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Perdre pied

J’ai travaillĂ© cette nuit. En quittant mon service, ce matin,  23 minutes,  pour faire le trajet Ă  vĂ©lo depuis le 14 ème arrondissement de Paris jusqu’à la gare St Lazare.

 

Certes, il fait beau, assez chaud, mais c’est surtout parce-que, pour une fois, je me suis autorisĂ© Ă  « suivre» certains cyclistes pressĂ©s (hommes comme femmes) que je suis allĂ© aussi vite. Habituellement, pour le mĂŞme trajet, je mets entre 27 et 29 minutes. En « flânant Â» quelque peu. Hier soir, une femme sur un vĂ©lo de course de marque Triban Ă©tait belle Ă  voir. Son short cycliste noir lui arrivait Ă  mi-mollet. Lesquels mollets Ă©taient fermes et assez volumineux. Elle devait avoir Ă  peine la trentaine. Si elle dĂ©marrait doucement, elle avait ensuite une façon d’avaler les mètres en avant, sans forcer, qui me dĂ©crochait de plusieurs mètres. C’était beau, cette aisance. C’était comme si elle rentrait dans le vent.

 

Hier soir, Bd Raspail, dans la montée, j’ai bien rattrapé et lâché quatre ou cinq personnes sur leur vélo. Mais pas elle, toujours revenue et restée facilement devant moi, et qui a tourné, sur la droite, vers la Tour Montparnasse, après un feu, alors que je continuais tout droit vers la Place Denfert Rochereau. J’ai vu sa main indiquer qu’elle allait tourner. Un geste simple, économe, sans précipitation. Et, ça a été tout. C’était fini.

 

Je croise ça ou lĂ  quelques cyclistes sur mon trajet. Des hommes comme des femmes.  Certains que je peux rattraper. D’autres qui sont des « missives Â» en express que leur braquet emporte loin de moi. NĂ©anmoins, mĂŞme disparus de l’horizon et de la rencontre, j’en garde quelques unes et quelques uns, pour quelques temps, dans ma mĂ©moire.

 

Ce matin, il y avait « un Â» vĂ©lo Ă©lectrique, « un Â» Brompton mĂ©canique et une cycliste sur un VĂ©lib qui m’ont marquĂ© et qui m’ont aussi…inspirĂ©.

 

« Le Â» vĂ©lo Ă©lectrique m’a d’abord dĂ©passĂ© avec agilitĂ© et facilitĂ© Boulevard ou rue St Jacques. Sur le chemin assez Ă©troit de la piste cyclable protĂ©gĂ©e. Pourtant, j’avais bien pris mon Ă©lan depuis le dĂ©but. Etant donnĂ© que je ne me sentais pas essoufflĂ© et que mes cuisses le supportaient, j’ai appuyĂ© sur mes pĂ©dales pour le suivre malgrĂ© les mètres qui nous sĂ©paraient dĂ©ja. Je me suis dit que pour monter, il fallait de toute façon prendre de l’élan. Et non se traĂ®ner. Au feu, « Le Â» vĂ©lo Ă©lectrique a pris une autre direction. J’ai passĂ© les pavĂ©s et me suis dirigĂ© vers la descente du Bd Raspail vers la rue du Bac. C’est lĂ  qu’un autre « vĂ©lo Ă©lectrique Â» a pris le relais. Il a quelque peu fusĂ©. Avec son pantalon Khaki, son casque Cusco, il dĂ©livrait de la facilitĂ©. Moi, je devais me donner. Un peu plus bas oĂą Ă  moins qu’il ne nous ait rattrapĂ©, « Le Â» vĂ©lo Brompton a dĂ©barquĂ©. A nouveau, cette fluiditĂ© que je trouve dans cette catĂ©gorie de vĂ©lo. L’homme dessus Ă©tait du genre cadre qui se rend au travail.  La trentaine. Casque sur la tĂŞte. Lunettes de soleil. Chemise  de couleur claire, chaussures de villes, pantalon de ville. Une sacoche Ă  l’avant. Une petite derrière la selle. On aurait dit un skieur ou un pratiquant de roller. Il glissait sur le bitume. Il a rapidement pris les devant sans mĂŞme se prĂ©occuper de nous.

 

MĂŞme « Le Â» vĂ©lo Ă©lectrique, si avancĂ©, a fini par ĂŞtre derrière. Car « Le Â» Brompton virevoltait. A aucun moment, je n’ai essayĂ© de lui parler. Il avait un air de « Je ne connais plus personne en Brompton Â». Mais aucune ressemblance avec Brigitte Bardot et Serge Gainsbourg.

 

Certainement sobre sur sa selle, « Le Â» Brompton Ă©tait plutĂ´t grand, Ă©lancĂ©. Je suis incapable de dire s’il Ă©tait sportif. Ces vĂ©los « Brompton Â» me donnent toujours l’impression que, dessus, tout le monde est athlĂ©tique. Que tout le monde est performant. Je l’ai dĂ©jĂ  Ă©crit :

 

« Certains vĂ©los sont faits pour rouler. Le mien semble fait pour pĂ©daler Â».

 

Ce matin, une femme en vĂ©lib Ă©tait Ă©tonnante. Ce type de vĂ©lo est lourd. Pourtant, elle suivait de près « Le Â» Brompton. Au point que cela m’a donnĂ© l’impression qu’elle et lui Ă©taient ensemble. Plus surprenant, alors qu’elle pĂ©dalait, devant, rĂ©gulièrement, cette cycliste en Jean et casquĂ©e, secouait un de ses bras. TantĂ´t le droit. TantĂ´t le gauche. J’ai plus eu l’impression que c’était une peu une force de la nature. Une jeune femme en pleine forme. Et non une sportive assidue. Mais impossible de le certifier.

 

Au feu rouge, Ă  la rue du Bac, juste avant de tourner Ă  gauche pour prendre cette rue qui passe ensuite devant le musĂ©e d’Orsay, je me trouvais derrière « Le Â» Brompton que je venais de rejoindre. La jeune femme au vĂ©lib’, elle, s’était dĂ©tournĂ©e de la rue du Bac auparavant et nous avait quittĂ©.

 

« Le Â» vĂ©lo Ă©lectrique est arrivĂ© après nous. Nous l’avions distancĂ© plusieurs centaines de mètres plus tĂ´t Ă  un endroit oĂą il s’était arrĂŞtĂ© Ă  un feu rouge. Et, oĂą, de manière opportuniste, Ă  la suite du « Brompton», nous avions Ă©tĂ© plusieurs Ă  nous engager.

 

Chaque fois que je fais ça, je regarde bien si une voiture vient. C’est comme traverser à pied une route en dehors d’un passage piéton ou lorsque le feu est vert pour les voitures. On évalue la distance et la vitesse des autres véhicules. On regarde avec attention. Et on s’engage. Bien-sûr, il convient de ralentir voire de freiner avant de faire ça.

 

Chaque fois que je suis passé au rouge, les autres véhicules étaient soit absents de l’horizon. Soit à l’arrêt. Et, moi, j’étais lancé et à plusieurs mètres d’eux.

 

 

Puis, rue du Bac, le Brompton est passé alors que, pour nous, le feu était encore rouge.

 

Je ne l’ai pas suivi. J’ai mes limites.

 

Je ne passe au feu rouge Ă  cet endroit. « Le Â» Brompton a tournĂ© sur la gauche et est descendu. Il allait passer devant le musĂ©e d’Orsay, vers la place de la Concorde. Mon trajet.

 

A la place de la Concorde, « Le Â» Brompton avait une bonne centaine de mètres devant moi. Il filait.

 

Mais, près du jardin des Tuileries, au lieu de repartir, alors qu’il s’était arrêté et attendait le feu rouge, pour les voitures, il est descendu de son vélo pour vérifier ou prendre quelque chose sous sa selle. C’est à ce moment-là que je suis passé, une fois que le feu est passé au vert pour nous, les cyclistes. Je ne l’ai plus revu ensuite.

 

Avant la gare St Lazare, j’ai fait un crochet par la rue Vignon où se trouve un magasin de cycles qui vend des vélos électriques, des accessoires et fait des réparations. Afin de récupérer son nom car je l’avais oublié. Puis, je suis reparti vers St-Lazare. Ce qui fait que j’aurais sans doute pu faire ce trajet en 21 minutes. Ce qui n’est pas mal en durée.

 

Je sais avoir rompu avec certaines de mes résolutions en matière de terrorisme de la vitesse. Mais mon séjour à Quiberon m’a débarrassé pour l’instant de mon émerveillement pour les environs que je traverse à Paris, désormais. La mer à Quiberon était bien plus belle que ce béton, toutes ces voitures et cette densité humaine.

Voir Quiberon, Mai 2021.

Ou, si l’on est pressĂ© : 

 

Sans compter qu’avec le beau temps, et plus de possibilitĂ©s de sortie depuis quelques jours dans le contexte Covid , il y a bien plus de personnes Ă  vĂ©lo dans Paris Ă  divers endroits selon les heures.  Et certains de ces cyclistes ( hommes et femmes) s’adressent Ă  leur route sans ( trop) faire attention aux autres :

 

Je reste étonné par le peu d’usage qui est fait de la sonnette pour prévenir les piétons ou les autres cyclistes que l’on dépasse. J’ai deux sonnettes sur mon vélo. Et, je m’en sers régulièrement pour prévenir que j’arrive. Le piéton qui traverse à plusieurs mètres devant soi. Le cycliste ou la cycliste à côté de qui l’on va passer.

 

Il doit y avoir bien peu de cyclistes qui se servent d’une sonnette. Que ce soit « Le Â» Brompton de ce matin, les deux vĂ©los Ă©lectriques, la femme en VĂ©lib’ ce matin ou celle d’hier sur son vĂ©lo de course Triban, aucun n’a utilisĂ© de sonnette. Par contre, ils portaient tous un casque. C’est dĂ©jĂ  bien.

 

Je suis « content Â» du temps mis pour rejoindre St Lazare. Mais, surtout, d’avoir pu suivre certains vĂ©los sur mon vĂ©lo pliant. Celui-ci conserve des dĂ©fauts. Parmi eux, cette selle qui descend insensiblement et que, hier soir, Ă  un feu rouge, sur le Bd Raspail, j’ai dĂ» remonter. Ce soir, encore, sans doute, je devrais Ă  nouveau la remonter. Je pressens aussi que pour ce qui est du passage des vitesses, il y a mieux que mon vĂ©lo de marque B’Twin. Mais, cela mis Ă  part, entre hier soir et ce matin, j’ai eu la satisfaction d’avancer quelque peu sur mon deux roues. Mon vĂ©lo n’est donc pas fait que pour pĂ©daler.

 

Franck Unimon, mercredi 2 juin 2021.