Cette chanson du groupe Soft Cell, sortie en 1981, m’a toujours beaucoup touchée. Bien qu’elle soit moins connue que son tube : Tainted Love.
A nouveau, je viens d’essayer de chanter sur Say Hello, Wave Goodbye en même temps que son interprète, Marc Almond. J’ai probablement chanté faux.
Mais, cette fois, pour la première fois, je suis resté dans « ma » voix. Enfin, je crois m’être au mieux rapproché de ce qui est ma voix. Car, à chaque fois, auparavant, je me faisais aspirer par celle de Marc Almond fuselée pour passer des graves aux aigus. Evidemment, je finissais, à chaque fois, par «m’asphyxier » et racler mes limites vocales. Cela devait être plus que moche à voir et à écouter. Fort heureusement, pour l’instant, je n’ai jamais cru en ma carrière de vocaliste. Même si chanter m’attire depuis des années. Au même titre que faire de la musique.
Chanter, jouer de la musique, écrire, ce sont des activités d’abord humaines, qui, si elles ne permettent pas de devenir « riches » et « célèbres » matériellement, autorisent à être soi-même. Seul ou avec d’autres. Et à vivre, autrement, seul ou avec d’autres, connus, ou inconnus, ce temps qui passe, qui nous occupe ou nous accule. Dans une certaine sincérité.
Il existe plein d’activités humaines. Certaines plus nécessaires que d’autres. Certaines plus volontaires. Et, d’autres, plus interdites. Que ces activités soient bénéfiques ou néfastes, toutes ces activités ont lieu. Nous les faisons. Nous y assistons. Nous en entendons parler. Puis, nous en parlons, en rêvons, tentons de faire pareil. Ou, au contraire, nous nous taisons et nous éloignons. Parfois pour des « bonnes » raisons. D’autres fois, non. Car quelle bonne raison pourrait-il y avoir, si l’on en a envie, de s’interdire de prendre le temps de chanter ou d’apprendre à chanter ? A écrire ? A jouer de la musique ? Si cela nous plait. Si cela nous ouvre à nous-mêmes mais aussi à certaines émotions.
Ce titre, Say Hello, Wave Good Bye raconte une histoire triste. La musique est fort peu dansante. Plutôt nostalgique. J’avais 13 ans lorsqu’elle est sortie, en 1981. Il n’y a rien d’exceptionnel dans le fait de filer une certaine nostalgie lorsque l’on a 13 ans. Une peine d’amour ou d’amitié. Une mauvaise note. Une mauvaise nouvelle dans sa famille.
En 1981, pourtant, j’avais plus été touché par la mort de Bob Marley. Sa musique était familière grâce à la platine disque de mon père depuis plusieurs années. En 1981, j’avais sûrement entendu Tainted Love à la radio. Parmi les tubes. Mais pas Say hello, Wave Good Bye. Et, jamais, je n’aurais entendu ou n’ai entendu de groupes du genre de Soft Cell ou Depeche Mode qui se sont faits connaître à peu près en même temps, à la maison.
Cette musique, ainsi que d’autres, étaient ignorées à la maison. Et dans nos réunions familiales. Je ne pourrais même pas dire qu’elles étaient interdites. Même si ça revenait au même : elles auraient été ignorées, méprisées. Ou, auraient été perçues comme l’empire du mal. Je repense encore, par moments, à ce jour, où, dans un mariage ou une fête antillaise, j’avais remplacé, pour quelques titres un de mes oncles maternels qui était le DJ de cette soirée.
Après plusieurs titres antillais, j’avais décidé placé sur une des platines le titre World in My Eyes…de Depeche Mode. Jusque là, tout s’était bien passé.
Mais, à peine avais-je posé ce titre, que, c’était comme si j’avais balancé du Round Up sur la piste. En moins d’une minute, tous les danseurs et danseuses avaient déguerpi ! Ce n’était pas uniquement une histoire de goût ou de rythme. Mais, aussi, une affaire de prestige et de honte. J’imagine que cela aurait été la honte pour elle si une seule personne avait osé danser sur ce titre. Mizik A Blan ! De la musique de Blanc !
Il est un certain nombre d’activités vis-à-vis desquelles nous avons le même comportement : nous considérons que ce n’est pas pour nous ! Même si rien ne nous interdit de les pratiquer ou de nous en approcher. Si ce n’est notre sentiment d’appartenance à un groupe. Et la conception, assez superficielle, en surface, que nous avons de ce que nous sommes. Je me rappelle encore de mon petit frère, ado, qui écoutait du Rap avec ses copains, et qui, secrètement, en cachette et en ma présence, avec ma « complicité », écoutait….Björk.
Car j’écoutais et j’aimais cette artiste que j’ai d’ailleurs « vue » trois fois en concert. Presque autant de fois que j’ai vu Miles Davis, Me’Shell Nédégeocello, Kassav’ ou Alain Bashung en concert…..
https://youtu.be/sJ7M3ht9rYI
J’ai découvert ou redécouvert Say Hello, Wave Good Bye lors d’un séjour supposé linguistique en Ecosse, à Edimbourg, en 1990. Un séjour affectivement conséquent pour moi.
Dans ce titre, je suis sensible à la tristesse. A cette désillusion amoureuse. Sans doute ou peut-être parce-que lors de ce séjour, j’avais vécu une double rencontre amoureuse. Avant mon départ pour l’Ecosse. Puis durant mon séjour. Deux histoires contraires dont le contenu émotionnel et sentimental m’ont porté pendant des années. Une, plutôt à distance, avec une Marseillaise. Une autre, avec une Parisienne, déjà en couple.
Peu importe que Say Hello, Wave Good Bye raconte une histoire d’amour entre un homme et une femme ou pour un autre homme. Car j’ai plus tard appris, si je ne me trompe, que Marc Almond est homo. Et, s’il ne l’est pas, je n’ai aucune difficulté à croire que ce titre puisse être un classique pour une certaine génération d’hommes voire de femmes homos. Comme je n’avais pas a priori compris, lors de sa sortie, que le tube d’Elton John, I’M still standing, puisse être si important pour les homos touchés, percutés et persécutés par le Sida.
Tout ce que j’avais entendu à l’époque, dans les années 80, c’était un titre plutôt dansant, assez funky. Je n’écoutais pas les paroles. Je ne comprenais pas le contexte. Pourtant, j’avais aussi peur du Sida. Et l’épidémie du Sida me concernait beaucoup. En tant que jeune adulte avec une sexualité. Mais, aussi, en tant qu’infirmier récemment diplômé.
Avec la pandémie du Covid, c’est pareil. Rien ne nous empêche de nous livrer à certaines activités dont nous avons envie et besoin. Même s’il faut savoir se protéger. Car, certaines fois, c’est peut-être, aussi, de certaines de nos apparences dont il vaut mieux savoir se protéger :
Il y a quelques jours, en revenant du travail, sur mon vélo pliant, j’ai découvert tous ces gens à nouveau en terrasse. Il faisait beau. Très beau. Et, moi, même si je savais que tout cela avait existé auparavant. Même si je comprenais ce besoin de sortir à nouveau. Même si j’irai sûrement, aussi, à une de ces terrasses un jour ou l’autre, j’ai néanmoins eu l’impression d’assister à une mise en scène.
J’ai eu l’impression que beaucoup de ces gens que j’ai aperçus, et, parmi eux, sans aucun doute, des amis, des proches ou des collègues, voulaient affirmer que, pour eux, vivre, c’était absolument ça ! Presque revendiquer le droit d’être en terrasse face à face. De fumer. De cloper à l’air libre. De consommer. De refaire les magasins.
Pourquoi je fais le moraliste ? Pourquoi cela m’a-t’il dérangé à ce point alors que je l’ai moi-même fait et refait ? Et que je le referai ?! Moi, aussi, je me rendrai bientôt sur une terrasse en plein Paris…
Je fais le moraliste parce-que, subitement, ce jour-là, et parce-que la pandémie a déja duré un certain temps, je me suis peut-être, et de manière assez provisoire sans doute, aperçu, que, pendant des années, je m’étais accroché à certaines activités qui, finalement, étaient peu nécessaires.
Etre en terrasse, oui, mais pour y vivre quoi et avec qui ?! Juste pour s’y montrer ?!
On peut être en terrasse avec quelqu’un et ne rien vivre de particulier avec elle ou lui. Donc, pourquoi y rester ?! Pourquoi y revenir ?! Pourquoi se l’imposer si ce n’est, principalement, pour être dans la norme ?! Pour faire quelque chose. Pour ne se pas se confronter à notre propre vide. A notre grande tristesse et à notre grande solitude.
Pour ne pas devoir admettre que l’on passe une grande partie de son temps à se vider de notre vitalité et de notre créativité au lieu de lui donner les moyens de s’exprimer et de, véritablement, nous libérer, nous aider.
Pour ne pas voir que l’on tourne régulièrement en rond mais que, comme la majorité des personne que l’on voit et que l’on fréquente agit de même, hé bien, cela nous rassure et nous encourage à continuer de rester sur la même piste de danse.
Il est plus facile et plus commode de faire la fête, d’être en terrasse en plein soleil avec d’autres que d’admettre que l’on est triste et défait. Lorsque l’on est triste et défait.
J’aime sans doute ce titre de Soft Cell (cellule douce) parce-qu’avec lui, comme avec d’autres, je m’autorise à entendre et à chanter ma tristesse et ma peine. Ce qu’il m’en reste. Ou ce que j’en ressens. Si la tristesse d’un Jacques Brel me fait déprimer, celle de Say Hello, Wave Goodbye a plus tendance à me donner un certain envol. Ensuite, si j’ai envie de bercer cette tristesse, de la distancer ou de la percer, j’écouterai du dub, du Reggae, du zouk, du Maloya, ou Miles Davis par exemple.
https://youtu.be/ChZ1QU9pxZE
D’autres préfèreront écouter du Rap, de la musique classique, du Rock, de la musique arabe, de la chanson française ou de la techno. La musique, cet ailleurs qui se joint à nos coups de poings mais aussi à nos soins intérieurs…
Mais quoiqu’il en soit, en terrasse ou non, nous vivrons les mêmes émotions (joie, espoir, tristesse, colère, désir ou dégout) à un moment ou à un autre. L’idéal, ensuite, ce sera de pouvoir les vivre avec d’autres, ces émotions. Que ce soit en terrasse. Ou ailleurs….
Mais si ce que vous êtes en train de lire vous ennuie, ou vous paraît déjà beaucoup trop long. Ou que vous ne savez pas lire. Ou que vous êtes très très fatigué(e)s . Ou que vous manquez de temps. Ou que vous avez faim et envie de passer à table. Ou que vous avez votre ménage ou la vaisselle qui vous traque. Ou que vous êtes en train de mourir. Ou que vous avez votre tiercé ou du compost à aller faire. Alors, et seulement, alors, un diaporama en musique vous attend déjà. Il est tout en bas de l’article. Ce n’était pas la peine de rester là. Pour regarder le diaporama, il vous suffira de descendre à la fin de cet article. Et, ensuite, peut-être, de tout remonter pour lire un peu. Et en savoir un peu plus sur ces images que vous aurez regardées. C’est terminé, les articles où on vous enchaine pendant trois quarts d’heure, pour, à la fin, vous distribuer deux ou trois petites illustrations grossièrement dessinées à la main et qui sentent le renfermé.
Le diaporama dure moins de cinq minutes. Cela est vérifiable scientifiquement ou simplement avec une montre ou un téléphone portable qui marche. Les photos sont éclairées suffisamment. La musique est peut-être adéquate.
En vous souhaitant un bon voyage. Pour les autres, les volontaires ou les condamné(es) de la lecture, ça commence d’abord, ici, par ce titre presqu’engageant….
Pourchassés
J’ai tangué encore un petit peu, ce matin, au moment du petit-déjeuner. Mais ça n’avait peut-être rien à voir avec ces quelques jours passés à Quiberon où, avec mon club d’apnée, nous sommes sortis en mer. Pour….. chasser.
Parce-que, hier soir, ce mercredi, avant d’aller me coucher, pour la première fois depuis mon retour de Quiberon dans la nuit de dimanche à lundi, j’ai recommencé à lire des journaux. Je me « devais » d’être informé.
La Croix. Le Parisien. Le Canard Enchaîné. Un journal « gratuit », compilation des journaux officiels.
Après les avoir parcourus en grande partie, je me suis demandé ce que j’avais appris.
Le Jihadisme en Afrique (Cameroun, Nigeria….). Les groupes terroristes Daech et Al- Qaida étaient toujours vivants et bien portants. « Il reste beaucoup à faire ». Les bombardements de la Palestine par le Premier Ministre israélien Netanyahou « en état de faiblesse ? ». Le retour de Manuel Valls en politique en France après sa parenthèse (également politique) de trois ans à Barcelone.
Le « différend » entre Gérald Darmanin, « notre » Ministre de l’intérieur, et Audrey Pulvar, alliée politique d ‘Anne Hidalgo, actuelle Maire de Paris, et possible candidate aux prochaines élections présidentielles françaises de 2022. « Le paiement sans contact, nouvelle cible des truands ». Le Covid : « vaccination obligatoire : le débat relancé ». « Serial Killer : LE PLUS ANCIEN DETENU DE FRANCE ASSASSINAIT LES BRUNES ». « L’ombre du génocide rwandais plane sur le diocèse de La Rochelle ». « Cinéma : The Father, dans la tête d’Anthony Hopkins », premier film oscarisé de l’auteur FlorianZeller. Un film très « joyeux » à ce que j’ai compris. L’acteur Anthony Hopkins, oscarisé pour ce rôle, est par ailleurs, coïncidence, devenu célèbre pour son rôle d’Hannibal Lecter, un tueur en série, dans le film Le Silence des Agneaux, sorti en 1991. Un film que j’avais aimé voir. Je suis aussi porté sur le sujet des tueurs en série. J’en reparlerai dans d’autres articles. Mais, en attendant, en lisant ces « nouvelles », hier soir, qu’est-ce que j’ai pris ! Mais, aussi, qu’est-ce qui m’avait pris ?!
Des réflexes d’alcoolique
Ce qui m’a pris ? Ce qui m’a repris, plutôt, c’est ce réflexe conditionné de « citoyen », de bon écolier, de mouton ou « d’alcoolique » des mauvaises dynamiques qui, après avoir brouté pendant un laps de temps assez court, une certaine liberté et une certaine détente, se croit invincible. Et se croit obligé de revenir se ligaturer les pensées, l’imaginaire et la sensibilité dans ce brouhaha anthropophage, délétère et auto-recyclé de nos combines et de nos névroses quotidiennes.
Or, comme a pu le dire une personne essayant de se sevrer de l’alcoolisme :
« Si tu bois et que tu as un problème, tu as deux problèmes ! ».
En lisant hier soir ces journaux, c’est étonnant, comme, subitement, j’avais à nouveau beaucoup de problèmes. Des problèmes sur lesquels j’avais très peu de prise, qui me survivraient très certainement et dont j’acceptais, en quelque sorte, de redevenir le spectateur, le consommateur, le goulot, l’idiot, le débiteur massif, intrépide, captif autant qu’impuissant…..
Tout n’est pas mauvais dans le quotidien comme dans un certain nombre de nos routines. Mais il y a néanmoins beaucoup de déchèteries et de vinasses mentales, et autres, et quantité de rustines, d’urines dégradées, avec lesquelles nous nous torchons comme s’il s’agissait de remontants dont nous aurions besoin pour nous exalter. Alors qu’ils nous détruisent.
A Quiberon, des « conditions de chiens » :
A Quiberon, en pleine mer, la mer était assez « sale » : du fait des conditions météos. Courants, houle, vent (entre 30 et 40 nœuds en moyenne). Il y avait une certaine turbidité de l’eau qui rendait la visibilité plutôt mauvaise. A peine trois ou quatre mètres.
Lorsque j’essayais, en surface, d’assurer la sécurité de J-L, qui venait d’effectuer son canard et qui, lesté de ces 7, 8 ou 9 kilos de plomb, s’enfonçait vers le fond, je finissais toujours par le perdre visuellement. Même en « apprenant » un peu à deviner sa trajectoire, sa façon de se diriger dans la profondeur, un peu particulière et peut-être influencé par sa main qu’il portait à son nez pour faire son vasalva :
J-L descendait d’abord en oblique, longue tige tournant son dos au fond, rallongeant la distance qui l’éloignait du fond, puis, adoptant une sorte de demi-tour. Ce qui faisait qu’une fois au fond, à l’horizontale, il partait pratiquement dans le sens opposé de son arrivée.
C’était drôle à voir tant que je le « voyais », mon masque sur mon visage rentré dans l’eau, mon tuba en bouche pour respirer, alors que j’étais allongé à la surface, et que les vagues et le courant, me faisaient un peu dériver sans que je m’en aperçoive.
Puis, lorsque J-L resurgissait quelques mètres plus loin, derrière ou devant moi, c’était ensuite à mon tour de « descendre » avec mes 8 kilos de plomb, palmes, masque, tuba et ma combinaison en néoprène, bien-sûr :
7mm5 pour le torse et le dos ; 5 mm pour la tête et les mains ; 3 mm pour les pieds. Protection thermique utile pour une eau comprise, durant notre séjour, entre 12 et 14 degrés. Et pour des sorties en mer de 1h30 à 2h30.
Plusieurs fois, j’ai eu les pieds engourdis par le froid. Mais cela a été supportable. J’essaierai de trouver des chaussons plus chauds avec la même épaisseur. Car, trop épais, les chaussons peuvent être difficiles à mettre dans les palmes et cela serait inconfortable.
A Loctudy, en Mai 2017, où la température de l’eau avait été anormalement élevée, entre 16 et 18 degrés, je crois, j’ai l’impression qu’il avait pu nous arriver de rester 3 heures ou 3h30 dans l’eau sans que je me ressente du froid.
Mais à Quiberon, et dans les alentours, il y a quelques jours, nous aurions « plongé » dans des conditions de « chien » selon deux chasseurs (F et J), des apnéistes férus de chasses sous-marine que nous avons croisés, amis de J-P, un de nos moniteurs encadrants.
F nous a aussi dit qu’il chassait « toujours, sous le vent ».
Je ne me suis pas particulièrement rendu compte de ces conditions de « chien » mentionnées pas F et J. Si ce n’est, peut-être, en comparant le résultat des chasses à Quiberon avec celles effectuées lors des précédents stages que j’ai effectués auparavant avec le club :
A Loctudy en Mai 2017. Puis en Octobre 2020 à Penmarch.
Bien-sûr, les températures de l’eau en Bretagne sont plus froides, et les marées sont différentes de celles que j’ai pu connaître en Guadeloupe où j’ai passé mes deux premiers niveaux de plongée avec bouteille il y a plusieurs années. Mais les « conditions de chien » mentionnées ici se rapportent à d’autres éléments.
Chasse sous-marine : une chance et un privilège
D’abord, nous étions bien plus nombreux à Loctudy (près d’une trentaine) et déjà moins nombreux à Penmarch (neuf) contre « seulement » six, cette fois, à Quiberon. Mais les conditions de chasse sous-marine étaient sans doute meilleures malgré tout lorsque nous étions allés à Loctudy et à Penmarch. Cette fois-ci, à Quiberon, « nous » nous sommes donc encore plus rabattus que d’habitude sur les araignées de mer. Et sur…. les huîtres.
Lorsque j’écris « nous » : c’est surtout les autres membres du groupe qui ont chassé.
J’ai bien attrapé deux ou trois araignées : rien de plus « facile » même si, à Loctudy en 2017, pour moi, cette « facilité » était « difficile ». Car il s’agissait quand même de s’enfoncer dans l’eau avec une ceinture de plomb autour des reins, sans bouteille de plongée puisqu’il est interdit de chasser avec bouteille. De repérer l’araignée, l’attraper sans se faire pincer les doigts, remonter à la surface et la mettre dans son filet. C’est simple dit comme ça. Mais lorsque l’on n’est pas familier avec la ceinture de plomb, le fait de descendre au fond de la mer, en tenant compte de ses tympans, de son souffle et autres, cela fait un certain nombre de paramètres à enregistrer.
Aujourd’hui, et, pour l’instant, même si je peux et sais attraper des araignées de mer, je ne suis pas un chasseur. Je n’ai pas l’esprit à la chasse lorsque je « plonge » en apnée. Je suis plutôt un contemplatif.
Je comprends l’intelligence, le plaisir, et j’admire l’aptitude d’adaptation étonnante qu’il y a à chasser sous l’eau. En se fondant dans le décor marin. En rusant avec la proie ou le poisson. En composant avec la houle et le courant. En ayant le coup d’œil pour repérer la proie même lorsqu’elle se cache. Et la « tirer » ou la « faire » au moyen de l’arbalète ou du « fusil de chasse » sous-marin.
J’admire ces chasseurs sous-marins capables de passer cinq ou six heures dans l’eau, de s’alimenter et de s’hydrater en pleine mer, juchés sur leur bouée comme si de rien n’était. Comme si c’était pareil que de faire du vélo, un footing ou d’être dans son canapé devant un bon film ou un bon livre.
A Penmarch, en octobre, j’avais aimé ce moment, où durant plusieurs secondes, posé sur le sable, mêlé à l’environnement, au fond de l’eau, à l’agachon, j’avais pu observer, un ou deux poissons, à quelques mètres, sous une petite grotte traversante, sur ma gauche. Les deux poissons se tenaient face au courant.
Ce genre de vision ou d’expérience vécue en apnée, impossible ou invisible pour nous, humains, à l’œil nu depuis la Terre, reste sans doute plus longtemps dans la mémoire. Car, dans nos conditions normales d’existence, sur la terre, et avec nos poumons, nos insuffisances mais aussi nos peurs, nous n’avons pas accès à ce monde.
Je comprends, aussi, la nécessité à apprendre à devenir chasseur sous-marin. Pour se nourrir. Ou nourrir sa famille ou son entourage. En respectant certaines règles : une certaine taille de poisson ou d’araignée. Certaines espèces et pas d’autres. Le sexe, aussi, de telle espèce afin de préserver sa reproduction.
Je comprends évidemment, aussi, la nécessité d’apprendre à préparer, dans la mer, le poisson que l’on a attrapé en l’accrochant d’une certaine façon afin qu’il ne s’échappe pas. En l’éviscérant comme il se doit. Dans mon club d’apnée, il se trouve un certain nombre d’adeptes expérimentés de la chasse sous-marine. Mais aussi de cuisiniers aptes à préparer ce qui a été pêché. Tel le carpaccio de vieille. Y m’a appris à faire des filets sur une vieille. Laquelle avait déjà été écaillée.
On peut trouver ça dégoûtant. Je trouve que c’est plutôt une aptitude à acquérir. Entre rester complètement dépendant de supermarchés, de boites de conserves, de publicités ou d’informations monopolisées- et colonisées- par quelques uns et savoir, si nécessaire, aller pêcher en mer ou ailleurs, avec quelques uns ou seul, je préfèrerais, dans l’idéal, apprendre aussi à chasser ou à pêcher moi-même ce dont j’ai besoin ou peux avoir besoin.
C’est donc une chance et un privilège, pour moi, d’avoir pu être présent lors de ce stage « d’apnée » à Quiberon. Et, encore plus alors que nous sommes encore nombreux à vivre dans les filets de la pandémie du Covid.
Devenir plus autonome :
Même si, pour l’instant, je ne suis pas un chasseur. Et que je « dois » devenir plus autonome. C’est d’ailleurs ça qui est plutôt ma priorité pour l’instant dans l’eau :
Me sentir plus à l’aise sur l’eau et au fond de l’eau. A Quiberon, j’ai commencé à découvrir que ma bouée était aussi ma maison. Car j’ai commencé à la personnaliser selon mes besoins et mes envies. Avec l’aide de mes encadrants du club. Et, d’après ce que j’ai vécu dans l’eau. Avec J-P, j’ai ainsi agrandi la garcette qui relie mon filet à ma bouée. Dans ce filet, je mets des barres de céréales dans leur emballage, des compotes, ma bouteille d’eau ainsi que ma chasse.
J’ai acheté d’autres mousquetons et les ai essayés. J’ai été content à plusieurs reprises, en revoyant la corde épaisse, et jaune, de ma bouée, lestée de plomb, alors que je m’approchais. Parce-que c’était devenu ma maison. Ce n’était pas le cas jusqu’alors. Jusqu’alors, à Loctudy et à Penmarch, c’était principalement ma bouée. Pour être vu, repéré. Pour me poser dessus à certains moments. Pour me déplacer.
Mes oreilles :
J’aimerais mieux faire « passer » mes oreilles. Mes oreilles « passent » suffisamment pour pêcher mais, de par ma petite expérience de plongeur bouteille, je sais qu’elles pourraient passer « mieux » et plus profond :
Pour l’instant, en apnée, je suis limité à une profondeur comprise entre 7 et 10 mètres. Que ce soit en fosse ou en mer. Alors qu’en plongée bouteille, j’ai pu descendre à 40 mètres.
Je déglutis pour faire passer mes oreilles. Vasalva, Frenzel, ça n’agit pas pour moi. J’ai déjà essayé. Je veux bien réessayer mais, tout ce que j’obtiens, c’est des grosses bulles. Et la pression sur mon oreille, principalement la gauche, reste la même.
Mais les conditions entre la plongée avec bouteille et celle en apnée étaient différentes. D’un côté, en plongée bouteille, je dispose de bien plus d’air à disposition et je peux me permettre de prendre mon « temps » pour compenser mes tympans :
Réaliser l’équilibre entre la pression exercée sur mes tympans par tout le poids et le volume de l’eau de la mer et la pression présente dans mes tympans.
De l’autre, chaque fois que j’ai fait de la plongée avec bouteille, je plongeais régulièrement, à raison de trois à quatre plongées par semaine sur plusieurs semaines de suite. Là, où, en apnée, pour l’instant, je pratique des stages de quelques jours séparés dans le temps de plusieurs mois ou de plusieurs années. C’est sans doute trop peu régulier pour que mes tympans aient le temps de se « faire » à la mer. D’autant qu’en apnée, vu que notre réserve d’air disponible est moindre qu’en plongée avec bouteille, nous nous devons en quelque sorte davantage d’être en « osmose » avec nos capacités corporelles et physiologiques:
Nous sommes à la fois plus « libres » (car sans bouteille. En Anglais, apnée se dit Free Dive) mais aussi plus exposés. En cas de « problème » qui nous retiendrait sous l’eau ou nous éloignerait de notre bouée ou du bateau, nous n’avons pas de détendeur d’air à portée de main ou de binôme qui pourrait nous passer son détendeur de secours.
J’ai bien-sûr pensé à une cause psychologique concernant ma difficulté à faire passer mes oreilles, en apnée, au delà des 7 à 10 mètres. Il est vrai que l’expérience de la fosse de vingt mètres reste pour moi assez angoissante. Même si, tête en haut, j’ai pu descendre jusqu’à quinze mètres assez facilement.
Mais une discussion avec ma mère m’a appris qu’enfant, j’avais fait des otites et que j’avais été opéré. Je crois donc que la « rigidité » tympanique que j’ai à l’oreille gauche vient peut-être, tout simplement, de la cicatrice chirurgicale, qui a besoin d’un peu de temps pour être assouplie et mieux « passer » les profondeurs.
En plongée bouteille, j’ai déjà fait l’expérience qu’une fois bien acclimatées, mes oreilles descendent bien, ou « glissent » dans les profondeurs. Toujours en déglutissant.
Il faut se sentir en « conformité » ou en « adéquation » avec ses organes lorsque l’on pratique la plongée avec bouteille. Ou l’apnée.
Une fois que l’on est en adéquation avec nos organes et notre humeur, on peut se rapprocher de grands plaisirs mais aussi du danger.
Le Danger :
La plongée avec bouteille est une discipline technique, exigeante et risquée. Des gens en meurent.
La pratique de l’apnée est tout autant une discipline technique, exigeante et risquée. Mal pratiquée, on peut aussi en mourir.
Pourtant, à Quiberon, lors de ce stage d’apnée il y a quelques jours, comme à Penmarch en octobre dernier ou à Loctudy en Mai 2017, je n’ai pas eu cette impression de risquer ma vie. J’ai deux ou trois explications à cela.
L’expérience :
Comme je l’ai déjà écrit, je ne suis pas un aventurier. Et, je suis plutôt quelqu’un de prudent. Mais j’ai un peu d’expérience en plongée avec bouteille et, désormais, en apnée. Avec mon club en piscine mais, aussi, en mer.
Cependant, comme dans toute discipline risquée ou un peu risquée, il faut aussi savoir se méfier de notre expérience.
Bien des plongeurs avec bouteille, mais aussi des apnéistes, confirmés sont morts en mer. C’est pareil pour des automobilistes, des cyclistes, des piétons ou des professionnels confirmés dans bien des domaines. Il est certaines négligences ou certains excès d’assurance et d’optimisme, qui, lors de certaines circonstances, peuvent avoir des conséquences traumatiques, définitives, ou, si on a un peu de chance, des incidences plus ou moins bénignes. Dans le domaine sportif, pour changer, on peut se rappeler l’accident de ski de l’ancien champion du monde d’automobile, Michael Schumacher. Adepte du ski hors-piste, et sportif d’excellence, Schumacher avait sans aucun doute des aptitudes hors-normes pour la pratique du ski. Mais aussi un certain excès de confiance qui a dû faire partie des conditions qui ont provoqué son grave accident.
Ce revers de l’expérience- l’excès de confiance- peut néanmoins, aussi, me concerner. Comme il peut, aussi, concerner les responsables de l’encadrement de mon club, ainsi, que les autres membres du club, présents avec nous lors de ce stage.
La Confiance :
Si toute entreprise humaine, quelle qu’elle soit, repose sur la confiance que l’on peut avoir dans ses partenaires et encadrants, mais, aussi, en soi-même, il est manifeste que la confiance doit être au rendez-vous lorsqu’une entreprise comportant une part de risque modérée ou élevée est envisagée.
Plusieurs origines
J’avais évidemment confiance dans mon encadrement comme dans mes partenaires de club. Cette confiance a plusieurs origines. Elle vient d’abord de moi : c’est parce-que j’avais un minimum de confiance en moi que j’ai décidé, un jour, personnellement, de m’engager dans cette discipline particulière qu’est l’apnée. Où Il s’agit d’accepter d’arrêter de respirer en ayant la tête et les parties respiratoires, et pas seulement génitales, immergées dans l’eau pendant un certain temps. Et, cette eau peut aussi, avoir, une température variable. Ou comporter du courant.
Or, nous ne sommes pas des poissons. Même si, à une époque très lointaine, l’être humain, avant de devenir ce qu’il est aujourd’hui, a probablement été issu d’un mammifère ou d’un être vivant marin.
Ensuite, plus que dans d’autres disciplines, l’apnée et la plongée avec bouteille se déroulant dans des environnements où nous nous déposons provisoirement à la surface de la vie et de la mort, en arrêtant de respirer, il importe particulièrement d’avoir suffisamment confiance dans celles et ceux qui nous accompagnent dans l’eau pour cette expérience. Ou qui nous proposent d’y évoluer dans certaines conditions.
La confiance ne se commande pas. C’est un peu comme le désir. Une personne peut bien avoir un pedigree exceptionnel. Si, pour une « raison » ou pour une autre (c’est plutôt d’ordre émotionnel, viscéral et instinctif) cette personne certifiée, volontaire, plus ou moins avenante, nous inspire le contraire de ce qu’elle est ou de ce qu’elle représente, nous serons dans la méfiance, sur la défensive, voire dans le refus ou dans la fuite.
La confiance est donc un baromètre et un critère plus qu’important dans la pratique de l’apnée. Et cela ne se contrôle pas toujours très bien.
Mais il est un autre critère qui m’a sauté particulièrement aux yeux cette fois-ci, à Quiberon, et qui s’ajoute à la confiance. Ou qui peut l’aider à advenir.
La Bienveillance :
Si bien des entreprises humaines se réalisent par la violence, fondatrices commedestructrices, ce qui m’a marqué lors de ce stage à Quiberon, c’est cette bienveillance constante qui a servi nos relations. Nous étions un petit groupe de six. Deux encadrants en titre. Deux encadrants plus récents mais néanmoins expérimentés dans l’eau. Et, deux pratiquants plutôt débutants dont je fais partie :
Je veux bien, d’ailleurs, accepter le titre de débutant ou de jeune pousse apnéiste du groupe. Au vu de ma dépendance encore très forte (presqu’une ventouse) envers l’encadrement. Ne serait-ce que pour réaliser un « simple » nœud de chaise ou pour dérouler ma corde correctement dans l’eau sans faire de nœuds.
Ces disparités de parcours et d’expériences marines et apnéistes pourraient d’emblée établir une hiérarchie verticale et monolithique. Et, évidemment, il y avait une hiérarchie établie et commune, acceptée de manière consensuelle. A aucun moment, par exemple, je ne me suis improvisé capitaine ou pilote du Zodiac qui nous a transporté. Comme, à aucun moment, je n’ai contesté l’endroit où ancrer le bateau et où nous allions nous mettre à l’eau : Je suis totalement incompétent dans ces domaines. Et je le sais.
Néanmoins, à terre, comme sur zodiac et dans l’eau, nous restions six personnalités, six individus. Une femme, six hommes. Et, comme nous le savons tous, nous autres, êtres humains, nous pouvons avoir un projet commun. Mais cela ne signifie pas pour autant pour que nous parviendrons à le réaliser ensemble. Même si, sur le papier et en théorie, nous avons tout ce qu’il faut à notre disposition pour concrétiser ce projet :
Les compétences, l’envie, la volonté, le matériel, l’argent, l’expérience….
Car nous avons chacune et chacun nos particularités, nos tempéraments, nos rythmes, nos limites, nos egos, notre susceptibilité, notre façon de ronfler, de manger, de parler, comme notre horaire pour nous rendre aux toilettes. Ou, tout simplement, pour vivre ou travailler avec les autres.
Certains ont besoin de parler tout le temps. D’autres sont régulièrement en activité et dans l’efficacité. D’autres ont aussi besoin de plages de silence, d’inactivité, de lenteur et de calme. Moi, je suis un lent. Mais ça ne m’empêchera pas de me lever à 5h25 du matin pour être à l’heure au petit-déjeuner de 6 heures. Car, pour notre dernière sortie, contrairement aux autres jours où nous prenions notre petit-déjeuner à 8h, celui-ci était à 6h.
En mer, alors, que nous avançons, j’aime bien connaître des moments où le bateau avance et où il n’y a que lui, et la mer, le vent, que l’on entend. Mais, d’autres, préfèrent ou ont absolument besoin de parler dans ces moments-là.
Néanmoins, malgré ces particularités et ces « disparités » de tempéraments et d’expériences marines et maritimes entre nous, notre séjour s’est bien déroulé. Parce-que nous nous étions encordés à une certaine bienveillance mutuelle.
Par la tenue des horaires décidés pour le petit-déjeuner. Pour le briefing de la journée. Pour être avec les autres. Pour réaliser les tâches diverses. Préparer les repas. Faire la vaisselle. Décharger et charger le zodiac. Faire les courses. Pour attraper une assiette ou un verre et le donner à qui en avait besoin à table au moment du repas etc…..
Port Haliguen, Quiberon.
La bienveillance, autant que la confiance et l’expérience ont permis selon moi la bonne réussite de ce séjour à Quiberon. Il était possible de les vivre très concrètement au vu de ces disciplines particulières, plutôt exigeantes, que sont l’apnée et la chasse sous-marine :
On s’aperçoit vite de la personne qui, lorsque l’on aspire à revenir sur le bateau nous tend la main pour prendre notre ceinture de plomb ou a un regard sur nous. Comme de celle ou de celui qui, lorsque l’on remonte à la surface, nous attend. De celle ou celui qui nous prête le mousqueton qu’il a en plus et dont on a besoin.
La bienveillance est aussi nécessaire dans bien d’autres entreprises humaines que ce soit au travail, avec les amis, en couple, son voisinage, avec son enfant etc….
Mais j’ai aussi lu d’autres mots écrits à notre retour pas d’autres membres du groupe pour expliquer la réussite (ressentie par tous) de ce séjour à Quiberon. Je ne les ai pas tous retenus alors que je termine cet article. Mais il y avait :
Bonne humeur, détermination, persévérance, capacité à accepter certaines exigences etc…..
J’ai sans doute plus appris ou réappris lors de ce séjour de quelques jours à Quiberon, avec mon club d’apnée, qu’en lisant hier soir ces journaux avant d’aller me coucher.
Bien-sûr, pour apprendre certains enseignements, il faut être disponible pour eux. On peut n’être que disponible pour les mauvaises nouvelles et n’apprendre que ça :
Que tout va mal et toujours très mal, à chaque instant, partout dans le monde, avec les autres et aussi en soi-même.
On peut choisir de s’orienter uniquement ou principalement avec les mauvaises nouvelles en se disant qu’en se préparant- et en pensant- toujours au pire, ainsi, on se réserve de bonnes surprises. Sauf que, de cette façon, si l’on s’épargne en effet certaines déconvenues et certaines désillusions, on aborde aussi la vie, les événements et les autres avec une certaine dynamique et un certain état d’esprit qui font barrage, frontière ou obstacle à certaines possibilités, élans ou initiatives, repoussées ou dissuadées par notre comportement alors plus proche de l’écueil que de l’accueil.
J’espère avoir un peu plus de bienveillance que ça envers moi-même. Etre plus accueil qu’écueil pour ce que j’ai à vivre. Et, si possible, être suffisamment accueillant envers les autres lorsque ceux-ci sont… bienveillants.
Mais être accueillant envers la bienveillance n’est pas inné. Il est nécessaire de pratiquer régulièrement. Autrement, on a assez vite fait de dériver et de se retrouver, de nouveau, entouré principalement de mauvaises nouvelles. Et, là, toutes le bouées que l’on nous aura jetées ou que l’on aura pu essayer de nous adresser ne suffiront pas.
Je ne suis pas un aventurier. En janvier de cette année, j’ai prononcé cette phrase, parmi d’autres, lors de mon discours de départ de mon précédent service. Service où, à ce jour, je suis resté ancré le plus longtemps : 11 années. Trois ans de jour pour commencer, puis huit de nuit pour finir.
J’ai fait trois fois mon pot de départ en effectifs réduits du fait de la pandémie du Covid. J’ai dit trois fois mon discours. J’ai donc répété cette phrase trois fois : ” Je ne suis pas un aventurier”. Certaines phrases, comme les vagues, se répètent. Mais nous ne les écoutons pas toutes. Parce-qu’elles sont trop nombreuses. Parce-qu’elles se ressemblent toutes. Parce-que nous sommes des araignées emportées par les sillons de nos propres toiles. Les vagues, aussi, sont des toiles. Elles accumulent les jours et les nuits plus qu’elles ne reculent devant elles.
J’avais déjà travaillé de nuit ailleurs, auparavant.
Dans les logements où j’ai vécu, toujours en ville, à ce jour, toujours en banlieue parisienne, j’ai un peu oublié la moyenne, mais j’y suis resté six ou sept années. Toujours dans des appartements, exception faite du pavillon que mes parents avaient acheté à Cergy-Pontoise et où nous avions emménagé. J’avais 17 ans. Et, pour moi, alors, quitter Nanterre et notre immeuble de 18 étages, dans notre cité HLM, cela avait été l’exil. M’éloigner d’une trentaine de kilomètres de ma région natale, les Hauts de Seine, pour cette région du Val-d’Oise, alors décrétée « ville nouvelle ».
Depuis l’esplanade de Paris, à quelques minutes à pied du pavillon de mes parents, par temps clair et ciel dégagé, je pouvais apercevoir la grande Arche de la Défense. C’était tout ce qui me restait à peu près, visuellement, comme contact, de Nanterre.
Il suffit de quelques kilomètres de différence par rapport à notre périmètre familier pour avoir l’impression d’être en quelque sorte « excommunié » du paradis où, pourtant, plus d’une fois, on s’est senti à l’étroit. Plus que la distance que l’on met entre soi et les autres, mais aussi entre certains événements et nous, ce qui compte, c’est le choix que l’on fait et le moment de ce choix. Et, je n’avais pas choisi de partir de Nanterre. Pourtant, à 17 ans, j’y partageais ma chambre avec ma petite sœur et mon petit frère. Il y a mieux comme intimité. D’autant que j’avais été fils unique pendant les neuf premières années de ma vie.
A Cergy-Pontoise, et jusqu’à mon départ de chez mes parents, un départ choisi après mon service militaire, j’allais, de nouveau, avoir ma chambre pour moi. J’allais aussi découvrir le calme. Le silence. Le calme et le silence d’une maison, d’un quartier pavillonnaire, d’une presque campagne, contre le tintamarre commun de la cité et de l’immeuble HLM :
Le jeune qui rôde sa mobylette dans la rue et qui enfile les tours de la cité en augmentant graduellement la vitesse de son engin motorisé avec, bien-sûr, le pot d’échappement pétaradant. Le voisin qui attaque son appartement à la chignole pour du bricolage. Les autres qui claquent la porte de leur appartement car celle-ci se ferme mal. Les gens qui s’engueulent. Les représentants qui électrisent subitement l’atmosphère dans l’appartement au moyen de la sonnette de la porte. Comme s’ils étaient chez eux. Les enfants/ les copains qui, depuis la rue, crient pour appeler leur copain afin qu’il descende jouer avec eux. La musique forte :
Même si, à la maison, on écoutait aussi de la musique à un volume sonore plus ou moins élevé, le tube Où sont les femmes ? De Patrick Juvet, mis et remis en selle, par la plutôt jolie fille aînée ( plus âgée que moi) de nos voisins directs, fait partie, à jamais, de mes souvenirs de Nanterre.
Je ne peux même pas dire si j’ai aimé entendre cette chanson : je n’avais tout simplement pas le choix. C’était comme ça. C’était normal. Et, à Cergy-Pontoise, dans ce pavillon acheté par nos parents, c’était exactement le contraire. Bien qu’il s’agissait d’un coin « civilisé », avec marché, médiathèque, piscine et centre commercial à proximité ( même si, comparativement aux Quatre Temps de la Défense, le centre commercial Les Trois Fontaines a d’abord fait un peu « pitié »), j’ai d’abord eu l’impression d’être arrivé dans un coin paumé. Pourtant, il y avait des gens. Et des jeunes de mon âge. Mais je ne les connaissais pas. Et la densité était moindre qu’à Nanterre.
Depuis mon enfance, je n’ai pas trop de problème pour sympathiser avec les autres. C’est peut-être un trait de mon tempérament. Ou, aussi, une résurgence des colonies de vacances et des centres de loisirs où je suis allé dès mes six ans voire plus tôt. Dans la ville de Cergy-Pontoise, en plus de vingt ans, je ne me suis fait aucun ami en dehors du travail. Tous mes amis de Cergy-Pontoise ont un rapport avec mon travail. J’ai en grande partie rejeté cette ville et ce qu’elle pouvait m’offrir dans le domaine associatif, sportif et autre. Pourtant, j’y ai croisé des gens en bien des circonstances.
Si j’avais été un aventurier, en six mois à Cergy-Pontoise, je me serais reconstitué un réseau d’amis pour remplacer celui dont j’avais été séparé à Nanterre. J’aurais fait le tour du monde à vélo ou à la voile. Je serais parti vivre plusieurs années à l’étranger.
Je serais venu habiter dans Paris lorsque les prix, dans l’ancien, à l’achat, étaient encore supportables : avant l’an 2000.
Je suis prudent. Je peux être méticuleux. Et, je peux être, aussi, particulièrement…. lent. Mais je suis, aussi, assez curieux dans les deux sens : un personnage étrange, pas tout à fait conforme, qui n’avance pas au même rythme. Et qui ne pense et ne s’exprime pas toujours comme on pourrait s’y attendre. Ou l’exiger. Qui semble- et qui est- en retrait des autres mais qui, contre toute attente, peut être attentif aux autres de façon plutôt surprenante.
Cela n’est pas calculé. Les horaires des marées hautes et basses de mes pensées suivent des lunes qui, sans doute, sont peut-être moins communes mais sont aussi faites d’écume. Ce qui peut les rendre plus difficiles à cerner comme à prévoir sur le comptoir des échanges relationnels. Or, ce qui est incompréhensible peut dérouter ou faire peur.
Et dans quel domaine, je travaille ? En psychiatrie et en pédopsychiatrie. Soit un domaine où les personnes, les patients mais aussi les collègues, que l’on rencontre peuvent être susceptibles d’agir comme de penser de manière….incompréhensible. On dirait presque que je le fais exprès, de dérouter mon entourage.
Mais, dans la vie, aussi, nous assistons à bien des phénomènes incompréhensibles.
Il m’a fallu plus de dix ans entre le moment où je me suis intéressé à la plongée avec bouteille. Et le moment où je me suis lancé en Guadeloupe jusqu’à y passer mes deux premiers niveaux. Pour l’instant, j’ai effectué 39 plongées avec bouteilles dont deux ou trois à quarante mètres.
Il m’a fallu à peu près le même temps ( plus de dix ans) pour me décider à prendre des cours de théâtre et jouer sur scène mais aussi dans des courts-métrages. Idem pour le roller etc….
Mon univers est sans doute celui d’un homme à l’envers. Pourtant, je sais ce qu’est le fait d’avoir des Devoirs et des engagements. Je n’ai pas beaucoup de leçons à recevoir des autres en matière de Devoirs et d’engagements. Pour cela, il me suffit de considérer ma vie, certains de mes sacrifices, même si je ne les ai d’abord pas toujours reconnus comme tels, et regarder un peu comme d’autres vivent autour de moi, pour savoir que je suis très en règle avec mes Devoirs et mes engagements. Voire, peut-être trop.
La pratique de l’apnée, en club, est devenue concrète pour moi il y a quatre ou cinq ans, maintenant. Après d’autres expériences tant personnelles que professionnelles. Là, aussi, il s’est passé un certain nombre d’années entre le moment où j’ai décidé de faire les démarches pour m’inscrire dans un club d’apnée et le jour où je l’ai fait. Evidemment, avant de faire ça, j’avais déjà lu, ou vu, sur des professionnels de l’apnée. Des « professionnels » au sens commun :
Des pratiquants de l’apnée médiatisés pour leurs performances hors-normes lors de certaines compétitions. Des gens que l’on surnomme souvent « L’homme-poisson », « L’homme-dauphin » etc….
Il y avait des femmes, aussi. Audrey Mestre, en particulier.
Si l’aspect « performance » de l’apnée a pu me séduire, comme un mannequin, un beau blouson éclairé en vitrine ou une vedette de cinéma peut aussi nous séduire, il est un autre aspect qui m’a, je crois, le plus « dragué » dans l’apnée :
La maitrise de soi. Le calme. La contemplation. L’apprentissage et la découverte de mes capacités. L’adaptation à un autre environnement. Adaptation, qui, ensuite, sans même y penser, se transpose, dans ma vie terrestre.
Des aptitudes requises mais qui peuvent aussi être développées, sollicitées, par la pratique de la plongée avec bouteille, de la psychiatrie et de la pédopsychiatrie, du théâtre, du massage bien-être, de la lecture, du journalisme cinéma, de l’écriture, du judo et de tout art martial mais aussi de tout sport de combat, diverses rencontres, la vie de couple, de famille ou le fait d’éduquer/d’essayer d’inspirer son enfant.
Il est courant d’opposer des disciplines qui, a priori, semblent antagonistes ou étrangères les unes aux autres. Entre ces disciplines, ces rôles et ces états, je recherche plutôt une certaine complémentarité.
Les personnes qui me connaissent un peu ne seront pas surprises par ce que j’avance.
J’ajouterai que la pratique de ces diverses disciplines – et d’autres- permet d’approfondir une certaine expérience de l’économie du geste, de la pensée, du calme, de la sincérité envers soi-même pour résumer. Et que cette pratique se réalise en « s’immergeant » en soi-même. Mais aussi en apprenant à observer et à ressentir, ce qui nous entoure (êtres, objets, éléments, événements). Et, aussi, en allant à leur rencontre dans la mesure de nos moyens, de nos limites et de nos connaissances.
Je ne suis pas un aventurier. Des quatre ou cinq jours que je viens de passer à Quiberon avec mon club d’apnée, mon troisième stage avec mon club, et mes trois seules sorties en mer de ce type, je suis revenu avec la sensation d’être un peu plus à l’aise dans l’eau en tant qu’apnéiste. Mais je ne suis pas encore autonome.
“Certains vélos sont faits pour rouler, le mien est fait pour pédaler“.
C’est ce que je me suis dit en revoyant un usager de cette marque de vélo que, cette fois, je laisserai dans l’anonymat. Chaque fois que je croise une personne sur ce genre de vélo, tout autant mécanique que le mien, je perçois en elle une aisance qui se refuse à moi. Pourtant, cela fait trois mois maintenant, à peu près, que j’ai troqué mes trajets de métro contre un vélo pliant. Et, je ne crois pas être si hors de forme que cela. Néanmoins, je m’apparente souvent à un rétro lorsque celle ou celui qui se déplace sur un de ces prototypes le fait avec une tranquillité indifférente. Le pire, peut-être, cela a été en “soulevant” le boulevard Raspail vers la place Denfert Rochereau :
Un homme assis sur cet objet qui m’intrigue filait sans forcer tout en conversant avec une dame pratiquant elle l’escalade au moyen d’un vélo grand format. Et, moi, qui faisais de temps à autre irruption sur leur tracé, j’étais non seulement presque comme une incongruité. Mais je voyais bien qu’après chaque arrêt, j’avais plus de mal qu’eux pour me relancer.
Je n’irai pas jusqu’à arracher les cheveux ou à crever les pneus d’une certaine catégorie de personnes. Car une certaine absence de testostérone résonne en moi pour ce genre de projet en pareilles circonstances. Mais j’ai eu le temps de gamberger. J’accepte facilement que des grandes roues ou des vélos profilés course me négligent ou me fusillent sur place. J’accepte même que des vélib’ lourdauds tractés par des mollets alcooliques me déversent des dizaines de mètres de distance dans la vue. Par contre, je me fais scrupuleux lorsque cette catégorie de vélo pliant me passe dessus ou devant. Car dans ses rayons, il y a comme un chant. Et celui-ci n’est pas bon pour mon entendement.
En attendant, je reste étonné de voir que, quelle que soit la marque, le style du vélo ou la pompe de celle ou celui qui l’emploie, c’est souvent la volonté de la course qui se retrouve. A part quelques touristes sans autre rendez-vous que l’instant. Assez peu, donc, posent le pied ou la cadence afin de faire le mur du temps et de prendre quelques photos.
Sur mon vélo de baltringue, dont la selle descend régulièrement et que je dois donc relever, je suis content de visiter quelques points de vue avant que ceux-ci n’aient disparu. A découvrir dans le diaporama qui suit. La musique a été choisie par ma fille.
Préparatifs pour le stage d’apnée à Quiberon de ce mois de Mai 2021
Choisir, c’est franchir :
En allant ce matin, jeudi de l’Ascension -mais aussi fin du Ramadan cette année pourles musulmans– à la gare St Lazare, à vélo, après une nuit de travail de douze heures, j’ignorais encore que j’écrirais cet article.
Sur le trajet, comme à mon habitude depuis bientôt trois mois maintenant, à l’aller comme au retour, j’ai pris des clichés. Comme chaque fois qu’un endroit, une lumière ou un événement me porte.
J’ai « publié » certaines de ces photos sur ma page Facebook ou sur ma page instagram. Mais, la plupart du temps, j’ai réservé le plus gros de ces photos prises lors de mes trajets pour mon blog, balistiqueduquotidien.com, dans la rubrique :
Vélo Taffe.
Je ne fume pas. J’ai juste un peu crapoté, ado, sur un terrain vague, près du supermarché Sodim, à Nanterre, qui existait, alors, près de la Cité Fernand Léger, une cité d’immeubles HLM de 18 étages, où j’ai grandi jusqu’à mes 17 ans. Et, puis, ça a été tout pour ma prise de nicotine ou de substance par voie respiratoire ou pulmonaire.
Mais j’ai aimé l’idée du jeu de mot avec « Taf », le travail. Et le fait « d’inhaler » du vélo. Parce-que je voulais voir le fait de faire du vélo comme une respiration. Un mode de vie. Comme bien d’autres disciplines.
Au premier plan, à droite, le technicien que j’ai interrogé et qui m’a répondu : ” Je ne sais pas pour quel film !”. Ce matin, vers 9h.
Ce matin, très beau ciel bleu. Une belle lumière, dehors. Et, Place de la Concorde, le tournage d’un film. J’ai interrogé un des techniciens du film qui se dirigeait vers moi. Sans doute le technicien lumière. Celui-ci m’a répondu avec le sourire :
« Je ne sais pas pour quel film ! ».
Dans le camion, blanc, à droite, “Au P’tit coin”, lieu de détente ou de relâchement des sphincters. Ce camion fait sans doute aussi partie de la logistique du tournage, car, habituellement, il n’est pas là.
L’article que je suis en train d’écrire est sans aucun doute un film que je me fais et que je suis en train de tourner. Comme chaque fois que je suis inspiré pour écrire. Et que je dispose de suffisamment de temps pour le faire. Je ne vis pas de ce que j’écris. Je le fais donc dès que je peux capter un peu de temps par-ci par là, tout en composant avec ma vie de famille, de couple, de père, de citoyen et d’employé.
Je dois donc concilier constamment plusieurs contraintes. Mais, ce faisant, comme la plupart des amateurs et des gens qui m’entourent et, de par le monde, j’ai ainsi accès à plusieurs vies. Chacun de mes articles est donc un tournage intime et public qui essaie de réunir, de projeter et de rendre attractives mes quelques vies d’ici et d’ailleurs. D’hier, d’aujourd’hui et de demain. Autant que je me souvienne. Pendant que j’ai encore de la mémoire, de l’envie et du plaisir.
A Penmarch’, en octobre 2020, lors de notre stage d’apnée avec mon club.
Cet article sera long. Je l’ai compris tout à l’heure en commençant à y penser chez moi. Alors, qu’au départ, il devait se contenter de faire un retour sur notre stage d’apnée à Penmarch, en Bretagne, en octobre dernier. Car j’avais pris quelques notes que j’ai facilement retrouvées tout à l’heure. J’avais aussi gardé des photos. Cet article devait être court. Il sera long. J’en suis désolé pour les lectrices et les lecteurs pressés. Pour celles et ceux qui ont besoin d’articles courts. Efficaces.
Je « sais » qu’écrire long est « anti-commercial ». Que c’est une mauvaise stratégie pour être beaucoup lu. Mais je ne peux pas et ne veux pas me soumettre à toutes les pyramides des tyrannies. En particulier, à celles qui consistent à faire du buzz à tout prix. A celles qui consistent à privilégier des pensées et des sensations cosmétiques.
Je n’écris pas et ne travaille pas pour l’Oréal. Et, encore moins pour les vitrines des grandes surfaces qu’elles soient de luxe ou non. J’écris comme je vis. Donc, si cet article doit être long, il sera long.
Lors d’un des ateliers d’écriture auxquels j’avais participé à la médiathèque de Cergy-Préfecture, il y a plusieurs années ( il y a plus de dix ans) l’écrivain qui l’animait avait dit :
« On écrit comme on respire ».
Mon initiation à l’Apnée :
Je me suis inscrit à mon club d’apnée, à Colombes, dans les Hauts de Seine, il y a environ quatre ans, maintenant.
Mais je suis arrivé à la pratique de l’apnée…par la plongée avec bouteille. Discipline que j’avais découverte il y a plus de dix ans maintenant. En Guadeloupe.
La plongée avec bouteille fait partie avec le roller de ces disciplines que j’ai découvertes et pratiquées, sur le tard. Alors que j’avais une trentaine d’années.
Ce sont des disciplines vers lesquelles je lorgnais depuis des années, comme j’ai aussi pu lorgner vers la pratique du théâtre pendant des années. Avant, là, aussi, de me décider à me lancer dans cette expérience avec plaisir.
C’est un Antillais, Jean-Charles, alors président et animateur d’un club à Cergy-Pontoise, Les Roller Eagles, qui m’a initié au sein de son club au roller. Je ne suis pas un pratiquant émérite de Roller. Mais, grâce à lui et à plusieurs sorties en club avec lui, j’ai pu faire des sorties d’une vingtaine de kilomètres sur la route, quelques randonnées, mais aussi participer à une ou deux randonnées nocturnes sur Paris. Jean-Charles a un rapport très concret aux rollers. Son enseignement visait à nous rendre aussi autonomes que possible en milieu urbain.
Aujourd’hui, j’ai toujours mes rollers même si je les utilise peu.
C’est un Corse, Stephan, qui, en Guadeloupe, dans la commune de Sainte-Rose, m’a initié à la plongée avec bouteille, dans son club : ALAVAMA.
Pourquoi Sainte-Rose ?
D’une part, parce qu’après avoir vécu une trentaine d’années en France, où je suis né, mes parents, natifs de la Guadeloupe, sont retournés vivre en Guadeloupe et se sont établis à Ste-Rose.
D’autre part, parce-que, après être allé rencontrer plusieurs dirigeants de clubs de plongée, c’est avec Stéphan, qu’humainement, je m’étais d’emblée senti le mieux.
Enfin, son club est un « petit » club. Et non une grosse usine de plongée. Cette particularité m’avait aussi plu.
Jean-Charles, tout comme Stephan, sont deux personnes que j’avais choisies. Or, choisir, c’est franchir….
Relater ça, et les origines de Jean-Charles, d’un côté, et de Stephan, d’un autre côté, est volontaire de ma part. Même si, je me répète :
Ce matin, au départ, en quittant mon service où je retournerai travailler cette nuit à nouveau pour douze heures, j’ignorais que j’allais écrire cet article.
Ce matin, en me rapprochant à vélo de la gare St Lazare, je suis tombé sur l’affiche d’un politicien. Son slogan était le suivant :
Le choix de la sécurité.
J’ai pris le temps de lire ce slogan alors que j’étais arrêté au feu rouge. Peu importe, pour moi, la couleur politique de cet homme. Car nous vivons dans un monde et dans un pays de frontières de toutes sortes :
Et, la pandémie du Covid, ses répercussions économiques et sociales, la géopolitique et d’autres facteurs accroissent de plus en plus les tensions autour et à propos de toutes ces frontières. Certaines frontières et tensions sont plus explicites que d’autres. Certaines sont plus directes que d’autres. Certaines sont plus visibles que d’autres.
Mais qu’on les perçoive ou non, ces frontières et ses tensions pèsent en permanence sur nos vies. Sur nos choix.
Ce politicien n’a pas choisi ce slogan par hasard. Nous avons tous peur de quelque chose. Je ne crois pas aux gens qui n’ont- jamais- peur de rien. Même si certaines personnes ont une assurance terrifiante. Mais il n’y a qu’à voir comment finissent certains despotes, monarques ou dictateurs pour s’apercevoir ou se rappeler que lorsque le Pouvoir, qui reste du sable, leur échappe, ils ont peur et fuient comme tout un chacun.
Enfants ou adultes. Jeunes. Vieux. Gros. Maigres. Yeux bleus, yeux marrons. Blancs ou noirs. Musulmans ou catholiques. Riches ou pauvres. Chômeurs ou travailleurs. Femmes ou hommes. Immigrés ou « nationaux ». Sportifs ou sédentaires. Propriétaires ou locataires. Résidents ou SDF. Cyclistes ou piétons, nous avons tous peur de quelque chose ou de quelqu’un à un moment ou à un autre.
Sauf que si la sécurité devient la seule norme et le seul critère possible, alors, tous les replis communautaires, quels qu’ils soient, se justifient. Ainsi que la peur de l’autre. Comme la peur et le rejet pour toute expérience et toute rencontre qui sort de notre pratique et de nos connaissance familières et connues.
Si je n’avais fait que le choix de la sécurité, jamais, je ne me serais lancé dans la découverte du roller.
Jamais, je ne me serais lancé dans la découverte de la plongée avec bouteille. Et, jamais, je ne me serais lancé dans la découverte de l’apnée. Car ces trois disciplines ( roller, plongée avec bouteille, apnée) font peur, comportent des risques, et ne font pas partie de mon « habitat » naturel ni de mon héritage familial.
Penmarch’, Octobre 2020.
Mon héritage familial : Un héritage d’ Ultra-marins
Les Antillais peuvent aussi être dénommés « ultra-marins » : Nous venons ou sommes originaires de l’Outre-mer. Mais, « ultra-marins », ne signifie pas du tout « sous-marins ».
Il existe bien évidemment des Antillais parfaitement à l’aise sous l’eau, que ce soit des chasseurs sous-marins ou des plongeurs avec bouteille. Mais, d’après mon expérience personnelle et familiale, ces Antillais sont une minorité.
Dans ma famille, nous sommes plutôt des terriens ou des terrestres. Mes parents savent nager, d’accord. Mais, contrairement à d’autres personnes, je n’ai aucun souvenir de vacances ou de journées passées sous l’eau ou sur l’eau avec mes parents.
Par contre, le Foot, la course à pied, le cyclisme voire la boxe, ça, oui, ça fait partie de mon patrimoine familial et culturel. Que ce soit en tant que pratiquant ou en tant que spectateur. Mais le roller, la plongée avec bouteille ou l’apnée, certainement pas.
Je me rappelle encore d’un de mes grands oncles paternels, aujourd’hui décédé, tout étonné, alors que je venais de lui parler d’une sortie plongée récente, d’apprendre que, non, je n’avais pas pêché de poisson ! J’avais alors compris que son rapport à la mer était strictement nourricier. Comme, pour certains hommes, le rapport à la femme peut n’être que strictement sexuel, procréatif ou domestique.
Je me rappelle aussi du mari, aujourd’hui décédé, de ma tante paternelle, pêcheur, me racontant- également en Créole– qu’il avait vu, comme il me voit, certains de ses collègues, tomber à la mer et se noyer sous ses yeux. Et, si je me souviens bien, cet « oncle », très bon marcheur par ailleurs, ne savait pas nager. D’ailleurs, il n’est pas mort en mer. Mais en faisant une mauvaise chute dans des escaliers. Peut-être à cause de son alcoolisme. Plus saoul marin, donc, que sous-marin.
Je me rappelle aussi comme, en Guadeloupe, certains locaux me regardaient comme un élément insolite, alors que depuis le club de plongée de Stephan, je figurais parmi les touristes (les blancs, pour faire simple) se dirigeant vers la mer et le bateau pour aller plonger plus loin.
Et, puis, je suis aussi obligé de rappeler que la mer, pour bien des ultra-marins, cela reste l’élément hostile, d’amnésie et de douleur, le récif qui nous a découpé et « séparé », de par l’esclavage, de la terre originelle : l’Afrique. Même si, depuis, l’Afrique est devenu un continent « autre ». Je connais peu, très peu d’Antillais, qui ont sillonné l’Afrique. Même moi, à ce jour, je ne suis toujours pas allé en Afrique. L’Afrique, pour beaucoup d’ultra-marins, c’est peut-être encore le continent de la défaite, du rejet, du deuil difficile ou impossible. Du reste, en occident, l’image- grossière- de l’Afrique reste régulièrement défigurée et : famine, dictatures, pauvreté, violences et, maintenant, jihadisme….
Par contre, nous sommes nombreux, aux Antilles ou en France, à regarder avec une certaine admiration nos “cousins” d’Amérique. Si Nelson Mandela, en tant que militant, est sûrement un leader africain estimé et reconnu aux Antilles, il me semble qu’à part lui, que nous serons souvent plus facilement inspirés pour admirer et citer des grands leader et des grands héros, noirs américains. Et, ce sera pareil pour des acteurs et des actrices noirs américains ou britanniques. Personnellement, je retiens le nom et “connais” bien plus d’acteurs et d’actrices noirs américains que d’actrices et d’acteurs africains. Cela pour dire jusqu’à quel point nous avons pu être séparés et pouvons continuer de nous séparer de l’Afrique…..
C’est donc dire à quel point, pour moi, le « Moon France » ( jeu de mot avec « Moun Frans », terme péjoratif que j’ai eu le privilège de découvrir dès mes 7 ans en Guadeloupe, pour mon premier séjour de vacances là-bas), le fait de choisir, à un moment donné, de découvrir une discipline comme la plongée avec bouteille, puis l’apnée, a nécessité que j’aille à contre-courant.
La facilité, la simplicité ou la lâcheté aurait évidemment consisté, pour moi, à suivre le courant. A me laisser résoudre et fabriquer selon les exemples et les modèles à ma portée immédiate :
D’après mes modèles familiaux et culturels. Mais aussi sociaux. Ce qui arrive encore constamment.
On peut très bien vivre dans un pays, une région ou une ville où il existe plein de possibilités de découvertes et d’épanouissement et s’en couper complètement. Et, vivre, de façon repliée. En faisant le choix de certaines certitudes. En faisant le choix….de la sécurité :
Je suis resté marqué par ce jeune croisé un jour alors que je venais d’emménager dans la ville d’Argenteuil en 2007. Je cherchais alors, près de la dalle d’Argenteuil, la médiathèque. Le jeune, qui, selon moi, habitait dans le coin, m’avait répondu qu’il ne savait pas où elle se trouvait. Et puis, en tournant la tête, je m’étais aperçu qu’elle était juste là, à quelques mètres de nous. Ouverte. Offerte. Gratuite.
Ce jeune devait passer devant cette médiathèque régulièrement sans le savoir. Je suis persuadé que nous agissons bien des fois comme ce jeune en bien d’autres circonstances. Et, cela, tout au long de notre vie. Et, personnellement, cela m’attriste, voire, m’inquiète.
Prendre la peur comme seul critère pour choisir de vivre et pour sélectionner son environnement comme celles et ceux que l’on va fréquenter revient, à un moment ou à un autre, à se rapprocher davantage de la peur.
Photo prise à Penmarch, lors de notre stage en octobre 2020.
Ce Lundi 9 Mai 2021 :
Ce Lundi 9 Mai, nous étions six à assister et à participer à cette visio-conférence organisée par Yves, le responsable de la section apnée de notre club.
Le but était de préparer notre stage d’apnée à Quiberon la semaine suivante (dans quelques jours).
Comme à son habitude, et avec simplicité, Yves a de nouveau déployé l’étendue de ses compétences.
Etant donné que c’est le premier club d’apnée que je connais, je n’ai pas d’élément de comparaison avec un autre club d’apnée. Mais, régulièrement, je suis admiratif de voir comme Yves, originaire de Bretagne, semble maitriser tant d’éléments :
Météo, maritime et terrestre, topographie des lieux, coût du carburant, planning, coût de l’hébergement, permis bateau, pêche sous-marine, cuisine et préparation de ce que nous avons pêché, matériel….
En outre, il semble inaltérable et infatigable. Ce qui est humainement impossible. Et, pourtant. Dernier couché, premier levé. A Penmarch’, en short et tee-shirt à manches courtes, je l’ai vu profiter d’un temps de pause pour passer la tondeuse autour de sa maison familiale alors que nous étions sortis le matin. J’étais aussi couvert qu’il était en tenue d’été ( en octobre, en Bretagne !) et plus bon pour la sieste que pour le jardinage.
On m’objectera que c’est son rôle. Et que c’est la moindre des choses. Peut-être.
Mais avec une telle aisance, tant d’un point de vue pédagogique, tant sur terre, sur bateau que sous l’eau ?
Hé bien, je vais affirmer que non ! Tout le monde n’est pas comme lui. Et, il faut savoir voir ce que certaines rencontres ont d’exceptionnel même si les personnes concernées s’en défendront souvent.
Un tel engagement, une telle compétence, dans une discipline si technique et potentiellement, si dangereuse, si effrayante, que ce soit en piscine, en fosse ou dans un environnement naturel ? Cela serait donc si banal, que ça ?!
Je vais affirmer- quitte à l’embarrasser- qu’il ne doit pas y avoir tant d’encadrants que ça qui font ça comme lui.
Je vais aussi affirmer que chacun d’entre nous se sentait en….sécurité alors qu’Yves, lundi ( il y a quelques jours) nous parlait, nous présentait le programme, mais, aussi, répondait à nos questions.
Même lorsqu’Yves, a pu nous dire à un moment que, dans tel endroit « il peut y avoir beaucoup de courant ». Mais qu’il suffit de se mettre à tel endroit, derrière la roche, pour se mettre à l’abri.
Tout en l’écoutant, je me suis demandé ce qui faisait que, moi, l’un des moins expérimentés du groupe, je pouvais me sentir si peu inquiet. J’allais quand même me retrouver, lesté de plusieurs kilos, dans une eau dont la température serait comprise entre 14 et 16 degrés, en pleine mer, durant plusieurs heures. Or, tout ce que j’entrevoyais, et attendais, c’était ce moment, où, avec les autres, j’aurais ces tonnes d’eau au dessus de ma tête. Et où je convergerais vers ces cinq ou huit mètres de profondeur, ou un petit peu plus peut-être, avec pour seule réserve et liberté, l’air que j’aurais emmagasiné dans mes poumons, ma tête. Et mes rêves.
A Penmarch, en octobre 2020.
D’accord, j’avais déjà effectué deux stages d’apnée en Bretagne avec le club. Un premier à Loctudy en 2017. Puis, un autre en octobre dernier à Penmarch. Mais cela suffisait-il pour expliquer cette tranquillité que je ressentais en l’écoutant ? Alors que je « savais » que si j’avais raconté à d’autres terriens- même sportifs- que nous avions prévu, avec mon club, de partir en stage d’apnée en Bretagne la semaine prochaine, que certaines et certains d’entre eux prendraient peur ou s’inquiéteraient.
Le choix de la sécurité….
Cet article est déjà long. Dans un autre, je restituerai les notes que j’avais prises lors de notre séjour à Penmarch en octobre dernier.
J’ajouterai avant de conclure celui-ci qu’autour d’Yves, se trouvent donc d’autres pratiquants qui ont déjà une sacrée expérience de chasse sous-marine. Mais, aussi, le doyen du club, Jean-Pierre, plus de 67 ans, et une bonne cinquantaine d’années d’expérience dans le domaine de la chasse sous-marine. Une longévité et une aisance que l’on ne peut qu’admirer. Je me rappelle encore qu’en octobre, alors que, moi, épuisé par les couchers assez tardifs et les réveils assez matinaux, j’avais opté pour arrêter ma «plongée » après deux heures dans l’eau ( température comprise entre 12 et 14 degrés, je crois), Jean-Pierre, lui, dans une mer qui secouait un peu, voltigeait comme un gamin dans son aire de jeu préférée. En pleine forme. Cela ne m’aurait même pas surpris s’il m’avait demandé, étonné :
“Ah, bon ? Tu rentres, déja ? Tu arrêtes de jouer ?”.
Je n’aurais jamais vu ou fait ce genre d’expérience et de rencontre si, toute ma vie, je ne m’étais tenu qu’à des choix de sécurité.
Tout à l’heure, après avoir arrêté d’écrire, j’ai continué d’écouter un podcast consacré à l’ancienne actrice porno, Brigitte Lahaie.
Au tout début, dans les années 90 peut-être, pour moi, Brigitte Lahaie était « juste » une actrice française de film X entrevue après d’autres actrices ou d’autres femmes dénudées. Elle n’était pas nécessairement celle qui me faisait le plus fantasmer.
Et puis, plus tard, j’avais compris en lisant une interview, peut-être, que c’était une femme intelligente. Bien consciente de ce qu’elle pouvait susciter chez un homme comme fantasme et…dotée d’humour. J’étais tombé sur une de ses réparties :
« Et, je saute Lahaie ?! ».
Depuis la lecture de cette répartie, pour moi, Lahaie, c’est ça : une femme qui a fait du X mais qui est intelligente. Et drôle.
Mais peut-être, aussi, que depuis que j’avais entendu parler d’elle la première fois dans les années 90 (ou 80 ?) que ma sexualité avait un petit peu évolué. Et que c’était aussi moi qui étais devenu un tout petit peu plus intelligent et drôle.
D’autres années sont encore passées depuis les années 90 ou 80. Et puis, je suis tombé sur ce podcast, il y a quelques jours. Je l’ai donc téléchargé avec bien d’autres podcast sur bien d’autres sujets.
Je n’avais pas envie de mater Brigitte Lahaie :
C’était la femme intelligente que je voulais entendre.
Ce fut assez drôle d’écouter ce podcast. Sauf que le comique de situation n’est pas venu de Brigitte Lahaie.
Dans cette émission appelée Mauvais Genres passée sur la radio France Culture le 2 Mai 2020, Lahaie était entourée de spécialistes du X qui étaient majoritairement des hommes apparemment sexagénaires. ( Lahaie, née en 1955, si je ne me trompe, a, elle…65 ans au moment de l’émission).
Il y avait aussi une femme qui, elle, peut-être plus jeune ( environ la quarantaine ?) était sûrement plus concernée par l’image de la femme, la place de la femme mais aussi, bien-sûr, la libération de la femme. Et par la façon dont la carrière de Lahaie au cinéma mais aussi dont les engagements ensuite avaient pu contribuer à la libération de la femme. En Occident, et, en particulier, en France.
Depuis une vingtaine d’années, Brigitte Lahaie est animatrice radio. Elle a écrit deux livres. Elle est considérée comme l’une des rares anciennes actrices pornos à avoir pu jouer dans des films de la filière dite classique ou traditionnelle. Mais aussi à avoir réussi sa reconversion professionnelle après la fin de sa carrière d’actrice. Ce que ne sont pas parvenues à faire par exemple feu Karen Bach/Lancaume et Raffaëla Anderson, héroïnes de l’adaptation cinématographique du livre Baise-Moi de Virginie Despentes. Un livre que j’avais lu. Et un film que j’avais vu au cinéma à sa sortie et qui m’avait “plu”.
Dans le podcast, Lahaie dit par exemple être inquiète d’assister à une certaine régression concernant les mœurs sexuelles. Et du fait que l’on puisse dire aujourd’hui que prendre la pilule, pour une femme, n’est pas un acte « naturel ». Lahaie de demander, alors :
« Parce-que faire douze enfants et mourir en couches, c’est naturel pour une femme ?! ».
Les hommes présents avec elle pour la radio France Culture, spécialistes de sa filmographie, et sans doute de bien d’autres films pornos, eux, étaient très polis, et très érudits.
Pourtant, ils faisaient penser à des hommes qui s’étaient sûrement masturbés après avoir regardé Lahaie- ou d’autres actrices du X- sur grand écran ou devant la télé bien des années auparavant. Sans rien en dire :
J’ai eu beaucoup de mal à croire que ces hommes soient des hommes ayant eu ou ayant encore une sexualité épanouie. Et, ils étaient là, à parler de tel film porno réalisé par tel réalisateur, avec tel acteur et Brigitte Lahaie. S’empressant de citer leurs connaissances. Sauf que, même cultivés, très cultivés, ils étaient restés les spectateurs et les admirateurs d’une carrière cinématographique pornographique.
Celle de Brigitte Lahaie. Alors qu’elle, cette carrière, elle l’avait vécue. Les pénétrations avaient bien eu lieu. Ainsi que les jouissances. Et, ils étaient là à en parler comme si de rien n’était. J’avais donc l’impression d’entendre des adorateurs qui, à tour de rôle, se pressaient follement pour placer leur pièce, ou leur feulement, dans l’horodateur du regard de Brigitte Lahaie. Pour se faire connaître -et voir- par une femme qui avait disparu depuis «longtemps » des écrans qui les avaient marqués et qui, pourtant, se trouvait devant eux : Brigitte Lahaie.
Brigitte Lahaie a bien expliqué que sa carrière dans le X devait beaucoup au fait qu’elle avait en elle une blessure. Elle recherchait de l’amour dans le regard de son père. Elle rejetait aussi le fait d’avoir une vie bien rangée….
Dans cette émission, comme ailleurs sans doute, Lahaie expliquait que tourner des films de X, à l’époque où elle en avait tourné, jusqu’ aux années 80, lui avait permis d’apprendre à s’aimer. Et qu’elle avait eu du plaisir à s’exhiber devant la caméra. Elle voyait d’ailleurs un certain gâchis lorsque, plus tard, certaines actrices françaises, telles Clara Morgane et Laure Sainclair, déclareraient avoir fait du X pendant un temps « juste pour le travail ». En affirmant ne pas avoir eu de plaisir particulier. Devant la caméra, elle, Lahaie avait du plaisir même si elle dément avoir été amoureuse de ses partenaires. Et, Lahaie d’ajouter dans l’émission que « toute femme peut arriver à jouir si elle trouve (ou rencontre) une bonne langue ». Il n y avait pas de prétention ni de provocation de sa part. Mais elle explicitait l’idée que l’on fait mieux son travail lorsque l’on a du plaisir à le faire.
A la limite, je l’ai trouvée assez sèche par moments avec ces messieurs. Mais c’était peut-être parce qu’elle avait déjà beaucoup rencontré de ces hommes qu’elle « passionne ». Et qu’il lui importait de les raisonner ou de les aider à raisonner plutôt que d’avoir à les aider à débander.
Mais c’était drôle d’imaginer non Brigitte Lahaie dans ses tenues intimes ou ses postures d’écran – même si, ensuite, j’ai regardé un peu quels films d’elle je pourrais éventuellement trouver ou acheter d’elle- mais ces spécialistes qui semblaient retenir leur envie derrière leurs propos qui se voulaient domestiqués. Comme si parler de X en face d’une ancienne vedette du porno pouvait se faire comme on peut discuter du solfège dans un conservatoire. Mais je dois le reconnaître :
Je n’aimerais pas avoir à me confesser devant une ancienne professionnelle du porno cousine de Brigitte de Lahaie. Une telle personne sait mieux que quiconque saisir l’octave du désir qui nous attire comme de celui que l’on enclave.
Chez moi, depuis des années, j’ai le film La Nuit des Traquées de Jean Rollin. Un film que j’ai déjà regardé un peu. Ou entièrement. J’ai oublié. Mais dont j’ai un bon souvenir esthétique. Et qui fait partie des films que Lahaie continue de préférer.