I was about to forget about Massive Attack at Rock en Seine Festival in August 2024. I was there. I took those pictures and videos. Je m’en rappelle ce soir avant que le vide ne m’entraîne à nouveau et avant mon coucher.
Massive Attack, groupe créé à Bristol à la fin des années 1980… (en 1988). Cela fait plusieurs fois que je la lis. Mais j’ai du mal à assimiler cette information.
1988, c’est sept années après la mort de Bob Marley. Trois ans avant le décès de Miles Davis et de Serge Gainsbourg. Quatre années et une année après les albums Purple Rain et Sign o’ the Times de Prince ; six années et une année après les albums Thriller et Bad de Michaël Jackson ; une année après l’album Kiss Me, Kiss Me, Kiss Me de The Cure ; quatre années après l’album An ba Chen’n la de Kassav’ ; six années après l’album The Message de Grandmaster Flash….
Pour moi, la musique de Massive Attack a fait partie des miracles des années 90 et 2000 avec, pour apothéose, leur troisième album Mezzanine ( sorti en 1998) dont le titre Dissolved Girl comptera parmi les titres du film Matrix réalisé par les ex-frères Wachowski qui connaîtra un succès mondial et qui est depuis devenu une référence pour bien des cinéphiles.
Mezzanine fut pour moi un miracle ambivalent, évident et captivant. Car aussi vénéneux, angoissant, aliénant et potentiellement mortel que potentiellement salvateur.
C’est surgir au bord du gouffre, nous prévenir de sa proximité et de son imminence. Et nous convaincre de rester écouter. Nous suggérer qu’il y a, parmi les éclairs, encore un espoir…
Si l’aura et la force du groupe se sont effilochées après Mezzanine, Massive Attack, par la suite, a néanmoins adressé d’autres titres qui ont du poids.
Je pense principalement à ceux de l’album Heligoland (sorti en 2010).
Lors de ce concert de Massive Attack en aout, j’ai été étonné par le jeune âge des spectateurs autour de moi. Normal :
Je fais désormais partie des vieux et ce sera encore plus vrai dans quelques minutes, date de mon anniversaire. Et celles et ceux que j’ai vus, assez près de la scène avec moi, avaient dans leur grande majorité à peu près l’âge que j’avais lorsque j’écoutais Massive Attack dans les années 90 : La trentaine ou un peu moins.
Ce qui signifie quand même que la plupart d’entre eux étaient à peine nés lors des premiers albums de Massive Attack ( Blue Lines, le premier album, est sorti en 1991).
A nouveau, comme pour d’autres artistes, cet exemple rappelle que, malgré les “changements” d’époque, une certaine attraction et identification demeurent. Comme chaque fois que l’oeuvre d’un(e ) artiste ou d’une personnalité “parle” au plus grand nombre.
Il est des oeuvres que le Temps camisole, d’autres qu’il libère.
Massive Attack est sans doute bien moins connu et bien moins écouté aujourd’hui qu’il y a trente ans mais il est bien des artistes qui aimeraient signifier au moins autant qu’eux au point de pouvoir encore se produire sur la grande scène d’un festival de “Rock” très suivi.
Ecrire peut ressembler à de la loterie ou à un exercice de télépathie ratée. Tant de pensées et tant d’énergie engagée et un mauvais choix peut tout gâcher alors que cela commençait bien et que notre temps- et aussi l’attention des autres- reste compté. Et limité.
C’est peut-être aussi parce-que je refuse encore- un peu -d’être dompté par cette addiction aux images qui a propulsé ses comptoirs dans nos vies et nous vide de notre intériorité en nous maintenant à l’arrêt que j’ai recommencé récemment à retourner voir des films au cinéma (à raison de deux films d’affilée au minimum) et que je me remets ce soir à écrire.
Je vais au cinéma comme d’autres prient, voyagent, partent en pélérinage ou vont à la messe.
Je me suis aussi rappelé que le cinéma pouvait me donner une éducation et m’apporter un certain répit.
J’aime encore le fait de me mouvoir et d’aller chercher corporellement dans l’espace un Savoir, une expérience, une rencontre, un moment.
Je crois que l’expérience d’un film peut avoir des effets bénéfiques sur mon existence.
A condition de bien choisir ses films.
Je sais aussi que cette façon de voir est attardée et qu’elle provient aussi de mon âge, de mon époque et de mon tempérament. Car, désormais, on peut aussi préférer tout faire depuis chez soi par la dématérialisation et le virtuel qui offrent des avantages pratiques conséquents.
J’aime aussi regarder des films de divertissement ou dits grand public.
Mais vu que mon temps est compté, je dois avoir des priorités. J’ai donc rapidement écarté des films tels que Alien : Romulus de Fede Alvarez ou Deadpool & Wolverine réalisé par Shawn Levy sortis respectivement le 14 aout et le 24 juillet en salles. Deux films qu’il est encore possible de voir en version originale au moins dans le complexe cinéma parisien que je fréquente depuis plus d’une vingtaine d’années.
Au lieu d’aller crier dans l’espace et de retourner voir Wolverine s’énerver et Deadpool faire le mariole, je suis allé chercher des films qui font partie de la constellation dite du « cinéma d’auteur».
Il y a des films d’auteurs qui marchent bien et qui « rencontrent » leur public massivement, au grand jour, et non dans une back room. Il en est d’autres qui sont peu vus car ignorés par le public ou rapidement retirés des salles de cinéma, mal distribués. Il y a ceux qui passent inaperçus au cinéma, que l’on va voir dans une salle pratiquement vide, et qui, plus tard, voire assez rapidement, deviennent cultes comme Requiem for a dream (2000)de Darren Aronofski ou Under the Skin ( 2013) de Jonathan Glazer. Il y a des réalisateurs reconnus de leur vivant et qui sont étonnamment oubliés après leur décès comme Krzystof Kieslowski. Et d’autres, peut-être trop fous pour que les gens normaux aient pu entendre parler d’une oeuvre telle que LaComédie de Dieu (1995) de Joao César Monteiro.
Il y a quelques films, aussi, qui, bien que faisant encore partie du cinéma d’auteur rassemblent les spectateurs car celle ou celui qui les délivre a, avec ses oeuvres cinématographiques précédentes, rempli de manière répétée au moins ces trois ou quatre conditions :
Remporté des prix dans des festivals prestigieux; été estimé(e) et soutenu par les média et les critiques de cinéma; rencontré un succès public et commercial ; révélé des oeuvres, des histoires personnelles, des actrices ou des acteurs.
Tel Emilia Pérez, le dernier film du réalisateur Jacques Audiard, sorti le 21 aout 2024, et qui a fait partie des films d’auteurs que j’ai vus (et aimé) récemment.
Et puis, il y a les films comme Ni Chaînes ni Maitres de Simon Moutaïrou sorti le 18 septembre 2024 et que je suis allé voir ce 20 septembre au matin.
La semaine dernière, je me suis étonné de ne pas citer Ni Chaînes ni Maitres lors d’une discussion avec quelques collègues à propos des films que j’avais vus récemment. Je les avais tous cités. J’avais même recommandé La Partition de Matthias Glasner qui est un film « dramatique allemand » de près de trois heures sorti le 4 septembre et qui est loin d’être léger moralement.
Mais aucune allusion spontanée de ma part concernant Ni Chaines ni Maitres à mes collègues.
Il m’a bien fallu environ deux bonnes minutes pour m’en rappeler et le rajouter, du bout des lèvres, parmi la liste des films que j’avais vus ces derniers jours. Et lorsque j’ai parlé du film, j’en ai parlé avec ménagement :
J’appréhendais de gêner ou de déranger. Je ne voulais pas gêner ou déranger mes collègues (majoritairement blancs) avec ce sujet. Je me suis presque comporté comme une personne qui confessait une faute morale. Avoir vu un film. Ce film-là.
J’avais pourtant aimé le film.
Je crois que ce malaise que j’ai ressenti devant mes collègues raconte le sujet du film. Ou, plutôt, la façon dont son sujet est abordé ou reste abordé en France :
Tant que l’on parle d’esclavage ou de racisme anti-noir dans des grosses productions américaines, tout va bien. Cela se passe aux Etats-Unis. En France, tout cela est « digéré » ou plutôt mis dans le placard avec tout le nécessaire disponible pour l’employé de ménage ( souvent une personne noire ou arabe).
Alors qu’aux Etats-Unis, qu’est-ce-que la condition des Noirs a été ou reste dégueulasse ! Black Lives Matter. Rodney King. Martin Luther King. I Have a Dream. Spike Lee. Angela Davis. Toni Morrisson. Colson Whitehead. James Baldwin. Amistad, La Couleur Pourpre, Le Majordome, Django Unchained, Get out…..
Grand soulagement cependant. Car même si en septembre 2018, en France, lors d’une émission télévisée et bien médiatisée, un personnage médiatique comme Eric Zemmour avait pu s’autoriser à donner son avis sur le prénom de la chroniqueuse Hapsatou Sy (comme à l’époque de l’esclavage) tous les débordements liés à l’esclavage et au racisme anti noir se déroulent bien sûr aux States, aux Etats Unis, où ça peut être très dur pour « Les Blacks ».
A la rigueur, un réalisateur britannique ( un homme noir bien-sûr) comme Steve McQueen va parler de l’esclavage dans un film comme Twelve years a slave (réalisé en 2013) qui comptera plusieurs vedettes internationales ( Chiwetel Ejiofor, Brad Pitt, Michael Fassbender, Paul Dano, Benedict Cumberbatch….).
Mais en France, pour l’instant, aucun film notable ou sérieux sur l’esclavage avec Jean Gabin, Yves Montand, Lino Ventura, Jean-Paul Belmondo, Alain Delon, Gérard Depardieu, Romain Duris, Pierre Niney, Pio Marmaï, François Civil, Romy Schneider, Brigitte Bardot, Vanessa Paradis, Jeanne Moreau, Catherine Deneuve, Isabelle Adjani, Maïwenn, Adèle Exarchopoulos, Alice Isaaz, Noémie Merlant, Audrey Fleurot, Audrey Tautou….
Il faut éventuellement attendre que deux humoristes ( noirs) plutôt connus comme Thomas N’gijol et Fabrice Eboué en parlent dans Case Départ en 2011 pour que l’on puisse dire qu’un film français (humoristique) qui évoque l’esclavage a eu un certain succès public. Auparavant, je crois que seul Rue Cases Nègres réalisé par Euzhan Palcy en 1983 avait pu aborder le sujet et avoir aussi un certain « succès ». Et le film d’Euzhan Palcy (inspiré du livre de Joseph Zobel) est le contraire d’une comédie.
L’ esclavage fait donc partie des sujets tabous en France en 2024 et j’ai été le propre témoin de ma dissociation à ce sujet. Car en présence de personnes noires, j’aurais sans aucun doute beaucoup plus facilement cité Ni Chaînes ni Maitres parmi les films que je suis allé voir récemment. Et qui m’ont plu. Comme Les Barbaresde Julie Delpy, A son image de Thierry de Peretti, Le Procès du chiende Laetitia Dosch.
Ni Chaînes ni Maîtres a par ailleurs dans ses avantages, le fait, pour la première fois dans une production française sur le thème de l’esclavage et du marronnage, de proposer des acteurs français et blancs de première main :
Camille Cottin et Benoît Magimel. Lesquels ont des rôles décisifs. Il faut aussi rajouter Marc Barbé qui fait une apparition marquante voire Félix Lefebvre, présent dans le Suprêmes d’Audrey Estrougo (consacré au groupe de Rap NTM).
J’ai été « initié » à l’histoire de l’esclavage par mon père, en banlieue parisienne, alors que j’étais à l’école primaire et que j’écoutais- entre-autres- les mêmes variétés françaises que mes copains et copines de classe de Claude François à Michel Sardou en passant par Alain Souchon ( J’ai dix ans) Dave (Vanina), Sheila, Joe Dassin, Ringo, Julien Clerc, Johnny Halliday, Mireille Mathieu ou Dalida ( Paroles paroles)…
Et alors que je regardais et découvrais fidèlement, émerveillé, Goldorak, San Ku Kaï mais aussi Les Mystères de l’Ouest, L’homme qui valait trois milliards ou David Vincent et les envahisseurs, Chapeau melon et bottes de cuir…La petite maison dans la prairie…Cosmos 1999, l’émission Temps X des Frères Bogdanoff.
Donc, quarante ans plus tard, un film de plus sur l’esclavage ne me faisait pas peur. Sauf que je peux en avoir assez de faire «bouffer » de l’esclavage à ma mémoire. Je ne cours pas après les films qui traitent (ce jeu de mot était trop irrésistible) de l’esclavage. Mais Ni Chaînes ni Maitres m’a rapidement donné « envie ». Cela vient peut-être du fait que le film a d’abord été très bien écrit par Simon Moutaïrou qui a d’abord été scénariste (L’Assaut,Goliath, Boîte noire) avant de devenir réalisateur. Avant de faire son film, Simon Moutaïrou a pris le temps de rencontrer des historiennes mais aussi de lire Le Marronnage à l’Isle de France, rêve ou riposte de l’esclave ? d’Amédée Nagapen, un ecclésiastique catholique et historien mauricien décédé en 2012 (sources Wikipédia et le Bondyblog.fr ).
D’après mes recherches, l’ouvrage de Nagapen est aujourd’hui indisponible. Pour l’instant, de son travail, il nous reste donc…Ni Chaînes ni Maitres de Simon Moutaïrou.
Dès le début, le film nous entraîne. Ensuite, avec très peu de gestes, et en quelques images, Benoit Magimel en Eugène Larcenet nous laisse entrevoir ce que pouvait être l’état d’esprit paternaliste d’un esclavagiste sur sa plantation. Sans grossièreté ni caricature.
Deux figures féminines (on peut en ajouter une troisième d’allure mystique) dominent le film. En la personne de Mati (l’actrice Thiandoum Anna Diakhere) la fille du héros (Massamba, l’acteur Ibrahima Mbaye) et de Madame la Victoire, la chasseuse de nègres, interprétée par Camille Cottin. Soit deux autres atouts supplémentaires du film.
J’ai aussi beaucoup aimé l’apport de la langue. Ici, beaucoup le Wolof. J’ai aussi aimé que le film nous montre ce que pouvait encore être la culture ( Wolof et autres) d’origine de ces femmes et de ces hommes avant qu’ils ne soient complètement « assimilés», francisés ou écrabouillés comme la canne à sucre qu’ils récoltent. Ni Chaînes ni Maitres se déroule en 1759 en “Isle de France” ( l’ancien nom de l’île Maurice).
Le film rappelle aussi l’addiction très ancienne de l’Humanité à la violence. Et les histoires qui en découlent où des cultures et des minorités ont eu ou ont contre elles le désavantage de l’infériorité au moins militaire, les conduisant, lorsqu’il leur est impossible de se défendre ou de résister, soit à disparaître soit à être envahies ou colonisées.
Dans la salle, parmi les spectateurs, il y avait nettement plus de personnes noires que lorsque j’étais allé voir La Partition de Matthias Glasner. Le public était aussi plus jeune. La vingtaine ou la trentaine « contre » un public de quasi retraités ou de retraités pour La Partition.
Après la projection de Ni Chaînes ni Maitres, quelques personnes sont restées assises. J’ai perçu une certaine émotion que j’ai aussi ressentie. Mais je n’en n’ai rien dit.
Franck Unimon, ce lundi 23 septembre 2024 ( et mercredi 25 septembre 2024).
« Les Maitres sont les Maitres. Au mieux, je suis un centimètre ».
Le terme « Maitre » est un des reflets de notre ambivalence.
Il peut rappeler des mauvais souvenirs. Il semble séparer les mondes d’hier dont nous somme les fruits que l’on fuit et ceux d’aujourd’hui que l’on préfère. Comme s’il était possible de creuser une tranchée entre les deux et d’y entrer.
Le « Maitre » peut rappeler l’instituteur de l’école primaire ou celui dont dépend l’esclave.
Personne n’aime véritablement se rappeler certains moments humiliants et publics de son histoire.
Mais le « Maitre » est aussi celle ou celui qui peut et sait guider et réparer. En particulier vers la vie et l’optimisme. Y compris dans le secret.
Il existe des Maitres dans beaucoup de domaines dans toutes les cultures à tous les âges de l’évolution et dans toutes les classes sociales. Mais, la plupart du temps, nous ne le percevons pas.
Par ailleurs, le terme de « Maitre » est anachronique tout autant que futuriste.
Et les Arts Martiaux véhiculent cette outrance ou cette ambivalence.
Car on peut trouver anachronique voire stupide que des gens, en 2024 et plus tard, puissent encore continuer de choisir de porter kimono, hakama, d’autres éléments vestimentaires mais aussi adopter certaines attitudes. Et, tout cela, afin de transpirer et suivre des rituels et des traditions d’un ancien temps mais aussi d’une culture qui n’est pas forcément la leur. Alors qu’il suffit de faire un régime alimentaire, de subir une intervention chirurgicale, de prendre un coach ou de faire du fitness ou du cross-fit pour perdre du poids et pouvoir se mettre en maillot de bain en été au bord de la plage en étant fier de son allure.
Toute époque a ses intégrismes et ses artifices aussi séduisants soient-ils. Et, si mon attachement à certaines valeurs dites traditionnelles me rapproche des Arts Martiaux, j’ai aussi appris que les traditions, à elles seules, ne sont pas des sanctuaires idylliques. Il faut des personnes, des femmes, des hommes et aussi des enfants qui sachent les interpréter et les perpétuer de manière vivante et optimiste.
Au Masters Tour de juillet 2024, nous avons eu le privilège de rencontrer plusieurs Maitres d’Arts Martiaux. Mon précédent article, Japon Juillet 2024 : Le Retour , fut long à écrire et à lire. Celui-ci est entre trois à six fois plus court.
Hormis Hino Akira Sensei approché lors d’un stage organisé par Léo Tamaki au cercle Tissier à Vincennes fin 2022, je découvrais les autres Sensei. Des Maitres et des personnes que Léo Tamaki, et quelques autres, avaient régulièrement rencontré depuis au moins une quinzaine d’années !
Ces hommes, ces Maitres, ont consacré leurs vies aux Arts Martiaux à un point difficilement concevable. Comme l’on porterait des métaux à une température particulièrement élevée, ils se sont forgés. Sans se rompre. Il faut le rappeler car nous sommes nombreux à avoir eu des projets ou des aspirations auxquelles nous avons dû partiellement ou totalement renoncer.
La première leçon du Maitre, c’est peut-être d’être une incarnation, devant nous, de cette forme d’accomplissement- et d’engagement- que très peu d’entre nous atteindrons. Parce que notre histoire est différente. Et aussi parce qu’avant lui, nous avons eu d’autres Maitres et retenu d’eux certains enseignements plutôt que d’autres.
Je ne pourrai pas parler d’une technique exposée et démontrée par un de ces Maitres. J’en suis incapable.
« Les Maitres sont les Maitres. Au mieux, je suis un centimètre » est une réflexion que j’ai écrite lors de ce Masters Tour de juillet 2024 alors que nous nous trouvions au Japon.
Cette différence lexicale est l’équivalent d’une décimale pour décrire à quel point, même si je parle d’êtres humains comme moi, il y a quand même une brèche saisissante entre eux et moi. Et que mes propos sont condamnés à rester rudimentaires pour les évoquer.
Pourquoi le faire, alors ?
Pour témoigner et pour contribuer à rajouter un peu de mémoire. Parce-que les êtres humains ont besoin d’histoires et de mémoire même s’il leur arrive aussi de les craindre et de les rejeter.
Je vais parler ici des Maitres qui m’ont le plus… « parlé ».
Hatsuo Royama Sensei, 76 ans, Karate Kyokushinkan, est le premier Maitre que nous ayons rencontré. Malgré sa bonne humeur et son enthousiasme, notre première rencontre avec lui et ses disciples m’avait laissé insatisfait. Nous étions une bonne centaine (ou davantage) sur le tatami. Au lieu de nous dire comme il l’a fait à la fin « Vous êtes nombreux à avoir une mauvaise garde », j’aurais préféré que lui ou un de ses disciples passe et nous le démontre en nous « corrigeant ».
J’ai été bien plus favorablement marqué quelques jours plus tard par le kata qu’il nous a délivré au butokuden lors de la célébration des dix ans de l’école Kishinkai Aïkido.
Hatsuo Royama Sensei, seul, face à notre assistance, a plongé dans un kata respiratoire où chacun de ses mouvements était soutenu par le marteau de son diaphragme. C’était la première fois que j’assistais à une telle expressivité martiale. Et sa démonstration attestait aussi de sa santé vigoureuse.
Une santé avec laquelle j’allais faire un peu plus connaissance ensuite ou, après qu’il ait accepté de prendre la pose avec moi pour la photo, il allait me surprendre en m’administrant une magistrale tape sur l’abdomen soit un peu l’équivalent d’une leçon particulière qui allait m’influencer, jusqu’à me mettre sur la défensive, lorsque j’allais me trouver lors d’une autre séance face à Minoru Akuzawa Sensei, Aunkai, pour une démonstration.
Takeshi Kawabe Sensei, 80 ans, Daitoryu Aikijujutsu.
Commençons par dire que Takeshi Kawabe Sensei ne fait pas son âge. Si Hatsuo Royama Sensei mesure près d’1m80, Takeshi Kawabe Sensei doit à peine dépasser 1m60. Avec son air de petit gars tranquille joueur de pétanque, il peut au mieux faire penser à l’inspecteur Columbo ou à un personnage d’un film de Johnnie To dont les méninges sont bien plus affûtés que les gestes.
Takeshi Kawabe Sensei est sans doute un homme très intelligent et aussi farceur (lors du repas collectif que nous avons fait, je crois qu’il s’est bien amusé de moi en me disant – en Japonais- que j’avais un très bon Japonais).
Mais c’est évidemment un redoutable pratiquant.
Ses saisies et ses clés sont promptes et donnent l’impression d’être la destinée de celui qui l’attaque. Il me reste des souvenirs de ce moment où Issei Tamaki a joué le rôle de Uke :
Issei y a mis tout son entrain pour, à chaque fois, le même résultat. Se faire retourner.
Takeshi Kawabe Sensei a réagi comme s’il l’attendait. Comme si tous les modes d’attaques humainement possibles étaient connus de son registre. On aurait dit l’agent Smith face à Néo à la fin du premier Matrix des ex frères Wachowski.
Le résultat était tellement évident que la conclusion aurait été vraisemblablement la même avec un autre Uke. En outre, Takeshi Kawabe Sensei prenait tout cela de manière ludique. Si on peut voir Hatsuo Royama Sensei comme une force de la nature, Takeshi Kawabe Sensei évoque plutôt celui qui a su transcender sa nature.
Hino Akira Sensei, 76 ans, Hino Budo, est également un petit gabarit. Sans forcer, il vous fait tomber. Vous vous croyiez enracinés et bien ancrés dans le sol ? Vous vous mentez à vous-mêmes. Vous ne l’êtes pas. Ou jamais suffisamment face à lui.
Plus il vous montre le mouvement, plus il vous convainc que c’est facile et plus vous avez du mal à le reproduire. Par moments, j’ai du mal à savoir si sa science tient de l’hypnose, du conditionnement ou de ces quelques degrés ou centimètres (millimètres ?) que l’on néglige d’ordinaire et qui font toute la différence entre le déséquilibre et la chute.
Sa pratique peut être très difficile pour celle ou celui qui s’est toujours reposé sur l’explosivité musculaire, l’excitation et l’agitation. Avec lui, on transpire de la tête à essayer de comprendre un concept qui n’existe pas. Il faut ressentir et c’est difficile.
En revoyant a posteriori quelques images que j’avais pu filmer lors de l’intervention de Hino Akira Sensei, j’ai pu m’apercevoir que d’autres participants du Masters Tour connaissaient aussi quelques difficultés pour mettre en pratique ce qu’il nous avait montré. Cela m’a un peu déculpabilisé.
Minoru Akuzawa Sensei, Aunkai, est à à l’image de Takeshi Kawabe Sensei et de Hino Akira Sensei. Avec son 1m65, il a la silhouette passe partout de celui que l’on oublie. Pourtant, en tant que Maitre d’Arts Martiaux, l’Aunkai qu’il a créé et qu’il enseigne peut être vu comme un croisement entre les enseignements de Hatsuo Royama Sensei et ceux de Hino Akira Sensei.
Minoru Akuzawa Sensei est capable des explosions et des percussions du premier et de la délicatesse du second tout en n’étant ni l’un ni l’autre.
Mon premier camarade de chambre lors de ce Masters Tour avait « goûté » à trois low kick de Minoru Akuzawa Sensei. Il les ressentait encore plusieurs jours plus tard.
Ma première « confrontation » physique avec Minoru Akuzawa Sensei avait eu lieu un peu plus tôt dans le car qui nous avait transporté de Kyoto à Kinosaki.
Cette « confrontation » fut principalement une bousculade. J’avais sans doute pris un peu trop de temps pour avancer dans le car et Minoru Akuzawa Sensei m’était rentré dedans en montant derrière moi. Impatience ? Distraction ? Je n’ai pas su.
Par contre, moi qui suis plus grand que lui dix bons centimètres et sans doute plus lourd que lui de dix kilos, j’avais été surpris de me sentir si facilement déplacé physiquement par un si « petit » homme.
Si tous les autres Maitres que nous avons rencontrés avaient des disciples ou des assistants japonais, Minoru Akuzawa Sensei s’est un peu distingué en laissant un de ses élèves occidentaux (un homme robuste d’un bon mètre quatre vingt dix vraisemblablement d’origine américaine ) diriger l’échauffement.
A la fin de la séance qu’il a dirigé dans un gymnase, Minoru Akuzawa Sensei nous a dit qu’il apprenait à connaitre les gens au travers du contact physique qu’il avait en pratiquant avec eux. Et qu’il avait senti chez ceux d’entre nous qu’il avait eus comme partenaires une « véritable ouverture pour les Arts Martiaux ».
Il a ensuite accepté d’être pris en photo avec celles et ceux qui le souhaitaient. En voyant plus tard les photos où nous sommes assis côte à côte, lui et moi, j’ai été très étonné de découvrir que Minoru Akuzawa Sensei avait posé son bras autour de mon épaule. Je n’avais absolument rien senti au moment de la photo. Au contraire de ce que j’avais ressenti au moment de la photo avec Royama Hatsuo Sensei avant que celui-ci ne me fasse la farce qui consiste à me « claquer » l’abdomen.
Takahiro Yamamoto Sensei, Taisha ryu.
En dépit de ses airs de Johnny Depp, Takahiro Yamamoto Sensei n’est pas acteur de cinéma. C’est un homme résolument dévoué à sa pratique martiale. Et, si j’ai eu beaucoup de mal à me faire à ses enseignements, très proches par moments de ceux de Hino Akira Sensei, pour moi à la limite de l’ésotérisme, j’ai été touché par son engagement, sa simplicité, sa prévenance envers ses assistants et son message de paix résumé par sa phrase :
« There is no ennemy ».
Son humilité mais aussi sa candeur et son enthousiasme se sont encore plus épanouis lorsqu’après son intervention, il est devenu un élève parmi nous, lors du cours dirigé par Hino Akira Sensei. J’ai trouvé son attitude remarquable.
Yoshinori Kono Sensei, 75 ans, Shoseikan.
Je sais que l’intervention de Yoshinori Kono Sensei au Butokuden a beaucoup déconcerté. On pourrait la comparer à du Free Jazz, à la musique de Weather Report, à de l’association d’idées ou à de l’improvisation ininterrompue.
Il est libre, Yoshinori Kono Sensei, il y en a même qui disent qu’ils l’ont vu voler….
Il fallait voir la plupart des participants qui suivaient Yoshinori Kono Sensei dans ses déambulations tant mentales que physiques au sein du Butokuden. Tels des Sancho Panza suivant leur Don Quichotte. Par moments, je me suis demandé si Yoshinori Kono Sensei s’en amusait.
Avant notre départ pour le Japon, Léo Tamaki nous avait présenté les Maitres que nous allions rencontrer. Concernant Yoshinori Kono Sensei, il nous avait écrit qu’il était un peu le « chercheur fou » des Arts Martiaux.
Le jour de son intervention, j’étais trop épuisé physiquement pour participer. Mais en temps ordinaire, je sais que je ne m’en serais pas mieux sorti que les autres participantes et participants du Masters Tour.
Lors du dîner que nous avons ensuite pris tous ensemble dans un restaurant à quelques minutes du Butokuden, il s’est trouvé que la table où j’ai été placé était voisine de celle de Yoshinori Kono Sensei. Celui-ci était derrière moi.
Très vite, j’ai été fasciné et happé par cet homme. Vêtu d’une tenue traditionnelle, à moitié assis sur sa chaise, une sorte de cartable en cuir souple posé derrière lui entre la chaise et son dos, Yoshinori Kono Sensei était en permanence occupé à réfléchir et à polir « ses » Arts Martiaux.
A telle manière de tenir un couteau. A telle façon de placer ses doigts. Et, il le partageait avec celui qui se trouvait à côté de lui. Et à toute personne volontaire et disponible dans les alentours immédiats. Il a ainsi entrepris Julien Coup, assis à sa droite. Puis, d’autres participants du Masters Tour.
Je le regardais, captivé.
Yoshinori Kono Sensei nous a fait l’extrême politesse d’être avec nous corporellement pour ce dîner. Il s’est plié à cette fonction sociale par amabilité. Mais il avait d’autres priorités. Le dîner, le spectacle, être filmé ou pris en photo, tout cela était pour lui secondaire depuis fort longtemps. Sans doute depuis des années.
La seule vérité comptable pour lui, c’était celle des Arts Martiaux. Yoshinori Kono Sensei est celui qui m’a le plus donné envie d’apprendre le Japonais. Je me suis dit que j’aurais aimé connaître suffisamment le Japonais pour l’écouter, pour l’interroger.
Et lorsque le dîner et tout le cérémonial social furent terminés, Yoshinori Kono Sensei est spontanément retourné au lieu et à la pratique auxquels il appartient :
Les Arts Martiaux.
Je trouve cette photo de lui, après notre dîner, extraordinaire. Pendant cette heure et demi environ où Yoshinori Kono Sensei était « avec nous », il n’a attendu que ça, ce moment où il pourrait retourner pratiquer. Seul. Tout le monde aurait tout aussi bien pu rouler sous la table, où la soirée se transformer en orgie gigantesque, je crois qu’il aurait adopté exactement la même attitude.
Autant de Maitres, autant d’attitudes et je « parle » uniquement de cinq ou six d’entre eux que j’ai à peine aperçus.
« Bientôt, ce qui s’est passé trois semaines durant au Japon se diluera :
Les effets de l’ensorcèlement de ces petits abrutissements quotidiens répétés.
Ma compagne et ma fille dorment encore. C’est un moment fait pour commencer à écrire.
J’ai passé récemment trois semaines au Japon. Mon précédent voyage au Japon en 1999 avait été principalement touristique. Celui-ci, le second, 25 ans plus tard, a été opéré lors du Masters Tour 2024 ».
Ces lignes datent de ce 30 juillet 2024. Depuis, ma compagne et notre fille sont parties pour trois semaines à la Réunion.
Certains des participants de ce Masters Tour de Juillet 2024 étaient également originaires de la Réunion. D’autres venaient de Suisse, de Belgique, du Vietnam, et de diverses régions de France ( Bretagne, Limousin, L’Est de la France, Champagne-Ardenne, Sud-Ouest, île de France….).
Bien-sûr, depuis mon retour du Japon le 29 juillet, j’ai repris le «travail ».
Le temps de faire un certain tri dans les photos et les vidéos que j’ai « faites » et de me mixer les neurones afin de décider quelle photo choisir pour débuter et comment m’y prendre au mieux pour constituer ce premier article, onze jours supplémentaires sont passés. Nous sommes désormais le samedi 10 aout 2024 et mon article n’est pas terminé. Il faut relire, rectifier, rajouter des photos et des vidéos. Se demander si tel passage est justifié. Si on a envie de le lire. Et, finalement, douter que cet article ait une raison d’exister, entre mégalomanie et folie.
J’avais 31 ans et étais célibataire sans enfant lors de mon premier voyage au Japon en 1999. L’année de la sortie du premier film Matrix que j’avais vu trois ou quatre fois dont une fois lors de ce voyage au Japon.
Je dois ce premier voyage à une amie qui résidait alors à Tsukuba, dans la banlieue de Tokyo, à une heure en train du centre de Tokyo. Grâce à elle et à son frère qui m’avait donné des conseils et m’avait appris ces quelques mots japonais qui m’ont à nouveau servi en 2024, j’avais vécu ce voyage extraordinaire.
Et cette semaine où je m’étais rendu seul à Kyoto – en prenant le shinkansen- ainsi qu’à Hiroshima et sur l’île de Miyajima.
Le numérique et internet, les réseaux sociaux, n’en n’étaient pas au stade où ils en sont aujourd’hui pour le pire et le meilleur. Et, je n’avais pas de blog. En plus de divers souvenirs, j’ai conservé les photos papier et peut-être leurs négatifs de ce séjour.
Je confirme que pour moi, comme pour d’autres, il y eut un « avant » et un « après » ce premier voyage au Japon. A mon retour du Japon, je dirais que j’avais gagné en lucidité sur moi-même. Et sur ce que je pouvais accepter ou refuser.
Cependant, même si je pratiquais encore le judo lors de ce premier voyage au Japon, j’y étais allé en touriste. Et en idéaliste du Japon, de l’Asie en général ou des Arts Martiaux. C’est peut-être en raison de cette attitude de touriste que j’ai pris autant d’années pour retourner au Japon alors que j’avais prévu d’y revenir.
Entre-temps, le Japon était devenu un peu plus touristique.
Au cinéma, le film L’été de Kikujiro (1999), puis Dolls ( 2002) et Zatoichi ( 2003) avaient renouvelé voire féminisé le public de Takeshi Kitano dont le film Sonatine ( 1993) avait été pour moi une marque cinématographique et personnelle lorsque je l’avais vu vers 1997 à Paris lors d’un festival consacré à un certain cinéma asiatique en direct de Hong Kong. J’y avais alors vu des films de « genre » de réalisateurs tels que Johnnie To, Kirk Wong et John Woo…
Kitano, de par ses « polars » faits de violence, d’humour noir et de poésie avait été le Japonais « infiltré » du groupe de réalisateurs présentés.
La France était devenue un pays de lecteurs de mangas. La Japan Expo ( à laquelle je ne suis jamais allé) avait été crééé ( en 1999-2000) et avait rapidement connu beaucoup de succès.
Le succès connu par le Japon s’étend peu à peu, depuis à peu près une dizaine d’années, à la Corée du Sud.
En 1999, le Japon était peut-être encore la Seconde ou la Troisième Puissance Mondiale. Peu avant notre séjour , en juillet 2024, le Japon est devenu la Quatrième Puissance Mondiale économique, dépassé par l’Allemagne et devancé par les Etats-Unis et la Chine. Le Yen avait perdu de la valeur et cela nous était favorable. 1 euro valait environ 171 yens en juillet 2024 durant ce Masters Tour.
Le voyageur que je suis
Je voyage souvent sans schéma. La plus grande partie de mon organisation consiste généralement à me décider pour une destination et à composer comme je peux le budget qui lui correspond.
D’emblée, dans un pays ou une région où je voyage, je pense assez peu à des endroits que je tiens particulièrement à « voir » ou à « visiter ». Ou alors très grossièrement. Ainsi, j’aimerais aller visiter l’Algérie ou un pays d’Afrique noire. Mais l’Algérie est un grand pays et l’Afrique noire est vaste.
C’est déjà bien que je puisse me dire que, en Algérie, j’aimerais bien voir « Alger la blanche », Tlemcen et d’autres villes. Car, ordinairement, j’en suis incapable.
Il m’est arrivé d’acheter des guides touristiques (sur le Japon ou ailleurs) ou d’en emprunter avant un voyage mais je ne les lis pas. Je le regrette car je me dis qu’ils sont très bien écrits et qu’ils fournissent des informations culturelles très importantes et très divertissantes. Mais je ne parviens pas à les ouvrir suffisamment.
Je suis plus réceptif à des suggestions que l’on peut me faire. J’écoute aussi et je marche facilement et beaucoup.
Comme un fou. Sans nécessairement savoir où je me rends.
En Yougoslavie, en 1989, alors que nous nous déplacions à pied et sans but, mon meilleur ami, qui me suivait, m’avait un moment dit :
« J’ai l’impression d’être avec un fou ! ».
Pas de plan, pas de boussole. Je suis en fait un peu comme un enfant qui apprendrait à marcher et qui découvrirait son environnement. Et qui croit à l’intemporalité.
Le Masters Tour créé et proposé par Léo Tamaki, à première vue, c’était plutôt l’opposé de tout cela. Mais avant de présenter un peu Léo Tamaki, je crois important de rappeler comment j’en suis arrivé à le « connaître ».
Une atmosphère de pandémie
J’ai eu tendance à raconter que j’avais découvert Léo Tamaki la première fois en regardant sa rencontre avec Greg MMA sur Youtube.
Mais à la réflexion, tout est parti, je crois, de la pandémie du Covid et de son atmosphère exceptionnellement anxiogène il y a quatre ans. En plein confinement. Aujourd’hui, nous sommes en plein dans l’ambiance estivale et festive des Jeux Olympiques en France. Et la France a remporté un certain nombre de médailles. Officiellement, tout le monde est content. C’est une ambiance détendue ou très détendue qui contraste avec celle des élections législatives anticipées qui se sont terminées la veille de notre départ le 8 juillet pour ce Masters Tour au Japon ainsi qu’avec celle connue dès le premier confinement lors de la pandémie du Covid en mars 2020. Même si elle camoufle bien des aspects préoccupants de l’actualité, je préfère évidemment l’ambiance de ces olympiades sportives à nos olympiades sanitaires durant la pandémie du Covid.
Durant la pandémie du Covid, à la télé, et sur les réseaux sociaux, au moins, nous nous faisions quotidiennement matraquer par les informations et les chiffres relatifs au Covid.
Tant de personnes hospitalisées après avoir attrapé le Covid, tant de personnes décédées.
C’étaient en permanence des auberges de Babel qui s’accordaient suffisamment afin de nous héberger dans une atmosphère de fin du Monde au travers de cet acharnement médiatique. Nous vivions sans la perspective annoncée de pouvoir reprendre un jour pied dans un horizon sanitaire et mental normal.
Alors infirmier dans un service de pédopsychiatrie, j’avais fait partie des professionnels et des personnes qui avaient continué de circuler, d’avoir donc le droit de prendre l’air lors de certains horaires et dans un certain périmètre. Et d’exercer.
Si le Covid m’avait physiquement épargné, j’étais néanmoins plus ou moins atteint psychologiquement et moralement, comme beaucoup, par cette angoisse collective, morbide. Et persistante.
Je n’ai pas de télé. Mais j’aime lire. Et près de mon service d’alors, dans le 13ème arrondissement, métro Gobelins, il y avait une centrale de presse demeurée ouverte.
Une oasis.
Je m’étais dit que lire et pouvoir choisir de lire était plus bénéfique que subir en continu les mêmes images.
Dans cette centrale de presse, j’avais commencé à regarder (et à acheter) des magazines consacrés aux Arts Martiaux. Sans doute Aïkido et Self & Dragon pour commencer.
Cette anecdote a son importance pour rappeler que les Arts Martiaux proposent des issues mentales, psychologiques, émotionnelles, intellectuelles et culturelles. Et qu’ils peuvent être des alliés dans une période de trouble à condition qu’ils permettent ou entretiennent une certaine capacité d’introspection, d’empathie et de réflexion. Ainsi qu’un certain optimisme.
En Psychiatrie adulte, je me rappelle encore d’un patient rencontré dans le service où je travaillais alors, dans les années 90. Ce patient, ancien champion de France de Taekwondo, avait une certaine capacité à reprendre le contrôle de lui-même lorsqu’il sentait qu’il commençait à s’agiter psychiquement. Et, il n’avait jamais fait partie de ces patients violents, irrespectueux, dangereux ou menaçants- malgré le déclin de son destin à son jeune âge ( moins de 30 ans)- que, de temps à autre, certains événements douloureux et tragiques poussent certains à associer à la psychiatrie.
Je sais aussi que, durant la pandémie du Covid, un Maitre de Kung Fu que j’avais rencontré à Paris une ou deux fois auparavant a gardé régulièrement le contact avec ses élèves via Facebook.
Et, je sais aussi que durant la pandémie du Covid, dès que cela avait été possible, un entraîneur de boxe française, dans ma ville de banlieue, à Argenteuil, a proposé régulièrement des séances d’entraînement en plein air sur un terrain de basket disponible voire sur un parking. Aux enfants comme aux adultes.
Ce sont des initiatives qui démontrent à la fois l’engagement de ces personnes mais aussi que la combattivité consiste aussi à savoir se maitriser comme à continuer de proposer autre chose que du pessimisme.
Je crois que beaucoup de personnes méconnaissent le fait que les Arts Martiaux mais aussi les sports de combat peuvent être des média d’optimisme voire d’une certaine liberté individuelle.
Au point que, de plus en plus, maintenant, je me sens embarrassé à dire que je suis parti au Japon « avec » un expert en Aïkido ou que je pratique un peu le karaté.
Parce-que je perçois plus rapidement le malentendu.
Parce-que, pour beaucoup de personnes, les Arts Martiaux se résument à du spectacle et à du combat. Cela revient à faire le grand écart et/ou le moonwalk comme Michaël Jackson ou à posséder des pouvoirs ou des « trucs » magiques et acrobatiques devant un public ébaubi. Ou à faire de l’EPS comme au collège lorsque certaines et certains déployaient tout leur génie afin d’en être dispensés.
Enfin, certaines personnes, pour des raisons, des croyances et des interdits qui leur sont propres, répugnent à passer par leur corps pour apprendre à s’extraire de leur condition. Cela demanderait trop d’efforts. Cela ferait mal ou l’on pourrait se faire mal. Et puis, cela stimule les glandes sudoripares et ça fait transpirer.
Pour ces personnes, les Arts Martiaux mais aussi les sports de combat doivent rester à distance à l’état de vitrine ou d’éclats ultimes sur un écran. Comme si les Arts Martiaux mais aussi les sports de combat, ou n’importe quelle activité physique et sportive, pour ces personnes, étaient le danger ou un déchet radioactif mortel implacable et irréversible qui pouvait les défigurer ou les anéantir.
A l’inverse, d’autres se saisissent des Arts Martiaux et sports de combat comme d’un élixir censé leur procurer tout ce qui a pu leur manquer à un moment de leur vie. C’est leur Durandal ou leur Excalibur.
La Pandémie du Covid a été un terrible révélateur.
Elle a d’abord eu pour effet de beaucoup nous contraindre physiquement, affectivement et mentalement (mais aussi économiquement) que l’on soit porteur ou non du virus. Mais aussi de nous révéler à quel point il était facile de nous écarteler (diviser) et de nous affoler.
Et, ces magazines consacrés aux Arts Martiaux que j’ai trouvés ont fait partie de ma petite panoplie de self défense mentale afin d’essayer de continuer à vivre au mieux.
Je crois que c’est de cette façon et dans ce contexte que j’ai entendu parler pour la première fois de Léo Tamaki. Et, je crois que ce contexte et ces raisons m’ont guidé vers lui et d’autres avant lui mais aussi après lui.
Léo l’a peut-être oublié aujourd’hui mais un ou deux ans après le début de la pandémie du Covid, un jour, je lui avais exprimé mes doutes quant au fait que celle-ci allait s’arrêter et qu’il serait possible de pratiquer à nouveau. C’était peut-être avant mon passage au Dojo 5 en été 2021 ( Dojo 5).
Très simplement, il m’avait alors fait part de sa certitude et de son optimisme. Je n’avais pas eu besoin de plus.
Masters Tour et Léo Tamaki
Le Masters Tour est un événement martial, touristique, culturel et personnel proposé depuis plusieurs années par Léo Tamaki, son frère Issei et celles et ceux qui les entourent et qui partagent avec eux un certain nombre de moments et de valeurs depuis des années (près de vingt années ou davantage). Parmi eux, on peut citer Tanguy Le Vourch et Julien Coup.
Il faut aussi citer Shizuka, la femme de Léo, très impliquée.
Et d’autres.
Léo Tamaki -qui est à l’initiative du projet et qui est en le chef d’orchestre- est un expert en Aïkido. Son CV martial est éloquent. Sa pratique martiale l’est tout autant. Quelques quarante années d’expériences ou davantage.
Bien avant l’Aïkido qu’il pratique et enseigne depuis plusieurs années maintenant, comme beaucoup de Maitres, Léo Tamaki s’était auparavant « configuré » dans d’autres disciplines martiales ou de combat. Je ne les ai pas toutes retenues. Mais je crois qu’il y a eu du judo, de la boxe thaï, du karaté…
Léo a du charisme et une autorité que peu de personnes, parmi celles et ceux qui ont pu l’approcher et le voir enseigner ou pratiquer, pourront contester.
On pourra juger que je fais ici dans la flatterie en vue de pouvoir gratter une réduction sur les tarifs du prochain Masters Tour ou en vue d’obtenir un abonnement gratuit à vie à la revue Yashima.
Pourtant, chaque fois que l’on parle d’un Maitre, d’un expert, d’un prof, d’un collègue, d’une histoire d’Amour ou d’une personne qui nous a laissé une impulsion salvatrice ou libératrice, celle-ci a toujours eue, de notre point de vue, un charisme, une connaissance et un savoir-faire qui étaient absents chez d’autres.
Et cela y compris sous d’autres latitudes que celles de la pratique martiale.
Je peux donc très facilement citer d’autres personnes qui, pour moi, ont ou ont eu un certain charisme bien qu’inconnus au plus grand nombre :
Stephan, Le prof de plongée qui, en Guadeloupe, m’avait fait passer mon baptême puis mes deux premiers niveaux de plongée ; Yves, le responsable de la section apnée du club dont je fais partie; Jean-Pierre Vignau, mon « prof de karaté préféré » comme celui-ci aime le dire en plaisantant dans les messages téléphoniques qu’il a pu me laisser. Mais aussi certains collègues dans mon travail à mes débuts ( ou à leurs débuts) et plus tard, en psychiatrie, et en pédopsychiatrie, dans les services où j’ai travaillé, lors de certaines situations. Des infirmiers psychiatriques, Bertrand, Bernard, Patrice, Daniel, Hugues, un interne en psychiatrie, Michaël, une infirmière, Katia, le premier pédopsychiatre avec lequel j’ai travaillé, le Dr Bruno Rist…
Du côté artistique et musical, je pourrais citer beaucoup d’artistes, de Miles Davis, à Cheikha Rimitti, en passant par Jacob Desvarieux. Albert Griffiths, Burning Spear jusqu’à Lana Del Rey bientôt au festival Rock en Seine…
Au mieux, l’émulation voire la compétition qui découlent de notre attirance pour le charisme d’une personnalité nous inspirent et amènent des grandes œuvres et des beaux projets.
Au pire, on se contente de singer le modèle, de quiproquos, de rapports de domination ou d’une admiration trop grande qui inhibe ou rend stupide.
A côté de ce charisme et de cette autorité, Léo a quelques particularités.
Il est par exemple très à l’aise avec les réseaux sociaux. Il tient un blog, poste régulièrement des vidéos ou des informations sur sa page Facebook. Il est plutôt à l’aise avec les interactions sociales ainsi qu’en interview : il ne passe pas son temps à regarder ses pieds ou à tchiper lorsqu’on lui adresse la parole.
En bon manager, il sait aussi très bien choisir ses associées, associés et partenaires directs. Et, régulièrement, il crée et propose des événements au grand public qui sont des projets stimulants sans aucun doute pour « ses » troupes mais aussi très exigeants en implication personnelle et en travail d’organisation… et d’improvisation.
Pour ma part, je ne sais pas faire “tout” ça ou je ne le souhaite pas.
Ce Masters Tour au Japon, comme les précédents et comme ces stages d’Aïkido KishinTaïkaï proposés par Léo et par les enseignants de son école, est ouvert aux pratiquants d’autres disciplines, qu’ils soient experts ou débutants.
Il est d’autres événements proposés ailleurs, par d’autres experts ou Maitres d’Arts Martiaux, mais ce séjour au Japon a fait partie des bonus pour moi.
Motivations et conditions pour participer au Masters Tour :
« Surtout, ne regarde pas à la dépense ! »
C’est ce que m’a recommandé avant ce Masters Tour, cette même amie qui, vingt cinq ans plus tôt, m’avait encouragé à faire un prêt avant mon premier voyage au Japon.
Lorsque j’ai revu cette amie à Paris deux ou trois semaines avant mon départ, je me souviens avoir été étonné par son regard au moment de nous dire au revoir près de la gare de l’Est.
J’étais dans la mesure pratique de mon quotidien. J’allais retourner au Japon et je me focalisais sur des démarches à faire dans tel ou tel domaine comme, par exemple, bien m’assurer de l’inscription administrative de ma fille au collège ou, simplement, recevoir l’officialisation de son passage en sixième. Le regard de mon amie, lui, dardait de joie pour moi. Elle, elle était déjà dans l’avion pour moi.
Je suis venu en amateur à ce Masters Tour. En amateur du Japon. En amateur des Arts martiaux. En Amateur de la vie.
En curieux.
Sans trop d’attentes démesurées, je crois.
Si je peux donner beaucoup de ma personne dans divers domaines, j’ai du mal à me percevoir comme un passionné des Arts Martiaux ou de quoique ce soit. Même si cela peut me flatter- et m’étonner- que l’on me puisse me décrire de cette manière.
Budget pour le Japon
Les premières fois que j’ai vu les tarifs du Masters Tour, le prix de ce voyage m’est apparu exorbitant voire mégalo :
5000 euros pour trois semaines.
C’était à peu près il y a deux ans. Avant de participer pour la première fois aux 24 heures du Samouraï au dojo d’Herblay en 2023, un événement également proposé par Léo et les enseignants et pratiquants de l’école d’Aïkido Kishin Taïkaï. ( voir Les 24 heures du Samouraï 2024 ).
Puis, je me suis rappelé que le Japon est une destination chère. Je vois le séjour au Japon comme un séjour réservé à des privilégiés ne serait-ce que d’un point de vue économique.
En 1999, j’avais d’abord payé environ 7800 francs mon billet d’avion puis 1200 francs un pass hebdomadaire pour prendre le shinkansen. J’avais alors cru avoir fait le principal en termes d’effort financier.
Puis, quelques jours avant mon départ, j’avais lu qu’il fallait un budget compris entre 500 et 1000 francs par jour pour passer des vacances au Japon. J’allais y passer trente jours contre 21 lors de ce Masters Tour.
En 1999, peu avant mon départ pour le Japon, je ne disposais pas de ces 500 à 1000 francs par jour.
Sur les conseils d’une amie, j’avais alors demandé et obtenu un prêt revolving de 20 000 francs que j’avais ensuite remboursé en deux ans.
Un prêt que je n’ai jamais regretté d’avoir demandé et obtenu. J’avais alors été très à l’aise financièrement durant mon séjour d’un mois au Japon.
Les 30 000 francs de l’époque équivalent sans aucun doute à peu près aux 5000 euros nécessaires cette année afin de pouvoir participer à ce Masters Tour et être logés. Et, en plus, lors de ce Masters Tour, nous allions rencontrer des Maitres d’Arts martiaux, pratiquer, visiter différents endroits auxquels spontanément, je n’aurais pas pensé, avec quelqu’un qui connaissait le pays bien mieux que moi et qui en parlait la langue.
Bien-sûr, il fallait prévoir aussi les frais annexes :
repas, restaurants, dépenses diverses et personnelles ( vêtements, électronique, mantras, baleines, autres…).
Mon voyage de 1999 avait été extraordinaire. Celui de ce Masters Tour le serait vraisemblablement aussi.
J’ai à nouveau fait le nécessaire afin d’être détaché le plus possible des éventuelles contraintes financières de l’expérience. En partant pour ce Masters Tour, j’avais prévu un budget dépenses situé entre 4000 et 5000 euros.
J’avais aussi payé deux cartes e-sim ( Holafly et Provider. Ma préférence va à Holafly) avec un forfait illimité durant trente jours. J’avais aussi pris chez mon opérateur, Orange, un forfait pour une heure d’appels depuis le Japon.
Et, je m’étais acheté auparavant deux smartphones reconditionnés, donc à prix réduit, qui acceptaient la carte e-sim. Un smartphone pour la messagerie WhatsApp, internet, les réseaux sociaux, les éventuels appels, les photos et les vidéos.
Et un autre smartphone, plus performant, pour les photos et les vidéos.
Léo nous avait recommandé de nous encombrer le moins possible pour faciliter nos déplacements et, donc, d’opter pour une valise d’une certaine contenance. Ni trop grande, ni petite. Je n’en n’avais pas. J’étais donc parti en acheter une et elle m’a donné satisfaction durant le séjour. C’est désormais ma compagne et ma fille qui en profitent à la Réunion.
On peut me trouver très à l’aise financièrement. Alors, je rappelle mon âge :
56 ans, cette année. Cela fait plus de trente ans que je travaille et mon précédent voyage au Japon datait de 1999. J’ai donc particulièrement tenu à refuser que l’aspect financier vienne me gâcher ce voyage peu ordinaire.
Le prix des billets pour certaines épreuves olympiques ( j’ai entendu parler de 7000 euros pour une place de spectateur en finale d’athlétisme du 100 mètres aux JO de cette année en France) m’a d’autant plus conforté dans l’idée que mon argent était « mieux » employé en partant pour le Japon. Même si, plus tard, j’ai profité d’une opportunité pour racheter deux places afin d’emmener ma fille assister à des épreuves de Judo aux Jeux Olympiques.
Et, aujourd’hui, en voyant ce que nous avons ” connu” durant ces trois semaines, je considère que notre argent a été très bien utilisé. A mon avis, nous avons plus fait en trois semaines que d’autres vacanciers en un mois ou davantage :
Jusqu’à trois à quatre visites de temples, parcs ou de musées ( ou plus) certains jours. Les entraînements. Les Maitres. Nous avons pris le Shinkansen quatre ou cinq fois ( ou plus). Nous avons changé d’hôtel cinq ou six fois ( ou plus). Dans des hôtels plutôt haut de gamme, très éloignés des standards du formule 1, et proches des gares.
Tokyo, Kyoto, Inosaki, Kurashiki, Hiroshima, Himeji, sont les villes où nous avons séjourné. Et, j’en oublie peut-être une ou deux.
Nous avons régulièrement reçu des suggestions de lieux à visiter là où nous nous trouvions.
Nous avons aussi eu deux repas au restaurant tous ensemble.
Les 140 du Masters Tour :
Je n’ai rien d’original.
Sans doute que beaucoup d’autres sont venus à ce Masters Tour en ayant à peu près les mêmes préoccupations tant financières que personnelles.
Cette année, nous étions un peu plus de 140 à venir probablement pour des raisons identiques au départ ( 142 exactement). Et aussi pour avoir « suivi » Léo Tamaki sur les réseaux sociaux ou pour l’avoir rencontré lors d’un stage d’Aïkido KishinTaïkaï ou aux 24 heures du Samouraï.
Puisque Léo Tamaki passe environ 200 jours par an à animer des stages d’Aïkido un peu partout dans le monde. Et qu’il publie régulièrement au moins sur Facebook.
142, c’était plus que les autres fois où, au plus haut, il y avait eu jusqu’à 90 participants. Ce qui était déjà beaucoup comparativement à la trentaine de participants présents lors d’éditions précédentes. J’ai eu connaissance de ce chiffre de 142 participants vraisemblablement quelques jours avant notre départ.
Certains participants sont restés deux semaines au Masters Tour. D’autres, trois. Certains participants étaient déjà venus au Japon lors d’un Masters Tour. Un des élèves de Léo revenait pour la quatrième ou cinquième fois au Japon dans ces circonstances. Je lui envie cette expérience.
De par ma participation aux 24 heures du Samouraï de 2023 et de 2024 au dojo d’Herblay, je connaissais de vue plusieurs participantes et participants. Le fait aussi de prendre des photos et de filmer lors de ces deux éditions des 24 heures du Samouraï m’avait permis de mémoriser certains visages. Autrement, j’ai découvert sur place tous les autres lors du séjour.
Ainsi que “mes” co-locataires.
Puisque j’ai partagé ma chambre d’hôtel avec un inconnu. D’abord L…, pratiquant de karaté shotokan. Puis, G, pratiquant d’Aïkido après que sa femme et leurs deux enfants soient retournés en France après la deuxième semaine.
J’ai aussi appris sur place que cette année correspondait à la dixième année de la création de l’école d’Aïkido Kishin Taïkaï crééé par Léo, Issei, Tanguy et Julien.
J’avais bien sûr imaginé que nous serions nettement moins nombreux que 142. Mais ce chiffre ne m’a pas rebuté.
Ce « succès » vient sûrement de la médiatisation de Léo via ses stages, les événements tels que Les 24 heures du Samouraï et sa présence sur les réseaux sociaux.
J’insiste sur ce point de la médiatisation et des réseaux sociaux car bien des experts et Maitres d’Arts Martiaux toujours en activité passent inaperçus ou sont oubliés en raison d’une certaine invisibilité médiatique, voulue ou subie, faisant d’eux peut-être ce que l’on appelle des Kage Shihan. Si je ne me trompe pas, ce terme qui signifie « Maitre de l’ombre » m’a très vite intrigué lorsque je l’ai découvert et me rappelle aujourd’hui, aussi, ces thés d’ombre qui peuvent être produits au Japon également.
Si la médiatisation peut apporter son cortège d’embarras et nécessiter un investissement personnel particulier, elle peut aussi, si elle est bien maitrisée et bien tolérée, avoir un certain nombre d’avantages pratiques. Mais nous ne sommes pas tous à l’aise de la même façon avec la médiatisation ou avec le fait d’être en interaction constante ou répétée avec nos semblables.
Désillusions
Ce sont des désillusions que j’ai déjà pu connaître ailleurs et que je pourrais à nouveau vivre comme chaque fois que je me fais une certaine idée préconçue de ce que je veux trouver ou des personnes que je veux rencontrer. Et que j’anticipe trop le déroulement d’un événement car je suis plus dans l’attente d’un signe, d’un geste, d’un événement ou d’une ouverture que je souhaite.
J’ai sûrement trop idéalisé les interactions sociales et humaines que j’attendais lors de ce Masters Tour 2024.
Je les voulais selon mes souhaits.
Je m’imaginais que des pratiquants d’Arts martiaux auraient les mêmes perceptions que moi. Qu’ils seraient « ouverts » et plutôt zen.
J’ai déchanté. Et c’est normal.
Je me croyais sans doute parti en colonie de vacances où je me ferais beaucoup -et facilement- des nouveaux amis. Mais du temps est passé depuis l’enfance et l’adolescence. Et, la vie, voire le combat, c’est assez souvent le contraire de ce que l’on prévoit :
Les gens réagissent différemment de ce à quoi l’on s’attend.
Je me ferai peut-être des amis à la suite de ce Masters Tour 2024 -ou même des ennemis à la suite de la lecture de ce passage dans cet article- mais cela prendra un peu plus de temps que prévu.
Je me rappelle que les premières fois que j’avais rencontré mon meilleur ami au collège, il m’était insupportable. Et, il avait fallu plusieurs années pour que nous devenions amis.
Toutefois, il importe rapidement d’apporter de la nuance et des précautions à mes propos :
J’ai bien sûr connu des moments répétés de détente et de visites, improvisés et décidés avec d’autres participants du Masters Tour 2024.
J’ai même pris la liberté certaines fois de rester dans mon coin.
Mais, visiblement, en d’autres circonstances, mes priorités sociales différaient de celles d’autres participantes et participants.
Contrairement à la majorité des pratiquantes et des pratiquants du Masters Tour, En Aïkido, je ne connais pas grand-chose. En karaté shotokan, à peine beaucoup plus.
Mais, à mon avis, le Masters Tour concerne autant le comportement sur le tatami et en tenue que seul, face à soi-même, et en dehors du tatami.
Et, dans certains compartiments de la vie sociale, là, j’ai été très étonné.
Pendant ces trois semaines, j’ai pris soin, un certain nombre de fois, d’essayer d’aller vers les autres. De discuter avec eux. D’apprendre leurs prénoms.
Vers autant de personnes que je le pouvais. Je n’y suis pas toujours parvenu. Mais je sais avoir essayé. Et je crois avoir retenu plus de prénoms que de participants n’ont retenu le mien. J’ai aussi bien vu que d’autres participants étaient assez isolés par intermittences en dehors du tatami.
Parallèlement à cela, un certain nombre de participantes et de participants ne s’embarrassaient pas avec ce genre d’applications sociales superflues. Elles et Ils ont néanmoins peut-être essayé au début du Masters Tour d’aller vers les autres.
Ce sont peut-être aussi des réactions dues au fait de se retrouver soudainement dans un grand groupe avec des personnes (ou un voisin de chambre) que l’on n’a pas choisies. Et de se voir et de se revoir fréquemment en grand nombre plusieurs jours durant. Alors que cela n’est pas dans nos habitudes.
On reste entre soi. Avec des personnes que l’on connaît déjà (souvent depuis des années) ou avec lesquelles on est (déjà) venu à des Masters Tour précédents. On passe sans dire bonjour. Celle ou celui que je ne connais pas ou qui n’est pas de ma discipline martiale ou de mon niveau n’existe pas. Ou très peu.
On se précipite pour rester avec celles et ceux que l’on connaît déjà et avec lesquels on rigole devant les autres qui sont là mais qui n’existent pas. A l’hôtel, on sort de l’ascenseur que l’on a pris avec un des participants du Masters Tour sans lui dire au revoir une fois arrivé à notre étage. Voire, on lui passe devant pour rentrer dans l’ascenseur alors qu’il attendait avant nous.
Il m’est arrivé de penser que cela faisait partie des épreuves informelles et implicites du Masters Tour. Qu’il s’agissait que le nouveau ou l’inconnu se fasse connaître et accepter ou endure l’épreuve de l’anonymat. Après tout, dans certaines traditions d’apprentissage, le petit nouveau ou la petite nouvelle n’a pas de visage, de nom ou même de matière. Elle ou il est là pour apprendre, pour servir, pour se taire. Et, avec du travail et de la patience, petit à petit, son statut évoluera. Si elle ou il persévère.
On était bien entre guerrières et guerriers ?! Donc, pourquoi se préoccuper des autres et de ces facilités- des hypocrisies ! – sociales qui nous font croire que tout nous arrive toujours tout cuit dans la bouche, sans se battre et sans persévérer et que tout le monde nous aime toujours ?
Cependant, ces attitudes d’évitement étaient par moments tellement caricaturales – voire comiques- qu’elles relevaient davantage, de mon point de vue, d’une difficulté à entrer simplement en relation avec celle ou celui que l’on ne connait pas. Qui est peut-être un ennemi déguisé sous les traits d’un participant ou d’une participante au Masters Tour…
Dire bonjour à quelqu’un était peut-être plus difficile à prononcer pour certaines et certains que d’avaler du cyanure. Pareil pour le simple fait de dire au revoir.
Il a pu arriver qu’à la fin d’une séance d’entraînements avec un Maitre, comme je prends beaucoup de photos, que certains se rappellent subitement de mon prénom et de mon existence afin de me demander si je les avais pris en photo. J’ai alors toujours donné la même réponse :
Non.
Mais je suis sûrement beaucoup trop photosensible. Et j’exagère sans doute. Je me la pète aussi très certainement beaucoup.
Il y a eu néanmoins des éclaircies, je le répète. Des périodes où j’ai connu des moments agréables avec d’autres. Il y a aussi eu ces moments ou ces rencontres et discussions imprévues devant la laverie automatique.
Et, je le précise : j’ai vu d’autres participants être par moments isolés, sans doute par choix, mais aussi, à mon avis, parce qu’ils avaient commis l’erreur ou la faute de venir seuls au Masters Tour ou de ne pas faire partie d’un groupe, duo ou trio.
Une certaine logique aurait aussi voulu que je rejoigne et que je me « colle » à d’autres adeptes du karaté shotokan parce-que je pratique un peu le karaté shotokan. Sauf que mon identité et ma valeur, c’est d’abord mon prénom, mon nom de famille ainsi que mon histoire personnelle. Et non le fait de porter une ceinture de telle ou telle couleur dans une discipline donnée qu’elle soit martiale ou autre :
Je suis une personne avant d’être un pratiquant que ce soit de karaté ou d’une autre pratique. Et, même si la pratique martiale- ou une autre pratique- révèle toute ou partie de la personne que l’on est, on dira que je mets ma personne- donc sans doute mon ego- avant le pratiquant que je suis ou peux être.
Et, pour moi, ça commence souvent par « Bonjour » voire, plus difficile, de connaître mon prénom. ça donne peut-être une idée de la très haute opinion que j’ai de moi-même et aussi de mon ego surdimensionné.
Mais, visiblement, d’autres participantes et participants ont eu le réflexe inverse. Et, j’aurais eu plus « d’attraits » y compris d’un point de vue sociétal si j’avais eu tel niveau et tel parcours plus ou moins accompli et reconnu dans telle pratique martiale.
Je crois que c’est une erreur de la part de ces pratiquantes et pratiquants d’avoir eu ce comportement quel que soit leur niveau avancé dans leur pratique martiale qu’il s’agisse d’Aïkido ou de karaté.
Je répète aussi que j’ai déjà assisté peu ou prou à ce type de comportement dans d’autres domaines :
Lorsqu’il m’est arrivé de faire du journalisme cinéma en tant que bénévole, j’ai pu croiser des journalistes cinéma professionnels, certes réputés et rémunérés, mais que j’ai perçus comme des handicapés de la relation sociale. Je me rappelle de mon enthousiasme à m’adresser pour la première fois, lors d’une projection de presse, à un journaliste cinéma de Télérama dont j’avais lu des critiques. Le ton sur lequel celui-ci m’avait répondu ne disait rien de ses jours de fête. J’avais rencontré des personnes beaucoup plus joyeuses à un enterrement.
J’ai aussi pu trouver excessif et ridicule de voir certaines attachées de presse mettre sur un piédestal certains journalistes employés par des média renommés tel Télérama. Qu’est-ce qui m’avait fondamentalement séparé de ces journalistes cinéma mis sur un piédestal ?
Le fait que j’écrivais pour un média moins diffusé en tant que bénévole. Il aurait suffi où il suffirait que demain, j’écrive ou travaille pour un média reconnu et important et, là, on me donnerait du « Monsieur » même si mes articles sont écrits par une banane en décomposition.
Dans « mon » club de karaté, il a pu arriver qu’un pratiquant nécessairement bien plus ancien que moi et plus gradé se contente de m’appeler « Ceinture jaune ! ». J’ai alors expliqué calmement que mon prénom était très différent. Et, intérieurement, il m’est arrivé de m’amuser en considérant que ces anciens (qui peuvent être nettement plus jeunes que moi) ont connu principalement un seul club de karaté ou deux, situé à quelques minutes de leur domicile alors qu’il me faut une heure de transport, et que je n’ai jamais vu aucun d’eux aux 24 heures du Samouraï.
Dans un service de psychiatrie adulte où il m’arrivait de faire des remplacements, une infirmière du service dont je connaissais le prénom m’avait interpellé un jour, comme je revenais, de la manière suivante :
« Pédopsy ? ». Elle avait eu une soudaine réminiscence. Je lui avais confirmé puis répondu :
« Mais, tu sais, mon prénom, ce n’est pas pédopsy… ».
Ces exemples pour montrer que ce qui s’est passé avec certaines participantes et certains participants du Masters Tour est assez courant ailleurs. Ces personnes ne sont pas forcément des mauvaises personnes y compris celles qui se sont estimées supérieures en raison de leur niveau de pratique martiale nettement plus avancé que le mien. Parmi elles, des rencontres humaines et des interactions sociales viables, prospères et profondes sont possibles. Mais cela passe par différentes étapes proches de l’orpaillage. Il faut prendre le temps de se trouver et de se connaître. Et, à la fin de ce Masters Tour, j’ai aussi remarqué que certains, plus distants ou indifférents en apparence à première vue m’avaient identifié et commençaient à s’autoriser à me parler un peu.
J’avais simplement idéalisé- et cru- de manière enfantine qu’au travers des Arts Martiaux, il était plus simple de rencontrer d’autres êtres humains.
Si les Arts Martiaux peuvent être des média, ils peuvent aussi servir de masques ou d’armures. C’est peut-être d’ailleurs l’un des messages du dernier film de Bruce Lee, de son vivant, Opération Dragon.
Lors du Masters Tour, à notre arrivée à la gare de Kurashiki, nous avons eu la surprise de devoir porter nos bagages dans les escaliers pour nous rendre jusqu’à l’hôtel situé à à peine dix minutes à pied. Je n’en veux pas à Léo et à Issei malgré la cadence imprimée au groupe afin d’arriver à une certaine heure à l’hôtel. Par contre, embarrassé par mes bagages, je ne pouvais pas aller aussi vite que le reste du groupe. Quelques minutes plus tôt, en descendant les marches d’escaliers, quelques participants avaient failli être les témoins d’une superbe cascade que j’avais failli réaliser malgré moi avec ma valise. Je dois à des réflexes et au fait d’avoir porté mes Doc Martens d’avoir pu rétablir la situation. Autrement, je me serais quelque peu fait mal en tombant avec ma valise de vingt kilos. Ce petit incident m’a stupidement incité à la prudence par la suite.
Or, l’état d’esprit « Sauve qui peut ! » et « Chacun pour soi ! » l’a emporté chez beaucoup. Et, arrivés à la gare de Kurashiki, seul comptait le fait de suivre le rythme pour arriver à l’hôtel.
Un seul participant du groupe a eu la présence d’esprit de se retourner et de voir que j’étais à la traîne. Et de m’attendre. Chargé comme je l’étais, je ne pouvais pas faire plus et plus rapidement que je ne le faisais.
Sans ce participant, j’aurais trouvé l’hôtel puisqu’il n’était pas loin de la gare et que nous avions reçu les informations le concernant sur la messagerie whatsApp.
Par ailleurs, au Japon, on se sent en sécurité et, à aucun moment, je ne me serais senti sur un champ de bataille ou en pleine guerre de gangs.
Mais j’ai été très étonné par cette absence d’attention du groupe pour quelqu’un d’autre. Et cette façon de foncer tête la première vers la destination qui était l’hôtel dans cette ville que nous découvrions tous, pour la plupart. Et, je suis persuadé que j’aurais eu cette attention pour quelqu’un d’autre à l’image de celle qu’a pu avoir ce participant et pratiquant expérimenté pour moi.
Une attention qui, même si elle lui a semblé tout à fait normale, et qu’il a sans doute aujourd’hui oubliée, est pour moi devenue quasiment indélébile dans ma mémoire.
J’exprime ici quelles ont pu être mes désillusions, et mes incompréhensions, par moments, lors de ce Masters Tour.
Mais il était sûrement impossible pour quiconque d’échapper à une quelconque désillusion ou incompréhension, à un moment ou à un autre, lors de ce Masters Tour. Un Masters Tour dont la plus grande partie du tracé était dirigée. Et où il a été nécessaire, régulièrement, de toutes façons, de s’adapter à diverses échéances et circonstances. Au point, qu’il m’est arrivé de me dire qu’en participant à ce Masters Tour, on faisait partie intégrante- jusqu’à un certain point- du système Tamaki.
Mais il y a le « système » Tamaki et la façon dont on reste soi-même. Etre perçu à ce point par moments comme un corps étranger, par certaines et certains, m’a dérangé.
Corps étranger
J’estime avoir autant voire plus appris durant ce séjour de mes interactions avec les autres participants et de mes quelques déambulations et observations au Japon que de mes pratiques sur les tatamis ou lors des séances d’entraînement :
Quand, lors de la deuxième semaine de ce Masters Tour, j’ai « oublié » mes armes dans le bus à Kyoto, j’étais certes fatigué et distrait, mais j’avais aussi manqué de présence et ne faisais pas suffisamment corps avec elles :
Même fatigué et distrait, je n’aurais pas oublié ma fille dans un bus que ce soit à Kyoto ou ailleurs. J’ai oublié ces armes dans le bus (finalement retrouvées grâce au concours de Megumi et Maki, deux de nos guides japonaises) car elles étaient alors pour moi des corps étrangers.
Après avoir oublié ces armes, et en avoir été privé durant deux jours, j’ai perçu leur importance et leur singularité lorsque j’ai compris qu’il était difficile d’en retrouver des semblables vu qu’elles avaient été constituées dans ce bois rare et léger dont Léo nous avait parlé avant notre départ.
Deux leçons fondamentales
Les deux leçons martiales fondamentales (ou autres) que je retiens, pour l’instant, sont d’abord ces deux commentaires que m’ont faits tour à tour Léo puis Issei en pleine séance :
« Tu es trop bienveillant ». « Tu réfléchis ? » (synonyme de « Tu réfléchis trop »).
Je trouve que cela me concerne beaucoup tant dans la vie que sur un tatami.
Pas tout le temps.
Mais suffisamment pour m’empêcher d’évoluer certaines fois. Depuis plusieurs années, j’ai plus (tenu) à développer mon côté bienveillant qu’à développer mon côté tranchant. Mon côté tranchant me fait peur. Alors, je le retiens comme je le peux par un excès de bienveillance.
Il arrive que de temps à autre, on me dise :
« C’est parce-que tu es infirmier en pédopsychiatrie et en psychiatrie..tu as la vocation etc…. ».
De la même manière que j’ai démenti être une personne passionnée, je vais ici démentir le fait d’avoir une quelconque vocation pour le métier d’infirmier comme le fait d’être « bienveillant » par effet de ruissèlement parce-que je suis infirmier en pédopsychiatrie et en psychiatrie.
Certains tortionnaires ont pu être et sont des médecins ou des soignants. Je pourrais très bien faire partie de ces tortionnaires.
Pour simplifier, « L’ère » nazie a donné de « bons » exemples de médecins tortionnaires. Et, malheureusement, je n’ai aucune difficulté à concevoir que lors du génocide des Tutsi au Rwanda, en 1994, des soignants hutus aient participé au massacre. Dès lors qu’une forme de folie meurtrière devient « normale », « féconde » et « collective », toutes les catégories sociales et professionnelles peuvent se révéler zélées et entreprenantes pour participer au “grand projet” qu’est un génocide. C’est un véritable film d’horreur mais pour de vrai.
Il ne suffit pas de porter une blouse blanche pour devenir bienveillant. On a une certaine bienveillance et attention en soi, de manière spontanée et stimulée, qui, ensuite, selon le domaine professionnel et économique où l’on exerce, et selon la conscience que l’on a de soi et des autres, va et peut se développer ou non en fonction des conditions de travail qui sont les nôtres que l’on accepte ou que l’on refuse.
J’aurais pu être tout autant quelqu’un de bienveillant et exercer en tant que journaliste ou avocat.
Une journaliste comme Laurence Lacour ( autrice de Le bûcher des innocents) un journaliste comme Ted Conover ( auteur de Là où la terre ne vaut rien) ou Joseph Kessel lorsqu’il a écritAvec les Alcooliques anonymes ont à mon avis une bienveillance supérieure à bien des personnes.
La bienveillance part d’eux. Ensuite, ils sont parvenus à la monnayer ou à en faire un métier mais aussi un moteur de leur carrière.
Moi, j’en suis au stade où je pense que ma bienveillance voire ma « sur » bienveillance est un moyen, aussi, pour moi, de distraire ma violence. Ou de l’utiliser à des fins que j’estime plus utiles et réparatrices. C’est une façon de la maintenir à distance. Par devoir et aussi par choix. Parce-que savoir ordonner sa propre violence au point de savoir l’utiliser afin d’en faire une œuvre d’art ou une œuvre socialement responsable et collective, c’est donné à peu de personnes :
Le plus souvent, lorsque l’on est coutumier de l’usage de la violence, soit on détruit son entourage, ses relations et son environnement et/ou soit on se détruit soi-même.
Picasso et Miles Davis étaient des personnes violentes et destructrices. Mais malgré tout, ils ont pu créer et c’est ce que beaucoup préfèrent retenir et admirer. A mon sens, Amy Winehouse s’est autodétruite quasiment en direct live et c’est la raison pour laquelle j’ai beaucoup de mal à comprendre comment des gens ont pu avoir du plaisir à assister à certains de ses concerts. Et, j’ai du mal à aimer sa musique pour les mêmes raisons. Une musique que je trouve en plus excessivement rétro comme corsetée dans une époque qui ne pouvait pas la retenir.
Par extension, je ne crois donc pas que les soignants en blouse blanche soient des êtres totalement pacifiés et expurgés de tout conflit intérieur et intrapsychique. Leur blouse blanche leur sert de digue ou de barrage, comme le kimono ou le hakama pour d’autres, et la profession que servent ces blouses blanches a des codes, des interdits, dont on peut retrouver des équivalents dans la Loi ou dans une religion qui donnent un cadre, des repères et des guides.
Le but de ce cadre, de ces repères et de ces guides, c’est d’éviter que la sauvagerie ne prenne le dessus sur l’Humanité et de permettre à cette dernière de subsister, de s’exprimer et de se consolider le plus possible.
Mais tout excès, même lorsqu’il s’agit de bienveillance, est à atténuer.
C’est peut-être pour cela que, instinctivement, de plus en plus, je me rapproche des Arts Martiaux bien-sûr mais aussi….des armes blanches.
Acheter un iaitō :
Je n’étais pas du tout venu au Japon avec l’intention d’acheter un iaitō.
Lorsque Léo en parlait dans ses mails plusieurs mois avant ce Masters Tour 2024, je ne me sentais pas du tout concerné. Je voyais cela comme une espèce d’excentricité coûteuse et décorative. Ou comme une recherche du spectaculaire. Je pensais aussi au katana posé sur un mur pour faire joli ou pour intimer :
«Mon secret, c’est que je suis un samouraï, une personne très redoutable, car j’ai un katana commandé sur internet accroché au mur dans mon salon ».
J’ai quelques fois la naïveté de croire que les personnes les plus redoutables sont aussi celles qui savent se rendre parfaitement indétectables et se fondre dans la masse. On l’a très bien « vu » (malheureusement) avec les terroristes islamistes ces dernières années.
Et puis, un des participants du Masters Tour a choisi un iaitō devant moi dans la boutique Sakuraya.
Curieux, je l’ai regardé faire. Il a été conseillé par Issei.
Ensuite, puisque j’étais là, autant en profiter pour toucher. J’en ai sorti un ou deux de leur fourreau avec autant de précaution que mes mains mal habitées le pouvaient.
J’ai ressenti quelque chose. J’ai ressenti de la vie. Ce n’était pas un objet ni un geste inerte. C’était une action qui, le fait de sortir et de manier cette arme, de manière répétée, apprise, maitrisée, pouvait faire grandir en moi un certain apaisement.
Je peux vraiment dire que c’est ce que j’ai ressenti plus que ce que j’ai vu ou l’envie de posséder une « arme » qui m’a incité à faire cette acquisition mais aussi à m’embarrasser ensuite à la porter d’hôtel en hôtel, de shinkansen en shinkansen jusqu’à l’aéroport.
Alors que voyager léger et le moins encombré possible facilitait beaucoup nos déplacements avec nos bagages.
Lorsque je suis reparti de la boutique Sakuraya, tout, dans l’attitude solennelle du vendeur expérimenté m’indiquait que j’avais acheté un objet important. Ou qu’il me confiait un objet important.
A mon retour en France, j’ai commencé à chercher des cours de iaido. Et, quotidiennement, je sors mon iaitō. Miles Davis disait qu’un musicien a besoin de toucher son instrument tous les jours. Je me dis que ce iaitō n’est pas un objet de décoration et doit (me) devenir un corps familier. Je fais sûrement des erreurs grossières et ridicules lorsque je l’emploie en attendant de prendre des cours. Mais je le préserve de la poussière.
Quelques jours après avoir acheté “ce” iaitō, j’aurais aimé m’être aussi fié à ce que je ressentais en touchant un Jeans à Kurashiki. J’ y ai délaissé un Jeans auquel je continue de penser depuis.
Car j’ai voulu me raisonner. Je porte très occasionnellement des Jeans. Et je n’avais aucune intention d’acheter une paire de Jeans en venant au Japon. Or, j’en avais déjà acheté deux.
J’ai un moment envisagé de faire le trajet Tokyo-Kurashiki pour aller le chercher. Ce qui aurait ramené ce Jeans quasiment au prix d’un diamant !
J’ai quand même vécu beaucoup de bons moments là-bas. Alors, pourquoi, à certains moments ai-je disparu du groupe ?
La vie en groupe, première semaine :
J’ai écrit qu’un certain nombre de participantes et participants sont restés entre eux. J’ai néanmoins bénéficié aussi des avantages du groupe ou des petits groupes en diverses circonstances.
Durant la première semaine, je me suis abreuvé principalement aux groupes. Je suivais le groupe dans lequel je me trouvais. Que ce soit pour prendre le shinkansen, le train, le bus, les visites. Prendre un verre.
C’était très agréable. Je faisais le touriste. Cela me permettait de socialiser. Cela était très confortable et je n’avais pas beaucoup à réfléchir sur ce qui m’environnait. Tout ce que j’avais à faire, c’était être à l’heure et faire avec les autres ou comme tous les autres.
Au préalable, j’avais toutefois effectué le minimum. J’avais pensé à retirer des yens en espèces dès le début de mon séjour par 50 000 yens (environ 260 euros au cours actuel de 1 euro = 171 yens, un taux très avantageux pour l’euro). J’avais acheté un téléphone portable reconditionné qui acceptait la carte e-sim et j’étais relié en permanence (et très facilement) aux divers groupes whatsApp du Masters Tour 2024.
Nos journées étaient quotidiennement rythmées par l’engrais des informations qui venaient régulièrement fertiliser nos messageries whatsApp.
La vie en groupe, deuxième semaine : Ne Pas déranger
En début de deuxième semaine, j’avais digéré le décalage horaire et avais commencé à comprendre dans quel pays je me trouvais. Dont certaines de ses règles liées à la ponctualité qui consiste à être en avance de dix à quinze bonnes minutes. Ainsi que le principe « Ne pas déranger » rappelé régulièrement par Léo et Issei.
Mais, surtout, j’ai alors fait une grande découverte :
J’étais devenu un bovidé.
Je me contentais de suivre et de boire à grands traits quand on me le disait et là où l’on me disait quand le faire. Moi, qui, en 1999, sans internet et la téléphonie mobile actuelle, avais pu circuler seul, une semaine durant au Japon, prendre le shinkansen, aller à Kyoto, Hiroshima. Dans le Japon de 1999 qui était bien moins touristique que celui « retrouvé » cette année où on a pu facilement entendre parler Français, Anglais ou Américain. Mais où j’ai aussi pu croiser un Ukrainien qui y vit depuis une dizaine d’années ainsi que des Nigérians.
C’est probablement au début de cette deuxième semaine que j’ai vraiment vu que certaines et certains préféraient rester entre eux pratiquant d’une certaine façon le « chacun pour soi ».
A cela s’est additionné un certain état d’esprit « sauve qui peut ». L’esprit « sauve qui peut », c’est cette tension ou cette anxiété, voire cette quasi-épouvante perçue dans le regard de certains au moment de prendre le shinkansen ou lorsqu’il s’agissait de se déplacer avec nos bagages dans les correspondances des gares. La peur ou l’inquiétude de se perdre. De rester à quai. Ou dans le shinkansen.
Sans le groupe.
Ces observations m’ont amené à réfléchir à celui que j’étais et que j’avais oublié : j’aime être en relation avec les gens mais pas à n’importe quelle condition. Et je n’aime pas me sentir enfermé dans un groupe.
La vie en groupe, troisième semaine : « On dirait qu’il fait tout le temps, la gueule ! ».
Lors de la première semaine du Masters Tour environ, j’avais été surpris d’apprendre par un participant que certaines personnes avaient l’impression que je faisais « tout le temps, la gueule ! ».
J’avais répondu à ce participant qu’en une semaine de Masters Tour, j’avais appris ça :
« Si les gens étaient (plus) sereins, ils ne pratiqueraient pas des Arts Martiaux ».
Une remarque que j’avais étendue aussi aux pratiquantes et pratiquants d’apnée.
J’avais ensuite ajouté que ces personnes qui s’étaient formalisées à mon sujet étaient très peu venues me parler.
Mais, rétrospectivement, ces personnes avaient peut-être un peu raison en ce sens que je ne me suis pas forcé à sourire. Et qu’il est d’autres moments où j’ai pu rester très sérieux ou concentré.
D’un autre côté, je comprends que des participants et des participantes soient venus en couple, en famille, entre potes ou partenaires du même club ou aient opté pour se réunir en personnes de la même discipline. Ce voyage sera pour eux mémorable et leur a sans aucun doute- je le crois et je l’espère- réservé des moments très privilégiés.
Pour ma part, même si, dans l’idéal, j’aurais aimé faire autrement, je continue de croire que j’ai pris la meilleure décision en venant seul au Japon pour ce Masters Tour 2024. Au vu du rythme et du nombre de nos visites, de nos marches, de nos changements d’hôtel, de la chaleur humide (plus de trente degrés tous les jours en moyenne), de la variabilité de nos horaires selon les circonstances, de la nécessité de s’adapter, de suivre les messages sur les boucles WhatsApp, des entraînements, je trouve qu’il est difficile de pouvoir s’y ajuster au mieux tout en conservant, par ailleurs, une vie de famille ou de couple harmonieuse, douillette et paisible.
On pourra me dire qu’une vie de couple et de famille est rarement harmonieuse, douillette et paisible et que le Masters Tour peut aussi permettre d’apprendre à se concentrer sur l’essentiel.
Je répondrais qu’il m’a manqué le courage, l’optimisme, la force, la folie mais aussi la générosité pour venir avec ma compagne et ma fille à ce Masters Tour 2024.
Je me souviens aussi m’être senti devenir assez irritable ou susceptible en début de troisième semaine. Et de moins bien supporter d’éventuelles contraintes relatives au groupe. Qu’il s’agisse de faire en groupe ou de « téter » l’anxiété ou la fébrilité de quelqu’un dans le groupe.
Donc, tout ce qui, en troisième semaine, m’a semblé facultatif concernant le groupe est assez facilement passé davantage au second plan. J’en aussi eu assez d’être celui qui va vers les autres participantes et participants du Masters Tour.
Je suis sûrement devenu nettement plus solo, plus égocentrique, donc peut-être encore plus bizarre et plus incompréhensible pour quelques unes ou quelques uns lors de cette troisième et dernière semaine.
Parallèlement à cela, je me suis davantage ouvert au pays, à mon rythme ainsi qu’à mes inspirations pour continuer à le découvrir.
J’ai un temps voulu aller à Yokohama. Mais durant les deux derniers jours de notre périple, je me suis avisé que j’avais à peine vu Shinjuku. Et en me rendant à Harajuku (où j’étais aussi passé en principe en 1999), je me suis aperçu que j’avais tout à découvrir.
Du Japon que j’avais aperçu en 1999, excepté Hiroshima et l’île de Miyajima, je n’ai rien reconnu.
Cette première partie s’arrête là. La seconde partie parlera des Maitres que nous avons rencontrés. Des impressions qu’il me reste ou que je me suis fait d’eux.
Il me semble que cette première partie est la plus difficile à lire et à avaler. Mais je crois que sans cette première partie, mon « récit » aurait été incomplet et artificiel.
Avoir un blog qui s’appelle balistique du quotidien m’oblige un « peu » à parler de ces élections législatives quelques heures avant leur second tour décisif.
Cela fait plusieurs jours que je pense à écrire un article. Et, il me reste désormais peu de temps avant mon départ pour mon second séjour au Japon.
En 1999, année de mon premier séjour au Japon, j’étais parti un an après la victoire de l’équipe française « Black, Blanc, Beur » de Jaquet, Zidane, Blanc, Deschamps, Thuram, Desailly et d’autres à la coupe du Monde de Football. Cette année, je partirai après le résultat de ces élections législatives où le RN, beaucoup plus héritier des pointes du FN que de celles de l’équipe de France de de 1998, joue un autre genre de football.
Dans une histoire de Hugo Pratt que j’ai relue récemment, un Indigène, allié du héros Corto Maltese, reçoit trois balles. Lorsque Corto Maltese lui demande :
« Tu ne vas pas mourir, quand même ? », celui-ci lui répond « Peut-être bien que oui, peut-être bien que non ». L’homme, car il s’agit bien d’un homme, s’en sort finalement. Car, par sa propre volonté, l’Indigène – qui est un puissant sorcier- a pu arrêter son hémorragie interne. Le médecin qui l’opère ensuite, raconte cela plus tard, médusé, à Corto Maltese. Lequel écoute ça sans s’en étonner. Nous sommes ici dans les reflets d’une bande dessinée.
Je n’ai pas les pouvoirs anesthésiants et puissants de ce sorcier dans cette nouvelle aventure de Corto Maltese afin d’arrêter cette hémorragie interne que peut être le RN.
Pour moi, les élections législatives d’aujourd’hui s’apparentent aussi à une sorte de toile d’araignée ne serait-ce que mentale. Et, je n’aimerais pas rester englué dans cette toile.
Je n’ai pas été étonné par la réussite du RN lors des élections européennes le 9 juin dernier. J’avais été plus déconcerté il y a une dizaine d’années en apprenant que de plus en plus de soignants votaient pour le FN avant que celui-ci ne devienne le RN :
Parce qu’il y a environ 25 ans, un soignant ou une soignante qui votait FN, c’était plutôt un spécimen. Je me souviens d’une collègue infirmière réputée voter pour le FN qui travaillait dans le service de psychiatrie du dessus dans l’hôpital de banlieue parisienne, dans le Val d’Oise, où je travaillais alors :
Elle était blonde aux yeux bleus et portait sur elle les codes vestimentaires de la catholique traditionnelle un peu ou assez bourgeoise. On était dans le cliché. Et dans le paradoxe. Infirmière, plutôt attachée à son travail auprès des patients, et capable de partir en séjour thérapeutique avec des patients en compagnie d’un de ses collègues infirmiers antillais.
Cela fait maintenant un demi siècle que la dynastie Le Pen poursuit son ascension vers les sommets politiques en voie d’extinction et, qui, comme l’Everest, sont devenus une destination touristique et rentable. En termes de Pouvoir et d’enrichissement économique personnel.
Les Le Pen ont aussi pour eux l’endurance, la persistance, un besoin de revanche et de jouissance médiatique et se nourrissent de toutes les crises mais aussi de toutes les audaces.
En face, on a eu principalement des hommes politiques- et quelques femmes- qui se sont comportés comme des rentiers, d’autres qui ont raté le train ( Rocard, Jospin, Juppé…), quelques uns qui se sont désistés ( Delors), et d’autres qui n’ont fait que passer :
J’avais déjà oublié qu’Elizabeth Borne avait été la Première Ministre précédant Gabriel Attal pourtant nommé seulement depuis six mois. J’ai du mal à me rappeler de la Ministre socialiste du travail , Myriam El Khomri. Mais aussi de certains ministres du Président Nicolas Sarkozy.
Par contre, les Le Pen, on les « connait ». Il leur manque juste une émission de télé-réalité pour boucler le Tour de France des média. Les Le Pen sont devenus familiers. Et ce qui devient familier inspire sympathie, accoutumance et confiance. En plus, Marine Le Pen est une femme. La seule femme, en France, à pouvoir rester au premier plan en politique sans faire partie du gouvernement présidentiel. Tout le contraire du Président Macron devenu le pire VRP pour son propre parti aussi « justes » ses causes soient-elles lorsqu’elles le sont.
J’écris cela de façon humoristique mais je souriais peu il y a encore deux semaines. Et je sourirai sûrement peu ce soir. Ou alors seulement parce-que je saurai que bientôt, je partirai pour quelques semaines au Japon.
Parce-que, pour moi, quel que soit le résultat des élections législatives ce dimanche 7 juillet, le RN a gagné.
Car il a ensorcelé une partie des esprits et des serpents. Ne serait-ce que provisoirement. Pour éviter que Marine Le Pen ne soit à ce point triomphante aujourd’hui, il aurait fallu la nommer Ministre il y a quelques années ou médiatiser son refus. Marine Le Pen est aussi forte aujourd’hui car ses adversaires politiques de gauche et de droite ont été plus suffisants et intéressés avec elle. Il était facile de se montrer très digne en sa présence en s’opposant à elle.
Une affaire de dignité :
L’homme politique Eric Ciotti, Président des Républicains, a été critiqué et rejeté par les membres de son parti pour avoir ouvertement donné sa préférence à Marine Le Pen après le résultat des élections européennes du 9 juin. Mais le choix de ces mêmes Républicains de s’abstenir de se désister en faveur de la « Gauche » au second tour de ces élections législatives me confirme qu’il est d’autres femmes et hommes politiques, de droite mais aussi de gauche, qui seront prêts à aller faire la bise à Marine Le Pen si celle-ci devenait Présidente de la République ou ne serait-ce que Présidentiable.
Je reste aussi très prudent devant les réserves exprimées par certains média économiques ou autres envers les compétences du RN. Parce-que si le RN venait à se montrer « compétent » économiquement ou si des éminences économiques et politiques reconnues venaient à accepter de faire partie d’un gouvernement RN, il nous serait très certainement expliqué ultérieurement que c’est avant tout pour le bien de la France.
C’est ce qui nous est très bien résumé dans l’article Partir ou résister, le dilemme des hauts fonctionnaires de Nicolas Sèze dans le journal La Croix de ce jeudi 4 juillet 2024, page 4. Extraits:
« (….) Certains préfets chargés de mission, pour qui nous n’y allons pas assez fort, attendent leur heure. Et beaucoup d’ambitieux voient déjà l’opportunité de gravir rapidement des échelons ».
Monter dans la hiérarchie sera d’autant plus facile que le RN aura besoin de cadres ».
« (….) Chez nous, personne ne pense qu’il se fera mettre à la porte début juillet » reconnait le fonctionnaire du ministère de la justice pour qui un futur gouvernement RN devra aussi « se confronter au réel » « Un certain nombre de leurs projets sont irréalistes et je crois possible de les faire évoluer en les confrontant à la réalité. Cela nécessitera de suivre de très près les discours politiques pour identifier les marges de manœuvre, mais aussi fixer nos lignes rouges, conclut-il. Si celles-ci étaient franchies, évidemment je partirai. Mais je ne pense pas que ce sera le cas à court terme ».
Cette stratégie de l’évitement ou du déni fait la force du RN. Croire ou penser qu’il sera possible de « faire évoluer » un représentant du RN revient à dire qu’il a été possible de « faire évoluer » un Emmanuel Macron, lorsque celui-ci, devenu Président de la République, inflexible, a décidé de faire passer en force certaines décisions telles que le recul du départ de l’âge de la retraite. Si certains fonctionnaires préfèreront partir en cas de gouvernement du RN , ils seront selon moi une minorité :
A moins de se sentir menacés directement ou personnellement, ces fonctionnaires feront comme la plupart d’entre nous. Ils resteront à leur poste, évoquant un ensemble de raisons et d’obligations qui les empêchent de partir tout en « condamnant » moralement le gouvernement du RN.
Ce qui nous enferme et nous rend aussi dépendants des aléas d’un emploi, d’un gouvernement, d’un pays, d’une situation, d’un statut ou d’un régime c’est peut-être aussi notre attachement forcené à notre sédentarité et aux endroits que nous connaissons, à ce que nous appelons notre enracinement ou notre identité. Ou, plus simplement, notre sécurité.
Si nous étions plus nomades à l’image de Corto Maltese ou de ces migrants regardés de travers, nous aurions sans doute plus de facilités pour relativiser ce qui nous arrive mais aussi pour partir ou changer de vie afin de rester plus libres. Mais pour cela, il faut accepter de s’exiler.
Ou rester sur place et résister. C’est ce que j’ai vu ce vendredi 5 juillet, sur les marches du tribunal de la Cité, avec ces drapeaux du Syndicat des avocats de France. Deux personnes (une jeune femme noire et un homme se présentant comme magistrat) qui ont assisté à cela m’ont expliqué que cela était relatif à une remarque récente sur les réseaux sociaux attribuée au RN estimant qu’il y avait trop d’avocats en France.
Ce n’est pas contre toi
Pour la première fois, il y a quelques jours, après le résultat des élections européennes et, surtout, après celui du premier tour des élections législatives, il m’est arrivé de me dire qu’il se trouvait parmi les personnes que je côtoie, collègues, connaissances, « amis », voisins, des électrices et des électeurs du RN.
Lorsqu’après les précédentes élections, les scores du FN/RN augmentaient, je ne me disais pas comme certains que tous les électeurs du FN/RN sont des racistes et des fascistes. Mais, désormais, je me le dis un peu plus. Ou, je commence à le croire un peu plus.
Je me dis en tout cas que je suis devenu ou redevenu une cible potentielle comme n’importe quelle minorité ostracisée ou pointée du doigt :
L’étranger sans papiers, le transgenre, l’homosexuel, la prostituée, le ou la toxicomane, la femme battue, l’alcoolique, le malade psychiatrique, le pervers, le jeune de banlieue, l’homme noir ou arabe, le Juif, le musulman, l’Asiatique….
Certaines personnes qui ont voté pour le RN auraient beau essayé de m’expliquer « Ce n’est pas contre toi », il n’empêche que, quelque part, quelqu’un, un jour, en France, soudainement, décidera ou pourra décider que ma tête est mise à prix ou ne vaut rien simplement parce-que le RN/FN se sera davantage rapproché des sommets du Pouvoir.
Le RN est l’équivalent d’une équipe de Foot qui a ses ultras parmi ses supporters. Et, il y a de plus en plus d’Ultras parmi les supporters de l’équipe de Foot que représente le RN. Et, ce que recherchent ces Ultras, c’est une certaine dose d’adrénaline. Quant au RN, il aime faire peur. Il a toujours aimé faire peur. Le climat anxiogène qu’il libère fait partie de son oxygène. Je comprends donc en grande partie les propos tenus dans un entretien par la cinéaste Alice Diop en première page du journal Libération le mercredi 26 juin 2024 :
Alice Diop Face Au RN « Pour les gens comme moi, C’est la vie ou la mort ».
La France, pays de la discordance
Et, ce qui n’arrange rien avec cette ambiance, c’est cette façon qu’ont certains d’agir comme si de rien n’était. De ne pas en parler. Lorsque j’ai revu récemment en consultation le pneumologue qui me suit depuis mon embolie pulmonaire l’année dernière, c’était étonnant de le voir et de l’écouter me parler comme si rien n’avait changé et comme si rien n’allait changer dans ce pays depuis le résultat des élections européennes puis ce premier tour des élections législatives.
Je suis très peu allé sur les réseaux sociaux. J’imagine facilement que bien des amis et des personnes que je connais se sont épanchés sur le sujet dans les réseaux sociaux. Mais dans la vraie vie, autour de moi, rien. Ou, en tout cas, pas devant moi. Je n’attendais pas que quelqu’un me dise :
« Franck, si , un jour, tu es poursuivi par des émanations du Ku Klux Klan, sache que j’aurais toujours pour toi une place chez moi entre le palier et les toilettes ainsi qu’un emploi d’homme à tout faire (je te paierai au black)…. ».
Mais ce silence est isolant. C’est un peu comme si, en tant qu’homme noir, en France, on était plus ou moins parvenu à se fondre dans la masse puis que les résultats de ces votes vers le RN agissaient comme du détachant et que l’on se retrouvait d’un seul coup clairsemé ou tout nu en pleine lumière.
Enfant, j’ai assez tôt appris que j’étais Noir. Ne serait-ce que de par mon éducation afin d’être préparé un minimum au racisme anti noir. Mais en vivant à mon époque en région parisienne et en étant employé dans un milieu professionnel et dans des fonctions où je ne détone pas particulièrement, j’ai pu plus ou moins l’oublier. Parce-que vivre en se répétant matin et soir que l’on est un homme noir est un petit peu fatigant. Mais il va peut-être falloir que je révise mes classiques.
Franck Unimon, ce dimanche 7 juillet 2024, à quelques heures du second tour des élections législatives.
Parler du Japon aujourd’hui depuis la région parisienne peut apparaître irresponsable et déplacé. Pourtant, nous sommes au mois de juin et cela fait plusieurs jours que je vois et revois que le Japon, lorsque l’été s’approche, redevient subitement une destination touristique attrayante. Ça et là, le Japon apparait dans les vitrines.
Je sais aussi qu’il existe un petit plus qu’un effet de mode avec le Japon et que depuis au moins une dizaine d’années, la culture nipponne, voire sud coréenne, a ses spécialistes et ses amateurs au moins parmi les adolescents et les jeunes adultes.
Cependant, en France, il pleut et il fait gris. Certaines personnes diraient même que, désormais, en France, il fait presque brun.
Car l’Assemblée nationale, en France, a été dissoute par le Président Emmanuel Macron il y a quelques jours après la victoire du RN aux élections européennes. Un Président de la République réélu, aussi jeune qu’il est devenu impopulaire.
Cinquante pour cent d’électeurs se seraient abstenus d’aller voter lors de ces élections européennes. Des élections législatives vont avoir lieu de manière anticipée le 30 juin et le 7 juillet. On ignore encore si, pour la première fois, en France, le Rassemblement National (RN), parti d’extrême droite héritier du Front National (FN) co-créé il y a un demi-siècle par le pionnier de la dynastie Le Pen va parvenir au Pouvoir Politique par la Grande Porte en obtenant le poste de Premier Ministre. Ou si, une fois de plus, le RN va se heurter à la muraille de Chine faite de ce refus des Français revenus une nouvelle fois voter par défaut pour un parti politique de Droite ou de Gauche perçu comme républicain, antiraciste et démocratique.
A quelques jours du début des Jeux Olympiques organisés en France, on pourrait se croire dans un épisode de Games of Throne avec les adeptes du RN dans le rôle des revenants d’autant plus inquiétants qu’ils ressemblent à ces mutants imperturbables vus dans bien des films et dont la volonté de fer se concentre dans l’action de se multiplier mais aussi de se diversifier. Tandis que les plus irréductibles des membres du RN, eux, verraient leurs opposants et leurs contraires comme autant de redoutables envahisseurs dont la principale source de volonté serait de coloniser et d’anéantir la grandeur de l’identité nationale française.
Je crois m’être fait servir par l’un d’entre eux il y a quelques heures.
Un Yakuza caché ?
Dans ma ville, je passe quelques fois dans une boucherie dans laquelle l’atmosphère et la clientèle détonnent. J’y entre en étant assez fasciné mais aussi parce-que je suis un client satisfait.
Dans cette boucherie, on se croirait dans la France des années 70 et 80. On semble y rester confiné entre soi mais on y achète de la très bonne viande plus chère qu’ailleurs dans la ville.
A tort ou à raison, cet endroit m’évoque facilement les très bons films Dupont Lajoie ou Seul contre tous. Cependant, il faut rester prudent et se méfier des apparences. Même si son propriétaire et boucher, tout à l’heure, m’a un peu troublé.
Ou provoqué.
Nous étions seuls dans la boucherie lorsque je me suis laissé aller à la familiarité de lui demander où il avait prévu de partir en vacances cet été. Peut-être parce-que ma tête lui était suffisamment familière, il m’a répondu spontanément :
« En Dordogne ».
La Dordogne est une jolie région et la France, un très beau pays à visiter. Cela fait des années que la France est un des pays les plus visités dans le monde qu’il s’agisse de l’Hexagone ou de « ses » îles si l’on excepte peut-être la Nouvelle Calédonie depuis plusieurs semaines compte-tenu du climat de guerre civile et de rejet de la politique française qui y a éclos abruptement.
Sauf que le boucher, Maitre en sa boucherie depuis une bonne vingtaine d’années, a eu besoin de rajouter :
«… Pour faire travailler les Français…. ».
Je me suis contenté de lui répondre, le plus légèrement possible :
« Si vous pouvez…. ».
Fort heureusement, sa politesse ou son absence de curiosité m’ont sauvé. Je n’ai pas eu à lui annoncer où j’avais prévu de passer mes vacances, cet été.
En effet, ce 8 juillet, soit le lendemain des résultats du deuxième tour de ces élections législatives provoquées par le Président Macron suite à sa décision de dissoudre l’Assemblée Nationale, je prendrai l’avion pour trois semaines au Japon afin de participer au Masters Tour 2024 créé et co-organisé une nouvelle fois par Léo Tamaki, expert en Aïkido.
Le Japon, c’est assez éloigné de la Dordogne.
Mais peut-être que le boucher regarde-t’il tous les soirs des manga à son domicile ? Peut-être aussi parle-t’il Japonais couramment dans ses rêves et se rend-t’il tous les ans à la Japan Expo ? Peut-être aussi, dans ses hobbies, compte-t’il un Savoir faire de Maitre Pottier japonais ? Ou de Maitre Sushi ? Ou de chanteur Karaoké ?
Rien ne (me) permet, à ce jour, de le contester. Peut-être même, tous les soirs, se transforme-t’il aussi en Yakuza à la façon dont Takeshi Kitano a pu nous les décrire dans ses films Sonatine ou Hana-Bi pour parler de quelques uns de ses films ?
Peut-être n’est-il qu’un samouraï infiltré dans une ville de banlieue parisienne, plutôt mal réputée, qui a choisi d’endosser l’habit, la profession et des propos qui peuvent s’apparenter à ceux de l’Extrême Droite pour mieux la combattre à la façon d’une taupe tel Tony Leung Chiu-Wai qui, lui, avait infiltré une triade chinoise dans le film A Toute Epreuve du réalisateur Hong-Kongais John Woo, son dernier film à Hong-Kong avant la rétrocession de celui-ci à la Chine et avant son exil pour les Etats-Unis et son film Volte-face avec Nicolas Cage et John Travolta ?
Ces films noirs ou ces polars asiatiques de ces réalisateurs, et d’autres que je ne cite pas tels Kirk Wong, Johnnie To ou les frères Mak etc…, font partie des classiques pour celles et ceux qui les connaissent ou les ont vus, comme moi, au cinéma, à leur sortie ou en décalé.
Ces films font aussi partie du passé. Même si ce passé est présent et futur. Et moi, ce que je suis en train de vous écrire ce mardi 18 juin 2024 appartient aussi au passé. Car si mon départ pour le Japon, cette année, est prévu pour le 8 juillet, soit dans trois semaines, il s’agira aussi de mon « retour » au Japon après mon premier voyage, là-bas, en 1999. Un retour souhaité dès cette année-là.
En 1999, lors de mon premier séjour au Japon, j’étais imprégné de cinéma en version originale sous-titrée et de cinéma asiatique. Au point de beaucoup m’identifier aux Japonais.
Nous ne sommes pas des japonais
« Vous n’êtes pas des Japonais ! » nous avait néanmoins asséné Vanessa, – tel un ippon- une de nos camarades- et Française- de notre cours de Judo, au gymnase, rue Michel Lecomte, tant nous singions certaines caractéristiques japonaises.
Nous, c’était Manu, un de mes amis Français, rencontré sur le tatamis du club, et moi, Français d’origine antillaise.
Elle avait raison.
Depuis notre naissance en région parisienne jusqu’à cette déclaration, Manu et moi n’avions jamais rien eu de bridé. Nous avions acheté nos kimonos de judo en France. Nous pratiquions le Judo en France. Notre professeur de Judo, Pascal Fleury, grand frère de la championne olympique Cathy Fleury, était d’origine italienne.
Lorsque Manu et moi, nous allions- quelques fois- dans des restaurants asiatiques, c’était à Paris ou en banlieue parisienne. Et, lorsque nous voyions ou rencontrions beaucoup d’Asiatiques, c’était surtout projetés sur un grand écran de cinéma, sur l’écran d’un téléviseur ou dans les ouvrages d’une librairie.
Pour moi, en devenant adulte, je crois que le Japon avait pris la place que les Etats-Unis, enfant puis adolescent, avaient pu avoir. Celle d’un pays dont l’Histoire et les êtres avaient des destinées fantastiques. Lorsque l’on est né en banlieue parisienne, dans un milieu social moyen, que l’on a d’abord grandi dans une cité, et que nos parents, bien que « Français », sont des Antillais qui ont dû venir vivre en métropole tels des immigrés à l’âge où, en principe, tout est possible puisque l’on est jeune et que ce possible se résume à un logement HLM avec d’autres personnes qui, comme eux, font de leur mieux pour s’en sortir, hé bien, soit on se contente de ce que l’on a. Soit on rêve ou on imagine un ailleurs.
Et puis, petit à petit, soit on essaie d’aller vers cet ailleurs, soit on reste enfermé dans sa cité et dans tout ce que l’on connait par coeur par peur et par précaution.
Pourquoi le Japon plus que le Vietnam, le Cambodge, l’Indonésie, la Corée du Sud, la Thaïlande, la Birmanie, le Laos ou ne serait-ce que la Chine qui sont aussi des pays à connaître comme tant d’autres en Asie, en Afrique, en Océanie, en Europe ou ailleurs ?
Très certainement pour cet attrait pour les Samouraï qui avaient remplacé les cow-boys des western de mon enfance. J’étais devenu adulte. C’était exotique. Je ne pouvais pas continuer à garder les mêmes modèles, me promener avec un chapeau de cow-boy, un ceinturon en plastique comportant un étui occupé par un colt noir également en plastique et une étoile de shérif.
Il y avait peut-être aussi une forme de refus du statut de victime permanente et suppliciée. La victime potentielle du racisme parce-que Noir dans un pays de Blancs, la France.
Et une espèce de recherche de mon salut intérieur un peu plus en accord avec moi-même dans les Arts Martiaux que dans les comportements des héros de western qui buvaient de l’alcool et qui fumaient, aussi, qui jouaient de l’argent. Qui roulaient un peu plus des mécaniques et qui parlaient fort. Il y ‘avait peut-être également une envie de ma part de m’affirmer en étant un homme antillais “différent”, moins bruyant, moins théâtral et moins prévisible. Plus original. Plus complexe. Peut-être plus libre.
Le Japon faisait aussi davantage penser à cette vitrine où y était exposée en permanence cette sorte de Maitrise en toute circonstance que je cherchais à obtenir en moi. Pour cette assurance et ce calme constants en apparence. Pour les sons gutturaux, rauques, brefs et définitifs de la langue japonaise telle que je l’entendais. Pour cette délicatesse supposée de la femme japonaise qui contrastait avec la femme imprévisible, exigeante, pleine d’assurance ou hystérique de la vie urbaine ou parisienne.
Pour caricaturer, d’un côté, on pouvait avoir la « Française » qui fume, qui boit de l’Alcool, qui peut vous quitter ou qui dit zut. De l’autre côté, on avait une femme polie, pas un mot plus haut que l’autre, que l’on voulait voir comme charnellement sensuelle, jamais contrariante et fidèle à jamais.
Il est beaucoup plus facile de fantasmer sur une personne à laquelle on ne se confronte jamais et dont on méconnait la langue, la culture, les volontés et la pensée et qui reste pour nous une apparition encadrée telle une poupée gonflable et domesticable. Mais aussi, jetable.
J’ignorais alors tout ce que le Japon pouvait avoir de traditionnaliste, de conservateur voire de raciste. Ou de sexiste. Et, je méconnaissais totalement le fait, aussi, que ce mode de vie que je préférais voir comme du raffinement esthétique digne de la très haute couture reposait aussi sur une certaine psychorigidité sociale qui flattait d’abord ma propre psychorigidité.
J’ignorais aussi que certains aspects de la vie traditionnelle à la Japonaise équivalaient, aussi, par ses principes, à certains aspects de la vie traditionnelle que m’ont transmis mes parents et auxquels je suis attaché : Un campagnard, qu’il soit japonais ou d’origine antillaise, aura une façon de regarder la vie assez similaire.
L’importance de la parole donnée m’apparait par exemple être une valeur qui émane plus de l’héritage de la tradition et du mode de vie campagnard que du mode de vie dit urbain et moderne, pour ne pas dire mondain.
« Le Japon a mis mes valeurs à plat » m’avait dit lors d’une soirée parisienne une Française qui y avait vécu quatre années.
Quatre années, pour moi qui n’étais jamais allé au Japon, c’était au-delà du réel.
Ce devait être deux ou trois ans avant que je n’envisage mon propre séjour au Japon. Cette femme qui avait à peu près mon âge avait accepté le principe de me revoir pour me parler davantage du Japon. Mais ce qu’elle m’avait laissé, ce sont ses quelques remarques sur le Japon, son prénom et son nom lors de cette soirée passée dans un lieu dont je serais incapable de me rappeler avec certitude.
Mais si cette connaissance croisée dans une soirée, n’avait pas tenu parole, l’amie que je connaissais, alors, elle, l’avait tenue en m’accueillant chez elle au Japon deux ans après m’avoir déjà reçu chez elle une première fois en Australie, à Melbourne, en 1997.
En 1999 : Le Japon, une éclaircie profonde
En 1999, l’année du film Matrix, pour moi, il y eut un avant et un après le Japon.
A mon retour de mon séjour grâce à Raspoutine, mon amie franco-australienne qui y habitait alors, et son frère Le Croque-mort alors mon ami, qui me fit profiter de son expérience là-bas avant de rentrer en France, je déclarai que ce voyage fut extraordinaire.
Et, je le pense toujours aujourd’hui.
Humainement, ce séjour fut pour moi une frontière entre celui que j’étais auparavant qui en faisais des tonnes dans la provocation mais aussi dans l’humour pour se faire aimer. Mais aussi pour se desservir lui-même.
Ce voyage au Japon et son contexte dans ma vie personnelle et professionnelle m’aidèrent et me poussèrent à aller davantage dans l’introspection. Pour paraphraser un peu le livre Avec les Alcooliques Anonymes de Joseph Kessel, paru en 1960 et que j’ai bientôt terminé, je dirais que ce séjour au Japon en 1999 m’a permis d’être plus honnête et plus sincère avec moi-même.
Je n’étais pas alcoolique et je ne suis pas alcoolique. Si je l’avais été, j’aurais pu être été poussé à croire que l’alcool, sous toutes ses formes et latitudes, aurait pu me guider.
Cependant, avant mon séjour au Japon, j’étais probablement ivre et imbibé de mes propres peurs. J’avais très peur de celui que j’étais, de celui que je pouvais devenir et j’avais aussi très peur….d’être aimé.
D’où les provocations et l’humour répétés jusqu’à en être inappropriés. Les décisions très mal inspirées. Le propre de l’alcoolique, c’est, à défaut de pouvoir s’étreindre et se rassurer lui-même, de se détruire et de chercher à s’assommer et à s’éteindre jusqu’au black- out par l’alcool. Pour s’évader de lui-même. Je faisais pareil mais avec l’humour, mes provocations, mes excès, mes gesticulations, des mauvaises décisions, une certaine négligence de moi-même…
Lorsque l’on a peur de soi-même, que l’on a peur d’être aimé ou que l’on estime être indigne d’être aimé, on sait devenir tranchant, blessant ou désarmant pour celles et ceux qui nous entourent ou qui prennent le risque ou ont l’audace de nous approcher. On devient ivre au point de s’aveugler, de manquer de lucidité, et d’être incapable de faire la distinction qui convient entre celles et ceux que l’on peut laisser s’approcher et les autres qu’il faut savoir repousser ou, plus simplement, éviter. Puis, notre orgueil parachève de manière incontestable notre entreprise (ou notre chef-d’œuvre) de démolition et d’autodestruction :
S’il y a un problème, c’est à cause des autres. Ou, on ne savait pas que l’autre ne nous voulait-finalement- aucun mal…..
Le contexte dans lequel j’étais parti au Japon en 1999 cumulé au fait de m’être rendu dans un pays comme le Japon m’avaient aidé à commencer à me sevrer de certaines de mes mauvaises habitudes relationnelles et émotionnelles. Mais, comme on le sait, se sevrer prend du temps. Ce qui n’empêche pas de vivre des éclaircies profondes. Et, le Japon en fut une pour moi.
Si bien qu’à mon retour, je m’étais dit que je reviendrais un jour au Japon. Il aura fallu attendre…25 ans.
Il y a 25 ans, du Japon, j’avais ramené des photos papier, un bermuda qui ne me va plus car j’ai pris du poids et du ventre depuis, une caméra analogique et de la céramique.
Electronique et Céramique
l’Electronique et la céramique me semblent assez bien représenter les deux versants du Japon. Le moderne et le traditionnel. Le quasi-virtuel et le spirituel. L’industriel et l’artisanal. Le logique et l’organique. L’efficace et le sensuel. Mais l’un comme l’autre concourt pour la perfection.
Des deux, électronique et céramique, c’est la céramique que j’utilise encore. Toutes mes tasses de thé ramenées du Japon en 1999 sont demeurées intactes. Et, au travers de leur utilité et de leur durabilité, je vois une sorte de confirmation dans le fait que, utilisée pour l’usage qui lui correspond, la tradition conserve sa supériorité en acquérant plus de profondeur que la nouveauté qui, elle, plus superficielle, est condamnée à se reproduire pour pouvoir espérer préserver ses attraits et convaincre quant à ses promesses et ses effets.
Mais on peut le voir autrement et se dire que mon versant ou mon tempérament traditionaliste l’a emporté pour le moment sur mon tempérament moderne ou moderniste. Car après tout, d’après un podcast que j’ai déjà écouté deux fois, les blogs appartiendraient au passé. Aujourd’hui, ce qui est moderne, ce qui suscite et maintient l’intérêt quotidiennement et qui apporte un succès immédiat et continu, c’est de diffuser souvent et régulièrement des images et de produire le moins de texte possible. Et, moi, comme un vieux schnock conservateur encore accroché au monde des relations épistolaires, et donc complètement démodé, je fais l’exact contraire. Peut-être s’agit-t’il d’une stratégie et d’une décision que je regretterai dans à peu près une dizaine d’années. Lorsque je me déciderai à changer de point de vue contraint ou forcé. Ou à changer le thème de mes articles.
Toutefois, il existe un bémol à cette autocritique : mes articles les plus lus sont relatifs aux Arts Martiaux ainsi qu’un article consacré à Brigitte Lahaie, une ex star française de films pornos qui n’a jamais porté de kimono.
Et, il y a aussi un autre bémol à apporter à cet éloge dithyrambique que j’ai fait concernant la supposée supériorité de la tradition sur la modernité, un préjugé de plus dans lequel je me suis très confortablement installé :
Pendant une vingtaine d’années, j’ai roulé dans une voiture Toyota achetée deux ans après mon premier voyage au Japon. Et le nouveau modèle d’occasion, plus récent, que j’ai acheté également à crédit l’année dernière n’est pas en céramique.
Il me reste aussi quelques souvenirs durables du Japon de 1999.
Des souvenirs durables de mon voyage au Japon en 1999
De Tsukuba, cette ville de banlieue qui évoquait la campagne, située à une heure de Tokyo où habitait mon amie à l’époque. D’une course improvisée à vélo en revenant de la gare de Tsukuba avec une collégienne ou une lycéenne dans sa tenue ( jupe, baskets, débardeur et chemise blanche).
De Pierre, lycéen français au Japon grâce au Rotary Club de sa ville.
De cette secousse sismique alors que je discutais avec mon amie dans son appartement. De ce tournoi de Sumo où nous nous étions rendus.
Je me rappelle de cette prévenance des Japonais et des Japonais faisant ( tout) leur possible pour me renseigner dans la rue dès lors que je m’étais adressé à eux avec les quelques mots d’usage et de politesse consacrés que je connaissais en Japonais. Des mots agissant à la fois comme des sésames ou des talismans poussant mon interlocuteur et mon interlocutrice à s’assurer que je prenais bien ensuite la bonne direction comme si son destin ou son karma en dépendait. Des mots que je n’ai pas oubliés et qui signifient « Bonjour », « Bonsoir », « Je voudrais, s’il vous plait », « Merci beaucoup », « êtes-vous d’accord ? », « Faites attention à vous »….
Il y avait ces rues envahies par ces foules, plus imposantes qu’ailleurs, au moment de les traverser ou marchant sur les trottoirs. Ce cycliste se frayant patiemment l’usage d’un passage à travers la multitude de piétons sur le trottoir sans que personne ne lui fasse le moindre reproche.
Kyoto, le Shinkansen. La ponctualité millimétrée des trains. La propreté immaculée des gares.
Ce sentiment de sécurité dans les rues ignoré du banlieusard que j’étais et confirmé par mon amie.
Il y a aussi ce Salary man qui, à Tokyo, vers 22 heures, habillé en pantalon et chemise, son attaché case à la main, s’était subitement mis à dégueuler sur le quai de cette gare où, comme lui, j’attendais le train pour rentrer. Puis, il s’était éloigné de ses vomissements sans rien dire.
Dans quelques rues d’Hiroshima, j’avais été étonné de voir ces jeunes femmes ou ces adolescentes au profil d’écolières de type lolita, véritables clignotants vestimentaires, qui attendaient le client égaré ou habitué. A Hiroshima, toujours, j’avais aperçu ce bâtiment dont le toit avait reçu la bombe atomique. Et, au musée tout proche, j’avais été étonné de constater que les Japonais étaient présentés comme les victimes de la bombe atomique sans souligner la responsabilité de l’armée japonaise plutôt jusque-boutiste. Je n’avais pas encore lu que les opérations Kamikaze des aviateurs japonais avaient, dans les faits, donné peu d’avantages en terme de réussite militaire mais, aussi, que la participation du Japon au conflit de la Seconde Guerre Mondiale était prévisible et devenu inévitable dès lors qu’il lui restait six mois de réserve de pétrole.
En 1999, j’avais aimé me rendre dans les quartiers de Shibuya et de Harajuku réputés pour être des coins branchés de Tokyo. J’avais déploré être passé à côté de la vie nocturne du Japon. Cela aurait pu arriver si j’avais pu rencontrer Yuji et sa compagne plus tôt dans une des rues de Tokyo. Anglophones tous les deux, ce qui était rare, ils m’avaient fait découvrir un bar-cinéma possédant une petite scène dont mes yeux d’occidentaux n’auraient jamais pu concevoir l’existence dans ce bâtiment ou cet immeuble tout proche de nous. Ensuite, toujours le même jour, le colocataire de Yuji, musicien et originaire de Nara, m’avait invité à venir m’y rendre un jour. Sauf que je repartais pour la France…le lendemain.
J’étais rentré du Japon le lendemain comme lorsque l’on sort d’un rêve.
Le Japon et moi, aujourd’hui :
Les quelques personnes à qui j’ai parlé de mon séjour au Japon, cette année, se sont montrées enthousiastes. J’ai été marqué par le sourire XXL de mon amie Pépita, qui, à l’époque, m’avait encouragé à faire un crédit que je n’ai jamais regretté même s’il m’avait fallu ensuite deux années pour le rembourser.
Le Japon reste une destination touristique peu courante comme en atteste encore la réponse que m’a faite le boucher lorsque je l’ai interrogé à propos de ses vacances. Même si l’écoute d’un podcast cette semaine m’a appris que de plus en plus de vacanciers s’y rendaient et que quelques uns d’entre eux se comportaient de façon outrancière.
En 1999, je buvais sûrement encore du thé en sachet ou du thé aromatisé avec beaucoup de sucre. Soit l’exact contraire d’aujourd’hui où je bois du thé vert japonais que j’achète en vrac et que je bois sans sucre. Du Sencha ou du Gyokuro que je peux boire froid. L’un des gérants de la boutique de thé où j’ai des habitudes et où j’ai commencé à acheter du thé en vrac un jour, m’a dit que mon palais avait été éduqué mais, aussi, que notre palais a une mémoire. Du goût et des températures qui nous conviennent lorsque nous buvons du thé.
J’ai l’impression d’être moins en pamoison devant la culture japonaise qu’en 1999. Délibérément et aussi parce-que je suis dans les démarches du quotidien, j’ai, pour l’instant, survolé le programme que nous a adressé Léo concernant notre séjour là-bas.
Mais si je me fie à mon rapport au thé, au salé, et au maintien de mon intérêt pour les Arts martiaux japonais ou autres, il semblerait que je sois bien plus réceptif à la culture japonaise que je ne le crois. De manière pragmatique, je crois que j’attends de me trouver dans l’avion pour Tokyo en bonne condition avec toutes les formalités en règle pour pouvoir commencer à pleinement vivre l’événement. Avant cela, je me dis sûrement que trop d’extrapolation et trop d’imagination tue l’expérience.
Cet article qui est une forme de pré-bilan avant le voyage fait partie pour moi des « formalités ». Autant d’un point de vue instrospectif qu’à visée d’interaction avec d’autres. Car je crois que d’autres personnes qui seront au Japon ou non en juillet peuvent ressentir ou s’identifier à ce que je raconte à un moment ou à un autre dans cet article.
Il y a quelques mois, je me suis dit que retourner au Japon lors du Masters Tour 2024 était vraisemblablement une des meilleures façons pour moi de le faire. Léo Tamaki nous a appris il y a quelques jours que nous serions 143 à participer à ce Masters Tour en juillet et que nous ferions des sessions avec des Maitres d’Arts Martiaux en étant 23 par groupes. Ce qui est un bon chiffre.
En apercevant quelques offres commerciales que j’ai pu voir en faveur de voyages au Japon ces derniers jours, tant pour leur tarif que pour leur contenu, je me suis déjà senti soulagé d’avoir opté pour le choix du Masters Tour 2024.
J’espère et je compte ramener du Japon 2024, en même temps que des impressions et des rencontres mémorables, quelques images et un article pour ce blog qui essaieront de restituer cela au mieux. Pour les esprits jeunes et les esprits vieux, pour les esprits traditionalistes et les esprits modernes qui pourront y trouver plaisir et réconfort.
Nota Bene, ce mercedi 19 juin 2024 :
En repensant ce matin à cet article après l’avoir écrit en grande partie hier, je me suis aperçu que j’avais complètement oublié de parler du risque de l’accident nucléaire au Japon. Un risque difficile à totalement occulter pourtant après ce qui s’était passé à Fukushima en 2011.
Malgré la probabilité du risque nucléaire, ou de celui d’un séisme, je reste sur l’impression que ce nouveau séjour au Japon m’extraira durant quelques temps des sortilèges d’un certain cirque quotidien.
Il pleuvait ce dimanche 19 mai 2024 autour de midi alors que nos colonnes peuplaient le dojo d’Herblay. Sur les tatamis, nous étions plus de deux cents à continuer de nous orienter sur la pirogue de la fatigue. Des hommes mais aussi des femmes, nous étions majoritairement en kimono.
Guidés par l’expert en karaté Kyokushinkai, Romain Anselmo, et aiguisés par le couteau de nos kiaï, nous nous enfoncions encore un peu plus dans ce qui restait de ces quelques minutes où tout allait bientôt s’arrêter. Avec une ou un partenaire, nous avons effectué des séances de low kick. Mais nous nous sommes aussi donnés des coups de poing réciproquement dans le gong de notre ceinture abdominale. Nous avons aussi fait des pompes. L’expert donnait le rythme. Amusé, il nous a informé qu’il lui avait été demandé de mettre de l’intensité. Léo Tamaki, sur le tatamis avec nous, a ajouté dans le même humour qu’il lui avait été demandé de nous «achever».
Pour quelqu’un d’extérieur, nous aurions pu passer pour des fanatiques ou des fantassins du passé. Mais si une Divinité attentive aux Arts Martiaux s’était trouvée dans les parages ou quelque part dans le Val d’Oise, elle serait peut-être venue nous apporter les croissants.
L’édition 2024 des 24 heures du Samouraï allait bientôt se terminer, notre vie recommencer et je retournerais bientôt à mes chansons de Lana Del Rey dont je suis devenu toqué depuis à peu près deux mois. Mais, entretemps, comme l’année dernière ( Les 24 heures du Samouraï au dojo d’Herblay ce 20 et ce 21 Mai 2023, 2ème édition ) avec beaucoup d’autres revenus cette année, j’aurais participé à cette manifestation.
Pourtant, quelques jours plus tôt, je m’étais interrogé sur les raisons qui me poussaient à y participer à nouveau. Je me sentais physiquement fatigué et je l’étais. L’épreuve d’effort que j’avais faite le lundi avait été estimée modérément convaincante «pour un sportif » par le pneumologue qui me l’avait prescrite. Je me savais entraîné sportivement a minima. J’avais très peu et irrégulièrement pratiqué tant en karaté avec Maitre Jean-Pierre Vignau qu’avec mon club d’apnée.
Ma seule constance sportive était faite de ces quelques kilomètres à vélo que je faisais depuis trois ou quatre mois pour me rendre au travail et de mon penchant spontané pour la marche. Pour marcher, il est plus simple d’avoir des pieds et l’arthrose de mes deux gros orteils avait été à nouveau confirmée par un cliché radio. Mais, aujourd’hui, il n’existe pas de réparation de l’arthrose. Les principales solutions- temporaires- consistent en des infiltrations, des soins locaux de confort (froid, antalgiques divers), le repos, la diminution ou l’absence de toute pratique qui privilégie les impacts pour les pieds. Du côté de la chirurgie, il y a bien l’arthrodèse mais je m’y oppose. Et, je n’ai plus envie de m’entourer les pieds avec de l’élastoplaste afin de protéger mes gros orteils par syndactylie.
Je pouvais donc être exposé par moments à une certaine douleur et je devais faire attention en revenant aux 24 heures du Samouraï. Pourquoi m’imposer ça ?
J’ai commencé à m’inspecter. Et à m’injecter des pensées dans lesquelles je me disais que les Arts Martiaux sont pour moi un essai de virilité, pour me la raconter ou me rassurer en tant qu’homme. Mais aussi que mon attrait pour les Arts Martiaux reposait sur une admiration puérile que j’avais conservée depuis les films de Bruce Lee. Et que, dans les faits, c’était plus le spectacle des Arts Martiaux et les films réalisés à leur sujet (de Bruce Lee à Jackie Chan en passant par The Blade et tous les films asiatiques ou non s’y rapportant) qui m’avaient fait entrer dans une fantasmagorie fantastique, divertissante et captivante qui m’avaient donné envie de croire que je voulais en faire partie. Alors que, « pour de vrai », ce que je voulais vraiment, c’était rester tranquillement à la maison pour regarder des films, des combats ou des spectacles d’Arts martiaux et en parler ensuite, fasciné.
On s’aime comme on peut. Et, sans me haïr forcément, je peux être assez exigeant envers moi-même. Mais peut-être moins que le pneumologue qui m’avait bien fait sourire trois jours avant les 24 heures du Samouraï.
L’année dernière, j’avais participé aux 24 heures du Samouraï avec une contracture musculaire à la cuisse. Mon kiné m’avait déconseillé d’y participer :
« C’est comme jeter une pièce en l’air… ».
Ce mercredi, trois jours avant Les 24 heures du Samouraï édition 2024, je revoyais le pneumologue car, en novembre 2023, j’ai fait une embolie pulmonaire assez grave. Grave aussi parce-qu’il s’était passé deux semaines entre le moment où j’avais consulté la première fois (parce-que je me sentais anormalement essouflé avec une douleur costalepersistante côté droit) et le moment où le (bon) diagnostic a été fait.
Mais grave, aussi, parce-que le pneumologue n’arrive pas à comprendre comment, moi, qui « n’ai pas le profil », j’ai pu faire une embolie pulmonaire :
Je ne fume pas. Je bois très peu d’alcool. Je suis plutôt sportif. Je n’ai pas de cancer. Je n’ai pas eu d’affection grave ou récente. En résumé, je suis ce que l’on appelle une personne en bonne voire en très bonne santé.
Mercredi, je faisais donc de mon mieux pour rassurer le pneumologue. On appelle ça, la transparence. Il se demandait s’il arrêtait de me prescrire les anticoagulants. Il n’avait pas d’argument pour les maintenir au vu de mes résultats. Mais il hésitait. Ça se voyait.
Alors, je l’ai aidé. Je lui ai parlé de mon projet de prendre l’avion au mois de juillet pour partir au Japon. Aussitôt, le pneumologue m’a répondu :
« ça n’est pas logique d’arrêter un traitement anti-coagulant quelques jours avant un vol long courrier ..».
Je comprenais sa logique même s’il est à mon avis beaucoup trop anxieux. Mais si je suis optimiste, je ne suis pas pneumologue.
Aussi, je lui ai donné un petit coup de pouce supplémentaire :
Je lui ai parlé des 24 heures du Samouraï auxquels j’allais participer trois jours plus tard.
Le pneumologue ne savait pas ce que c’était. Je lui en ai expliqué le principe :
Pendant vingt quatre heures, des experts en Arts Martiaux interviennent et on peut participer au nombre de séances que l’on veut. Ce n’est pas une compétition.
Il m’a demandé où ça se passait. J’ai cru qu’il allait être nécessaire que je lui situe la ville d’Herblay sur une carte. Ce n’était pas par envie de sa part d’y participer. J’ai plutôt eu l’impression de lui parler d’un événement d’un autre monde.
Même s’il portait un masque anti-Covid (il consulte dans un hôpital parisien de l’AP-HP), j’ai bien vu dans les yeux du pneumologue qu’il aurait presque pu se cogner le front contre son bureau devant ce que je lui disais. Moi, je lui parlais projets et perspectives. Lui, il était conditionné pour penser en termes de risques pour ma santé.
Parfaitement synchrone avec sa mécanique mentale inquiète, le pneumologue m’a parlé des risques d’hémorragie en cas de coups ou de blessure lors de la pratique durant ces 24 heures du Samouraï. Puisque je suis sous anti-coagulants depuis six mois.
Une hémorragie à la suite d’un coup ou d’une blessure est bien-sûr une possibilité. Mais, pour moi, ce n’est pas une fatalité.
Sans que le pneumologue s’en aperçoive, et bien qu’il me soit plutôt sympathique, son anxiété excessive lui donnait un caractère implacable. L’inquisition n’était pas très loin.
Puisque nous étions là « pour parler » et que le pneumologue s’appliquait à me démontrer et à m’expliquer, de manière éducative, les risques hypothétiques ou probables que j’encourais, j’ai fini par lui dire en toute décontraction :
« Mais lorsque je me rends régulièrement à mon travail à vélo, j’ai bien plus de risques de me faire percuter par une voiture -ou un (e) autre cycliste-. Je ne vais pourtant pas arrêter de faire du vélo pour cette raison ».
Le pneumologue s’est alors dépêché de modérer ses ardeurs anxieuses. Il m’a néanmoins laissé sous anti-coagulants en diminuant la dose. Il m’a prescrit un scanner et une scintigraphie. Il m’a dit que si ces examens étaient normaux, qu’il envisagerait d’arrêter les anti-coagulants. Autrement….
Alors que j’écris cet article quelques jours après les 24 heures du Samouraï, tout va bien. Le partenaire, lors des 24 heures du Samouraï, qui m’a donné un mauvais coup malencontreusement a d’abord été embarrassé bien qu’ignorant de l’épouvante magnitude 6 qu’il aurait pu provoquer chez le pneumologue. Mais je peux dire que je suis reparti des 24 heures du Samouraï avec uniquement une certaine fatigue, compréhensive, pour principal « désagrément ».
Et puis, un mauvais coup ou deux en s’entraînant, cela peut arriver. Afin de se préserver, il faut d’abord s’assurer que l’on se rend sur un tatami avec l’état d’esprit adéquat et que les autres en face sont dans le même état d’esprit.
Je ne suis pas venu aux 24 heures du Samouraï en me disant que j’allais tout (me) casser et devenir champion du monde. Les experts invités et, d’abord, les organisateurs de cet événement, sont aussi sur cette ligne. A partir de là, organisateurs et experts attirent à eux un public qui, à plus de 90 %, leur ressemblent. Je me rappelle encore de celui avec lequel j’avais pratiqué un peu de Ju-Jitsu brésilien au début des années 2000. Je venais alors d’un autre club où j’avais fait l’expérience du judo pendant une dizaine d’années avec Pascal Fleury comme prof.
Mon prof de Ju jitsu-brésilien était un très bon prof, un très bon pratiquant. J’ai de très bons souvenirs des quelques combats d’entraînement que j’ai pu faire avec lui au sol.
Mais mon prof de Ju-jitsu brésilien- qui s’entraînait tous les jours- aimait trop la baston. Il était chaud pour se battre n’importe quand. Il y prenait son pied. Cela transparaissait dans ses propos. Et, nous étions aux débuts de la médiatisation du MMA, de l’enthousiasme qu’il y avait à propos des combats Ultimate et des frères Gracie. C’était désormais « ça » qui faisait fantasmer ou une personnalité comme celle du boxeur Mike Tyson qui détruisait ses adversaires.
Celle ou celui qui aime la baston ou qui a absolument besoin de se prouver quelque chose au travers de la baston finit plus ou moins par se trouver directement ou indirectement enfermé dedans comme dans une prison. Et, mon prof de Ju-Jitsu brésilien avait dans son cours au moins un ou deux mecs (de moins de trente ans) qui s’y croyaient parce-qu’ils ne croyaient en rien d’autre en dehors du Ju-Jitsu brésilien. Et, d’abord, parce-qu’ils croyaient très peu en eux-mêmes. Et puis, j’arrivais aussi avec ma ceinture marron de Judoka et sans doute aussi que je transportais avec moi une certaine assurance. J’étais plus jeune. Plus physique. Plus explosif. En meilleure condition. Je me souviens m’être plus blessé durant cette année où j’avais pratiqué le Ju-jitsu brésilien qu’en dix ans de Judo où il m’était pourtant arrivé de me blesser.
On peut avoir besoin de rehausser son estime de soi au travers d’un sport ou d’un Art martial. Beaucoup d’expériences, de rencontres ou de découvertes faites lors de la pratique d’un Art martial, d’un sport de combat (ou autres) sont susceptibles de nous aider à nous révéler à nous-mêmes certaines de nos compétences en termes de combat.
Mais lorsque l’on en arrive à toujours avoir besoin de se démarquer ou d’écraser toutes celles et tous ceux que l’on trouve devant soi sur un tatami ou dans un ring, c’est problématique. Ou cela le deviendra. En MMA, on le voit avec les excès d’un Conor McGregor. Et, dans une autre discipline, j’ai l’impression que l’ancien champion du monde automobile Michael Schumacher doit son tragique accident de ski au même genre d’excès. Dans ce besoin constant, névrotique ou suicidaire, de prouver ou de se prouver que l’on peut être meilleur ou plus fort que les autres ou que l’on peut toujours franchir et dépasser les limites qui effraient ou font fuir le reste du monde. Alors que ce qui nous pousse à agir de la sorte, c’est souvent notre terreur de la mort ou de notre anéantissement.
J’ai de l’admiration pour Georges St Pierre, dont j’ai aimé le livre Le Sens du combat car c’est non seulement un très grand champion (et reconnu comme tel de manière assez unanime) mais aussi un combattant plutôt qu’un bastonneur :
Il n’a pas besoin de parader ou de rappeler tout le temps son palmarès.
Mais cette introduction a beaucoup empiété sur le récit des 24 heures du Samouraï, édition 2024. Je la crois nécessaire afin de donner une « conscience » à cette expérience des 24 heures du Samouraï. Afin de ne pas résumer cette expérience à de la prouesse martiale ou physique. Mais je comprendrais que cette introduction soit vue comme la partie la plus ennuyante de l’article.
Je n’ai pas fait beaucoup de recherches mais j’ai l’impression que les 24 heures du Samouraï sont actuellement un événement unique en France. S’il existe des stages ou des rencontres d’experts ou de Maitres d’Arts Martiaux en France et dans le monde, je crois que, seul, en France, l’événement les 24 heures du Samouraï permet de rencontrer autant d’experts et de Maitres d’Arts martiaux et de pratiquer sous leur conduite dans ces conditions. Il s’agit donc d’une expérience unique et qui, pour, l’instant, reste annuelle. Peut-être qu’un jour, l’événement deviendra-t’il semestriel. Car si les Arts martiaux dits traditionnels connaissent une désaffection grandissante, ils persistent et ont leur public. Et les 24 heures du Samouraï, dans la continuité du magazine Yashima, à nouveau proposé à la vente lors de l’événement, accueillent aussi d’autres pratiques martiales connotées comme « moins traditionnelles ».
C’est ainsi que, par exemple, cette année comme l’année dernière, est intervenu un expert en Penchak Silat ( Alvin Guinanao cette année, Ronan Datausse l’année dernière) . Ou qu’un autre, David Pierre-Louis, expert en grappling et en Ju-jitsu brésilien, assez proche de la sphère MMA, était intervenu l’année dernière.
Je ne serais pas du tout étonné si l’année prochaine, intervenait (ce serait « bien ») Richard Douieb, référence du Krav Maga ou un représentant de cette discipline.
J’aimerais aussi, que les 24 heures du Samouraï propose une ou deux expertes. Mais je me doute que les organisateurs de l’événement sont bien plus au fait que moi de la difficulté qu’il y a à trouver une experte (ou deux) qui réponde à leurs critères dans un univers où la plupart des experts sont encore plus souvent des hommes que des amazones.
Cette année, chaque séance a duré deux heures au lieu d’une heure quinze l’année dernière.
Au « menu », nous avions Sensei Seisuke Adanyia, pratiquant du karaté Shorinryu ; Sifu Didier Beddar pour le Kung Fu Wing Chun ; Alvin Guinanao pour le Penchak Silat, Raphael Couet pour le Hapkido ; Ludovic Rallo pour la Luta Livre ; Ben Boehli pour le Taekwondo ; Erwan Cloarec pour le Xingyiquan ; Nicolas Lorber pour le Shinjukai Karatedo ; Léo Tamaki pour l’Aïkido et pour finir Romain Anselmo pour le karaté Kyokushinkai.
Les 24 heures du Samouraï permettent de découvrir des Maitres et des experts dont je n’avais jamais entendu parler. Sensei Seisuke Adanyia fait partie, pour moi, de ces « inconnus ». Arrivé en retard, j’ai assisté à une partie de sa séance et j’y suis resté étranger.
Mais j’ai été marqué par sa façon de souligner l’importance de marcher d’une certaine façon dans la vie de tous les jours afin de pouvoir être prêt en cas d’attaque.
Après avoir reconnu Virginie, l’assistante de Sifu Didier Beddar, cela m’a fait de l’effet de voir celui-ci quelques mètres plus loin en train de faire des abdominaux, derrière le grand rideau, quelques minutes avant son intervention. C’est ce que l’on appelle donner l’exemple.
Sifu Didier Beddar nous a donné une séance où j’ai eu l’illusion, comparativement à l’année dernière, d’être plus à l’aise.
J’ai eu l’impression que le Kung Fu Wing Chun, c’est d’abord une très bonne garde qui limite beaucoup la possibilité des coups de poing. Et, là, on entre dans le sujet des systèmes. Chaque Art martial et chaque type de combat est un système. Un système de gestes, un système de pensées. Et le combattant, c’est celui qui apprend à maitriser et à développer le mieux possible son propre système de combat afin de piéger dedans son adversaire. On le comprend facilement en regardant Sifu Didier Beddar nous faire ses démonstrations. Il fait penser à un marionnettiste. Et, évidemment, la marionnette, c’est la personne qui lui fait face.
J’aimerais aussi voir comment ça se passe avec des attaques de jambe en Wing Chun. Je sais que Sifu Didier Beddar est aussi très fort en jambes.
S’exprimant en Anglais, Alvin Guinanao a peut-être beaucoup parlé et beaucoup fait d’humour mais on a bien vu qu’il avait son Penchak Silat chevillé au corps.
J’ai aimé chez lui, comme chez d’autres, le fait qu’il ait sa perception personnelle de son système de combat. Il ne se contente pas de le répliquer. J’ai aussi aimé le fait qu’il souligne que certaines postures de combat du Penchak Silat proviennent de certains modes de vie spécifiques à la culture du pays d’origine du Penchak Silat : on peut adopter un style de combat particulier mais il faudra aussi assimiler qu’il peut nous être impossible de bouger exactement comme certains de nos modèles. Notre corps et l’histoire que nous avons avec lui nous offre certaines possibilités que la pratique d’un Art martial (ou une autre discipline) peut nous permettre de découvrir et de développer. Mais notre corps a aussi ses limites culturelles comme physiques.
Raphael Couet m’a fait un peu peur. Lorsqu’il a nous dit, avec le sourire, de «taper dans la rotule ».
Bien qu’il soit sympathique, ces deux heures avec lui ont été magistrales pour comprendre que le hapkido, ce n’est pas pour les rigolos. Je l’avais déjà saisi l’année dernière où la séance m’avait déjà beaucoup plu. Mais on était ouvertement, comme déjà avec le Penchak Silat, dans un Art martial de destruction.
Si le Penchak Silat et le Hapkido me sont apparus comme des axes de destruction, la Luta Livre, avec Ludovic Rallo, elle, était , finalement, assez proche du Kung Fu Wing Chun, pour cette façon de coller à l’adversaire, de le suivre et de le retourner. Alors qu’au travers du Penchak Silat et du Hapkido, on cisaille, on casse, on fracasse et on percute, en luta Livre, on danse, on projette, on anesthésie et on finit par étrangler, par immobiliser ou par casser une corde ou une articulation chez l’adversaire. Fatigué bien qu’il ne soit que 21H30, j’ai assisté à toute la séance. La Luta Livre m’a fait penser à un mélange de Lutte de sumo, de judo, de ju-jitsu brésilien. Ludovic Rallo m’a semblé particulièrement affûté d’un point de vue gymnique.
Décidément trop fatigué, j’ai opté pour aller me reposer une heure trente après le début -à minuit- de la séance de Taekwondo de Ben Boehli. Mais j’ai aimé que celui-ci insiste pour que le travail se fasse en qualité sans recherche de la vitesse.
J’étais de retour pour l’intervention d’Erwan Cloarec. Et très intrigué. Auparavant, je m’étais douché et j’avais bénéficié de vingt minutes de shiatsu.
A 2h30 du matin, j’ai beaucoup aimé la simplicité d’Erwan Cloarec, sa modestie, son humour et son autodérision. Alors que ce qu’il nous a montré et fait pratiquer était aussi ardu que le Tai Chi Chuan démontré l’année dernière par Sifu Didier Beddar.
A 5h du matin, je n’ai pas été réceptif au début de la séance de Nicolas Lorber. Et, comme je me sentais à nouveau fatigué, je suis reparti faire un tour dans mon sac de couchage pendant 1H30 à nouveau.
Je voulais être présent pour l’intervention de Léo Tamaki et je l’ai été.
« La puissance vient de l’intérieur, l’imperceptible, vient des extrémités ».
Il était entre 7h30 et 9h30 quand j’ai entendu cette phrase et l’on se serait presque cru dans un débat télévisé de l’émission Droit de réponse avec Michel Polac. Je restitue ça avec humour mais cette remarque m’a beaucoup plu.
J’ai beaucoup aimé, aussi, le fait que Léo parle de « l’autre » ou de l’adversaire, comme d’une personne qu’il ne faut pas déranger et laisser dans son élan tout en s’effaçant, pour, bien-sûr, ensuite, le maitriser.
C’est encore Léo, je crois, qui a parlé de l’agresseur comme étant une proie. Cette inversion de pensée m’a aussi plu. De voir celle ou celui qui agresse comme étant la proie que l’on attend, finalement.
J’étais peu attiré par le karaté Kyokushinkai que je voyais surtout comme un karaté très dur et j’y suis vraiment allé pour voir. Lors de l’événement, j’avais discuté avec un adepte de cette forme de karaté qui ne croyait pas au combat au sol. J’ai compris que, pour lui, être au sol, signifiait être mort ou vaincu. Je n’ai pas pensé à lui parler des frères Gracie.
Ce jeune pratiquant ( ceinture noire) s’est aussi montré étonné et admiratif devant le fait qu’à mon âge, bientôt 56 ans, je me sois décidé à commencer le karaté ( le karaté Shotokan où je suis ceinture jaune). Sa remarque m’a étonné. Un quart de siècle nous séparait.
Je crois attacher moins d’importance à ma ceinture jaune que certaines personnes qui la voient. Parce-que je ne cours pas après la ceinture noire mais plutôt après l’expérience. Ou, plutôt, après la conscience. Mais c’est peut-être une excuse de vieux pour masquer sa diminution et sa faiblesse physique.
Il y avait d’autres quinquagénaires dans le dojo. Même si la moyenne d’âge des pratiquantes et pratiquants devait se situer dans les 35-40 ans. Il y avait même deux ou trois jeunes pré-adolescents parmi nous.
J’ai été agréablement surpris par la séance de karaté Kyokushinkai. Crier des Kiaï et apprendre à donner des Low Kick un dimanche matin après plusieurs heures de pratique martiale, je suis volontaire.
Les séances de deux heures, entrecoupées de pauses de 15 à 30 minutes, ont rendu plus faciles, je crois, le fait de se reposer entre deux séances, si on le souhaitait. Cependant, cela imposait aux intervenants de savoir maintenir l’intérêt des participants. Pour cela, certains horaires étaient plus délicats que d’autres. Mais j’ai l’impression que, dans l’ensemble, les experts sont parvenus à faire oublier ces deux heures.
Pour le mental et pour ma santé physique, les 24 heures du Samouraï m’ont été bénéfiques. Ils m’ont permis de me faire une idée plus précise de mon état de santé général. Je n’ai pas eu de problème particulier. J’ai participé à six interventions sur dix. Ce qui me convient. Je trouve que cela m’a bien préparé pour le Masters Tour en Juillet. J’ai eu quelques discussions. J’ai à nouveau fait des photos.
J’ai aussi à nouveau beaucoup apprécié que l’on nous remette en arrivant ce sac qui contient une bouteille d’eau minérale de 1,5 litre, une pomme, une banane et une orange ainsi que le service restauration qui nous propose à un tarif très fréquentable de quoi très bien manger.
Comme il est aussi très agréable de pouvoir rester dormir à l’intérieur du dojo, dans une partie dédiée. Ou d’entendre le Paris Taiko Ensemble.
A l’image de l’année dernière, durant ces 24 heures, j’ai choisi de rester dans le dojo pendant toute la durée de l’événement et mon téléphone portable était éteint la plupart du temps.
La suite de cet article se fera en principe avec le Masters Tour de cet été et quelques uns des organisateurs et participants présents lors de ces 24 heures.
Dans ce diaporama, vous pourrez retrouver la plupart de ces photos avec d’autres ( bonus) que je n’ai pas pu insérer dans cet article.
Je suis devenu un toqué de Lana Del Rey quelques jours avant les 24 heures du Samouraï
Bonjour ou bonsoir, ma situation est presque désespérée. Et, j’envisage, bientôt, peut-être, de devoir composer le 15 afin de demander des secours au Samu. Sauvez-moi.
Voici mon problème. J’aime, entre-autres, écouter de la musique. Je pratique très irrégulièrement les Arts martiaux. C’est peut-être d’ailleurs pour cela que je me suis mis dans cette situation apparemment inextricable.
Je suis un être de bientôt 56 ans, du genre masculin, hétéro-normé, conformé, chloroformé, noir, d’origine antillaise, sobre de l’usage comme de la fréquentation de toutes substances stupéfiantes et illégales, éduqué dans le zouk, le Kompa, le Reggae et la Soul par mes parents.
Cependant, depuis quelques semaines maintenant, j’écoute et fais écouter à mon domicile une artiste blanche, américaine, de plus de vingt ans ma cadette que je n’ai jamais rencontrée, qui n’est ni de mon âge ni de mes coutumes et dont les admirateurs se cachent.
Ce n’est pas la première fois que je parle d’elle ( Quand j’écoute de la musique : Lana Del Rey). Et, je suis en train d’écouter un de ses albums ( Chemtrails Over The Country Club ) alors que je publie cet article.
Cette artiste a un public. Puisque les places pour son premier concert à l’Olympia se seraient vendues en une minute et trente secondes et que toutes les places pour son unique concert en France, cet été, au mois d’Aout, en île de France, se sont rapidement vendues et que certaines réapparaîtront vraisemblablement sur le marché noir avec le bon tempo. Il m’arrive, de temps à autre, de manière impulsive et puérile de « chercher » une place pour ce concert prévu cet été.
Je n’ai pas de problème d’appétit ou de sommeil. Je continue d’effectuer mon travail dans des conditions satisfaisantes. Personne, pour l’instant, dans mon entourage proche et limitrophe n’a remarqué de changement notable ou préoccupant dans mon comportement.
J’ai toujours prévu de participer à la troisième édition des 24 heures du Samouraï dans quelques jours, le 17 et le 18 Mai au dojo d’Herblay, comme de me rendre durant trois semaines au Japon cet été au Masters Tour organisé et proposé par Léo Tamaki également à l’œuvre- avec d’autres- dans la préparation des 24 heures du Samouraï ( Les 24 heures du Samouraï au dojo d’Herblay ce 20 et ce 21 Mai 2023, 2ème édition).
Sauf que, chaque fois que je parle de cette artiste, autour de moi, et, peu importe l’âge de la personne à qui je m’adresse, les réponses que j’obtiens sont décourageantes malgré les millions d’album vendus. Peut-être qu’il se trouvera, aux 24 heures du Samouraï les 17 et 18 Mai, mais aussi lors du Masters Tour cet été, parmi les participantes et les participants, ainsi que parmi les intervenants, des admiratrices et admirateurs de Lana Del Rey.
Je ferai mon enquête.
Mais, pour l’instant, lorsque, subitement, plein d’espoir, je demande à mon interlocuteur ou à mon interlocutrice :
« Tu connais Lana Del Rey ? » ou sa variante « Tu aimes la musique de Lana Del Rey ? », j’hérite à chaque fois de la même réponse polie mais aussi imperturbable qu’une esquive ou un ippon :
« Je dois connaître ses deux ou trois tubes… ».
Ses deux ou trois tubes ? Ce ne sont pas eux qui m’importent. Depuis que je me suis mis à écouter Lana Del Rey par hasard, je n’ai pas encore réécouté ses deux ou trois tubes (Video Games et Born to die).
Pour l’instant, seul le bibliothécaire de mon travail où j’ai emprunté par curiosité, parce-qu’il était devant moi, le dernier album de Lana Del Rey , a comprimé un air de contentement lorsque je lui ai parlé de mon plaisir à l’écouter. Le contentement de celles et ceux qui, rigoureusement et constamment, font de leur mieux pour combattre la routine et l’enfermement sans être pour autant les personnes les plus à l’aise pour converser et pour expliciter une œuvre ou un kata.
Le bibliothécaire ne sera pas présent aux 24 heures du Samouraï 2024 où je serais bien étonné. En tout cas, il ne m’en a pas parlé. Et, moi, non plus.
Alors, je suis, là, comme un mendiant esseulé en train de quêter un quignon de discussion à propos de Lana Del Rey. Je n’ai pas encore opté pour me rapprocher de groupes d’admirateurs de Lana Del Rey. Je reste très conservateur en termes de relations sociales ainsi que très méfiant envers les excès réalisés grâce aux réseaux sociaux.
Il m’arrive néanmoins, sur le net, d’essayer de dénicher des informations supplémentaires sur ses textes. Bien-sûr, j’ai déjà lu et relu la page wikipédia qui est consacrée à sa biographie. Je ne l’ai pas encore imprimée. Je n’en suis pas à acheter des posters, des mugs ou des tee-shirts à son image ou des éditions spéciales de ses albums (j’ai vu que cela était possible) car cela ne fait pas partie de mon carburant. Par contre, quand je le peux, au travail ou dans le train, je sors mon baladeur, et, je me mets un petit coup de Lana Del Rey dans les oreilles et dans la tête.
Mais peut-être suis-je en train d’endurer un juste châtiment que j’ai mérité car, en me mettant à écouter Lana Del Rey, je suis tombé bien bas alors que j’avais « tout » pour réussir…
C’était mieux avant ?
Hier soir, en effet, un événement vraiment très grave s’est produit.
Plein d’enthousiasme, j’avais commencé à écouter l’un des derniers albums de Marcus Miller, Laid Black (2018). Un album parmi la quarantaine ou cinquantaine (centaine ?) de Cds que j’ai amassés grâce à des emprunts- pour certains prolongés- dans plusieurs médiathèques ces trois dernières semaines ou ces deux derniers mois.
Marcus Miller que j’ai vu deux fois en concert. Marcus Miller qui a joué en concert avec Miles Davis à partir de 1981 et qui a composé la plupart de ses derniers titres.
Marcus Miller ! L’un des derniers protégés de Miles !
Cela se passe bien avec le premier morceau, Trip Trap.
Puis, Que Sera Sera deuxième titre de l’album Laid Black de Marcus Miller, sur lequel chante Selah Sue ( Selah Sue !), a commencé depuis à peine deux minutes que j’en ai assez.
Marcus Miller est devenu depuis des années (peut-être depuis la mort de Miles en 1991) une Majesté musicale illustre et incontournable.
Mais, hier soir, j’ai plaqué Marcus Miller, pour, à la place, remettre dans mon lecteur Cd un ” vulgaire” album de Lana Del Rey :
Norman Fucking Rockwell ! ou NFR !
Si j’avais une platine disque, j’aurais effectué exactement les mêmes gestes avec les disques vinyles. Je le sais.
Pourtant, tout, sur la pochette de l’album de Marcus Miller est présent pour me retenir. Le beau visage et le regard direct, conquérant, assuré ou séducteur du « Grand » Marcus Miller avec son beau chapeau et que l’on devine torse nu/Le terme « Black » et le jeu de mot Laid Back-Laid Black et le tampon Blue Note, référence musicale absolue du Jazz.
En face, la couverture de l’album de Lana Del Rey, énigmatique, spontanément, me parle et m’attire moins. Cette main tendue de Lana Del Rey vers nous avec ses ongles vernis en jaune. Ce drapeau américain derrière elle. Ce voilier sur la mer et ce jeune homme qui n’est pas Norman Rockwell mais que l’on est poussé à prendre comme tel. Ce ciel au dessus d’eux qui s’avère avoir été peint, détail dont je me suis aperçu seulement lorsque j’ai voulu faire une photo de cette pochette pour cet article.
Si j’avais dû choisir entre les deux albums en me fiant à leurs couvertures, j’aurais opté pour Laid Black de Marcus Miller. Mais même si le visuel d’un artiste est capital, on écoute encore la musique ou, du moins, peut-être que pour moi, ce que j’entends peut encore l’emporter sur ce que je vois d’un artiste musical dans certaines conditions.
Je vais également ajouter que j’ai déjà été « déçu » plusieurs fois par Marcus Miller depuis la mort de Miles Davis. Tant en concert que dans ses albums. J’ai l’impression qu’il jouait mieux lorsqu’il composait pour Miles ou lorsqu’il se mettait à son service. Je trouve que sa maitrise technique mégalomaniaque prend trop de place et que, faute d’alter-ego sur scène et en studio, que sa musique est devenue académique, ennuyante, même si imposante, et qu’elle fait surtout plaisir à celles et ceux qui pensent et intellectualisent la musique beaucoup plus qu’ils ne la ressentent.
Je crois que beaucoup de celles et ceux qui aiment aujourd’hui la musique de Marcus Miller sont aussi identiques à celles et ceux qui se rendent à un Opéra pour s’y montrer et faire œuvre de mondanités. Hyper-intellectualisme et mondanité sont ce que je reproche à Marcus Miller et ce dont, pour l’instant, la musique de Lana Del Rey, me semble encore préservée.
Aujourd’hui, et depuis des années, plus personne, parmi les musiciens expérimentés de poids, aujourd’hui, n’est présent pour exiger de Marcus Miller qu’il fasse montre de créativité. Alors que Lana Del Rey, elle, est encore inspirée. Il est vrai aussi qu’elle est bien plus jeune et que Marcus Miller a mangé tellement de musique et composé pour tellement d’artistes. Je manque peut-être tout simplement de gratitude pour Marcus. Mais je doute que lui soit en attente d’une quelconque gratitude de quiconque. Ou cela signifierait qu’il a pris sa retraite or il ne l’a pas prise. Ou peut-être que je ne comprends plus ou ne suis plus de ses “combats”. L’un de nous deux a vieilli plus que l’autre. Au point qu’aujourd’hui, j’en suis à écouter Lana Del Rey.
J’avais déjà écouté l’album Norman Fucking Rockwell ! deux ou trois fois. Et, de façon impérieuse, hier soir, j’ai voulu connaître la raison pour laquelle on parlait de cet album comme d’un des chefs-d’œuvre de Lana Del Rey. Alors que je lui préfère pour l’instant très largement son dernier album Did you know that there’s a tunnel under Ocean Blvd ou son album Lust for Life. Deux albums que j’ai écoutés pour la première fois il y a à peu près un mois maintenant.
Hier soir, j’ai éteint la lumière, et, dans l’obscurité, assis dans mon fauteuil avec la musique qui sortait des enceintes derrière moi, j’ai réécouté plusieurs des titres de Norman Fucking Rockwell. L’Anglais chanté, je le comprends assez peu alors je n’ai pas tout avalé. Même si Lana Del Rey a un élan vocal, qui, sans être monacal, est beaucoup plus facile à suivre que celui d’un chanteur de Heavy Metal ou d’une rappeuse type Nicki Minaj. Les termes « Bitch » et « Fuck », lorsqu’ils sont arrivent, sont très faciles à comprendre. Ce n’est pas d’eux dont je parle.
Alors que les plages de Norman Fucking Rockwell s’étendaient, j’ai repensé au dernier album de l’artiste Adele que j’avais emprunté en même temps que le dernier de Lana Del Rey ainsi qu’à l’album Sorore du trio français Vitaa/Amel Bent/Camélia Jordana. Comparer des artistes et établir entre eux des hiérarchies est trompeur tant leurs univers et leurs intentions peuvent être différentes mais aussi parce-que des artistes qui nous semblent dissemblables peuvent très bien s’entendre :
Bob Marley écoutait James Brown. Miles Davis écoutait Bob Marley, Chopin autant que le zouk de Kassav’. Et Jacques Brel et Johnny Halliday étaient potes.
Par ailleurs, j’ai appris que bien des chanteuses et des chanteurs de « variétés » dont on peut trouver les titres ou les œuvres ringards sont souvent beaucoup plus au fait de la musique qu’on ne peut le croire et ont des textes bien plus recherchés que l’idée que l’on s’en fait a priori. Il se trouve « simplement », que, eux, c’est dans le domaine de la variété qu’ils ont pu percer comme d’autres, au cinéma, parviennent à faire une carrière en restant dans le registre ( comique, érotique, spectaculaire ou patibulaire) pour lequel on leur propose invariablement des rôles.
Mais en réentendant le titre Venice Bitch, j’ai eu une idée de ce qui m’entraîne chez Lana Del Rey.
La musicalité, le format.
Lana Del Rey n’a pas peur de la musique. Elle ne fait pas que chanter et jouer avec sa voix en se cramponnant à « son » territoire. Sur un de ses titres, elle est capable de citer John Denver et sur un autre les Kings of Leon mais aussi…Sun Ra. Sur un autre, elle fait un duo avec l’artiste The Weeknd. J’ai aussi « vu » (sur internet) qu’elle a chanté en duo avec Billie Eilish mais aussi avec Chris Isaak.
Sur son album Norman Fucking Rockwell (oui, j’ai fait des recherches pour connaître le sens du nom de cet album) le titre Venice Bitch, lui, dure plus de 9 minutes.
Lorsque l’on décide, en tant que chanteuse considérée plus ou moins comme « pop » de faire un morceau d’une telle longueur, cela signifie que l’on ne va pas chercher à le calibrer pour en faire un tube destiné aux fuseaux horaires de la radio et des boites de nuit (ou dance floor).
Sur ce titre, Lana Del Rey fait beaucoup mieux que de se contenter de lécher le mot « Bitch » pendant neuf minutes. La musique est, là aussi, une particule sonore entière et tentaculaire. Ce n’est pas un bruit de fond ou un prétexte pour « sortir » Lana Del Rey de son silence et nous faire entendre la cour de sa jolie voix.
Je ne dirais pas que Venice Bitch va suffire à me faire revoir l’album Norman Fucking Rockwell à la hausse. Par contre, il me confirme que l’artiste Lana Del Rey (qui semble sortir un album tous les deux ans voire presque tous les ans) est tout sauf un artifice. Et, je comprends, lorsqu’on a pris la peine de vraiment l’écouter, que l’on ait plaisir à continuer de le faire.
Je crois que Miles serait tout à fait d’accord avec ça. Et, peut-être Marcus Miller aussi. Lana Del Rey, elle, serait peut-être embarrassée. Ce qui me rendrait sa musique encore plus attachante.
Mélissa Laveaux en concert à l’espace 1789 ce 6 octobre 2023
La première fois, sa voix aurait pu sortir d’un coquillage ou d’un nombril posté près du cartilage de mes oreilles. Elle contenait la gnole de l’enfance et ce Créole d’Haïti sur lequel j’avais pu voir danser et dansé dans les soirées antillaises de métropole mais aussi pendant les vacances estivales en Guadeloupe. Comme elle semblait presque miauler et que le Créole Haïtien reste pour moi une langue à ellipses, les paroles de Mélissa Laveaux me paraissaient très éloignées des sujets des œuvres du réalisateur Raoul Peck lorsqu’il parle de leur pays.
Lorsque, quelques années plus tard, je me suis rendu à ce concert en octobre 2023, à l’Espace 1789 de St Ouen en Seine St Denis, j’avais appris entre-temps que Mélissa Laveaux était largement majeure et plus offensive que les mélodies de comptines auxquelles certains de ses titres peuvent faire penser. Aussi n’ai-je pas été surpris, à la fois par sa réactivité devant les tentations transphobes d’un des spectateurs comme par la découverte, par celui-ci, que Mélissa Laveaux était autre qu’une artiste « du soleil » venue chauffer l’ambiance de notre début de soirée.
Entre plusieurs chansons, Mélissa Laveaux s’est montrée cultivée, attachée à l’Histoire, presque pédagogique et aussi ironique- ou humoristique- se moquant de manière répétée de cette anxiété assez généralisée qui se dorait, alors, concernant l’invasion des punaises de lit dans la ville de Paris, quelques mois avant l’organisation des Jeux Olympiques de 2024.
Après le concert, patiemment, Mélissa Laveaux a pris le temps de dédicacer et de vendre ses albums à son public. Ce qui m’a donné la possibilité de trouver un air de ressemblance à une des spectatrices avec l’humoriste Fanny Ruwet. Mais ce n’était pas elle.
Mélissa Laveaux a hésité avant de me donner son accord pour que je sois pris en photo avec elle. Elle a finalement accepté en m’en donnant la raison, personnelle. Et, moi, j’ai alors hésité pour montrer ces quelques photos et pour m’occuper de cet article avant de le lui envoyer comme nous en avions convenu ensemble. Plusieurs mois sont passés depuis et je me suis dit que cet article à propos du concert de Mélissa Laveaux devait être publié sur mon blog comme ceux que j’ai écrits sur d’autres artistes en concert ( Tricky à l’Olympia ce 6 mars 2024, Rhizomes : Quartier Général en concert à la Cave Dimière d’Argenteuil…). Ne serait-ce que pour une question d’égalité.
Rhizomes : Quartier Général en concert à la cave Dimière d’Argenteuil
Un mois plus tôt, le 29 mars, le groupe Rhizomes est passé en concert à la cave Dimière d’Argenteuil. Il s’était associé à cinq chanteuses originaires de Grèce, d’Italie, d’Espagne, de Kabylie, de Turquie et du Maroc. Le groupe Rhizomes étant déja pourvu de deux chanteuses (et musiciennes) originaires d’Israël et de Tunisie, cela a débouché sur sept chanteuses.
L’ensemble s’est appelé Quartier Général. Deux termes masculins qui portaient en leur sein des histoires féministes et des souhaits d’un présent plus apaisant. Il m’a fallu du temps pour choisir ces photos et les publier. Pour que, désormais, à leur tour, elles puissent prendre le temps de vous parler de ce concert.