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Arts Martiaux : un article inspiré par Maitre Jean-Pierre Vignau

Jean-Pierre Vignau, chez lui, ce samedi 21 novembre 2020.

 

           Arts Martiaux : un article inspirĂ© par Maitre  Jean-Pierre Vignau

 

L’inconnu :

 

 Jean-Pierre Vignau, pratiquant d’Arts Martiaux au moins depuis 1958, Maitre (ou Sensei) depuis plusieurs dĂ©cennies  m’était inconnu il y a encore sept mois. Son Ă©cole d’Arts Martiaux, le Fair Play Sport, se trouve dans le 20 ème arrondissement de Paris.

Sur cette photo ci-dessus que j’ai prise chez lui ce samedi après-midi, Jean-Pierre Vignau a l’allure d’un gentil papy tranquille. Cela s’explique par le sens de l’accueil avec lequel sa femme Tina et lui m’ont reçu. Et, avant ça, cela s’explique aussi par le fait que lorsque cette photo a Ă©tĂ© prise, nous en Ă©tions Ă  la fin de notre rencontre. D’abord, je suis convaincu qu’avant mĂŞme que je ne me dĂ©place pour venir chez lui, qu’il savait dĂ©ja que je n’Ă©tais pas un ennemi. Je crois que certaines personnes savent “lire” ou percevoir les rĂ©elles intentions de celles et ceux qui les entourent et les sollicitent.

 

Il est quantitĂ© de gens qui se pensent douĂ©s et perspicaces lorsqu’il s’agit de dĂ©coder ou de jauger les autres et qui s’illusionnent. Je ne mettrais Jean-Pierre ni dans cette catĂ©gorie de personnes et encore moins dans cette illusion. Pourtant, j’Ă©tais dĂ©tendu en sa prĂ©sence. Et,  je me suis rendu chez lui et sa femme en toute confiance. L’arme posĂ©e sur la table Ă  cĂ´tĂ© de lui n’est pas un objet de dĂ©coration que Jean-Pierre aurait achetĂ©e dans une brocante pour se faire plaisir. Pas plus qu’elle n’est lĂ  pour ouvrir le courrier des factures d’Ă©lectricitĂ© ou afin d’Ă©plucher les pommes de terre pour faire des frites. Jean-Pierre est allĂ© la chercher pour m’illustrer le mot d’une arme que je ne connaissais pas. Pour avoir un peu eu cette arme dans la main, je peux certifier qu’elle pèse son poids. Ce n’est pas du liège. Ni un jouet en aluminium. 

Jean-Pierre Vignau est «  9ème Dan I.B.A Hanshi Â». Je l’écris parce-que j’ai l’information sous les yeux lors de la rĂ©daction de cet article. Car le grade du Maitre a une importance formelle et est aussi un gage de lĂ©gitimitĂ© officielle. L’équivalent d’un « diplĂ´me Â» reconnu. MĂŞme si un grade, ou un Dan, est sĂ»rement plus qu’un diplĂ´me. Ce n’est pas son nombre de Dan, pourtant, qui m’a donnĂ© envie d’aller vers Jean-Pierre Vignau.

 

Son interview par LĂ©o Tamaki – dans le numĂ©ro 7 du magazine Self & Dragon– m’a appris son existence.

MalgrĂ© la petite faute de frappe sur le nom, il s’agit bien du mĂŞme homme que celui que j’ai pris en photo. Sauf qu’il est lĂ  en pleine dĂ©monstration.

 

Avant notre premier confinement, en fĂ©vrier, j’avais eu la possibilitĂ© de dĂ©couvrir un cours de Self-DĂ©fense dispensĂ© par Sifu Roger Itier, que je rencontrais pour la première fois. La seule fois Ă  ce jour. Mais quelques semaines après cet essai, qui m’avait plu, une certaine douleur persistante m’avait obligĂ© Ă  me rendre Ă  cette  Ă©vidence : Je m’étais blessĂ© et j’allais devoir en passer par un kinĂ©. Puis, le premier confinement dĂ» Ă  la pandĂ©mie du Covid-19, ses fermetures, ses peurs et ses inconnues,  Ă©tait arrivĂ© mi-Mars.

 

Par chance, près de mon travail, se trouve un centre de presse resté ouvert pendant le confinement. Centre où j’ai pris l’habitude de me procurer des journaux relatifs aux actualités. Et où, en prenant le temps de passer dans les rayons, j’ai aperçu les magazines Yashima, Self & Dragon, Taichi Chuan mais aussi Self & Dragon Special Aikido.Inspiré par un certain besoin d’Arts Martiaux, j’ai commencé à acheter régulièrement leurs numéros.

 

J’avais entendu parler de Roger Itier, Maitre en Arts Martiaux chinois, en suivant deux ou trois ans plus tĂ´t une formation Massage bien-ĂŞtre au centre Tao situĂ© dans le 19ème arrondissement. Formation que j’ai « terminĂ©e Â» Ă  ce jour. Lors de cette formation, de façon plus ou moins intuitive, influencĂ© sans doute par mes prĂ©cĂ©dentes expĂ©riences  sportives, erreurs incluses, j’avais commencĂ© Ă  percevoir l’importance du souffle. On nous avait sensibilisĂ© Ă  l’importance de nos gestes, de notre rythme, de notre prĂ©sence, mais aussi du placement comme du balancement de notre corps dans l’espace par rapport Ă  l’autre. Afin d’éviter de nous Ă©puiser le moins possible. Mais aussi, afin de ne pas nous faire du mal Ă  nous-mĂŞmes. La personne qui pratique le massage pour le bien-ĂŞtre d’autrui est aussi supposĂ©e faire attention Ă  sa personne lorsqu’elle pratique.  Je crois que l’on peut retrouver ça dans un Art Martial.

 

Pendant cette formation massage bien-être, j’avais été étonné de finir par comprendre que dans bien des pratiques sportives, et depuis des années, ne serait-ce que pour faire de simples étirements, peu d’attention était apportée à notre respiration. A travers le sport, trop de fois, notre rapport au corps est un rapport raide, brutal et mécanique. Machinal. Il est plus que courant de voir des sportives et des sportifs tirer sur des extrémités de leur corps sans y penser et sans tenir compte de leur respiration après ou avant une séance d’entraînement. On leur a dit ou ils ont appris qu’il faut faire ça, alors, elles et ils font ça. J’ai fait partie de cette population. Et j’en fais sûrement encore partie.

J’ai pris du temps pour m’apercevoir que la plus grande partie des Ă©tirements que nous « faisons Â» dĂ©coule souvent de postures de yoga oĂą savoir bien respirer est indispensable.

 

Si ce comportement que nous avons adoptĂ© envers notre corps et notre respiration a d’abord des incidences telles que des blessures diverses – physiques et morales-  par entĂŞtement, nĂ©gligence, imprudence ou ignorance, ce comportement a aussi des retombĂ©es sur nos rapports avec les autres comme avec le monde. Mais j’écris ça maintenant. Je n’ai pas racontĂ© tout ce bla-bla Ă  Roger Itier ce jour oĂą je l’avais rencontrĂ©. Lui, il savait dĂ©jĂ  tout ça largement.

 

J’ai fait mon essai. A la fin du cours, je me suis rhabillĂ© après avoir pris le temps de me doucher et de discuter. Je me suis ensuite aperçu que je m’étais blessĂ©. Le confinement est arrivĂ©. Et, lĂ , j’ai fait comme tout le monde. A ceci près que j’ai fait partie de celles et ceux qui ont continuĂ© de se rendre Ă  leur travail comme si «  de rien n’était Â» pendant la première vague du Covid. Puisque ma profession de soignant fait partie des professions en activitĂ© tous les jours de l’annĂ©e et sur toutes les « branches Â» horaires de jour comme de nuit. Et, durant le premier confinement, donc, après mes nuits de travail, le centre de presse a en quelque sorte remplacĂ© la mĂ©diathèque de ma ville.

 

 

Dans le Self & Dragon numĂ©ro 7,  LĂ©o Tamaki m’avait permis de dĂ©couvrir Jean-Pierre Vignau. LĂ©o Tamaki, aussi, m’était inconnu. Aujourd’hui, je peux Ă©crire son prĂ©nom et son nom de tĂŞte car je me suis dĂ©sormais un peu mieux familiarisĂ© avec eux. Je « sais Â» que LĂ©o Tamaki est un Maitre d’AĂŻkido, qu’il a Ă©tĂ© un Ă©lève de Jean-Pierre Vignau,  qu’il travaille, aussi,  en tant que journaliste, pour le magazine Yashima. Qu’il tient un blog. Qu’il a créé son Ă©cole d’AĂŻkido, KinshikaĂŻ. Et que plus de deux cents jours par an, de par le monde, il dispense des cours d’AĂŻkido.

 

Mais soyons- Ă  peu près- concis :  

 

A mesure que je parcourais ces divers magazines traitant des arts martiaux asiatiques,   j’apprenais l’existence d’un certain nombre de Maitres d’Arts Martiaux semblant, d’un seul coup, sortir d’une mĂŞme boite tels ces automates meurtriers d’allure enfantine dans l’adaptation cinĂ©matographique de l’œuvre de Philippe K.Dick : Planète Hurlante.

 

 

 

Sauf que ces Maitres d’Arts martiaux ne criaient pas sur le papier. C’était principalement des hommes. Asiatiques ou occidentaux. La plupart avaient Ă  leur actif vingt Ă  trente annĂ©es, en moyenne, de pratique cumulĂ©e dans diffĂ©rentes disciplines martiales.  Plusieurs de ces pratiquants Ă©taient des Maitres enseignant depuis plusieurs dĂ©cennies.  Jean-Pierre Vignau fait partie de ces « derniers Â».

Un certain nombre de ces Maitres Ă©taient passĂ©s ou enseignaient dans des villes, Paris et des villes de la banlieue parisienne par exemple, oĂą je ne comptais plus mes allĂ©es et venues. Et, moi, « amateur Â» d’Arts Martiaux depuis des annĂ©es, plutĂ´t sportif, Ă  peu près ouvert et curieux, attachĂ© Ă  une certaine polyvalence, j’étais passĂ© Ă  cĂ´tĂ©.

 

C’était Ă  se demander oĂą j’avais vĂ©cu, par quelles vitrines je m’étais laissĂ© happer et, aussi, qui j’avais rencontrĂ© pendant toutes ces annĂ©es.  

 

Je sais avoir fait et continué de faire des rencontres importantes en dehors des Arts Martiaux.

 

Pourtant, plusieurs fois, en lisant Yashima, Self & Dragon, Self & Dragon spĂ©cial AĂŻkido, TaĂŻ Chi Chuan ou TaĂŻ Chi Mag, j’ai eu le sentiment d’avoir ratĂ© une partie de ma vie.  En « occultant Â» tous ces Maitres et tous ces enseignements dont j’entrevoyais les traits -au travers de persiennes – dans ces articles que je lisais.

 

Si tout dans la vie peut être Art Martial et que la pratique d’un Art Martial ne se résume par à la satisfaction ressentie dans un dojo ou sur un tatamis, il y a quand même, pour moi, un sentiment de gâchis, dans le fait d’avoir ignoré des personnes (Maitres, pratiquantes et pratiquants d’Arts Martiaux) pendant tant d’années.

 

 

 

Aujourd’hui, si je cite Conor McGregor, vedette du MMA prĂ©sentĂ© par Google comme un « pratiquant d’Art Martial Â» ou Aya Nakamura, il y a des chances pour qu’une certaine partie de la jeunesse masculine et fĂ©minine de France sache de qui je parle. Il y a une vingtaine d’annĂ©es, les « Ă©quivalents Â» de Conor McGregor avaient aussi une certaine notoriĂ©tĂ©. Les Gracie, FĂ©dor Emelianenko, Bertrand Amoussou, JĂ©rome Le Banner, Gilles Arsène, Andy Hug et d’autres concernant le MMA et l’UFC.  Et, n’oublions pas dans le registre de la boxe, Mike Tyson. Je les « connaissais Â» eux et d’autres : j’avais vu des vidĂ©os ou lu Ă  leur propos.

 

Photo prise Ă  la gare de Paris St Lazare, ce 25 novembre 2020.

 

Si je cite Aya Nakamura, plus chanteuse de son Ă©tat que combattante de MMA, mĂŞme si l’on peut comparer son succès mĂ©diatique et ses punchlines  Ă  ceux de certaines vedettes de MMA, c’est parce-que, comme Conor McGregor, ses vidĂ©os sur Youtube ou sur les rĂ©seaux sociaux totalisent gĂ©nĂ©ralement beaucoup plus de vues, et de loin, que les vidĂ©os montrant Jean-Pierre Vignau ou d’autres Maitres d’Arts Martiaux en dĂ©monstration sur youtube.

 

C’est un peu l’histoire du Blues ou du Jazz, ou d’une « quelconque Â» musique ou Ĺ“uvre artistique, par exemple, qui se rĂ©pète. Aujourd’hui, des grandes vedettes de Rock, de Pop ou de Rap doivent beaucoup Ă  leurs aĂ®nĂ©s du Blues ou du Jazz. Pourtant, ce sont les vedettes de Rock de Pop ou de Rap dont on connaĂ®t le plus les Ĺ“uvres, les spectacles, l’image ou le succès. Et ce sont leurs concerts qui affichent complet dans des salles gigantesques dont le prix d’accès peut ĂŞtre excessif tandis que les plus « anciens Â» et les moins « people Â» jouent dans des salles plus modestes pour des sommes pouvant ĂŞtre deux Ă  trois fois moins Ă©levĂ©es. Aujourd’hui, la pandĂ©mie du Covid, sorte d’ogre sanitaire qui annihile et dĂ©vore nos volontĂ©s, empĂŞche les concerts. Mais lorsqu’il se sera un peu Ă©loignĂ©,  de mĂŞme que la menace terroriste, on peut s’attendre Ă  ce que, pour compenser, beaucoup d’entre nous aurons besoin de se distraire dans toutes formes de rĂ©jouissances et de festivitĂ©s immĂ©diates et extĂ©rieures. Dont des concerts et des festivals.  

 

J’aime Ă©couter la musique d’Aya Nakamura comme il m’est arrivĂ© de regarder des combats de Conor McGregor et d’autres combattants ou d’aller Ă  des concerts et des festivals. Je m’étonne simplement d’avoir pu ĂŞtre en partie captivĂ© par une certaine partie du « spectre Â» des possibilitĂ©s qui nous est offert en permanence sur internet ou ailleurs. Au dĂ©triment des Arts Martiaux par exemple. Parce-que, je me crois et me croyais assez ouvert.

 

C’est ouvert :

 

 J’avais entendu parler de Maitre Henry PlĂ©e de son vivant (celui-ci est dĂ©cĂ©dĂ© en 2014 Ă  l’âge de 91 ans).  J’ai pratiquĂ© un peu de judo. J’ai lu, il y a une vingtaine d’annĂ©es, La Pierre et le Sabre d’ Eiji Yoshikawa, roman inspirĂ© de la vie de Miyamoto Musashi. Une fois, dans ma vie, grâce Ă  une amie, je suis allĂ© au Japon. C’était en 1999, l’annĂ©e de la sortie du film Matrix des frères Wachowski, avant qu’ils ne deviennent deux femmes, film que j’avais tenu Ă  aller revoir au Japon dans une salle de cinĂ©ma. Avec cette amie, j’étais allĂ© assister Ă  un tournoi de Sumo Ă  Tokyo.

 

Comme nous le savons, nous disposons aujourd’hui d’un très grand accès- quasiment illimité- à l’information et aux connaissances.

Mais tout dĂ©pend de ce que nous cherchons.  Et comment nous le cherchons. Nous disposons de plus en plus facilement « d’armes Â» de plus en plus puissantes. Mais nous rĂ©gressons peut-ĂŞtre de plus en plus concernant la Maitrise de nos Ă©motions, de nos jugements comme de nos actions. Nous manquons peut-ĂŞtre, de plus en plus, d’éducation. Me concernant, par exemple, il est Ă©vident que si, aujourd’hui, je retournais au Japon, que j’irais y chercher autre chose qu’il y a une vingtaine d’annĂ©es. Et ce serait sans doute pareil pour les autres destinations oĂą je me suis dĂ©jĂ  rendu de par le passĂ©.

 

Mais si nous sommes de plus en plus agressifs envers les autres et envers nous-mĂŞmes, c’est sans doute, aussi, parce-que, dans le fond, malgrĂ© les  « progrès Â»,  notre sentiment d’insĂ©curitĂ© personnel a  Ă©galement augmentĂ©.

 

 

Ma rencontre ce week-end avec Jean-Pierre Vignau est peut-ĂŞtre une tentative de dĂ©but de rĂ©ponse Ă  cette question :

 

Qu’est-ce qu’un Maitre ?

 

 

Qu’est-ce que l’on recherche chez lui ?

 

Est-ce celle ou celui auquel on se soumet parfois ou souvent aveuglement, jusqu’à l’étranglement, en l’échange d’un peu de (sa) protection ?  

 

Est-ce celle ou celui qui nous permet de devenir rĂ©sistants et autonomes quelles que soient les difficultĂ©s ou les handicaps que nous rencontrerons dans la vie ?

 

Pour certains, Le Maitre est celui qui vous forme, qui vous dĂ©livre un permis de tuer et d’intimider qui sera le moyen de devenir cĂ©lèbre en mĂŞme temps que meurtrier et terroriste.  Ou mercenaire. Je ne recherche pas ce genre de Maitre. J’ai « lu Â» cependant que Jean-Pierre Vignau avait Ă©tĂ© un temps, mercenaire.

 

Pour d’autres, le Maitre ou la Maitresse est celle ou celui qui vous isole et vous protège du Monde comme de tous ses dangers et de ses perversitĂ©s et vous «  aide ( ?!!) Â» Ă  vous en « purifier Â» en vous sĂ©parant de toutes vos possessions matĂ©rielles, spirituelles mais aussi de vos vies relationnelles acquises dans notre Monde « malsain Â». Ce n’est pas pour moi.

Pour d’autres, le Maitre ou la Maitresse est celle ou celui qui vous promettra un Etat militaire et policier. La paix dans les rues. La torture et la censure derrière les murs. Je ne veux pas de ce genre de Maitre, non plus.

 

Il est aussi des Maitres et des Maitresses qui acquièrent une très forte position sociale et Ă©conomique qui se mesure aussi Ă  l’étendue des possessions matĂ©rielles. Disposer d’une voiture luxueuse, d’un château ou d’une villa Ă  montrer ne m’a pas conquis. Cette « absence Â» d’ambition, dans un monde oĂą avoir des « relations Â»  peut ĂŞtre bien plus avantageux que les compĂ©tences et la bonne volontĂ© m’a sĂ»rement desservi. Mais cela n’empĂŞche pas d’apprendre et de s’en tenir Ă  certaines prioritĂ©s :  

 

On ne « voit Â» pas un Maitre ou une Maitresse dans une vidĂ©o, sur un site ou dans un article. On les rencontre. Au mĂŞme titre que si l’on se contente de voir sa vie plutĂ´t que de l’expĂ©rimenter, on se contente alors de l’envisager. Tel le fumeur de shit devant son joint,  le buveur devant son verre, l’escroc devant sa combine,  le tueur devant son arme, l’agresseur devant sa victime.

 

L’exigence vis-Ă -vis de soi mĂŞme :

 

Si je suis exigeant envers moi-même, Jean-Pierre Vignau l’est sans doute encore beaucoup plus envers lui-même. Et depuis bien plus longtemps que moi.

 

C’est sans doute, pour moi, une des différences nécessaires entre un Maitre et un élève. Et c’est parce-que cette différence se perçoit concrètement que se créent l’autorité, la légitimité et l’écoute du Maitre.

 

Si certaines valeurs aujourd’hui se « perdent Â» ou semblent se perdre, c’est peut-ĂŞtre, aussi,  parce qu’elles sont d’un cĂ´tĂ© rĂ©servĂ©es, telles des places de parking, Ă  quelques titulaires avant mĂŞme leur naissance. Tandis que ces mĂŞmes valeurs continuent d’être livrĂ©es telles des jolies phrases ou des emballages sous vide Ă  d’autres qui doivent se contenter de parpaings pour sommiers lorsqu’ils s’endorment le soir. Après que ces derniers se soient faits « arnaquer Â» un certain nombre de fois, certains d’entre eux finissent par se mĂ©fier de tout y compris des meilleures volontĂ©s qu’ils rencontrent peut-ĂŞtre trop tard.

 

Il y a aussi des histoires de « clan Â» peut-ĂŞtre de plus en plus ancrĂ©es. Des histoires et des croyances hĂ©rĂ©ditaires qui guident, qui brident, et qui nous disent que lorsque l’on fait partie d’un clan, d’un quartier ou d’une famille, qu’il est impossible de faire partie d’un autre ou de plusieurs autres. Mais il y a peut-ĂŞtre aussi cette revendication identitaire jusque-boutiste et suicidaire  qui consiste Ă  vouloir absolument retrouver ailleurs ce que l’on vit et pense tous les jours chez soi. MĂŞme si on y tourne en rond et que cela nous dĂ©truit, nous et notre entourage.

 

On choisit de rencontrer une Maitresse ou un Maitre plutôt qu’un (e ) autre selon là où on est. Parce qu’elle ou lui nous semble la personne la plus crédible mais aussi la plus accessible et la mieux disponible pour nous aider à nous éloigner ou nous sortir de certaines impasses.

 

Une Maitresse ou un Maitre est une personne exigeante. Lorsque l’on se prĂ©sente devant elle ou lui, nous venons avec nos aptitudes, notre potentiel mais, aussi, avec certaines  attitudes et ignorances qui nous maintiennent dans une certaine incomplĂ©tude. Nos ambitions et la façon que nous avons de nous percevoir font aussi partie de nos habitudes et de nos ignorances.

 

L’exigence, l’exemple, autant que l’empathie, la persévérance, l’optimisme mais, aussi, l’autocritique font, selon moi, partie de la panoplie du Maitre. Même si, bien-sûr, toute Maitresse et tout Maitre est aussi un être humain avec ses faiblesses. Et que si certains Maitres ont plus de réussite avec certains élèves, certains élèves ont aussi plus de réussite avec certains Maitres.

 

Dans son interview, lors de notre rencontre,  Jean-Pierre Vignau le dit :

 

« Mon but, c’est de dĂ©courager… Â». Et, il explique que, pendant les trois premières annĂ©es de pratique, il s’emploie Ă  dĂ©courager l’élève. Cela a de quoi intimider. Trois ans, dans notre vie oĂą beaucoup doit ĂŞtre obtenu rapidement ou aller vite, c’est très long.

 

J’ai connu un kinĂ© sportif, il y a plusieurs annĂ©es, qui m’avait presque tenu les mĂŞmes propos que Jean-Pierre Vignau. Il m’avait expliquĂ© que lorsqu’un sportif venait le voir pour une rééducation, il le mettait « minable ! Â» pendant les sĂ©ances. Mais qu’en contrepartie, celui-ci se remettait sur pied. Dans d’autres expĂ©riences, on peut retrouver ce genre d’exigence. On peut bien-sĂ»r penser Ă  l’armĂ©e. Mais aussi Ă  une Ă©cole prestigieuse rĂ©servĂ©e Ă  une Ă©lite. Pour moi, une Ă©lite, cela peut ĂŞtre aussi bien une très bonne Ă©cole de menuiserie, de pâtisserie, de boulangerie, de mĂ©canique ou de cuisine. Pas uniquement une Ă©cole d’intellos. L’intellect, le fait d’avoir une certaine aisance pour le verbe, la culture, les concepts et la thĂ©orie,  mĂŞme si j’y souscris, cela ne fait pas tout.

 

On peut s’inscrire dans un club d’art martial sans faire partie d’une élite. On peut être un modèle sans être un intello.

 

Dans son livre, paru en 2016, La Fabrique du Monstre, (10 ans d’immersion dans les quartiers nord de Marseille, parmi les plus inĂ©galitaires de France) que je suis en train de lire, le journaliste Philippe Pujol nous explique que certains- une minoritĂ©- sont prĂŞts Ă  vendre du shit, Ă  faire des braquages mais aussi Ă  tuer pour… « rĂ©ussir Â» Ă  exister socialement de façon expresse. Rapidement. MĂŞme si leur vie et celle des autres autour d’eux doit ĂŞtre courte.

 

Jean-Pierre Vignau, pour exigeant qu’il soit, est le contraire d’un Monstre. Dans l’interview que je fais de lui, on pourra ainsi entendre, Ă  un moment donnĂ©, le  peu d’estime qu’il peut se porter.

 

« Analphabète jusqu’à ses 28 ans Â», il fait partie de celles et ceux qui ont beaucoup vĂ©cu, beaucoup vu et entendu, qui continuent de pratiquer et qui, selon moi, sont un exemple. D’abord, parce qu’ils sont toujours vivants. Ensuite, parce-que, si l’on vient les rencontrer avec les « bonnes Â» intentions, simplicitĂ© et honnĂŞtetĂ©, je crois que ces gens-lĂ , nous recevrons bien et ne nous raconterons pas de bobards. MĂŞme si, et c’est normal, ils garderont leurs secrets. Car Les secrets s’éliminent Ă  mesure que l’on fait ses preuves. Or, on peut mourir sans jamais faire ses preuves. Comme on peut passer Ă  cĂ´tĂ© d’elles toute notre vie durant.

 

Construire sa légende

 

Le numĂ©ro de tĂ©lĂ©phone portable de Jean-Pierre Ă©tait notĂ© en bas de l’annonce pour son club, Fair Play– dans le 20ème arrondissement de Paris- Ă  la fin du magazine Self-DĂ©fense. Je crois ĂŞtre passĂ© devant son club l’annĂ©e dernière en me rendant pour la première fois chez un ami. Je vĂ©rifierai.

 

Lorsque la semaine dernière,  j’ai composĂ© le numĂ©ro de tĂ©lĂ©phone de Jean-Pierre la première fois, je pensais tomber sur un rĂ©pondeur. J’ai eu Jean-Pierre directement. J’avais lu qu’il dĂ©dicaçait son dernier ouvrage, Construire sa LĂ©gende, paru en 2020.

 

C’était il y a plus d’un mois. Je me rappelle que dans le magazine Self & Dragon, Vignau rĂ©pondait Ă  un moment donnĂ© Ă  LĂ©o Tamaki :

 

« Moi, pour certaines personnes qui pratiquent le KaratĂ©, je fais partie des malades mentaux. Je pratique et j’enseigne des techniques qui se rapprochent de la rĂ©alitĂ©, mais en les dosant Ă©videmment». (page 28 de Self & Dragon numĂ©ro 7). Ce genre de propos ainsi que le reste m’ont sans doute parlĂ©.

 

Lorsque je l’ai appelĂ©, j’en Ă©tais Ă  l’étape oĂą je cherchais la rencontre. Après ĂŞtre restĂ© des annĂ©es sous cloche en quelque sorte. La rencontre des Maitres. Mais aussi celle de la vie loin du Covid et du second confinement que nous «connaissons Â». Ou que nous apprenons Ă  connaĂ®tre :

 

Au nom du Covid, nous acceptons un certain mode de vie que nous aurions refusĂ© il y a encore quelques mois. Cette semaine, en partant chercher ma fille au centre de loisirs, j’ai croisĂ© la mère d’un de ses copains. Celle-ci, comme nous, quittait le centre de loisirs avec son fils et sa fille. Une fois en dehors du centre de loisirs, cette mère, infirmière comme moi (elle, en soins somatiques, moi en pĂ©dopsychiatrie) avait très vite retirĂ© son masque et l’avait fait enlever Ă  ses enfants. Elle m’avait expliquĂ© :

 

« Dès que je peux, je leur fais retirer leur masque ! Â». A cĂ´tĂ© d’elle, moi, qui, il y a encore un mois, acceptais tranquillement de sortir avec ma fille sans que celle-ci porte un masque anti-covid, jusqu’à ce que l’école et le centre de loisirs rendent son port obligatoire, j’ai confessĂ©, plutĂ´t penaud :

 

« Moi, je ne sais plus ce qu’il faut faire… Â». J’approuvais totalement la rĂ©action de cette mère et « collègue Â». Mais je considĂ©rais aussi que cela ne pouvait pas faire de « mal Â» Ă  ma fille- vu qu’elle entendait parler du Covid depuis des mois- de garder son masque jusqu’à la maison. Sauf qu’imposer le masque sur le visage Ă  nos enfants lorsque cela est injustifiĂ©, c’est comme leur poser sur le visage l’équivalent d’une muselière. Et, dĂ©jĂ , d’une certaine façon, dès leur plus jeune âge et avec notre complicitĂ©, c’est leur apprendre Ă  ĂŞtre dociles voire imbĂ©ciles. Ou Ă  devenir, plus tard, des enragĂ©s.

 

Me refuser à ma part imbécile

 

Lorsque Jean-Pierre Vignau m’a proposĂ© de venir chez lui pour lui acheter son livre au lieu de le commander sur internet, j’ai aussitĂ´t acceptĂ©.  Cela signifiait sans doute aussi pour moi que je pouvais, encore, jusqu’à un certain point, me refuser Ă  ma part imbĂ©cile.

Je m’en serais voulu si j’avais refusĂ© ou si j’avais prĂ©fĂ©rĂ© commander son livre comme une pizza  sur internet.

 

J’étais serein en prenant la route. Ma compagne était à la maison avec notre fille. Je n’avais pas à penser à l’heure du retour pour aller chercher notre fille à la sortie de l’école ou du centre.

 

A mon arrivée, je me suis garé devant le domicile d’un des voisins de Jean-Pierre.

Jean-Pierre m’a proposé de me garer dans l’enceinte de son parking extérieur. Il m’a guidé alors que j’effectuais ma marche arrière. En sortant de ma voiture, j’avais mis mon masque anti-Covid. Lui, m’a d’emblée reçu à visage découvert. Sa femme Tina, aussi. Lorsque j’ai abordé le sujet du masque avec Jean-Pierre, celui-ci m’a rapidement fait comprendre que je pouvais enlever le mien.

 

En me tenant à distance bien-sûr, j’ai donc enlevé mon masque. C’est de cette façon que la rencontre s’est faite. Si je crois bien-sûr que l’on peut se dire beaucoup avec nos yeux, il était pour moi inconcevable de garder mon masque, donc de cacher mon visage, alors que Jean-Pierre et Tina, qui me voyaient pour la première fois, et étaient sans masque, m’admettaient chez eux.

 

 Cette interview, samedi après-midi, Ă©tait informelle. Quelque peu improvisĂ©e. Si, officiellement, je venais acheter le dernier livre de Jean-Pierre, c’est une fois sur place que je lui ai demandĂ© si je pouvais filmer pour mon blog. Bien-sĂ»r, dès qu’il m’a proposĂ© de venir chez lui, je me suis dit que je me devais de l’interviewer.

 

Jean-Pierre en a parlĂ© Ă  son Ă©pouse. J’ai obtenu leur accord. Jean-Pierre Ă©tait dĂ©jĂ  assis. J’ai posĂ© mon camĂ©scope de poche, l’ai allumĂ© et l’ai laissĂ© filmer comme ça venait. Tant qu’il pouvait.  J’ai effectuĂ© deux incises dans le montage. Mes remarques auraient pu ĂŞtre mieux prĂ©parĂ©es et l’on m’entend moyennement lorsque je parle. J’aurais prĂ©fĂ©rĂ©, idĂ©alement, avoir une meilleure Ă©locution, moins bafouiller. En somme, lorsque je regarde et Ă©coute ces images, j’aurais aimĂ© mieux faire l’acteur et le comĂ©dien.  Maquiller mes interventions afin que ça passe « mieux Â» comme dans un clip d’Aya Nakamura ou lors d’une provocation de Conor McGregor sans doute. Mais je n’étais pas venu pour fabriquer mon rĂ´le ou pour tourner mon clip. Et,  on entend très bien les rĂ©ponses, fournies, de Jean-Pierre comme celles de sa femme. Donc, pour moi, le principal est prĂ©sent et bien audible.

 

 

Cela a duré un peu plus d’une heure. L’interview en images s’arrête brutalement mais je crois qu’il y a suffisamment de matière. Quel que soit ce que ce que j’ai été capable de retenir de ces moments, je suis persuadé d’avoir appris quelque chose ce samedi. Par exemple, en reprenant aujourd’hui cet article depuis le début pour la quatrième fois, je sais y avoir incorporé des idées qui m’ont été inspirées par notre rencontre il y a maintenant deux jours (trois jours maintenant). Et d’autres arriveront sans doute après la publication de cet article et de cette interview.

 

Je n’ai pas encore lu le dernier livre de Jean-Pierre, Construire sa lĂ©gende.

 

Dans le numĂ©ro 9 du magazine Yashima d’octobre 2020, page 8,  LĂ©o Tamaki mentionne la biographie de Jean-Pierre Vignau, Corps d’acier  (je l’ai achetĂ©e d’occasion via le net) . Ainsi que le documentaire Le maĂ®tre et le batard qui lui est consacrĂ©. L. Tamaki encourage surtout Ă  « un moment de pratique avec lui Â» ( Jean-Pierre Vignau).

LĂ©o Tamaki prĂ©sente Jean-Pierre Vignau comme «  simple et direct Â». C’est ce Ă  quoi je m’attendais. Et c’est ce que j’ai vĂ©cu et qui se retrouve, je crois, dans ce que mon camĂ©scope, qui a sa vie propre, a filmĂ©.  

 

Je suis convaincu que Jean-Pierre et Tina, samedi après-midi, m’ont donné quelque chose.

 

J’espère, Ă©videmment, que cet article et, plus tard, la vidĂ©o de mon interview leur rendra la pareille. Ainsi qu’à d’autres. Pour l’instant, mon ordinateur « rame Â» pour exporter ce que j’ai filmĂ©. C’est peut-ĂŞtre mieux comme ça pour le moment. En attendant, je publie dĂ©jĂ  cet article. Parce-que je pense qu’il prĂ©pare un peu Ă  l’interview filmĂ©e de Jean-Pierre. Et, peut-ĂŞtre, je le souhaite, parce qu’il contribuera un peu, Ă  bien ou mieux apprĂ©hender les Arts Martiaux d’une certaine façon.  

 

Cet article est long. Peut-ĂŞtre trop long. Il dĂ©couragera sans doute un certain nombre de lectrices et de lecteurs. Mais sa longueur est peut-ĂŞtre aussi une forme de « protection Â» contre ce Big Bang permanent du « clash et du buzz Â» qui constelle et Ă©parpille dĂ©sormais  nos existences. Big Bang dont tout et n’importe quoi peut sortir Ă  n’importe quel moment. Le pire comme le meilleur. Alors que si je parle- un peu- d’Arts Martiaux, je tiens particulièrement Ă  ce que ce soit le meilleur qui ressorte et qui soit retenu par celles et ceux qui liront cet article et qui verront- ou non- l’interview de Sensei Jean-Pierre Vignau lorsque je la posterai.

 

Franck Unimon, ce mardi 24 novembre 2020.

 

 

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Argenteuil Corona Circus self-défense/ Arts Martiaux

M

 

                                                               M

Je devrais ĂŞtre couchĂ©. Il est cinq heures du matin. Je « dormais Â». J’ai bien des lâchetĂ©s et bien des faiblesses. Mais lorsque j’ai un texte ou un article Ă  Ă©crire, je me lève. C’est l’avantage de ces mĂ©langes entre le sommeil et les pensĂ©es : cela nous met des phrases dans la tĂŞte.

Ensuite, c’est à nous qu’il revient de choisir. Nous censurer et nous rendormir. Ou nous lever et les exprimer.

 

 

Ce n’est pas la première fois que je me lève en pleine nuit. Ou en plein jour.

 

 

Nous avons revu M, sans doute cet Ă©tĂ©, dans son nouvel appartement.  Dans une nouvelle ville. Avec son nouveau compagnon. Et son second enfant. Nous la voyons beaucoup moins qu’avant lorsqu’elle habitait dans la mĂŞme ville que nous.

 

Auparavant, il nous arrivait de nous croiser près de la gare d’Argenteuil lorsqu’elle revenait du travail ou dans la ville, carrément. M fait partie de ces personnes que l’on pouvait rencontrer dans une des rues d’Argenteuil en allant faire une course. Il suffit que deux ou trois personnes de ce profil s’en aillent pour que, très vite, on se sente plus seuls dans une ville. E, par exemple, travaillait à la médiathèque du Val d’Argenteuil. Mais je l’avais connue au club de boxe française où, pendant un temps, elle avait été assidue.

 

VoilĂ©e, convertie Ă  l’Islam, et alors cĂ©libataire, E  habitait encore plus près de chez nous. Je la croisais rĂ©gulièrement dans la ville Ă©galement. Ou Ă  la mĂ©diathèque oĂą, hilare, elle prolongeait facilement la durĂ©e de mes prĂŞts. Pour nous saluer, nous nous serrions la main. Nous rigolions et discutions bien ensemble, en toute intelligence.

 

Puis, un jour, j’ai Ă  peine reconnu E. Elle s’avançait en direction de la gare alors que je m’en Ă©loignais. MaquillĂ©e, dĂ©voilĂ©e, portant une jupe, E s’était sĂ©parĂ©e de l’Islam. Elle m’avait fait la bise.

En quelques mots, elle m’avait racontĂ© s’être faite « humilier Â» en tant que femme lors de sa pratique de l’Islam. Depuis, elle s’était mise en couple avec quelqu’un qu’elle connaissait depuis des annĂ©es. Peu après, E a quittĂ© Argenteuil pour le VĂ©sinet ou Chatou oĂą elle a retrouvĂ© un emploi de bibliothĂ©caire.

 

Ensuite, elle est devenue mère. Aujourd’hui, elle a deux enfants et vit avec son compagnon à la Rochelle d’où, de temps à autre, elle envoie des photos qui donnent envie. Un jardin, un potager, de l’espace, la mer.

 

 

Avant, je rencontrais K, aussi. Comédienne, metteure en scène, prof de théâtre. Elle et moi, nous étions rencontrés en thérapie de groupe, à Argenteuil. A une époque, où, après une énième rupture amoureuse, je m’étais dit qu’une thérapie s’imposait.

K, aussi, a quitté Argenteuil avec son compagnon et père de leurs deux enfants. Pour Cormeilles en Parisis. C’est plus près que la Rochelle. Mais on se voit beaucoup moins. Peut-être une fois par an. Quand je me rends à la journée des associations d’Argenteuil qui se déroule chaque année sur le parking de la salle des fêtes Jean Vilar ainsi que dans la salle des fêtes Jean Vilar. Laquelle salle des fêtes Jean Vilar est menacée d’être détruite. Le maire Georges Mothron et son équipe ont pour projet de mettre à la place un hôtel de luxe, quelques commerces, dont une Fnac, ainsi qu’une salle de cinéma afin de rendre la ville plus attractive. Si ce projet se réalisait, la librairie Presse Papier (restée ouverte malgré le confinement) située à l’entrée de la ville serait aussitôt concurrencée par la Fnac. Et le centre culturel Le Figuier Blanc, qui projette des films, pourrait l’être par la salle de cinémas.

 

 

K m’a un jour rĂ©pondu avoir quittĂ© Argenteuil car elle en avait « marre Â» des pauvres. Ce ne sont pas les pauvres en eux-mĂŞmes dont K a eu marre, Ă  Argenteuil. Je pense que c’est plutĂ´t des incivilitĂ©s rĂ©gulières. De certains comportements. Du bruit.  Sans doute de certains trafics, aussi.

 

Locataire en appartement Ă  Argenteuil, K et son compagnon sont devenus propriĂ©taires Ă  Cormeilles En Parisis. Comme certains parents des copains et des copines de l’école maternelle de ma fille qui ont rapidement fait le nĂ©cessaire pour faire admettre leurs enfants dans l’école privĂ©e Ste-Geneviève de la ville, M, K et E font partie de ces forces vives qui, pour diverses raisons, un jour, se retirent d’un endroit. Ensuite, mĂŞme si l’on peut faire d’autres rencontres, et que l’on connaĂ®t d’autres personnes toujours prĂ©sentes dans notre environnement immĂ©diat, c’est une affaire entre soi et soi. De choix et d’espoir. Mais tout dĂ©part, comme toute sĂ©paration, nous Ă©loigne et nous sĂ©pare un peu de nous-mĂŞmes.

 

 

Cet Ă©tĂ©, après environ quarante minutes de route, nous sommes arrivĂ©s dans le nouvel habitat de M.  C’est un ensemble d’immeubles avec parking. Nous avions du mal Ă  trouver oĂą nous garer. Car beaucoup de places Ă©taient privĂ©es. En m’approchant de M, descendue Ă  notre rencontre, j’hĂ©sitais sur l’attitude Ă  avoir concernant…. Â« les gestes barrières Â». M a tranchĂ© :

 

« C’est bon ! Â». Et nous nous sommes fait la bise. Je n’ai pas cherchĂ© Ă  contredire M. Je n’en n’avais mĂŞme pas envie. M, c’est un char d’assaut. Et, Ă  propos de la vie et de la mort, M est la mĂ©moire directe, et la plus proche, de cette expĂ©rience que nous avons connue ensemble concernant ces sujets. On pourra toujours argumenter que notre attitude a Ă©tĂ© parfaitement irresponsable en pleine pĂ©riode du Covid et alors que nous avons des enfants plutĂ´t jeunes. Mais chaque rencontre dicte ses règles.

 

M et nous, nous nous sommes rencontrĂ©s Ă  la maternitĂ© de l’hĂ´pital d’Argenteuil. Tout le monde a entendu parler de la maternitĂ©, de la grossesse, d’un accouchement et de la naissance d’un enfant. Le plus souvent, ça se passe « plutĂ´t bien Â» lorsque la grossesse se rĂ©alise. Pour M et nous, la grossesse a effectivement eu lieu. Mais l’accouchement  a Ă©tĂ© prĂ©maturĂ©. Nos deux filles ont Ă©tĂ© de grandes prĂ©maturĂ©es. La prĂ©maturitĂ©, c’est devenu banal quand on en parle. Une personne m’avait par exemple dit :

« Je connais quelqu’un qui a eu un enfant prĂ©maturĂ© Â». Et quelqu’un d’autre m’avait dit aussi : «  Ma nièce, Ă  sa naissance, pesait 540 grammes. Elle Ă©tait Ă  peine plus grosse qu’un steak. Aujourd’hui, elle va très bien, elle a deux ( ou quatre) enfants Â». C’était des marques de sympathie et d’encouragement.

 

La prĂ©maturitĂ© de nos filles, cependant, cela a Ă©tĂ© un petit peu notre VendĂ©e Globe Ă©motionnel. Un mois et demi d’hĂ´pital en rĂ©animation puis en soins intensifs pour la fille de M. Deux mois et demi pour la nĂ´tre. Des visites quotidiennes. Des appels tĂ©lĂ©phoniques quotidiens. Soit le contraire d’une vie «normale Â» oĂą, souvent, après quelques jours d’hospitalisation, la mère repart Ă  la maison avec son enfant ou ses enfants. Puis, ensuite, la « rĂ©adaptation Â» Ă  la maison et Ă  la vie extĂ©rieure pour tout le monde Ă  la sortie du bĂ©bĂ© de l’hĂ´pital.

 

M reprĂ©sente ça pour nous. Et, sans doute que nous reprĂ©sentons ça aussi pour elle. Nous discutons ou avons assez peu discutĂ© de cette « Ă©poque Â», elle et nous. Ou, alors, j’étais absent Ă  ce moment-lĂ . Mais il est facile de concevoir que cette « Ă©poque Â», nous l’avons encore dans la peau. D’une façon ou d’une autre. Alors, il Ă©tait impossible de ne pas nous faire la bise en nous revoyant.

 

Nous avons passé une bonne après-midi chez M et son nouveau compagnon, avec leurs enfants.

 

Franck Unimon, ce samedi 21 novembre 2020. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Corona Circus Crédibilité

Santé Mentale

 

                                                 SantĂ© Mentale

Lorsque l’on se prĂ©occupe des autres, on oublie parfois de s’occuper de soi. Il est des personnes dont c’est le mĂ©tier et aussi la volontĂ© de s’oublier.  On peut prĂ©fĂ©rer s’ignorer ou estimer que notre vie peut attendre. Les autres, d’abord. Ensuite, on verra bien pour soi. S’il reste encore un peu de place dans la glace que l’on regarde.

 

Covid-19, deuxième prise. Nous sommes au mois de novembre 2020. Je suis un privilégié. Je travaille. J’ai touché une prime Covid. J’ai un salaire. Je n’ai pas été malade du Covid. Mes proches, non plus. Mon métier de soignant n’a peut-être jamais été aussi important.

Ah, oui, j’allais oublier : nous avons obtenu une augmentation salariale. 183 euros en deux temps.  Beaucoup de personnes en France aimeraient percevoir cette somme en plus sur leur salaire Ă  la fin du mois.

 

Comme la majorité, à partir de mars, j’ai été matraqué lors des premières semaines du confinement numéro un au mois de mars. Par l’anxiété, l’angoisse et la peur. Au début du confinement en mars, j’ai cru qu’à n’importe quel moment, dans un couloir de métro, le virus pouvait me sauter dessus. Et me tuer en quelques secondes. Comme une bombe insecticide peut tuer un cafard.

 

 

J’ai aussi été exposé comme d’autres au manque de masques chirurgicaux les premières semaines. Dans mon service, j’ai oublié quand nous en avons eu. Mais nous en avons eus pour travailler.

 

Puis,  dans le monde extĂ©rieur, les masques sont arrivĂ©s dĂ©but Mai. Tels des millions de parachutes de NoĂ«l dans les supermarchĂ©s. Aujourd’hui, on peut trouver des paquets de masques bradĂ©s. J’en ai achetĂ© hier, dans la pharmacie, oĂą, en fĂ©vrier, un pharmacien m’avait vendu deux ou trois masques FFP2 Ă  3,99 euros l’unitĂ©. Avant que l’épidĂ©mie, le confinement de Mars et la pĂ©nurie de masque ne nous tombent dessus. Jusqu’en Mai.

Hier, Ă  la pharmacie, j’ai « seulement Â» payĂ© cinq euros pour une boite de cinquante masques jetables. Il m’en a coĂ»tĂ© « seulement Â» cinq euros la boite.

 

Il m’a fallu quatre mois, entre mars et juillet, pour débloquer mes neurones. Pour redevenir capable de lire des livres. Partir en vacances mi-juillet pendant une dizaine de jours m’a bien aidé. Je fais partie des privilégiés qui ont pu partir en vacances à la mer cet été.

 

Depuis Mai, je porte un masque sur le visage chaque fois que je sors. Et, Ă©videmment, au travail. Depuis mes vacances d’étĂ©, j’écoute ce qui a trait au Covid de « loin Â». Je m’en tiens Ă  quelques règles principales :

 

Porter mon masque sur mon nez et ma bouche. Eviter de le masturber. En changer rĂ©gulièrement. Me laver les mains avec du savon quand je rentre dans un endroit. Lorsque je sors des toilettes. Avant de manger. AĂ©rer les pièces oĂą je me trouve. Embrasser seulement ma compagne et notre fille. Je me permets quelques fois de poser ma main sur certaines personnes mais c’est court. Je m’autorise certaines fois Ă  ĂŞtre Ă  visage dĂ©couvert en prĂ©sence d’autres mais Ă  un ou deux mètres. J’ai acceptĂ© de prendre ma collègue M-J dans mes bras le lendemain de sa dernière nuit de travail, avant son dĂ©part Ă  la retraite. J’ai posĂ© ma main un instant sur l’Ă©paule d’une collègue qui venait de m’apprendre avoir perdu sa grand-mère de 94 ans. Ce matin, j’ai aussi posĂ© ma main sur l’Ă©paule de ma collègue de nuit après que nous soyons restĂ©s discuter un peu dans la rue, devant le service, au moment de nous dire au revoir. Lorsque je me prĂ©sente Ă  un nouveau patient ou Ă  une nouvelle patiente, j’enlève mon masque afin que celui-ci ou celle-ci voie mon visage mĂŞme si c’est Ă  un ou deux mètres. 

 

 

Accepter d’être près de quelqu’un physiquement n’a peut-ĂŞtre jamais Ă©tĂ© autant synonyme d’affection,  de sympathie ou de « rĂ©volte Â» qu’aujourd’hui. Puisqu’il existe un risque et un interdit sanitaire.

 

 

A l’école de ma fille, nous avions dĂ©jĂ  Ă  composer avec le plan Vigipirate toujours actif dans notre dĂ©partement. Depuis, nous devons faire avec nos masques sur nos visages. MĂŞme ma fille  y a maintenant droit dans l’enceinte de l’école et du centre de loisirs. Comme ses copines et ses copains.

 

Les échanges téléphoniques et les réunions en visio-conférence pour le conseil de l’école sont en passe de devenir la norme à l’école de ma fille.

 

Cette semaine a eu lieu le premier conseil de l’école avec les enseignants et les parents d’élèves. En écoutant parler untel ou untel, je me suis étonné de mon incapacité à comprendre ce qui se racontait. Je me sentais plus que ralenti tant j’avais de mal à saisir les propos tenus. Des propos pourtant simples et largement à ma portée.

Ensuite, ma connexion internet est devenue mauvaise. Je voyais les images fixes de mes interlocuteurs mais sans le son. Ou alors, le son était haché. J’ai dû renoncer à participer. Je sais bien que mon désistement n’affecte pas en soi notre présence auprès de notre fille et ni ses résultats. Mais je n’ai pas pu m’empêcher de voir dans ma déconnection une sorte de décrochage scolaire alors que les autres participants, une majorité de femmes, semblaient parfaitement à l’aise avec ce nouveau dispositif.

 

 

Il y a deux ou trois semaines, maintenant, je suis arrivé en retard d’une demi-heure à une réunion à mon travail. J’avais pris le temps d’attendre que ma compagne et notre fille rentrent pour les voir. Mais j’avais mal anticipé la diminution du nombre de trains desservant Paris du fait de la pandémie.

 

Au travail, personne ne m’en a voulu pour mon « retard Â». J’étais quand mĂŞme arrivĂ© avec une heure d’avance avant ma deuxième nuit de travail.

 

Pour cette réunion, nous étions plusieurs dans la salle d’attente attenante au bureau du médecin-chef. Il était là ainsi que deux ou trois autres collègues et notre cadre de pôle. Nous étions tous masqués. Nous étions sagement assis sur nos sièges. Environ un mètre nous séparait les uns des autres. Sur l’écran de l’ordinateur du médecin-chef, on pouvait voir la tête de nos autres collègues qui, depuis leur domicile, assistaient et participaient également à la réunion.

 

Ce soir-là, parmi les collègues présents physiquement, il y avait M-J. C’était sa dernière nuit avant son départ à la retraite.

Quand je suis arrivĂ©, le sujet concernait le Covid. Les mesures Ă  prendre par rapport au Covid. Masques, lavage des mains, aĂ©rer les pièces, nombre de personnes.  

Nous avons aussi Ă©tĂ© briefĂ©s Ă  propos du fait que, malades, sous certaines conditions, nos pouvions ou devions venir travailler. MasquĂ©s Ă©videmment. Et en respectant- formule dĂ©sormais familière – «  les gestes barrières Â». Voire, selon les situations, après avoir observĂ© une pĂ©riode de confinement chez soi de sept ou huit jours.

 

Il n y avait rien de rĂ©volutionnaire ou de choquant dans ces « nouvelles Â». En fait, mon retard m’avait fait rater le plus « choquant Â». Je l’appris plus tard par une de mes collègues :

 

La Direction de notre hĂ´pital faisait appel Ă  des volontaires afin de se rendre dans un service oĂą la majoritĂ© des patients avait le Covid et oĂą, beaucoup de soignants, l’avaient Ă©galement attrapĂ©. Ce service avait besoin de renforts. Il se trouvait Ă  une bonne heure en transports de notre service dans un dĂ©partement d’île de France. Les « volontaires Â» pouvaient choisir les horaires qui leur convenaient, soir ou matin. Rappelons les horaires du soir : 13h45/21H15. Rappelons les horaires du matin : 6h45-14h15.

 

A dĂ©faut de volontaires, la Direction faisait savoir qu’elle dĂ©signerait du personnel pour se rendre dans ce service. Dans notre hĂ´pital, il manquerait deux cents infirmiers. RĂ©cemment, l’application qui propose des remplacements payĂ©s en heures sup dans d’autres services de l’hĂ´pital a Ă©tĂ© remplacĂ©e. DĂ©sormais, la nouvelle application qui «  rĂ©volutionne la gestion des ressources humaines dans la santĂ© Â»  et forte du fait que «  1500 entreprises nous font dĂ©ja confiance Â» nous signale que tel service a « besoin Â» de nous.

 

Sur ma boite mail, c’est une première, j’ai aussi reçu un message, d’un groupe privĂ© qui recherche des aides-soignants et des infirmiers :

 

« Dans le contexte d’épidĂ©mie Covid-19 et pour accompagner nos patients et rĂ©sidents, nous avons besoin de renfort dans nos Ă©quipes soignantes au sein de nos Ehpad, Cliniques SSR et HAD.

Nous recherchons des Aides Soignant(e)s et des Infirmier(e)s pour des contrats en vacations, CDD ou CDI Â»

 

 

16 euros brut de l’heure sont annoncĂ©s pour un infirmier qui a plus de trois ans d’expĂ©rience. Ainsi qu’une prime SĂ©gur mensuelle et une prime pour tout travail effectuĂ© durant le week-end.  

 

 

« L’argent Â» et le sacrifice, ou le sacrifice et « l’argent Â» continuent d’être les seules façons de s’adresser aux soignants.

 

Ce matin, sur la chaine Cnews, j’ai Ă©coutĂ© une partie du dernier discours Ă  ce jour du Ministre de la SantĂ©, Olivier VĂ©ran. Il prĂ©venait que le confinement allait sĂ»rement devoir continuer. Il prĂ©cisait que le gouvernement se prĂ©occupait, aussi, de l’état de santĂ© mental des Français : peur, anxiĂ©tĂ©, angoisse, dĂ©pression etc…

Et, il invitait les personnes concernées à s’adresser à des…. professionnels de la Santé.

 

 

La pĂ©nurie des soignants qui a Ă©tĂ© constatĂ©e en mars de cette annĂ©e est pourtant la mĂŞme en novembre. Elle dure depuis vingt Ă  trente ans. Et, aujourd’hui, elle est peut-ĂŞtre pire. Pourtant, c’est Ă  ces mĂŞmes soignants que l’on demande d’être « volontaires Â» pour partir en renfort ailleurs. Que l’on sollicite par mail pour venir faire des vacations dans un autre Ă©tablissement (en plus de leur poste de titulaire). Ou que l’on prĂ©sente comme totalement disponibles pour toutes ces personnes qui, et cela se comprend, sont durement Ă©prouvĂ©es psychologiquement, moralement et Ă©conomiquement par cette pandĂ©mie du Covid.

 

 

Et nous n’en sommes « qu’à Â» la  deuxième  vague du Covid.

 

Nous sortirons un jour de ces tourments dus au Covid. Mais ça nous paraîtra long. C’est d’ailleurs déjà très long pour beaucoup de personnes. Moi, y compris.

 

Par exemple, je ne supporte plus de devoir remplir une feuille de justificatif lorsque je sors de chez moi. Porter le masque, oui. Me laver les mains, oui. Etre prudent en présence d’autres personnes, oui, même si, lorsque le métro est plein, je suis bien obligé de rester dedans pour me rendre à mon travail. Mais devoir accepter de rester chez moi alors que je souhaiterais rendre visite à quelqu’un devient très contraignant. Il faut un justificatif. Il faut rester dans un périmètre compris dans un kilomètre autour de chez soi.

 

Le pire, c’est que je rĂ©agis comme ça parce-que j’ai connu autre chose. Mais pour celles et ceux, qui, dans quelques annĂ©es, vivront confinĂ©es dès leur naissance, cela paraitra normal d’être cloĂ®trĂ©es ou de fournir un justificatif au moindre dĂ©placement. Et, tout ça, tout en Ă©tant dĂ©jĂ  « repĂ©rĂ©s » par nos navigations sur internet ou par l’usage de nos smartphones. Ou, bientĂ´t, peut-ĂŞtre, par des drones, ou, pourquoi pas, par des automates Ă  forme humaine ou par des animaux ou des arbres artificiels.

 

 

En ce moment, en cette pĂ©riode d’hĂ©bĂ©tude, trois activitĂ©s en particulier me font beaucoup de bien en plus de mes Ă©tirements quasi-quotidiens :

 

Lire

 

Ecouter des Podcasts

 

Lire sur les Arts Martiaux, comme des ouvrages ou des interviews de Maitres.

 

 

Nos relations au travail avec nos collègues, mais aussi avec certains  voisins ou commerçants se resserrent  sans doute. Ainsi qu’avec celles et ceux avec lesquels nous gardons le contact.

 

C’est sĂ»rement, ça, la bonne nouvelle. Nous devenons des adeptes du « dĂ©veloppĂ© toucher Â» en quelque sorte. Le toucher relationnel. Ou nous devenons de bons petits paranos.

 

Franck Unimon, ce vendredi 20 novembre 2020.

 

 

 

 

 

 

 

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Puissants Fonds/ Livres self-défense/ Arts Martiaux

Renaître/ un livre écrit avec Marion Bartoli

   

 

        RenaĂ®tre/ un livre Ă©crit avec Marion Bartoli

« Bartolir : prendre une dĂ©cision irrĂ©flĂ©chie Â». 7 ans plus tard, ce nĂ©ologisme portĂ© sur un rĂ©seau social ( Twitter ou instagram) par un lettrĂ© mĂ©diatisĂ© continue Ă  ne pas me revenir.

 

C’était fin 2013, après la victoire de la joueuse de tennis Marion Bartoli à Wimbledon. Celle-ci venait d’annoncer sa retraite sportive. Et, Bernard Pivot, référence littéraire en France depuis les années 70 avec l’émission Apostrophes, s’était exprimé.

 

J’ai grandi « avec Â» Apostrophes. MĂŞme si j’ai peu regardĂ© cette Ă©mission, je savais que c’était une institution intellectuelle. MĂŞme Mohammed Ali Ă©tait passĂ© Ă  Apostrophes. LycĂ©en et ensuite, si j’avais pu, j’aurais aimĂ© Ă©crire un livre ou pouvoir susciter l’intĂ©rĂŞt des pointures qui s’y sont prĂ©sentĂ©es. Comme de Bernard Pivot.

 

Evidemment, comme la majorité des lycéens et des spectateurs, cela n’est jamais arrivé. Je me suis rabattu sur L’école des fans de Jacques Martin où je ne suis jamais passé non plus.

 

Puis, ça m’était passé. Bernard Pivot et Apostrophes ou sa dictée ne faisaient plus partie de cette lucarne de but où je cherchais à entrer. Ou peut-être aussi, que comme la majorité, je m’étais résigné au babyfoot.

 

Aujourd’hui, on dirait plutĂ´t : « Comme la majoritĂ©, je m’étais rĂ©signĂ© Ă  la console de jeux et aux rĂ©seaux sociaux Â». Après avoir obtenu un travail, m’être insĂ©rĂ©, fait des amis, quelques voyages, j’avais trouvĂ© ailleurs et avec d’autres de quoi me regarder.

 

« Bartolir Â».

 

Visiblement, en 2013, Bernard Pivot continuait de compter pour moi.

Lorsque j’avais lu ce mot, je m’étais dit que j’aurais bien voulu le voir, le Bernard Pivot, en short et chaussettes, avec une raquette de tennis, se mangeant les sĂ©ances d’entraĂ®nement massives et quotidiennes de Marion Bartoli !

 

J’en ai beaucoup voulu Ă  ce lanceur de dictĂ©e. Je me suis rappelĂ© de ma lecture d’un article racontant sa « rencontre Â» avec le navigateur Eric Tabarly. Pivot, l’intello de plateau, y avait Ă©tĂ© dĂ©crit comme une sorte d’animateur prenant Tabarly de haut, car incapable de s’ajuster au fait que cet homme des vagues se tenait lĂ  sans se prĂŞter Ă  l’eau pâle des alexandrins et des cotillons verbaux. 

 

En 2013, amateur de sport, comme Bernard Pivot, j’imaginais pourtant facilement l’usure mentale et physique de celle qui s’était engagée mais aussi esquintée en pratiquant le sport à très haut niveau. C’était peut-être dû aux séquelles de mes propres blessures de sportif amateur depuis mon adolescence. A ce que j’avais fini par en apprendre.

 

C’était peut-ĂŞtre dĂ» Ă  la lecture de quelques articles dans les journaux concernant Marion Bartoli. Ou Ă  celle d’ouvrages d’anciens joueurs de tennis de haut niveau :

 

Déclassée de l’ancienne numéro un française Cathy Tanvier m’avait sans doute beaucoup éduqué.

 

Plus jeune, adolescent, je me marrais devant les dĂ©faites rĂ©pĂ©tĂ©es de Cathy Tanvier pendant les tournois de tennis. En apprenant qu’elle avait Ă©tĂ© « Ă©liminĂ©e Â» dès les premiers tours de tel tournoi du grand Chelem, « notre Â» numĂ©ro vingt mondial.

 

 Puis, j’avais lu son DĂ©classĂ©e, (paru en 2007). Non seulement, il Ă©tait très bien Ă©crit, m’avait Ă©mu. Mais, en plus, ce livre m’avait remis Ă  ma place.

 

En dĂ©couvrant la vie personnelle de Cathy Tanvier, j’avais compris que le parcours professionnel de haut niveau qu’elle avait tracĂ© en parallèle avait nĂ©cessitĂ© des efforts gigantesques. Et que ces efforts qu’elle avait dĂ» produire en « surcharge Â» avaient sĂ»rement plus d’une fois fait la diffĂ©rence avec les autres championnes qui gagnaient les finales car, dĂ©lestĂ©es, elles, de ces contraintes. Mais aussi de certaines blessures physiques. Car Cathy Tanvier avait participĂ© Ă  certains de matches en Ă©tant blessĂ©e.

 

 

Open Ă©crit par AndrĂ© Agassi (paru en 2009) m’avait aussi Ă©duquĂ©. Si la carrière tennistique d’AndrĂ© Agassi a bien sĂ»r Ă©tĂ© plus triomphale que celle de Cathy Tanvier, il existe pourtant des points communs entre leurs carrières et celle…d’une Marion Bartoli dont « le Â» livre, RenaĂ®tre, est paru en 2019. Aujourd’hui, Marion Bartoli, nĂ©e en 1984, a 36 ans.

 

La prĂ©cocitĂ© :

Marion Bartoli a quatre ou cinq ans lorsqu’elle tient sa première raquette de tennis en main. Contrairement à un André Agassi et une Cathy Tanvier qui se révèlent très tôt particulièrement doués, dans Renaître, Marion Bartoli répète qu’elle avait seulement pour elle une concentration supérieure à la normale ainsi qu’une certaine rage.

 

 

Modèle et environnement familial :

J’ai oubliĂ© comment Cathy Tanvier en Ă©tait arrivĂ©e Ă  jouer au tennis. Mais je me rappelle que le père d’AndrĂ© Agassi avait d’abord voulu faire de son frère et de sa sĹ“ur aĂ®nĂ©e des champions de tennis. En vain. Avant de s’apercevoir que le « dernier Â», AndrĂ©, avait des aptitudes particulières : dont un certain coup d’œil pour Ă©valuer la trajectoire de la balle.

 

C’est en regardant son père et son frère Franck, de neuf ans son aîné, jouer au tennis que Marion Bartoli eu envie de participer.

 

Pendant toute sa carrière, Cathy Tanvier n’a eu de cesse de courir après les balles de tennis et les tournois afin de compenser les infidélités conjugales et les pertes financières de son père.

 

André Agassi a eu à faire avec un père tyrannique, d’origine arménienne, déterminé et imposant.

 

Le Clan des Bartoli :

 

Marion Bartoli, elle, nous parle d’un clan familial obligé de partir de Marseille, leur ville de chair, en se coupant du reste du monde afin d’aller s’établir à Retournac, petit village pépère de 2500 habitants.

« Papa Â» Walter Bartoli a perdu sa mère lorsqu’il avait deux ans. Son père a refait sa vie sans lui. « Maman Â» Sophie, elle, est manifestement brouillĂ©e Ă©galement avec sa propre famille. Mais la petite Marion ignore la raison de ces diffĂ©rends. Papa, maman, Franck et Marion Bartoli partent s’installer Ă  Retournac et vivent en clan.

Retournac se trouve en Auvergne. L’Auvergne est une très jolie région. Mais cela n’a rien à voir avec le climat et l’ambiance de Marseille.

 

Dans la rĂ©gion d’Auvergne, donc, les Bartoli forment un clan d’amour oĂą la rudesse Ă©conomique est perceptible. Papa Bartoli est mĂ©decin libĂ©ral. Maman, ancienne infirmière de nuit, est la secrĂ©taire. En Ă©tĂ©, pendant les vacances, la famille s’en sort financièrement. Autrement, il y a deux ou trois fois moins de travail pour le Dr Bartoli et donc moins d’argent pour la famille. 

 

A lire RenaĂ®tre, il semblerait aussi que « Les Â» Bartoli soient un clan fermĂ© : apparemment, aucun cousin, cousine, tonton ou tata du cĂ´tĂ© du père comme de la mère n’est prĂ©sent dans le cadre de la maison.

 

La petite Marion Bartoli est très bonne élève. Elle aime être la première de la classe et ne sourcille pas lorsque son père lui demande de prendre de l’avance sur ses cours. En outre, au vu des difficultés concernant les fins de mois, elle s’applique à être exemplaire.

 

Le tennis va devenir un cocon pour faire plaisir, pour exister, pour prendre une revanche mais, aussi, pour donner une certaine revanche aux parents.

 

Construire ses matches comme on construit les marches de son  destin :

Le goût de la compétition, de l’effort, ainsi que l’envie de rendre les parents fiers, vont petit à petit gagner du terrain. Le père et la fille, au moins, vont de plus en plus se prendre au jeu. Marion, pour réussir et donner cette réussite à sa famille. Le père, pour être présent et soutenir sa fille mieux et plus que son propre père ne l’a fait pour lui.

Le frère aîné va s’engager dans l’armée. Marion, elle, va devenir un soldat volontaire de l’entraînement. Pour réussir, elle apprend très vite qu’il lui faut travailler bien plus que les autres.

 

Une critique du système Ă©ducatif dans son ensemble :

 

Dit comme ça, on pourrait penser que ce tandem que va former Marion Bartoli avec son père est « juste Â» l’histoire de deux personnes qui pansent leurs plaies Ă  travers l’autre. Ou  l’histoire d’une enfant qui fait son possible pour sauver ses parents d’une certaine dĂ©tresse.

 

Mais la carrière de Marion Bartoli, « peu douĂ©e pour le tennis Â», est aussi une critique du système Ă©ducatif dans son ensemble. MĂŞme si, dans RenaĂ®tre, Marion Bartoli s’en prend principalement Ă  la FĂ©dĂ©ration Française du Tennis qui, Ă  plusieurs reprises, s’obstine Ă  vouloir faire d’elle une simple exĂ©cutante de la balle jaune. Alors que, très tĂ´t, celle-ci a Ă©tĂ© l’associĂ©e de son père et entraĂ®neur. Et que c’est par lui et avec lui qu’elle s’est sortie du lot des joueuses jusqu’à se faire remarquer, du fait de ses rĂ©sultats, par cette mĂŞme FĂ©dĂ©ration Française du Tennis.

 

Dans son livre, on est marquĂ© par le très grand manque de compĂ©tence psychologique de plusieurs personnalitĂ©s, pourtant Ă©mĂ©rites, de la FĂ©dĂ©ration Française de Tennis. Et, on se dit qu’il doit y avoir bien d’autres fois, ou en d’autres circonstances, et dans d’autres institutions, oĂą ce genre de situation arrive :

 

Des cadres qui ont le Pouvoir- et dont la carrière et le palmarès font autorité -s’estiment légitimes pour disqualifier les méthodes d’apprentissage d’un athlète ou d’un candidat dont les performances font pourtant partie du plus haut niveau. Un peu comme si un professeur de guitare au conservatoire méprisait la façon dont un jeune Jimi Hendrix avait appris à jouer des notes.

 

 Il faut attendre AmĂ©lie Mauresmo, un profil peut-ĂŞtre « diffĂ©rent Â» ou hors norme de par sa vie personnelle en tant que femme homosexuelle affirmĂ©e, pour trouver une interlocutrice plus ouverte. Ou, peut-ĂŞtre aussi que lorsque cette rencontre survient entre AmĂ©lie Mauresmo, capitaine de l’équipe de France de Tennis, que Marion Bartoli est alors mieux disposĂ©e pour s’affranchir de son père.

 

La retraite sportive et la vraie vie :

Avec sa retraite sportive, on retrouve cette « petite Â» mort dĂ©jĂ  racontĂ©e par d’autres.  A la fin de la carrière intense et des jets d’adrĂ©naline, pousse un vide et un sentiment de surplace sans limites qu’il faut remplir. Marion Bartoli peine Ă  digĂ©rer son « dĂ©part Â» Ă  la retraite mais aussi sa sortie du cocon familial qu’a Ă©tĂ© sa relation en particulier avec son père au travers du tennis.

 

Pendant des années, au travers du tennis, Marion Bartoli a vécu dans un cocon. Dans ce cocon, sa famille, son clan, était constamment présent grâce au cordon qui la reliait à son père. Sa retraite sportive coïncide avec l’âge où elle quitte ses parents. Ça fait beaucoup.

 

S’ensuit une sĂ©vère dĂ©pression. Pour Marion Bartoli, ça passe Ă  la fois par des troubles alimentaires… mais aussi par une relation sentimentale « banque-cale Â» avec un homme.  Puisqu’il en faut un pour essayer de colmater l’absence de papa. Ou de maman.

 

Cela a pu arriver à d’autres y compris dans des professions rigoureuses comme espionnes (Les Espionnes racontent, un livre de Chloé Aeberhardt, paru en 2017).

 

Car l’armature et la très haute habilitĂ© affective que l’on peut avoir sur un terrain de sport ou dans un environnement professionnel ne suit pas forcĂ©ment dans la vie intime. Les règles et les limites y sont plus floues et plus incertaines. Sur un court de tennis, lorsque la balle est dans le filet  ou dans le couloir, il y a faute et le jeu s’arrĂŞte. Dans la vraie vie, le jeu peut malgrĂ© tout continuer. La vie intime est tel un hymen docile. S’offrir  Ă  l’autre, en vue de rester avec lui ou de le garder, est le contraire de la performance. Dans une performance, on cherche Ă  annuler, bloquer, dĂ©tourner, dĂ©passer, dĂ©stabiliser ou dĂ©truire l’autre.

 

Dans RenaĂ®tre, on lit et on entend l’humour et l’autodĂ©rision « connues Â» de Marion Bartoli. J’ai eu un grand plaisir Ă  lire ce livre dans lequel elle nous parle aussi un peu de quelques Ă -cĂ´tĂ©s du Tennis de haut niveau : Serena Williams, Maria Sharapova….

 

Aujourd’hui, ce ne sont plus les mêmes joueuses de tennis qui dominent autant le Tennis mondial (à part peut-être Serena Williams encore un peu), mais il en est sûrement quelques unes et quelques uns qui ont connu ou vont connaître les mêmes états que Marion Bartoli. Dans le monde du Tennis ou ailleurs.

 

Franck Unimon, ce mardi 17 novembre 2020.

 

 

 

 

 

 

 

 

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Je suis Ă  l’Est ! un livre de Josef Schovanec

 

Je suis Ă  l’Est ! , livre paru en 2012, a Ă©tĂ© Ă©crit par Josef Schovanec ( avec Caroline Glorion).

 

J’ai pris du temps à lire ce livre. Peut-être parce-que Josef Schovanec, comme toutes les personnes que l’on ne prend pas le temps d’écouter, avait beaucoup à dire. Ou peut-être parce-que dans la vie ordinaire, aimanté par l’affiche d’un nouveau film ( avant ces histoires de reconfinement et de covid) ou par un de mes écrans, j’ai plusieurs fois laissé un Josef Schovanec de côté.

 

De toute façon, en tant que professionnel de la santĂ©, ce genre de livre nous donne une tape derrière la tĂŞte. Parce-que, cette fois, celui qui fait autoritĂ© en matière de connaissances et d’expĂ©riences, c’est le patient ou la victime qui a Ă©crit le livre dont je vais vous parler. Et, lĂ , je ne peux qu’écouter, rĂ©flĂ©chir et lire puisqu’il s’agit d’un tĂ©moignage, celui de Josef Schovanec. Je ne peux pas tĂ©moigner Ă  la place de Josef Schovanec. Si je m’étais senti capable de tĂ©moigner Ă  sa place, je me serais dispensĂ© de lire son Je suis Ă  l’Est !

Et puis, je ne me fais assez peu d’illusions : Ă  l’école maternelle oĂą les ennuis de Josef Schovanec ont dĂ©butĂ©, je l’aurais ignorĂ©. J’aurais prĂ©fĂ©rĂ© jouer avec les copains, taper dans une balle de tennis ou un ballon de foot. Peut-ĂŞtre, mais ce n’est mĂŞme pas sĂ»r, me serais-je abstenu de faire partie de ceux qui se seraient amusĂ©s Ă  le tirer comme un lapin avec le ballon de foot ou un autre projectile improvisĂ©, reflet de ces pensĂ©es de reptile qui nous animent par moments tout civilisĂ©s que nous prĂ©tendons ĂŞtre devant nos victimes. Car nous nous transformons vite en barbares dès que nous sommes en meute.

 

Mais ce qui est bien avec Josef Schovanec, c’est qu’il est gĂ©nĂ©reux :

A peu près tout le monde en prend pour son curriculum dans son livre. Le système scolaire et Ă©ducatif français et occidental ; la sociĂ©tĂ© et ses rituels relationnels inadaptĂ©s ; les psychanalystes et psychiatres Ă  but lucratif qui ont su le raccourcir- heureusement, les effets ont Ă©tĂ© rĂ©versibles- Ă  coups  d’antipsychotiques ; certaines et certains anciens camarades de sciences Po pompeurs de ses cours hier, grandes vedettes mĂ©diatiques aussi pomponnĂ©es qu’amnĂ©siques aujourd’hui ; les associations qu’il a pu frĂ©quenter ou qui ont donnĂ© des confĂ©rences ; son exposition mĂ©diatique.

 

Avec sarcasme et humour, Josef Schovanec nous raconte une partie de son parcours personnel. Muet jusqu’à ses six ans, mais habile avec l’astronomie, l’écriture et l’Egypte antique, il a su se frayer un « destin Â» grâce Ă  la pugnacitĂ© et  Ă  la ruse de ses parents. Mais aussi grâce Ă  sa rĂ©sistance. Car ses mĂ©saventures morales, fonctionnelles et physiques ressemblent beaucoup Ă  celles d’un suppliciĂ©.

 

Josef Schovanec, c’est aujourd’hui 1m95 d’autisme qui nous « parle Â», Ă  nous les gens normaux. Mais c’est aussi un homme multi-diplĂ´mĂ©, Docteur en philosophie, plusieurs fois polyglotte et grand voyageur. D’ailleurs, il insiste pour ne pas ĂŞtre rĂ©sumĂ© Ă  son autisme d’asperger qui a nĂ©cessitĂ© plusieurs annĂ©es avant de finir par ĂŞtre diagnostiquĂ©. Peut-ĂŞtre parce qu’à  l’image de la schizophrĂ©nie, il y a diffĂ©rentes façons d’être autiste et diffĂ©rentes façons de le concevoir pour une personne extĂ©rieure.

 

 

Si Schovanec nous parle de nos travers, il nous parle aussi de certaines de ces personnes, devenues ses proches, qui ont su penser diffĂ©remment en le rencontrant ou qui Ă©taient elles-mĂŞmes diffĂ©rentes et pourtant bien dans le coup. Tel Hamou Bouakkaz,  Kabyle nĂ© en AlgĂ©rie, aveugle,  d’origine modeste, venu habiter Ă  Bezons avec sa famille et qui a su , après de brillantes Ă©tudes dont une Maitrise en mathĂ©matiques, accĂ©der au monde de la politique.

 

En lisant Je suis Ă  l’Est !  de Schovanec, on comprend très vite que c’est plutĂ´t, ou souvent, la majoritĂ© d’entre nous qui le sommes. Mais comme nous sommes la majoritĂ© et que c’est elle qui impose souvent l’attitude gĂ©nĂ©rale, nous restons installĂ©s dans nos impasses de pensĂ©e mĂŞme si celles-ci nous implantent un peu plus dans des blocs de bĂ©ton.

 

Je trouve rĂ©confortant, alors que nous vivons cette deuxième vague du Covid et un second confinement plutĂ´t dĂ©primant, de pouvoir trouver dans ce livre de quoi se sentir un peu plus lĂ©ger. On peut bien-sĂ»r se sentir assez peu fier de soi quant Ă  nos prĂ©jugĂ©s devant certains « handicaps Â», mais on peut aussi s’estimer finalement bien plus avantagĂ© que ce que l’on croit. A condition d’être dotĂ© de quelques uns des atouts ou des qualitĂ©s que Schovanec a, pour lui, de toute Ă©vidence :

 

1) La curiosité

2) Le courage : il n’a attendu personne pour s’intĂ©resser Ă  certains sujets, astronomie, Egypte des pharaons, langues ou autres. Et, il ne s’est pas prĂ©occupĂ© de savoir si c’était bizarre ou non de s’intĂ©resser Ă  ces sujets alors que la majoritĂ© des enfants de son âge avaient d’autres intĂ©rĂŞts.

3) La constance ou la persĂ©vĂ©rance : Il ne s’est pas contentĂ© de lire un ou deux ouvrages. Puisque le sujet l’intĂ©ressait, il a continuĂ© tant qu’il a pu trouver des informations sur ce qui lui plaisait d’apprendre.

4) L’humour et l’autodĂ©rision : on ne perçoit pas de haine, de colère, d’espoir ou de projet de revanche sur celles et ceux qui lui en ont fait baver lors des diffĂ©rentes Ă©tapes de sa vie. Il raconte en s’amusant avoir Ă©tĂ© pris pour un prĂŞtre, un homosexuel…ou un agent secret.

 

Sans doute que son entourage familial (au moins sa mère et son père) plutôt aidant, plutôt cultivé et stable lui a permis d’exprimer ces aptitudes.

On pourrait se dire que Josef Schovanec a grandi dans un milieu social plutôt favorisé et dans des écoles plutôt réputées. Mais il explique dans son livre que les écoles réputées sont sans doute bien plus intolérantes que les autres puisqu’elles sont obsédées par leur réputation.

 

 

Vous ne connaissiez pas Josef Schovanec ? Moi, non plus. Pourtant, il a Ă©tĂ© vu et revu Ă  un moment donnĂ©, sans doute comme un Ă©nième exemplaire de ces phĂ©nomènes de cirque autiste type Rain Man ou autre au cinĂ©ma. Il parle de cette pĂ©riode entre-autres dans cette partie, page 231, et c’est lĂ  dessus que nous nous quitterons aujourd’hui :

 

«  Aujourd’hui, tout ce pan de mon passĂ© est terminĂ©. Cela fait longtemps que les gens ne me reconnaissent plus dans la rue. Joie de la paix retrouvĂ©e ! Je n’ai plus aucune responsabilitĂ© officielle dans le monde associatif. MĂŞme si je continue, pour une durĂ©e encore indĂ©terminĂ©e, Ă  participer ponctuellement Ă  tel ou tel Ă©vĂ©nement – confĂ©rences, CafĂ©s de l’association Asperger  AmitiĂ© et autres. Compagnon de route, je chemine. En attendant le moment, impossible Ă  prĂ©dire et pourtant inĂ©vitable oĂą, soudain, brutalement, les rails qui filaient en parallèle s’écarteront et oĂą, vu du train, je perdrai de vue en quelques secondes ceux qui furent longtemps Ă  mes cĂ´tĂ©s Â».

(Josef Schovanec dans Je suis Ă  l’Est !)

 

 

Franck Unimon, ce jeudi 12 novembre 2020.

 

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Les Chinois

Oeuvre de Thibaut Dapoigny.

 

                                                            Les Chinois

 

 

A vue d’œil, il y a peu de Chinois dans ma ville. Mais, souvent, lorsque j’en vois, ils tiennent un commerce ou y sont employĂ©s :

 

Traiteur alimentaire, poissonnerie (mauvaise), salon d’esthĂ©tique, buraliste PMU, produits (alimentaires) exotiques, marchand de vĂŞtements ou de maroquinerie. 

 

Ils font partie des commerçants de la ville parmi les Kebab, opérateurs et réparateurs de téléphonie, autres restaurants et magasins de vêtements, boulangeries, pharmacies, supermarchés, marchés, boucheries, marchand de primeurs, enseigne Babou, opticiens, agences immobilières, banques physiques, quelques hôtels, cafés, Quicket Mac Do qui donnent sur la rue.

 

Pour parler des quelques commerces que l’on peut dĂ©couvrir lorsque, depuis la gare d’Argenteuil, on se dirige vers le centre-ville. 

 

Les Chinois vivent plutĂ´t en retrait. On n’entend pas parler d’eux. Aucun terroriste islamiste d’origine chinoise, recensĂ© Ă  ce jour. Pas de lien connu ou mĂ©diatisĂ© avec le trafic de cannabis. Aucun d’entre eux non plus parmi les figures connues des gilets jaunes. Oui, la blague est facile, presque factice et limite raciste. Mais je vais rapidement me sortir de cette ambiguĂŻtĂ© :

 

RĂ©cemment, une de mes collègues m’a appris qu’un de ses amis, d’origine chinoise, s’en prend plein la tĂŞte. Celui-ci travaille en Seine et Marne- c’est en banlieue parisienne- dans un supermarchĂ© en tant qu’employĂ©. Il  s’occupe des rayons. Il se fait insulter.

 

Il lui est reprochĂ© la pandĂ©mie du Covid ! Ni plus, ni moins.

 

Rebattre les cartes de la vie ordinaire

 

En France, la pandémie du Covid a rebattu les cartes de notre vie ordinaire et de notre mémoire depuis la mi-Mars 2020. Nous connaissons notre deuxième reconfinement, après quelques jours de couvre-feu, pour cause de deuxième vague depuis le début de ce mois de novembre. Aujourd’hui, nous sommes le dimanche 8 novembre 2020. Et une troisième et quatrième vague sont déjà annoncées.

 

Conclusion : en France au moins, certains Chinois n’ont pas fini d’entendre parler du Covid. On nous parle bien d’un vaccin qui nous protĂ©gerait. Mais cela prendra du temps et puis, les vaccins et la santĂ© publique sont un business comme un autre. On en trouvera peut-ĂŞtre un jour en vente libre sur les marchĂ©s et dans les supermarchĂ©s. Lorsque nous serons morts, pour celles et ceux qui peuvent lire cet article aujourd’hui, ou condamnĂ©s.

 

Nous vivons donc sous certaines contraintes qui Ă©taient inimaginables il y a encore quelques mois. J’ai tendance Ă  croire que nous pouvons connaĂ®tre pire mĂŞme si, je l’espère, ce ne sera pas pour tout de suite. Aux Etats-Unis, ce week-end, nous avons Ă©chappĂ© Ă  la réélection de Donald Trump. Ce qui est a priori, pour moi, un certain soulagement.  Mais si Donald Trump fait peur, on a peur pour Joe Biden.

Photo prise Ă  Argenteuil, en novembre 2018.

 

Et puis :

Imaginons un Etat constituĂ© comme la France, la Grande-Bretagne ou les Etats-Unis qui dĂ©ciderait de passer des contrats avec des terroristes, comme on peut le faire avec une boite privĂ©e :

 

Le but serait de commander les gens par la peur. De leur dicter ce qu’ils doivent manger, lire, boire, penser et consommer. A qui et quand.  De quelle heure Ă  quelle heure. Dans quelles proportions. Mais aussi, quand ils peuvent se reproduire. Et, tout cela, pour le « bien Â» de l’économie et des actionnaires. Vous avez-encore- le droit de vous dire que je vais trop loin ou que j’ai  mangĂ© beaucoup trop de foin ce matin. Après, ce sera peut-ĂŞtre trop tard.

 

En attendant, comme celles et ceux qui le peuvent encore, les Chinois bossent. Comme l’humoriste Bun Hay Mean- dont j’aime beaucoup l’humour- qui peut nous dire :

 

« Nous, les Chinois, avec notre petite bite, on vous a bien ni-quĂ©s ! Vous n’avez rien senti ! Â». 

L’extrait ci-dessous n’est pas celui auquel je pensais mais il donne une idĂ©e de l’humour de Bun Hay Mean dans un de ses spectacles rĂ©cents ( 2020 ou 2019, visiblement). 

 

 Spike Lee, aussi, nous parle des Asiatiques qui bossent. Dans son film, rĂ©alisĂ© en 1989 : Do The Right Thing. MĂŞme si, dans cet extrait, il est question d’un commerçant corĂ©en et non d’un commerçant chinois. 

 

Mais les Chinois ne sont pas les seuls à bosser. Avant le film de Spike Lee, il y avait eu, en France, le très bon Pierre Desproges avec son sketch Rachid

Dans son sketch, Rachid, Desproges nous parle du racisme qui, en France, touche les Arabes. Le Front National dirigĂ© alors par Jean-Marie Le Pen obtenait alors de plus en plus de voix dans la France socialiste du PrĂ©sident François Mitterrand ( 1981-1995). Et certaines personnes considĂ©raient les Arabes comme des fainĂ©ants.  Alors, dans son sketch, Desproges « s’étonne » comme, pour des fainĂ©ants, bien des Arabes travaillent dur. Son sketch date des annĂ©es 80, probablement en 1985 ou en 1986 ( Desproges est mort le 18 avril 1988) Ă  l’époque oĂą les mĂ©diathèques n’étaient pas remplacĂ©es par internet. Je vous propose de le retrouver…sur internet. Et de l’écouter et de le regarder. Rire, rĂ©flexion et Ă©motion sont garantis. MĂŞme si la façon de bouger et d’occuper la scène est très diffĂ©rente de celle de Bun Hay Mean. Trente ans sĂ©parent les deux humoristes. 

 

 

Vers l’oasis :

 

 

Hier matin, samedi, je suis allé à la médiathèque de ma ville. En raison de la pandémie, il était possible de s’y rendre de 11h30 à 12H30 ou de 16h30 à 17h30 pour venir y chercher un ouvrage que l’on avait commandé. En temps habituel, les samedis, la médiathèque est ouverte de 10h à 18h.

 

Après avoir discuté un peu avec un des bibliothécaires, comme j’avais quelques courses à faire, je me suis offert un petit périple. J’avais sur moi toutes les feuilles d’attestation de déplacement provisoire. Je n’en n’ai pas rempli une seule. J’avais besoin de prendre l’air. J’en avais assez de devoir prendre le temps d’écrire sur une feuille ce que je vais faire. Et quand. Et où. Et pourquoi. Et avec qui. Et dans quelle position. Et pendant combien de temps. Ce que j’écris est très grave car je donne un mauvais exemple de comportement civique en pleine période de pandémie. Mais c’est la première fois que je le fais. Et, surtout, il s’agissait de marcher un peu dans ma ville à l’heure de midi.

 

 

Mon masque sur le visage- oui, je porte toujours mon masque sur mon nez et ma bouche lorsque je sors !- j’ai un peu improvisĂ© dans les rues. Jusqu’à arriver devant ce magasin de produits exotiques tenus par des Chinois oĂą je n’étais pas allĂ© depuis une bonne annĂ©e. Ou plus.

 

Photo prise près du Louvre, ce 5 novembre 2020.

Il Ă©tait ouvert. Cela se voyait d’assez loin avec l’enseigne lumineuse, au dessus du magasin, qui clignotait. Dans notre monde de plus en plus fermĂ© par la peur, voir un magasin ou un lieu ouvert peut donner l’impression de se retrouver devant une oasis. Ce que bien des commerces, bien des pubs, certains programmes politiques, Ă©conomiques ou religieux nous promettent.  

 

Sur la droite de « l’oasis Â», un chien agenouillĂ© et enchaĂ®nĂ©. Etait-ce l’un des chiens de l’enfer ? Il avait l’air plutĂ´t gentil. Sauf qu’il n’était pas lĂ , les dernières fois.

 

Après avoir dit bonjour à la dame, j’ai à peine eu le temps d’aller dans les rayons que celle-ci m’a demandé avec une certaine inquiétude…de mettre du gel hydro-alcoolique sur mes mains. J’ai alors vu le flacon devant elle ainsi que le mot nous invitant à l’utiliser.

 

Mais il y avait plus. Lors de mes prĂ©cĂ©dentes venues, il suffisait de faire son tour et de choisir ses articles. LĂ ,  il a presque fallu que j’annonce mes intentions d’achat dès le dĂ©part. Cela m’a fait penser Ă  de la rapine rĂ©pĂ©tĂ©e dont le magasin a pu avoir Ă  se plaindre.

 

J’ai apparemment su rassurer car, ensuite, la dame m’a laissé fureter entre les étalages.

J’étais devant le rayon des surgelĂ©s lorsque je l’ai entendue dire Ă  voix haute :

 

« Il faut mettre votre masque ! Â». Peu après, j’ai vu dĂ©bouler un homme peut-ĂŞtre d’origine pakistanaise ou bangladaise en tenue traditionnelle longue et sandales. Il est restĂ© peu de temps.

 

La date de pĂ©remption du produit surgelĂ© que je regardais Ă©tait dĂ©passĂ©e de quelques jours : Octobre 2020. J’en ai parlĂ© Ă  la vendeuse. Elle s’en est Ă©tonnĂ©e. Un peu plus tĂ´t, elle m’avait expliquĂ© qu’en ce moment, ils avaient de moindres approvisionnements.

 

Elle m’a proposé de me faire un prix. Cinq euros au lieu de six euros quatre vingts.

 

 

J’ai accepté.

 

 

Franck Unimon, ce dimanche 8 novembre 2020.

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Bouclier

 

                                                         Bouclier

Le soleil est un bouclier. On ne peut pas le traverser comme tout ce qui a été oublié.

 

Il aurait Ă©tĂ© oubliĂ© par une quelconque araignĂ©e. Elle avait laissĂ© traĂ®ner ses filets. Des Ă©toiles en ont profitĂ© pour en trouer quelques uns. On n’a  jamais retrouvĂ© ces Ă©toiles. Mais  le soleil, lui, s’est Ă©chappĂ©. Puis, notre histoire a commencĂ©.

 

Nous ne savons rien des délits passés du soleil. L’araignée, qui pourrait peut-être tout nous raconter, se terre quelque part. Elle serait alors beaucoup plus que millénaire.

Nous serions les descendants de sa toile. Sans cette lumière qu’elle laisse descendre, nous pourrions à peine nous lever.

 

Nous ne savons pas ce qu’il y a derrière le soleil. Parce-que, comme les meurtriers, nous sommes trop entraînés dans nos œuvres de terrassement. Tuer, détruire- la mémoire en particulier- et torturer requiert diverses qualifications, un temps d’apprentissage ainsi qu’un certain nombre de vies.

Guérir comme les guerriers, ou fuir, aussi.

 

Les guérisseurs sont des guerriers. Les meurtriers détruisent.

 

Nous avons Ă  choisir entre nos deux tombants. Si nous pouvons  ĂŞtre sur tous les flancs, certains se spĂ©cialisent. D’autre s’immobilisent.

 

Le soleil, lui, ne se laisse pas prendre. Impossible, dĂ©jĂ , de faire face Ă  ce titulaire. Lorsqu’erre une seule de ses Ĺ“illades, des milliards de fois nuclĂ©aires, nous, les « vaque Ă  terre Â» nous reculons. Nous temporisons. Nous faisons avec nos moyens. Nous nous accrochons aux rayons de nos superstitions et de nos religions. 

 

Le soleil,  sur sa pirogue, continue de se promener  d’est en ouest de jour en jour.

 

Beaucoup plus loin, nous, nous tournons en boucle Ă  la recherche d’un mode d’emploi.  

 

Franck Unimon, ce vendredi 6 novembre 2020.  

 

 

 

 

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J’ai bugĂ© !

 

 

                                                   J’ai bugĂ© ! 

Ce dimanche soir, j’ai assez vite perçu que cela ne se passait pas comme prévu.

 

Ordinairement, depuis Argenteuil, on met entre 11 et 17 minutes par le train pour arriver à Paris St Lazare. Mais ce dimanche matin, en revenant du travail, j’ai découvert qu’il y avait des travaux sur la voie ferrée ce week-end. Et que j’allais devoir prendre une navette en passant par la gare de Bécon-Les-Bruyères.

 

Cela s’est très bien passĂ© ce dimanche matin Ă  BĂ©con-les-Bruyères. MĂŞme si, avec les Ă©vĂ©nements rĂ©cents, l’attentat jihadiste dans une Ă©glise catholique Ă  Nice, et la symbolique du bus, sorte de convoi possible vers la mort, je n’ai pu m’empĂŞcher d’avoir un petit peu de retenue en abordant la navette. Devant  celle-ci, un employĂ© barbu nous attendait. Oui, nous en sommes parfois un peu lĂ  avec les inconnus. Pour peu qu’une situation imprĂ©vue s’impose Ă  nous après un Ă©vĂ©nement aussi effrayant que celui de Nice ou d’ailleurs. La mort de Samuel Paty avait aussi Ă  peine refroidi.

 

 

Ma retenue passagère devant cet employé avant de monter dans la navette fut le moment, ce dimanche matin, où j’avais un peu bugé. Ensuite, le trajet s’était fait sans encombre en une vingtaine de minutes jusqu’à la gare d’Argenteuil. Puis, j’étais rentré chez moi.

 

Ce dimanche soir, le chauffeur de la navette qui arrive Ă  la gare d’Argenteuil pour nous transporter jusqu’à la gare de BĂ©con-les-Bruyères est noir. Je serais Ă©videmment montĂ© mĂŞme s’il avait Ă©tĂ© Arabe. Et barbu. Mais, disons, que je suis montĂ© en toute confiance. Alors mĂŞme que je sais- en thĂ©orie- que l’on peut ĂŞtre noir et jihadiste :

 

Pour avoir lu Les Revenants ( publiĂ© en 2016) de David Thomson il y a un ou deux ans, je « sais Â» que des compatriotes antillais sont partis faire le Jihad en Syrie. Par ailleurs, certains Ă©vĂ©nements au NigĂ©ria ou au Mali nous montrent bien qu’il existe des noirs jihadistes.

 

Le jihadisme est une sorte de pèlerinage fait de diffĂ©rents visages et de diffĂ©rents sexes dont l’unique monument est la mort. Tout le contraire de ma vie et de mon mĂ©tier. MĂŞme si, dernièrement, je suis tombĂ© par hasard devant la proximitĂ© qui peut exister entre le verbe « guĂ©rir Â» et le mot «guerrier». 

 

Et ça me plait bien, ça, de me dire que celles et ceux qui essaient de guérir, que ce soit se guérir eux-mêmes ou les autres, puissent être ou sont des guerriers.

 

Malgré les armes de destruction massive, les horreurs et les apparences, les vrais et les plus grands guerriers sont peut-être, finalement, toutes celles et ceux qui s’efforcent de guérir le monde plutôt que de le meurtrir ou de le conquérir. Et cette guérison commence d’abord par soi-même.

 

Nous avons tellement Ă  guĂ©rir en nous :

 

Nos peurs, nos colères, nos préjugés, notre ignorance, nos exigences.

 

Je ne pensais pas Ă  ça dans la navette ce dimanche soir. Nous Ă©tions une dizaine de passagers. Des Noirs et des Arabes. On me croit sans doute obsĂ©dĂ© par la couleur de peau des gens. Et, je le suis en partie. Mais, c’est pourtant un fait : dans cette navette, ce dimanche soir, en partance depuis la gare d’Argenteuil, nous Ă©tions bien principalement des Noirs et des Arabes. Aucun asiatique. Aucun blanc.

 

Peut-ĂŞtre deux femmes. Des hommes pour le reste. Cette information ethnique a pour moi plus valeur sociologique que valeur morale.

 

Si nous étions partis de la gare de St Germain en Laye, que je connais un peu, ou d’Enghien les Bains (plus proche d’Argenteuil), je veux bien croire qu’il y aurait eu, peut-être, un petit peu plus de mixité sociale. Et, encore, cela dépend des horaires.

Ce dimanche soir, je ne sais pas oĂą ces autres passagers se rendaient. Mais, moi,  j’allais au travail pour ma troisième nuit de suite.

 

 

A la gare de Colombes, tout allait bien. Même si j’ai été un peu étonné que le chauffeur s’arrête à la gare de Colombes avant de passer par la gare Le Stade.

 

J’ai vu le chauffeur se renseigner pour la suite de l’itinéraire auprès d’agents de circulation, une jeune femme et un jeune homme, noirs tous les deux. Le prochain arrêt semblait être deux ou trois rues plus loin.

 

Un jeune homme est allé voir le conducteur pour lui demander s’il s’arrêtait bientôt. Il voulait descendre à Bois-Colombes et nous étions dans Bois-Colombes. Très sûr de lui, le chauffeur, dont le masque anti-covid était baissé sur le menton durant tout le trajet, lui a affirmé que c’était pour bientôt.

 

A la gare d’Argenteuil, j’avais vu ce jeune dégingandé arriver. La vingtaine, lui et un autre passager traînant une valise à roulettes, s’étaient alors reconnus. Depuis le fond du bus, on les entendait discuter. Le plus jeune s’exprimant à voix haute.

 

Il avait eu sa mamie au téléphone un peu plus tôt et avait essayé de lui expliquer.

 

« J’ai  arrĂŞtĂ© l’école très tĂ´t car la rue m’a appelĂ© Â». Son copain s’était alors mis Ă  rire.

 

Puis, inquiet pour le climat politique de la France, celui qui avait appelĂ© sa mamie avait lâchĂ© :

 

« 2002. On est dĂ©jĂ  dans la merde, arrĂŞtez avec Lepen ! Â». Rires des autres passagers dans la navette.

 

Ensuite, leurs projets pour l’avenir avaient Ă©tĂ© exposĂ©s :

 

« Une petite femme, un petit boulot, un petit travail, et voilĂ  ! Â».

 

A ce moment, pour une raison inconnue, le chauffeur avait repris la route pour…Argenteuil. Puis, il fit ce constat Ă  voix haute :

 

« J’ai bugĂ© ! Â».

 

Dans un carrefour, il fit demi-tour. Au moins savait-il manœuvrer le véhicule.

 

Nous étions bien avancés dans la ville d’Asnières, et nous nous rapprochions de Clichy, lorsque je me suis dit qu’il fallait aller voir le chauffeur. Là, celui-ci m’a appris qu’il ne connaissait pas le parcours. La SNCF l’avait mandaté mais ce n’était pas son trajet habituel. Il était donc volontaire mais limité.

 

Les autres passagers sont restés plutôt calmes. Même s’il a été étonnant de voir comme, même en étant correctement renseignés, on peut comprendre une même information différemment. Un passager, le plus proche du conducteur, croyait par exemple que la navette allait nous emmener directement à la gare St Lazare.

J’ai dû apprendre à certains passagers qu’il y avait la gare d’Asnières sur Seine et la gare de Bécon les Bruyères. Qu’il s’agissait de deux gares différentes même si toutes les deux se trouvent dans la ville d’Asnières.

 

Le chauffeur de bus m’a d’abord un petit peu « rĂ©sistĂ© Â». Lorsque j’ai essayĂ© de l’orienter, je m’appuyais sur le fait que je connaissais un petit peu le coin. Non, aller Ă  gauche lĂ  oĂą il Ă©tait indiquĂ© St Denis et Clichy n’était pas notre direction.

Apercevoir assez vite un panneau montrant BĂ©con les Bruyères m’a rendu un peu crĂ©dible. Plus que le jeune homme « de Bois Colombes Â» qu’il a d’abord voulu consulter et qui, heureusement, a bien pris la tournure des Ă©vĂ©nements et n’a jamais tentĂ© d’avoir un rĂ´le d’éclaireur.

 

Voir un ou deux autres panneaux et les montrer au conducteur a continué de nous mettre sur la bonne voie. D’autant que, son téléphone à la main, celui-ci a voulu s’en servir comme GPS. C’est bien utile, le GPS sur le téléphone. Sauf lorsqu’il vous indique la mauvaise route. Un copilote improvisé avec deux yeux et une tête, et qui parle, ça peut aussi aider.

 

Nous sommes arrivés à la gare de Bécon les Bruyères après quarante bonnes minutes de route. Le chauffeur, soulagé, m’a remercié. Ainsi qu’un des passagers, que je trouvais plutôt assez jovial alors que nous marchions dans les rues calmes nous menant à la gare de Bécon les Bruyères. Le quartier était agréable et aussi plutôt cossu.

 

 

Le train pour Paris St Lazare est arrivĂ©. Nous Ă©tions dedans depuis Ă  peine quelques minutes, lorsque, assis un peu plus loin devant moi, j’ai vu « mon Â» passager jovial apostropher une femme qui Ă©tait au tĂ©lĂ©phone avec ses Ă©couteurs :

 

« Parle plus doucement ! Sale raciste ! Tu me prends pour les blancs ?! Je te cogne, moi ! Â».

 

Debout, la femme, a d’abord tenu tĂŞte sur le ton de «  Si vous n’êtes pas content, descendez du train!». Puis, elle s’est rapidement rassise et a parlĂ© plus doucement. Notre homme qui avait arrĂŞtĂ© d’être jovial avait dĂ» ĂŞtre persuasif.

 

A la station Cardinet ou Clichy Levallois, deux jeunes couples sont montés dans la voiture. Détendus, souriants, ils ignoraient tout ce qui avait pu se passer depuis notre départ d’Argenteuil. Je me suis dit que la vie se déroule de cette façon tous les jours.

 

Pour rapide qu’ait Ă©tĂ© notre trajet jusqu’à St Lazare depuis BĂ©con les Bruyères, j’étais content d’arriver. Avant que les portes du train ne s’ouvrent sur le quai, me revoilĂ  cĂ´te Ă  cĂ´te avec « mon Â» jovial. J’essaie de lui dire quelques mots. De le raisonner. Il me rĂ©pond :

«  Je les dĂ©teste Â».

 

Avant de nous sĂ©parer, j’ai juste l’élan de lui rĂ©pondre :

 

«  La haine n’est pas la solution Â». Puis, nous nous souhaitons mutuellement une bonne soirĂ©e.

 

 

Franck Unimon, ce mercredi 4 novembre 2020.  

 

 

 

 

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Argenteuil Corona Circus Croisements/ Interviews

Immobilier

 

                                                   Immobilier

Il claudique mais ça n’empêche pas de marcher ensemble. Je l’ai connu alors qu’il était gérant d’un supermarché près de chez moi. Il le tenait avec autorité depuis sa caisse. Avec un regard d’aigle. Il disait à peine bonjour. Ou du bout des lèvres. Normal, pour un aigle.

 

Puis, il a arrĂŞtĂ©. Il a changĂ© de projet.  Alors, il a pris un peu plus le temps de discuter avec moi lorsque l’on a continuĂ© de se croiser. Puisque nous habitons Ă  peu près dans le mĂŞme quartier. Dans le supermarchĂ©, pendant des annĂ©es, il avait travaillĂ© de 5h Ă  21h. Il m’avait demandĂ© :

 

« Tu l’aurais fait ?! Â». Je lui avais confirmĂ© que je ne l’aurais pas fait.

Un autre jour, il m’a appris qu’il achetait des appartements aux enchères. Une fois, il m’a proposé d’y aller avec lui. Au tribunal de Pontoise. J’ai décliné. Peut-être mes principes ou ma disponibilité. Racheter à bas prix ce qui a pu constituer le projet et la vie des gens. Ou je n’étais tout simplement pas prêt à tenter cette aventure.

 

Je l’ai recroisé tout à l’heure à la boulangerie. Je venais de prendre mes baguettes. Lui, il sortait de la pièce du boulanger. Comme s’il était chez lui. Il m’a reconnu malgré mon masque anti-Covid. Il avait du pain dans la bouche.

 

Les murs de cette boulangerie sont restĂ©s vides pendant plusieurs annĂ©es. Une fois, j’y avais achetĂ© une confiture faite maison, payĂ©e cinq euros. Une arnaque. Une de mes collègues en avait rigolĂ© avec moi. Puis, il a rachetĂ© les murs. Il m’a expliquĂ© un jour son principe : Il loue. C’est Ă  celui qui tient la boulangerie de faire en sorte que son commerce marche !

 

Alors que nous nous éloignons de la boulangerie, il me demande si le pain est bon. J’ai les bras remplis de baguettes. J’ai oublié de prévoir un sac. Je réponds que le pain est très bon dans cette boulangerie.

 

Comme il me rappelle être seulement propriétaire des murs, j’en profite pour bénéficier de sa connaissance du marché immobilier dans notre ville d’Argenteuil. Récemment, en lisant par dessus l’épaule d’une personne qui regardait son téléphone portable, j’ai appris que le journal Les échos se demandait si ce deuxième reconfinement allait faire baisser les prix. L’article des Echos expliquait qu’avant ce deuxième reconfinement, les acheteurs avaient recommencé à se manifester. Mais, là….

 

Pour lui, Covid ou non, la vie continue. Il touche et dĂ©place son masque rĂ©gulièrement Ă  pleine main tout en me parlant. 500 euros la location pour 10 mètres carrĂ©s. 600 euros de loyer pour un 25-30 mètres carrĂ©s. Pour 38 mètres carrĂ©s ? 800 euros. Il m’explique qu’investir dans l’immobilier Ă  Argenteuil vaut le coup. Y habiter, non.

1200 demandes de location par jour m’apprend-t’il. Il m’approuve lorsque je dis qu’Argenteuil attire car c’est une ville proche de Paris.

Au centre, le maire de la ville d’Argenteuil, Georges Mothron, lors de la journĂ©e d’ouverture de la saison 2020-2021 au centre culturel Le Figuier Blanc.

 

 

Je pars acheter Le Canard Enchaîné. En première page d’un journal, j’aperçois un article qui parle de l’attentat jihadiste récent à Vienne. Si les Viennois sont, et je le comprends facilement, sous le choc, ici, et ailleurs, on est loin de tout ça.

 

Par contre, je connais quelqu’un qui est encore sous le choc. Une commerçante près de chez moi.

 

Elle a ouvert son commerce il y a Ă  peine deux mois. Il a l’air d’assez bien marcher. Ce week-end, quelqu’un a essayĂ© de partir avec la caisse mais, aussi, de s’envoler avec ce qu’elle vend. De l’alimentaire. Elle m’a appris ça ce matin. J’ai d’abord pensĂ© Ă  cette pĂ©riode de plusieurs mois qui avait prĂ©cĂ©dĂ© l’ouverture de son magasin. PĂ©riode durant laquelle des travaux avaient Ă©tĂ© effectuĂ©s. Mais quand je repasse la voir, elle me dit que c’était comme si la personne connaissait les lieux et avait la clĂ©. Aucune effraction. Elle ne sait pas si elle va rester.  Je la comprends : il y a quelques semaines, elle a dĂ» coopĂ©rer avec une fuite d’eau. Et, maintenant, ce cambriolage sans effraction. Les voleurs ont rĂ©ussi Ă  ouvrir la porte de devant mais ont Ă©chouĂ© Ă  faire monter le rideau de fer.

 

Au commissariat où elle est allée porter plainte, on lui a répondu que lors de ce week-end de la Toussaint, il y avait eu beaucoup d’infractions. L’agence immobilière qui gère les murs s’est contentée de lui répondre qu’elle lui avait remis des clés et qu’elle est fermée le dimanche. La propriétaire ne s’est pas manifestée.

 

 

Franck Unimon, ce mercredi 4 novembre 2020.

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Cinéma Echos Statiques self-défense/ Arts Martiaux

La Clinique de l’Amour ( version courte)

 

 

La Clinique de l’Amour ( version courte) : une Ă©mission de France Inter

 

 

«  L’Amour, c’est deux solitudes qui s’accouplent pour crĂ©er un malentendu Â» avait Ă©crit Pascal Bruckner dans son livre Lunes de Fiel.  L’histoire avait  ensuite Ă©tĂ© adaptĂ©e par Roman Polanski. Le film avait fait parler de lui. C’était en 1992.

 

Les films et les livres sur l’Amour défient l’horizon. Dans un film de Lelouch, je crois, l’acteur Jean-Pierre Marielle disait que l’Humanité, malgré tout ce qu’elle avait pu inventer, avait si peu évolué dans le domaine de l’Amour.

Mais, aujourd’hui, et au moins depuis le mouvement MeeToo, Polanski est très mal perçu. Alors, citons d’autres films oĂą le couple et l’Amour sont mis Ă  mal car il y a du “choix” dans le domaine. Je ne peux m’empĂŞcher de citer le film de Maurice Pialat : ” Nous ne vieillirons pas ensemble“.

 

 

Autre film que je peux citer dans l’amour vache, ” Seul contre tous” de Gaspar NoĂ© qui me permet a posteriori de rendre hommage Ă  l’acteur Philippe Nahon, dĂ©cĂ©dĂ© il y a quelques mois. Je considère depuis longtemps ” Seul contre tous” comme un chef-d’oeuvre. Au mĂŞme titre que ” Nous ne vieillirons pas ensemble”. 

 

Mais il importe de donner un peu plus la parole aux femmes… 

 

 

 

 

J’ai choisi ces extraits de films mais, bien-sĂ»r, on aurait pu en prendre bien d’autres.

 

La Clinique de l’Amour est une Ă©mission que l’on peut trouver en podcast. Elle a Ă©tĂ© proposĂ©e par France inter en fĂ©vrier. Durant cinq Ă  six Ă©pisodes d’une vingtaine de minutes, chacun, on « Ă©coute Â» l’évolution de plusieurs couples qui font une thĂ©rapie.

 

L’émission m’a « plu Â». MĂŞme si je lui reprocherais le fait que, par moments, pour moi, les thĂ©rapeutes sont trop intervenus. Le thĂ©rapeute masculin par exemple.

 

Il est certaines fois oĂą, Ă  mon avis, les deux thĂ©rapeutes auraient dĂ» davantage « protĂ©ger Â» la parole de celle ou de celui qui s’exprime  et le laisser parler. Au lieu de le laisser ou de la laisser se faire « pilonner Â» verbalement par l’autre.

 

Je crois que ça aurait Ă©tĂ© « bien Â» d’expliciter :

 

De dire par exemple Ă  telle personne qu’elle semble très déçue ; qu’elle avait apparemment une très haute vision ou une vision diffĂ©rente de ce que son mari ou sa compagne allait ĂŞtre dans la vie de couple ou de famille.

 

Un des couples a trois enfants. Je crois que cela aurait Ă©tĂ© bien de demander pourquoi trois enfants ? Pourquoi pas deux ? Pourquoi pas un seul ?

Vu que j’ai compris que bien des couples font des enfants en pensant que faire des enfants rapproche et va aider le couple Ă  se « soigner Â».

 

Alors que je crois que cela peut ĂŞtre le contraire :

 

Lorsque l’on fait un enfant, nos tripes prennent facilement ou peuvent facilement prendre le dessus sur tout ce que l’on essaie d’être ou de faire de manière rationnelle. Et l’on peut alors s’apercevoir Ă  quel point on est très diffĂ©rent de sa « moitiĂ© Â» voire opposĂ© Ă  elle. MĂŞme si on peut aussi devenir complĂ©mentaire.

 

J’ai aussi Ă©tĂ©  Ă  nouveau assez agacĂ© par certaines phrases typiques du vocabulaire professionnel de « mes Â»  collègues :

 

Ma remarque est sĂ»rement très dĂ©placĂ©e. Car le principal est bien-sĂ»r que ces thĂ©rapeutes aient fourni leur prĂ©sence, leur constance et leur empathie Ă  ces couples. Mais je vois Ă  nouveau dans ces tics de vocabulaire et de langage de mes « collègues Â» thĂ©rapeutes un certain manque de spontanĂ©itĂ© : un trop haut degrĂ© d’intellectualisation ; une certaine carence affective. Comme s’ils s’en tenaient Ă  un texte ou Ă  un protocole appris par cĹ“ur qui les empĂŞche d’improviser. Comme s’ils s’exprimaient de manière scolaire.

 

Hormis ces quelques remarques, j’ai bien aimé cette émission.

 

Vu que la longueur de mes articles peut dĂ©fier l’horizon et statufier l’attention du lecteur, cet article est la version courte de celui que j’avais proposĂ© en premier ( La Clinique de l’Amour-d’après un Podcast de France Inter). L’idĂ©e est quand mĂŞme de vous donner envie d’Ă©couter ces podcast de France Inter. Pas de vous donner envie de “haĂŻr” l’auteur de l’article parce-que ses articles sont trop longs. Sourire.  

Le lien pour le premier podcast se trouve ci-dessous

https://podcasts.apple.com/fr/podcast/1-partir-ou-rester/id1498194259?i=1000465403252

 

Franck Unimon, ce mardi 3 novembre 2020.