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Avec ou sans masques

 

                                                             Avec ou sans masques.

 

 

 

Le dĂ©confinement a donc bien eu lieu le 12 Mai. Cela fait dĂ©jĂ  deux semaines. A premiĂšre vue, notre monde n’a pas changĂ©. Nous avons toujours deux bras et deux jambes. Nous nous dĂ©plaçons toujours de la mĂȘme maniĂšre en gardant les mĂȘmes symptĂŽmes qu’auparavant : nous habitons ensemble des couloirs et des histoires diffĂ©rentes en boitant. Parfois en gagnant. D’autres fois en perdant. Mais, toujours, en respirant. Et lorsque nous jouissons ou Ă©jaculons, notre respiration part faire une ou plusieurs boucles avant de se rappeler de nous et, comme le marteau de Thor  ou la « planche Â» du Surfer d’Argent, de nous revenir.  Car ça aussi, ça n’a pas changĂ©. En principe.

 

Nous avons eu peur. Nous avons encore peur d’une certaine maniĂšre puisque nous sommes nombreux maintenant Ă  porter des masques. Mais, dans l’ensemble, une fois de plus, nous avons survĂ©cu. Ça, aussi, ça n’a pas changĂ©. Sauf qu’une bonne partie d’entre nous sont devenus des fantĂŽmes masquĂ©s. Car les masques sont arrivĂ©s et nous les plaçons devant notre nez et notre bouche. Certaines personnes rajoutent des lunettes ou des protections plastifiĂ©es devant tout le visage. Nous ne savons plus ce que ça fait que de respirer Ă  visage dĂ©couvert dans la rue, dans des commerces, des transports ou au travail en prĂ©sence de nos collĂšgues Ă  proximitĂ©.

 

Il y a les masques jetables et rĂ©utilisables. Ceux achetĂ©s dans les supermarchĂ©s, d’autres commerces ou dans les pharmacies ou en ligne. Ceux offerts par la mairie de notre ville, notre employeur, la SNCF ou la RATP.

 

Il y a des rĂ©sistants au masque. Et des rĂ©sistants Ă  la distance sociale.  Ce qui dĂ©montre bien que nous sommes toujours la mĂȘme espĂšce humaine :

 

Il faut toujours qu’il y en ait un ou plusieurs qui se singularisent. Peu importe de savoir qui a tort ou raison. Mais nous sommes quand mĂȘme beaucoup plus nombreux aujourd’hui Ă  porter des masques dans les rues, dans les transports, dans les commerces et au travail qu’il y a trois mois.

 

Il y a trois mois, notre gouvernement considĂ©rait comme inutile d’en porter. Il y a trois mois, nous Ă©tions un grand nombre d’ignorants concernant le mode de propagation du virus. Nous avons aussi pĂ©tĂ© plus haut que notre nez et sans doute Ă©tĂ© d’un certain mĂ©pris pour ce qui se pratique Ă  l’étranger, en Asie en particulier, depuis des annĂ©es :

 

Porter un masque dans un monde pollué, dans un monde infecté.

 

Aujourd’hui, dans les transports en commun ainsi qu’au travail, le port du masque est devenu obligatoire. Soit nous avons appris de l’étranger. Soit nous appliquons les rĂšgles et la loi qui nous ont Ă©tĂ© indiquĂ©es par le gouvernement et les chiffres. Les chiffres des malades et des morts, inconnus ou familiers : amis, voisins, proches, collĂšgues.

 

En France, il y a trois mois, nous aurions sĂ»rement portĂ© des masques plus vite. Sauf qu’il y a trois mois, en France comme dans d’autres pays, il y avait trĂšs peu de masques Ă  disposition pour la population, professionnels de la santĂ© inclus. Et les masques FFP2, parmi ceux protĂ©geant le mieux  (parmi les masques jetables) coĂ»taient au moins 3,99 euros l’unitĂ© (voir l’article Coronavirus ). Sachant que la durĂ©e de vie de ce masque est d’environ quatre heures, il aurait fallu ĂȘtre plutĂŽt riche pour s’en fournir pour une durĂ©e de deux Ă  trois mois.

 

A nouveau, ce n’est pas nouveau, les riches s’en sortent le mieux. Ainsi que celles et ceux qui distribuent, calculent, anticipent et dĂ©cident des chiffres qui sont souvent les mĂȘmes personnes.

 

BientĂŽt, nous allons nous faire avoir par tout un tas d’impĂŽts, de conditions et de vie et de travail de plus en plus rĂ©pressives au profit de la minoritĂ© des riches, des dirigeants et de notre gouvernement et cela va se passer comme d’habitude car nous sommes toujours dans le mĂȘme monde qu’avant l’épidĂ©mie. C’est ce que nous croyons pour la plupart d’entre nous. MĂȘme s’il y aura des contestations sociales qui s’opposeront Ă  la distanciation sociale imposĂ©e pendant l’épidĂ©mie.

 Mais nous croyons que ça va se passer comme d’habitude parce-que nous sommes cramponnĂ©s Ă  notre monde. Nous y sommes entraĂźnĂ©s mĂȘme s’il nous en fait voir. Nous sommes installĂ©s en lui autant qu’il est installĂ© nous. Lui et nous avons fusionnĂ© jusqu’à un certain point. Un point assez pathologique. Mais nous nous en rendons moyennement compte, et pas longtemps, puisque tout le monde fait pareil. Et on ne peut pas vivre tout seul ni se battre- et gagner- contre le plus grand nombre. En plus, l’ennemi, est invisible, multicartes et quasiment interchangeable. PrĂ©nom, genre, prĂ©fĂ©rence sexuelle,  taille,  Ăąge, couleur de peau, adresse postale, niveau d’Ă©tudes, nombre d’enfants, profession, religion, rĂ©gime alimentaire, appartenance politique, langues parlĂ©es et Ă©crites, chemise, veste, pantalon, jupe, couche-culotte pampers, legging, maillot de bain, soutien-gorge,  il peut ruisseler de l’un Ă  l’autre avec facilitĂ©. Il finira toujours par nous avoir.  

 

Pourtant croire et penser que tout reste exactement et toujours Ă  l’identique reviendrait Ă  dire que depuis vingt, trente ou quarante ans, tous les jours, nous portons toujours la mĂȘme tenue lĂ©opard, nous mangeons toujours les mĂȘmes carottes, le mĂȘme couscous, les mĂȘmes donbrĂ©s, matin, midi et soir ; que nous Ă©coutons toujours le mĂȘme titre de musique ; que nous portons encore le mĂȘme vĂȘtement de la mĂȘme couleur ;  que nous adressons les mĂȘmes mots aux mĂȘmes visages que nous avons devant nous ; que nous vivons toujours au mĂȘme endroit et que nous sommes toujours dans la mĂȘme position corporelle au millimĂštre prĂšs; que nous avons toujours les mĂȘmes voisins….

Cela reviendrait Ă  dire qu’en 1989, le mur de Berlin est restĂ© intact. Ou que dans la sĂ©rie Game of Thrones le Mur reste immuable. Ce qui signifierait que pour le mur de Berlin, on est soit ignorant de ce qui s’est passĂ© dans les faits et que pour Game of Thrones, on n’ait pas vu la sĂ©rie dans son intĂ©gralitĂ© ou que l’on n’en n’ait jamais entendu parler. C’est possible. Il est possible que des gens n’aient jamais entendu parler de la chute du Mur de Berlin comme de la sĂ©rie Game of Thrones. Il y a bien des Ă©vĂ©nements de par le monde, et mĂȘme dans notre vie personnelle, qui nous ont marquĂ©s et qui sont passĂ©s totalement inaperçus ou ont Ă©tĂ© considĂ©rĂ©s, volontairement ou involontairement, comme insignifiants par beaucoup d’autres. C’est une bonne partie de notre vie et cela peut ĂȘtre trĂšs dur Ă  accepter comme Ă  digĂ©rer. D’oĂč l’explication de la prĂ©sence de la haine et de la rancune sur terre sans doute entre les ĂȘtres humains.

 

Mais je crois que nous pensons que notre monde n’a pas changĂ© depuis l’épidĂ©mie par habitude. Ou parce-que nous voudrions qu’il se transforme comme dans les contes de fĂ©es. Du jour au lendemain et pour le meilleur, pendant notre sommeil, pendant que l’on regarde ailleurs ou que l’on est en train de faire ses courses afin de changer de carottes, de voisins ou de collĂšgues. 

 

Aujourd’hui, celles et ceux qui ont un regard sont avantagĂ©s dans notre monde de masques jetables et rĂ©utilisables. Celles et ceux qui portent un masque. Et celles et ceux qui les regardent. J’ai l’impression que l’on se regarde un peu plus, les uns et les autres, dehors. Il y a bien sĂ»r de la mĂ©fiance. Mais il y a aussi une certaine attention qui avait pratiquement disparu au profit de tous ces Ă©crans qui sont devenus nos nouvelles frontiĂšres entre nous et les autres. Des frontiĂšres aux serrures de plus en plus sophistiquĂ©es qui deviendront peut-ĂȘtre plus difficiles Ă  ouvrir que ces frontiĂšres physiques pour lesquelles des migrants meurent Ă  l’extĂ©rieur de notre pays et dans « nos Â» mers.

 

Quand nos masques tomberont, une fois l’épidĂ©mie passĂ©e, et que nous les rangerons et les oublierons (mĂȘme si je crois qu’ils reviendront), nos yeux redeviendront des linceuls et des impasses pour les autres:

 

Celles et ceux qui nous sont inconnus et que nous ignorons par habitude.

 

La pandĂ©mie a simplifiĂ© nos agendas. Elle a aussi, malheureusement, tuĂ©, rendu malade, mis en colĂšre et poussĂ© au chĂŽmage. Elle a aussi permis le crime (violences conjugales, maltraitance sur enfants). Des dĂ©lits (trafics de drogues, vols et trafics de masques et de matĂ©riel mĂ©dical et paramĂ©dical
). Des enrichissements en bourse pour les plus riches. Des stratĂ©gies politiques. Mais elle a aussi permis Ă  celles et ceux qui en avaient le souhait, celles et ceux qui Ă©taient dĂ©jĂ  en train de le faire
de changer. De façon de vivre. De façon de penser.

 

Assiette de la fĂȘte de l’AĂŻd que nous a offert un de nos voisins, ce matin.

 

Par exemple, en France, on a pu faire toute une histoire concernant le port du voile « musulman Â». Or, actuellement, depuis l’épidĂ©mie, nous sommes nombreux, avec nos masques, Ă  ressembler Ă  des musulmans. MĂȘme celles et ceux qui ont eu et ont des points de vue antimusulmans.

 

La culture du masque, en cas de risque de pollution ou d’épidĂ©mie, n’est pas française. C’est parce-que la culture française, comme d’autres cultures, a su incorporer, assimiler et adopter le Savoir, les connaissances et les expĂ©riences d’autres cultures qu’elle a pu s’en sortir, perdurer
et devenir une grande culture. Ce qui implique pour la culture française et  d’autres cultures si « importantes Â», y compris scientifiques, de par le monde, de Savoir reconnaĂźtre ce qu’elle Doit Ă  d’autres cultures et, avant cela, d’Apprendre Ă  les ConnaĂźtre.

 

 

 

Mais si la culture française- ou toute autre culture « triomphante Â»- continue de prĂ©fĂ©rer ses chiffres, ses pendentifs, ses mĂ©dailles et ses vitrines aux personnes qui l’animent, la guident, la soignent, l’entretiennent, la lavent, la convoient et la nettoient jour aprĂšs jour elle finira victime de ses latrines, de ses blessures et de ses guerres, un jour ou l’autre, avec ou sans ses masques.

 

Franck Unimon, mardi 26 mai 2020.

 

 

 

 

 

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Coronavirus Circus 2Ăšme Panorama 15 avril-18 Mai 2020 par Franck Unimon

Coronavirus Circus 2Ăšme Panorama 15 avril- 18 Mai 2020.

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Sankara n’est pas mort

 

 

 

                   Sankara n’est pas mort : Au Pays des Hommes intĂšgres

 

                    RĂ©alisĂ© en 2019 par Lucie Viver. Musique : Rodolphe Burger.

                    Langues parlĂ©es   : Français, MorĂ©, Dioula. 

                     Film Disponible en VOD sur la plateforme  25 Ăšme Heure

                     DistribuĂ© par Meteore-Films

                     Agence de Presse : Makna Presse/ ChloĂ© Lorenzi

 

D’un point de vue occidental, j’ai l’impression que chaque fois que l’on parle de l’Afrique, qu’en fait, on parle d’un pays. Comme si l’Afrique Ă©tait une fresque saccadĂ©e et fragile, qui, pour se tenir et s’ériger, nĂ©cessitait le cours et les contours de tous ses fleuves, de tous ses mirages et de tous ses peuples. Et qu’elle hĂ©ritait constamment de sillons- en partie coloniaux- la sĂ©parant de ses aimants. Un destin qui peut ressembler Ă  celui de toute minoritĂ© disparue ou menacĂ©e de finir dans une dĂ©charge un jour ou l’autre que ce soit en Asie, en Amazonie ou en Europe. Car une minoritĂ© qui ne se fond pas dans la masse ou dans la forĂȘt ombilicale de la majoritĂ© est gĂ©nĂ©ralement considĂ©rĂ©e comme usagĂ©e. Sauf que l’Afrique est beaucoup trop grande, trop peuplĂ©e et trop ancienne, pour ĂȘtre uniquement un bout de terrain mĂȘme si elle sert souvent de parking et d’antres-peaux Ă  certains entrepreneurs, Ă  certaines castes familiales et politiques d’Afrique et d’ailleurs.

 

Pendant ce temps, en occident, en Asie ou ailleurs, certaines Nations se dĂ©marquent sans qu’on leur colle la mĂȘme exigence d’unitĂ© que l’on impose Ă  l’Afrique. Nous l’avons vu rĂ©cemment avec la pandĂ©mie du Covid-19 : On nous a parlĂ© de l’Allemagne,   des Pays-Bas, la Chine, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis, la Russie, la CorĂ©e du Sud, TaĂŻwan, l’Italie, l’Espagne
. et de l’Afrique qui Ă©tait Ă  nouveau appelĂ©e Ă  souffrir- un peu comme si l’Afrique Ă©tait de la mĂȘme taille qu’HaĂŻti- car trop peu structurĂ©e.

 

L’Afrique est peut-ĂȘtre le continent dont on parle le plus sans le connaĂźtre, en occident. Sans mĂȘme prendre la peine de prĂ©senter ses excuses pour notre ignorance la concernant. Lorsqu’on parle d’elle. Elle est cette gigantesque silhouette dans l’arriĂšre champ d’un film. Celle qui fait le mĂ©nage ou est un mauvais exemple, dont on retient Ă  peine le nom et dont on oublie la fiche de paie.

 

Lorsqu’on parle de l’Afrique, en occident, le plus souvent, c’est pour nous parler d’un vertige bloquĂ©. D’un continent qui dĂ©gringole. Et qui dĂ©gringole sans cesse. Rimbaud a Ă©crit Le Bateau ivre. C’est toujours un modĂšle. Depuis l’occident, avec nos yeux d’occidentaux standardisĂ©s,  on pourrait presque surnommer l’Afrique, le continent ivre. Et ce n’est pas pour la citer en exemple. Car nous avons alors les yeux de celle ou celui qui quitte le sol et voit dĂ©jĂ  double rien qu’en fixant le fond de son verre et cela avant mĂȘme de commencer Ă  boire ce qu’il contient.

 

Je suis un occidental. Je suis nĂ© comme ça. Je rĂ©pĂšte seulement Ă  ma façon ce que l’auteur noir amĂ©ricain Richard Wright (mort Ă  Paris en 1960) avait pu dire il y a un demi-siĂšcle siĂšcle ou davantage.

Thomas Sankara connaissait sans aucun doute des auteurs comme Richard Wright, une référence occidentale. Par contre, en occident, nous connaissons moins bien les auteurs africains.

 

Je ne connais rien Ă  l’Afrique. Je n’y suis jamais allĂ©. Personne, dans ma famille, n’y est jamais allĂ©. Plusieurs de mes ancĂȘtres, il y a longtemps, ont Ă©tĂ© forcĂ©s d’en partir. C’est tout. On ne sait mĂȘme pas exactement qui ils sont. Ni d’oĂč ils venaient prĂ©cisĂ©ment dans l’Afrique des siĂšcles passĂ©s. A quels peuples ils appartenaient. Moi, je suis nĂ© en Ăźle-de-France.

 

L’Afrique actuelle compte un peu plus de trente pays. Je viens de l’apprendre en comptant sur une carte. Il me semble que l’Europe actuelle compte moins de pays que l’Afrique. Mais je n’ai pas comptĂ©.

Le Burkina Faso ou Burkina, l’ancienne Haute Volta, fait partie de l’Afrique de l’Ouest.   

Autour du Burkina Faso ( 20 millions d’habitants), situĂ© en Afrique de l’Ouest, on trouve le Mali, le Niger, le BĂ©nin, le Togo, le Ghana et la CĂŽte d’Ivoire. Certains de ces pays, avant l’époque coloniale et aussi pendant l’époque de l’esclavage ont Ă©tĂ© de grands royaumes africains tant par la force militaire, Ă©conomique que culturelle. Leurs frontiĂšres Ă©taient aussi diffĂ©rentes.

 

Le Burkina n’a pas d’accùs direct à la mer.

 

Thomas Sankara, PrĂ©sident d’orientation marxiste, a appelĂ© l’ancienne Haute Volta, le Burkina Faso:

«  Le Pays des hommes intĂšgres Â».

 

C’était en 1984. AprĂšs le Putsch Militaire qui l’a amenĂ© Ă  devenir le PrĂ©sident du pays. Jusqu’en 1987 oĂč il aurait Ă©tĂ© assassinĂ© par le capitaine Blaise CompaorĂ©, un de ses anciens alliĂ©s, qui a ensuite dirigĂ© le pays jusqu’en 2014 oĂč l’insurrection populaire l’a vidĂ© du Pouvoir. Aujourd’hui, Blaise CampaorĂ© vivrait en CĂŽte d’Ivoire ( le journal Le Monde diplomatique, Mai 2020, article de RĂ©mi Carayol, Les milices prolifĂšrent au Burkina Faso).

 

Le Burkina a Ă©tĂ© un pays oĂč des « groupes communautaires et des religions y coexistaient de maniĂšre pacifique :

Mossis, Bobos, Dioulas, Peuls, GourmantchĂ©s, SĂ©noufos, Bissas, Touaregs etc
.Selon le recensement de 2006, le pays compte 60,5% de musulmans, 19% de catholiques, 15,3% d’animistes et 4,2% de protestants. Les mariages mixtes y sont nombreux ; les familles, multiconfessionnelles Â» (article de l’envoyĂ© spĂ©cial RĂ©mi Carayol, dans le journal Le Monde diplomatique de Mai 2020, article Les milices prolifĂšrent au Burkina Faso, page 12).

 

Actuellement, les Peuls sont accusĂ©s d’ĂȘtre proches des djihadistes.  Certains Peuls ont Ă©tĂ© « massacrĂ©s Â» par certaines confrĂ©ries  (dont les dozos ou donsos) de chasseurs traditionnels. Depuis des siĂšcles, les dozos «  assurent la protection des villageois, rĂ©gulent la pratique de la chasse pour prĂ©server la faune et pratiquent la mĂ©decine traditionnelle Â».  Mais des Peuls ont aussi Ă©tĂ© tuĂ©s par « les gardiens de la brousse Â» ou Koglweogo  (dans la langue des Mossis) aprĂšs qu’un chef de village Mossi ait Ă©tĂ© assassinĂ© par des djihadistes.  Les milices des Koglweogo sont apparues dans «  les annĂ©es 90 Â» et se « sont multipliĂ©es aprĂšs la chute de M.CompaorĂ© Â» ( article Les milices prolifĂšrent au Burkina Faso dans Le Monde diplomatique, Mai 2020).

 

 

A l’époque de Thomas Sankara, le climat inter-ethnique Ă©tait sĂ»rement plus apaisĂ© au Burkina. Et puis, Sankara Ă©tait un meneur charismatique. Je me rappelle de lui en tenue militaire. Et d’un article oĂč il expliquait qu’il dormait peu et s’imposait une discipline assez stricte en terme d’exercice physique. Ce qui lui donnait les yeux rouges. Et, il anticipait le fait que certaines personnes allaient en dĂ©duire qu’il se droguait. Si sa figure de combattant « puriste Â» pourrait, pour un occidental, spontanĂ©ment faire penser Ă  une sorte de Che GuĂ©vara “africain”, il faut peut-ĂȘtre plus lui trouver de points communs avec Patrice Lumumba du Congo-Kinshasa, assassinĂ© en 1961 avec la complicitĂ© de Mobutu, son ancien alliĂ©, devenu ensuite dirigeant du pays rebaptisĂ© ZaĂŻre de 1965 Ă  1997. Le ZaĂŻre, pays oĂč eut lieu, en 1974, le match de boxe Historique entre les deux noirs amĂ©ricains, Georges Foreman et Muhammad Ali, hĂ©ros de millions de gens. 

 

“Loin” de tout ça, le film-reportage Thomas Sankara n’est pas mort de Lucie Viver ( son premier film), dĂ©bute par des images nous montrant l’usine Ideale oĂč l’on conditionne de l’eau minĂ©rale dans des sacs en plastique. Ces sacs sont destinĂ©s Ă  la vente. De ces sacs en plastique remplis d’eau, nous passons Ă   quelques images de rue lors du renversement du gouvernement de Blaise CampaorĂ©.

Un homme explique que le « rĂšgne interminable Â» de Blaise CampaorĂ© a assez durĂ© :

 

«  Il a Ă©tĂ© le PrĂ©sident de mon papa. Il ne peut pas ĂȘtre le PrĂ©sident de mes enfants ! Â».

 

 

Puis, nous suivrons l’écrivain-poĂšte Bikontine Ă  travers le pays. Lequel espĂšre «  se sortir de son chancĂšlement Â» au cours de ce voyage qu’il accomplit en grande partie Ă  pied :

 

Beregadougou, Bobo-Dioulasso, Bagassi, PompoĂŻ, Zamo, Ouagadougou et Kaya sont les Ă©tapes de ce voyage assorties chacune d’un titre. « L’illusion d’une vie meilleure Â» ; «  sans jamais y croire Â» ; «  c’est le mĂȘme monde Â» ; «  je veux changer Â»â€Š..

Bikontine, au premier plan.

Bikontine avait 5 ans en 1987, lors de la mort de Sankara. Avec Bikontine, nous dĂ©couvrons un pays encore paisible (c’est en tout cas que nous montre Thomas Sankara n’est pas mort) oĂč le souvenir de Sankara est restĂ© vivace alors que certains des chantiers qu’il avait lancĂ©s sont quelque peu moribonds :

 

«  Depuis que Sankara est parti, on a eu un faux-dĂ©part Â».

 

La monnaie semble ĂȘtre le compas d’un ancien temps. Un stylo peut coĂ»ter 3000 francs. Et l’instruction de qualitĂ© est peut-ĂȘtre encore plus chĂšre. Pourtant, les personnes que l’on croise avec Bikontine semblent tenir le choc devant la camĂ©ra malgrĂ© des conditions d’existence qui pourraient donner le hoquet. Une institutrice enseigne en Français Ă  sa classe (de prĂšs de cent Ă©lĂšves) la signification des couleurs du drapeau BurkinabĂ© :

 

« Rouge pour le sang versĂ© par nos grands-pĂšres contre les Blancs ; Jaune pour la couleur de l’étoile qui guide vers un Burkina oĂč il fait bon vivre ; Vert, pour le pays agricole qu’est le Burkina Â».

 

Plus loin, Bikontine, devant des travailleurs dans une plantation de canne Ă  sucre, parle de « l’écume des ouvriers au milieu du soleil Â».

 

Une femme-taxi explique que Sankara considĂ©rait la femme comme l’égale de l’homme et qu’il impliquait tout le monde. «  La femme, c’est la lumiĂšre du monde Â». Pourtant, la contraception des femmes conserve un statut fragile. Une jeune femme souhaite se faire retirer son stĂ©rilet qu’elle porte depuis un an et quatre mois car il en a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© ainsi avec son mari et, celle-ci affirme Ă  la professionnelle de santĂ© qui la reçoit :

« Il ne va rien arriver Â».

 

Avec un jeune qui a arrĂȘtĂ© l’école avant ses 18 ans pour trouver du travail, Bikontine parle de Camara Laye, CĂ©saire et Senghor. Ailleurs, il fait l’expĂ©rience de descendre sous terre, Ă  la corde, sur le campement installĂ© par des chercheurs d’or qui se disent qu’ils ont peut-ĂȘtre leurs chances vers les 40 mĂštres de profondeur. L’installation est plutĂŽt artisanale.

 

Vers la fin de Thomas Sankara n’est pas mort, nous atteignons le bout de l’unique voie ferrĂ©e du pays qui date de l’époque de Sankara et dont la construction a Ă©tĂ© abandonnĂ©e. Bikontine s’est inspirĂ© du sillon de cette voie ferrĂ©e pour son trajet Ă  travers le Burkina.

La voie ferrĂ©e se dĂ©labre. Un arbre a poussĂ© au milieu des rails et ce n’est pas un arbre Ă  palabres. L’enfant isolĂ© que rencontre Bikontine dans la nuit, prĂšs du feu qu’il a fait, lui rĂ©pond n’avoir jamais vu le train. L’enfant refuse de suivre Bikontine car il a « peur d’aller loin Â».

 

Un peu plus tĂŽt, Bikontine s’est demandĂ© si un poĂšte peut « apporter quelque chose Ă  sa sociĂ©tĂ© Â» et « si cela sert Ă  quelque chose d’écrire des textes que personne ne va lire Â»â€Š

 

 

Franck Unimon, vendredi 15 Mai 2020.

 

 

 

 

 

 

 

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The Charmer

 

                                       The  Charmer : EsmaĂŻl, homme de fois.

 

EsmaĂŻl est iranien. Il vit au Danemark depuis deux ans. Il n’a rien Ă  voir avec Milo et Kurt le con qui « vivaient Â» dans le monde de la drogue de Pusher III, l’Ange de la mort. ( Pusher III : JournĂ©e de merde pour papa-poule ). 

EsmaĂŻl, c’est un ange des corps. Un verre de vin Ă  la main, toujours dans le mĂȘme bar, il sait plaire aux Danoises. Il sait parler. Il s’exprime bien en Danois. Il a de l’humour. Et, sexuellement, il fait salle comble. MoitiĂ© talentueux Mr Ripley/ moitiĂ© EsmaĂŻl, c’est l’homme araignĂ©e mais sans sa toile et sans sixiĂšme sens. Une fois sĂ©duites, une Ă  une, ses conquĂȘtes se dĂ©tachent. On regarde donc EsmaĂŻl tirer son coup puis avoir du mal Ă  joindre les deux bouts. On l’envie d’abord puis on le plaint.

 

Avec The Charmer, j’ai appris qu’il existait une diaspora iranienne en SuĂšde et au Danemark. Cela semble quasi-culturel. Avec EsmaĂŻl, on est aussi un peu dans le surnaturel car s’il est bien Ă©duquĂ©,  on ignore qui il est vĂ©ritablement. Et lui, ignore qu’il existe une diaspora iranienne au Danemark. Il se croyait le seul. C’est vrai qu’il est un peu unique en son genre.

 

Car pour cette diaspora iranienne, bien plus aisĂ©e que lui, le souvenir de l’Iran est un musĂ©e sacrĂ© dont EsmaĂŻl a peut-ĂȘtre plus entendu parler que connu. Il se retrouve donc exilĂ© au royaume du Danemark parmi ses conquĂȘtes mais aussi parmi d’autres Iraniens, eux-mĂȘmes exilĂ©s au Danemark et accrochĂ©s Ă  leur communautĂ© oĂč EsmaĂŻl est un Ă©tranger.

Car ils n’ont pas les mĂȘmes rĂȘves. Et, de l’homme araignĂ©e sans toile vĂ©ritable, EsmaĂŻl devient de plus en plus sirĂšne. Tellement sirĂšne que si ce film nous entraĂźne, il entraĂźne aussi EsmaĂŻl dans une vie diffĂ©rente de la sienne. Ce qui se tient :

Les grands sĂ©ducteurs sont aussi ceux qui savent se convaincre eux-mĂȘmes.

 

Reste Ă  convaincre les autres que le rĂȘve dairnois d’EsmaĂŻl sera encore lĂ  au moment du rĂ©veil et qu’il pourra le tenir par la taille. The Charmer est l’histoire d’un homme travailleur, intelligent et charmant plutĂŽt douĂ© pour les relations comme pour fae des rencontres mais qui reste le seul Ă  croire Ă  un rĂȘve auquel les autres ne croient pas. C’est peut-ĂȘtre aussi un film sur la foi, finalement. EsmaĂŻl n’est pas fait de la mĂȘme foi que les autres.

 

 

Franck Unimon, mercredi 13 Mai 2020

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Je me suis couchĂ© un peu tard cette nuit. AprĂšs deux heures du matin. Ce matin, dans mon lit, je me le suis trĂšs vite reprochĂ©. J’aimerais faire tellement. Reprendre la lecture de tel livre commencĂ©e il y a plus de deux mois avant que la pandĂ©mie du Covid-19 ne colonise une grande partie de nos pensĂ©es et de nos Ă©motions. Continuer de faire le tri dans des magazines que j’ai depuis 2017 et mĂȘme avant. Faire mes Ă©tirements. Aller acheter des fruits et des lĂ©gumes. Passer voir mon vĂ©lo pour vĂ©rifier si la roue arriĂšre est restĂ©e gonflĂ©e depuis la derniĂšre fois afin de pouvoir reprendre mon vĂ©lo, rassurĂ©, ce soir, pour me rendre Ă  mon travail. Ce qui nĂ©cessitera plus d’une heure de vĂ©lo Ă  l’aller.

 

Ma compagne et notre fille Ă©taient parties lorsque je me suis levĂ© environ trente minutes plus tard. J’ai commencĂ© par mes Ă©tirements. A jeun. Comme ça, j’étais sĂ»r de les faire.

 

Hier soir, je me suis couchĂ© tard parce-que je suis restĂ© regarder des images de combats. Le combat Georges Foreman/ Muhammad Ali dont j’avais entendu parler, enfant, et sur lequel j’avais lu et aussi vu un trĂšs bon documentaire, When we were kings.

J’ai aussi lu le rĂ©sumĂ© de la biographie de l’acteur Donnie Yen que j’avais dĂ©couvert dans Hero peut-ĂȘtre. Et que je redĂ©couvre dans des extraits de Ip-Man. Bruce Lee, Scott Adkins, Jacky Chan, Jet Li, Van Damme, Chuck Norris, Tony Jaa, Amy Johnston, quelques combats de MMA
. J’ai regardĂ© ou revu des extraits de leurs films. Ainsi que des dĂ©monstrations de Self-DĂ©fense.

 

J’ai aussi regardĂ© des extraits d’interviews d’anciens membres du GIGN, mais aussi de StĂ©phane Bourgoin, spĂ©cialiste des tueurs en sĂ©rie que j’avais interviewĂ© deux fois, qui m’avait particuliĂšrement dĂ©niaisĂ© concernant les tueurs en sĂ©rie, et qu’un article du Monde de ce 21 avril soupçonne d’ĂȘtre un affabulateur.

 

A ces images de combats et de mort, j’avais prĂ©fĂ©rĂ© des images d’humoristes au cours de la journĂ©e ou un ou deux jours plus tĂŽt : Mustafa El Atrassi, Bill Burr, Bun Hay Mean, Haroun, Louis C.K. Il faut bien se dĂ©tendre avant un combat ou entre deux combats. MĂȘme si l’on y participe uniquement en tant que
 spectateur.

 

Je n’ai pas la carriĂšre de combattant ou d’humoriste qu’idĂ©alement, je souhaiterais, aurais souhaitĂ© ou ai pu souhaiter avoir. Pour arriver au niveau de ces humoristes, combattants et ex- intervenants du GIGN, et des autres que je n’ai pas citĂ©s, il faut gĂ©nĂ©ralement commencer tĂŽt, souvent avant ses 10 ans, cumuler des heures et des heures et des annĂ©es d’entraĂźnement, donner de sa personne, et, Ă  ce que je comprends, cumuler des expĂ©riences dans diverses disciplines, complĂ©mentaires ou opposĂ©es. Ce qui suppose une extrĂȘme persĂ©vĂ©rance ou une certaine dĂ©termination ( d’autres parleront d’engagement) ainsi qu’une marge d’erreurs.

 

Des erreurs, j’en ai faites et je continue d’en faire. Hier, en aidant ma fille Ă  faire ses devoirs, je lui ai affirmĂ© :

 

« Les erreurs, ça sert Ă  apprendre ! Â». Ma fille avait refait la mĂȘme erreur que quelques heures plus tĂŽt avec exactement la mĂȘme opĂ©ration et les mĂȘmes chiffres. Une erreur de retenue dans son addition. Je croyais qu’elle avait bien mĂ©morisĂ© d’autant qu’elle s’implique dans ses devoirs. Mais, non, la distraction, l’insouciance et un trop grand sentiment de facilitĂ© sans doute l’avaient bernĂ©e.

 

J’aurais peut-ĂȘtre pu ou dĂ» ajouter :

«  Les erreurs, ça sert Ă  apprendre ! A condition de savoir ou de pouvoir s’en rendre compte Â».

 

Evidemment, un enfant, un novice, un dĂ©butant ou un innocent a du mal Ă  s’apercevoir de ses erreurs. Comme pour trouver la solution. C’est donc aux personnes qui les entourent et qui en sont responsables de, autant que possible, les Ă©duquer,  les sensibiliser et de les prĂ©server de certaines dĂ©convenues.

 

Je ne suis pas toujours persuadĂ©, en tant qu’adulte et en tant que pĂšre, de toujours ĂȘtre le bon exemple pour ma fille. Tant mieux pour eux si certains parents sont convaincus, lorsqu’ils se regardent, d’ĂȘtre ou d’avoir Ă©tĂ© les meilleurs parents de l’univers. Mais, hier, alors que nous dĂ©jeunions ensemble et que ma fille me parlait, je l’écoutais tout en voguant dans ma tente psychique.

Ma fille Ă©tait et est dans l’instant prĂ©sent comme tous les enfants. Moi, j’étais dans un de ces moments oĂč ma conscience  chemine, entre le passĂ©, le prĂ©sent et le futur. On dira que j’étais dans la contemplation. Ou dans l’extrapolation : ma fille me parlait et tandis que je l’écoutais Ă  la surface, en profondeur, j’étais ailleurs. Il y a d’autres moments oĂč c’est elle qui est ailleurs alors que nous lui parlons, ma compagne et moi. Et il est plein d’autres fois oĂč celles et ceux Ă  qui l’on cherche Ă  s’adresser sont ailleurs.  Il y a aussi d’autres fois oĂč nous portons notre attention sur les autres vĂ©ritablement mais oĂč, ceux-ci, ne nous voient pas et restent ensuite persuadĂ©s d’ĂȘtre sans valeur. C’est l’Histoire des ĂȘtres humains. Nous avons beau avoir des agendas, beaucoup de bonnes intentions thĂ©oriques et pleins d’inventions technologiques, lorsque ce moteur que nous avons tous Ă  l’intĂ©rieur nous pousse vers cet ailleurs, il est difficile de savoir quand nous nous rencontrons vraiment.

 

Heureusement, en partageant l’intimitĂ© d’une personne ou avec la rĂ©pĂ©tition des rencontres, mathĂ©matiquement, il arrive des moments oĂč nous sommes bien disposĂ©s en mĂȘme temps. OĂč nous sommes en phase, comme on dit. Ceci pour dire que, finalement, dans l’Histoire des relations humaines, sans doute sommes nous en permanence comme la terre, le soleil et la lune. Nous nous tournons autour. Un certain nombre de fois, tout est bien alignĂ©. D’autres fois, comme nous vivons dans le mĂȘme pĂ©rimĂštre physique et gĂ©ographique, c’est la collision, l’illusion ( nous croyons ĂȘtre proches les uns des autres mais, en fait, des milliers de kilomĂštres nous sĂ©parent) ou l’ignorance.

 

Depuis, j’ai oubliĂ© de quoi je voulais prĂ©cisĂ©ment parler. Etre ailleurs, ou vouloir ĂȘtre ailleurs, ça, j’ai commencĂ© avant mes dix ans. Comme tout le monde, je pense. Et, de ce cĂŽtĂ©-lĂ , j’ai continuĂ© l’entraĂźnement comme tout le monde, aussi, je pense.

Evidemment, en regardant cette nuit ces images de combat, j’ai sans doute essayĂ© de voir si j’y Ă©tais ou si je pouvais y ĂȘtre. Ce qui est impossible, ne serait-ce que physiquement. C’est bien Ă  ça que nous servent les images. A faire l’expĂ©rience cĂ©rĂ©brale, Ă©motionnelle, voire physique d’un Ă©vĂ©nement que l’on ne peut pas vivre directement, physiquement, dans l’instant prĂ©sent. On le vivra peut-ĂȘtre un jour. On l’a peut-ĂȘtre pleinement vĂ©cu dans le passĂ©. Mais lorsqu’on le regarde, on ne le vit pas totalement. Les images que nous regardons et qui nous captivent sont peut-ĂȘtre souvent des Ă©toiles mortes que, nous, les vivants, nous regardons afin de pouvoir nous guider
.

 

 

J’avais prĂ©vu de parler du don. Du don de soi. Je sais que la pandĂ©mie du Covid-19 a fait de nous, «officiellement Â», les soignants, des « hĂ©ros Â» avec d’autres professions :

 

les cytokines, les pompiers, les Ă©boueurs, les caissiers, les enseignants ( oui, je mets les enseignants dedans car le travail Ă  distance effectuĂ© par les enseignants, mĂȘme s’il a Ă©tĂ© limitĂ© par les moyens de certains parents et par la technologie elle-mĂȘme, est pour moi une trĂšs grande force d’engagement ), travailleurs sociaux, policiers etc
.

 

Dans la vie courante, « normale Â» et ne serait-ce qu’avec notre administration ( je pense ici au service de la Direction de notre employeur) on verra ce  qu’il restera du crĂ©dit que l’on porte aux hĂ©ros. Mais, en attendant, j’ai bien compris qu’il ne suffit pas de donner de soi aveuglement pour recevoir une quelconque reconnaissance et compensation. Non. Cela ne suffit pas. En Ă©tant mĂȘme un peu provocateur, je crois qu’il faut donner moins pour recevoir plus. Car, lorsque l’on donne trop, sans compter, on encourage forcĂ©ment quelqu’un, Ă  un moment ou Ă  un autre, Ă  se reposer sur nous tandis que l’on s’épuise. Et, au final, on termine K.O.

C’est ce qui est arrivĂ© Ă  Georges Foreman Ă  Kinshasa en 1974 face Ă  Muhammad Ali, un de mes hĂ©ros d’enfance.

De Georges Foreman, avant le match, on louait la force physique hors norme. Muhammad Ali partait perdant selon certains pronostics. En regardant et en (re)dĂ©couvrant le match, cette nuit, je me suis demandĂ© comment tous ces experts avaient pu ignorer Ă  ce point certaines Ă©vidences :

Georges Foreman Ă©tait beaucoup plus limitĂ© techniquement que Muhammad Ali. Sa gamme de coups. Ses dĂ©placements Ă©taient monolithiques. Ali esquivait beaucoup mieux, Ă©tait plus mobile. Ali Ă©tait plus rapide sur ses appuis et sur ses directs. Il a touchĂ© Foreman au visage trĂšs vite. La plupart des coups qu’il porte Ă  Foreman sont situĂ©s au visage. Signe qu’il n’avait pas peur. Signe de sa dĂ©termination. Il est allĂ© Ă  l’essentiel. LĂ  oĂč il savait pouvoir faire le plus mal Ă  Foreman. Le mettre en colĂšre, lui faire perdre la raison. Le dĂ©saxer mentalement. Muhammad Ali avait aussi pour lui la ruse, la stratĂ©gie. 

En outre, Muhammad Ali a donnĂ© Ă  Foreman ce qu’il a voulu lui donner. Et Foreman a foncĂ© sans rĂ©flĂ©chir. Il a donnĂ© de sa personne comme il le pouvait en se faisant manipuler par Ali : Foreman a rĂ©agi comme Ali le souhaitait. Ali Ă©tait pourtant connu. Foreman avait trop d’assurance. Il a boxĂ© sans sa tĂȘte. Il s’est vidĂ© tout seul de sa puissance et de sa rĂ©sistance. Et Muhammad Ali l’a mis K.O vers la fin du 8Ăšme round.

D’aprĂšs les images, Ali s’attendait Ă  ce que le match dure plus longtemps mĂȘme si Foreman, depuis un ou deux rounds, glissait de plus en plus.

Ce match de boxe montre la différence qui existe entre un boxeur stratégique et un boxeur exécutant. Et sans doute aussi entre un boxeur qui a débuté assez tÎt et incorporé une gestuelle ou une grammaire technique et un autre qui devait principalement ses victoires à sa force physique hors norme.

 

 

Nous, les spectateurs du quotidien, qui sortons peu Ă  peu du confinement, j’espĂšre que nous serons plus des Muhammad Ali que des Georges Foreman. MĂȘme si Muhammad Ali a aussi fait de sacrĂ©es erreurs dans sa vie (concernant Malcolm X ou Joe Frazier par exemple) et que Georges Foreman, par ailleurs, est une personne de valeur.

 

Franck Unimon, ce mardi 12 Mai 2020. 

 

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Il Ă©tait difficile

 

Franck Unimon, jeudi 7 Mai 2020. 

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La Reprise

Paris, 1er Mai 2020, prĂšs du Louvre, en allant au travail.

 

 

                                                       La Reprise

Lui ressembler, c’est dĂ©jĂ  ĂȘtre sa proie. Je refuse de la nommer. Mais c’est de plus en plus difficile. Dans quelques jours, ce 11 Mai, Ă  la reprise de l’activitĂ© scolaire, aprĂšs plusieurs semaines de confinement dans la peur pour cause de pandĂ©mie du covid-19, il y aura encore plus de peur et de colĂšre. Elle sera Ă  nouveau lĂ  pour en profiter.

 

Adroite fille de son pĂšre, elle a rĂ©cupĂ©rĂ© son parti politique d’abord avec l’aide et les encouragements de celui-ci. Puis, ils se sont fĂąchĂ©s. Cela fait des annĂ©es qu’on dirait qu’ils font leur thĂ©rapie familiale Ă  travers la scĂšne politique et publique.

 

Mais elle est un modĂšle de rĂ©ussite familiale dans un pays, la France, qui reste une grande puissance Mondiale dont la sociĂ©tĂ© assez traditionnaliste voire conservatrice sait ĂȘtre raciste :

 

En France, en 2020,  il vaut mieux ĂȘtre un homme, plutĂŽt blanc, plutĂŽt de religion catholique, ĂȘtre mariĂ© Ă  une femme et avoir effectuĂ© de grandes Ă©tudes, dans des Ă©coles rĂ©putĂ©es, pour accĂ©der aux plus hautes fonctions et aux meilleurs salaires.

Et, elle, femme divorcĂ©e, patronne d’un parti selon elle devenue le premier parti de France, n’est pas sortie de ces grandes Ă©coles Ă©litistes.

MĂȘme si elle a fait des Ă©tudes et a plus qu’un BEP, elle incarne donc une certaine modernitĂ© par rapport Ă  la France d’avant Mai 1968. Cependant, elle se rĂ©clame de la Grandeur d’une France d’avant qu’elle n’a pas connue mais que- comme son pĂšre- elle idĂ©alise et aime Ă  jeter au visage de celles et ceux qu’elle vise et entend provoquer, humilier et dominer.

 

AprĂšs bientĂŽt un demi siĂšcle de prĂ©sence- en incluant la carriĂšre de son pĂšre- dans la politique, les mĂ©dia, les sondages, refuser totalement de la voir ou  l’oublier reviendrait Ă  se comporter comme un climato-sceptique. 

 

C’est donc par Devoir que, pour la premiĂšre fois, la nuit derniĂšre, je me suis imposĂ© de la regarder et de l’écouter lors de son allocution du 1er Mai 2020. J’ai voulu m’abstenir de cette rĂ©action viscĂ©rale de rejet que j’ai pour elle et qu’elle a, je crois, pour les autres :

 

Celles et ceux qui pensent diffĂ©remment d’elle et ne lui ressemblent pas.

 

Moi, le Français noir, d’origine antillaise, plutĂŽt fier de me rappeler que son pĂšre n’avait pas pu dĂ©barquer en Guadeloupe lorsqu’il s’y Ă©tait rendu en avion plusieurs annĂ©es auparavant (on ne parlait pas beaucoup d’elle, alors) j’ai pris sur moi pour regarder sa vidĂ©o sur Youtube, une innovation technologique Ă©trangĂšre, contemporaine, entrĂ©e dans les mƓurs, qui n’existait pas dans cette France du passĂ© Ă  laquelle elle se rĂ©fĂšre.

 

Son allocution durait environ 21 minutes. Je suis resté dix minutes.

 

Souriante, dans un intĂ©rieur Ă©voquant plus le salon d’une maison de privilĂ©giĂ©s que l’appartement exigu, dans un quartier bruyant, elle rayonne dĂšs le dĂ©but. LovĂ©e dans ce systĂšme politique et dĂ©mocratique qu’elle aime saturer et persifler, elle est tellement contente d’ĂȘtre lĂ  une fois de plus. De dĂ©ranger. De se montrer. De s’exprimer sans la moindre interruption ou intervention extĂ©rieure.

TrĂšs Ă  l’aise, sans lire ou sans sembler lire une seule note ( au contraire du maire de ma ville mais aussi de certains dĂ©putĂ©s et d’un certain nombre de ministres) elle distribue les sarcasmes Ă  l’intention de ses rivaux politiques actuellement au Pouvoir qu’elle nomme Ă  visage dĂ©couvert.

Mais, d’abord, elle nous parle de Jeanne d’Arc et des travailleurs. Je ne connais pas personnellement Jeanne d’Arc mais elle semble trĂšs bien la connaĂźtre comme elle semble aussi savoir ce que celle-ci aurait pensĂ© et fait dans la France d’aujourd’hui qui serait envahie. Par des Ă©trangers. Par Youtube et les rĂ©seaux sociaux, aussi, mais, ça, ça ne la contrarie pas apparemment.

 

Je suis persuadĂ© de faire partie des Ă©trangers pour elle, son pĂšre et sa niĂšce. Mais je n’ai pas de preuves.

 

Par contre, je fais partie des travailleurs depuis des annĂ©es. Et, dans ce domaine, j’ai des preuves. En France, je suis un travailleur parmi des millions d’autres. Je fais Ă©galement partie des travailleurs susceptibles de travailler n’importe quel jour de l’annĂ©e. Le Week-end comme un jour fĂ©riĂ©. De nuit comme de jour. Je sais que d’autres travailleurs n’aimeraient pas travailler les week-end, les jours fĂ©riĂ©s ou la nuit. Je sais aussi que d’autres travailleurs exercent dans le froid, portent des charges pĂ©nibles, nettoient, respirent et dĂ©barrassent la saletĂ© du monde.

Je sais que des travailleurs ont votĂ©, votent et voteront pour elle. Qu’il y en a de plus en plus parmi mes collĂšgues. Peut-ĂȘtre des femmes plus que des hommes. Question d’identification.

Mais, femmes comme hommes, il y a diffĂ©rentes sortes de travailleurs. Celles et ceux qui ont un emploi lĂ©gal. Celles et ceux qui travaillent au noir. Celles et ceux qui ont une situation professionnelle prĂ©caire. Celles et ceux qui sont fonctionnaires. Celles et ceux qui sont en colĂšre. Celles et ceux qui ont peur. Celles et ceux qui gagnent Ă  peu prĂšs correctement leur vie. Celles et ceux qui gagnent trĂšs bien leur vie. On peut  trĂšs bien gagner sa vie et ĂȘtre en colĂšre. Je ne sais pas si elle est trĂšs en colĂšre contre la vie, la France ou les autres, par contre, je crois qu’elle gagne beaucoup mieux sa vie qu’un travailleur comme moi. Je crois aussi que ses horaires et ses conditions de travail sont plus confortables que les miens. Pourtant, je ne me plains pas lĂ  oĂč je suis.

Ce matin, j’ai discutĂ© avec deux de mes jeunes collĂšgues. Elles ont la trentaine. Elles faisaient le constat qu’elles avaient dĂ©sormais de plus en plus de mal Ă  enchaĂźner plusieurs journĂ©es de travail de suite en commençant Ă  6h45. Et elles aspiraient Ă  moins travailler le week-end que ce soit pour leur vie personnelle et familiale.

Je comprenais de quoi elles parlaient concernant la difficultĂ© de commencer Ă  travailler, de façon rĂ©pĂ©tĂ©e, Ă  6h45. Cela fait plus de dix ans que je n’ai plus eu ce genre d’horaire de travail et je m’en passe trĂšs bien. Pourtant, je suis plutĂŽt un lĂšve-tĂŽt.

 

Mes collĂšgues de ce matin font partie des « HĂ©ros de la Nation Â» depuis le discours du PrĂ©sident de la RĂ©publique, Emmanuel Macron, le 16 mars, je crois.  Avant que ne dĂ©butent les mesures de confinement pour contrer la pandĂ©mie au Covid-19 que la France, dans son ensemble, a embrassĂ© sans expĂ©rience Ă©pidĂ©miologique, sans masques, sans protection, avec des hĂŽpitaux et des personnels soignants pris de court car pris de haut depuis des annĂ©es par les responsables politiques, et avec un manque de moyens de dĂ©pistage. Comme si la France, une des plus grandes puissances mondiales, premiĂšre destination touristique mondiale, pays aux rĂ©fĂ©rences culturelles multiples, Ă©tait un pays sous-dĂ©veloppĂ© sauf pour dĂ©livrer des mensonges et des bobards Ă  ses citoyens.

 

Ce matin, mes collĂšgues ne se plaignaient pas. Elles n’étaient pas en colĂšre. Elles constataient simplement leurs limites au moins physiologiques comme je pouvais moi-mĂȘme connaĂźtre les miennes concernant cet horaire qui consiste Ă  dĂ©buter sa journĂ©e de travail Ă  6h45. Comme d’autres millions de travailleurs peuvent finir par connaĂźtre leurs limites vis-Ă -vis d’un horaire, d’un certain type de travail, de ses conditions d’exĂ©cution, d’un mode de vie ou d’un salaire. Parmi ces travailleurs qui constatent ces limites, beaucoup d’entre eux doivent pourtant continuer au delĂ  de leurs limites parce qu’ils n’ont pas d’autre choix ou se sentent  privĂ©s d’horizons.

 

Lorsque je la regarde et l’écoute sur Youtube (un mĂ©dium que Jeanne d’Arc aurait peut-ĂȘtre dĂ©daignĂ©e), je ne crois pas qu’elle aille au delĂ  de ses limites. Revancharde et sans limites, elle aime faire peur et menacer. DĂ©ja candidate aux Ă©lections prĂ©sidentielles en 2022, si elle est en Ă©tat, elle sera encore lĂ  en 2042. A son niveau, la politique est un jeu. Son pĂšre a bien tenu jusqu’à au moins ses 70 ans voire davantage. Il a plus de 80 ans maintenant. Elle en a une cinquantaine. Et elle n’a pas ou trĂšs peu de comptes Ă  rendre contrairement Ă  la majoritĂ© des Français.  MĂȘme Jeanne d’Arc a dĂ» rendre des comptes.

 

Elle le sait, c’est mathĂ©matique : il peut suffire d’une fois, pour, qu’aux Ă©lections prĂ©sidentielles, elle soit finalement Ă©lue. Elle n’a pas si besoin que ça de se mĂ©tamorphoser. Il lui suffit de continuer de durer. Et les autres classes politiques l’aident bien. Ce systĂšme de caste politique et sociale qu’elle mĂ©prise- ce n’est pas une pauvre- est complice et responsable de sa rĂ©ussite comme il l’a Ă©tĂ© de celle de son pĂšre :

 

Dans une vie politique et sociale ambitieuse, et aussi plus vertueuse et dĂ©mocratique, on aurait des hommes politiques qui ressembleraient moins Ă  des VRP pour les grandes entreprises et les grands groupes financiers. On est sans doute passĂ© des carriĂ©ristes de lutte aux carriĂ©ristes de luxe. Les travailleurs, une fois leur vote obtenu, ça ne rapportait plus assez. Alors, on les a dĂ©localisĂ©s des grandes Ă©quations et des grandes questions. Ils ont  Ă©tĂ© livrĂ©s Ă  eux-mĂȘmes sans masques, sans protections. Ce qui lui permet Ă  elle, Ă  la suite de son pĂšre, de marquer l’Histoire de France dans le domaine politique. Ou de pouvoir faire son possible pour en faire partie Ă  cĂŽtĂ© de celles et ceux qui sont dans l’Histoire officielle.

 

J’ai envie de croire que si elle Ă©tait Ă©lue, que trĂšs vite, elle serait perdue. Parce-que depuis des annĂ©es, elle a la place la plus facile : critiquer sans gouverner.

Si elle avait Ă©tĂ© membre d’un parti politique classique, comprendre « socialement Â» frĂ©quentable, je crois qu’elle aurait sans doute dĂ©ja Ă©tĂ© nommĂ©e Ministre plusieurs fois. Mais ça se serait mal passĂ© car elle aime le Pouvoir et, avec elle, c’est toujours de la faute de l’autre.  Elle fait partie des personnes qui ont les moyens d’imposer ça comme principe : ce n’est jamais de sa faute. Et, il lui avait fallu plusieurs semaines pour comprendre qu’elle avait ratĂ© sa prestation face Ă  Emmanuel Macron lors du dĂ©bat d’avant le second tour des Ă©lections prĂ©sidentielles de 2017.

 

Mais si elle Ă©tait Ă©lue prĂ©sidente, je crois que des femmes et des hommes politiques trĂšs «respectables Â» viendraient toquer Ă  sa porte pour obtenir un poste de Ministre et nous expliqueraient de façon didactique avec des polycopiĂ©s qu’ils font ça par Devoir, pour la France, ou qu’ils estiment qu’elle est- profondĂ©ment- attachĂ©e au rayonnement de la France.

 

Je crois aussi qu’il y a peut-ĂȘtre pire qu’elle en politique mais que nous ne le connaissons pas encore. Je ne sais pas si sa niĂšce est ce « pire-lĂ  Â» mais je me dis que si elle et son pĂšre peuvent, comme ils le font, prospĂ©rer sur la scĂšne politique française depuis des annĂ©es, que le pire est possible. MĂȘme si, pour moi, elle fait plus partie du passĂ© que du futur.

 

 

La reprise scolaire et un “dĂ©confinement” graduĂ©s ont Ă©tĂ© prĂ©vus pour la semaine prochaine, Ă  partir du 11 Mai. Je ne serais pas Ă©tonnĂ© que, finalement, le gouvernement change d’avis et repousse la date. Mais, en attendant, le gouvernement a “dĂ©coupĂ©” la France en trois couleurs, selon le niveau de la pandĂ©mie. Vert, orange, rouge. Sur la carte de France affichĂ©e dans le journal Le Parisien du samedi 2 Mai 2020, on peut voir qu’une bonne majoritĂ© des dĂ©partements de l’ouest de la France est en vert. La pandĂ©mie y est moins sĂ©vĂšre. La Guadeloupe, la Martinique la Guyane, la RĂ©union mais aussi la Corse sont aussi en vert. Mayotte, par contre, est en rouge comme tout le Nord-Est de la France, Ăźle-de-France, incluse. 

 

 

“AprĂšs le 11 Mai, il sera possible d’effectuer des dĂ©placements dans un rayon de 100 km Ă  partir de son domicile. Au delĂ , il faudra pouvoir justifier d’un motif professionnel ou d’un “impĂ©ratif familial impĂ©rieux”. Mais l’exĂ©cutif, par la voix d’Olivier VĂ©ran, appelle Ă  limiter les dĂ©placements “entre les territoires plus ou moins Ă©loignĂ©s, mais trĂšs diffĂ©rents sur le plan de la circulation du virus” (….)

“En clair, un habitant d’un dĂ©partement rouge est priĂ© de ne pas se dĂ©placer dans un dĂ©partement vert” ( article d’AurĂ©lie Sipos et FrĂ©dĂ©ric Gouaillard, dans le journal Le Parisien du 2 Mai 2020, page 2 et 3 dans la rubrique Le Fait du Jour : Crise du Coronavirus avec le titre Du flou sur la carte). 

Le retour des enfants Ă  l’Ă©cole, mĂȘme en prenant en compte les mesures de prĂ©vention recommandĂ©es par l’Etat a mis et met beaucoup de parents en colĂšre :

On a l’impression d’envoyer nos enfants et notre santĂ© au casse-pipe pour permettre Ă  l’Ă©conomie de reprendre. Il est imposĂ© Ă  l’Ă©chelle nationale une logique qui a fixĂ© de plus en plus, depuis des annĂ©es, les conditions de travail des soignants dans les Ă©tablissements de santĂ© :

L’Ă©conomie et la rentabilitĂ© avant la santĂ©, la relation humaine et la rĂ©flexion. 

On essaie avant tout de voir comment on peut se faire encore plus de fric en un minimum de temps. On pensera peut-ĂȘtre Ă  (sa)voir plus tard les Ă©ventuels dĂ©gĂąts que cette logique cause et creuse.

 

Les conditions pour la reprise de l’Ă©cole la semaine prochaine ont Ă©tĂ© qualifiĂ©es ” d’usine Ă  gaz” par le maire de ma ville, Georges Mothron. J’ai regardĂ© sa vidĂ©o sur youtube aprĂšs que ma compagne me l’ait envoyĂ©e. Il y avait trois cents ou quatre cents vues. Beaucoup moins de vues sans doute que pour elle.

L’intervention de Georges Mothron date du 1er Mai mais la vidĂ©o a Ă©tĂ© ajoutĂ©e le 2 Mai.  Sur la vidĂ©o, Georges Mothron avait beaucoup moins d’Ă©clat qu’elle. Elle et lui ne sont pas du mĂȘme camp politique

MalgrĂ© sa prestation dĂ©pourvue de charisme, le maire de ma ville m’a donnĂ© le sentiment d’un Ă©lu sincĂšrement prĂ©occupĂ© par la santĂ© de ses concitoyens. Il a prĂ©cisĂ© qu’il attendait encore d’autres informations, dont certaines des associations de parents d’Ă©lĂšves, pour arrĂȘter une dĂ©cision concernant la reprise de l’Ă©cole. 

 

Dans ce mĂȘme exemplaire du journal Le Parisien, page 6 ( Le Parisien de ce samedi 2 Mai 2020), l’article Acheter un masque en grande surface, mode d’emploi nous apprend que ” DĂšs lundi ( ce lundi 4 Mai 2020) ils seront en vente libre, mais sous certaines conditions”. 

 

 

L’article de Sylvie De Macedo et Odile Plichon nous informe que des millions de masques vont ĂȘtre en vente Ă  Carrefour, Casinon, Franprix, IntermarchĂ©, Leclerc, Lidl, Monoprix, SystĂšme U. Des millions de masques, jetables mais aussi rĂ©utilisables. “Ă  prix coĂ»tant” annonce Carrefour soit 0,58 euro le masque chirurgical et ” Pour ceux en tissu, les premiers prix seront Ă  ” moins de 1 euro”. Un prix plus abordable que celui que j’avais payĂ© fin fĂ©vrier ( 3,99 euro) pour un masque FFP2 dans une pharmacie parisienne. ( Coronavirus ).

 

 

Dans Le Parisien de ce 2 Mai, il y a mĂȘme de la Pub pour Leclerc, Carrefour et IntermarchĂ© qui nous informent qu’ils vont nous vendre des masques et du gel hydroalcoolique et que leur offre commerciale a pour but de veiller sur notre santĂ©, accomplissant un geste plein de civisme.  

MalgrĂ© ce cynisme Ă©conomique ( les rayons alimentaires- et autres- des hypermarchĂ©s ont plutĂŽt fait un trĂšs bon chiffre d’affaires durant ces semaines de confinement), j’imagine facilement les files d’attente – et les bagarres- Ă  partir d’aujourd’hui dans les hypermarchĂ©s pour acheter des masques.

 

En bas de page de ce mĂȘme article, les mĂȘmes journalistes ont rĂ©digĂ© un autre article L’attaque choc de la santĂ© contre les enseignes de distribution Les professionnels s’indignent de la disponibilitĂ© soudaine de gros volumes de masques). L’article prend deux Ă  trois fois moins de place, en bas de page, que celui nous informant de la vente de masques dans les hypermarchĂ©s. Mais, au moins existe-il. 

Avant d’apprendre cette information en achetant le journal Le Parisien, j’en Ă©tais restĂ© sur l’information que le gouvernement avait passĂ© commande en avril de masques Ă  la Chine. Et que deux milliards de masques Ă©taient prĂ©vus en provenance de la Chine…fin juin. Je ne comprenais pas comment le gouvernement d’une Grande Puissance telle que la France pouvait accepter de dĂ©pendre de la Chine ou d’un autre pays pendant deux mois pour recevoir des masques en pĂ©riode de pandĂ©mie. Je n’avais pas Ă©tĂ© surpris de voir de plus en plus de personnes ces deux derniĂšres semaines portant des masques faits main. Je crois mĂȘme que fabriquer- et vendre- des masques est dĂ©sormais un bon filon commercial puisque je m’attends dĂ©sormais Ă  d’autres pandĂ©mies de ce genre Ă  l’avenir. 

Mais je ne m’attendais pas Ă  ces millions de masques en vente libre progressivement- en nombre limitĂ© par personne– Ă  partir d’aujourd’hui dans des hypermarchĂ©s. Plus de 300 millions de masques selon l’article du Parisien.

Je dois au hasard le fait d’avoir achetĂ© et lu ce numĂ©ro du Parisien oĂč j’ai appris que des chiens pourraient ĂȘtre “utilisĂ©s” pour dĂ©tecter les personnes touchĂ©es par le Covid-19, une dĂ©marche qui m’inspire certaines rĂ©serves.

 

 

 

Mais le 2 Mai, donc,  aprĂšs une nuit de travail, je suis allĂ© acheter le livre que j’avais commandĂ© une semaine plus tĂŽt dans un point presse oĂč j’ai pris mes habitudes. Je prĂ©fĂšre lire les informations sur du papier, surtout celles concernant la pandĂ©mie du Covid-19. Je trouve que ça filtre beaucoup mieux cette angoisse permanente dans laquelle nous sommes installĂ©s depuis plusieurs semaines. Et puis, ça m’informe sur d’autres sujets tout en soutenant, un petit peu Ă©conomiquement, la presse Ă©crite qui souffre beaucoup de la fermeture des kiosques Ă  journaux et de sa moindre distribution. 

 

 

 

 

Ce samedi 2 Mai, au matin, je suis donc allĂ© rĂ©cupĂ©rer  le livre DĂ©ni, MĂ©moire sur la terreur de Jessica Stern que je ne connaissais pas il y a encore deux semaines. Jusqu’Ă  ce que dans la salle d’attente oĂč le mĂ©decin-chef  (pĂ©dopsychiatre) de mon service reçoit ses consultations, je dĂ©couvre la revue Cercle Psy de mars-avril 2020. 

En sortant du point presse, ce samedi 2 Mai, j’ai Ă©tĂ© sollicitĂ© par un homme d’une soixantaine d’annĂ©es. Au lieu de me demander de l’argent, il m’a demandĂ© si je pouvais  lui acheter Le Parisien. Avec le livre de Jessica Stern, j’avais dĂ©ja achetĂ© deux ou trois autres journaux. Mais pas Le Parisien que je lis aussi de temps en temps.  Je suis retournĂ© au Point Presse et en suis ressorti avec deux exemplaires du Parisien.

 

MĂȘme si je suis en colĂšre, je ne voterai pas pour elle.

 

 

Franck Unimon, ce dimanche 3 Mai 2020 + ce lundi 4 Mai 2020. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Franck Unimon, 1er Mai 2020.