Trois jours après avoir vu Zentone à la Maroquinerie dans le 20ème arrondissement de Paris ( En concert avec Zentone à la Maroquinerie), le concert de Hollie Cook arrive ce vendredi soir au Trabendo dans le 19 ème arrondissement. Prix de la place en prévente :
29,90 euros.
Dans le métro, ligne 5, jusqu’à la porte de Pantin, la mixité sociale et culturelle saute aux yeux comparativement à trois jours plus tôt.
Se rendre à la gare du Nord et dans certains endroits du 19ème arrondissement, c’est aussi passer dans des « juridictions » où augmente le nombre de personnes addicts et SDF. Je parle de celles et ceux qui n’en sont plus à se demander quand part le dernier métro.
Mais le 19ème arrondissement, c’est aussi des lieux culturels dont le Zénith, la Philarmonie de Paris, la Villette et le Conservatoire de musique. Il y a également la salle de concert, le Trabendo. C’est en me dirigeant vers lui que je me rappelle y être allé une première fois pour voir Brinsley Forde et Vincent Segal en concert, il y a environ dix ans. Un très bon souvenir.
Avec Hollie Cook, mon histoire a connu un effet rebond. Au départ, il y a eu le titre Far from me sur l’album Vessel of love, sorti en 2018, peut-être écouté après avoir lu un article élogieux sur elle.
Il y avait aussi eu le titre Sugar Water (Look at my face). Et puis, plus rien. Je ne pensais plus particulièrement à Hollie Cook. Je ne me rappelle pas si j’avais lu, comme je l’ai déjà beaucoup relu depuis, que Hollie Cook est la fille d’un des membres des Sex Pistols et d’une des membres du groupe The Belle Stars.
J’avais beaucoup aimé le titre Sign Of The Times des The Belle Star qui avait été un tube à sa sortie en 1983. Un tube que tout le monde, moi y compris, avait déja oublié lorsque Prince avait sorti son album et titre Sign « O » Times seulement quatre ans plus tard en 1987.
Ce vendredi 28 octobre 2022, lorsque je marche vers Hollie Cook, mon histoire a changé avec elle. Car j’ai écouté l’album Twice deux ou trois ans après Vessel of love. Je ne savais pas, alors, que Twice était antérieur (sorti en 2014) à l’album Vessel of love. Cependant, plusieurs titres m’ont très vite captivé dans l’album Twice :
99, Looking for real love et Superfast.
Et, lorsque j’ai découvert la vidéo officielle de Looking for real love, j’ai été suis séduit par la grâce de Hollie Cook. Laquelle, avec très peu de gestes, est habile pour happer notre attention. Sur une autre vidéo, je l’ai vue interpréter Sugar Water (Look at my face) en concert à Montreux avec Horseman à la batterie et à la voix. Sur une autre, 99. Et, j’en redemande. Je la cite d’ailleurs dans mon article sur l’ouvrage de Judith Duportail (L’Amour sous algorithme, un livre de Judith Duportail )
Hollie Cook a sorti un dernier album en 2022, Happy Hour, que je n’ai pas encore écouté.
Si les chansons de Hollie Cook parlent beaucoup d’Amour, la douceur de sa voix se plante dans un Reggae robuste. Et, cela me parle. Et, comme cela me parle, j’ai fait des recherches et vu qu’Hollie Cook était passée en concert à Paris il y a quelques années. Je l’avais donc manquée…. jusqu’à ce vendredi soir.
Ce soir, je ne saurais pas dire, comme j’avais pu le faire lors du concert de Zentone, quelle était la proportion de femmes et d’hommes dans le public. Car je me suis tout de suite mis devant la scène. Mais le public m’a paru un peu plus jeune en moyenne. Et les squaws étaient bien plus présentes tout près de la scène. Des squaws qui connaissaient les paroles des chansons de Hollie Cook.
Dès son entrée sur scène, Hollie Cook nous a charmé par son sourire et son envie. Derrière elle et sur ses côtés, un guitariste, un batteur, un bassiste et un claviériste, parfois dans les chœurs, ont tourné avec elle la clé du concert.
Hollie Cook est plus qu’une voix agréable et un sourire sympathique. C’est aussi un corps heureux qui laisse s’échapper la musique jusqu’au Dub. C’est aussi une professionnelle très concentrée.
Depuis des années, dans le Reggae, la basse m’attire le plus. Mais cela fait deux concerts de suite où le batteur, parmi les musiciens, a ma préférence. Pourtant, les autres musiciens étaient bien présents.
Le concert a été si agréable et si léger, que, plusieurs fois, j’ai eu l’impression de vivre un rêve prolongé.
A la fin, Hollie Cook nous a nouveau remercié pour les bonnes vibrations et pour l’énergie que nous lui avions donnée. Elle nous a aussi dit que, dès le début de sa carrière, elle avait été très bien accueillie à Paris.
Après le concert, je l’ai aperçue à quelques mètres en compagnie de personnes qu’elle connaissait. Je me suis dit que je n’allais pas faire ma groupie. J’ai commencé à m’en aller tout en regardant. J’ai vu quelques personnes aller la voir et se faire prendre en photo avec elle. Je me suis dit que je ne pouvais pas partir comme ça.
J’ai redescendu les marches.
Lorsqu’est venu mon tour, je lui ai demandé :
« Hi, Hollie, May I ? ». Hollie a acquiescé. Si je recommence à me faire prendre en photo avec des artistes, il va falloir que je me détende un peu. Là, sur la photo, j’ai une tête d’assassin.
« I Took some pictures of you ». Tout en gardant le sourire, elle a fait « oui ». J’avais bien vu qu’elle m’avait vu la prendre en photo durant le concert. Puis, elle m’a demandé de lui en envoyer sur instagram.
Je lui ai répondu :
« I will try my best ».
Dans l’article précédent sur le concert de Zentone, j’avais oublié la pandémie du Covid. Je me suis davantage rappelé des attentats terroristes qui l’avaient précédée car, en plus de massacrer des personnes et de vouloir effrayer le monde, l’un d’entre eux a aussi eu pour projet de détruire la musique. Et, aussi, parce-que, d’une façon ou d’une autre j’ai vu les morts de ces attentats.
J’ai eu la chance de n’avoir perdu personne du Covid.
Pendant le confinement décidé lors de la pandémie du Covid les manifestations publiques telles que les concerts ont été annulées. Se retrouver comme hier ou mardi soir, avec des inconnus, à visage découvert, sans avoir à fournir de passe sanitaire, dans une salle fermée à écouter la même musique, à danser voire à rêver ensemble grâce à la musique et des artistes était devenu impossible. C’était il y a deux ans. Il n’y a pas si longtemps. ( Panorama 18 mars-19 avril 2020, Coronavirus Circus 2ème Panorama 15 avril-18 Mai 2020 par Franck Unimon).
Ce à quoi nous tenons, ce que nous vivons, est éphémère. La musique renoue avec cet éphémère.
Voici mon « best of » des photos du concert d’Hollie Cook au Trabendo, ce vendredi 28 octobre 2022.
Un de mes collègues, ancien animateur radio, compte parmi ses amis, un homme, célibataire, lequel, tous les soirs, se rend à un concert.
En une année, c’est beaucoup plus que le nombre de fois où je suis allé voir un groupe ou un artiste sur scène.
Un concert raconte souvent un bout de notre vie. Et, je crois aussi, comme quelqu’un l’a dit ou écrit, que la musique est une des meilleures machines à remonter le temps que nous ayons à notre portée. Elle piège aussi celle et ceux qui acceptent de s’en approcher qu’ils soient musiciens, chanteurs ou « simples » auditeurs. Car elle porte en elle une partie de la promesse que chacune et chacun a en soi et qu’elle peut lui apprendre à mieux connaître ou à découvrir. Et puis, mirage ou prodige, la musique nous autorise une jeunesse et une enfance renouvelées. On commence sans doute à se (b)rider lorsque l’on commence à décider que la musique, le jeu et le rire sont des activités de colonie de vacances qui ont fait leur temps, qu’il faut passer à tout autre chose, se mettre au travail pour de bon, et devenir, sans jamais dévier de la ligne, une personne en tout point de vue irréprochable, sérieuse et adulte.
J’avais dix neuf ans lorsque je suis allé seul, pour la première fois, à un concert. C’était pour aller voir Miles Davis, déjà mon musicien préféré, découvert alors que j’avais 17 ans. Grâce à un copain, d’origine franco-polonaise, par l’album Star People, sur sa platine disque vinyle. Un ami, un peu plus âgé que moi d’un an ou deux, que je connaissais de vue avant de véritablement faire sa connaissance dans le club d’athlétisme de notre ville. Club où il me rapprocha de quelqu’un, devenu mon meilleur ami, d’origine algérienne, qui avait connu les bidonvilles de Nanterre, que j’avais eu dans ma classe au collège, et que j’avais toujours évité en raison de sa nervosité et de son impulsivité.
Ce premier copain, franco-polonais, plus grand que moi de dix à quinze centimètres, habitait avec sa mère, divorcée, quatre étages en dessous de l’appartement où j’habitais avec mes parents, ma sœur et mon frère dans un F3, dans une tour HLM de 18 étages, à Nanterre. En face de l’école maternelle et primaire, Robespierre. A côté de l’usine Citroën.
J’ai connu les concerts, les cafés et les restaurants au cours desquels on se faisait enfumer par ses voisins et où l’on rentrait chez soi, avec sur ses vêtements, l’odeur du tabac. Ce qui n’a jamais été ma volonté mais c’était un passage obligé lorsque l’on souhaitait sortir de chez soi.
Beaucoup a changé depuis. Pourtant, beaucoup, aussi, est resté identique. Comme les enfants d’il y a quarante ans, les enfants d’aujourd’hui continuent d’aimer manger des frites. Et, des gens d’aujourd’hui continuent d’aimer écouter de la musique, d’en jouer ou d’en découvrir. La musique reste la musique. Seules ses déclinaisons et la façon dont on est allé vers elle la première fois, et où l’on retourne vers elle, peut avoir changé un peu ou beaucoup lorsque l’on est aujourd’hui « plus jeune ». Mais la musique continue de nous toucher. Et, il nous reste aussi la mémoire ainsi que la transmission.
Combien de personnes « jeunes », aujourd’hui, écoutent une musique qu’ont pu écouter leurs parents ou leurs grands parents, en même temps que d’autres musiques. Car si la musique peut être une transition dans nos vies, elle est aussi une mémoire, une transmission et une acquisition.
Hier soir, lorsque je suis allé voir Zentone à la Maroquinerie, mon dernier concert dans une salle datait de plus de cinq années. C’était peut-être pour aller voir Marc Ribot à la cave Dimière d’Argenteuil. Après Arno et Danyel Waro au Figuier blanc, également à Argenteuil. Des très bons concerts.
J’étais alors devenu père ou allais le devenir.
En prenant de l’âge mais aussi en changeant de « statut », en passant de fils « d’employé » étudiant idéaliste plus ou moins puceau à père et conjoint employé et imposable, on sort, sans vraiment s’en souvenir ou s’en apercevoir d’un certain circuit. Pour, quelques années plus tard, assez facilement se convaincre que ce circuit nous est à tout jamais interdit. On serait devenu trop vieux ou infréquentable ou tout juste bon pour rester chez soi.
Sauf que rien ne nous interdit de reprendre des études, de refaire connaissance ou d’acheter un billet d’entrée pour aller à un concert. Et, rien ne nous interdit non plus d’y aller seul si la majorité des personnes que nous connaissons, et qui nous ressemblent, sont indisponibles ou n’ont pas cette envie ou ce besoin-là.
En musique et en concert, je crois avoir raté l’aventure du Rap parce-que, dans les années 90, j’avais un travail qui me plaisait, enfin, et qui me permettait de gagner suffisamment ma vie. J’avais donc commencé à m’insérer socialement et entrevoyais la possibilité concrète d’un avenir. Même si mes projets d’avenir restaient approximatifs.
Mais j’ai sans doute aussi raté l’aventure du Rap, parce-que, dans les années 90, j’étais bien plus entraîné dans le Dub et le Reggae, ou, éventuellement, dans une certaine forme de techno.
Si Miles a bien fait un album inspiré du Rap, sorti après sa mort en 1991, cet album n’a pas suffi. Et, si j’étais allé voir MC Solaar au Zénith (un concert très correct mais frustrant) et I AM à l’Olympia (un de mes meilleurs souvenirs de concert), le Rap, qui, aujourd’hui, en France, désherbe « tout », ne m’a pas parlé aussi bien que le Dub, par exemple.
High Tone et Zenzile avaient déjà joué ensemble en 2006 a rappelé un des musiciens hier soir. Cela ne m’a pas marqué. J’ai dû le savoir et l’écouter « à l’époque » mais sans donner suite car je ne m’en souviens pas.
Pendant des années, j’ai eu beaucoup de mal avec « les » Zenzile de Angers. La voix de leur chanteuse, Jamika, ne passait pas pour moi. High Tone, j’aimais davantage. Mais je trouvais leurs titres trop longs ou trop expérimentaux.
J’ai aimé High Tone lorsqu’ils ont joué avec le groupe Improvisators Dub, dans le groupe Highvisators. C’était en 2004. Les Improvisators Dub de Bordeaux, avec « feu » Manutention, étaient lestés de Dub. Avec eux, impossible de rater la percussion Dub. J’ai eu la chance de voir les Improvisators Dub à un concert à la salle de concerts l’Observatoire à Cergy St Christophe, la même soirée où j’ai découvert le groupe Brain Damage de St Etienne, alors conduit par Martin Nathan et le bassiste Raphaël Talis, parti par la suite.
Depuis, Manutention est décédé et le groupe Improvisators Dub n’existe plus, ce qui me rend assez nostalgique. Hier soir, sur scène, à la Maroquinerie, aucun des artistes sur scène n’a mentionné les Improvisators Dub parce-que le temps est passé. Mais dans les années 1990-2000, les Improvisators Dub faisaient partie, avec High Tone et Zenzile des groupes français pionniers pour jouer du Dub sur scène « avec des instruments » comme l’a dit un des spectateurs, hier soir.
Les groupes français Le Peuple de l’Herbe, Dubphonic ou Lab° ont aussi su faire partie ou font peut-être encore partie de la surface de réparation du Dub en France mais je les connais moins bien, ne les ai pas vus sur scène, ou leur prestation sur scène (telle celle de Lab° à Saint Germain en Laye) m’avait moins transporté.
J’ai aussi aimé High Tone lorsqu’il a croisé Brain Damage « de » Martin Nathan (après le départ de Raphaël Talis) pour former le groupe High Damage. J’étais allé les voir à l’EMB de Sannois.
Enfin, j’ai aimé High Tone lorsque, cette fois, il a retrouvé Zenzile pour Zentone.
J’avais raté cette deuxième « version » de Zentone en concert en juin à Paris. Je n’avais pas pu aller l’écouter sur scène à Lille fin septembre. Aussi, est-ce avec un grand plaisir qu’en tapant Zentone sur internet, machinalement, il y a quelques semaines, que j’ai appris qu’ils allaient passer, à nouveau pour une date unique, cette fois à la Maroquinerie, salle de concerts dont j’avais déjà entendu parler mais qui m’était toujours restée inconnue. Je ne savais pas où la situer.
Se rendre seul à un concert, dans une salle que l’on ne connaît pas, ressemble un peu à un pèlerinage.
Pour ce pèlerinage, il m’a fallu me transplanter, vers 19h ce mardi soir, dans un métro bondé, ligne 3, depuis Paris St Lazare, avec une femme-parachutiste criant et se jetant presque dans mon dos, alors que les portes allaient se fermer :
« Mettez-vous dans les couloirs, s’il vous plait ! C’est pas vrai ! Tout le monde pourrait entrer si les gens se mettaient dans les couloirs ! ».
La station de métro suivante, la même « parachutiste » a préféré se cramponner à l’intérieur de la voiture, gênant le passage des personnes qui souhaitaient descendre.
L’atmosphère s’est ensuite pacifiée dans le métro alors que celui-ci s’est un peu vidé. J’ai alors pris le temps de regarder ces personnes qui étaient dans le métro. Il y avait un peu moins de monde sur son écran de smartphone que d’habitude.
A la station Gambetta, beaucoup de voyageurs sont descendus. On aurait presque dit qu’ils se rendaient tous à la Maroquinerie.
Dans les faits, non, bien-sûr.
Après un passage à la boulangerie La Gambette à Pain où j’ai dû me passer de Mamouna, car il n’y en n’avait plus, j’ai demandé mon chemin pour la Maroquinerie, rue Boyer.
C’est loin ! Vous n’y êtes pas du tout ! Je crois qu’il faut monter vers Ménilmontant….
Vous n’avez pas un téléphone ?
J’ai répondu : « Je suis archaïque. Je préfère demander aux gens… ».
Enfin, une dame d’une soixantaine d’années, la quatrième personne que j’interrogeais, et de loin plus âgée que les trois hommes que j’avais questionné précédemment, m’a confirmé :
« Vous continuez tout droit, vous descendez la rue Villiers Adam. Jusqu’à la rue de la Bidassoa…vous en avez pour 15 minutes ou peut-être moins si vous marchez plus vite que moi ».
Moins de quinze minutes plus tard, je passais devant les Tonton Bringueurs où se tenait un certain nombre de consommateurs, ainsi qu’à l’intérieur. Dans la rue Boyer, je suis aussi passé devant un club de Pilates ( « En dix séances, vous sentez la différence ») et un futur projet de construction d’appartements luxueux.
La Maroquinerie est le type de salle de concert que je préfère. Je suis allé une fois ou deux à Bercy. C’est trop grand même si j’y ai de très bons souvenirs :
Burning Spear et les Gladiators avec « feu » Albert Griffith.
Je suis allé une fois à la Défense Arena, c’était pour Kassav’. Je ne le regrette pas mais j’avais préféré, ensuite, retourner voir Kassav’ à la fête de l’Huma. J’ai ainsi pu voir « feu » Jacob Desvarieux avec le groupe, une dernière fois sur scène, sans le savoir.
Et puis, il y ‘a le prix de la place. 21,99 euros pour Zentone, hier soir. Je prends. A partir de 30 euros, il me faut une bonne raison. Je ne vais plus à un concert de Björk, que j’avais pu voir lors de son passage à l’Elysée Montmartre après son premier album, Debut, depuis que les places montent à des tarifs auxquels je préfère ne pas penser. La dernière fois que j’ai vue Björk, sur scène, c’était en clôture du festival Rock en Seine. Un très très bon concert. C’était il y a environ 15 ans. J’étais alors célibataire et sans enfant.
J’ai accepté de mettre près de 40 euros pour aller voir en décembre Rodolphe Burger au New Morning. Parce-que c’est Rodolphe Burger, que je ne l’ai jamais vu sur scène. Et, parce-qu’il sera accompagné des deux pointures que sont Medhi Haddab, dont je connais un petit peu l’univers, et Sofiane Saïdi que je ne connais pas du tout.
Pour moi, le prix d’une place de concert ne dit rien de la valeur d’un artiste. En novembre, à Massy, il sera possible de voir en concert la plus que très grande chanteuse Oumou Sangaré pour moins de trente euros. C’est bien moins que d’autres artistes, dont les concerts sont plus chers, et dont la voix, à côté d’elle, est une brindille.
Je n’ai jamais vu Rodolphe Burger en concert mais cela fait des années que je l’écoute par morceaux. Récemment, j’ai aimé revoir et réécouter sa reprise du Billie Jean de Michaël Jackson. Où Burger joue avec Sarah Murcia, une artiste que je ne connaissais pas il y a encore deux mois et que j’ai aperçue en photo, collée à sa contrebasse, pour la première fois, en me rendant à une exposition de tableaux d’une ancienne collègue au restaurant-café-salle de concerts le Triton.
Pour moi, parler de tout ça a aussi à voir avec le concert d’hier soir. Hier soir, un des guitaristes du groupe Zentone portait un tee-shirt sur lequel on pouvait lire :
Nous avons écouté du Dub et du Reggae hier soir. Mais les musiciens que nous avons vus et écoutés viennent d’horizons multiples et multipistes. Tout comme un certain nombre des spectateurs présents, sans doute.
Je me demande certaines fois qui je vais voir, parmi les spectateurs. Quel sera leur profil. Même si un profil, une apparence, ne dit rien de définitif ou de notre humeur véritable. Hier soir, le public était un peu plus masculin que féminin. Je dirais à peu près 55 pour cent d’hommes pour 45 pour cent de femmes.
Un public plutôt blanc. Nous devions être dix noirs, en comptant très large, dans la salle. Pour l’âge, je dirais que cela commençait à 25 ans pour monter jusqu’à 50 ans et plus. Mais j’ai aussi vu une enfant d’une douzaine d’années qui devait être avec son père au fond de la salle de concert. J’ai vu une femme d’une bonne vingtaine d’années avec une casquette posée à l’envers de façon recherchée, portant un blouson type Bombers, jeans troué aux genoux, baskets, le dos vouté, accompagnée au moins d’un homme d’à peu près du même âge, une pinte de bière à la main, allure de geek (ou de skateur), avec casquette, lunettes et barbe de plusieurs jours.
Mais j’ai aussi vu un homme d’une cinquantaine d’années, presque habillé comme un cadre sup, au bras de sa compagne énamourée.
Les bières étaient de sortie dans la salle. Elles avaient remplacé les cigarettes et les joints. Même si une personne ou deux a pu tirer des lattes sur sa cigarette électronique sans inquiétude.
D’abord plutôt au fond de la salle, devant la console de son, je me suis rapidement aperçu que j’étais trop loin pour prendre des photos. Alors que ce que j’aimerais, autant que possible, lors des quelques concerts où j’ai prévu de me rendre, c’est de pouvoir proposer des photos présentables. Des photos qui donnent envie d’aller à un concert, des photos qui donnent envie d’écouter de la musique dans un endroit public.Alors, suivant l’exemple de quelques personnes, que j’avais vu se faufiler vers la scène, je me suis mis à sillonner au sein du public. Et, très facilement, j’ai pu me rapprocher….
Au début du concert, je n’ai pas pu m’empêcher de penser aux attentats terroristes islamistes « du » Bataclan en novembre 2015. Peut-être que c’est la première fois ou l’une des première fois que je retourne dans une salle de concert depuis ces attentats. Ce n’est pas une histoire de peur. Je crois que c’est parce-que j’avais été occupé par d’autres événements. Mais tout en étant là, devant Zentone, avec d’autres personnes dans la salle, je me suis dit que nous contribuions, aussi, à nous éloigner de ce trauma.
Ensuite, sur scène, Zentone a tenu toutes ses promesses. Le bassiste de Zenzile et celui de High Tone, toujours devant au milieu de la scène, ont joué par alternance. Celui de Zenzile avait une énergie punk tandis que celui de High Tone était plutôt roots.
Deux guitaristes étaient en lice. Un autre musicien tenait la partition des instruments à vent et de la percussion. A l’arrière scène, au milieu, le batteur a été le ferment d’un Dub intraitable.
L’Amour sous algorithme, un livre de Judith Duportail.
Appât ou état, son apparition change la donne. Seconde peau de première main, l’Amour est une assez vieille croyance que, quel que soit l’âge, un jour, beaucoup mangent.
La journaliste indépendante Judith Duportail a 28 ans lorsqu’elle télécharge en 2014 l’application de rencontres Tinder. On apprend dans son livre que cette application, disponible en France en 2013, a été cofondée par Sean Rad – qui voulait être acteur initialement- en 2012 aux Etats Unis.
Judith Duportail est une jeune parisienne qui, lorsqu’elle écrit ce livre, pourrait être décrite comme « émancipée », urbaine, éduquée (un niveau d’études plutôt élevé, Anglais courant) et pourvue d’humour.
Sur le papier, Judith Duportail est une personne suffisamment armée pour être aimée.
Cela pourra étonner de voir rapproché, ici, le terme « arme » de celui qui consiste à trouver ou à être trouvé par l’âme sœur… mais lorsqu’il s’agit de séduire la personne qui s’aventure à nous plaire, un simple sourire pour elle est déjà une tentative de capture. Même si sourire n’empêche pas la rupture. Hollie Cook hante cette vérité dans son titre 99 :
« Please, don’t give me your smile I Adore cause I can’t touch you no more…. » (« Je t’en supplie, ne m’adresse plus ce sourire que j’adore car je ne peux plus me rapprocher de toi »).
Hollie Cook passe cette semaine en concert au Trabendo ce vendredi 28 octobre. Il est possible que j’aille la voir.
Le fait que L’Amour sous algorithme ait été écrit par une femme (apparemment en 2019) et ait été cité par d’autres femmes (Mona Chollet et Victoire Tuaillon) préoccupées également par les relations amoureuses entre les êtres humains a son importance. Car officiellement, les hommes hétérosexuels sont des larves de l’Amour.
Et, en tant que larves des sentiments et de l’engagement, ils font beaucoup souffrir les femmes qui sont des êtres beaucoup plus évolués en matière d’engagement et de sentiment. Je l’écris ici avec un peu de provocation misogyne. Mais je résume aussi, je crois, une partie du sujet principal. Parce qu’il y a l’algorithme. Puis il y a celles et ceux qui l’utilisent et qui sont, en principe, tous, des êtres responsables.
Soit une personne née à partir des années 80 et très tôt familiarisée avec les environnements numériques et qui, par conséquent, peut être quotidiennement rivée à un écran d’ordinateur, de tablette numérique, de smartphone ou attachée à une console de jeux donnant généralement accès à internet avec un débit illimité.
Pour une personne Digital Native, télécharger une application telle que Tinder pour faire des rencontres fait partie du décor de son quotidien. Mais cela fait aussi partie de la norme sociale.
Lorsque le site de rencontres Meetic fut créé en 2001, cela fut davantage un événement d’un point de vue sociétal que de s’y inscrire. Car c’était nouveau de s’y prendre de cette manière pour faire des rencontres. C’était plutôt une pratique secrète et honteuse. Il pouvait être plus facile de s’afficher comme une personne célibataire dans la vie ordinaire que de raconter que l’on avait passé plusieurs heures de sa journée ou de sa nuit à écluser un site de rencontres.
Dans les années 2000, le site Meetic était le site de rencontres dont on parlait le plus. Le site existe toujours et serait toujours un site de rencontres qui compte. Sauf que, depuis 2001, les sites de rencontres, les réseaux sociaux, la technologie informatique mais aussi la téléphonie mobile se sont beaucoup développés et ont transformé la façon de se rencontrer mais aussi d’interagir avec les autres tant d’un point vue professionnel, administratif, économique, amical qu’amoureux. En 2001, par exemple, il était impossible de consulter son compte bancaire sur son smartphone. Et, il était plutôt rare d’organiser des réunions ou des « rencontres » à distance sur Skype.
Judith Duportail, amatrice de Tinder
Judith Duportail, née en 1986, Digital Native, a voulu en savoir plus sur ce qu’il y avait dans le ventre de l’application Tinder qui a le pouvoir de retourner les tripes de ses usagers. Célibataire et en perte d’amour lorsqu’elle télécharge l’application Tinder, elle a ce réflexe à la fois féministe, personnel mais aussi journalistique.
Quand paraît son livre, nous sommes aussi dans l’ère des « lanceurs d’alerte ». Et, Judith Duportail a sans aucun doute eu connaissance de l’affaire mondialement médiatisée en 2013 de l’Américain Edward Snowden (son aîné de 3 ans) ou de l’affaire Wikileaks, d’abord, en 2006 avec Julian Assange.
Des « affaires » comme l’affaire Wikileaks et l’affaire Snowden mais aussi des œuvres cinématographiques comme Matrix ( réalisé en 1999) qui ont eu des retentissements médiatiques mondiaux auront démontré que le monde numérique a non seulement des failles mais peut aussi servir des intentions malveillantes.
Une personne Digitale Native un peu soucieuse et critique vis à vis de cet environnement numérique qui lui est aussi familier que peut l’être une forêt pour un garde champêtre, peut avoir à cœur de mieux connaître ce site de rencontres à qui elle confie sa vie sentimentale mais aussi son avenir. Mais aussi disposer de suffisamment de compétences et de culture technique pour mieux comprendre comment cette entreprise numérique et commerciale marche.
En plus de ces compétences et de cette culture numérique, Judith Duportail, devenue journaliste indépendante après avoir travaillé pour Le Figaro, fait aussi montre d’une grande créativité tant relationnelle que journalistique pour rencontrer certains représentants de Tinder France. Elle réussira même à obtenir une interview-pré-programmée- même le cofondateur de Tinder, Sean Rad, qui est encore alors le PDG de Tinder. Mais aussi de Whitney Wolfe, ex-cofondatrice de Tinder. Celle qui, « a eu l’idée d’appeler l’application Tinder, qui se traduirait par « allume-feu » en Français ». (L’Amour sous algorithme, page 183).
Judith Duportail nous apprend que Whitney Wolfe, après avoir dû quitter Tinder a créé Bumble « une application de rencontre qui se présente comme féministe. Avec ses 36 millions d’utilisateurs, l’appli est maintenant le principal concurrent de Tinder, et le groupe Match cherche à la racheter. Sur Bumble, ce sont les femmes seulement qui peuvent prendre l’initiative d’engager la conversation avec les hommes ». ( page 181, de L’Amour sous algorithme).
Si Duportail nous parle de Tinder et de la façon dont ce site de rencontres peut collecter une quantité invraisemblable d’informations personnelles de ses usagers, puis les revendre à d’autres entreprises, on comprend ( ou l’auteure nous l’explique) que cette « méthode » de siphonage des informations personnelles est aussi utilisée par un certain nombre des sites de rencontres et des réseaux sociaux qu’il est désormais courant d’utiliser quel que soit notre âge, notre sexualité, notre poids, notre religion, notre catégorie socio-professionnelle ou nos origines.
Le titre du livre de Judith Duportail s’appelle L’Amour sous algorithme mais il aurait pu aussi s’intituler Le rêve sous algorithme. Et le mot « algorithme » peut bien des fois se faire remplacer par le mot « cloche ».
Car l’auteure nous démontre comment sur Tinder, qui se veut démocratique, les rencontres sont orientées et quadrillées selon les résultats de certains « échanges » entre usagers mais aussi selon certaines valeurs plutôt…conventionnelles.
Malgré la présentation « jeune » et « décontractée » affichée par les représentants et le discours de la « boite » Tinder, les entrailles des algorithmes, lorsque passées au scalpel de l’enquête de Duportail se montrent beaucoup moins novatrices.
Lorsque l’auteure questionne Sean Rad, alors PDG de Tinder, quant à la tendance consumériste des rencontres sur le site d’applications, celui-ci répond que beaucoup de personnes leur écrivent pour les remercier de leur avoir permis de trouver leur bonheur sur Tinder. Ce genre d’histoires existe bien-sûr. Mais pas pour d’autres et, cela, dans une proportion difficile à définir. Car des millions d’usagers persistent à se connecter telles des souris de laboratoire enfermées dans une cage- ou sous une cloche- qui continuent de faire tourner la même roue qui est la route du cash pour un site comme Tinder.
« Chaque jour, se produisent 2 milliards de matchs sur Tinder. L’application, présente dans 190 pays revendique être à la base d’un million de dates par semaine. Un million ! Le succès de Tinder est indéniable. C’est un outil incroyable ». ( page 219 de L’Amour sous algorithme ).
L’addiction à la connexion
Dans L’Amour sous algorithme, Duportail nous parle de l’addiction à la connexion au site qu’elle compare entre-autres à celle des joueurs de casino. Très vite, elle nous a parlé, lors de ses débuts sur Tinder, du fait que son ego a pu être rapidement boosté à recevoir un certain nombre de matches. Avant ensuite de déchanter devant ce besoin recomposé de recevoir de nouveaux shoots de matches mais aussi devant la désillusion que lui font vivre ses rencontres. Lorsqu’elle nous raconte certaines de ses rencontres et déconfitures, on se croit par moments dans un mauvais sketch de Blanche Gardin, de Tania Dutel ou de Marina Rollman.
Boire, fumer, draguer et coucher avec qui, quand et comme on veut, plus ou moins bien gagner sa vie, vivre chez soi ou en coloc, conduire une moto ou une voiture, avoir son réseau d’amis, sortir la nuit, découcher, danser, voyager, dire des gros mots ou ce que l’on pense quand on le pense, bien s’exprimer, avoir de la répartie et un humour supersonique, avoir un très bon niveau d’études, une certaine réussite sociale, cela ressemble à une vie d’adulte émancipée. Mais cela n’empêche pas la claudication alternative devant l’alerte de La rencontre.
La dépendance affective
Après nous avoir parlé de l’addiction au site, Judith Duportail fait bien de souligner l’engrenage de la dépendance affective qu’entretient un site (tout site ?) de rencontres. Car les comportements d’addiction et la dépendance affective sont attachés. Et, lorsque l’on se retrouve imbriqué entre les deux, on peut avoir du mal à réellement s’émanciper de certaines conduites d’échecs lors de nos rencontres sentimentales :
« (….) Selon John Bowlby, la moitié des adultes dans le monde occidental souffrent d’un trouble de l’attachement plus ou moins prononcé. Certains arriveront à bien vivre avec, ou n’en seront pas trop handicapés. Car attention, toute relation sentimentale à un autre, tout attachement, induit une forme de dépendance. On dit bien à ses amis :
« Je peux compter sur toi » ou « Je suis là pour toi », ce qui signifie qu’on a besoin les uns des autres, qu’on se félicite d’honorer cette interdépendance. Une dépendance consentie, cadrée. Dans le cas des dépendants affectifs, le regard de l’autre prend trop de place, trop d’importance. Car ils cherchent à l’extérieur d’eux-mêmes comment soigner leur blessure initiale ». (page 139 de L’Amour sous algorithme).
A ce jour, je n’ai pas lu d’ouvrage de John Bowlby. Mais j’aimerais bien savoir quelles sont les causes, selon lui, de ce « trouble de l’attachement plus ou moins prononcé » dont « la moitié des adultes dans le monde occidental souffrent ». J’imagine que certains modes de vie doivent y être pour quelque chose. Même si le trouble de l’attachement « plus ou moins prononcé » a sans doute toujours existé en occident mais aussi ailleurs.
Le mirage des sites de rencontres et des réseaux sociaux, qui sont des média plutôt extraordinaires à l’origine, c’est de nous abonner à la croyance qu’ils peuvent très facilement « nousaider » à gommer ce qui nous dérange dans notre vie ordinaire et nous faire vivre des miracles répétés. En nous offrant leurs « services ».
Alors qu’il faudrait d’abord, au préalable, vérifier dans quelle disposition mentale et affective on se trouve, et faire le ménage dans nos méninges et nos névroses, lorsque l’on se rend dans ce genre d’endroits :
Les sites de rencontres et les réseaux sociaux.
Après tout, toute personne qui va se lancer dans une aventure vérifie d’abord son matériel, sa condition physique et mentale, mais aussi la viabilité de son projet auparavant. Et, pour cela, le plus souvent, même si ensuite elle décide de tenter l’aventure, elle sait d’abord se faire entourer et conseiller par des spécialistes, des professionnels ou par des personnes qui ont tenté cette aventure avant elle.
C’est pourtant le contraire qui se passe avec les sites de rencontres. Appâtés par le miracle qui nous attend après quelques mouvements de doigts, nous nous muons en Indiana Jones de la rencontre et sautons les étapes.
Lorsque j’avais connu l’expérience du site de rencontres Meetic à la fin des années 2000, j’étais célibataire, plus ou moins déprimé et en recherche d’une histoire d’Amour. Mais j’allais bien mieux que d’autres. Je n’étais ni sous anti dépresseurs et pas sous le coup d’une rupture toute fraiche de quelques minutes. J’avais besoin d’élargir mon cercle de rencontres. Et Meetic était une nouvelle façon pour peut-être élargir ce cercle.
En outre, le fait d’être actif dans la recherche, avait au départ quelque chose de sans doute valorisant. Agir plutôt que subir. Essayer cette nouvelle façon de faire au lieu de la dénigrer d’emblée. Pour ces raisons, au départ, l’expérience Meetic fut une expérience d’ouverture. Car toutes mes rencontres jusqu’alors s’étaient faites sans passer par un site.
J’ai oublié combien de temps j’étais resté inscrit sur Meetic. Peut-être à peu près deux ans. A l’époque, le site de rencontres était exclusivement payant pour les hommes. Et gratuit pour les femmes. Cela m’a toujours paru injustifié.
J’ai toujours eu le sentiment que le fait de pouvoir s’inscrire gratuitement maintenait la plupart des femmes du site dans la position passive des princesses qui passaient leur temps à attendre le prétendu prince charmant. Car j’avais été édifié de lire sur bien des annonces de femmes inscrites, qui se présentaient comme des femmes ayant la trentaine tout au plus, qu’elles recherchaient le « prince charmant ».
Que ce soit dans la vraie vie ou sur un site de rencontres, pour moi, celle ou celui qui recherche le prince charmant, consciemment ou inconsciemment, ne le trouvera pas.
En tout cas, moi, je ne me vois pas comme un prince charmant. Et, je perçois cette attente comme une dictature. Une telle attente me donne plutôt envie de me comporter de manière très provocante.
Et, j’avais peut-être eu tort alors, mais chaque fois que j’avais vu mentionnée cette quête ou cette attente du « prince charmant », j’avais fui. Je ne correspondais ni au portrait-robot ni au portrait-mental d’un prince charmant. Et, c’est toujours le cas aujourd’hui.
Pourtant, je cherchais véritablement une histoire d’Amour sur Meetic. Et je sais qu’il y a des hommes qui cherchent aussi à vivre une sincère histoire d’Amour avec des femmes. Il reste donc énigmatique pour moi que des femmes instruites comme Duportail, Tuaillon et Chollet, et celles qui leur ressemblent, puissent avoir eu tant de mal à croiser ces hommes qu’elles ont cherché ou cherchent.
Pour moi, l’explication ne tient pas uniquement dans le patriarcat. Mais aussi dans le fait que certaines femmes dites émancipées le sont bien moins qu’elles ne le croient ou l’affirment. Et, un certain nombre d’entre elles continuent de suivre celle ou celui qui sera le mieux doué(e) pour leur jouer la comédie. Puisque dès lors que quelqu’un nous « fait quelque chose » ou nous « fait vibrer », on aime bien se raconter, même si assez vite cette personne honore très mal ses promesses ou ses engagements, que, malgré tout, cela vaut le coup. Et que cela vaut aussi le cul, par la même occasion.
Le grand remplacement
Sur Meetic, j’avais connu une histoire de cinq mois qui m’a fait un effet durable puisque je me rappelle toujours du prénom et du nom de cette personne comme de certains moments vécus avec elle près de quinze ans plus tard.
Mais j’avais aussi été très influencé par le côté supermarché du site.
Et, lorsque étaient apparues des tensions entre elle et moi, j’avais été rapidement agacé par ce que je voyais comme des caprices de petite fille. Me disant que si notre relation se terminait que je retrouverais rapidement- sur le site- quelqu’un d’autre de « bien » qui me ferait moins chier. Ma future ex de Meetic s’était sûrement comportée comme une personne capricieuse, quelque peu immature et tyrannique, exigeant de moi des gages d’Amour qui me déconcertaient mais aussi mettant en doute la sincérité de mon attachement. Peut-être que notre relation était-elle réellement privée de futur. Néanmoins, si elle et moi nous étions rencontrés dans mes conditions de vie habituelles (ce qui aurait été assez peu probable étant donné que nous évoluions et avons sans doute continué d’évoluer dans des univers culturels, économiques et professionnels très différents ), je crois que j’aurais été plus tolérant.
Je n’aurais pas eu ce réflexe, très vite acquis en étant inscrit sur le site alors que je n’avais pas rencontré tant de personnes que ça avant elle, de me dire que je pourrais très vite la remplacer. Et, lorsqu’elle m’avait fait sa « crise » d’autorité ou de caprice, je l’avais déposée en voiture là où elle me l’avait demandé/exigé. Afin de lui laisser cette assurance que, oui, je la considérais vraiment. Elle, qui aurait voulu qu’à notre retour de Normandie, je la dépose devant chez elle, à Paris, rue du Bac, en voiture. Pour qu’ensuite, je retourne chez moi toujours en voiture chez moi à Cergy le Haut où j’habitais alors. J’avais refusé de me retrouver inféodé au rôle de l’homme qui conduit sa compagne jusqu’au pas de sa porte et qui ne compte pas les kilomètres, le temps et l’essence pour ensuite retourner chez lui. Cette erreur-là, en plus de celle d’avoir refusé de rencontrer sa mère, me fut fatale.
Ma future ex de Meetic eut quelques pleurs. M’affirma sans doute que je n’avais pas de sentiments pour elle. De mon côté, je refusais que nous restions « amis » comme elle me le proposait. Nouvelle erreur stratégique de ma part. On croit que je parle d’une jeune femme d’à peine 18 ans ? Si j’avais bien 7 ou 8 ans de plus qu’elle, ma future ex avait alors près de trente ans. Ce qui n’excluait pas, visiblement, de pouvoir se comporter en certaines circonstances comme une adolescente d’à peine 18 ans.
Notre séparation devint définitive. Sans doute par orgueil, ainsi que dans la douleur, elle s’emmura dans sa décision, “conseillée”, je crois, au moins par certaines de ses amies qui pensaient comme elle. Nous nous revîmes elle et moi au moins deux fois, dont une fois dans cet appartement qu’elle avait acheté dans le 14ème arrondissement et qui faisait deux fois la superficie de mon studio de banlieue. Une autre fois, lorsque nous allâmes ensemble au festival de musique Rock en Seine clôturé avec maestria par Björk, elle avait rencontré quelqu’un.
Plusieurs années plus tard, j’appris par hasard sur Facebook qu’elle s’était mariée. Elle me répondit une première fois pour ne plus me répondre.
Hors bord relationnel
Après elle, je ne connus pas d’autre relation aussi notable d’un point de vue affectif en passant par Meetic. J’en avais aussi assez de passer mon temps sur le site telle une personne en recherche permanente d’emploi devant adresser d’innombrables CV qui ne débouchaient sur rien.
Pour être suffisamment inspiré et susciter l’intérêt d’une femme, il me fallait avoir le moral et être inspiré lorsque j’écrivais un message que je devais multiplier pour pouvoir, mathématiquement, provoquer une réaction ou deux favorables. Or, pour cela, il fallait passer du temps sur le site. Et, plus je passais du temps sur le site, plus je me démoralisais devant le vide numérique qui revenait constamment à ma rencontre. En prenant son temps, c’est à dire le mien. Mon temps qui était associé à mon espoir de « trouver » quelqu’un.
Je peux imaginer que mon ex de Meetic, apprenant cela, aurait vu dans mes déboires un châtiment juste et mérité pour mon « comportement » à son égard. Alors que je crois qu’il y a surtout eu de l’incompréhension entre elle et moi. Mais aussi, pour moi, une sorte de décalage, ou une forme de sentiment de dissociation, entre la réalité de cette relation sentimentale, car j’avais des sentiments pour elle contrairement à ce qu’elle a cru ou eu besoin de croire, et sa soudaineté.
Les rencontres via les sites abrègent beaucoup la durée du temps de rencontre. Si certaines personnes sont des adeptes du coup de foudre ou des rencontres flash, j’ai plutôt besoin d’une certaine « maturation » de la rencontre et du sentiment pour être « dans » l’histoire. Si j’avais été bien sûr content de rencontrer mon ex de Meetic et que nous avions une réelle connivence, je crois, sur certains sujets, le fait d’avoir « obtenu » cette rencontre aussi improbable, aussi « facilement », m’a empêché de me mettre dans les vraies conditions de la rencontre. Pour employer une image grossière, une fois la rencontre faite, j’avais sans doute l’impression que notre relation était une péniche, qu’il y avait le temps. Alors que j’étais sur un hors bord.
Je fus aussi très étonné par le gâchis fait par ces usagères du site soit par manque de sincérité ou par manque de maturité. Car le côté supermarché des sites de rencontre vaut aussi pour les femmes. Ce ne sont pas seulement certains hommes qui vont sur les sites de rencontres comme on se rend dans un supermarché.
Près de quinze années environ après mon expérience Meetic, la lecture facile et plaisante de l’ouvrage de Judith Duportail confirme mes anciennes impressions. Et, cela ne me donne pas du tout envie de retourner faire le mur un jour sur un site de rencontres.
Aujourd’hui, pour rencontrer quelqu’un, je recommanderais plutôt le cercle de connaissances et d’amis ; la découverte de nouvelles associations ou de clubs culturels sportifs ; le lieu de travail ou les voyages ; ou la fréquentation répétée de tout endroit qui permet des rencontres sociales et personnelles viables, agréables et autres que celles que l’on connaît déja.
Je connais par exemple un couple qui s’est formé dans mon club d’apnée. Tous deux séparés de leur côté, chacun mère et père. Je sais qu’elle, qui faisait au départ de la plongée dans le club a ensuite rejoint la section apnée lorsqu’elle l’a aperçu. C’est elle qui me l’a raconté.
Mais avant toute rencontre, il y a d’abord le préalable indispensable d’être d’abord véritablement « disposé » pour s’engager dans une relation intime. Parce-que si l’on a peur de partager son intimité ou si l’on préfère conserver exclusivement son territoire à soi et pour soi, on peut rencontrer un certain nombre de personnes tout à fait recommandables et très bien s’arranger pour leur tourner leur dos ou les dissuader de s’approcher.
Je crois que ces dernières précautions restes valables même si l’on préfère ou si l’on ajoute les sites de rencontres, les forums ou les réseaux sociaux pour accroître ses chances de rencontrer quelqu’un et ainsi déjouer l’algorithme de l’accablement sentimental.
Rien ne dure vraiment longtemps, un livre de Matthieu Seel.
Matthieu Seel, le métis adopté, a été la voix de la série podcast Crackopolis. Dans cette série, il racontait le hijack que peut-être le crack en plein Paris, en outre dans le 19ème arrondissement où il a d’ailleurs grandi et où, plus jeune, il avait eu Peter Chérif et les frères Kouachi comme copains de primaire et de collège.
Certains veulent voir, Matthieu Seel a tout vu sauf l’histoire de ses origines dont les barreaux, par condensation, lui résistent. C’est peut-être pour cette histoire qu’il ne connaît pas qu’il commence par fumer des paquets de joints dès l’âge de dix puis qu’il finit, plus tard, par consulter le caillou.
Matthieu Seel ne nous raconte pas tout. Pour cela, il faudrait absolument se souvenir et il a aussi besoin d’oublier. Mais il y en a assez pour dix dans ce qu’il nous dit. Celle ou celui dont la vie dévie pour dealer et pour attraper du caillou se surpasse jusqu’à un point culminant qui se déplace sans cesse et qui est à peine imaginable.
Il y a des existences beaucoup plus simples et beaucoup plus reposantes. Mais pour cela, il faut être assez robot. Matthieu Seel n’en n’est pas un et il connaît difficilement le repos depuis assez tôt. Artiste photo un temps, vivant la nuit, il finit par vendre son appareil et par connaître des journées de 96 heures sans dormir lorsque le crack est devenu son métronome. Combien de personnes, ou plutôt de formes, a-t’il rencontrées parmi lui et qui, comme lui, pointaient vers les mêmes usages ? De toute façon, ces formes de rencontres ne tenaient pas.
Sa mère ( adoptive) fait partie de celles et ceux qui ont tenu. Et, je comprends qu’une Virginie Despentes ait cru en lui pour ce livre car il aurait pu avoir un rôle dans son film Baise moi. Comme je comprends aussi qu’une personnalité comme Slimane Dazi soit ce parrain qu’il remercie, ainsi que beaucoup d’autres, à la fin de son livre. J’aurais été beaucoup plus étonné si Guillaume Canet ou André Dujardin l’avait parrainé.
Dans Rien ne dure vraiment longtemps , sorti en septembre 2022, Seel raconte les mauvais passeurs d’histoires, les arnaques, les guet-apens, l’entraide, la survie dans la rue, les échecs sentimentaux, la paranoïa, sa famille, l’hôpital, les tentatives de sevrage à Pierre Nicole, le centre thérapeutique de la Croix Rouge, et à Marmottan ( La ferveur de Marmottan). Eduqué, autodidacte, il est loin d’être idiot. D’autres sont comme Matthieu Seel mais leurs mots, leur nom et leur visage ne nous parviendront pas.
Maggie Nelson est une femme de l’être. Debout dans mon train, que j’ai attrapé de justesse, alors que je suis en transit entre ma ville de banlieue parisienne et la gare de Paris St Lazare, je me répète cette phrase.
Maggie Nelson est une femme de l’être.
D’après sa photo en médaillon au début du livre, Maggie Nelson est l’Américaine « typique », blonde, yeux clairs, regard direct, sourire évident, plutôt jolie, svelte, fit.
Cette fille, née en 1973, respire la vie.
Mais les Etats-Unis, c’est de là que « vient » Maggie Nelson, est aussi le pays des positions extrêmes. Et, Maggie nous jette dans le refrain de ses extrêmes dès la première page de son livre coupée en deux. Une partie autobiographique où elle nous encule en nous parlant de son Amour pour son compagnon Harry, née femme, père d’un petit garçon. Puis, une autre, théorique ou conceptuelle, où elle nous parle de Wittgenstein :
« Avant notre rencontre, j’avais consacré ma vie à l’idée de Wittgenstein selon laquelle l’inexpressible est contenu – d’une manière inexpressible ! dans l’exprimé (….) ».
C’est ce que l’on appelle être une fille bordée par une cérébralité plutôt exacerbée. Et, dès ce passage, l’intellectualité poing fermé de Maggie Nelson me bouscule. Son compagnon Harry a donc vraiment quelque chose de particulier pour avoir non seulement pu la rendre hautement amoureuse mais aussi pour être capable de lui donner la répartie lors de leurs débats. Car, durant son livre de plus de deux cents pages, Maggie Nelson va alterner avec des passages de sa vie et des références poussées aux œuvres de diverses personnalités pour nous parler d’identité, de « genre », du « queer », de « binarité », « non-binarité » mais aussi de la famille, de la norme, l’Amour, de la solitude, du deuil, de la sexualité, du couple, du mariage, de la parentalité, de la grossesse et de la maternité… :
Eula Biss, Deleuze, Eve Kosofsky Sedgwick, Susan Fraiman, Lee Edelman, Michel Foucault, Judith Butler, Anne Carson, Luce Irigaray, D.W Winicott, Pema Chödrön, Leo Bersani, Elizabeth Weed, Susan Sontag, Jane Gallop, Rosalind Krauss, Jacques Lacan, Janet Malcolm, Kaja Silverman, Eileen Myles, Beatriz Preciado, Alice Notley, Audre Lord, Deborah Hay, Sara Ahmed, Roland Barthes ….
Les travaux mais aussi les noms de ces auteurs et de ces personnalités sont sûrement familiers à des universitaires comme Maggie Nelson entraînés à les triturer ainsi qu’à celles et ceux dont la vie personnelle requiert la compréhension et la connaissance des ouvrages de ces personnalités. Maggie Nelson et son compagnon Harry sont de ces personnes qui possèdent cette double caractéristique.
Pour ma part, jusqu’à maintenant, j’ai plutôt vécu à côté de l’expérience de toutes ces personnalités. Aussi, en lisant Les Argonautes, j’ai connu bien des absences de compréhension. Bien des fois, il m’aurait presque fallu, comme lorsque l’on fait des mots croisés, un endroit où l’on peut trouver et vérifier les bonnes réponses. Cela ne figure pas dans Les Argonautes. Pour cette raison, sa lecture m’a été difficile et m’a pris du temps.
Plus de deux mois. Et, je préfère (me) dire que j’ai peu compris ce que Maggie Nelson a pu extraire des diverses réflexions de ces auteurs qu’elle cite plutôt que de me ridiculiser en affirmant m’y être senti comme chez moi. Et d’ouvrir le gaz alors que je crois allumer la lumière. Première conclusion immédiate, jamais, je n’aurais pu convenir à une Maggie Nelson et la séduire.
La tranche autobiographique de Les Argonautes, elle, m’a par contre été plus « facile » à suivre, page 37 :
« (….) Mon beau-père avait ses défauts, mais tout ce que j’avais pu dire contre lui est revenu me hanter, maintenant que je sais ce que c’est que de se tenir dans cette position, d’être tenue par elle.
Quand tu es une belle-mère, peu importe à quel point tu es merveilleuse, peu importe l’amour que tu as à donner, peu importe à quel point tu es mûre ou sage ou accomplie ou intelligente ou responsable, tu es structurellement vulnérable à la haine ou au mépris ; et il y a si peu de choses que tu puisses faire contre ça, sinon endurer et t’employer à cultiver le bien-être et la bonne humeur malgré toute la merde qui te sera balancée à la gueule ».
Je lisais encore Les Argonautes, je crois, lorsque je suis allé voir le film Les enfants des autres de Rebecca Zlotowski. Le personnage interprété par l’active actrice Virginie Efira ( inspiré de la vie personnelle de la réalisatrice) se reconnaîtrait dans ce passage.
Le rôle joué par Virgine Efira dans Les enfants des autres est celui d’une femme qui ne peut pas ou ne peut plus enfanter mais qui est disposée à (se) donner son amour maternel à la fille de celui qu’elle aime, interprété par l’acteur Roschdy Zem.
Maggie Nelson, elle, est aimée de Harry qu’elle n’a pas à partager avec un ex ou une ex. Et, elle est aussi une œuvre d’endurance et de bien-être. Entre son rôle de fille qui a perdu son père, de belle-mère du fils de Harry, de compagne amoureuse qui entoure son mari (Harry) « en cours de transition », de personne et d’universitaire queer qui refuse de faire la retape de la norme patriarcale et hétérosexuelle puis de femme qui, la trentaine passée, aspire à devenir mère en recourant à l’insémination artificielle, Maggie Nelson porte beaucoup.
Y compris, je trouve, une partie de la « masculinité » de son mari, Harry Dodge, un artiste, qui est pourtant avant leur rencontre une personne qui s’affirme déjà comme un homme.
Cependant, Maggie Nelson nous parle de Harry de telle façon que nous voyons un homme, chaque fois qu’elle le mentionne. Avant même que celui-ci ne soit opéré et lorsqu’elle nous raconte ensuite lui faire ses injections de testostérone. En cela, et je peux imaginer que cela pourrait déplaire au couple que forment Harry et Maggie, il me semble que Maggie Nelson, en tant que « femme », contribue aussi à faire de sa moitié un homme. Son regard et sa pensée de femme sur sa moitié (Harry) me fait un peu l’effet du pollen sur la fleur.
Phénomène plutôt courant, finalement, car la biologie ne peut se suffire à elle-même pour former ou établir des rôles durables entre être humains :
Il ne suffit pas d’être une femme et un homme biologiquement fertiles pour être instinctivement mère et père lorsque le bébé naît. Il faut aussi suffisamment de volonté mais aussi la capacité ou la solidité émotionnelle et affective pour l’être.
A la fin de son livre, Maggie Nelson nous le démontrera autrement que théoriquement en nous parlant des parents biologiques de Harry que celui-ci recherchera. Harry, vers la trentaine, retrouvera sa mère biologique, lesbienne séparée de son père, ainsi qu’un de ses frères resté vivre avec leur père, décrit comme un homme violent. On apprendra qu’Harry, née fille, éduquée avec amour par ses parents adoptifs, s’en est bien mieux sorti, que son frère ( élevé par leur père biologique) devenu toxico cumulant les incarcérations, et, sans doute, leur propre mère biologique.
La pensée très technique de Maggie Nelson, lorsqu’elle cite certains auteurs, m’a plusieurs fois distancé mais elle m’a, aussi, plus d’une fois averti.
Lorsqu’elle parle du film X-Men, le commencement, regardé avec Harry, on voit par exemple ce film commercial grand public, inspiré de comics américains lus par des millions d’enfants et d’adolescents de par le monde depuis plusieurs générations, autrement que comme nous pousse généralement à le faire, la pensée « mainstream », superficielle et hétéro.
A la fin de Les Argonautes, l’autobiographique et un certain humour prennent le dessus comme elle nous raconte sa grossesse puis son accouchement et sa maternité, concomitante, avec la « testostéronisation » d’Harry. Il est alors très drôle de voir Harry adopter certains traits caricaturaux prêtés aux hommes. Des traits dont bien des femmes « féministes » se plaignent.
Et, paradoxalement, alors que Maggie Nelson, durant tout son livre, s’est opposée- avec Harrry- à certaines normes de genre, on peut se demander si être une femme et un homme se résume à une somme d’hormones, page 206 :
« (….) J’ai une phobie de la salle de bain. Jessica veut sans cesse que je fasse pipi, mais m’asseoir ou m’accroupir est impensable. Elle me répète que je ne peux pas arrêter les contractions en restant immobile, mais je pense que je peux. Je suis allongée sur le côté, je serre la main de Harry ou celle de Jessica. Debout comme pour danser un slow avec Harry, je fais pipi sans le vouloir, puis encore une fois dans le bain, où des secrétions de mucus rouge sombre commencent à flotter. Incroyable : Harry et Jessica se commandent de la nourriture et mangent ».
Les Argonautes, paru en 2015 dans sa version originale, publié en Français en 2017, est un livre qu’il faut prendre le temps de lire et de relire.