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Nonne essentielle

 

 

                                                 Nonne essentielle

 

Ce matin, afin de retourner Ă  la galerie d’art de l’ami Michel, j’ai empruntĂ© un autre itinĂ©raire Ă  vĂ©lo. Je me suis retrouvĂ© en compagnie de compĂ©titeurs et de compĂ©titrices, chacune et chacun avec son engin et son style. Certains exfiltrant toute lenteur de leur cycle. L’un d’eux, plus pressĂ© que d’autres, mais au mauvais moment, s’est fait toper par la police. Au feu rouge oĂč nous Ă©tions arrĂȘtĂ©s, nous l’avons vu remettre sa piĂšce d’identitĂ© Ă  un agent qui effectuait des vĂ©rifications en se servant de son tĂ©lĂ©phone portable.

 

Nous avons aussi Ă©tĂ© des vitrines roulantes en file indienne du cĂŽtĂ© du Boulevard Magenta sans rien d’autre Ă  vendre que le vent et notre vigueur. Dans l’autre sens, c’était pire. C’était la cavalerie des dĂ©railleurs.

 

Lorsque je me suis rapprochĂ© du but, j’ai pris une rue qui s’est avĂ©rĂ©e ĂȘtre celle du Delta. Je n’ai pas su comment bien la prendre, cette rue, avec ce nom de variant en pleine pandĂ©mie du Covid. Je jure sur le St Galibier avoir tournĂ© dans cette rue au hasard mĂȘme si certaines lunes, pĂ©tĂ©es de thunes, certifieront que l’on ne choisit jamais les costumes que l’on enfile au hasard. Au mĂȘme titre que certaines rencontres que l’on prend et qui sont des rasoirs nous entaillant la gorge d’une oreille Ă  l’autre.

 

Mais je n’allais pas, par superstition, retourner en arriĂšre, juste pour changer de rue. MĂȘme si j’ai Ă©vitĂ©  de stationner devant le bar Le SĂ©vĂšre Tuant. 

 

Lorsque je suis arrivĂ©, l’ami Michel balayait devant sa porte. Il Ă©cartait les feuilles sur le trottoir. Je me suis arrĂȘtĂ©, et avec malice, j’ai sonnĂ©. Il s’est retournĂ© et m’a souri. Peu aprĂšs, nous sommes entrĂ©s dans sa galerie comme quelques mois plus tĂŽt.

 

La pratique artistique et culturelle est une nonne essentielle. Tandis que l’on parle entre nous, qu’on la regarde ou qu’on l’écoute, elle prie pour nous, nous inspire, nous porte et nous protĂšge.  Mais c’est peut-ĂȘtre la croyance idiote Ă©manant d’une intelligence en manque de stimulation ou Ă©puisĂ©e par trop de vĂ©lo. Parce-que l’art et la culture, cela ne remplit et n’abrite pas toujours le corps des femmes et des hommes. Mais cela peut permettre la rencontre de la conscience, une expĂ©rience qui ne rĂ©pond Ă  aucun logiciel et qui ne se commande pas.

 

L’art et la culture, ça peut aussi nous sortir de cette vie de portiques, de surditĂ© et de contrĂŽles dans laquelle nous nous enfonçons de plus en plus.

 

 

 

Pour quitter l’ami Michel, je suis remontĂ© sur mon vĂ©lo. Celui-ci m’a saluĂ© comme si je partais pour un trĂšs long voyage. Jusqu’à la gare St Lazare.

 

 

Dix minutes plus tard, j’avançais en touriste quand j’ai croisĂ© Josiane Balasko. Elle promenait deux petits chiens, boulevard Clichy, avec ses cheveux blonds, l’esprit dans un scĂ©nario, qu’elle seule pouvait voir. J’ai freinĂ©. J’ai rebroussĂ© chemin. J’ai eu envie de l’accoster pour demander Ă  la photographier pour une amie. J’ai saluĂ© l’homme qui accompagnait « Josiane Â» et qui, lui, aussi, promenait un chien. On aurait dit un Apache ou un PĂ©ruvien, assez grand, assez massif. J’ai un petit peu pensĂ© Ă  l’ami indien du photographe de guerre, Patrick Chauvel.

Mais l’homme n’a pas trĂšs bien rĂ©pondu Ă  mon signe de tĂȘte. Il se demandait peut-ĂȘtre ce que je voulais. Je ne suis pas fort en tĂ©lĂ©pathie, en nuages de fumĂ©e et en langage de signe. Alors, j’ai prĂ©fĂ©rĂ© laisser rĂȘver.

 

Franck Unimon, ce mardi 31 aout 2021.

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La marche de la vie

La marche de la vie

 

Je crois que je n’avais pas revu cette amie depuis l’enterrement de son ex-mari il y a deux ou trois ans. AprĂšs le cimetiĂšre, je n’avais pas pu rester. J’avais ma fille Ă  aller chercher Ă  la sortie de l’école. J’étais rentrĂ© avec la compagne de mon meilleur ami. Lequel, lui, Ă©tait parti avec elle rejoindre des proches.

 

Depuis, mon meilleur ami a perdu son pĂšre. Cela faisait deux ans qu’il avait dĂ©veloppĂ© la maladie d’Alzheimer. J’étais au domicile de ses parents ainsi qu’à la mosquĂ©e avant que le corps du pĂšre de mon meilleur ami ne soit rapatriĂ© en AlgĂ©rie. J’étais vraisemblablement la seule personne prĂ©sente Ă  n’avoir jamais reçu le moindre enseignement musulman.  C’était le 13 juillet de cette annĂ©e.

 

Cette amie a Ă©galement perdu son pĂšre rĂ©cemment. Ce vendredi, alors que je sortais de ma deuxiĂšme journĂ©e de travail, nous nous sommes donnĂ©s rendez-vous. Tout est parti d’un sms que je lui avais envoyĂ© la veille en sortant de ma consultation avec la mĂ©decine du travail. PrĂšs de l’appartement de ses parents.

 

Notre estime mutuelle tient de l’escrime. Et, c’est comme ça depuis trente ans. Lorsque je lui ai appris ne pas ĂȘtre vaccinĂ© contre le covid, elle m’a d’abord demandĂ© :

 

« Si ce n’est pas indiscret, tu peux me dire pourquoi ? ». Je lui ai rĂ©pondu. AprĂšs quelques minutes, elle a poursuivi :

 

« Etant donnĂ© que je suis vaccinĂ©e, tu te doutes que je ne partage pas ton avis. Mais ce n’est pas grave Â».

 

Je me suis alors senti obligĂ© d’ajouter :

 

« Non, je ne m’en doute pas. C’est toi qui me l’apprends. Il y a diffĂ©rentes façons de prendre sa dĂ©cision pour se faire vacciner. Autour de moi, je connais des personnes qui se sont faites vacciner pour Ă©viter les consĂ©quences Ă©conomiques. Et d’autres, pour voyager Â».

 

 

Nous nous sommes revus Ă  la sortie d’une station de mĂ©tro. Elle m’a alors appris avoir passĂ© ses six premiĂšre annĂ©es dans un immeuble, non loin de lĂ . Elle a voulu y aller. Nous l’avons fait. Je n’étais pas pressĂ©. J’avais mon vĂ©lo Ă  cĂŽtĂ© de moi. J’étais aussi curieux de dĂ©couvrir ça. Elle m’a racontĂ© comment c’était du temps de son enfance. Elle aurait voulu entrer dans la cour intĂ©rieure. Mais l’accĂšs Ă©tait fermĂ©. DĂ©sormais, il fallait soit connaĂźtre le code ou possĂ©der un badge. Quelques dizaines de mĂštres plus loin, nous tournant le dos, s’éloignant, et ignorant tout de notre prĂ©sence, des prĂ©adolescents semblaient jouer ou parler entre eux. Ce qui rendait ce milieu encore plus inaccessible.

 

Puis, nous nous sommes Ă©loignĂ©s. Elle m’a montrĂ© l’église qui Ă©tait toujours lĂ . Elle m’a passĂ© d’autres tĂ©moins de son histoire.

 

Ensuite, nous avons marchĂ© en nous racontant nos vies, jusqu’aux plus grandes Ă©chelles, jusqu’à chez elle, dans Paris. Sans regarder l’heure. C’est elle qui nous guidait, me proposant de temps Ă  autre le choix entre deux rues.

 

J’ai vraisemblablement beaucoup vieilli depuis que nous nous connaissons. Ou la vie en banlieue et les confinements successifs m’ont rendu aveugle et amnĂ©sique. Car, dans les rues, je redĂ©couvrais quelques foules attablĂ©es Ă  l’extĂ©rieur ou debout, discutant. Je croisais Ă  nouveau des personnes qui passaient Ă  vĂ©lo. Je n’avais plus vu ça ou pris part Ă  ça dans Paris depuis quelques annĂ©es. J’ai mĂȘme reconnu un jeune acteur entourĂ© de quelques uns de ses amis. Il avançait dans la rue, souriant. FĂ©lix Moati.  Je l’ai signalĂ© Ă  mon amie qui a alors tournĂ© la tĂȘte. Puis, j’ai ajoutĂ© que ça n’avait pas d’importance. Comme si, sur la plage, j’avais subitement remarquĂ© un caillou et que, finalement, en rĂ©flĂ©chissant, ne sachant pas trop quoi en faire, j’avais dĂ©cidĂ© de le laisser dans son environnement. Afin de continuer Ă  profiter du moment.

 

Bien-sĂ»r, il ne s’agit pas de sortir pour sortir. Pour « faire jeune Â», « branchĂ© Â» ou « dynamique Â». Et pour n’ĂȘtre, finalement, rien d’autre qu’un consommateur de plus qui copie avec le sourire ce qui est attendu de lui. Tout en ayant la certitude d’ĂȘtre parfaitement original et maitre de lui-mĂȘme. Mais, disons que je me suis senti un peu dĂ©placĂ©, inadaptĂ©, en apercevant ça. Alors que je sais avoir par ailleurs de bonnes raisons de ne plus ĂȘtre dans ce « mouvement Â». Et, puis, aussi, que l’on peut se passer de tout ça pour ĂȘtre proche de quelqu’un.  Ce n’est pas le prestige d’un endroit ou le prix d’une table de restaurant qui rend exceptionnel ce que l’on vit. C’est ce que l’on vit. Et avec qui.  Et quand.

 

Et, je crois que ce que j’ai vĂ©cu avec cette amie a Ă©tĂ© exceptionnel. Puisque cela n’est pas courant. Si je faisais de l’esprit, je dirais qu’il est exceptionnel que cette amie et moi ayons pu nous parler et nous Ă©couter pendant prĂšs de deux heures sans nous disputer. Mais je fais ici de la provocation. Non, l’exceptionnel, c’est de pouvoir se parler en toute confiance et, aussi, d’avoir pu se revoir pour des circonstances agrĂ©ables et suffisamment durables de façon Ă  pouvoir refaire le plein.  

 

 

Nous n’avons fait qu’une halte pour acheter un sandwich Ă  emporter. Puisque moi, je n’avais pas de passe sanitaire. Ce qui m’a peut-ĂȘtre donnĂ© l’occasion de frauder pour la premiĂšre fois. Alors que nous nous sommes assis, seuls, Ă  l’écart, sur un des bancs situĂ© Ă  plusieurs mĂštres en face du lieu oĂč nous avions commandĂ© et achetĂ©. Ces bancs avaient sĂ»rement Ă©tĂ© mis lĂ  par l’enseigne et Ă©taient occupĂ©s par un groupe de jeunes avant notre arrivĂ©e.

 

Puis, aprĂšs avoir mangĂ©, nous sommes repartis. Avant de nous mettre en train, cette amie s’était inquiĂ©tĂ©e du fait que notre destination, jusqu’à chez elle, m’éloignait de chez moi. J’avais souri :

 

« Mais j’ai mon vĂ©lo ! Tout ce qui compte pour moi, ensuite, c’est d’aller Ă  la gare St Lazare Â».

 

PrĂšs de son immeuble, elle m’a dit de la tenir au courant de ce qui m’arrivait. J’ai acquiescĂ©. Puis, en suivant ses indications, j’ai vite retrouvĂ© le chemin pour St Lazare. Avant la gare du Nord, j’ai aperçu une fĂȘte. Il y avait beaucoup de monde. J’entendais la musique alors que nous discutions.

 

A St Lazare, j’ai pris mon train de banlieue.

 

Cette nuit, j’ai comptĂ© le nombre d’articles que j’ai Ă©crit lors de ce mois d’aout aprĂšs avoir publiĂ© Photos du mois d’Aout 2021) . Article que j’ai publiĂ© en me demandant si toute cette Ă©nergie que je mets Ă  Ă©crire avait une rĂ©elle utilitĂ©. Je n’ai jamais autant publiĂ© pour mon blog que depuis ce mois d’aout 2021. Je dĂ©pose aussi dans ce blog une partie de ma mĂ©moire.  Ce mois d’aout est peut-ĂȘtre le tour de piste des sujets vers lesquels je vais de plus en plus me concentrer. Ou peut-ĂȘtre aussi ma façon de tirer ma rĂ©vĂ©rence. Car j’ai le pressentiment que ce mois de septembre va m’ĂȘtre difficile. MĂȘme si je ne vois pas trop encore pour quelle raison. Parce-que  tout ce que l’on apprĂ©hende de façon trop Ă©vidente se vĂ©rifie, Ă  mon avis, assez rarement.

 

A cĂŽtĂ© de ça, je me dĂ©sole de voir que Marche jusqu’au viaduc   est moins lu qu’il le devrait Ă  mon avis. C’est peut-ĂȘtre une histoire d’exposition. C’est peut-ĂȘtre tant mieux, aussi. Mais pour qui ?

 

Franck Unimon, ce dimanche 29 aout 2021.

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Photos du mois d’Aout 2021

 

                                     Photos du mois d’Aout 2021

Ces photos ont été prises principalement à Paris. Souvent en me rendant au travail à vélo. Ce diaporama a été réalisé sans tenir forcément compte de leur chronologie.

Une photo a Ă©tĂ© prise Ă  Argenteuil. Sur une autre, Ă  Aulnay sous Bois, Ă  la ferme du Vieux-pays, on peut voir Steve Tientcheu, acteur, et Tarik Laghdiri, scĂ©nariste ( Le cinema-A ciel ouvert avec Steve Tientcheu et Tarik Laghdiri).

 

Certaines de ces photos devaient servir pour un article que j’avais prĂ©vu d’appeler Sommes-nous si prĂ©visibles ?Un titre trĂšs enjouĂ© que j’avais trouvĂ© tout seul en tombant sur la couverture d’un journal nous parlant des Talibans en Afghanistan. AprĂšs plusieurs semaines durant lesquels la pandĂ©mie du Covid, mais aussi la vaccination anti-Covid, avaient occupĂ© systĂ©matiquement la premiĂšre page des journaux, mais aussi nos pensĂ©es et nos discussions, subitement, et presque de concert, la prioritĂ© mĂ©diatique Ă©tait donnĂ©e aux Talibans. Ainsi qu’à la peur du terrorisme. Une peur remplaçait une autre peur. Plusieurs « Dj Â» avaient changĂ© de disque en mĂȘme temps pour nous faire danser aussi longtemps qu’avec le tube de la peur prĂ©cĂ©dente. Peur prĂ©cĂ©dente qu’il s’agissait de ne pas trop user afin qu’elle puisse rester disponible et efficace. Il fallait pouvoir continuer de nous pousser vers la piste de danse.

 

D’avance, je sais que nous danserons.

 

On nous parle aussi du rĂ©chauffement climatique qui prend des proportions de plus en plus catastrophiques mais, pour l’instant, les grandes capitales ne sont pas frappĂ©es. A court terme, les bombes et les kalachnikovs des terroristes (Talibans ou autres), eux, peuvent nous atteindre plus rapidement que le rĂ©chauffement climatique.

 

Une influenceuse ou un « influenceur Â» de bonheur, aussi, peut nous atteindre plus rapidement que le rĂ©chauffement climatique.

 

Mais tout cela n’est pas une raison pour s’empĂȘcher de regarder ailleurs. C’est aussi ce que nous faisons.

 

J’ai Ă©tĂ© trĂšs touchĂ© de voir cette exposition de quelques photos des films du rĂ©alisateur polonais Kieslowski dont « l’anonymat Â» depuis sa mort me dĂ©sole. C’est un rĂ©alisateur dont j’aurais pu ou aurais dĂ» parler avec Steve Tientcheu et Tarik Laghdiri. Je l’aurais sans doute fait si j’avais aperçu cette exposition avant de les rencontrer.

 

Kieslowski abordait souvent des sujets graves de maniĂšre apaisante. Moins fantastique que Cronenberg et moins dĂ©primant que Bergman, j’ai aimĂ© sa façon de nous entraĂźner dans ses histoires. Pourtant, ses films ont d’abord Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s dans une Pologne « grise Â» trĂšs dĂ©pendante du mur de Berlin. Et la musique employĂ©e pour la bande son de ses films limitait beaucoup les envies de dĂ©hanchement et d’emballement d’une Ă©ventuelle conquĂȘte. NĂ©anmoins, ses films ont Ă©tĂ© moralement formateurs.

 

Pour ce diaporama, j’ai pensĂ© Ă  ce titre du groupe Nirvana parce-que je l’aime beaucoup et aussi parce qu’il est court. Je n’ai pas Ă©tĂ© inspirĂ© par un titre de zouk pour le « coller Â» Ă  ces photos. Il y aurait pu y avoir des photos de LĂ©o Tamaki Dojo 5 ) qu’il Ă©tait prĂ©vu que j’interviewe Ă  la fin de ce mois d’aout lors de son stage d’AĂŻkido Ă  Paris . Mais je n’ai pas de passe sanitaire et celui-ci est devenu incontournable aprĂšs mon premier passage au Dojo 5 en juillet.

LĂ©o Tamaki m’a assurĂ© que l’interview pourrait avoir lieu d’ici quelques mois. Son optimisme m’a fait du bien.

 

J’espùre que ce diaporama vous plaira.

 

Franck Unimon, ce dimanche 29 aout, 2h10 du matin.

 

 

 

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Cinéma

Le cinema-A ciel ouvert avec Steve Tientcheu et Tarik Laghdiri

Steve Tientcheu et Tarik Laghdiri, vendredi 21 aout 2021 Ă  la Ferme du Vieux-Pays, Aulnay sous Bois.

     

Le Cinema-A ciel ouvert

   avec 

Steve Tientcheu et Tarik Laghdiri

 

 Le cinema-a ciel ouvert ( https://www.cinemacielouvert.fr ) a Ă©tĂ© crĂ©Ă© Ă  Aulnay Sous Bois par l’acteur Steve Tientcheu et le scĂ©nariste Tarik Laghdiri .

 

Cinema- Ă  Ciel ouvert

La boite noire du cinĂ©ma est ici lĂ  pour dĂ©visser les cercueils dans lesquels les corps, autrement, sont Ă  l’Ă©tat de flaques  superposĂ©es les unes sur les autres. Au point qu’elles finissent par se ressembler toutes.

Au lieu d’ĂȘtre enfermĂ© ou de rester paralysĂ© Ă  l’intĂ©rieur de nos histoires, grĂące au cinĂ©ma, il va ĂȘtre possible de se mettre Ă  circuler ailleurs et diffĂ©remment. PlutĂŽt que de rester plantĂ©, lĂ ,  dans un dĂ©cor de plus en plus sourd Ă  ses habitants. Et, on va les faire germer ces histoires que l’on est les mieux habilitĂ©s Ă  raconter. Puisque, ces histoires, nous les connaissons. Nous les arrosons tous les jours et tous les soirs.

Parce-que ces histoires, ce sont nos adresses postales, mentales, corporelles et culturelles. Nos omoplates. Nos réservoirs. Sans elles, nous ne tenons pas.

J’Ă©cris “nous”. Mais c’est d’abord d’eux, bien-sĂ»r, dont je parle : les fondateurs et les participants impliquĂ©s dans ce projet inspirĂ© de leur vĂ©cu dans la ville d’Aulnay sous Bois. Et, j’Ă©cris “nous” parce-que je m’identifie Ă  ce que je comprends du projet.  

 

 

 

Ciel ouvert“. 

Presqu’un mot de passe. ” A ciel ouvert”. Comme Ă  flanc de ciel.  ” Ciel oĂč vers”. Le ciel est presqu’un cierge que l’on allume pour une priĂšre ou mieux y voir.  “Ciel oĂč vert”. Le vert, l’espoir. Vers…vers Ă  peu prĂšs tout ce que l’on veut. “Ciel ouvert”/ ” Ă  coeur ouvert”, quelle diffĂ©rence ?

 

On ne choisit pas les histoires qui nous marquent. Mais on peut choisir de s’en servir.

 

Ce vendredi 20 aout 2021, Ă  la ferme du Vieux-Pays, Ă  Aulnay-sous-bois, Steve Tientcheu et Tarik Laghdiri nous parlent du projet le cinĂ©ma- A ciel ouvert  . C’est Ă  partir de sa pĂ©piniĂšre qu’est arrivĂ© ce projet de court-mĂ©trage : La ChimĂšre

 

 

La ChimĂšre est le premier court-mĂ©trage que Steve Tientcheu  va rĂ©aliser avec des personnes d’Aulnay sous Bois. Il a crĂ©Ă© une association : C’est une Dinguerie. 

Quatorze personnes ont été sélectionnées aprÚs un casting

Le tournage débutera ce lundi 23 aout 2021. Il durera six jours.

 

Ce vendredi 20 aout 2021, je dĂ©couvre Tarik Laghdiri. Je « connais Â» un peu plus Steve.   

 

Je crois que c’est le rĂ©alisateur Yassine Qnia– dont le premier long mĂ©trage De Bas Ă©tage est sorti rĂ©cemment au cinĂ©ma- qui, le premier, m’avait parlĂ© du documentaire La Mort de Danton (2011) d’Alice Diop.

Dans ce documentaire, Alice Diop faisait un portrait de Steve alors qu’il avait pris l’initiative de «fuguer Â» de sa citĂ©, d’abord en secret de ses amis et de son quartier. Afin de suivre une formation de comĂ©dien au cours Simon, Ă  Paris.

Yassine Qnia venait alors de réaliser son court-métrage Fais Croquer.

 

A partir de La Mort de Danton, j’avais « suivi Â» assez rĂ©guliĂšrement l’évolution Ă  l’écran de Steve Tientcheu (Qui Vive, Les misĂ©rables 2Ăšme partie , Qu’un sang impur… La Nuit Des Rois-un film de Philippe LacĂŽte).

C’est lors du tournage du court-mĂ©trage Molii co-rĂ©alisĂ© en 2013 par Carine May, Mourad Boudaoud, Hakim Zouhani et Yassine Qnia, qu’en passant lors d’une nuit de tournage, j’avais rencontrĂ© Steve Tientcheu la premiĂšre fois.

 

Huit ans plus tard, ce vendredi 20 aout 2021, par l’entremise de l’attachĂ©e de presse Jamila Ouzahir, je revois donc Steve Tientcheu avec Tarik Laghdiri. Ils me parlent de La ChimĂšre et du projet autour.

 

Pour cela, j’ai fait le dĂ©placement jusqu’à la ferme du Vieux-Pays d’Aulnay Sous Bois, leur ville de naissance et de domiciliation.

La ferme du Vieux-Pays est l’endroit qu’ils ont tous les deux choisi afin de prĂ©parer les acteurs de leur film. 

 

Je connais mal le dĂ©partement du 93. Je n’y ai jamais vĂ©cu. J’y suis toujours passĂ©. Mais j’ai connu la citĂ© HLM jusqu’à mes 17 ans Ă  Nanterre. J’ai toujours habitĂ© en banlieue parisienne. Lorsque j’aurais pu venir habiter Ă  Paris, j’ai eu peur de m’y perdre et j’ai « fui Â» en restant vivre en banlieue parisienne.  

Par mon  mĂ©tier d’infirmier en pĂ©dopsychiatrie et en psychiatrie, je suis immergĂ© depuis des annĂ©es, mĂȘme si cela peut ĂȘtre seulement pour quelques heures, dans l’envers de toutes sortes de cycles et d’histoires. MĂȘme si je parle et raisonne comme un intello, avec un Français dit « soutenu Â» et « posĂ© Â», je crois ĂȘtre d’une autre contrĂ©e que bien des professionnels du journalisme cinĂ©ma que j’ai pu rencontrer en France jusqu’alors. Peut-ĂȘtre parce-que, contrairement Ă  eux, il y a eu un peu moins de possibilitĂ©s de retrait et de zones tampons entre mon corps, ma vie, et certaines souffrances et violences qui composent notre monde.

 

Cela ne fait pas de moi pour autant une personne exemplaire. Cependant, en apprenant ce projet de Steve Tientcheu et de Tarik Laghdiri, j’ai eu envie de venir. Cela a Ă©tĂ© un plaisir pour moi d’ĂȘtre passĂ©, en mĂȘme temps qu’une forme de devoir et de responsabilitĂ©. Pour eux deux bien sĂ»r mais aussi pour les autres personnes impliquĂ©es dans ce projet. Et, je pense aussi aux actrices et aux acteurs que j’ai croisĂ©s et photographiĂ©s et filmĂ©s durant leur sĂ©ance de Yoga, la derniĂšre phase de leur prĂ©paration, avec la prof, Estelle.

 

 

Je « devais Â» venir le samedi. Mais cette sĂ©ance de prĂ©paration avant le dĂ©but du tournage de La ChimĂšre a Ă©tĂ© annulĂ©e. Steve me dira au cours de l’interview que la prĂ©paration a Ă©tĂ© « intense Â». Et que pour laisser souffler les acteurs avant le « grand jour Â», cette sĂ©ance a donc Ă©tĂ© effacĂ©e.

 

Pour ĂȘtre prĂ©sent ce vendredi Ă  cette derniĂšre phase de la prĂ©paration d’avant tournage, je suis donc venu avec ma fille puisqu’elle Ă©tait avec moi au lieu d’ĂȘtre au centre de loisirs. C’était la premiĂšre fois que je l’emmĂšnais avec moi pour une interview. Et, j’ai trĂšs vite pensĂ© Ă  la faire participer. On l’entendra poser une question Ă  Steve dans une des vidĂ©os.

 

Si j’étais venu ce samedi, je serais arrivĂ© seul le matin, aprĂšs avoir travaillĂ©, avec mon visage de la nuit. Ces conditions changent une histoire. Mais aussi le regard que l’on peut avoir sur un Ă©vĂ©nement ainsi que celui que les autres peuvent porter sur nous. On ne dĂ©cide jamais au dĂ©part du regard que les autres ont sur nous. Quelles que soient les intentions et les circonstances qui nous amĂšnent. Bonnes ou mauvaises.

 

En Ă©coutant et en regardant Steve et Tarik dans ce que j’ai filmĂ©, on se fera facilement une idĂ©e de leur volontĂ© de dĂ©coller et de se dĂ©coller de certaines frontiĂšres. Telle une note de musique imaginaire qui se sortirait de toute entrave et se maintiendrait sur toute la durĂ©e. Jusqu’à ce qu’elle parvienne Ă  ses auditeurs et ses auditrices.

 

En regardant Steve Ă  l’image, on comprendra de quoi on parle lorsque l’on dit d’une actrice ou d’un acteur qu’elle ou qu’il a une « prĂ©sence Â». Ou qu’elle ou qu’il « dĂ©gage quelque chose Â».

 

Steve Tientcheu et Tarik Laghdiri, vendredi 21 aout 2021, La ferme du vieux-pays, Aulnay sous bois.

AprĂšs avoir photographiĂ© Steve plusieurs fois ce vendredi, tout en l’interviewant, je n’ai pu m’empĂȘcher de me dire que les professionnels du cinĂ©ma qui ont pu penser ou qui continuent de penser qu’un acteur noir est plus difficile Ă  Ă©clairer- et donc Ă  filmer- ont surtout  les muscles trapĂšzes de la paresse beaucoup trop dĂ©veloppĂ©s.

 

A la fin de l’interview, j’ai remerciĂ© Tarik et Steve. Ils m’ont alors rĂ©pondu :

« C’est nous qui te remercions ! Â».

 

Pourtant, en repartant de cette ferme et de cette ChimĂšre, je me suis rappelĂ© Ă  quel point j’avais besoin d’extĂ©rieur, de fantaisie, d’optimisme et de constance. Vivre en permanence le contraire revient Ă  ĂȘtre en prison. Et, la prison est l’un des thĂšmes de leur film.

 

Merci donc Ă  Steve Tientcheu et Ă  Tarik Laghdiri. A Jamila Ouzahir. A la prof de Yoga, Estelle.  Mais aussi aux actrices et aux acteurs pour leur accueil. Ainsi que pour les photos et les images que j’ai pu prendre d’eux durant leur sĂ©ance de yoga. Si je les « chambre Â» un petit peu en les montrant dans certaines postures, qu’ils sachent qu’à leur place, je n’aurais pas fait mieux. Mais aussi que je les envie d’avoir bĂ©nĂ©ficiĂ© d’une telle prĂ©paration et de pouvoir vivre une expĂ©rience pareille.

 

Un autre article suivra aprĂšs celui-ci avec d’autres photos, d’autres vidĂ©os. Car cela aurait fait trop Ă  mettre dans un seul article. Et puis, je tenais Ă  en publier un avant que ne commence le tournage…

 

 

 

Franck Unimon, ce dimanche 22 aout 2021 ( avec la participation d’Emmi Unimon).

 

 

 

 

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Argenteuil Corona Circus

Un acte politique

Photo prise ce mercredi 18 aout 2021 à Argenteuil, non loin de la mairie et de la médiathÚque.

                                                 Un acte politique

La foule

 

 

« Tout acte est politique Â». Nous avons tous entendu ça un jour. A partir de lĂ , tirer la chasse d’eau dans les toilettes ou laisser dĂ©border la cuvette des chiottes- sans les nettoyer- peut aussi ĂȘtre vu comme un acte politique. Pisser par terre sans essuyer, aussi. 

 

Je n’ai pas de passĂ© de militant politique. J’ai trĂšs peu mouillĂ© le maillot dans des manifestations ou dans des assemblĂ©es syndicales, associatives ou autres. Je me mĂ©fie des mouvements de foule et de groupe. Il y a bien-sĂ»r ma conversion trĂšs facile au « thĂ©orĂšme Â» de l’humoriste Pierre Desproges qui expliquait que pour connaĂźtre le quotient intellectuel d’un groupe ou d’une foule, qu’il fallait le diviser par le nombre de personnes qui le ou la constituait.

 

Mais il y ‘a d’autres paramĂštres qui comptent pour moi et qui rejoignent ce « thĂ©orĂšme Â».

 

Une foule, Ă  moins d’y aller en famille, c’est beaucoup de personnes inconnues. On peut bien sĂ»r y faire des rencontres indispensables. Mais, le plus souvent, la plus grande partie de celles et ceux que nous avons cĂŽtoyĂ©es restent pour nous des anonymes. On est moins maitre de soi dans une foule. En terme de repli, d’esprit critique mais aussi pour nos dĂ©cisions.

 

D’une certaine façon, se mĂȘler Ă  la foule, c’est lui faire confiance. Et, tout le monde qui constitue cette foule se livre Ă  cette confiance assez aveugle. On suit le mouvement. Ça peut donner Ă  vivre des moments trĂšs agrĂ©ables, de liesse ou de grande communion.  Pacifique ou destructrice. Ça peut aussi revenir Ă  se retrouver dans une cuvette remplie de dĂ©sherbant lorsque ça dĂ©rape. Ou lorsque la peur remplace solidement le fragile sĂ©diment d’union.

 

Les incendies du Monde

 

Ces deux-trois derniers jours, on parle de plus en plus des incendies en Chine, en Russie et dans une autre partie du Monde. Tout cela est liĂ© Ă  la dĂ©sertification et au rĂ©chauffement climatique. On parle aussi des Talibans qui ont repris l’Afghanistan depuis le dĂ©part des derniĂšres troupes militaires amĂ©ricaines. L’opticien avec lequel j’ai mes habitudes m’a parlĂ© des conditions de vie qui se sont particuliĂšrement dĂ©gradĂ©es au Liban ces derniĂšres semaines. Il est trĂšs difficile d’y trouver du pain. De l’essence pour les voitures. Les gens ont droit Ă  vingt litres d’essence. Les coupures d’Ă©lectricitĂ© sont frĂ©quentes. La retraite n’existe pas au Liban. On y travaille jusqu’Ă  la mort. Son grand-pĂšre, atteint d’un cancer, travaillait encore une semaine avant sa mort.  

 

Ces sujets- et d’autres- sont inquiĂ©tants. Ils permettent aussi de parler d’autres sujets que la pandĂ©mie du Covid, des pro-vaccins, des anti-vaccins, et des dĂ©sunions profondes que ces sujets causent.

 

Mais sans parler de ça, et avant mĂȘme que de nouveaux actes terroristes n’assombrissent encore plus nos visages, quelques Ă©vĂ©nements quotidiens banals nous montrent dĂ©jĂ  que notre union gĂ©nĂ©rale a une composition assez voisine de celle de certains de ces produits que l’on achĂšte en grande surface.

 

Il y a un peu plus de trois ans, alors que l’on parlait davantage des attentats terroristes islamistes, une jeune femme avait dĂ» subir l’insistance d’un homme en public. C’était dans le mĂ©tro Ă  une heure de pointe. L’homme Ă©tait un « beau bĂ©bĂ© Â», d’un mĂštre quatre vingt Ă  un mĂštre quatre vingt dix. Il devait porter un vĂȘtement militaire pour que je me sois imaginĂ© qu’il devait ĂȘtre du genre engagĂ© dans l’armĂ©e. Laquelle lui permettait sans doute d’avoir des rĂšgles de vie. Une tenue de route. Des ordres Ă  appliquer. Une discipline.

 

LĂ , livrĂ© Ă  lui-mĂȘme, parachutĂ© dans la vie et l’isolement social,  il avait bu quelques biĂšres. En canettes ou en petites bouteilles de verre. Il Ă©tait plus lourdaud qu’un pervers Ă  la Fourniret. Mais il Ă©tait nĂ©anmoins imposant, intimidant et Ă  cĂŽtĂ© de la plaque.

La jeune femme avait peine Ă  se soustraire de ses « avances Â». Dans le mĂ©tro qui s’ébrouait, sur la ligne 4, personne ne bougeait. Un de ces mĂ©tros « serpent Â» oĂč toutes les voitures communiquent entre elles.

 

C’est en entrant dans le mĂ©tro et en m’asseyant  Ă  quelques mĂštres que j’ai vu ça. Ce jour-lĂ , je n’ai pas rĂ©flĂ©chi. Parce-que pour agir « juste Â», c’est cela le paradoxe, que ce soit en amour, lors d’une dispute ou pour aider quelqu’un, il faut aussi savoir
ne pas rĂ©flĂ©chir. Savoir se faire confiance. S’exprimer comme ça nous vient.

 

L’homme aux lunettes jaunes

 

Ce jour-lĂ , j’ai Ă©tĂ© suffisamment confiant pour, trĂšs vite, faire signe Ă  la jeune femme de venir s’asseoir Ă  cĂŽtĂ© de moi. Une place Ă©tait libre. La jeune femme a vu mon geste puisqu’elle s’est dĂ©placĂ©e jusqu’à moi. Je ne suis plus sĂ»r qu’elle se soit assise Ă  cĂŽtĂ© de moi. Mais je sais lui avoir parlĂ© et lui avoir demandĂ© oĂč elle voulait descendre. C’était une ou deux stations de mĂ©tro plus loin.

Quelque chose dans mon attitude avait vraiment dĂ» lui inspirer confiance car, Ă  cette Ă©poque, je portais des lunettes de vue plus ou moins Ă  double foyer dont les premiers verres Ă©taient de couleur jaune. Si j’était plutĂŽt content de mon choix alors, aujourd’hui, lorsque je revois certaines photos de moi avec ces lunettes, je me dis que je n’étais pas du tout Ă  mon avantage.

 

Le gros bĂ©bĂ©, lui, seul sur la piste, comme si une femme l’avait plantĂ© en plein slow, s’était un peu Ă©nervĂ©. Il avait jetĂ© sa canette de biĂšre par terre. De la mousse avait coulĂ©. Il avait fait quelques pas  dans notre direction. Un autre homme, plus jeune que moi, plus petit que notre « gorille Â», mais aussi plutĂŽt longiligne s’était comme mis sur la trajectoire de « l’envahisseur Â». Lequel avait aboyĂ© des propos ou des menaces que notre deuxiĂšme homme, notre deuxiĂšme ligne, avait laissĂ© passer. Puis, ça avait Ă©tĂ© « tout Â».

 

Notre jeune femme avait pu sortir du mĂ©tro. Je serais incapable de la dĂ©crire. Je me rappelle qu’un homme, un peu plus loin, m’avait ensuite adressĂ© un regard. Comme si, pour lui, j’avais pu constituer une forme de soutien. Alors que j’estimais ĂȘtre presque rien. Je ne sais pas de quoi j’aurais Ă©tĂ© capable si notre « homme Â» avait Ă©tĂ© agressif physiquement envers moi. Je n’y avais pas rĂ©flĂ©chi en faisant signe Ă  cette jeune femme. Je n’avais pas eu le temps d’avoir peur. Mais j’avais eu le temps de me dire qu’en cas de nouvel attentat (ce devait ĂȘtre aprĂšs l’attentat du Bataclan), la plupart de ces personnes prĂ©sentes dans ce mĂ©tro, ce jour-lĂ , seraient parties dans tous les sens. Et que les terroristes auraient pu en faire ce qu’ils voulaient. Dans les rues de Paris et au Bataclan, les terroristes avaient pris leur pied en tirant sur des gens Ă  balles rĂ©elles comme dans une fĂȘte foraine. Dans ce qui venait de se passer avec cette jeune femme, je ne voyais pas de quel genre d’Ă©chappatoire nous aurions pu disposer face Ă  un scĂ©nario terroriste identique Ă  celui du Bataclan. Et, cela, les terroristes le savent. L’Etat, aussi. 

L’Ami de quelqu’un

 

C’est aussi pour cela, sĂ»rement, que je me mĂ©fie des foules. Lors d’une action commune, je prĂ©fĂšre ĂȘtre entourĂ© de peu de personnes et bien les connaĂźtre. Et, Ă©videmment, plus cette action commune sera dĂ©licate, plus j’aurai sans doute besoin de bien connaĂźtre ces personnes qui m’entourent afin de pouvoir mieux me coordonner avec elles. On critique trĂšs souvent les personnes qui, dans les transports en commun, ne bougent pas en cas d’agression. Cette « passivitĂ© Â» s’explique aussi par le fait que toutes ces personnes entre elles ne se connaissent pas et ne connaissent pas la victime. Et, l’agresseur ou les agresseurs profitent  aussi de cette brĂšche. De cette opportunitĂ©.

 

Aujourd’hui, on se dit facilement ĂȘtre l’ami de quelqu’un. Mais c’est une formule. Y compris une formule de politesse. Il est facile d’ĂȘtre l’ami de quelqu’un lorsque tout sourit. Et c’est agrĂ©able, aussi. On ne peut pas souhaiter rester en permanence sur le qui-vive et dans la mĂ©fiance. On ne peut pas passer son temps Ă  devoir ramper constamment dans la boue et le froid, en pleine nuit, le ventre vide, afin d’échapper Ă  des furies. Ou juste pour se rendre Ă  une sĂ©ance de cinĂ©ma ou pour prendre un verre dans un bar avec quelqu’un.

 

L’anomalie

 

Aujourd’hui, j’ai raccompagnĂ© ma fille Ă  la mĂ©diathĂšque de ma ville. J’ai vite renoncĂ© Ă  faire remarquer aux bibliothĂ©caires que je « connais Â» et qui me « connaissent Â» qu’il y a une grosse anomalie dans le fait que des gens comme moi, non vaccinĂ©s contre le Covid, soient dĂ©sormais interdits d’accĂšs de la mĂ©diathĂšque. Je crois que faire part de cette anomalie aux bibliothĂ©caires les mettrait mal Ă  l’aise. Je me suis contentĂ© de les saluer de loin. Nous nous sommes souris. Je me suis aussi demandĂ© combien de fois faudrait-il que des usagers familiers comme moi repassent et restent ainsi presqu’à la « porte Â» de la mĂ©diathĂšque pour que l’une ou l’un d’entre eux, Ă  un moment donnĂ©, finissent par se dire qu’il y a quelque chose qui cloche dans cette situation. Je me suis aussi demandĂ© combien de temps, si j’étais Ă  leur place, ou lorsque je suis Ă  leur place dans mon travail, me faudrait-il/me faut-il, pour m’apercevoir qu’il y a quelque chose qui cloche dans ma conduite au regard de certaines situations.

 

L’anomalie est  que la mairie de ma ville ne propose aucune alternative. Car les impĂŽts que je paie depuis des annĂ©es contribuent au financement des institutions publiques comme les mĂ©diathĂšques et les hĂŽpitaux publics. L’Etat et donc la mairie de ma ville n’ont donc aucune lĂ©gitimitĂ© Ă  m’interdire totalement l’accĂšs Ă  la mĂ©diathĂšque de ma ville. Ou, ils se doivent de me proposer un service alternatif. Car je paie pour ce service public avec mes impĂŽts. Or, depuis plusieurs jours maintenant, l’Etat prend l’argent de mes impĂŽts mais ne me rend pas le service pour lequel mes impĂŽts- et ceux des autres citoyens vaccinĂ©s et non-vaccinĂ©s contre le Covid- le paient. Et, la mairie de ma ville se comporte donc comme un exĂ©cutant zĂ©lĂ© de l’Etat. C’est un exĂ©cutant de poids mais, aussi, un exĂ©cutant dĂ©cĂ©rĂ©brĂ© qui manque totalement de recul. Et qui manque, lĂ , Ă  sa mission d’inclusion sociale et culturelle.

Lorsqu’une entreprise prend l’argent ou reçoit de l’argent de ses actionnaires, elle lui doit des contreparties. Sauf si les actions n’ont plus de valeur. Dans ce cas, les actionnaires ont perdu leur argent. Refuser l’accĂšs Ă  des institutions publiques Ă  des personnes qui paient leurs impĂŽts parce-qu’, actuellement, ces personnes ne fournissent pas de passe sanitaire ou de test PCR ou antigĂ©nique nĂ©gatif, cela signifie aussi que, pour l’Etat, les “actions” du service public n’ont aucune valeur. 

 

C’est presque le contenu du mail que j’ai envoyĂ© tout Ă  l’heure Ă  la mairie de ma ville.  Je ne sais pas quand ce mail sera lu. Nous sommes en plein mois d’aout, pendant les grandes vacances. Et, je ne suis personne. Je n’ai pas des millions de vues sur une chaine Youtube. Je n’ai aucun ami dans les sphĂšres politiques, mĂ©diatiques ou dans le monde des affaires. Mais mon mail est sans doute un acte politique. Et, je n’ai pas prĂ©vu d’aller boire de la biĂšre dans un mĂ©tro en attendant que l’on me rĂ©ponde.

 

Franck Unimon, ce mercredi 18 aout 2021.

 

 

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Mes impĂŽts

Photo prise le 6 aout 2021 Ă  Argenteuil. J’ai revu cette affiche quelques jours plus tard Ă  Paris. Le message est que les baisers “profonds” sont Ă  “jeter” puisque susceptibles d’ĂȘtre transporteurs du virus du Covid. C’est un hasard si le vĂ©hicule de transport se trouvait lĂ  au moment oĂč j’ai pris la photo.

Mes impĂŽts

Mais, au fait ! Moi, le non-vaccinĂ©, coupable de vivre encore sans passe-sanitaire


Tous les mois, depuis des annĂ©es, je paie bien des impĂŽts ? Et, maintenant que le prĂ©lĂšvement de l’impĂŽt sur le revenu se fait Ă  la source, chaque mois, sur mon salaire, sont bien prĂ©levĂ©s mes impĂŽts ?

 

 

 

Mes impĂŽts participent aussi au financement des hĂŽpitaux publics, des bibliothĂšques et autres services
.alors, je paie pour ça mais je n’y ai plus le droit depuis quelques jours ( En allant Ă  la mĂ©diathĂšque ce samedi 14 aout 2021). Sauf pour les urgences Ă  l’hĂŽpital.

Ça fait penser un peu Ă  du racket dans un pays supposĂ© Ă©galitaire. Ou ça pousse Ă  croire que l’Etat, au moins, et celles et ceux qui appliquent ces nouvelles mesures s’assoient sur certaines lois. Sans penser Ă  mal, bien-sĂ»r.

 

On a le droit d’ĂȘtre pro-vaccin et mĂȘme d’ĂȘtre persuadĂ© que les anti-vaccins sont des crĂ©tins, des illuminĂ©s, et tout ce qui s’ensuit. Mais cette histoire d’impĂŽts devrait faire rĂ©flĂ©chir n’importe qui. Mais, apparemment, pas trop. La rĂ©flexion semble se limiter Ă  : seringue ou pas seringue. Pas au delĂ .

A cĂŽtĂ© de ça, les nouvelles mesures sanitaires (passe sanitaire obligatoire) sont appliquĂ©es sans discernement. De l’Etat au simple employĂ© qui ne fait qu’executer 
.

Bonne nuit.

 

La mĂȘme affiche qu’au dĂ©but de cet article, photographiĂ©e cette fois quatre jours plus tard Ă  Paris, le 10 aout 2021. Sortie Ă  Paris qui m’a ensuite inspirĂ© l’article “Paris sans passe : Atterrissage ethnique”.

 

 

Franck Unimon, ce dimanche 15 aout 2021.

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En allant à la médiathÚque ce samedi 14 aout 2021

 

En allant à la médiathÚque ce samedi 14 aout 2021

 

La peur d’un complot

 

 

En allant Ă  la mĂ©diathĂšque ce samedi 14 aout 2021, je savais que je ne pourrais y entrer dĂ©sormais. DĂ©sormais, un passe sanitaire est obligatoire Ă  l’entrĂ©e. « Ou un rĂ©sultat nĂ©gatif Ă  un test PCR ou antigĂ©nique Â» a ajoutĂ© la bibliothĂ©caire qui a ajoutĂ© avoir reconnu ma voix lorsque je l’ai appelĂ©e par son prĂ©nom.

 

14 ans que je me rends Ă  cette mĂ©diathĂšque. Cette fois, je faisais le trajet pour y accompagner ma fille qui, fort heureusement, maintenant, connaĂźt l’endroit et la plupart des gens qui y travaillent. Cette situation oĂč je la « dĂ©pose Â» Ă  l’entrĂ©e de la mĂ©diathĂšque et reviens ensuite la chercher est bien-sĂ»r un bon moyen d’autonomisation pour elle. « D’autres parents font comme ça, aussi Â» m’avait Ă©galement dit la mĂȘme bibliothĂ©caire au tĂ©lĂ©phone.

 

Au prĂ©alable, j’avais expliquĂ© le « topo Â» Ă  ma fille. En quelques mots. Elle avait pris ça calmement et Ă©tait plutĂŽt contente de dĂ©couvrir qu’elle pourrait utiliser la carte de prĂȘt, toute seule. Pour le dvd du dessin animĂ© Trolls 2, ce serait Ă  elle qu’il reviendrait d’aller solliciter la bibliothĂ©caire afin de lui demander si elle pourrait le rĂ©emprunter. Car elle n’avait pas eu le temps de le regarder.

 

En nous rapprochant de la mĂ©diathĂšque, je suis tombĂ© sur ce panneau de la Licra contre l’antisĂ©mitisme. Je comprends la campagne contre l’antisĂ©mitisme. Mais j’ai Ă©tĂ© surpris par la pĂ©riode d’apparition de ce panneau. Pourquoi maintenant, un 14 aout ? Alors qu’une bonne partie des gens sont, en principe, en vacances. Et puis, je ne saisissais pas cette phrase qui Ă©tait apparemment un tĂ©moignage :

 

« En m’associant Ă  la peur d’un complot, on donne un visage Ă  l’antisĂ©mitisme Â».

 

Signé David.

 

Aujourd’hui, le mot « complot Â» est directement associĂ© Ă  celles et ceux qui sont contre les vaccins anti-Covid ou qui expriment des doutes Ă  leur sujet.

 

Et, puis, cet homme sur la photo donne l’impression que c’est lui, l’antisĂ©mite. Puisque c’est son visage qui apparaĂźt. Or, il est supposĂ© ĂȘtre juif. Qu’est-ce que c’est que ce message contradictoire ?! Cette phrase sĂ»rement sincĂšre et pourtant si alambiquĂ©e que j’avais du mal Ă  la dĂ©crypter ?!

 

Passer de ce « Je Â» implicite ( “En”)  Ă  « On Â». Quel flou ! Comment la Licra avait t’elle pu lancer une campagne avec des propos aussi ambigus ? Ou bien, avais-je mal vu ?

 

Je ne savais plus. Je ne sais plus.

 

Rester dans la mĂȘme histoire

 

J’ai pris le temps de prendre cette affiche en photo. Puis, j’ai rejoint ma fille. Avant de traverser la route, je me suis dit :

 

« Peu importe que l’on ait (la) raison ou qu’on l’ait perdue : la folie, c’est rester dans la mĂȘme histoire en se blottissant contre l’impossibilitĂ© ou la difficultĂ© d’en sortir. En la voyant comme le rĂ©servoir de l’HumanitĂ© et l’intĂ©gralitĂ© de nos vies Â».

 

A partir de ce 12 juillet 2021, avec un gros pic dĂ©but aout, j’ai beaucoup parlĂ© du Covid et des vaccins dans mes derniers articles. C’est « normal Â», ce sujet nous occupe tous. Et il va continuer de le faire. Mais ne parler que de « lui Â» et des vaccins, c’est s’immerger soi-mĂȘme la tĂȘte dans une marmite et l’y laisser cuire.

 

Je parlerai donc Ă  nouveau du Covid dans mes articles. Mais, autant que possible, moins. Parce-que je ne crois pas qu’en plein conflit armĂ©, en prison ou en d’autres circonstances de vie difficiles que les gens qui survivent et s’en sortent le mieux ne passent leur temps qu’à parler de ce qui se trouve ou de ce qui peut bien encore se trouver au fond de la marmite. Et de sa fabrication, de son volume rĂ©el mais aussi de sa couleur. Ce genre d’informations, mĂȘme en nous concentrant, nous dĂ©passe : le volume rĂ©el de la marmite, sa profondeur exacte
.tout cela, nous ne l’apprendrons, si nous sommes encore prĂ©sents Ă  cette date, que lorsque  notre histoire avec cette marmite sera rĂ©ellement terminĂ©e. Or, pour l’instant, cette histoire est encore en cours.

 

Combattre, rĂ©sister, s’évader

 

Quant Ă  la façon de combattre, de rĂ©sister, ou de s’évader, il en existe plusieurs. Rarement une seule Ă  ce que j’ai compris. Et, il convient de rĂ©ussir Ă  trouver celle qui nous correspond le mieux.

 

A quelques mĂštres devant l’entrĂ©e de la mĂ©diathĂšque, une table dehors. DerriĂšre elle, une bibliothĂ©caire que je connaissais bien-sĂ»r. J’ai fait mes derniĂšres recommandations Ă  ma fille et lui ai dit l’heure Ă  laquelle j’allais revenir la chercher. La bibliothĂ©caire, pĂ©dagogue, lui a traduit :

 

« Donc, ça te fait trois quarts d’heure Â». Je ne pouvais pas faire plus pour cette fois.

 

Je suis allĂ© faire quelques courses chez le marchand de primeurs. Je suis passĂ© Ă  la bonne heure. J’étais le seul client.

 

A mon retour, j’ai essayĂ© de voir avec la bibliothĂ©caire comment me faire Ă  ces nouvelles rĂšgles. Elle m’a confirmĂ© que je pouvais faire des rĂ©servations sur le site de la mĂ©diathĂšque. Mais m’a expliquĂ© qu’ils n’étaient pas assez nombreux en personnels pour organiser un « Drive Â». Il faudrait donc que quelqu’un qui dispose d’un passe sanitaire, ou ma fille, aille chercher les documents rĂ©servĂ©s Ă  ma place. Ce genre de solution n’a rien d’exceptionnel. A l’extrĂȘme, je « sais Â» que dans certains conflits armĂ©s, des parents ont pu cacher des armes dans les cartables de leurs enfants afin que ceux-ci passent les contrĂŽles. LĂ , il s’agirait juste de me porter quelques livres ou cds. Cela pourrait ĂȘtre assez gratifiant pour ma fille. Mais cela m’emballe modĂ©rĂ©ment. Et, de la solliciter pour ça. Mais, aussi, de solliciter qui que ce soit d’autre.

 

Si j’étais gravement malade, trĂšs occupĂ© ou un grand criminel recherchĂ© dans toute la France, je pourrais Ă  la limite recourir Ă  cette « mĂ©thode Â». Mais, lĂ , je suis parfaitement en Ă©tat pour effectuer mes dĂ©marches moi-mĂȘme. Mon casier judiciaire est vierge.

Sauf que les rĂšgles ont changĂ© depuis le 9 aout. Je peux entrer dans n’importe quelle Fnac de France avec mon masque anti-Covid. J’ai vu il y a quelques jours que j’aurais pu entrer dans une bibliothĂšque en plein Paris sans passe sanitaire. Dans le 1er arrondissement. Si je cherche bien,  il doit donc y avoir encore d’autres bibliothĂšques oĂč il est toujours possible d’entrer sans passe sanitaire, en portant un masque anti Covid.

Certaines mairies par contre, comme celle de ma ville, font peut-ĂȘtre du zĂšle en matiĂšre de mesures sanitaires. Je n’ai pas les moyens de m’y opposer. Pour l’instant, je n’ai donc plus le droit d’entrer dans la mĂ©diathĂšque de ma ville et, un peu, de ma vie.

 

A partager

 

Ma fille et moi sommes ensuite repartis. Elle, insouciante, et c’est normal, moi, plus partagĂ© mais aussi discret que possible pour ne pas la concerner par cette situation particuliĂšre.

 

PartagĂ© parce-que je ne sais pas combien de temps il sera autorisĂ© qu’elle puisse accĂ©der Ă  la mĂ©diathĂšque sans passe sanitaire ou autre restriction qui ne finit de s’ajouter Ă  notre quotidien. PartagĂ© parce-que, d’une certaine façon, je fais peser sur ma fille les consĂ©quences d’une dĂ©cision qui ne devrait regarder que les adultes entre eux. Or, cette pandĂ©mie n’est pas seulement sanitaire. Elle est aussi sociĂ©tale et imprĂšgne tous les rayons et toutes les Ă©tagĂšres sur lesquels reposent toutes les cultures que nous empruntons, dĂ©nigrons ou ignorons.

 

Franck Unimon, ce dimanche 15 aout 2021.

 

 

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Qui ĂȘtes vous ?

Piscine de Roubaix, juillet 2019.

Qui ĂȘtes-vous ?

 

La premiĂšre fois, c’était Ă  la mĂ©diathĂšque. Je venais d’arriver dans la ville. M
une bibliothĂ©caire, partie Ă  la retraite il y a quelques annĂ©es, m’avait parlĂ© de lui. De ce professeur de percussions d’origine antillaise, au conservatoire. C’était en Avril ou Mai 2007. La jeune Alisha ( Marche jusqu’au viaduc )Ă©tait alors bĂ©bĂ© ou pas encore nĂ©e. Ses deux futurs camarades et  meurtriers qui , le 8 mars 2021, la piĂ©geraient, la tabasseraient et la jetteraient dans la Seine, Ă  Argenteuil, prĂšs du viaduc sous la A15, Ă  une vingtaine de minutes Ă  pied depuis chez moi, devaient alors Ă  peine marcher. Bien-sĂ»r, en 2007, j’ignorais tout de cette future histoire. J’avais bien d’autres histoires en tĂȘte que j’ai aujourd’hui oubliĂ©es pour la plupart.  

 

En 2007 ou 2008, j’étais allĂ© le rencontrer au conservatoire. Et, nous avions sympathisĂ© et discutĂ©. Il m’avait parlĂ© de son Maitre, Mamady Keita, dĂ©cĂ©dĂ© ce mois de juillet 2021 soit quelques semaines avant Jacob Desvarieux ( J’ai revu quelqu’un…). Par la suite, j’avais bien pris un ou deux cours de djembĂ© avec lui. Mais je suis peu douĂ©. Je rĂȘve bien mieux la musique que je ne la joue. Je n’ai pas de bonnes mains ni les oreilles et le cerveau ou la patience et l’intelligence qu’il faut devant un instrument de musique. Ainsi que la constance et la consistance nĂ©cessaires Ă  l’épuisement de mes dĂ©fauts.

 

Par contre, j’écris comme d’autres jouent de la musique ou pratiquent un art martial ou de combat. A jeun. Au rĂ©veil. A peu prĂšs Ă  n’importe quelle heure. De maniĂšre rĂ©pĂ©titive.

 

MĂȘme si mes articles sont ratĂ©s, mauvais, transportent des idĂ©es claironnĂ©es dans le dĂ©sert ou donnent sur des impasses, cela ne me dĂ©courage pas. Je vais recommencer. Je vais repartir. Je ne peux pas faire autrement. Cela a peut-ĂȘtre Ă  voir avec le fait qu’écrire me vient de ma jeunesse et que j’y ai concentrĂ© ce qu’il m’en reste.

 

Parler, c’est difficile. On peut raconter des histoires Ă  l’oral mais il faut une bonne voix. Ou bien savoir s’en servir. La mienne ne porte pas. Elle endort et se mĂ©lange dans les dĂ©tails, bĂ©tails incontrĂŽlĂ©s rapidement hors de portĂ©e des fusils de l’attention de l’auditoire. Un auditoire a besoin d’ĂȘtre captif. Pas de se dissĂ©miner en partant Ă  la chasse d’un fou qui court partout en mĂȘme temps. 

 

Un fou, contrairement Ă  ce que l’on croit, ça Ă©coute. Ça Ă©coute tout. Trop. Et ça croit beaucoup, aussi. C’est pour cela qu’il est fou. Il y a des gentils fous et des mĂ©chants fous.

 

Lorsque je lui ai envoyĂ© un sms hier soir, cela faisait plusieurs mois que je ne lui avais pas parlĂ©. La derniĂšre fois, c’était quelques jours ou quelques semaines avant qu’il ne prenne sa retraite du conservatoire de musique. Si j’étais plus allĂ© le voir de temps en temps de façon amicale et en amateur de musique, j’avais aussi pris la prĂ©caution d’emmener ma fille le voir deux ou trois fois. Elle devait avoir deux ou trois ans, lorsque, entre deux cours, alors qu’il Ă©tait disponible, pour elle, il avait jouĂ© quelques airs au djembĂ©. Plus tard, toujours entre deux cours, ou entre deux tours, il l’avait faite jouer un peu et lui avait donnĂ© une petite initiation musicale.

 

Mon sms Ă  peine envoyĂ©, hier soir j’ai reçu sa rĂ©ponse par sms :

 

« Qui ĂȘtes vous ? Â». Puis, j’ai vu qu’il avait essayĂ© de me joindre. J’ai dĂ©cidĂ© de le rappeler. AprĂšs que je me sois prĂ©sentĂ©, il m’a presque engueulĂ©.

 

« Pourquoi tu m’envoies un sms au lieu de m’appeler ?! Tu m’envoies un truc, il faut que je clique sur un lien ! Avec toutes les arnaques qu’il y a par tĂ©lĂ©phone ! Â».

 

Je lui ai expliquĂ© que je n’étais pas trĂšs disponible pour discuter. Il m’a rĂ©pondu :

 

« Y’a pas de problĂšme ! Â».

 

Trente minutes plus tard, nous Ă©tions encore au tĂ©lĂ©phone. Il m’a appris qu’il continuait de donner des cours de musique dans une association oĂč il enseignait depuis vingt ans. Il approche des 70 ans.

 

Il m’a appris comment, pendant plus de vingt ans, il avait fait deux heures de route Ă  l’aller, deux fois par semaine, pour se rendre au conservatoire oĂč je l’avais rencontrĂ©. Et comme il arrivait fatiguĂ© avant mĂȘme de commencer Ă  donner ses cours. Mais, aussi, lĂ  oĂč il avait commencĂ© Ă  donner des cours dans la ville avant d’ĂȘtre embauchĂ© au conservatoire.

 

Parce qu’un fou, ça sait interroger et faire parler les gens.  Parce qu’un fou, ça permet Ă  un autre fou de livrer une part de sa folie. Parce qu’entre fous, on se reconnaĂźt, on se comprend et on se fait confiance. On se livre peu face Ă  quelqu’un dont la folie correspond assez peu aux valeurs et aux dĂ©tours de la nĂŽtre.

 

Un professeur de conservatoire, c’est souvent une personne ou un professionnel, dont on imagine trĂšs peu la vie. A moins de le connaĂźtre. Sauf s’il en parle. Parce qu’en gĂ©nĂ©ral, un professeur de conservatoire enseigne une discipline si rigoureuse que l’on a d’autres prioritĂ©s que d’aller renifler son derriĂšre afin de savoir ce qu’il a mangĂ©, quand et avec qui. Mais, lui, m’a toujours parlĂ© de quelques unes de ses expĂ©riences.

 

Hier soir, j’ai donc entendu qu’il avait Ă©tĂ© batteur Ă  Pigalle pendant cinq ans dans un orchestre entre 1979 et 1984. Il m’a dĂ©crit une ambiance de Far west et dit que s’il Ă©crivait un jour un livre, il raconterait ça plutĂŽt que ce qu’il a pu apprendre des gens au travers de ses Ă©lĂšves du conservatoire. Moi, j’aurais bien aimĂ© qu’il raconte aussi ce qu’il avait vu au conservatoire.

 

Far West Ă  Pigalle ou histoires de conservatoire, deux histoires et deux mondes s’opposent. Je n’ai pas pĂ» m’empĂȘcher de penser qu’un Ă©diteur ou un producteur de film opterait pour le Far West Ă  Pigalle. C’est plus vendeur. C’est plus attractif.

 

Mais ça m’a fait rĂ©flĂ©chir.

 

Parfois, nous racontons des histoires parce que ce sont celles qui nous ont le plus marquĂ©es et elles sont marquantes. Ce faisant, nous dĂ©laissons d’autres histoires qui finissent par disparaĂźtre. Alors qu’elles sont peut-ĂȘtre aussi marquantes que les autres que nous retenons ou prĂ©fĂ©rons. Qui suis-je pour croire et dĂ©cider qu’une histoire vaut autant ou plus qu’une autre ?

 

Un fou et un auteur.

 

Franck Unimon, ce samedi 14 aout 2021.

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Moon France Musique

J’ai revu quelqu’un…

CathĂ©drale d’Amiens, juillet 2021.

                                           J’ai revu quelqu’un
.

 

Il y a quelques jours, j’ai revu quelqu’un. Ce n’était pas dans une Ă©glise. Je l’avais appelĂ© il y a quelques mois. Nous avions discutĂ©.

 

Il ne me connaissait pas.

 

Je lui avais donnĂ© mon nom et le prĂ©nom de ma mĂšre qu’il aurait dĂ» connaĂźtre. Il ne se souvenait pas d’elle.

 

Alors, j’avais sorti d’autres prĂ©noms et d’autres noms du jeu de cartes de ma mĂ©moire. Parmi eux, un certain nombre de carrĂ©s d’as. Il connaissait bien ces cartes. C’était bien lui que j’avais rencontrĂ© il y a plus de trente ans. J’avais croisĂ© sa mĂšre, aussi. Une petite femme pleine d’autoritĂ© qui connaissait ma mĂšre et me saluait.

 

AprĂšs quelques minutes, il s’était excusĂ©. Il avait du travail. Je n’avais pas insistĂ©. Mais j’avais Ă©tĂ© un peu contrariĂ© que ce simple Ă©change lui suffise.

 

Nous nous sommes finalement vus il y a quelques jours. Quand il s’est approchĂ©, Ă  petits pas vers moi, nous nous sommes regardĂ©s. C’est plus par dĂ©duction que nous avons compris qui nous Ă©tions. Lui et moi Ă©tions dĂ©tendus. J’étais assis, lui, debout face Ă  moi. Autour de nous, les personnes prĂ©sentes sont devenues transparentes et silencieuses bien qu’elles aient continuĂ© Ă  parler entre elles Ă  voix haute.

 

Lorsqu’il a enlevĂ© son masque anti-Covid, je ne l’ai pas reconnu. Je suis pourtant assez physionomiste. Mais, Ă  part les yeux et le regard peut-ĂȘtre, dans la rue, je serais passĂ© Ă  cĂŽtĂ© de lui. Il avait le crĂąne rasĂ©. Avait minci. Une petite moustache taillĂ©e. Et portait la marque autour du cou de celles et ceux qui ont Ă©tĂ© gravement malades et pour lesquels une chirurgie lourde avait Ă©tĂ© nĂ©cessaire. Un cancer Ă©tait passĂ© par lĂ . J’avais aussi appris qu’il avait Ă©tĂ© de celles et ceux qui avaient attrapĂ© le Covid cette annĂ©e, en mars-avril. Il avait Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© plusieurs semaines puis avait repris.

 

De lui, j’avais le souvenir d’un homme trĂšs assurĂ©, trĂšs bon professionnel. Qui savait ce qu’il faisait. C’était ce qui Ă©manait de lui. MĂȘme si nous n’avions pas vraiment passĂ© de temps ensemble, il avait Ă©tĂ© un peu un modĂšle pour cela.

 

Un jour, il y a plus de trente ans, s’adressant Ă  quelqu’un que je devais connaĂźtre il avait dit, trĂšs content :

 

« Tu veux voir ma caisse ?! Â». A cette Ă©poque, tout juste adulte, je n’avais pas le permis. J’étais Ă  cet Ăąge oĂč, avec les premiers salaires, la voiture, les copains et les copines, on sort la nuit et on « profite Â» de la vie. J’avais tout Ă  apprendre pratiquement.

 

Nous avons repris nos marques en reparlant du passĂ©. Nous avons Ă©changĂ© Ă  nouveau des noms et des prĂ©noms inconnus Ă  notre entourage immĂ©diat. Alors que parmi ces collĂšgues immĂ©diats se trouvaient vraisemblablement des personnes qui le connaissaient intimement depuis des annĂ©es, maintenant.  Et, moi, le « nouveau Â», celui qui faisait moins que son Ăąge, j’arrivais avec ça.

 

Lorsque j’ai mentionnĂ© la date de notre derniĂšre rencontre, 1989, le collĂšgue avec lequel je venais de terminer une deuxiĂšme nuit de travail de suite, un « nouveau Â» comme moi, mais un petit peu plus ancien dans le service, s’est exclamĂ© :

 

« En 1989, j’avais deux ans ! Â».

 

Ma fille a dĂ©sormais un peu plus que deux ans. Tout Ă  l’heure, avec elle, j’ai de nouveau regardĂ© quelques vidĂ©os de Jacob Desvarieux, l’un des fondateurs du groupe de Zouk Kassav’, dĂ©cĂ©dĂ© il y a quelques jours.

J’en ai parlĂ© dans un de mes articles rĂ©cents intitulĂ© : Jacob Desvarieux. Dans mon blog, on trouvera d’autres articles relatifs Ă  Kassav’ dans la catĂ©gorie Moon France.

 

Sur Youtube, je suis tombĂ© sur cette vidĂ©o de quelques minutes lors de l’enterrement de Jacob Desvarieux. Quatre hommes en costume portent son cercueil et se mettent Ă  zouker sur un de ses  titres : KavaliĂ© O Dam. ( Pour ĂȘtre plus exact : ces quatre hommes dansent le quadrille dans sa version crĂ©ole)

Ma fille Ă©tait assise sur mes genoux alors que nous regardions ça. J’ai trouvĂ© ça beau ! ça m’a…touchĂ©. Et encore plus parce-que je pouvais regarder ça avec ma fille.  Elle m’a demandĂ© oĂč Ă©tait Jacob Desvarieux, ou, pourquoi il Ă©tait dans le cercueil. Je lui ai alors rĂ©pondu :

« Parce qu’il est mort Â».

En regardant cette vidĂ©o, j’aurais aussi bien aimĂ© ĂȘtre le dĂ©funt qu’ĂȘtre Ă  la place d’un de ces quatre hommes qui portent le cercueil.  

 

Sur une autre vidĂ©o, un homme interrogĂ© a dit ce que la mort de Desvarieux lui faisait. On aurait dit un pĂȘcheur d’une soixantaine d’annĂ©es. Il s’est exprimĂ© en CrĂ©ole. J’ai pris l’initiative de traduire ses propos Ă  ma fille
  jusqu’à ce qu’elle me fasse comprendre que cela l’agaçait. Je lui ai alors demandĂ© en souriant :

« Ah, bon ! Ou KonĂšt PalĂ© KrĂ©yol ?! Â» (« Ah, bon, tu sais parler CrĂ©ole ?! Â»).

 

Je fais attention Ă  l’usage du CrĂ©ole avec ma fille. Afin qu’il ne soit pas un geste de colĂšre. Je le parle mal mais je sais ce qu’une langue peut crĂ©er en soi de sensible. Et je le rĂ©serve Ă  des moments agrĂ©ables avec elle. Lecture de contes. Quelques formulations.

 

Le dĂ©cĂšs de Jacob Desvarieux a Ă©tĂ© une bonne occasion, de plus, de filer la langue crĂ©ole sur le comptoir de ces instants vĂ©cus avec ma fille. Si je le pouvais, je parlerais aussi le CrĂ©ole rĂ©unionnais et haĂŻtien en plus d’autres langues. Dont L’Arabe et le Japonais.

 

J’ai Ă©tĂ© Ă©tonnĂ©, en Ă©voquant devant mon collĂšgue masquĂ© certains prĂ©noms et noms d’anciens collĂšgues avec lesquels il avait travaillĂ© directement, qu’il martĂšle plusieurs fois, ce verdict :

 

« Il est mort ! Â».

 

Au point que j’ai fini par lui dire, presque Ă©tonnĂ© :

 

« Mais, on finit par mourir un jour, de toutes façons ?! Â».

 

Il m’a regardĂ© en silence, comme s’il disposait d’un plan secret pour Ă©viter ça. Mais qu’il le gardait pour lui. Ou qu’il Ă©tait encore trop tĂŽt pour en parler. J’ai alors compris la raison pour laquelle il reculait la date de son dĂ©part Ă  la retraite prĂ©vu initialement pour cette annĂ©e.

 

Je ne suis pas fort. Mais je trouve que l’on fait aussi toute une histoire avec la mort. C’est ce que je me suis dit en regardant ces quelques vidĂ©os sur Jacob Desvarieux. J’avais oubliĂ© de parler de ses solos de guitares qui, lors des concerts de Kassav’, Ă©taient un passage obligĂ©. Et, personne ne s’en plaignait.

 

Afin de coller Ă  notre Ă©poque, j’ai aussi pris le temps de regarder avec ma fille quelques vidĂ©os de Billie Eilish. Ce sera peut-ĂȘtre son futur d’adolescente. Billie Eilish doit aujourd’hui avoir Ă  peu prĂšs l’ñge que j’avais lorsque j’avais rencontrĂ© mon aĂźnĂ© Ă  la Maison de Nanterre, vers le milieu ou Ă  la  fin de mes annĂ©es d’études d’infirmier. C’Ă©tait aussi la pĂ©riode oĂč Kassav’ et le Zouk, d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, dĂ©bordaient aux Antilles. 

 

J’ai Ă©tĂ© un peu gĂȘnĂ© par quelques postures et images de la demoiselle Elish. Pour ma fille qui est encore en dessous de l’Ăąge de l’adolescence.

J’ai compris assez facilement ce qui peut expliquer le succĂšs de la jeune femme (Billie Eilish) :

La maitrise de l’image et du son. Certaines provocations et mimiques Ă  connotation sexuelle ou sensuelle ou comment titiller les tĂ©tons et les limites. Le style vestimentaire. La voix Ă©raillĂ©e et supportĂ©e par la technique. L’énergie spĂ©cifique Ă  cet « Ăąge Â» de la vie. Les thĂšmes interprĂ©tĂ©s comme artiste et personne plutĂŽt que comme une victime claustrĂ©e. Le fait aussi qu’elle chante en Anglais. Dans l’article consacrĂ© Ă  Desvarieux et Kassav’, j’ai appris tout Ă  l’heure que des pressions avaient Ă©tĂ© exercĂ©es sur le groupe afin qu’il chante…en Français. Comme La Compagnie CrĂ©ole. Cette volontĂ© comme ce projet sont pour moi inconcevables. MĂȘme si je sais qu’une artiste comme l’Islandaise Björk a aussi dĂ» son succĂšs international Ă  l’usage de l’Anglais ( comparativement Ă  l’artiste Mari Boine); ou que Bob Marley a dĂ» transposer ses idĂ©es depuis son argot jamaĂŻcain Ă  travers le garrot d’une langue anglaise plus accessible au grand public, le rythme d’une musique a aussi ses rĂšgles et ses conditions pour que ses auteurs et ses interprĂštes restent en adĂ©quation avec lui !   

Eilish, “native” de la langue anglaise n’a pas eu Ă  subir ce genre de chantage de l’industrie du disque. 

Sur scĂšne, accompagnĂ©e de deux ou trois musiciens et de machines dĂ©vouĂ©es, Eilish se sert de sa voix et de son corps tels des processeurs qui lui obĂ©issent au doigt et Ă  l’Ɠil.

 

Ensuite, Eilish est dĂ©ja arrivĂ©e Ă  ce stade de la cĂ©lĂ©britĂ© oĂč celle-ci recycle l’enthousiasme du public qui, en grossissant, attire de nouvelles personnes. Comme moi qui, aprĂšs avoir aperçu un ou deux articles rĂ©cemment Ă  son sujet, ai dĂ©cidĂ© de pousser la porte numĂ©rique de Youtube afin de me faire une idĂ©e. Pourquoi ? Parce-que sur le mĂȘme journal oĂč figurait un hommage Ă  Desvarieux se trouvait aussi un article sur Eilish et que c’était la deuxiĂšme fois en moins de dix jours que dans un journal, je la voyais soit en couverture ou dans les colonnes d’un article.

 

De Billie Eilish ( existe-t’il un rapport avec Billie Holiday ?), Ă  Jacob Desvarieux et Kassav’ en passant par cet aĂźnĂ© de dix ans- et collĂšgue- revu trente ans plus tard, il y a de multiples façons de se rencontrer soi-mĂȘme. Et de se voir. Je me suis senti un peu malade Ă  la suite de ma rencontre avec cet aĂźnĂ©. Je me suis mĂȘme demandĂ© si, Ă  son contact chargĂ©, j’avais attrapĂ© le Covid. Non pour son Ă©tat de santĂ©. Mais pour son Ă©tat d’esprit.

 

La mort de Jacob Desvarieux ne m’a pas mis dans cet Ă©tat d’esprit. Pour Billie Eilish, on verra selon la façon dont elle dĂ©cĂšdera. J’espĂšre bien-sĂ»r que ce sera le plus tard possible pour elle et que ce sera une assez belle mort.

Une mort Ă  la Amy Winehouse me catastrophe. J’ai l’impression d’ĂȘtre le tĂ©moin privilĂ©giĂ© et impuissant d’une dĂ©tresse en direct. Et je n’aime pas ça !  

Pour nous avoir aussi Ă©vitĂ© ça, Ă  nouveau un trĂšs grand merci Ă  Jacob Desvarieux. Comme on dit en CrĂ©ole, MĂ©ci On Pil !

 

Franck Unimon, ce vendredi 13 aout 2021

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Corona Circus

Immunité et amnésie collective

 

Photo prise à Paris, vraisemblablement prÚs de la Place Monge. Photo©Franck.Unimon

Immunité et amnésie collective

 

Pour un retour Ă  une vie normale

 

Cette vidĂ©o est repassĂ©e plusieurs fois. Comme bien d’autres passagers, je n’y ai pas fait plus attention que ça. DĂ©sormais, dans les trains de banlieue, il y a aussi des Ă©crans. On y voit des images nous prĂ©sentant, sans le son, les attraits de la rĂ©gion d’üle de France et certains Ă©vĂ©nements.

 

On y voyait une jeune femme brune plutĂŽt charmante, seule, portant un maillot et, sur son visage, les couleurs de l’équipe française de Football. Elle nous souriait devant ce qui pouvait faire penser au Stade de France d’avant un match. Cela se terminait par une phrase qui disait Ă  peu prĂšs :

 

« Pour revenir Ă  une vie normale, et recommencer Ă  tous nous amuser, vaccinons-nous contre le Covid Â».

C’est Ă  ce “clip” que je fais allusion. Il est Ă  nouveau rediffusĂ© depuis quelques jours. Mais je ne saurai dire quand. J’ai pris cette photo ce mercredi 1er septembre 2021 prĂšs de la ligne 14. Le clip est bien-sĂ»r rediffusĂ© dans d’autres lieux de transports. Sans doute comme un rappel avant le 15 septembre 2021. Date Ă  partir de laquelle toute personne non vaccinĂ©e ou non en cours de vaccination anti-covid risque d’ĂȘtre licenciĂ©e, mise Ă  pied, suspendue…. Le clip se termine avec la phrase : ” A chaque vaccination, c’est la vie qui reprend”. Phrase que j’avais oubliĂ©e mais dont j’avais retenu le message Ă  ma façon comme on peut le lire dans cet article.

 

Il y avait le mĂȘme genre de clip pour les festivals de musique. Avec le mĂȘme message. C’était le dĂ©but de l’étĂ©, peut-ĂȘtre avant le dĂ©but des grandes vacances. A cette pĂ©riode de l’annĂ©e, oĂč, traditionnellement et souvent, en France, on aspire particuliĂšrement Ă  vivre Ă  l’extĂ©rieur.

 

Maintenant que j’y repense, Ă  peu prĂšs deux mois plus tard, cette campagne d’information et de prĂ©vention Ă©tait un slogan. Le public incitĂ© Ă  la vaccination anti-Covid Ă©tait peut-ĂȘtre fĂ©minin mais surtout jeune adulte. Dans une moyenne d’ñge comprise entre celui oĂč l’on est autorisĂ© Ă  se rendre seul Ă  un stade de foot jusqu’à, disons, 25 ou 26 ans. Cette tranche de la vie oĂč l’on est supposĂ© insouciant, sans enfants et sans charges particuliĂšres. OĂč l’on aime circuler, sortir et consommer et oĂč l’on a, en principe, la possibilitĂ© de le faire.

PrÚs des Colonnes de Burren. Photo©Franck.Unimon

 

C’est peut-ĂȘtre aussi pour ces raisons que je ne m’étais pas du tout senti concernĂ©. Cette Ă©poque de la vie Ă©tait pour moi plutĂŽt rĂ©volue. Si j’avais Ă©tĂ© une femme charmante et jeune Ă  une Ă©poque, je ne l’étais plus depuis des annĂ©es. Cela fait des annĂ©es que plus personne ne m’a invitĂ© au restaurant ou proposĂ© d’aller danser en boite de nuit.

 

Il y avait aussi des annĂ©es que je n’étais allĂ© dans un stade de foot. Et, en plus, je n’étais pas du tout pressĂ© de me faire vacciner contre le Covid.

 

Notre Dame

 

Il y avait eu,  aussi, finalement, Ă  peu prĂšs le mĂȘme genre de publicitĂ© pour la cathĂ©drale Notre Dame de Paris. C’était aprĂšs son incendie- en avril 2019- qui avait beaucoup Ă©mu. Et qui avait Ă©tĂ© trĂšs mĂ©diatisĂ© de par le monde quelques annĂ©es plus tĂŽt. Pour des appels Ă  dons afin de permettre sa reconstruction.

 

 

Je me rappelle d’une affiche sur un mur avant d’aller prendre la ligne 12 du mĂ©tro en partant pour le travail. Cette grande affiche montrait un jeune d’une vingtaine d’annĂ©es avec cette phrase :

 

« Parce-que c’est Notre Dame Â».

 

LĂ  aussi, je ne m’étais pas senti concernĂ©. Je n’avais jamais fait que passer devant Notre Dame et je ne me rappelle pas y ĂȘtre entrĂ© une seule fois avant son incendie.

 

Depuis le 12 juillet 2021, je le rĂ©pĂšte comme je bute contre cette information, la campagne de vaccination contre le Covid m’a assez brutalement rattrapĂ©. Les mesures dĂ©cidĂ©es par le gouvernement ont organisĂ© une sorte de parcours flĂ©chĂ© directif vers les centres de vaccination anti-Covid et l’acceptation du passe sanitaire numĂ©risĂ©. Le passe sanitaire n’est autre que la version amĂ©liorĂ©e,  quelque peu totalitaire, de ces attestations de dĂ©placement provisoire que nous devions remplir Ă  chaque fois, sur un formulaire papier. Lorsque nous sortions de chez nous Ă  partir du premier confinement de mars 2020. L’annĂ©e derniĂšre. Ce genre d’attestation Ă  remplir et Ă  prĂ©senter Ă©tait une PremiĂšre, pour nous, Français, nĂ©s aprĂšs la Seconde Guerre Mondiale. Pour nous, de telles mesures de restriction faisaient plutĂŽt partie des manuels d’histoire.

J’avais gardĂ© quelques uns de ces formulaires. Je crois qu’il s’agit de la premiĂšre version papier ou de l’une des toutes premiĂšres versions papier d’attestation de dĂ©placement que nous avions Ă  remplir lors du premier confinement en mars 2020. L’annĂ©e derniĂšre, j’en avais souvent plusieurs exemplaires vierges sur moi.

 

 

 

Avec le passe sanitaire, nous avons franchi d’un seul coup plusieurs paliers supplĂ©mentaires dans l’auto-surveillance et l’autojustification de nos dĂ©placements. Nous avons acceptĂ© un peu plus ou un peu mieux de nous retrouver derriĂšre certains verrous.

 

 

Seuil psychologique

 

 

Cette obligation indirecte, mais concrĂšte, de la vaccination anti-Covid et de l’acceptation du passe sanitaire m’a amenĂ© devant mon seuil psychologique. Nous avons tous un seuil psychologique Ă  partir duquel, chacune et chacun, nous devenons plus ou moins sidĂ©rĂ©s, nous fuyons, nous rĂ©sistons, nous piĂ©tinons ou remettons en cause ce que l’on nous propose ou ce que l’on tente de nous imposer.

 

DerniĂšrement, j’ai Ă©crit que mon refus pour l’instant de la vaccination anti-Covid et du passe sanitaire obligatoire (puisque les deux ont Ă©tĂ© menottĂ©s ensemble par notre gouvernement) a fait de moi l’équivalent d’un aborigĂšne exclu de la civilisation des spectateurs et des consommateurs dont je faisais partie jusque lĂ . ( Paris sans passe : Atterrissage ethnique), un article Ă©crit ce 11 aout 2021.

Gare St Lazare. Photo©Franck.Unimon

 

 

Avoir mauvaise conscience

 

 

Je vais me reprendre Ă  ce sujet. J’ai pu avoir mauvaise conscience lors du mouvement des gilets jaunes. Leurs manifestations persistantes, chaque week-end, ont pu durer plusieurs mois sans que je ne participe Ă  aucune d’entre-elles. Alors que je les approuvais. MĂȘme si, par ailleurs, certaines personnalitĂ©s et certains agissements ou dĂ©rapages m’ont laissĂ© perplexe. Et, Il avait fallu qu’en sortant du travail, je tombe fortuitement sur celle qui allait ĂȘtre- Ă  ce jour- la derniĂšre manifestation des gilets jaunes avant le premier confinement de mars 2020 pour que j’assiste un peu, malgrĂ© moi, en  direct, Ă  l’Ă©vĂ©nement. Et pour y participer un peu Ă  ma façon en restant quelques minutes et en prenant des photos.

Sans cette circonstance imprĂ©vue, j’avais toujours eu une bonne ou une mauvaise raison pour me tenir Ă©loignĂ© du mouvement des gilets jaunes. Ma mĂ©fiance et ma rĂ©serve envers les mouvements de foule, et pour la façon dont ils peuvent ĂȘtre rĂ©cupĂ©rĂ©s et utilisĂ©s. Pour ne parler que de ça. Raisons pour lesquelles, par exemple, je n’avais pas participĂ© en janvier 2015 Ă  la marche Je suis Charlie aprĂšs les attentats. Je savais qu’il y aurait beaucoup de monde Ă  cette marche. Et puis, pour moi, « ĂȘtre un Charlie Â» devait ĂȘtre un acte durable plutĂŽt qu’un acte « cutanĂ© Â» : une rĂ©action Ă©pidermique Ă  trĂšs court terme non suivie d’un engagement sur la durĂ©e.

MĂȘme si, bien-sĂ»r, cette manifestation spontanĂ©e aprĂšs les attentats Ă©tait nĂ©cessaire et qu’elle Ă©tait aussi constituĂ©e de personnes qui sont restĂ©es des « Charlie Â» depuis.

Pour moi, “ĂȘtre un Charlie” a consistĂ©, aprĂšs les attentats, plutĂŽt qu’Ă  le dire et Ă  le montrer lors de cette marche d’aprĂšs les attentats, Ă  me mettre Ă  acheter chaque semaine, voire Ă  m’abonner  Ă  cet hebdomadaire. Et, six ans plus tard,  alors mĂȘme que depuis plusieurs semaines, Charlie raille et caricature lourdement les personnes comme moi qui se refusent Ă  la vaccination anti-Covid, je n’en continue pas moins de l’acheter et de le parcourir. MĂȘme si sur certains sujets auparavant, j’avais pu ĂȘtre en dĂ©saccord avec quelques uns de leurs points de vue.

Manifestation des gilets jaunes, ce 14 mars 2020, quelques jours avant le premier confinement de mars 2020. Photo©Franck.Unimon

 

Mais envers le mouvement des gilets jaunes et d’autres mouvements sociaux qui les ont prĂ©cĂ©dĂ©s, et par lesquels j’ai pu, aurais pu ou aurais dĂ» me sentir concernĂ©, j’étais restĂ© spectateur. J’avais perpĂ©tuĂ© ma vie de spectateur, de commentateur et de consommateur. Alors que ces personnes qui manifestaient, gilets jaunes ou autres, elles, Ă©taient alors arrivĂ©es Ă  ce seuil psychologique que je crois connaitre actuellement devant cette vaccination anti-Covid et ce passe sanitaire.

 

 

 

Manifestation des gilets jaunes, ce 14 mars 2020, quelques jours avant le premier confinement de mars 2020. Photo©Franck.Unimon

 

 

L’ĂȘtre humain est fait de paradoxes

L’attestation de dĂ©placement dĂ©rogatoire dans sa version papier telle qu’elle a pu Ă©voluer ensuite. En bas Ă  droite, on peut remarquer l’invitation Ă  tĂ©lĂ©charger un QR Code. On en Ă©tait, alors, encore, Ă  une situation optionnelle. J’ai oubliĂ© quand ce genre de formulaire a commencĂ© Ă  apparaitre. Probablement aprĂšs juin 2020.

 

Photo prise en novembre 2020 Ă  la gare de Lyon. Mais, si je me rappelle bien, ce genre d’invitation sous cette forme, Ă  tĂ©lĂ©charger l’application Tousanti-Covid sur notre tĂ©lĂ©phone portable, existait dĂ©ja plusieurs mois auparavant dans d’autres gares parisiennes.

 

 

On peut toutefois ĂȘtre spectateur, consommateur et  militant, rĂ©sistant ou engagĂ©. C’est aussi lĂ  oĂč je tiens Ă  me reprendre. L’ĂȘtre humain est fait de tant de paradoxes. Des paradoxes que l’informatisation et la modĂ©lisation de nos vies cherchent et parviennent assez Ă  refouler jusqu’au moment oĂč survient ce seuil psychologique, cette limite qui est notre vĂ©ritable identitĂ©.

 

Au Jardin des Tuileries. Photo©Franck.Unimon

 

 

Par exemple, je crois que parmi les personnes aujourd’hui pro-vaccin anti Covid, il s’en trouve un certain nombre qui, avant l’arrivĂ©e des vaccins anti-Covid, avaient pris quelques libertĂ©s avec les mesures restrictives dĂ©cidĂ©es par le gouvernement. Que ce soit pour le nombre de kilomĂštres autorisĂ© hors de chez soi. Pour les motifs de dĂ©placement hors de chez soi. Pour le fait de se retrouver en compagnie de plus de personnes qu’il ne l’était autorisĂ© par le gouvernement pour lutter contre la pandĂ©mie du Covid. Mais aussi pour le respect de certaines rĂšgles de distanciation sociale. Il doit bien y avoir un certain nombre de personnes, qui, bien avant leur vaccination contre le Covid, avaient dĂ©ja pris dans leurs bras des proches ou des collĂšgues ; ou s’étaient embrassĂ©es- ou plus- en dĂ©pit des mesures prĂ©conisĂ©es de distanciation sociale. Et, c’est aussi parmi ces personnes aujourd’hui que l’on trouvera les plus grands critiques envers les rĂ©ticents Ă  la vaccination anti-Covid, aujourd’hui perçus comme celles et ceux qui emmerdent tout le monde et qui retardent le retour Ă  la « vie normale Â».

 

Pour l’instant, je n’ai pas retrouvĂ© la date de cette photo. Mais j’opterais pour dire que je l’ai prise l’annĂ©e derniĂšre, en 2020. Entre juin et dĂ©cembre 2020.

 

Immunité collective

L’annĂ©e derniĂšre, entre mars 2020 et juin 2020, je croyais que la pandĂ©mie du Covid serait passagĂšre. Je croyais Ă  un retour Ă  “notre vie normale”. MĂȘme si je m’attendais Ă  ce que, de plus en plus, les masques anti-Covid ou de “protection respiratoire”, fassent dĂ©sormais partie de notre culture. MĂȘme si je pensais, paradoxalement, que la pandĂ©mie du Covid allait contribuer Ă  changer notre monde.

HĂ© bien, maintenant, je vais Ă©crire que, mĂȘme si nous parvenons Ă  une immunitĂ© collective, telle qu’elle nous est louĂ©e afin de permettre la sortie de cette pandĂ©mie, je ne crois pas Ă  notre retour «  Ă  la vie normale Â». A notre vie « d’avant Â». Je n’y crois pas. Ce n’est pas pour cette raison, au dĂ©part, que je rechigne Ă  me faire vacciner contre le Covid. Mais, pendant que j’aborde ce sujet de la « responsabilitĂ© Â» supposĂ©e des anti-vaccins dans la longĂ©vitĂ© de la pandĂ©mie, je me dis qu’il faut aussi aller au delĂ  et aborder ce sujet au passage.

 

 

 

TrĂšs certainement que beaucoup de personnes, en vacances ou non, mais vaccinĂ©es, croient encore qu’une fois que tout le monde sera vaccinĂ© contre le Covid, que notre vie deviendra ou redeviendra meilleure. Moi, je trouve que les Ă©vĂ©nements nous dĂ©montrent dĂ©ja le contraire. Par exemple, je n’oublie pas que les manifestations des gilets jaunes qui avaient lieu chaque semaine depuis des mois, ont dĂ» s’arrĂȘter avec le premier confinement dĂ©cidĂ© par notre gouvernement et dĂ©butĂ© mi-mars 2020 en raison de la pandĂ©mie du Covid. Cette coĂŻncidence, entre la prioritĂ© sanitaire, indiscutable, donnĂ©e Ă  la pandĂ©mie Covid, et, en mĂȘme temps, l’interdiction des rassemblements et des manifestations des gilets jaunes m’a toujours dĂ©rangĂ©. Car cette coĂŻncidence a aussi Ă©tĂ© bien commode, trop commode, pour permettre Ă  notre gouvernement de se dĂ©barrasser facilement du mouvement des gilets jaunes.

Depuis, le gouvernement a aussi obtenu du plus grand nombre dans l’hexagone, volontaire ou contraint, de se faire vacciner contre le Covid. Et d’accepter le passe sanitaire. A partir de lĂ , le gouvernement actuel et celui qui lui succĂšdera (car j’ai beaucoup de mal Ă  imaginer que le PrĂ©sident Macron puisse ĂȘtre rĂ©Ă©lu/ et je ne vois pas « la fille de son pĂšre Â» se faire Ă©lire. Je crois qu’elle a Ă©puisĂ© tous ses jokers. Mais, bien entendu, je peux me tromper)  n’aura de cesse de nous faire admettre encore plus de contraintes. Elle est lĂ , notre amnĂ©sie collective. Dans le fait d’oublier de plus en plus tout ce que nous avons acceptĂ© depuis des annĂ©es et que nous aurions dĂ» refuser. Bien avant la pandĂ©mie du Covid. Laquelle pandĂ©mie n’a fait que montrer davantage comme nous pouvons ĂȘtre dociles. AprĂšs ça, comme dans un restaurant ou dans un magasin, un gouvernement (pas seulement celui de Macron) mais aussi des entreprises ou toutes sortes d’idĂ©ologues plus ou moins bienveillants n’ont plus qu’à consulter le menu,  sonder, passer commande et se ( faire) servir.

Pour cet article, j’ai d’abord utilisĂ© des photos que j’avais prises entre mars et juin 2020. Et d’autres que j’avais prises par la suite. Principalement, entre juin et dĂ©cembre 2020. On pourra retrouver quelques unes de ces photos dans des diaporamas-panoramas “rangĂ©s” dans la catĂ©gorie Corona Circus de ce blog. Avec un premier diaporama-panorama qui “couvre” la pĂ©riode Mars-avril 2020 ( Panorama 18 mars-19 avril 2020 ). On pourra lire mes premiĂšres impressions concernant la pandĂ©mie du Covid avant qu’elle ne soit officialisĂ©e en mars 2020 ici Coronavirus, un article que j’avais Ă©crit le 24 fĂ©vrier 2020. 

 

 

Cet article Ă©crit en plein mois d’aout peut faire l’effet d’un trĂšs grand coup de fouet mortifĂšre. Ce n’est pourtant pas son but. Soit un paradoxe de plus, sans aucun doute. Comme rĂ©digĂ© plus haut, on peut ĂȘtre consommateur, spectateur et, par ailleurs, en certaines circonstances et Ă  d’autres moments, ĂȘtre militant, rĂ©sistant, engagĂ©. Cela peut ĂȘtre par le biais de l’humour, de la poĂ©sie, de l’art en gĂ©nĂ©ral. Ou dans le simple fait de porter et de prĂȘter attention Ă  quelqu’un d’autre que soi Ă  un moment oĂč elle ou il en a besoin ou peut en avoir en besoin. Il existe bien des façons diffĂ©rentes- et persistantes- de faire primer sa conscience et son humanitĂ© avant tout. Y compris malgrĂ© soi. 

 

Je viens de m’apercevoir que cet article est le 300 Ăšme que j’ai Ă©crit depuis la crĂ©ation de mon blog, il y a deux ou trois ans. Je me devais donc de particuliĂšrement le soigner. C’est donc pour cette raison qu’entre sa premiĂšre version cette nuit, vers une heure du matin, et ce matin un peu avant midi, je l’ai un peu complĂ©tĂ©e et modifiĂ©e. 

Franck Unimon, ce jeudi 12 aout 2021.