La peur a changé de camp, un livre de Frédéric Ploquin paru en 2018.
« Ceux qui disent quâils nâont pas peur sont des menteurs » a affirmĂ© lâancien boxeur français, Fabrice BĂ©nichou, ancien champion du monde. Ces propos sont dans le documentaire Noble Art rĂ©alisĂ© en 2004 par Pascal Deux.
La vie de Fabrice Bénichou a aussi été faite de faillites personnelles et économiques tranchées par des dépressions, des tentatives de suicides, des hospitalisations, des addictions et par une interpellation par les forces de police.
Le film corĂ©en Le Gangster, le flic et lâassassin du rĂ©alisateur Kim Jee-Woon, en salles depuis ce 14 aout, nous montre trois mĂąles dominants, un Mafieux, un flic intrĂ©pide et un tueur en sĂ©rie dont la sĂ©crĂ©tion toute personnelle de testostĂ©rone et dâadrĂ©naline transforme diabĂšte, coma, blessures Ă lâarme blanche, fractures, hĂ©morragies, fatigue, stress, empathie et peur en eau minĂ©rale facile Ă avaler et Ă Ă©liminer ensuite par les voies naturelles.
Dans Le Canard EnchaĂźnĂ© de ce mercredi 21 aout 2019, en premiĂšre page, on peut lire lâarticle Des chirurgiens dissĂšquent le LBD, qui relate la gravitĂ© des blessures causĂ©es par lâusage des balles de dĂ©fense (LBD) par les policiers :
« Fractures graves » ; « Les mĂȘmes blessures que lâon retrouve chez des individus qui se font frapper Ă coups de batte de base-ball » ; « Lâimpact est si fort quâil est comparable au coup de poing dâun boxeur professionnel ».
Des manifestants participant au mouvement des gilets jaunes ont été blessés par ces balles de défense.
Lâauteur de lâarticle, S. Chalandon, grand reporter, Ă©crivain, a entre-autres rĂ©alisĂ© des reportages dans des zones de « conflit » en Irlande du Nord ainsi quâau Liban. Il est citĂ© dans le livre Sans Blessures apparentes ( Sans Blessures Apparentes ) ainsi que dans le documentaire du mĂȘme nom du grand reporter Jean-Paul Mari oĂč celui-ci parle du stress post-traumatique longtemps cachĂ© parmi les grands reporters. Parce-que parler de sa douleur morale et de ses cauchemars en revenant dâun reportage oĂč lâon avait Ă©tĂ© le tĂ©moin de scĂšnes de guerre, ça faisait « chochotte » :
On passait pour une faible ou un faible.
Dans son livre hautement détaillé La peur a changé de camp, Frédéric Ploquin, également grand reporter, parle de la peur qui, désormais, et de plus en plus, menotte les femmes et les hommes policiers à leur fonction. En particulier dans les zones fortement urbanisées.
En lisant La peur a changĂ© de camp, jâai trĂšs vite perçu le trĂšs grand professionnalisme de FrĂ©dĂ©ric Ploquin. Professionnalisme que jâavais dĂ©ja un peu dĂ©couvert Ă la faveur dâarticles lus Ă propos de certains de ses documentaires sur le grand banditisme. Le but de mon article est dâessayer- en assez peu de pages- de me montrer Ă peu prĂšs aussi nuancĂ© et complet quâa pu lâĂȘtre son ouvrage. Tout en le rendant un peu personnel. Ce qui mâa amenĂ© Ă parler de lâancien champion de boxe Fabrice BĂ©nichou, du film corĂ©en Le Gangster, le flic et lâassassin, de lâarticle de Le Canard EnchaĂźnĂ© sur lequel je suis tombĂ© et, oĂč, cette fois-ci, S. Chalandon parle du sujet prĂ©occupant de lâusage des balles de dĂ©fense.
Lâarticle de S.Ch, cette fois-ci, confirme ce que nous savons et ce que FrĂ©dĂ©ric Ploquin aborde Ă©galement dans son livre :
La police a mauvaise presse. Et les mĂ©dias dĂ©noncent rĂ©guliĂšrement des exemples de bavures policiĂšres ou des manquements de la police aux droits Ă©lĂ©mentaires des citoyens : le respect, lâattention Ă autruiâŠ.
S. Chalandon est aussi un trĂšs grand professionnel. Jâaime la plupart de ses articles dans Le Canard EnchainĂ©. Mon but nâest donc ni de nier la gravitĂ© du contenu de son article et encore moins dâorganiser dans ma tĂȘte ou ailleurs un combat de boxe foireux entre son article de quelques lignes et les plus de trois cents pages reprĂ©sentatives de plusieurs mois dâenquĂȘte de lâouvrage de FrĂ©dĂ©ric Ploquin.
Lâarticle de S. Chalandon rĂ©sume oĂč nous en sommes de plus en plus en France, en tant que citoyens , avec la police, chaque fois que nous manifestons ou exprimons notre mĂ©contentement envers un gouvernement ou  une hiĂ©rarchie dans la rue et en nombre.
Le livre de Ploquin plonge , lui,  directement dans la société française et dans son évolution ainsi que dans celle du monde politique depuis environ ces trente derniÚres années.
Si lâon dĂ©tourne la phrase de lâancien boxeur Fabrice BĂ©nichou, on peut affirmer que la peur nâa pas de camp. Tout le monde a peur Ă un moment ou Ă un autre dans sa vie personnelle ou professionnelle. Et les personnes qui vont affirmer le contraire mentent ou se mentent Ă elles-mĂȘmes. MĂȘme si cela dure quelques secondes. Dire que lâon nâa jamais peur, câest comme dire que lâon est immortel. Tout le monde va mourir un jour. Ce qui nous diffĂ©rencie les uns des autres, câest ce moment oĂč la peur va nous saisir. Et notre façon de rĂ©agir Ă son influence voire Ă son « charisme ». Nous pouvons ĂȘtre paralysĂ©s et subir. Ou, au contraire, ĂȘtre « catapultĂ©s » par notre adrĂ©naline, nos rĂ©flexes, notre instinct de survie ou notre sens du devoir. Osciller entre le statut de victime, de survivant, de hĂ©rosâŠou dâagresseur.
La police est enfermĂ©e dans lâimage et le tiroir de lâagresseur. Ploquin fait remonter des faits qui accrĂ©ditent cette vision de la police.
Et ça commence dĂ©ja entre policiers. Si aujourdâhui, environ un quart des effectifs policiers est de sexe fĂ©minin, la misogynie et la suspicion, au sein de la police, quant aux compĂ©tences rĂ©elles, sur le terrain, des femmes policiers sont encore actives. Mais dans un mĂ©tier oĂč la force physique et frontale revient comme un Ă©lĂ©ment indispensable, cela peut aussi , dans certaines situations, se comprendre.
Dâautres fois, la femme flic peut ĂȘtre perçue par ses collĂšgues masculins comme un expĂ©dient sexuel. Il lui faut donc aussi savoir se faire respecter de ses collĂšgues « Ne perds pas ton temps ! » comme en tĂ©moigne une des femmes flics.
Etre Arabe et musulman peut ĂȘtre un atout quand on est flic et que lâon veut se faire passer pour un consommateur et infiltrer un trafic de drogue car les clichĂ©s persistent aussi du cĂŽtĂ© des dĂ©linquants :
Car Etre Arabe et flic, « ça ne matche pas » ( ça ne colle pas). Encore faut-il que les collĂšgues flics (blancs) avec lesquels on travaille pour la mĂȘme maison ( la police) et pour les mĂȘmes raisons ( la Loi, la Justice)  sachent sây retrouver entre les dĂ©linquants noirs et arabes, une minoritĂ©. Et tous les autres noirs et arabes, citoyens honnĂȘtes et paisibles, la majoritĂ©.
« Encore des Arabes ! » a conclu un des policiers blancs en sâadressant Ă une de ses collĂšgues policiĂšres, dâorigine arabe, aprĂšs les attentats de Mohammed Merah. Comme si celui-ci Ă©tait son frĂšre ou son cousin.
« Quâest-ce quâil yâa comme Bougnoules ! » dit un autre policier dans la voiture de fonction alors que lui et ses collĂšgues flics circulent, Ă lâaffĂ»t. Sauf que lâĂ©quipe dans le vĂ©hicule est constituĂ©e de deux flics blancs, dâun flic antillais et dâun flic arabe. Lequel flic antillais, quelques minutes plus tĂŽt, a aussi eu droit Ă une nouvelle ration de pop-corn raciste le concernant en observant la faune alentour. Ces rĂ©actions racistes de certains flics, devenues instinctives, sont tellement caricaturales quâen les lisant jâai eu envie de rire. Comme jâavais pu d’abord rire devant le film Dupont Lajoie (1974) dâYves Boisset en dĂ©couvrant ce que pouvait ĂȘtre une parole raciste dĂ©complexĂ©e (« Ce sont des Arabes, ils nous envahissent ! »). Le meurtre qui arrive rend ensuite le film beaucoup moins drĂŽle. Et, si j’Ă©tais flic,  jâaurais sĂ»rement peu rigolĂ© si, jour aprĂšs jour, patrouille aprĂšs patrouille, jâavais entendu tel collĂšgue policier     ( peu importe sa couleur de peau, son sexe, ses croyances religieuses ou ses origines sociales et culturelles ou son grade ) vider sa bile en matiĂšre dâanthropologie raciste sur les Noirs, les Antillais et les Africains et mâinfliger quasi-quotidiennement ce quâil faut bien voir comme du harcĂšlement.
Ce mĂȘme « harcĂšlement » sans doute mais sous une autre forme dont, sur la voie publique, ensuite, certaines personnes -dĂ©linquantes ou innocentes- sâestiment victimes.
Et je nâai pas du tout rigolĂ© en voyant le film Un Français (2014) rĂ©alisĂ© par DiastĂšme.
Quarante ans sĂ©parent ces deux trĂšs bons films. Et chacun parle du racisme en France dâune façon diffĂ©rente. Dans le film de Boisset, on est plutĂŽt dans le racisme beauf de lâaprĂšs guerre dâIndochine et dâAlgĂ©rie. Dans le souvenir transi et palpitant de la « Grandeur » (splendeur ?) coloniale de la France. Dans le film de Diasteme, le racisme, sĂ»rement pour partie lâhĂ©ritier du prĂ©cĂ©dent, sâest structurĂ© sous la forme dâune milice qui peut ĂȘtre autonome et vaporiser la peur et le ressentiment dans les quartiers immigrĂ©s apparus depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale.
Dans le film de Diasteme, le racisme se politise, devient agile, et peut agir en toute lĂ©galitĂ© donc en toute impunitĂ©. Ploquin ne va pas jusquâĂ aborder ces sujets de cette maniĂšre tant son enquĂȘte est vaste et a nĂ©cessitĂ©- dĂ©jĂ - beaucoup de rencontres et de travail sur le terrain. Aussi, ce matin, en relisant mon article, câest moi qui complĂšte avec cette petite touche cinĂ©matographique. Un film comme Les MisĂ©rables de Ladjy Ly , primĂ© Ă Cannes cette annĂ©e et bientĂŽt en salles, apportera sans aucun doute, aprĂšs et avant d’autres films,  un autre regard complĂ©mentaire et documentĂ©  sur un certain type de rapports entre la police et certains quartiers de banlieue. Et Ă travers eux, sur certains aspects de la sociĂ©tĂ© française d’aujourd’hui. Ou l’inverse.
Concernant lâĂ©lectorat dâextrĂȘme droite dans la police, dans La Peur a changĂ© de camp, il yâa plusieurs versions. Des flics sont pro-extrĂȘme droite. Ce quâils voient et vivent de maniĂšre rĂ©pĂ©tĂ©e dans certains quartiers oĂč les rapports de force sont devenus la norme les acculturent Ă leurs idĂ©es racistes de dĂ©part ou dâarrivĂ©e. Et pour eux, le « vivre ensemble » est une supercherie compte-tenu de leurs expĂ©riences dans les quartiers sensibles oĂč ils interviennent. Dâautant quâen dehors des heures de travail, on reste plutĂŽt entre flics. Ou en famille plutĂŽt tranquillement chez soi. A essayer de se remettre de la violence du mĂ©tier. Car malgrĂ© la carapace que l’on se crĂ©e, peu Ă peu, certaines expĂ©riences traumatiques et impossibles Ă raconter Ă son supĂ©rieur, au “quidam” voire Ă sa famille ou Ă son conjoint ou Ă sa conjointe, s’incrustent dans les pensĂ©es et les rĂȘves ( des cauchemars).  Voir ou revoir Mel Gibson ou Sylvester Stallone en traumatisĂ©s de guerre dans les films L’Arme Fatale ou Rambo ou des films ou des sĂ©ries policiĂšres rĂ©centes telles True DĂ©tective, ça peut encore ĂȘtre trĂšs tĂ©lĂ©gĂ©nique et donner du plaisir au spectateur. A vivre,  d’un point de vue fantasmatique et physique, c’est une toute autre expĂ©rience. Et elle peut ĂȘtre trĂšs dĂ©sagrĂ©able jusqu’Ă l’insupportable.
Selon La Peur a changĂ© de camp, dâautres policiers ont votĂ© pour lâExtrĂȘme-Droite par dĂ©pit et colĂšre.
Ps :  j’ai Ă©tĂ© Ă©tonnĂ© d’apprendre que de plus en plus d’infirmiĂšres et d’infirmiers votaient pour l’ExtrĂȘme droite. Si j’accepte l’idĂ©e que l’on peut, malheureusement, ĂȘtre infirmiĂšre ou infirmier et ĂȘtre raciste ( l’Allemagne nazie nous a bien tristement “enseignĂ©” que l’on pouvait ĂȘtre mĂ©decin et nazi ), je crois aussi Ă la possibilitĂ© d’un vote de colĂšre, de dĂ©ception et de mĂ©contentement qui peut s’exprimer en votant pour l’ExtrĂȘme Droite.
Et, lâExtrĂȘme droite serait le seul parti politique qui soutient officiellement la police et saurait vĂ©ritablement en quoi consiste, aujourdâhui, le travail dâun flic en France. Les discours de Marine Le Pen concernant la police seraient Ă©crits par un flic au vu de la bonne connaissance du sujet et des problĂšmes bien des fois rencontrĂ©s sur le terrain par les femmes et les hommes policiers.
Il est nĂ©anmoins un certain nombre de flics antifascistes. Mais qui obĂ©issent aux ordres. Pourtant dans la police, il yâa pire quâĂȘtre Arabe, Noir, femme et musulman :
Etre flic et homo. Ăa a du mal Ă passer. Donc, si la police, dans la diversitĂ© de ses rangs, se fait aussi le reflet de la sociĂ©tĂ© française, lâintĂ©gration et les promotions sâobtiennent beaucoup plus difficilement pour certaines et certains. Et il faut aussi se taire sur son homosexualitĂ© et savoir la cacher quand on est flic.
Parmi les autres causes de dĂ©sagrĂ©ments internes Ă la profession policiĂšre, Il yâa aussi… les vols entre collĂšgues dans le vestiaire des flics. Argent, VTT, parfumâŠ.
Il est aussi quelques flics ripoux : on informe ses copains cambrioleurs que certaines maisons seront vides de leurs propriĂ©taires durant les vacances. On vole les codes dâaccĂšs Ă certains fichiers sensibles concernant un trafic de drogue.
Il yâa des flics rugueux. Et Ă une Ă©poque, il pouvait ĂȘtre courant de donner une baffe « thĂ©rapeutique » Ă quelquâun qui se rebiffait et parlait mal alors quâon lâinterpelait. Ou parce quâil sâĂ©tait abstenu de signaler quâil portait sur lui une lame ou des stupĂ©fiants lors dâun contrĂŽle.
Il yâa des bavures policiĂšres.
Au total, « Sur les vingt trois mille policiers que comptent Paris et la petite couronne, une centaine passe ainsi chaque annĂ©e au conseil de discipline, dont un tiers pour des faits de corruption ou de consommation de stupĂ©fiants (pour dĂ©tecter la « mauvaise graine », lâadministration a dĂ©veloppĂ© ces derniĂšres annĂ©es des tests inopinĂ©s dans les Ă©coles) les autres pour conduite en Ă©tat dâivresse ou violences conjugales. Les vrais bandits restent heureusement assez rares dans la police mais ces cas isolĂ©s font dâautant plus mal que les mĂ©dias , fans de ripoux, ces personnages souvent rocambolesques qui fascinent tant ils osent tout, leur font une publicitĂ© inversement proportionnelle Ă celle qui entoure les petits vols au quotidien ».
Il est aussi des fois oĂč des policiers interviennent suite Ă un appel et tombent dans un guet-apens prĂ©parĂ©. Il est dâautres fois oĂč ils se retrouvent en infĂ©rioritĂ© numĂ©rique en terrain hostile alors quâils font leur travail : Poursuivre jusquâĂ chez lui un dĂ©linquant qui a arrachĂ© une tablette numĂ©rique Ă son propriĂ©taire aprĂšs lâavoir tabassĂ©. Et se retrouver, Ă trois ou quatre flics dans lâappartement de lâauteur de lâagression. Alors que de lâautre cĂŽtĂ© de la porte, un « gros noir » se prĂ©sente et dit :
« Ouvre-moi la porte, jâhabite ici ! » DerriĂšre cet habitant qui veut “simplement” s’en retourner dans son logis, dans lâimmeuble, « trente lutins, torse nu » attendent.
Au sein de la police, sâil yâa un problĂšme, il vaut mieux fermer sa gueule afin dâĂȘtre bien vu. Et, si possible, rĂ©gler ça proprement et discrĂštement. Ou digĂ©rer le tout. Le fait de devoir justifier pratiquement chaque action. Le temps allongĂ© pour sâacquitter de la paperasse. Les contrariĂ©tĂ©s variĂ©es, personnelles et professionnelles, ainsi que les contradictions :
Si la gendarmerie, la rivale, a un type de commandement unifié, la police, elle, compte plusieurs directions et plusieurs services et presque autant de motifs de défiance et de concurrence.
Pourtant, il faut bien quâĂ un moment ou Ă un autre, les flics parlent et se parlent entre eux. Ils ont trĂšs peu la possibilitĂ© de sâĂ©pancher devant des psychologues ou des oreilles discrĂštes, disponibles et bienveillantes :
« Notre quotidien, ce nâest pas de sâamuser Ă frapper les gens, câest de ramasser la cervelle dâun jeune percutĂ© par une voiture et dâembarquer du pochtron » rappelle utilement une gardienne de la paix. Qui peut mieux comprendre ce que tu vis quâun autre flic ? ».
« Alors que les militaires disposent de 15 800 personnels de santĂ© pour 140 000 personnes, les 150 000 policiers nâont Ă leur disposition que 284 mĂ©decins et infirmiers ».
Les commissaires à « lâancienne » qui allaient boire un coup avec leur Ă©quipe et prenaient le temps de sâenquĂ©rir de la vie personnelle de leurs troupes sont de plus en plus rares. Lâobsession du chiffre et de la promotion qui y est associĂ©e les a soit poussĂ©s vers la retraite, envoyĂ©s sur une autre planĂšte oĂč lâadministration/lâadministratif et le monde politique sont oppressants.
Si les flics sont souvent des femmes et des hommes qui sâengagent par idĂ©al de Justice, ils sont rĂ©guliĂšrement déçus par le manque de considĂ©ration de leur hiĂ©rarchie. Les flics qui sont intervenus lors des attentats terroristes « du » Bataclan ont reçu une mĂ©daille « deux ans et deux mois plus tard ». Des promotions sont accordĂ©es Ă la tĂȘte du client. La direction sâadresse aux flics principalement pour les recadrer et les engueuler. TrĂšs rarement pour les fĂ©liciter. La Justice rendue par les juges est perçue comme laxiste et mĂ©prisante Ă leur encontre. Une certaine solidaritĂ© et un sens du devoir demeurent entre flics mais lâesprit du collectif serait moins fort quâ « avant ».
Les hommes politiques se servent de la police comme dâune bonne Ă tout faire. Comme tout faire pour donner une bonne image de leurs dĂ©cisions ministĂ©rielles et gouvernementales. Nicolas Sarkozy, Maitre Karcher, les a par exemple karchĂ©risĂ©s et les a entubĂ©s :
Il a pris leur vote électoral pour devenir Président de la République. Il a réduit leurs effectifs. Désormais, il faudrait faire aussi bien voire mieux mais avec moins de personnel. Sarkozy a accentué le rÚgne du chiffre et du rendement- qui lui préexistait- au sein de la police en réservant une prime aux « meilleurs» flics :
Celles et ceux qui ramÚneront le plus de « baballes » de chiffres.
Un des Maitres Ă penser de Nicolas Sarkozy, Claude GuĂ©ant, lui, sâest servi dans les caisses de la police.
François Hollande, une fois Ă©lu PrĂ©sident de la RĂ©publique,  les a dĂ©savouĂ©s en prenant par exemple mĂ©diatiquement position pour le jeune « ThĂ©o » sans prendre le temps de tout comprendre et de tout savoir du dĂ©roulement de lâinterpellation.  Il aurait suffi de regarder et d’interprĂ©ter certaines images vidĂ©os de l’intervention au prĂ©alable.
AprĂšs les attentats terroristes, il a fallu combler un manque de personnel de toute urgence. Le prĂ©sident de la RĂ©publique, prĂ©cĂ©dent, Nicolas Sarkozy, ayant dĂ©cidĂ© de diminuer les effectifs policiers. La formation dâun policier, ordinairement dâun an, est alors passĂ©e ( exceptionnellement ?) Ă six mois. Si au cours de sa formation, un flic sâentraĂźne au tir en moyenne une fois par semaine, dĂšs lors quâil est diplĂŽmĂ© et en activitĂ©, ce chiffre tombe Ă environ trois entraĂźnements de tir par an en raison de son emploi du temps chargĂ©. Il est difficile dans ces conditions- selon un moniteur de tir de la police- dâĂȘtre serein et maitre de soi lorsque lâon est flic, que lâon porte une arme et que l’on doit s’en servir alors que lâon est devenu la cible de jeunes dĂ©linquants (cocktail molotov, aquarium avec poisson, rĂ©frigĂ©rateur, pavĂ©sâŠ.) et des terroristes capables de venir vous agresser jusquâĂ votre domicile.
Ce qui, « avant » ne se produisait pas.
« Avant », câĂ©tait aussi lorsque les anciens prenaient le temps de former les nouveaux flics, qui, au sortir de lâĂ©cole, ne savent pas grand chose du mĂ©tier. En pratique. Comme dans bien dâautres mĂ©tiers. Cette passation entre anciens et nouveaux flics se fait de moins en moins.
MĂȘme le casting dâorigine des flics a changĂ© : « Avant », une bonne majoritĂ© des flics de la rĂ©gion parisienne Ă©tait dâorigine ouvriĂšre. Aujourdâhui, il yâa de plus en plus de jeunes provinciaux dâun milieu social assez confortable dont certains sont accompagnĂ©s Ă leur entrĂ©e Ă lâĂ©cole de police par leurs parents.
Les jeunes flics de « maintenant » supporteraient moins bien les contraintes du mĂ©tier (horaires, conditions de travail) que leurs prĂ©dĂ©cesseurs. Ils sont aussi plus Ă lâaise avec les rĂ©seaux sociaux et ont sĂ»rement contribuĂ© Ă cette manifestation de flics- qui ont dĂ» dissimuler leur visage pour Ă©viter d’ĂȘtre reconnus par leur hiĂ©rarchie ainsi que par de potentiels agresseurs- autour de lâArc de Triomphe Ă lâautomne 2016 pour exprimer le mĂ©contentement de la profession malgrĂ© leur devoir de rĂ©serve.
En face, aussi, ça a changé : les délinquants vont délibérément au contact des flics. Ils sont plus durs et plus agressifs que leurs anciens.
Les hommes politiques, eux aussi, ont changĂ©. Le dernier Ministre de lâIntĂ©rieur qui a eu une bonne cote auprĂšs de la police sâappelle Pierre Joxe et il Ă©tait socialiste. Apparemment, Charles Pasqua ensuite avait Ă©tĂ© assez bien vĂ©cu. Et, rĂ©cemment, Bernard Cazeneuve Ă©tait , contrairement aux apparences, plutĂŽt bon avec la police. Autrement, les hommes politiques sây connaissent principalement en mĂ©dias et en plan de carriĂšre. Ils sont aussi en poste pour une durĂ©e courte. Par contre, ils ne connaissent rien au travail sur le terrain. Ils nây connaissent rien au travail qui se fait dans la police au mĂȘme titre quâils nây connaissent rien en ce qui concerne le bon fonctionnement dâune centrale nuclĂ©aire. Par contre, ils savent parler, se faire filmer avec le beau costume, la belle lumiĂšre. Et, ils savent Ă©couter les directeurs gĂ©nĂ©raux et les conseillers qui leur assurent que tout va bien sur le terrain. Pour le prouver, ils ont des chiffres. On leur fournit des chiffres. Sachant que, dĂ©sormais, on privilĂ©gie le nombre dâintervention pour faire du chiffre.
Plus on fait dâinterventions, plus on fait du chiffre et plus on « dĂ©montre » que lâon est efficace. Et plus on augmente ses chances dâĂȘtre bien vu de sa hiĂ©rarchie, donc dâĂȘtre promu. Mais aussi de toucher une prime :
195 euros par trimestre lorsque lâon est « en bas de lâĂ©chelle ». « Entre 15 000 et 20 000 euros par an pour un patron dâarrondissement parisien ».
Dans le livre de Ploquin, jâai aussi lu que certains commissaires avaient demandĂ© â et obtenu- dâĂȘtre payĂ©s davantage en Ă©tant moins nombreux. ça me fait penser Ă ces collĂšgues infirmiĂšres et infirmiers qui acceptent dâĂȘtre mieux payĂ©s en clinique en Ă©tant moins nombreux et en faisant des journĂ©es de travail plus longues. Et aussi plus nombreuses. Dans une clinique, on pourrait travailler un certain nombre de jours dâaffilĂ©e sans prendre de jour de congĂ©. Dans un hĂŽpital public, la lĂ©gislation du travail nous impose, pour notre santĂ©, de prendre un jour de congĂ© Ă partir dâun certain nombre de jours et de nuits travaillĂ©es. A ce jour, et pour lâinstant, jâestime que le travail qui se pratique dans une clinique psychiatrique (oĂč lâon est trĂšs bon pour faire du chiffre et de lâabattage) est par exemple de moins bonne qualitĂ© relationnelle avec le patient quâĂ lâhĂŽpital public. Lequel hĂŽpital public est de plus en plus sommĂ© de sâaligner sur le modĂšle de lâentreprise et de la clinique privĂ©e.
Dans la police, on fait plus de chiffre en interpellant des personnes en situation irrĂ©guliĂšre pour leurs papiers ou en interceptant un fumeur de joint quâen dirigeant une enquĂȘte qui prend deux Ă trois mois avant dâobtenir un Ă©ventuel rĂ©sultat. Jâimagine que le flic qui mâa interceptĂ© aprĂšs mon passage de la porte de validation qui mâavait tant contrariĂ© (voir mon article Câest Comportemental !) Ă©tait soit puni par sa hiĂ©rarchie ou faisait du chiffre.
Le chiffre devance la compĂ©tence. Câest vrai pour les rĂ©sultats Ă la fin des formations dans la police : si lâon a une trĂšs bonne note, on peut choisir lâaffection que lâon souhaite. Et fuir les commissariats qui craignent sur des secteurs oĂč les dĂ©linquants multirĂ©cidivistes se sentent chez eux car peu sanctionnĂ©s par la Justice quels que soient leurs Ă©tats de fait : vols, menaces, agressions physiques sur agent, injures, dĂ©gradationsâŠ.
Pour les politiciens, tout va bien puisque câest « quâon » leur dit et câest aussi ce quâils brĂ»lent dâentendre. Pour les politiciens, les syndicats policiers exagĂšrent les faits. Et les flics sont des trouillards. Ou des canidĂ©s quâil faut bien tenir en laisse afin dâĂ©viter de nouvelles Ă©meutes dans les quartiers, ce qui serait mauvais pour lâimage de la police et dĂ©sastreux pour nâimporte quel candidat Ă lâapproche des Ă©lections.
A mesure de cet article, dâagresseur, le flic est devenu victime. Entre les deux, il est aussi hĂ©ros mais cela est peu exposĂ© dans les mĂ©dias. Par choix de certains mĂ©dias. Par intermittence aussi : Ploquin rappelle quâaprĂšs les attentats terroristes, pendant un temps, les flics et les CRS Ă©taient vus comme des hĂ©ros par les Français. Puis, cette « histoire dâamour » pour les forces de lâordre sâest Ă nouveau ternie.
Il est une autre raison pour laquelle les faits hĂ©roĂŻques policiers disparaissent de la circulation : la jalousie entre collĂšgues. La jalousie entre services dâintervention. Tel collĂšgue qui brille dans les mĂ©dias est susceptible de susciter la jalousie dâun ou plusieurs collĂšgues gradĂ©s. Ou dâune autre institution qui a mal digĂ©rĂ© une affaire passĂ©e et qui peut profiter dâune «opportunitĂ© » pour salir la rĂ©putation dâun professionnel jusque lĂ approuvĂ© officiellement.
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En conclusion, les agents de police souffrent souvent de manque de respect et dâattention de la part de leur hiĂ©rarchie (du commissaire au Ministre), de leurs collĂšgues et des citoyens. De leur cĂŽtĂ©, bien des citoyens, gratuitement ou Ă raison, leur reprochent les mĂȘmes exactions.
« Aux yeux de lâadministration, le flic doit ĂȘtre bon Ă tout faire ou alors il nâest bon Ă rien ».
Je crois que beaucoup de citoyens, sâils remplacent le mot « flic » par la fonction professionnelle quâils occupent peuvent aussi se retrouver dans cette phrase. Sauf que le flic, lui, est entre deux. Autant je plains Ă©videmment les victimes de bavures policiĂšres, autant jâai aussi lâimpression quâil est bien des fois oĂč la femme et lâhomme flic, mĂȘme bien disposĂ© Ă lâĂ©gard de lâhumanitĂ© et du citoyen, est Ă la place du con dĂšs lors quâau dessus de lui un supĂ©rieur pond un ordre ou une directive sans queue ni tĂȘte.
Dans le film corĂ©en Le gangster, le flic et lâassassin, le flic intrĂ©pide (et aussi trĂšs tĂȘte Ă claques) rĂ©ussit facilement Ă se soustraire aux ordres de son patron incompĂ©tent et corrompu et conserve sa libertĂ© dâaction et de commandement. Mais il sâagit dâune fiction oĂč la sociĂ©tĂ© corĂ©enne apparaĂźt nĂ©anmoins si rĂ©glĂ©e et si cadenassĂ©e, que dans les faits, en CorĂ©e comme en France, je crois quâun tel flic aurait Ă©tĂ© dĂ©mis de ses fonctions, ou mutĂ© avant que lâassassin soit identifiĂ©.
Mais concernant lâenquĂȘte de Ploquin, il est Ă©tonnant de voir comme ces femmes et ces hommes flics qui- malgrĂ© eux- voient lâenvers du dĂ©cor dâune sociĂ©tĂ© et ses travers sont aussi vus Ă lâenvers -et de travers- par celles et ceux quâils se sont aussi vouĂ©s Ă dĂ©fendre et Ă protĂ©ger :
« Une grappe de jeunes filles lĂ©gĂšrement alcoolisĂ©es trinquent et multiplient les selfies Ă la terrasse dâune brasserie de la place de Clichy, Ă Paris. Lâhumeur est gaie et lĂ©gĂšre, la vie presque belle, mais dans leur voiture, Ă quelques encablures, trois policiers de la BAC de nuit ne voient pas le monde en rose : voilĂ des victimes idĂ©ales pour ces arracheurs de portables qui frĂŽlent en coup de vent les terrasses et disparaissent avec leur butin. A lâaffĂ»t, les « Baceux » guettent le premier mouvement suspect, une posture, un regard, un type qui ferait tache dans le dĂ©cor, capuche sur la tĂȘte, pas vraiment lĂ pour boire un coup ».
« Au petit jour, lâĂ©quipage devra encore sĂ©curiser les clients des boĂźtes homos du Marais, proies sur mesure pour toutes sortes de prĂ©dateurs ».
« Entre les mauvais regards qui dĂ©bouchent sur un Ćil en moins, les coups de couteau pour une cigarette, les vols avec violence, ceux qui finissent dans les eaux dâun fleuve pour nâen pas remonter, la vie nocturne donne au flic une image assez radicale de lâĂąme humaine. Tout au moins une idĂ©e assez prĂ©cise de ce que le peuple urbain compte de dĂ©jantĂ©s et dâagresseurs. Il yâa la face visible de lâiceberg et le reste, poursuit ce brigadier que ses amis surnomment « Le Hibou », nuiteux depuis plus de dix ans. En surface, tout le monde il est beau et gentil ».
Ces extraits de La Peur a changĂ© de camp impose lâidĂ©e quâĂ faire ce mĂ©tier de flic, on « devient » plus ou moins ce milieu inversĂ©, tordu et bizarre dans lequel on Ă©volue. Puisquâil faut sây adapter en permanence avant dâen revenir. Ce milieu que le citoyen lambda peut se permettre dâignorer,  dont il perçoit parfois une infime surface, et quâil peut ĂȘtre tentĂ© dâexpĂ©rimenter au risque de se faire briser.
RegardĂ©s comme celles et ceux qui se risquent dans ce milieu de vie et de mort, et mĂȘme sâils sont volontaires, les femmes et les hommes flics sont aussi des ĂȘtres sacrifiĂ©s. Bien plus que ce quâeux mĂȘmes ou leurs proches avaient pu prĂ©voir en entrant dans la police. Car comme le dit un des tĂ©moins lors de cette enquĂȘte, le point fort de la police, câest sa rĂ©activitĂ©. Pas sa capacitĂ© dâanticipation. Et celles et ceux qui devraient faire montre dâanticipation, les dĂ©cideurs, sont sur dâautres plans.
« La culture de la maison, câest la rĂ©activitĂ©. Elle est tellement ancrĂ©e que lâon frise lâaberration. Jâai toujours martelĂ© lâidĂ©e quâil fallait faire preuve dâanticipation mais la police ne sait pas faire ». (un ancien policier, fils de policier).
Je regarde Ă©videmment la police dâun autre Ćil depuis la lecture La Peur a changĂ© de camp. Mais il nâest pas certain que tous les agents de police le sachent.
Il yâa quelques jours, lorsque jâai traversĂ© la route avec ma fille prĂšs de notre immeuble, une voiture de police Ă©tait arrĂȘtĂ©e au feu rouge. Assez rĂ©guliĂšrement dans ma ville, Argenteuil, je vois ou entends une voiture de police. Au cours de ma lecture de La Peur a changĂ© de camp, j’ai repensĂ© Ă un ancien copain, d’origine indienne, qui vivait  à Sarcelles il y’a plus de dix ans. Goguenard, il m’avait dit une de ces  fois oĂč j’Ă©tais allĂ© chez lui,  entendre “tous les jours” la sirĂšne d’une voiture de police. Son rĂȘve Ă©tait alors d’aller vivre en PolynĂ©sie et de se rendre rĂ©guliĂšrement Ă la mer afin de pratiquer palmes, masque et tuba. Il est finalement parti s’installer et se marier Ă PondichĂ©ry.
Le livre de Ploquin m’a permis de relativiser encore davantage le climat de vie Ă Argenteuil. MĂȘme si celle-ci, malgrĂ© ses divers atouts, conserve gĂ©nĂ©ralement une mauvaise image dans la presse par exemple en raison, sĂ»rement, du nombre d’incivilitĂ©s qui s’y pratiquent et auxquels j’assiste quelques fois malgrĂ© moi et de certains trafics qui y sont Ă l’oeuvre. Mais la rĂ©putation d’une ville, d’une personne, comme de la carriĂšre d’un flic, quels que soient ses mĂ©rites, peut ĂȘtre sĂ©vĂšrement et durablement entachĂ©e par certains Ă©vĂ©nements et quelques Ă©lĂ©ments.
Nous nous sommes avancĂ©s sur le passage piĂ©tons, ma fille et moi. Nous Ă©tions tous les deux porteurs de notre casque Ă vĂ©lo et dâune paire de lunettes noires. Je tenais le siĂšge enfant que jâallais ensuite installer Ă lâarriĂšre de mon vĂ©lo. Ma fille, quant Ă elle, portait la pompe Ă vĂ©lo. La femme flic au volant de la voiture a un moment regardĂ© dans notre direction. Elle aussi portait des lunettes noires. Je me suis demandĂ© si elle avait pu, un moment, nous suspecter dâun dĂ©lit quelconque. MĂȘme si cette femme flic ainsi que ses collĂšgues ne mâinspiraient pas de peur particuliĂšre, jâai Ă©tĂ© Ă©tonnĂ© par lâabsence de sourire sur son visage. Mais elle a peut-ĂȘtre aussi Ă©tĂ© Ă©tonnĂ©e de me voir la regarder sans un sourire. Ou se demander la raison pour laquelle je la regardais tout en traversant la route.
Franck Unimon, jeudi 22 aout 2019.
Pour complĂ©ter, on peut aussi lire dans l’ordre que l’on souhaite les articles Tenir le rythme, La Peur a changĂ© de camp, Mes rĂȘves avaient un goĂ»t de sel.