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Cinéma

The Fall

 

 

                  The Fall, une série crééé, scénarisée et réalisée par Allan Cubbit.

 

 

Je n’avais jamais entendu parler de cette série (2013-2016) comme d’Allan Cubbit auparavant. Un jour, ma compagne est rentrée avec le dvd de la saison 1 de The Fall. Une de ses connaissances la lui avait donnée. Ce dvd m’a d’abord fait l’effet de ces dvds que l’on trouve bradés à un ou deux euros dans les supermarchés.

J’avais bien reconnu l’actrice Gillian Anderson, l’un des personnages principaux ( Scully) de la série X-Files. C’était au vingtième siècle. La série, malgré son succès, m’avait peu captivé. J’ai le souvenir de créatures extra-terrestres maquillées grossièrement.

Le DVD de la saison 1 de The Fall est resté parmi d’autres durant un bon mois. Puis, j’ai rappelé à ma compagne l’existence de ce dvd qu’elle avait un jour ramené du monde extérieur. Entretemps, je n’avais faite aucune tentative de recherche de renseignements à propos de cette série. A l’image d’un mauvais enquêteur ou d’un mauvais journaliste, seuls mes a priori faisaient loi. The Fall a fait tomber ces mauvaises pensées. Plusieurs jours sont passés depuis que nous avons regardé le dernier épisode de cette série qui compte trois saisons. Et aujourd’hui subsiste un étonnement grandissant devant The Fall :

Un étonnement fait de ces cercles dans l’eau, qui, depuis leur isolement et leur discrétion d’abord microscopique ceinturent subitement toute la mesure de notre regard avant de se faire attraper par l’horizon.

The Fall se passe aujourd’hui en Irlande. Stella Gibson (l’actrice Gillian Anderson), enquêtrice londonienne de pointe est sollicitée par une vieille connaissance :

Un officier irlandais à visage de Droopy. Un de ces hommes consciencieux, trop sérieux, à la carrière honnête, qui s’est éloigné du terrain pour se rapprocher de fonctions plus politiques où il s’agit de se mettre bien dans le cadre et d’être conforme à l’image et au protocole. Mais ça presse et il y’a plus important que de détailler son profil. Car une femme d’une trentaine d’années, belle, a été assassinée. Et il n’y’a aucune piste.

La véritable « particularité » de cette femme est son statut social. Architecte célèbre, Alice Munro, la trentaine, est l’ex-belle fille d’un homme important de la société irlandaise. Un peu comme si, sans le souhaiter, demain, l’ex-belle fille d’un des grands patrons de France, se faisait assassiner. Si la victime avait été une femme de classe moyenne, gilet jaune, sans papiers ou migrante, peut-être que la « blonde » Stella Gibson n’aurait pas été appelée pour guider et mener cette enquête.

Une des originalitĂ©s de The Fall est donc qu’un homme d’expĂ©rience appelle une femme d’expĂ©rience dans le domaine de l’enquĂŞte policière. Et que cette femme est une « Ă©trangère » et une adversaire historique ( se rappeler l’Histoire entre l’Angleterre et l’Irlande). Ce qui signifie que les rapports entre les deux pays a Ă©voluĂ© pour le mieux au point de pouvoir dĂ©sormais s’entraider l’un et l’autre. Mais aussi que The Fall confie Ă  une femme le rĂ´le du hĂ©ros encore majoritairement attribuĂ© Ă  un homme dans les sĂ©ries comme dans les films.

The Fall brille aussi par quelques défauts. Si la série est un très bon moyen de découvrir l’Irlande de l’intérieur et son identité duelle et fratricide, le réalisateur se montre moins engagé ou moins inspiré lorsqu’il fait intervenir certains activistes irlandais : il en fait des beaufs. Mais ces ratés – et d’autres- sont consommables.

Stella Gibson, elle, brille de mille peaux : Highly Educated ( très qualifiée, très cultivée), Emancipated ( Libre de tous ses frémissements d’organes), Extremely Attractive ( il faut vraiment faire l’article ?) Utterly Reliable ( Totalement fiable). C’est simple, The Fall m’a réconcilié avec l’Anglais. Peut-être parce-que l’accent « saucisson » de l’Américain m’avait détourné des terres académiques de l’accent britannique. Et scolaire. Mais avec Gillian, pardon, avec Stella Gibson, l’Anglais académique se fait la classe du trouble.

En plus, Stella est une éminente pédagogue, une fervente psychologue, une sportive accomplie (elle nage). Un quart de siècle après X-Files, on regrette d’avoir sous-estimé la très belle femme et la très subtile actrice qu’est Gillian Anderson. On voudrait se jeter à l’eau et faire bien des langueurs avec elle mais notre crime a été commis bien des années plus tôt. Et c’est irréparable. Et puis, Stella Gibson n’est par nourrice agréé. Plutôt épingle. Aussi rude que délicate, aussi imparfaite que son éclat, telle est Stella Gibson. Attirante, touchante et protectrice par endroits, froide, provocatrice et technique par ailleurs. Toujours précise.

L’autre triomphe de The Fall est de développer les répercussions des meurtres et de la gestion de l’enquête sur plusieurs des protagonistes que l’on apprend à connaître. Et chacun, malgré ses forces environnantes, connaît sa chute personnelle plus ou moins forte.

Il y’a dans The Fall un lien équitable entre la progression de l’enquête, l’opposition entre les enquêteurs et le tueur, et les incidences sur celles et ceux, non préparés, qui s’y trouvent confrontés.

The Fall, série policière qui se déroule en Irlande est une histoire explosive sans une seule explosion. Les attentats, ici, sont les meurtres et certaines mœurs. Comme souvent sauf qu’on l’oublie ainsi que la solitude qui, généralement, s’ensuit.

Franck Unimon, ce mardi 6 aout 2019.