HĂŽtel de Ville, Paris, depuis la rue de Rivoli, ce samedi 11 septembre 2021, vers 9 heures du matin. On peut apercevoir sur la gauche un vaccinodrome. Et, au fond, Notre Dame.
Etre un mauvais exemple
Ce samedi 11 septembre 2021, je suis un mauvais exemple. Je dois donc me prĂ©parer Ă vivre dans le mĂ©pris, la peur et la honte. Si jâĂ©tais clairvoyant, Je ferais tout afin me faire subventionner au plus vite par une marque de mouchoirs jetables. Mais aussi pour devenir VRP pour des anxiolytiques et des antidĂ©presseurs. Pour fuir, raser les murs et me faire le plus discret possible. Tout cela est compatible. Dans ces domaines, je suis un homme dâavenir.
En dehors de ça, je passe mon temps Ă me terrer dans le passĂ©. Je refuse la nouveautĂ© et le changement. Je suis irrationnel, illogique, Ă©goĂŻste, irresponsable, immoral. Certaines personnes ont rĂ©ussi et vont rĂ©ussir prĂ©cisĂ©ment « grĂące » Ă ces caractĂ©ristiques. Mais pas moi. Car, je suis has been. Je vois bien que tout le monde est passĂ© Ă autre chose. Or, je persiste dans mon erreur. Câest plus fort que moi. Câest en cela que lâon reconnaĂźt un mauvais exemple.
Je fais partie de cette minoritĂ© dont la seule vĂ©ritable expertise, reconnue et encouragĂ©e, consiste, a toujours consistĂ©, Ă obĂ©ir, Ă donner de sa personne et Ă subir. Par exemple, je peux me prĂ©senter dans un centre de transfusion sanguine afin dâaller donner mon sang librement. On acceptera de me le prendre sans difficultĂ©s. Je suis donc bien obligĂ© dâadmettre quâil est encore des endroits oĂč, malgrĂ© mes tares, on accepte encore de me recevoir.
Faire partie dâune minoritĂ© peut ĂȘtre un avantage. Il existe des minoritĂ©s expĂ©rimentĂ©es, puissantes, organisĂ©es, protĂ©gĂ©es, dĂ©terminĂ©es et qui comptent. Ces minoritĂ©s prennent des dĂ©cisions pour le plus grand nombre et peuvent souvent sâexprimer et ĂȘtre Ă©coutĂ©es. Que lâon soit dâaccord avec elles ou non, elles prĂ©serveront leurs fonctions. Et, lorsque certaines ou certains de leurs membres se trompent ou commettent des infractions, on trouvera bien un arrangement.
La minoritĂ© dont je fais partie peut ĂȘtre nĂ©gligĂ©e et balayĂ©e. Câest aussi en cela que je suis un mauvais exemple. Jâai une attirance inextinguible pour la dĂ©faite. Durant quelques mois, jâai fait partie de la minoritĂ© des « hĂ©ros ». Beaucoup de gens ont applaudi, celles et ceux, qui, comme moi, continuaient dâaller travailler, sans protection, tandis que la majoritĂ© restait Ă lâabri du « flĂ©au ». Mais cela fait partie du passĂ©. Alors que la lĂ©gion d’honneur et le PanthĂ©on n’attendaient plus que moi, j’ai tout gĂąchĂ©.
Etonnamment, depuis ce 12 juillet 2021, mon statut a basculĂ© : de « hĂ©ros », je suis devenu de maniĂšre de plus en plus avancĂ©e, un mauvais exemple. Mais quâest-ce que je croyais ?! Que lâon pouvait rester un hĂ©ros toute sa vie ?! Mon statut de « hĂ©ros » ressemble aux sapins de NoĂ«l que l’on range aprĂšs les fĂȘtes ou que l’on retrouve sur les trottoirs, dans la rue, prĂšs des poubelles.
NĂ©anmoins, je nâai pas envie de ressembler Ă ces mendiants, qui, aprĂšs avoir rĂ©pĂ©tĂ© les mĂȘmes phrases, dans chaque wagon, passent ensuite dans les rangs mĂ©caniquement. Je fais encore partie des murs de l’illusion sociale. Mais je dois faire bref avant que nâarrive la prochaine station et les prochaines Ă©lections de pensĂ©e.
Ce samedi 11 septembre 2021, je ne suis toujours pas vaccinĂ© contre le Covid. Je nâai donc pas de passe sanitaire. Une premiĂšre fois, jâai pris rendez-vous. CâĂ©tait le 4 aout 2021. Je me suis finalement dĂ©sistĂ©. LĂ , jâai Ă nouveau pris rendez-vous pour ce 13 septembre pour une premiĂšre injection. Et, je me demande si je vais Ă nouveau me dĂ©sister.
Incapable
RĂ©pĂ©ter quâil nous manque du recul pour ces vaccins anti-Covid (Pfizer, Moderna, Astrazeneca, Johnson&Johnson ) proposĂ©s Ă partir de fin dĂ©cembre 2020 puis, dĂ©sormais, imposĂ©s, revient Ă tenir des discours comme ces mendiants ou ces dragueurs « bof » qui, dans les transports en commun, nous interpellent. DĂšs leurs premiĂšres intonations, on sait que lâon va connaitre un moment embarrassant. A la virgule prĂšs, on sait quelles sont leurs intentions et leurs demandes. On nâa pas envie dâentendre ça. On nây croit plus. Certaines fois, on veut bien donner une petite piĂšce, un ticket restaurant ou un peu de nourriture. Mais ce serait plutĂŽt pour quâensuite, ils nous laissent tranquilles.
Or, je ne suis pas encore un mendiant. Et, je crois, aussi, quâil faut en dire plus. Donner de soi, Ă nouveau. Rester humain et personnaliser ce que lâon exprime. MĂȘme si cela sera peut ĂȘtre embarrassant tandis que je passerai ensuite dans les rangs. Avant de passer Ă un autre wagon.
Ce samedi 11 septembre 2021, je suis incapable de savoir quoi rĂ©pondre Ă ma mĂšre Ă propos de la vaccination anti-Covid. Moi, lâaĂźnĂ©, le fils Ă maman, lâenfant qui a longtemps tenu Ă protĂ©ger sa mĂšre et qui continue dans une certaine mesure. Moi, le seul infirmier parmi ses enfants, je suis aussi le seul non vaccinĂ© contre le Covid. Tous mes vaccins sont suivis et Ă jour. Exception faite avec cette vaccination contre le Covid.
Il y a quelques mois, vers Mai ou Juin, avant que ne tombe cette obligation vaccinale contre le Covid pour les soignants, ma mĂšre mâavait demandĂ© conseil. Jâentendais alors de trĂšs bons Ă©chos « du » Pfizer » , le vaccin largement le plus utilisĂ© dĂ©sormais en France contre le Covid. RĂ©cemment, jâai lu que 76 millions de doses du vaccin Pfizer , en France, avaient Ă©tĂ© administrĂ©es. Largement plus que pour les trois autres vaccins rĂ©unis (Astrazeneca, Moderna, Johnson & Johnson ). Pour continuer d’appeler ces vaccins par le nom des laboratoires qui les fabriquent. Un nom un peu plus facile Ă retenir que leur vĂ©ritable nom scientifique.
Aussi, il y a quelques mois, vers Mai ou Juin, jâavais rĂ©pondu Ă ma mĂšre :
« Jâentends dire beaucoup de bien du Pfizer ».
Le Johnson & Johnson et son injection unique mâavait pourtant donnĂ© envie pendant un certain temps. Ce qui mâavait aussi plu avec lui, câĂ©tait quâil arrivait aprĂšs les trois autres (Pfizer, Astrazeneca, Moderna ). Je le considĂ©rais donc comme porteur de plus de garanties en matiĂšre de recul et dâexpĂ©rience. MĂȘme son « nom », Johnson & Johnson , je trouvais que ça sonnait bien. Mais, trĂšs vite, le dĂ©collage du vaccin Johnson & Johnson sâĂ©tait mal passĂ© en raison dâeffets secondaires redoutĂ©s. Et, aprĂšs le vaccin Astrazeneca , il sâĂ©tait rapidement retrouvĂ© entachĂ© avec la rĂ©putation dâĂȘtre un vaccin Ă Ă©viter. Ce qui faisait deux vaccins contre le Covid sur quatre à « Ă©viter ».
Mais jâavais fait mon devoir. Jâavais conseillĂ© le Pfizer Ă ma mĂšre dont jâai eu des « bons retours » dâexpĂ©rience autour de moi. Par « bons retours dâexpĂ©rience », je pense Ă©videmment au fait que toutes celles et tous ceux qui lâont reçu, et avec lesquels jâen ai parlĂ©, vont bien aujourdâhui. Ni dĂ©cĂšs. Ni maladie grave causĂ©e par la vaccination. Ni Covid.
Je croyais ma mĂšre vaccinĂ©e depuis longtemps quand cette obligation vaccinale pour les soignants, mais aussi, indirectement, pour tous les Français, est arrivĂ©e le 12 juillet. Et puis, jâai appris que ni elle ni mon pĂšre ne lâĂ©taient. VaccinĂ©s.
Dâabord, parce quâen raison de ses problĂšmes-traitĂ©s et stabilisĂ©s- de santĂ©, lâAstrazeneca lui avait Ă©tĂ© dĂ©conseillĂ© par son mĂ©decin. Mes parents rĂ©sident en Guadeloupe oĂč ils sont retournĂ©s vivre pour leur retraite. Ensuite, parce-que ce jour oĂč tous deux sâĂ©taient rendus Ă lâaĂ©roport pour se faire vacciner, ils avaient trouvĂ© une sorte de barrage tenu par des opposants Ă la vaccination contre le Covid. Ecoutant leurs arguments, mon pĂšre avait alors signalĂ© Ă ma mĂšre :
« Leur vaccin nâest pas encore tout Ă fait au point. On va attendre encore un peu ». Et, mes parents avaient rebroussĂ© chemin. Ăa, câĂ©tait avant que les Antilles et lâĂźle de la RĂ©union ne fassent la Une des journaux concernant lâessor de la pandĂ©mie. Et que lâon nous apprenne les chiffres dâune population sous-vaccinĂ©e contre le Covid, de lâordre, Ă peu prĂšs de 25 Ă 30 pour cent. Contre prĂšs de 70% de personnes vaccinĂ©es contre le Covid dans lâHexagone, aujourdâhui.
Une situation pas normale
Nous devions ĂȘtre en aout lorsque ma mĂšre mâa Ă nouveau demandĂ© conseil Ă propos de la vaccination anti-Covid. Elle ne savait plus quoi faire au vu de toutes les informations contradictoires. Au point de mâadresser elle-mĂȘme le 4 aout, par exemple, une vidĂ©o mettant en garde contre la vaccination. Etait-ce lâintervention en CrĂ©ole du syndicaliste Elie Domota ? Câest possible.
Le 4 aout devait ĂȘtre la date de ma premiĂšre injection, avec le Pfizer , dans ma ville, Ă une dizaine de minutes Ă pied de chez moi.
Mes rĂ©serves initiales et mes doutes- dĂ©jĂ bien constituĂ©s- envers la vaccination anti-Covid proposĂ©e, ajoutĂ©s Ă cette vidĂ©o et certainement dâautres propos mâont poussĂ© Ă annuler ce rendez-vous du 4 aout.
Jâai fini par rĂ©pondre Ă ma mĂšre que je devrais savoir lui rĂ©pondre. Mais que jâen Ă©tais incapable car la situation que nous vivons est « anormale ». Et, particuliĂšrement, « notre » façon de rĂ©pondre et de rĂ©agir par rapport Ă cette pandĂ©mie du Covid.
RĂ©agir ou agir « normalement », câest Ă la fois adopter une attitude raisonnable . Mais, aussi, celle appliquĂ©e ou suivie par la majoritĂ© . Cette association du raisonnable avec la majoritĂ© garantit en principe lâĂ©quilibre et la pĂ©rennitĂ© du plus grand nombre. Les mĂȘmes rĂšgles et les mĂȘmes lois, connues de tous, facilement identifiables, graduĂ©es selon lâĂąge et les capacitĂ©s, acceptĂ©es et supportĂ©es par le plus grand nombre, donc par la majoritĂ©, permettent de vivre dans un certain confort et une certaine entente gĂ©nĂ©rale et durable. Soit ce qui dĂ©finit une civilisation, une sociĂ©tĂ©, une culture, une nation. Lâenvers du chaos, des guerres et des conflits.
Ce projet de civilisation, de sociĂ©tĂ©, de culture et de nation, je me suis gĂ©nĂ©ralement Ă©vertuĂ© Ă le rejoindre comme Ă mây faire intĂ©grer. Sauf que mes « retours » dâexpĂ©rience depuis le dĂ©but officiel de la pandĂ©mie en mars 2020 me font particuliĂšrement douter, voire tituber Ă devoir ingurgiter certaines « nouvelles » lois.
Mes « retours » dâexpĂ©rience :
La principale continuitĂ© dans laquelle je me retrouve avec certitude depuis mars 2020, câest de toujours faire partie des personnes dominĂ©es. Que ce soit au sein de certaines minoritĂ©s ou au sein de la majoritĂ©.
En Mars 2020, je faisais partie des minorités qui continuaient de se rendre à leur travail.
Les éboueurs, les caissiÚres et les caissiers, les commerçants « alimentaires », les policiÚres et les policiers, les pompiers, les livreurs, les personnels soignants, médicaux et de ménage hospitaliers, les ambulanciers.
Il est possible que jâaie oubliĂ© dâautres professions comptant parmi ces minoritĂ©s. Dâune part parce-que je fais en fonction de ce que mon expĂ©rience et mon entendement me permettent de comprendre de notre sociĂ©tĂ©. Dâautre part, parce-que, depuis le dĂ©but de la pandĂ©mie en mars 2020, ces minoritĂ©s que je viens de citer et celles que jâai oubliĂ©es de mentionner, sont rarement celles que lâon entend sâexprimer en permanence et que lâon prend le temps dâĂ©couter Ă propos de cette pandĂ©mie. Alors quâelles ont Ă©tĂ© en premiĂšre ligne et se sont constituĂ©es, aussi, une certaine expĂ©rience sanitaire directe qui pourraient ou devraient servir Ă la majoritĂ©. Or, jâai lâimpression que seulement une partie de cette expĂ©rience pratique sert. Principalement, tout ce qui peut faire peur.
L’annĂ©e derniĂšre, je faisais partie des minoritĂ©s hĂ©roĂŻques, aujourd’hui, je fais partie des minoritĂ©s non-vaccinĂ©es :
Les sceptiques, complotistes, irresponsables, Ă©goĂŻstes, immorales, irrationnelles, illogiques, inexcusables, les bientĂŽt squelettiques….
Si je devais me fier Ă tout ce qui nous a Ă©tĂ© dit et rĂ©pĂ©tĂ© depuis le dĂ©but concernant la pandĂ©mie du Covid (officiellement en mars 2020 en France), aujourdâhui, le pays devrait ĂȘtre orphelin par milliers en Ă©boueurs, caissiĂšres et caissiers, commerçants « alimentaires », policiĂšres et policiers, pompiers, livreurs, personnels soignants, mĂ©dicaux, de mĂ©nage, hospitaliers et aussi ambulanciers.
Parce-que ces minoritĂ©s ont dâabord Ă©tĂ© exposĂ©es Ă la pandĂ©mie du Covid pendant plusieurs semaines mais aussi Ă une pĂ©nurie de masques, durant les six premiĂšres semaines Ă compter de mars 2020.
Parce quâun certain nombre de professionnels faisant partie ces minoritĂ©s ont contractĂ© le Covid.
Dix huit mois plus tard, par exemple, la pĂ©nurie en personnel soignant dans les hĂŽpitaux publics sâest aggravĂ©e Ă ce que jâai pu lire dans la presse. Parce-que tous ces personnels soignants sont allĂ©s sâimplanter dans des cimetiĂšres ? Je ne crois pas.
La charge anxiogĂšne qui nous a Ă©tĂ© administrĂ©e depuis l’annĂ©e derniĂšre dans le traitement mĂ©diatique de la pandĂ©mie du Covid a Ă©tĂ© maximale. MĂȘme le site indĂ©pendant Prescrire l’a soulignĂ© dans un de ses articles. J’ai eu la surprise hier soir ou avant hier soir de dĂ©couvrir un article sur ce thĂšme alors que je cherchais Ă grappiller des informations sur les vaccins anti-Covid. Pour conserver ma dĂ©cision de me faire vacciner.
Le site Prescrire , dans cet article, va jusqu’Ă prĂ©coniser de limiter Ă une heure par jour, je crois, le moment oĂč l’on reçoit des informations relatives Ă la pandĂ©mie du Covid.
Le site Prescrire dit plutĂŽt du bien des vaccins Ă ARN messager, Pfizer et Moderna , qu’il recommande en premiĂšre intention avant les vaccins Astrazeneca et Johnson & Johnson . Le site nomme ces vaccins par leur appellation scientifique.
Si cette charge anxiogĂšne qui nous a tabassĂ© Ă propos de la pandĂ©mie du Covid, via les media, et aussi le gouvernement avec ses revirements successifs, a Ă©tĂ© « maximale », j’ai commencĂ© Ă m’apercevoir qu’elle a aussi Ă©tĂ© rapidement « oubliĂ©e » voire niĂ©e. La premiĂšre personne Ă me rendre tĂ©moin de cela avait Ă©tĂ© une collĂšgue infirmiĂšre- aujourd’hui Ă la retraite- en arrĂȘt de travail dĂšs le dĂ©but du premier confinement. En revenant dans le service plusieurs semaines plus tard, cette collĂšgue avait Ă©tĂ© Ă©tonnĂ©e lorsque je lui avais dit que nous nous Ă©tions fait « tabasser » psychologiquement par toute la charge anxiogĂšne relative aux informations balancĂ©es Ă propos de la pandĂ©mie du Covid. Cette collĂšgue- qui avait sĂ»rement prĂ©fĂ©rĂ© se protĂ©ger en restant chez elle dĂšs le dĂ©but du premier confinement en mars 2020- avait rĂ©agi devant moi comme s’il n’y avait jamais eu la moindre inquiĂ©tude Ă©pandue en France Ă propos de la pandĂ©mie du Covid. Et que je lui racontais des histoires.
Je croyais alors que cette amnĂ©sie ou ce dĂ©ni Ă©tait spĂ©cifique Ă cette collĂšgue. Je crois aujourd’hui de plus en plus que cette amnĂ©sie et ce dĂ©ni sont partagĂ©s par d’autres personnes depuis le dĂ©but de la pandĂ©mie du Covid l’annĂ©e derniĂšre. Et, c’est facile Ă comprendre : cette amnĂ©sie et ce dĂ©ni aident Ă se relever et Ă poursuivre. A continuer de vivre. A aller de l’avant. A ne pas regarder en arriĂšre et y retrouver ce qui a pu effrayer ou faire souffrir. Ils sont ce que l’on appelle des mĂ©canismes de dĂ©fense psychique devant certaines situations stressantes et Ă©motionnellement difficiles voire traumatisantes. Peu importe l’Ăąge, le sexe, la constitution ou l’expĂ©rience que l’on a. Chaque personne a ses limites.
Argenteuil, butte d’Orgemont, samedi 4 septembre 2021.
Des personnes sont mortes du Covid . Je ne conteste pas la pandĂ©mie non plus. Mais, dix huit mois plus tard, avec dâautres, je suis encore vivant. Je ne suis pas une exception. Et, au lieu dâen ĂȘtre content et de chercher Ă savoir ce qui a pu permettre ça, la tendance est plutĂŽt de continuer Ă nous faire entrer dans la tĂȘte des pensĂ©es telles que :
« Vous avez eu beaucoup de chance jusqu’Ă maintenant ! » ; « ça ne va pas durer ! ». « Vaccinez-vous au plus vite ! Câest le mieux Ă faire ! ». « Regardez, dans les services de rĂ©animation, dĂ©sormais, on retrouve principalement des patients atteints du Covid non vaccinĂ©s ! MĂȘme BFM TV le dit ! ».
« Puisquâon vous le rĂ©pĂšte ! ».
Une infectiologue, plutĂŽt Ă l’aise dans les mĂ©dia, a avancĂ© qu’avec le variant Delta, tout le monde allait se faire contaminer cette fois-ci par le Covid.
Néanmoins, malgré toutes ces annonces répétées, les vaccinodromes à portée de main et de clic, les tentes de test PCR et antigénique bien visibles, je continue de slalomer entre le oui et le non pour me faire vacciner.
Ces derniers jours, je me suis demandé la raison pour laquelle je réagissais comme ça étant donné que tout est si « clair » pour la majorité.
RĂ©volutionnaire et anarchiste ?
« Je ne te savais pas aussi rĂ©volutionnaire » a rigolĂ© au tĂ©lĂ©phone un de mes cousins il y a quelques jours. Je venais de le surprendre en lui apprenant que je nâĂ©tais pas vaccinĂ© contre le Covid. Mon cousin ne me l’a pas dit, mais il a sĂ»rement aussi pensĂ© : « SacrĂ© Franck ! C’est vraiment un original ! ».
Un de mes amis, infirmier Ă la retraite depuis un an, mâa traitĂ© « dâanarchiste » avec le sourire alors que je dĂ©jeunais avec lui et sa compagne, Ă©galement Ă la retraite. Tous les deux vaccinĂ©s, ils mâont reçu Ă leur table comme si ma non-vaccination Ă©tait davantage une particularitĂ© qui pouvait me causer des ennuis Ă©conomiques que constituer un risque pour leur santĂ©.
Sauf que je ne suis ni « rĂ©volutionnaire », ni « anarchiste ». Par contre certaines situations vĂ©cues depuis lâannĂ©e derniĂšre mâincitent beaucoup Ă croire ou Ă comprendre que la rĂ©ponse officielle et lĂ©gifĂ©rĂ©e Ă la pandĂ©mie donne beaucoup plus la prioritĂ© Ă lâĂ©conomie quâĂ la santĂ©. Pour rĂ©sumer :
Tout ce qui rapporte beaucoup de fric ou peut en ramener trĂšs vite est dâabord privilĂ©giĂ©. CâĂ©tait dĂ©jĂ comme ça avant la pandĂ©mie du Covid. Cela sâest accentuĂ© depuis la pandĂ©mie.
La Gazette du Val d’Oise, mercredi 8 septembre 2021.
Ce samedi 11 septembre 2021, je peux Ă nouveau retourner librement, et sans passe sanitaire, dans un centre commercial prĂšs de chez moi. ( Test PCR ).
Par contre, je ne peux toujours pas retourner librement dans la petite médiathÚque de ma ville. Il me faut encore fournir un passe sanitaire ou un Test antigénique ou PCR de moins de 72 heures.
Devant la mĂ©diathĂšque de ma ville, ce samedi 11 septembre 2021. Sur la barriĂšre, on peut apercevoir les consignes concernant les conditions d’accĂšs. Passe sanitaire, test PCR et antigĂ©nique de moins de 72 heures…. Bien-sĂ»r, le port du masque y est obligatoire.
On pourrait me rĂ©pondre quâil y a un public mineur, enfant ou adolescent, quâil convient de prĂ©server de la pandĂ©mie du Covid dans la mĂ©diathĂšque ?
Mais ce public mineur, enfant et adolescent, peut trÚs bien se retrouver dans le centre commercial à nouveau « disponible » sans passe sanitaire prÚs de chez moi. Et, dans ce centre commercial, bien plus fréquenté que la médiathÚque, le port du masque suffit et est obligatoire. Comme dans la médiathÚque.
L’une des entrĂ©es du centre commercial CĂŽtĂ© Seine, ce samedi 11 septembre 2021. Il y a encore quelques jours, il fallait prĂ©senter son passe sanitaire ou le rĂ©sultat d’un test PCR ou antigĂ©nique de moins de 72 heures pour y entrer.
Un centre commercial, ça rapporte du fric. Une mĂ©diathĂšque, non. Câest ĂȘtre « rĂ©volutionnaire » et « anarchiste » dâĂ©crire ça ?!
Aujourdâhui, toujours, dans la ville oĂč jâhabite, Ă Argenteuil, câĂ©tait la journĂ©e des associations. Il fait beau et chaud depuis plusieurs jours. On se croirait en Ă©tĂ©. Sauf lorsquâil pleut brutalement. Mais, aujourdâhui, il a fait beau. Les stands des associations, cette annĂ©e, ont tous Ă©tĂ© mis dehors. Dont, une partie prĂšs des berges de Seine. Une trĂšs bonne et trĂšs audacieuse initiative et aussi un trĂšs vieux projet de la mairie dâArgenteuil. RĂ©cupĂ©rer les berges de Seine pour les piĂ©tons. Il est certain que la mairie saura tirer avantage de la rĂ©ussite de cette manifestation pour son bilan. Mais pour accĂ©der Ă cette journĂ©e des associations qui s’est donc dĂ©roulĂ©e essentiellement Ă lâextĂ©rieur, la prĂ©sentation dâun passe sanitaire Ă©tait obligatoire.
Entrée de la journée ou forum des associations à Argenteuil, ce samedi 11 septembre 2021.
Bien-sĂ»r, on me rappellera que tout Ă©vĂ©nement public, Ă lâextĂ©rieur, Ă partir dâune certaine envergure et affluence, nĂ©cessite dĂ©sormais la prĂ©sentation dâun passe sanitaire. Mais Ă quoi servent donc les masques anti-Covid ? Et le fait dâĂȘtre Ă lâextĂ©rieur ? Et dans le centre commercial, alors ? Il passera moins de personnes, enfermĂ©es dans le centre commercial, quâĂ ce forum des associations en effet trĂšs suivi comme chaque annĂ©e ?
Pour la deuxiĂšme fois, depuis lâinstauration de ces nouvelles lois en faveur du passe sanitaire, j’ai fraudĂ©. La premiĂšre fois, câĂ©tait pour mâasseoir sur un banc, dehors, Ă quelques mĂštres de lâentrĂ©e dâun lieu de restauration. Afin de manger un sandwich, Ă lâĂ©cart, avec une amie vaccinĂ©e contre le Covid. LĂ , j’ai fraudĂ© par opportunisme. Je nâĂ©tais pas venu pour frauder. Jâavais mĂȘme oubliĂ© que câĂ©tait la journĂ©e des associations Ă Argenteuil. Et, j’ai fraudĂ© pour quelle raison ?! Pour me rendre Ă une journĂ©e des associations dans ma ville. J’ai fraudĂ© avec un masque. Nous sommes dehors. Jâai croisĂ© diffĂ©rentes personnes sans masque lors du forum. Normal, nous sommes dehors. Et puis, la plupart de ces personnes sont supposĂ©es ĂȘtre vaccinĂ©es. Ce nâest pas grave. MĂȘme si lâon sait aussi que, mĂȘme vaccinĂ©, on peut ĂȘtre porteur du virus et contagieux.
Journée ou forum des associations à Argenteuil, ce samedi 11 septembre 2021.
Chaque samedi, depuis au moins le mois d’aout, des personnes opposĂ©es au passe sanitaire et anti-vaccins manifestent dans Paris et en France. Il y âen aurait de moins en moins. Moins de deux cent mille, officiellement. Par contre, ces personnes seraient de plus en plus « radicalisĂ©es ». Je vais prendre mon exemple : jâai fraudĂ© deux fois depuis lâinstauration du passe sanitaire. Je suis donc en phase de « radicalisation » ?
Pour mâĂȘtre assis sur un banc pour manger un sandwich et pour pouvoir me rendre Ă une journĂ©e des associations Ă lâextĂ©rieur en portant un masque ?!
Je ne rapporte pas dâargent. Jâen perds plutĂŽt. Je fais partie de la minoritĂ© qui nâest pas du tout un exemple Ă suivre. Au contraire dâune certaine minoritĂ© qui a su investir ou faire fructifier une entreprise porteuse en cette pĂ©riode de pandĂ©mie :
Vaccins, masques anti-covid, gel hydro-alcoolique, sites de vente sur internet, autres….
Jâallais oublier de dire quâhier, le vendredi 10 septembre, câĂ©tait la journĂ©e du suicide. Une journĂ©e oĂč lâon sensibilise les gens au suicide. Aux signes avant coureurs. Comment aider. Jâai appris hier soir que câĂ©tait la « journĂ©e du suicide ». En France, chaque annĂ©e, il y aurait 9000 suicides par an. Lâun des chiffres les plus Ă©levĂ©s dâEurope. Mon attitude envers la vaccination anti-Covid a quelque chose de suicidaire. Si je mâen tiens, Ă la fois aux risques dâattraper le Covid mais aussi aux sanctions Ă©conomiques qui vont bientĂŽt me tomber dessus, il y a quelque chose de suicidaire dans ma posture. Je me dois de lâadmettre ou de lâenvisager. MĂȘme si je fais de mon mieux pour prĂ©venir le suicide chez les autres.
Cependant, un commerçant, apprenant mes doutes, mâa surpris. Je le croyais entiĂšrement convaincu. Il mâa rĂ©vĂ©lĂ© son scepticisme envers la vaccination anti-Covid en « raison du manque de recul » des vaccins actuels. Heureusement, sa direction a su le soutenir :
« Câest soit tu te vaccines, soit tu fermes ta boutique ! ». Ce qui fait penser Ă une nouvelle version de « Soit tu te vaccines, tu fermes ta gueule et tu restes ouvert. Soit tu lâouvres et tu fermes ta boutique pour toujours ! ».
Mais Ă propos des arguments que lâon pourrait servir aux personnes qui doutent de ces vaccins, je crois aussi entendre celui-ci :
« Prends le vaccin, et jette-toi dans le vide ! Tu ne crains rien. On ne peut pas trop te dire oĂč tu vas atterrir. Qui vivra, verra. Tu verras bien ! ».
Tu verras bien
Ce que je « vois », câest que jâai eu lâaudace ou la naĂŻvetĂ© de croire que je pourrais me passer de ce vaccin anti-Covid. Ou que je pourrais prendre mon temps avant de me dĂ©cider pour un vaccin dans lequel jâaurais eu le temps de croire. Dans lequel jâaurais pu prendre le temps de mettre ma confiance.
Pour ces raisons, lorsquâil y avait eu tous ces Ă©clats Ă propos du professeur Raoult il y a quelques mois, jâavais Ă©coutĂ© tout ça de trĂšs trĂšs loin. Je nâavais aucun avis sur lâHydroâŠ. Je me sentais trĂšs bien dans mon ignorance sur ces sujets avec mes masques anti-Covid, mon lavage de mains et mes gestes barriĂšres.
Aujourdâhui encore, jâai du mal Ă retenir les noms des mĂ©dicaments Ă©voquĂ©s lors du « dĂ©bat » Raoult . MĂȘme si je me rappelle plus facilement de lâIvermectine . Parce-que je me suis retrouvĂ© devant deux ou trois fois dans la pharmacie de mon service.
Quant au professeur Raoult , alors que son pic de popularitĂ© et de mĂ©diatisation est aujourdâhui moindre quâil y a quelques mois, chaque fois que je lâĂ©coute dans une vidĂ©o, jâai du mal Ă comprendre ce quâil explique. Il est sĂ»rement trĂšs intelligent et bien plus compĂ©tent que moi, de toutes façons, concernant la pandĂ©mie du Covid. Mais je trouve quâil manque souvent des rĂ©ponses simples et courtes aux questions quâon lui pose.
Si la prudence est de mise pour parler de science, de constatations et de rĂ©sultats, jâai lâimpression quâil « rajoute » beaucoup de prudence par dessus la prudence pour rĂ©pondre Ă certaines questions. Peut-ĂȘtre parce quâil a subi beaucoup dâattaques et de pressions dont je nâai pas idĂ©e. Ces polĂ©miques qui piquent rapidement et abondamment rendent aussi « anormale » lâexpĂ©rience de cette pandĂ©mie.
Cependant, si jâai pu croire que je pourrais soit me passer dâune vaccination anti-Covid, soit prendre mon temps avant de me dĂ©cider, câest parce-que, Ă ce jour, comme dâautres personnes faisant partie des minoritĂ©s directement exposĂ©es, je nâai pas attrapĂ© le Covid. A une « Ă©poque », lâannĂ©e derniĂšre, oĂč durant plusieurs mois, il nâexistait pas de vaccin anti-Covid. Je crois donc beaucoup aux bienfaits des gestes barriĂšres tels que le port du masque, le lavage des mains avant tout, le fait dâaĂ©rer autant que possible. Puis, vient la distanciation sociale. Je devrais placer la distanciation sociale dans le trio de tĂȘte immĂ©diat des gestes barriĂšres. La distanciation sociale est un geste barriĂšre qui compte. Sauf que la distanciation sociale, nous savons trĂšs bien depuis des mois quâil est des circonstances oĂč il nây en nâa pas :
Dans les transports en commun et dans les gares aux heures de pointe. Il faudrait donc arrĂȘter les transports en commun et fermer toutes les gares ? Ce serait immobiliser lâĂ©conomie. Laisser sâaccumuler des tensions sociales qui finiraient par sâĂ©tendre dans toute la sociĂ©tĂ© jusquâĂ lâĂ©clatement. Mieux vaut donc permettre la circulation des gens tout en les contrĂŽlant de plus en plus, progressivement, de façon Ă leur laisser le temps de sây habituer. Et de croire que câest leur choix.
Lâautre particularitĂ© de la distanciation sociale, câest quâelle isole. Et sâoppose aussi, dâune certaine façon, Ă une certaine solidaritĂ©. Puisque lâon se voit moins, que lâon se rassemble moins et que lâon Ă©change donc moins nos informations et nos expĂ©riences. Au contraire des minoritĂ©s dirigeantes, qui, elles, continuent de se refiler les bons tuyaux et les bons filons.
La vaccination anti-Covid, en France, est devenu un sujet aussi sensible que la religion, la sexualitĂ©, lâappartenance politique ou le salaire que lâon gagne.
Jâai envoyĂ© un nouveau mail, le second, Ă la mairie de ma ville. Comment justifier que lâon puisse dĂ©sormais, Ă nouveau, librement accĂ©der Ă un centre commercial. En portant un masque anti-Covid. Et quâil faille toujours, ce samedi 11 septembre, fournir un passe sanitaire ou un test PCR ou antigĂ©nique de moins de 72 heures pour entrer dans une mĂ©diathĂšque ? Tout en portant un masque anti-Covid.
Que le maire applique la loi, câest un fait. Mais au travers de cette expĂ©rience, je comprends quâun maire se doit aussi de savoir interroger la loi. Et, pas seulement agir pour bien se faire voir de celles et ceux qui sont au dessus de lui. Car si lâon suit ce raisonnement qui consiste Ă strictement appliquer la loi sans lâinterroger, dans dâautres circonstances, on pourrait aussi laisser des gens mourir au prĂ©texte quâils ne relĂšvent pas de notre juridiction ou de notre champ de compĂ©tences. Ou parce-que la loi nâa rien prĂ©vu dans ce genre de cas de figure. Une loi nâempĂȘche pas encore dâobserver et de penser. Mais ça va peut-ĂȘtre bientĂŽt arriver.
Me voici donc dĂ©finitivement, ou Ă peu prĂšs, paranoĂŻaque. Ou, plus simplement, je nâai toujours rien compris aux mesures et aux dĂ©cisions simples et bienveillantes prises pour nous face Ă cette pandĂ©mie du Covid. Je suis un mauvais exemple. Il est Ă©vident que je fais preuve de mauvaise volontĂ©.
Franck Unimon, ce samedi 11 septembre 2021.