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Cinéma

Le Chant du Loup

 

Le Chant du Loup un film d’Antonin Baudry

Sorti en salles ce 20 février 2019

 

RĂ©cemment, un candidat de la version française de l’émission tĂ©lĂ©visĂ©e The Voice a dĂ©clarĂ© qu’il prĂ©fĂ©rait rester lui-mĂȘme plutĂŽt que de chanter de façon contraire et voir les quatre jurĂ©s se retourner pour le choisir. Ce candidat Ă©tait peut-ĂȘtre plus libre qu’Antonin Baudry lorsque celui-ci a rĂ©alisĂ© Le Chant du Loup. Car dans Le Chant du Loup, on « apprend » par exemple qu’une femme amoureuse est nĂ©cessairement une infirmiĂšre dĂ©vouĂ©e Ă  qui, Ă  la vitesse d’un coup de foudre, on peut confier des secrets d’Etat. D’autant que, Ă©tant donnĂ© qu’elle est libraire, elle saura lire entre les lignes.

 

L’affiche du film Ă©tait trop belle : Un sous-marin, un plongeur et François Civil, Omar Sy, Reda Kateb, Matthieu Kassovitz pour les tĂȘtes d’affiches. Soit le croisement d’acteurs Ă©prouvĂ©s, estimĂ©s, que l’on aime regarder jouer.

Le film commence bien. MĂȘme si, assez vite, du cĂŽtĂ© de nos acteurs « connus », ça sonne Ă  cĂŽtĂ©. Soit leur prĂ©sence est insuffisamment raccord avec le climat du film. Soit on leur a dĂ©jĂ  vu cette expression-lĂ  quelque part. Mais c’était sur Terre, dans un autre film ou dans une sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e. Le Chant du Loup avait pourtant de beaux atouts. Parmi eux, de la culture :

« Les vivants, les morts et ceux qui sont en mer ». Cette citation d’Aristote ouvre le film.

On y attrape quelques bouts de cette connaissance inhérente à chaque univers mystérieux et celui de la mer et de la marine nationale en sont :

« Un sous-marin bien conduit, ça fait moins de bruit que la mer ».

Chanteraide, surnommĂ© « Chaussette », interprĂ©tĂ© par François Civil, nous Ă©pate bien-sĂ»r par ses dons d’audition comme par son Ă©rudition acoustique qui font de lui un mutant qui pourrait postuler en vue de participer Ă  la version française des X-Men.

Les cartes de la gĂ©opolitique ont Ă©tĂ© actualisĂ©es. Tout cela est vraisemblable. Mais le film reste entre deux. Il pourrait ĂȘtre ratĂ©. Il pourrait ĂȘtre rĂ©ussi. « Nos » acteurs de premier plan font ici ce qu’ils ont dĂ©jĂ  fait. Alors que le but de ce film est quand mĂȘme de nous emmener dans d’autres ailleurs que ceux proposĂ©s gĂ©nĂ©ralement par les productions françaises :

Comédies ou « drames ».

Matthieu Kassovitz s’en sort le mieux. MĂȘme si son jeu peut ressembler Ă  une extension de son personnage de Malotru dans Le Bureau des LĂ©gendes, il lui donne quelques nuances supplĂ©mentaires et restitue bien le peu d’humour Ă©crit.

Le Chant du Loup accumule peu Ă  peu certains « dĂ©fauts » que l’on va d’autant plus lui reprocher que l’on a cru en lui : Vouloir faire ou donner l’impression de vouloir faire « comme » les productions amĂ©ricaines mais en moins bien. MĂȘme si, Ă  ce que j’ai lu, ces films ne seraient pas les rĂ©fĂ©rences principales du rĂ©alisateur, j’ai trouvĂ© Le Chant du Loup  « moins » bien que A La Poursuite d’Octobre Rouge rĂ©alisĂ© en 1990 par John Mc Tiernan et que le K-19 : Le PiĂšge des profondeurs rĂ©alisĂ© en 2002 par Kathryn Bigelow.

La rĂ©fĂ©rence cinĂ©matographique principale  serait  Le Bateau ( Das Boot) rĂ©alisĂ© en 1981 par Wolfgang Petersen. Film dont j’avais entendu parler durant mes annĂ©es de collĂšge mais que je n’ai toujours pas vu. Wolfgang Petersen a aussi, entre-autres, rĂ©alisé Dans la ligne de mire ( 1993) ainsi que Troie ( 2004) pour citer deux autres de ses films connus.

 

Le Chant du Loup est peut-ĂȘtre un film de jeunesse. Avec ce que l’on attribue de façon idĂ©alisĂ©e Ă  la jeunesse : Fougue, audace, crĂ©ativitĂ© et force de travail. Il en fallait indiscutablement pour tenter ce genre de film, en France, et en l’écrivant avec ces quatre acteurs principaux aux caractĂšres et aux carriĂšres diffĂ©rentes et qui jouaient peut-ĂȘtre ensemble pour la premiĂšre fois dans un long mĂ©trage.

Matthieu Kassovitz, a Ă©tĂ© en France l’un des rĂ©alisateurs-acteurs chouchous des annĂ©es 90-2000 (La Haine rĂ©alisĂ© par lui, Regarde les Hommes tomber rĂ©alisĂ© par Jacques Audiard pour rĂ©sumer grossiĂšrement sa pĂ©riode 90-2000). Depuis, dans les mĂ©dia, il apparaĂźt comme un personnage plutĂŽt offensif ou contrariĂ© en mĂȘme temps qu’un rĂ©alisateur/producteur/ acteur qui continue de bĂ©tonner son CV. Pour le plaisir, je vais Ă  nouveau citer la sĂ©rie Le Bureau des LĂ©gendes. En 2008, il a Ă©tĂ© l’un des producteurs- en mĂȘme tant qu’acteur- pour le film Louise Michel rĂ©alisĂ© par Gustave Kervern et BenoĂźt DelĂ©pine. Mais il Ă©tait trĂšs Ă©tonnant de le trouver par exemple dans PiĂ©gĂ©e (2012) de Steven Soderbergh. Comment fait-il ?

Reda Kateb a commencĂ© Ă  se faire connaĂźtre par les deux ou trois premiĂšres saisons de la sĂ©rie française Engrenages. Une sĂ©rie policiĂšre française trĂšs mĂ©connue en France pour des raisons aussi trĂšs mĂ©connues. Reda Kateb a dĂ©jĂ  une belle carriĂšre. Un ProphĂšte de Jacques Audiard ; Qu’un seul Tienne et les autres suivront de LĂ©a Fehner ; Zero Dark Thirty de Kathryn Bigelow ; Qui Vive de Marianne Tardieux ; FrĂšres Ennemis de David Oelhoffen. Et bien d’autres films.

Ensuite, parler d’ Omar Sy, c’est parler de sa pĂ©riode Omar et Fred puis d’Intouchables, bien-sĂ»r mais aussi de Nos Jours Heureux rĂ©alisĂ© par les mĂȘmes Toledano et Nakache ; X-Men : Days of Future Past rĂ©alisé par Bryan Singer ; Yao (2018) rĂ©alisĂ© par Philippe Godeau. Et d’autres films.

François Civil qui a le rĂŽle principal dans Le Chant du Loup est, comme dans le film, le « petit » jeune (François Civil est nĂ© en 1990). Celui dont la carriĂšre militaire/cinĂ©matographique prend son essor. J’ai dĂ©couvert l’acteur François Civil seulement avec la sĂ©rie Dix pour cent (Ă  partir de 2015). Il joue trĂšs bien Ă©galement, voire encore mieux, dans Made in France (2016) de Nicolas Boukhrief.

Souvent, l’acteur principal est l’alter ego du rĂ©alisateur. Antonin Baudry est un ancien diplomate français nĂ© en 1975, auteur (avec l’illustrateur Christophe Blain) sous le pseudonyme Abel Lanzac de la bande dessinĂ©e Le Quai d’Orsay. Antonin Baudry a participĂ© Ă  l’écriture du scĂ©nario de la version cinĂ©matographique de Le Quai d’Orsay, rĂ©alisĂ©e par Bertrand Tavernier en 2012.

Le Chant du Loup ( 2018) est le premier film d’Antonin Baudry en tant que rĂ©alisateur et scĂ©nariste exclusif. Souhaitons lui une autre suite dans le cinĂ©ma que ce qui arrive au personnage de Chaussette Ă  la fin de Le Chant du Loup. Car son film, en rĂ©unissant ces quatre acteurs, ces quatre visages et entitĂ©s, dans l’univers sonore et visuel encore assez clos du cinĂ©ma français, est peut-ĂȘtre la mĂ©taphore d’une France qu’il voudrait plus ouverte. Et sans doute l’amorce d’une filmographie rĂ©ussie.

Franck Unimon, ce lundi 4 mars 2019.

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Echos Statiques

L’Ă©cole Robespierre 2Ăšme partie

 

 

                                            L’école Robespierre 2Ăšme partie

 

« Fé-Lix Potin, On y revient ! ».

 

A l’école Robespierre, je suis sorti des toilettes. Le grand Philippe C m’attendait. Surpris, je me suis arrĂȘtĂ©. Il a tirĂ© sur son Ă©lastique et me l’a envoyĂ© dans l’oeil. Il est reparti hilare.

En temps ordinaire, je n’aurais pas caftĂ©. Philippe C, avec Cyril T, son grand frĂšre et Enzo B Ă©taient des durs de la rue ou de la citĂ© Creuse (on disait « Greuse »). Une petite citĂ© HLM un peu Ă  l’écart, faite de bĂątiments de trois ou quatre Ă©tages, situĂ©e entre le théùtre des Amandiers et la citĂ© oĂč j’habitais faite de tours de 18 Ă©tages.

Mais la douleur, la surprise et la peur m’ont fait pleurer. C’est Mr Lambert, je crois, qui, devant toute la cour, a engueulĂ© Philippe C. Celui-ci s’est fait tout petit. Cela a Ă©tĂ© la premiĂšre et derniĂšre fois oĂč il s’en est pris Ă  moi.

Certains garçons avaient la rĂ©putation d’ĂȘtre de trĂšs bons bagarreurs. Amar B frimait parce qu’il avait des grands frĂšres qui se battaient bien et pouvaient le dĂ©fendre. « Mais, en vrai », il n’était pas fort. C’est ce qui a pu se raconter.

Jacky W, qui Ă©tait un bon bagarreur, a fait pleurer Amar un jour. Lors de l’unique bagarre – nous Ă©tions plutĂŽt copains- que j’ai eue avec Jacky W (pour une raison que j’ai oubliĂ©e) j’ai trĂšs vite donnĂ© un coup de sabot. Ce jour-lĂ , je portais des sabots. Jacky W s’est arrĂȘtĂ©. Il est parti s’asseoir quelques minutes Ă  quelques mĂštres. J’ai attendu, debout et prĂȘt, les poings serrĂ©s, pieds nus dans mes sabots noirs. Jacky s’est relevĂ© puis a fait la paix avec moi. J’ai acceptĂ©. Je suis reparti de mon cĂŽtĂ©. Je n’étais pas un bagarreur. Je n’avais rien Ă  me prouver de ce cĂŽtĂ©-lĂ .

William P avait combattu de façon hĂ©roĂŻque face Ă  Cyril T devant la cour de l’école. Cyril T l’avait provoquĂ©. Peut-ĂȘtre parce qu’arrivĂ© en CE2 ou en CM1, William P Ă©tait nouveau dans l’école. Et, devant ses copains Philippe C, Enzo B, et son grand-frĂšre, Cyril T a dĂ» aller jusqu’au bout.

William P s’est trĂšs bien dĂ©fendu. On m’a racontĂ©. C’est peut-ĂȘtre William P lui-mĂȘme qui me l’a racontĂ© car on s’entendait bien. AprĂšs la bagarre, William a portĂ© un bandage Ă  la main  mais il a Ă©tĂ© respectĂ© et admirĂ©. Cyril T l’a peut-ĂȘtre menacĂ© mais c’était surtout pour ne pas perdre la face.

Dans l’autre Ă©cole primaire de Robespierre, j’ai entendu parler d’un garçon d’origine vietnamienne, Teduc de V
. D’aprĂšs la description, dĂšs qu’il s’énervait lors d’une bagarre, il Ă©tait terrifiant. Je ne l’ai jamais rencontrĂ©.

Lorsque j’Ă©tais en CM2, j’ai Ă©tĂ© atterrĂ© d’entendre des petites et des petits prononcer dĂšs le CP des gros mots tels que « Ta mĂšre la pute ! ».

AprĂšs ĂȘtre entrĂ© en 6Ăšme, au collĂšge Evariste Gallois, un tout petit peu en dehors de ma citĂ©, je suis revenu deux ou trois fois dire bonjour Ă  Mr Pambrun. Il m’a Ă  chaque fois Ă©coutĂ© durant quelques minutes. Lorsque je lui ai dit que, moi, au collĂšge, je ne faisais pas de bĂȘtises, il a rĂ©pĂ©tĂ© mes propos en me souriant. Il a peu insistĂ©. Mais j’ai compris qu’il n’en croyait pas un mot.

Comme d’autres copains, avec Jean-Marc T, en particulier, un Antillais d’origine martiniquaise nĂ© en France comme moi, rencontrĂ© en 6Ăšme, j’ai commencĂ© Ă  voler dans le supermarchĂ© FĂ©lix Potin. Anciennement Sodim. Je volais n’importe quoi. J’en remplissais mes poches et n’en faisais rien. C’était d’autant plus idiot que le supermarchĂ© FĂ©lix Potin, le supermarchĂ© le plus proche de ma citĂ©, Ă©tait le supermarchĂ© oĂč mes parents m’envoyaient faire des courses. Autrement, il y’avait le supermarchĂ© Suma situĂ© du cĂŽtĂ© du collĂšge Evariste Gallois. En face de FĂ©lix Potin, de l’autre cĂŽtĂ© de la route, peut-ĂȘtre avant la construction du grand parc de Nanterre, il y’avait un terrain vague. C’est lĂ  que Gilles S, qui habitait aux Canibouts, prĂšs des PĂąquerettes et de l’hĂŽpital de Nanterre oĂč travaillait ma mĂšre, a tenu Ă  faire un concours avec Jean-Marc et moi. Pour savoir qui de nous trois avait la plus grande ou la plus grosse bite. Gilles S avait beaucoup de bagout. Il s’est soudainement retournĂ© vers nous en pressant son zizi dans sa main pour nous montrer. J’ai refusĂ© de participer. Je savais que les gros en avaient une petite.

Sur ce terrain vague, aussi, avec Jean-Marc, j’ai commencĂ© Ă  crapoter. J’ai vite arrĂȘtĂ©. Aucun plaisir. En plus, cela prenait beaucoup de temps pour terminer une cigarette. Lorsque Francine B, rencontrĂ©e au collĂšge, m’a dit plus tard que cela la calmait de fumer des cigarettes, cela m’a paru trĂšs abstrait.

C’est sur la route entre ce terrain vague (ou le parc de Nanterre) et FĂ©lix Potin, qu’un jour, des gardiens du parc ont poursuivi des jeunes de la rue Creuse qui avaient traversĂ© le parc en mobylette. C’était interdit. Nous les avions regardĂ©s faire. Les deux jeunes, dont le grand frĂšre de Cyril T je crois, dĂ©boulaient tĂȘte nue sur leur mobylette chaudron au moteur dĂ©bridĂ©. Ils Ă©taient suivis environ cinquante mĂštres ou cent mĂštres plus loin par les deux gardiens du parc assis sur leur deux roues de fonction, vĂȘtus comme des gendarmes avec leur kĂ©pi sur la tĂȘte. Au compteur, il devait bien y avoir trente Ă  quarante kilomĂštres heures d’Ă©cart entre les vĂ©lomoteurs rĂ©glementaires et de petite cylindrĂ©e des gardiens. Et ceux du grand frĂšre de Cyril T et de son copain.

Nous Ă©tions plusieurs jeunes (uniquement des garçons sans doute) Ă  regarder ça un peu comme s’il s’agissait du Tour de France. Nous encouragions Ă©videmment les deux jeunes. Vu que les deux gardiens avaient le sens du devoir, cela a durĂ© un moment. Sans suspense.

 

Non loin de lĂ  et Ă  l’entrĂ©e du parc, la chapelle St Joseph oĂč je suis allĂ© au catĂ©chisme. Lors des dĂ©bats, le pĂšre AndrĂ© me donnait souvent l’impression que j’étais vraiment intelligent. Lorsque le groupe Police a commencĂ© Ă  ĂȘtre connu, avec d’autres jeunes, j’ai Ă©coutĂ© et réécoutĂ© le titre Do Do Do Da Da Da. Au catĂ©chisme, j’ai retrouvĂ© un camarade de collĂšge avec lequel j’ai davantage sympathisĂ©- presque fraternisĂ© la religion aidant- Roberto C, d’origine italienne.

 

Au collĂšge Evariste Gallois, la derniĂšre fois que j’ai vu Enzo B, il Ă©tait entourĂ© de policiers. Nous Ă©tions assez nombreux dans la cour du collĂšge Ă  assister Ă  son arrestation. Le petit Enzo B (Enzo Ă©tait de petite taille) avec lequel mes quelques Ă©changes Ă©taient sympathiques tout comme avec Cyril T et son grand frĂšre, se tenait fiĂšrement. Enzo est montĂ© dans le camion de police. Je crois ne l’avoir jamais revu. Pas plus que je n’ai revu le grand Philippe C, Cyril T et son grand frĂšre. Ou alors, je les ai revus et ne les ai pas reconnus.

 

Je ne sais comment. Un jour, j’ai su qu’il Ă©tait possible de renifler la colle qui sert Ă  poser des rustines lorsque l’on rĂ©pare les chambres Ă  air de nos vĂ©los. Je ne l’ai pas fait. Je ne voyais pas ce que cela pouvait m’apporter.

Gilles P, un voisin de notre tour qui habitait avec ses parents quelques Ă©tages en dessous de notre appartement, mon aĂźnĂ© d’un ou deux ans, serait mort d’une overdose Ă  l’hĂ©roĂŻne. Je le croisais quelques fois en bas de notre tour, en attendant l’ascenseur, ou au collĂšge. Son pĂšre Ă©tait policier, je crois. Une des derniĂšres images que j’ai de Gilles P, c’est lui, portant un maillot de foot vert et se battant avec une fille dans la cour du collĂšge. Il avait dĂ» la provoquer. Elle se battait trĂšs bien. Sa jambe allait haut. Gilles avait beau jouer la dĂ©contraction en reculant tel un boxeur pour Ă©viter les coups, il n’avait pas gagnĂ© et avait plutĂŽt Ă©tĂ© intimidĂ©.

Une autre image me montre Gilles P un peu plus tard et portant un blouson de cuir noir, un Jean foncĂ© prĂšs du corps et des baskets Adidas Ă  trois bandes. Les groupes AC/DC et Trust Ă©taient devenus des rĂ©fĂ©rences musicales pour certains jeunes. Gilles P et moi nous sommes plus croisĂ©s que parlĂ©s. Deux ans d’écart, lorsque l’on est jeune, c’est beaucoup.

En 4Ăšme, Patrice L m’a proposĂ© un jour d’aller coucher avec une fille. Patrice a ajoutĂ© :

« Par contre, ramĂšne l’eau de javel parce-qu’elle se lave pas
 ». J’ai refusĂ©.

Une autre fois, j’ai croisĂ© Patrice alors qu’il s’amusait avec ses copains. Il m’a proposĂ© de faire de la mobylette avec eux. J’ai refusĂ© poliment et ai commencĂ© Ă  m’éloigner. Peu aprĂšs, un camion de police est venu les embarquer.

En 3Úme, Mme Epstein, notre prof de Français et professeur principal, petite femme au fort caractÚre et grande fumeuse, étonnée, nous demandait réguliÚrement :

« Pourquoi vous Ă©crivez toujours des histoires qui se passent aux Etats-Unis ? Racontez des histoires d’endroits que vous connaissez
 ». J’ai quelques fois essayĂ© de rĂ©flĂ©chir pendant quelques secondes. Je n’y arrivais pas.

 

J’ai aimĂ© ma citĂ©. Les reprĂ©sentants entraient comme ils voulaient dans notre tour. Lorsqu’ils s’arrĂȘtaient devant la porte d’un appartement, ils faisaient vriller les tympans avec la sonnette. Puis, sans attendre la moindre rĂ©action, ils passaient Ă  une autre porte d’appartement et ainsi de suite dans les Ă©tages. 18 Ă©tages.

Sur notre palier, parmi nos voisins, figuraient les M. Ils claquaient la porte lorsqu’ils entraient. Ils la claquaient lorsqu’ils partaient. Je suis allĂ© plusieurs fois chez eux. Christophe M, le fils, et moi Ă©tions assez copains. Il avait une voix assez aigĂŒe Ă  l’époque. Corinne, sa grande sƓur aĂźnĂ©e, avait beaucoup aimĂ© le tube de Patrick Juvet : « OĂč sont les femmes ? ». A notre Ă©tage, on l’avait entendu et rĂ©entendu, plus qu’à la radio, ce tube.

Lorsque des gens se disputaient chez eux, on entendait tout. Pareil lorsque quelqu’un se dĂ©cidait Ă  attaquer un des murs de son appartement Ă  la chignole. Quand un jeune dĂ©cidait de roder sa mobylette, on Ă©tait avec lui alors qu’il passait et repassait dans la citĂ©, augmentant petit Ă  petit la vitesse de son engin.

Le terrain de foot en cailloux situĂ© entre ma tour, la tour 13 et la tour 14 avait ses pĂ©riodes de grande frĂ©quentation. J’y ai connu certains de mes petits matches de foot.

La création du centre commercial Les Quatre Temps à la Défense nous a apporté un renouvellement de notre environnement. Auchan et le Mac Donald.

Avec Jean-Marc, principalement, les premiĂšres fois, je suis aussi allĂ© voler dans quelques magasins des Quatre Temps. MĂȘme si je m’étais dĂ©jĂ  fait prendre une fois. A Suma. L’attrait Ă©tait trop fort.

CollĂ©gien, je suis bien plus de fois entrĂ© dans le centre commercial les Quatre Temps qu’au théùtre des Amandiers devant lequel, pourtant, j’Ă©tais dĂ©ja passĂ© quantitĂ© de fois depuis l’enfance. Le théùtre des Amandiers fait pratiquement face Ă  la piscine Maurice Thorez. Le théùtre des Amandiers Ă©tait un endroit qui ne me parlait pas. Les personnes qui faisaient la queue, jusque dans la rue, pour y entrer, nous empĂȘchaient parfois de passer. Ces personnes ne nous parlaient pas, ne nous ressemblaient pas, Ă  mes copains et moi.

Mme Epstein, notre prof de Français de 3Ăšme, nous a emmenĂ© voir Combat de NĂšgres et de chiens au théùtre des Amandiers. Ensuite, elle en a dĂ©battu avec nous. Malheureusement, contrairement Ă  l’expĂ©rience de la bibliothĂšque en CE2 avec Mr Pambrun, cette fois-ci, je n’ai pas eu envie d’y retourner. Pourtant, le théùtre des Amandiers Ă©tait bien plus proche de notre tour que la bibliothĂšque et le centre commercial des Quatre Temps. J’ignorais ce que le théùtre pouvait m’apprendre et me donner mais aussi ce que j’aurais pu, tout autant, lui donner. Il est vrai, aussi, que l’accĂšs au théùtre Ă©tait payant. On ne paie jamais pour entrer dans un centre commercial.

Au collĂšge, ce qui me parlait, c’était la tĂ©lĂ©, le Foot, l’AthlĂ©tisme, Bruce Lee, Mohamed Ali, le Tennis, le Cyclisme, les acteurs amĂ©ricains, la musique noire amĂ©ricaine, les Etats-Unis rĂ©sumĂ©s Ă  New-York, le Reggae, la lecture.

Au collĂšge, ce qui me parlait c’était la ceinture de mon pĂšre, son soutien scolaire, le crĂ©ole, la Guadeloupe, la musique antillaise, la mĂ©moire de l’esclavage, avoir des bonnes notes Ă  l’école. Ma mĂšre. Ma petite sƓur et mon petit frĂšre. Mon cousin Christophe qui habitait aux PĂąquerettes prĂšs de l’hĂŽpital de Nanterre. Et les copains.

Parmi ces quelques jeunes citĂ©s, et certains de leurs proches, femmes et hommes, il doit malheureusement s’en trouver plusieurs Ă  qui la haine a su parler.

Franck Unimon, ce samedi 2 mars 2019. Fin de la 2Ăšme partie de l’école Robespierre.

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Jusqu’Ă  la garde

 

Jusqu’à la Garde un film de Xavier Legrand

 

 

« J’ai changé  ». Antoine vient de boire un grand verre d’eau. Il se met Ă  pleurer face Ă  « sa » femme, Miriam, devant leur fils Julien (l’acteur Thomas Gioria) ĂągĂ© de 11 ans.

Oui, il a changé.

Avant de boire ce grand verre d’eau dans la cuisine et de donner cette Ă©trange « confession », de sa masse imposante, il est venu prendre possession. Des lieux. D’une intimitĂ©. Il n’est pas chez lui. Il est chez son ex-femme, Miriam.

Quelques annĂ©es plus tĂŽt, lointain horizon, lui, ce responsable sĂ©curitĂ© (interprĂ©tĂ© par l’acteur Denis MĂ©nochet) d’un centre commercial, Ă©tait peut-ĂȘtre un homme et un port aimants et rassurants pour la frĂȘle Miriam (l’actrice LĂ©a Drucker) et leurs deux enfants. Au cƓur d’un couple et d’une famille, la sĂ©curitĂ©, toutes les sĂ©curitĂ©s, sont ce que l’on peut attendre de l’autre. A la fin du film Mystic River – rĂ©alisĂ© par Clint Eatswood- alors qu’il doute, un pĂšre (interprĂ©tĂ© par Sean Penn) est rĂ©armĂ© moralement par sa propre femme et mĂšre de leur fille disparue. Oui, lui et ses hommes ont tuĂ©, Ă  tort, un de ses anciens amis d’enfance (victime lui-mĂȘme d’un viol dans son enfance) qu’il a cru  responsable du viol et du meurtre de leur fille. Mais il a fait ce qui est attendu d’un homme qui protĂšge sa famille (sa tribu) lui assure sa femme ! Et, devant le perron de leur maison, ce pĂšre interprĂ©tĂ© par Sean Penn, et sa femme, se montrent pleins d’assurance alors qu’ils assistent Ă  un dĂ©filĂ© et que l’on voit un moment passer, abattu moralement, le fils de l’ami d’enfance rendu responsable – Ă  tort- d’un crime qu’il avait lui-mĂȘme subi plus jeune car personne ne l’avait dĂ©fendu.

Dans Jusqu’à la garde, Antoine, semblable Ă  un ogre, est devenu une menace pour son couple et sa famille dont il Ă©tait supposĂ©, originellement, assurer la protection.

Oui, il a changé.

Ou Miriam a peut-ĂȘtre toujours rĂȘvĂ© l’homme qu’il Ă©tait comme on peut parfois rĂȘver celle ou celui que l’on aime.

Lors de la comparution devant le juge, l’ogre ou « L’Autre », comme Miriam et leurs enfants le nomment en son absence, se comporte en homme qui sait se tenir. Son avocate met en doute la cohĂ©rence comme l’honnĂȘtetĂ© morales de Miriam :

« On part en week-end » ; « Comme le prĂ©tend Madame
 ». L’avocate d’Antoine se retient presque d’exprimer des rĂ©serves quant aux capacitĂ©s de Miriam en matiĂšre d’éducation et de soins pour ses deux enfants. Les parents d’Antoine, ses collĂšgues ainsi que ses amis chasseurs tĂ©moignent en faveur de son exemplaritĂ©.

De son cÎté, aprÚs avoir écouté le témoignage de leur fils Julien, lu par la juge, Antoine déclare calmement :

« J’aimerais bien comprendre. Je ne sais pas ce qu’on lui met dans la tĂȘte ». « On », c’est bien-sĂ»r Miriam, assise juste Ă  cĂŽtĂ© de lui. Devant les tĂ©moignages contradictoires, qui se doivent de rester calmes et intelligibles malgrĂ© l’extrĂȘme tension Ă©motionnelle, la juge (la comĂ©dienne Saadia BentaĂŻeb, trĂšs bien) a du mal Ă  trancher.

Jusqu’à la garde (2018) est la suite du court-mĂ©trage (30 mn) Avant que de tout perdre ( 2013) que Xavier Legrand avait rĂ©alisĂ© sur le mĂȘme thĂšme et avec les mĂȘmes comĂ©diens principaux. En 2013, j’avais dĂ©couvert Avant que de tout perdre alors que j’étais encore rĂ©dacteur pour le site Format Court et que j’y co-animais les soirĂ©es dĂ©bats mensuelles. Une fois par mois, en plus d’autres Ă©vĂ©nements, le site Format Court continue de proposer des soirĂ©es dĂ©bat au cinĂ©ma des Ursulines Ă  quelques minutes du jardin du Luxembourg.

Xavier Legrand était venu participer au débat. Avant que de tout perdre nous avait « bien » plu :

Devant des sujets particuliĂšrement sensibles, ici celui des violences conjugales, lorsqu’un film est bien ou trĂšs bien rĂ©alisĂ©, Ă©crit et interprĂ©tĂ©, il me semble toujours un peu dĂ©placĂ© de dire ou d’écrire qu’il m’a « bien » ou « beaucoup » plu. Car c’est rarement pour notre confort personnel que l’on participe Ă  un projet pareil. Et, c’est Ă©galement rarement pour notre plaisir personnel que l’on se dĂ©cide Ă  voir un film comme celui-ci.

Lors de la derniĂšre remise des CĂ©sar (ce vendredi 24 fĂ©vrier 2019 : il y’a une semaine) Jusqu’à la garde a rĂ©coltĂ© plusieurs prix dont celui du meilleur film de l’annĂ©e et de la meilleure actrice pour LĂ©a Drucker. Je suis allĂ© le voir hier. Pour ses deux films, Xavier Legrand s’est documentĂ©. Il a aussi rencontrĂ© un certain nombre de personnes et d’organisations Ă  mĂȘme de l’aiguiller. Dans le gĂ©nĂ©rique de fin de Jusqu’à la garde, il remercie par exemple la FNCAV :

FĂ©dĂ©ration Nationale Des Associations et des Centres de Prise en Charge d’Auteurs de Violences Conjugales et Familiales.

Jusqu’à la garde est un film trĂšs ambitieux. Il y’a beaucoup Ă  dire sur les violences conjugales et Xavier Legrand rĂ©ussit trĂšs bien Ă  concilier Ɠuvre de fiction et Ɠuvre pĂ©dagogique. Pour cela, il est aussi rĂ©ussi que le Holy Lola (rĂ©alisĂ© en 2003
comme Mystic River !) de Bertrand Tavernier, consacrĂ©, lui, Ă  l’adoption.

Un film comme Ne Dis Rien rĂ©alisĂ© en 2004 par Iciar Bollain sur le thĂšme des violences conjugales m’était aussi restĂ©. Mais la violence brute dĂ©robĂ©e par moments Ă  Antoine/ Denis MĂ©nochet me rappelle aussi celle excavĂ©e par un Chris Penn ( feu le frĂšre de Sean Penn) dans Nos FunĂ©railles ( 1996) d’Abel Ferrara ou Ă©galement dans le Short Cuts rĂ©alisĂ© par Robert Altman en 1994. « Adoption », « funĂ©railles », il y’a au moins de ça dans les violences conjugales. Une adoption et des funĂ©railles ratĂ©s. On peut y ajouter, malheureusement, le viol.

Il n’y’a pas de scĂšne de viol physique dans Jusqu’à la garde. Mais la prestation de Denis MĂ©nochet me rappelle celle d’un Jo Prestia dans le IrrĂ©versible (2002) de Gaspar NoĂ© oĂč, lĂ , il est bien question d’un viol physique (psychologique et moral) filmĂ© de maniĂšre rĂ©aliste (ou crue selon les sensibilitĂ©s). J’avais appris plus tard qu’aprĂšs avoir interprĂ©tĂ© ce rĂŽle de violeur, le comĂ©dien Jo Prestia avait dĂ» suivre une thĂ©rapie. Lors de la cĂ©rĂ©monie des CĂ©sars de vendredi dernier, je me suis demandĂ© si Denis MĂ©nochet , qui porte ce rĂŽle d’homme et de pĂšre violent allait avoir, lui aussi, besoin de ce soutien psychothĂ©rapeutique Ă  un moment ou Ă  un autre. Car jouer ce genre de personnage nous enfouit dans des Ă©motions dont il peut ĂȘtre difficile de se dĂ©pĂȘtrer :

Je me rappelle de l’acteur Jean-Michel Martial nous expliquant au cours d’un dĂ©bat , que pendant un temps, il avait « dĂ©gagĂ© un truc » aprĂšs avoir jouĂ© son rĂŽle de militaire tortionnaire sous la dictature de Duvalier Ă  HaĂŻti dans le film L’Homme sur les quais (1992) de Raoul Peck.

« Tortionnaire », « dictature »,  » Ne dis rien« ,  Mystic River, Short Cuts,  aprĂšs les « adoption »,  » funĂ©railles » ratĂ©s, IrrĂ©versible et le viol : mes rĂ©miniscences cinĂ©matographiques, aprĂšs voir vu Jusqu’Ă  la garde parlent pour moi et bien mieux que moi, en quelques mots, de ce que j’ai « vu » hier.

A l’image de ce que peuvent ressentir bien des victimes (de violences conjugales mais aussi d’autres violences), Jusqu’à la garde nous enferme. Il pourrait donner Ă  certaines personnes un certain sentiment de claustrophobie. NĂ©anmoins, mĂȘme si Miriam et ses enfants s’installent peu Ă  peu dans un Ă©tat d’alerte quasi animal, Xavier Legrand prĂ©serve nĂ©anmoins des sas et des Ă©chappatoires :

Miriam et ses enfants sont entourĂ©s de proches recommandables et aussi capables de tenir tĂȘte Ă  « L’Autre ». Appuis dont un certain nombre de victimes sont privĂ©es (victimes de violences conjugales, de violences sectaires, de violences dans les Ă©glises ou de violences liĂ©es Ă  la prostitution ou Ă  la toxicomanie par exemple
).

D’un point de vue clinique, ma seule petite rĂ©serve concerne le physique de Denis MĂ©nochet : sa stature imposante peut laisser croire qu’un violent ou une violente conjugal(e ) est obligatoirement une personne au physique de vigile et au regard de faucille ( de « pervers », diront d’autres). Les auteurs de violence conjugale ont Ă  mon avis des physiques trĂšs variĂ©s.

Jusqu’à la garde est un film qui informe que mieux peut ĂȘtre ou doit ĂȘtre fait en faveur des victimes. C’est aussi un film qui peut rappeler Ă  celles et ceux qui dĂ©tiennent un pouvoir ou un ascendant sur d’autres (hiĂ©rarchique, financier, affectif, Ă©ducatif,
.) que dĂšs lors que l’on a ce pouvoir, nos Ă©changes avec les autres peuvent ĂȘtre assez facilement biaisĂ©s. Il importe donc, aussi, de savoir se mettre Ă  la hauteur des autres ainsi qu’à leur rĂ©elle Ă©coute si l’on aspire vĂ©ritablement Ă  avoir avec eux des relations oĂč « tout se passe bien ».

RĂ©pĂ©ter des « Mon cƓur » ou des ribambelles de phrases toutes faites tressĂ©es de mots-clĂ©s lorsque l’on dispose d’un pouvoir et que l’on s’adresse Ă  l’autre ne suffit pas.

NominĂ© pour le CĂ©sar du meilleur acteur, Denis MĂ©nochet n’a pas eu le prix. Si j’ai Ă©tĂ© content qu’Alex Lutz l’obtienne pour son rĂŽle dans le film qu’il a corĂ©alisĂ© et co-Ă©crit (Guy), je dĂ©plore qu’au cinĂ©ma, les rĂŽles de « mĂ©chant » soient si connotĂ©s moralement qu’ils privent gĂ©nĂ©ralement leur interprĂšte d’une quelconque distinction. Par exemple, pour moi, dans le film Django Unchained (2012) de Quentin Tarantino, Samuel Jackson et LĂ©onardo DiCaprio, dans leurs rĂŽles respectifs, auraient pu ou dĂ» avoir un Oscar d’autant plus qu’ils meurent dans le film. Je reverrais ce film avec plaisir juste pour eux. Jamie Foxx qui joue pourtant le rĂŽle du hĂ©ros, soit Django, et qui a pu me plaire dans d’autres films est dans Django Unchained complĂštement secondaire Ă  mes yeux. Pareil lorsque l’Oscar du meilleur acteur avait Ă©tĂ© donnĂ© Ă  Tommy Lee Jones pour son rĂŽle dans Trois Enterrements (2005). Sans l’acteur Barry Pepper (que tout le monde a dĂ©sormais oubliĂ© alors que la carriĂšre de Tommy Lee Jones Ă©tait dĂ©jĂ  bien Ă©tablie), qu’aurait donnĂ© le jeu de Tommy Lee Jones ?

Mais au cinĂ©ma, on prĂ©fĂšre rĂ©compenser les « gentilles » ou les « bons » personnages. Pour son rĂŽle dans Jusqu’à la garde, LĂ©a Drucker a donc Ă©tĂ© rĂ©compensĂ©e. J’aime le jeu de LĂ©a Drucker. DĂ©sormais, ma rĂ©fĂ©rence la concernant est plutĂŽt son rĂŽle dans la trĂšs bonne sĂ©rie Le Bureau des LĂ©gendes. J’ai Ă©tĂ© touchĂ© par son discours et son attitude Ă  la cĂ©rĂ©monie des CĂ©sars. Mais comme elle l’a dit elle-mĂȘme, en remerciant Denis MĂ©nochet, elle a d’autant mieux jouĂ© son rĂŽle de Miriam parce-que Denis MĂ©nochet le lui a permis en se plongeant dans son personnage d’homme Ă  la violence irradiante. Il faut d’autant plus une grande confiance mutuelle, une forte connivence et affection – en plus d’une certaine force morale- entre comĂ©diens et une Ă©quipe de tournage pour arriver Ă  un tel rĂ©sultat. Impossible de rĂ©aliser ça en restant chacun seul dans son coin.

Une pensĂ©e pour la chanteuse dĂ©cĂ©dĂ©e Edith Lefel (1963-2003) qui, dans son titre SomnifĂšre, abordait le sujet des violences faites aux femmes. Nous faire zouker sur une chanson qui parle- en crĂ©ole- de violences faites aux femmes, il faut le faire. J’ai du mal Ă  imaginer Johnny nous faire le mĂȘme effet avec le mĂȘme titre.

Franck Unimon, ce vendredi 1er mars 2019.