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Les Rascals un film de Jimmy Laporal-Tresor

Les Rascals un film de Jimmy Laporal-Trésor

 

 

Sorti en janvier 2023, auréolé d’assez bonnes critiques, Les Rascals est passé assez inaperçu devant le public derrière les « colosses » Black Panther 2 et Avatar 2 présents également en salles en ce début d’année. Cependant, comme dans certaines oeuvres cinématographiques où l’on a pu voir « débuter », certaines actrices et acteurs, amusons-nous à mémoriser aujourd’hui le visage et les noms des acteurs principaux de cette pièce visuelle. Nous aurons plaisir à nous en rappeler plus tard lorsque certains membres du casting deviendront des artistes « reconnus ».

 

En effet, parmi les assez innombrables sorties de films, de séries, et leurs copies, peut-on dire que  Les Rascals est un petit film d’auteur de plus ?

 

Côté filiation, l’œuvre de Jimmy Laporal-Trésor, dont l’histoire se déroule à Paris ainsi qu’en banlieue parisienne dans les années 70-80 d’avant l’explosion de l’épidémie du Sida, m’a tout de suite fait penser à Un Français réalisé par Diasteme en 2014 et à The Club (Neil Thompson, 2008). Mais, bien-sûr, il peut être relié à d’autres oeuvres antérieures en particulier anglo-saxonnes.

Adam ( l’acteur Victor Meutelet) convaincant dans son rôle.

Croquis social, Les Rascals se situe à l’époque où le groupe de rockabilly les Stray Cats avait la côte tandis que refluait en France hors des cendres du temps un racisme anti arabe et anti noir de plus en plus pressé sur la scène politique française par le Front National du papa de Marine Le Pen. Laquelle était alors étrangère à toute ambition politique comme à toute exposition médiatique. Sa nièce était alors à peine issue de la conception. Et Eric Zemmour était peut-être encore étudiant, jeune journaliste ou devait faire du porte à porte quelque part en essayant de vendre des tapis de sol pour la pratique du yoga.

Frédérique ( l’actrice Angelina Woreth) et Adam( l’acteur Victor Meutelet) « RASCALS »
un film de JIMMY LAPORAL-TRESOR
Paris, FRANCE le 16/07/21
© Jean-Philippe BALTEL / SPADE / AGAT FILMS ET CIE

Comme dans Un Français de Diasteme, le film réussit bien le portrait féminin fascisant de la jeune Frédérique (l’actrice Angelina Woreth). Il m’est difficile de savoir si cela a été voulu par Jimmy Laporal-Trésor mais le personnage de la jeune Frédérique peut, à un moment donné, évoquer celui de la jeune femme qui avait appâté Ilan Halimi en 2006.

Néanmoins, il est peut-être encore un peu tôt pour que le cinéma français s’empare d’un rôle féminin comme celui de la jeune Frédérique et le regarde dans les yeux de bout en bout. A l’image de ce que  Diasteme avait pu faire avec le personnage interprété par Alban Lenoir dans Un Français.

 

Mais l’un des autres personnages très importants du film, c’est la musique.

Musicalement, à l’époque que nous raconte Les Rascals, le Rap  démarrait pour de bon mais on ne le savait pas encore. Ses danses attiraient davantage l’attention en particulier au Trocadéro. Dans Les Rascals, on aperçoit Sidney, l’ancien animateur radio, « héros » d’une époque avec son émission télévisée consacrée au Hip Hop.

 

Bob Marley, lui,  était mort depuis peu. Serge Gainsbourg était encore vivant. La New Wave avait déjà ses standards. Le Hard Rock était entré par effraction dans les collèges avec AC/DC et était à certains ados  ce que le Rap allait devenir ensuite d’abord pour des ados de cités et de banlieue. Le Zouk arrivait mais le monde ne connaissait pas encore le groupe Kassav’. Le Rock semblait encore être le plus grand armateur musical du monde.

Les Rascals, film sonorisé par le groupe Delgrès, prend particulièrement soin d’ancrer son histoire aussi avec quelques pochettes de disques telles celle de l’album vinyle Thriller de Michaël Jackson ou celle du groupe antillais Lazair.

 

Culturellement, Jimmy Laporal-Trésor a d’ailleurs axé son film selon un point de vue antillais. Et, j’ai beaucoup aimé sa description de certains des codes de la culture antillaise. Qu’il s’agisse du recours au Créole lors de certains passages ou des relations du héros Rudy (l’acteur Jonathan Feltre) avec sa mère. Depuis au moins Rue Cases-Nègres adapté par Euzhan Palcy en 1983, en passant par les films de Jean-Claude Flamand-Barny plus tard, Les Rascals contribue à l’édification d’une mémoire cinématographique qui inclut les Antilles françaises…dans l’Histoire de France. Car le film montre au grand jour que les Antillaises et Antillais, en France, à l’image de bien des immigrés, ont pu être considérés comme les restes d’un univers souterrain, ignoré, vitrifié, sacrifié.

 

De gauche à droite, Mandal ( l’acteur Marvin Dubart), Boboche ( l’acteur Taddeus Kufus), Rudy ( l’acteur Jonathan Feltre) Rico ( l’acteur Missoum Slimani) Sovann ( l’acteur Jonathan Eap).

Mais Les Rascals est aussi de ces films à classer dans la catégorie des Stand By me : des copains qui se connaissent depuis l’enfance et meurtris par un environnement et un trauma communs se soudent jusqu’à espérer franchir ensemble le mur du son du monde adulte.

 

Franck Unimon, ce jeudi 23 février 202