Nous nous sommes revus tout Ă fait par hasard. Jâai Ă©tĂ© Ă©tonnĂ© mais aussi content de le revoir.
Je lâai appelĂ© par son prĂ©nom pour ĂȘtre sĂ»r.
FĂ©lix ?
Il a approuvé, assis au milieu de deux ou trois inconnus.
Je me suis avancĂ© vers lui. Ils nâexistaient plus ou alors seulement comme assistants de cette rencontre.
Enthousiaste, jâai dĂ©bitĂ© le peu dont je me rappelais. FĂ©lix a souri. Son sourire Ă©tait un feuilletĂ© dâembarras, de sĂ©nilitĂ© et de surprise. CâĂ©tait le sourire de celui qui regrettait. Pourtant, je ne lui voulais aucun mal.
FĂ©lix regrettait, quinze ans plus tĂŽt, dâavoir choisi de mâoublier. Alors que moi, je pouvais encore parler de la marque de sa voiture, du groupe de musique quâil aimait Ă©couter. Des prĂ©noms de plusieurs femmes avec lesquelles il avait besognĂ©es. LĂ oĂč il avait travaillĂ©.
Mais, lui, il ne savait rien de moi.
FĂ©lix mâa appris ĂȘtre Ă la retraite depuis quatre ans. Ensuite, il mâa raccompagnĂ© prudemment vers la sortie. Pourtant, je ne lui voulais aucun mal. On lâa laissĂ© faire.
Nous nous reverrons peut-ĂȘtre dans quinze ans. Et ce sera peut-ĂȘtre moi qui, ce jour-lĂ , fermerai dĂ©finitivement la porte derriĂšre lui. Celle de lâoubli.
Franck Unimon, ce mardi 9 février 2021.