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Sibyl

 

Sibyl un film de Justine Triet

 

Sibyl : « On ne construit que sur la merde ».

 

Sibyl a un mĂ©tier rĂ©flĂ©chi. Psychologue libĂ©rale depuis plusieurs annĂ©es, elle est une professionnelle et une femme autonome et accomplie. Mari parfait jusqu’à l’effacement. Enfants plus que parfaits. Entourage aimant. Pas de problĂšmes d’argent en vue. Assez soudainement, elle veut quitter tout ça et se remettre Ă  Ă©crire. Peut-ĂȘtre parce-que sa vie flĂ©chĂ©e l’ennuie. Peut-ĂȘtre parce-que que sa tĂȘte reste le passage obligĂ© d’une routine. Et que cette routine la reconduit vers sa mĂšre, ses 3 grammes d’alcool dans le sang, et la sortie de route qui l’ont fait disparaĂźtre et rendue muette Ă  jamais.

Dans son cabinet, comme dans la vie, Sibyl sait Ă©couter les autres et leur parler. Lorsqu’on la regarde vivre extraite de son justaucorps social, Sibyl est un de ces sushis qui dĂ©file sur tapis roulant au dĂ©but du film tandis qu’un de ses amis Ă©diteur lui parle Ă  lui donner le tournis.

 

Film Ă©trange que ce Sibyl de Justine Triet, oĂč l’on s’éponge entre mensonges, fantasmes, perversion, exhibitionnisme et voyeurisme, mĂ©langes prompts Ă  vous Ă©garer. Encore plus peut-ĂȘtre si juste auparavant, Ă  la sĂ©ance prĂ©cĂ©dente, vous Ă©tiez en compagnie de John Wick Parabellum et ses scĂšnes de combat oĂč vous compreniez chaque rĂ©plique et chaque mimique. Avec Sibyl, on pourrait se dire que nous sommes en face du Ă©niĂšme film français de bobo nĂ©vrosĂ© pour intellectuels bobos :

Ce film doit ĂȘtre vu avec son microscope, mieux, avec son scanner cĂ©rĂ©bral portatif en bon Ă©tat de marche.

 

Regardons de plus prĂšs quelques protagonistes principaux : Virginie Efira/ Sibyl est la premiĂšre raison pour laquelle je suis allĂ© voir ce film. Cela fait plusieurs annĂ©es que cette actrice nous a fait comprendre que nous avons tout Ă  gagner Ă  nous la fader sur grand Ă©cran, elle et son visage de blonde assez fade. Il est assez pratique d’employer des formules toutes faites Ă  propos de certaines actrices et acteurs telles que :

« C’est le comĂ©dien le plus douĂ© de sa gĂ©nĂ©ration ». Ou « Il peut tout jouer ! ». HĂ© bien, en voyant le film Sibyl – qui n’est pas un film d’épouvante- on peut se dire que Virginie Efira, Ă©galement douĂ©e pour la comĂ©die, pourrait jouer dans des films d’épouvante ou d’horreur. De cette Ă©pouvante bien sous tous rapports et Ă  cheval entre la normalitĂ© et la folie. Son jeu dans Sibyl est trĂšs propre. Ma scĂšne prĂ©fĂ©rĂ©e est sans doute celle de « la pomme d’Amour et du Barbapapa ». Mais j’ai aussi beaucoup aimĂ© une autre scĂšne qui fait penser Ă  une scĂšne de licenciement.

AdĂšle Exarchopoulos/ Margot Vasilis. La Vie d’AdĂšle de Kechiche avait Ă©tĂ© un film presque fait sur mesure pour elle. Elle a tournĂ© dans d’autres films depuis. Dans Sibyl, elle me convainc moyennement dans certaines scĂšnes. Lorsqu’elle pleure par exemple. Pour la premiĂšre fois, dans son rĂŽle de Margot Vasilis, elle m’a fait penser Ă  l’actrice Ludivine Sagnier plus jeune. Mais en un peu plus « perverse ». Pour le rĂŽle. Dans Sibyl, Margot/ AdĂšle est selon moi meilleure comĂ©dienne lorsqu’elle balade Sibyl que sur le tournage du film rĂ©alisĂ© par Mika/ l’actrice Sandra HĂŒller et oĂč elle est une jeune comĂ©dienne qui joue son avenir professionnel.

Gaspar Ulliel/ Igor a gardĂ© un peu de sa « balafre » hannibalienne dans son rĂŽle et ça colle bien. En en montrant moins que Margot Vasilis, son personnage dĂ©gage plus d’épaisseur.

Niels Schneider/ Gabriel (comme l’ange Gabriel ?) me plait davantage dans la derniĂšre partie du film : dans la premiĂšre partie, on le voit jouer ce par quoi il s’est fait connaĂźtre en particulier dans le cinĂ©ma de Xavier Dolan (l’ambiguĂŻtĂ©, la sexualitĂ©).

Laure Calamy/la sƓur de Sibyl, Paul Hamy/ le mari de Sibyl, Arthur Harari/ Dr Katz, Sandra HĂŒller/ Mika, la rĂ©alisatrice, complĂštent la liste des rĂŽles principaux. J’aime beaucoup le jeu de l’actrice Laure Calamy en gĂ©nĂ©ral. Si j’aime la revoir ici, j’aimerais bien qu’elle sorte – un peu- de sa « panoplie » de femme nĂ©vrosĂ©e.

Lors de la sĂ©ance de John Wick Parabellum, j’avais arrĂȘtĂ© de compter Ă  partir de la 8Ăšme scĂšne de combat. En dĂ©couvrant Sibyl, j’ai assez vite renoncĂ© Ă  savoir ce qui faisait partie des mensonges ou des fantasmes de Sibyl. Le film peut faire penser Ă  l’univers de Catherine Breillat comme Ă  celui d’Atom Egoyan pour cette relation fusionnelle et passionnelle entre les protagonistes. Pour cette façon de nous manipuler en nous laissant croire que nous captons tout alors que nous captons hak ! (rien, le nĂ©ant ). Ce film est peut-ĂȘtre un regard critique sur le milieu du cinĂ©ma et du spectacle au sens large. Je n’ai peut-ĂȘtre pas suffisamment compris ce film pour en parler correctement. Mais j’ai compris que Sibyl est fatiguĂ©e de se mentir Ă  elle-mĂȘme et qu’elle rĂ©pĂšte souvent aux autres « Tu n’es pas seule » alors qu’elle est elle-mĂȘme un comptoir de solitude. Cela me rappelle cette chanson de Björk : Army of Me. Il m’avait fallu plusieurs Ă©coutes fois avant de finir par comprendre que Björk s’adressait sĂ»rement Ă  elle-mĂȘme. Que ce soit lors de ce tournage oĂč Sibyl se rend malgrĂ© l’interdit (ou le tabou) dĂ©ontologique rappelĂ© par le Dr Katz ( tous ses garde-fous sont des hommes dans le film ) :

« Ton rĂŽle Ă  toi, c’est de rester du cĂŽtĂ© du fantasme ».

Que ce soit lors de ses Ă©bats supposĂ©s ou rĂ©els avec Gabriel, Sibyl lĂšve une armĂ©e contre elle-mĂȘme. Peut-ĂȘtre qu’il lui faut ça pour enfoncer la forteresse qu’elle a Ă©rigĂ©e entre sa vie et ce qu’elle est vĂ©ritablement. Finalement, elle a peut-ĂȘtre plus de points communs qu’il n’y paraĂźt avec John Wick. Sibyl sera peut-ĂȘtre dans le 4Ăšme volet de John Wick. Virginie Efira en est capable.

 

 

 

 

Franck Unimon, ce vendredi 31 Mai 2019.

 

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