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Tenir le rythme

 

 

Tenir le rythme :

Hier, j’Ă©tais avec ma fille. Sa mère travaillait. Au retour de ma compagne, j’ai eu le sentiment d’avoir Ă©tĂ© un bon père. Hier.

Quelques heures plus tĂ´t, nous allions dĂ©jeuner notre fille et moi lorsqu’elle avait voulu nĂ©gocier :

Ce qu’elle allait manger. Ainsi que la quantité. Des pâtes. Et une demie-cuillère de petits pois. Je lui ai répondu :

« Tu sais ce que je vais te donner ? A manger ! ».

Et, je lui ai servi environ deux à trois cuillères à soupe de petits pois cuisinés la veille par sa maman.  Ainsi qu’un peu de riz. La suite viendrait après.

Si on écoutait notre fille, elle mangerait du riz et des pâtes ou des pâtes et du riz à tous les repas. Et des frites. Il faut parvenir à se faufiler dans la file active de ses préférences alimentaires. Chacun son style entre sa maman et moi.

Mon style est de ne pas laisser le choix. Et de servir d’abord ce que je veux qu’elle mange. Sa mère aussi essaie de faire pareil. Mais il doit y avoir une habitude entre notre fille et sa mère : sur certains sujets, notre fille doit déjà savoir, à son âge, qu’elle peut en quelque sorte faire fléchir sa mère. Ou lui résister.

Mais j’aurais tort de fanfaronner : Notre fille a ses limites. Elle a mangĂ© hier les petits pois servis parce qu’ils faisaient nĂ©anmoins sans doute partie de sa juridiction alimentaire et de celles de ses humeurs. Il y’a d’autres fois oĂą sa mère s’en sort mieux que moi avec elle : avec calme.

Après le déjeuner, nous sommes partis chercher mon vélo.

La veille ou le matin, ma fille m’avait fait savoir qu’elle souhaitait sortir :

Au cinéma, dans un parc ou ailleurs. Assez souvent, elle me formule ce genre de demande. Faire une sortie à un moment de la journée. Cela peut consister à aller faire des courses, passer à la médiathèque, aller à la librairie puis rentrer au bout d’environ deux heures.

Hier, je n’étais pas inspiré pour l’emmener à la piscine. Les températures se sont un peu rafraîchies. Elle s’est enrhumée.

Elle a rapidement choisi d’aller faire une promenade à vélo derrière moi, le long de la Seine.

Ce genre de promenade faisait partie de ce que j’avais prévu de faire cet été avec elle :

La piscine et ce genre de promenade à vélo.

Nous avons donc fait une promenade Ă  vĂ©lo Ă  partir de 14h30, heure oĂą nous sommes partis de chez nous. Pour rentrer vers 18h30. Bien-sĂ»r, nous n’avons pas roulĂ© durant quatre heures. Mais nous avons fait une bonne promenade jusqu’à Nanterre, jusqu’au Chemin de l’île, je pense. Un coin oĂą, ado, il m’était arrivĂ© de me rendre  Ă  pied depuis l’ancien domicile de mes parents situĂ© au 17, allĂ©e Fernand LĂ©ger, près du grand parc de Nanterre, pour aller chez un copain de lycĂ©e : Lakhdar. Celui chez qui j’allais Ă©couter de la musique et qui m’avait fait dĂ©couvrir des titres de James Brown, de Soul. Celui avec lequel j’avais Ă©coutĂ© du Reggae en buvant du lait de vache frais. Celui que j’avais accompagnĂ© un jour, par curiositĂ©, non loin de mon ancien collège, afin d’acheter du shit pour un de ses bons copains.

Lakhdar m’avait demandé :

« Tu veux venir avec moi ? ». J’étais disponible et j’avais acceptĂ©. Je voyais bien oĂą se trouvait l’endroit oĂą il avait rendez-vous.

La double particularitĂ© de cet achat est que Lakhdar connaissait bien la vendeuse. C’était une de ses ex-copines de classe que je connaissais de vue. PlutĂ´t mignonne, plus âgĂ©e et plus grande que moi donc intimidante et intouchable. VĂŞtue Ă  cette Ă©poque et ce jour-lĂ  avec des vĂŞtements de couleur noire, un Jeans, un genre plutĂ´t Hard-Rock. Une jeune femme blanche, souriante, plutĂ´t « cool » Ă  sa façon, et visiblement Ă  l’aise.  En tout cas plus que  moi.

En ce sens oĂą j’Ă©tais un puceau qui marchait droit.

J’ai oublié si elle consommait. Mais par Lakhdar, j’avais su que cette ex-copine de classe au lycée était une revendeuse régulière. Elle avait été aperçue vendant du shit à des gamins à la sortie d’un collège. Ce qui avait bien déplu à un des bons copains de Lakhdar, Ali, qui était un militant en faveur de la jeunesse.

La seconde particularitĂ© de cette course tout de mĂŞme, c’était que ni Lakhdar ni moi n’étions fumeurs. Nous Ă©tions donc deux idiots qui, s’ils s’étaient faits « gauler » avec la barrette de shit, auraient eus quelques difficultĂ©s Ă  expliquer ce qu’ils  faisaient avec ce genre de produit. Et le coin de vente Ă©tait plus proche de chez moi que du domicile de la famille de Lakhdar. Puisque c’était près de mon ancien collège que j’avais quittĂ© pour le lycĂ©e oĂą j’avais rencontrĂ© Lakhdar. Aujourd’hui, je peux en sourire. C’était il y’a plus de trente ans. Après le Bac, nous vivons une accĂ©lĂ©ration du temps qui nous Ă©loigne d’un certain nombre de personnes. Soit de notre fait. Soit suite Ă  la dĂ©cision des autres. Je n’ai pas revu Lakhdar depuis environ trente ans. Et cette revendeuse, je n’ai pas essayĂ© de mesurer son trajet ou de savoir de quoi il avait pu ĂŞtre fait par la suite. Aujourd’hui, je pencherais plutĂ´t pour une trajectoire moins « cool » qu’elle me paraissait alors en la voyant. Mais on peut ĂŞtre- agrĂ©ablement-surpris.

Hier, ma fille a bien aimé notre sortie. Moi aussi. J’avais prévu ce qu’il fallait question sandwich, eau. Au retour, nous nous sommes arrêtés à une aire de jeux où se trouvaient quelques enfants et leurs parents.   Prenant exemple sur une adulte qui venait de faire de la balançoire à côté d’elle, Je lui ai montré comment faire de la balançoire toute seule. Puis,  elle s’est entraînée alors que je l’encourageais. En pratiquant, elle y arrivera. Je l’ai aussi un peu poussée.

Alors que nous allions partir pour rentrer, j’ai entendu de la musique qui venait d’un peu plus haut, dans le parc Lagravère que nous longions. Les gens que nous apercevions n’avaient pas l’air de s’en préoccuper plus que cela. Mais pour moi, il était évident que c’était un « groupe » qui jouait en Live. Nous nous sommes rapprochés de l’endroit à vélo.

Un jeune avait installé sa batterie devant l’entrée du parc Lagravère et jouait du Police ou du Sting. A la batterie. Seul. C’était bien. Quelques personnes étaient là. Deux ou trois adultes. Cinq ou six enfants.

Après quelques minutes, le batteur a permis à un enfant noir de faire de la batterie.

Le « petit » s’est installé avec ses tongs aux pieds, son short et son tee-shirt à manches courtes. Je m’attendais à ce qu’il découvre l’instrument grâce à la gentillesse du batteur qui devait avoir une vingtaine d’années à peine.

Le mĂ´me de 8 ans s’est avĂ©rĂ© très douĂ©. L’Afrique. L’Afrique et ses paradoxes. Dans le livre La peur a changĂ© de camp, FrĂ©dĂ©ric Ploquin rĂ©vèle au cours de son enquĂŞte que dans certaines citĂ©s et certains quartiers, selon l’expĂ©rience de certains flics, des Noirs et des Arabes sont les principaux fauteurs de troubles. D’oĂą un certain racisme de certains flics qui doivent se farcir les infractions Ă  rĂ©pĂ©tition, ainsi que les insultes, les agressions et les provocations des mĂŞmes dĂ©linquants souvent très vite relâchĂ©s- donc abonnĂ©s Ă  un sentiment d’impunitĂ©- et qui voient leur citĂ© ou leur quartier comme leur territoire. Et les flics comme un gang ou une autre bande rivale qu’il convient de dĂ©bouter.

Ce môme de 8 ans, hier, rappelait que l’Afrique, noire ou du Maghreb, a aussi autre chose à offrir au monde et à la vie, pour peu qu’on lui en donne les moyens.

Je me suis tourné vers ma fille, toujours assise derrière moi. A la fin, je lui ai demandé si cela lui avait plu. Elle a acquiescé à voix basse. Avec ses lunettes de soleil aux verres noir, son casque à vélo sur la tête et son air sérieux, j’avais du mal à percevoir si cela lui avait véritablement plu. Même si, quelques minutes plus tôt, elle m’avait demandé de nous rapprocher. Alors que moi, par prudence pour ses oreilles, j’avais opté pour nous tenir à une distance de sécurité.

Devant mon insistance pour savoir, elle m’a alors répondu :

« J’ai envie de pleurer tellement c’était bien ».

Après son solo, le jeune noir a pris sa trottinette et s’est dirigĂ© vers le parc Lagravère, c’est-Ă -dire dans notre direction. Il Ă©tait suivi par deux filles noires un peu plus âgĂ©es que j’avais vues danser un peu plus tĂ´t. J’ai appris par ces deux filles un peu plus âgĂ©es qui le suivaient (ses sĹ“urs ?) qu’il avait commencĂ© seul. En tapant sur des casseroles et des branches d’arbre. Et que, maintenant, il en en avait  » un… ». Un vrai instrument de musique. Une batterie.

J’ai été étonné en écoutant ces deux filles de comprendre que le Français semblait être leur seconde langue.

Le batteur, lui, à deux ou trois mètres, est resté silencieux. Il m’a regardé et écoutait tandis que les deux filles me répondaient avec le sourire. On aurait dit, déjà, deux agents s’occupant de leur artiste. Mais elles avaient 12 ans tout au plus, les deux agents d’artistes. L’Afrique, encore, et cette belle précocité qui nous livre à de si grandes perplexités, nous, les occidentaux, moi, dont les ancêtres, comme le reste de l’Humanité ( jusqu’à preuve du contraire) viennent de là-bas. De ce continent que je ne connais pas et qui contient pourtant tant d’échecs et aussi tant de Savoirs.

Je n’ai pas entendu la voix de ce môme. Lorsque j’ai restitué à ces trois gamins les propos de ma fille, ce sont les deux jeunes filles qui ont réagi en s’émouvant. Le môme, lui, n’a rien répondu. Mais lorsque j’ai dit :

« C’est bien ! Il faut continuer ! ». J’ai bien vu qu’il m’a écouté avec attention. Et que mes mots comptaient pour lui, moi l’adulte qui, à ce moment-là, question musique aurait pu, tout aussi bien, être son élève, très peu doué, malgré les quarante années qui nous séparaient.

Puis, je les ai laissés partir. En pensant malgré moi que j’espérais que ce gamin tiendrait le rythme. Qu’il ne s’égarerait pas en cours de route dans la délinquance.

Il n’existe sans doute aucune statistique, ou alors occulte, de ce genre, mais il est vraisemblable que parmi tous ces gamins délinquants multirécidivistes dont se « plaignent » certains flics dans le livre de Frédéric Ploquin, qu’il en est un certain nombre dont la courbe des dons a été stoppée ou braquée à un moment ou à un autre. « Who knows » ? Comme aurait pu dire Jimi Hendrix.

Who knows ?

Dans le livre de Ploquin, j’ai appris que des gamins de 12 ans pouvaient toucher 150 euros par jour pour faire les guetteurs. Afin d’avertir les trafiquants de drogue ou les dealers de l’arrivée de la police.

150 euros par jour, ça peut faire jusqu’à 4500 euros par mois. Pour des gamins qui ne savent rien du trafic de drogue en lui-même. D’où il vient, quelle quantité….

150 euros par jour, c’est une somme largement suffisante pour détourner un gamin de 12 ans de l’école. Qui plus est s’il est déjà en échec scolaire. 4500 euros par mois pour accepter d’être un simple exécutant. Je crois que beaucoup de personnes, même adultes (on serait surpris) accepteraient ce genre de job moyennant une telle somme.

En reprenant la route, j’ai dit à ma fille que j’aurais dû demander au môme son prénom. C’est une mauvaise habitude, lorsque l’on s’adresse amicalement à un inconnu, de ne pas se présenter. Et « d’oublier » de lui demander son prénom.

Ma fille m’a demandé pourquoi j’aurais voulu connaître son prénom. J’ai essayé de lui expliquer. Elle m’a écouté. Mais pendant que je pédalais, j’avais l’impression que ce que je disais se perdait dans le vent. Mais le principal, sans doute, c’était que, pour le moment, elle soit encore bien attachée derrière moi tandis que je nous ramenais à la maison. Et que le retour se déroule sans encombre.

Franck Unimon, mardi 20 aout 2019.

Ps : La photo de cet article n’est pas une erreur. Compte tenu de l’âge des protagonistes principaux croisés hier dont je parle dans  cet article, j’ai préféré m’abstenir de montrer un cliché les représentant. Et, ce, afin de les préserver de certains aléas de notre vie « moderne » et « civilisée ».

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Journée Portes Ouvertes au Qu4tre à Argenteuil 2ème et dernière partie

Oeuvres de l’artiste Chemmane.

 

 

 

 

 

On se souvient que les 25 et 26 Mai derniers se dĂ©roulaient les journĂ©es portes ouvertes au Qu4tre, Ă  Argenteuil, dans le quartier du croissant ferrĂ©. J’en avais donnĂ© un aperçu dans mon article JournĂ©es Portes Ouvertes au Qu4tre Ă  Argenteuil les 25 et 26 Mai 2019.

J’avais laissĂ© d’autres photos Ă  quai. Il Ă©tait temps de les laisser (re) prendre le chemin des regards et des pensĂ©es.

 

 

Oeuvres de l’artiste CĂ©cile Thonus.

 

 

Sculptures, photos, peintures, êtres imaginaires ou invisibles aux ossatures écloses. Ils se sont entendus avec leurs « révélateurs » pour être épandus.

 

 

Photos de l’Association  » Vues d’En Bas » qui a pour but de rendre Ă  nouveau visibles les personnes invisibles et prĂ©caires.

 

 

Courroies de distribution, figures de bitume que triturent des esprits-proies, des écrits au trot recommencé, effiloché, sur la pointe des pieds.

 

 

Oeuvre de Virginie Jacquette.

 

 

Corps arrêtés, coeurs vitrés.

 

 

 

Photos de Xavier L comme Lahache.

 

 

Instants donnés. Instantanés.

 

 

Oeuvre de l’artiste Hopare.

 

Sous la tente, entre un soleil couchant qui maintient éveillé(e).

 

 

Photo Xavier L.

 

 

L’Indienne Patti. C’est elle qui est prise, c’est elle qui nous prend.

 

 

Oeuvres de Cécile Thonus.

 

 

Modèles rĂ©duits de ces explorations que l’on fait avec les doigts, bronze et bois.

 

 

 

FigĂ©es de vie, connues d’une lave sortie.

 

Photos de l’association  » Vues d’en Bas ».

 

Au fond de la cuisine.

 

 

« Je n’habite pas ici » ( L’artiste Virgine Jacquette).

 

 

Photo Xavier L.

 

Cherche petit studio meublĂ© avec un bon couloir oĂą se dĂ©fouler. Et plus, si Ă©ternitĂ©…

 

 

 

 » Je ne suis vraiment pas photogĂ©nique ». ( L’artiste Chemmane).

 

 

Assise dans le canapĂ©, Ă  contre-jour, l’artiste Virginie Jacquette.

 

Dans une salle d’attentes.

 

 

Oeuvres de Cécile Thonus.

 

Mais que font-ils ?

 

 

 

Oeuvres de l’artiste Chemmane.

 

Nous sommes prĂŞtes, Toni.

 

 

Oeuvre de Cécile Thonus.

 

 

Textes et photos de Franck Unimon ( exceptions faites des photos de l’association  » Vues d’en bas » et de  Xavier L comme mentionnĂ©es).

 

Franck Unimon, ce mercredi 7 aout 2019.

 

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Journées Portes Ouvertes au Qu4tre à Argenteuil les 25 et 26 Mai 2019

 

ArrivĂ© Ă  Argenteuil en 2007, j’avais entendu parler de ces journĂ©es portes ouvertes qui s’y dĂ©roulent une fois par an au Qu4tre, citĂ© des artistes. Mais je frĂ©quentais toujours un empĂŞchement ou un oubli. Ce 25 et 26 Mai 2019, je m’y suis enfin rendu avec mon appareil photo et ma fille, dans ce quartier d’Argenteuil appelĂ© le croissant ferrĂ©.

 

 

Deux parapluies, trois esprits assis sur une chaise et une bouteille d’eau m’ont accueilli près d’une première oeuvre.

 

 

L’artiste Hopare scrutait l’horizon, guettant peut-ĂŞtre des lignes de pluie tandis que son oeuvre posait dans nos regards des grenades de pluie.

 

 

 

La découverte de ces anciens locaux de la SNCF pouvait commencer.

 

 

 

 

 

 

 

 

Les couleurs et l’espace, ces mĂ©taux rares et prĂ©sents dont les artistes scient les rythmes en s’appliquant Ă  les laisser vivants.

 

 

 

 

Au fond, Ă  droite, bras croisĂ©s, Samer Tarabichi, l’artiste peintre et sur sa gauche, une main sur l’escalier, l’artiste Fabrice Minel.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Il y’avait une animation particulière dans cette cour de rĂ©crĂ© particulière.

 

 

 

 

 

 

 

 

L’entrĂ©e de l’exposition des oeuvres de Thibaut Dapoigny. Cela commençait par deux coccinelles, se poursuivait par d’autres animaux en moins favorable compagnie.

 

 

 

 

 

Cet interrupteur laissĂ© dans le champ de la photo est peut-ĂŞtre dĂ©placĂ©. Pour moi, il illustre bien l’Ă©clat de la vision de ce rhinocĂ©ros.

 

 

 

 

 

 

 

Si peu de distance entre ces muscles et cet oeil. Une telle puissance qu’elle concentre les siècles par sillon. Ce que l’on voit, cet animal ou soi, est millĂ©naire et il suffit de ce regard pour s’en rappeler. Et l’on comprend que nous sommes face au sacrĂ©.

 

 

 

 

 

 

 

 

Thibaut Dapoigny m’a racontĂ© les 30 premières heures de travail Ă  partir d’une photo bien plus petite. Puis, le travail plus ou moins « balayé » par la maladresse d’un autre nous-mĂŞme. Et les 30 autres heures de travail pour restituer le pourtour de l’oeil. Ensuite, il s’est fait Ă  son imagination. Son oeuvre s’Ă©tait vendue un peu plus tĂ´t dans la journĂ©e. 1200 euros. Je ne l’aurais peut-ĂŞtre pas achetĂ©e. Mais, Ă  dĂ©faut,  je lui ai demandĂ© de bien vouloir poser Ă  cĂ´tĂ© de sa crĂ©ation.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cette oeuvre ci-dessus et les deux précédentes sont de Laurence Louisfert.

 

 

 

Cette oeuvre ci-dessus est de Tom Lestienne. A cette Ă©poque, d’après les couleurs, cela n’allait pas très bien dans sa vie Ă  ce qui nous a Ă©tĂ© dit.

 

 

 

Oeuvre de Tom Lestienne.

 

 

 

Oeuvres ci-dessus de Tom Lestienne.

 

 

 

Sezny Peron travaille l’ardoise.

 

 

 

 

 

 

Oeuvre ci-dessus de Cécile Garaudel.

 

 

La journĂ©e portes ouvertes Ă©tait terminĂ©e ce samedi quand je me suis prĂ©sentĂ© devant les oeuvres de CĂ©cile Garaudel. Mais la porte Ă©tait encore ouverte et l’on m’a dit que je pouvais venir. Je suis entrĂ©, un peu mal Ă  l’aise bien que personne ne me manifeste une quelconque mauvaise humeur. Un certain nombre d’amis et d’invitĂ©s, de l’artiste vraisemblablement, discutaient, dĂ©contractĂ©s, devant apĂ©ritifs et boissons. Devant ces portraits pixelisĂ©s, j’Ă©tais si dĂ©concertĂ© que cela m’a amusĂ© de prendre cette photo avec ces jambes dans l’escalier. La mise en scène me plaisait. Ainsi que les autres personnes Ă  l’arrière-plan absolument pas au courant de ce qui venait de me passer par la tĂŞte.Puis, je suis parti rapidement. Comme un voleur. Par la suite, je me suis aperçu qu’en regardant ces portraits pixelisĂ©s d’un peu plus loin, et en prenant mon temps, cela donnait autre chose. Et j’aurais sans doute demandĂ© Ă  l’artiste comment elle avait obtenu ce rĂ©sultat.

 

 

 

 

 

 

 

 

L’artiste Hopare.

 

Fin de la première partie.

 

Oeuvres de Alexandre Hopare; Samer Tarabichi; Fabrice Minel; Elizabeth Martin; Thibaut Dapoigny; Frédéric Jallot; Laurence Louisfert; Tom Lestienne; Sezny Peron; Cécile Garaudel;

 

Musique écoutée pendant la sélection des photos : album  » Vazo » de Tao Ravao et Vincent Bucher en particulier les titres  » Mamy T »;  » Jamba »;  » Muddys Song »;  » Mellow Down Easy aka Ny Meva ».

Musique Ă©coutĂ©e pendant la mise en page de cet article : album  » Souldier » de Jain en particulier les titres  » On My Way »;  » Alright »;  » Oh Man »;  » Abu Dhabi »;  » Souldier ». Je n’aimais pas particulièrement la musique de Jain jusqu’alors.

 

Texte ( quand il y’en a ) et photos : Franck Unimon, ce lundi 3 juin 2019.

 

 

 

 

 

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Dans la galerie de Michel

 

 

Dans la galerie de Michel

 

 

L’ami Michel Guillet tient sa galerie d’art, au 8 avenue Trudaine, depuis quarante ans. Ses clients, simples passants, viennent de partout. Des femmes et des hommes, un jour, trouvent leur  couleur et leur forme exposée dans une  peinture ou une sculpture.

 

 

Selon Michel, le regard, c’est le passé. Cela pourrait parfois expliquer notre aveuglement devant le présent. Ainsi que la raison pour laquelle certains voudraient punir l’art. Car un art armateur de notre passé pourrait maintenir notre identité à la surface. Tandis qu’un art en service commandé la laisserait sombrer. Et un titre comme Until You Remember du groupe Tedeschi Trucks Band (album Revelator ) resterait maintenu sous les eaux par des commandos de la pensée.

 

 

Notre vie est faite de peintures fracassantes que quelques uns captivent pour quelques temps. Et celles-ci nous attendent dans une musique, quelques lettres, certaines images, parfois des moments ou des gestes dont nous sommes les aperçus.

 

 

Oeuvres des artistes AndrĂ© Laurenti, ITO GHO, CĂ©cile Orsoni, Shimon Palombo….

( Photos par Franck Unimon comme la plupart des photos de ce blog)

 

Franck Unimon, lundi 21 Mai 2019.

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Le Fait Eric

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mère normande, père malgache, il est d’abord parti de Caen. J’ai rencontré l’ami Eric Moscardo-Rabenja il y’a environ dix ans à l’université de Saint-Denis en banlieue parisienne.

Nous étions tous les deux acteurs dans un court-métrage réalisé par des étudiantes en cinéma. Nous avons fait connaissance pendant que l’équipe technique procédait aux réglages ou que d’autres de nos partenaires tournaient. De contact facile, l’esprit à la tête, la conversation avec Eric s’est aisément faite.

Je suis souvent resté perplexe devant la superficialité et l’infirmité des rapports entre les humains du milieu du théâtre, du cinéma mais aussi du journalisme cinéma qui peuvent pourtant se dévouer à bien des œuvres « généreuses » et « humaines ».

Tout semble perpétué par une prise d’intérêt immédiate. A moins qu’il ne s’agisse de ces embarras communs, embruns qui nous dominent, lorsque l’on ne sait quoi dire à un autre nous-même. Ou de cette angoisse qui oblige. A faire du rendement et du recel de présence plutôt que des rencontres. Pour se prouver que l’on a bien travaillé ; que l’on a bien produit ; que l’on a été efficace ; que l’on a fait quelque chose de soi et de son temps.

On peut être décisif en déposant que lorsqu’il est difficile de gagner sa vie- dans un milieu ultra-compétitif- pour se nourrir et être reconnu à la hauteur de son énergie, on n’a pas le temps pour jouer à la balle au prisonnier, conter fleurette et faire du tricot.

Il est étonnant comme certaines personnes- même décédées- donnent encore l’impression de manquer de temps.

Le pire est que ce sous-développement relationnel touche même des univers professionnels supposés habilités à le traiter. Exemple : les techniques et décisions gouvernementales et managériales dans les hôpitaux et les lieux de soins.

Mais on peut aussi, bien-sûr, préférer évoquer pudiquement- et sincèrement- le charme des       « affinités ».

 

Le sens de la droiture. Le fait d’avoir longtemps été un « artiste caché ».

 

Je crois avoir décelé quelques affinités entre Eric et moi. Pourtant, j’éviterai de trop le déshabiller. Car, même si l’artiste, au moins, s’expose devant les autres, c’est souvent à titre provisoire et partiel. Lors de certains moments précis et identifiés par lui (ou elle) où il ou elle est raccord pour se présenter autrement qu’à l’accoutumée.

Cela peut peut-être se comparer, jusqu’à un certain point, à une forme d’envoutement, où l’on fait refluer vers soi et en soi, toutes ces vies dénombrées, retenues, saisies, claquemurées, ignorées, confiées et aperçues dont on hérite et que l’on restitue – par parcelles- sur la scène. Vies qu’on oublie ou que l’on oubliera une fois la scène ou le plateau de tournage éteints alors qu’elles auront entretemps étreint d’autres mémoires avant que l’on s’en retourne à notre ordinaire.

 

Je suis peut-être sous l’influence de mes élucubrations, éléments variables de mes bizarreries et autres dérangements.

 

Eric est né le 3 octobre. Je suis né le 2. On peut donc dire que l’on se suit.

Lors de notre dernière rencontre, il était très amusant de voir comme, à tour de rôle, chacun voyait dans le parcours de l’autre, une inspiration possible pour écrire une histoire ou un scénario de court-métrage.

Après avoir travaillé une vingtaine d’années dans les Aéroports de Paris, depuis trois ou quatre ans, Eric est devenu un artiste à temps complet. Il a écrit un premier One Man Show qu’il a joué à Paris et à Madagascar. Il continue de se former au jeu d’acteur et à l’écriture de projet. Il participe à des tournages. Il joue au théâtre. Il a un agent.

 

Lorsque j’avais reçu le dvd du court-métrage où nous avions joué ensemble, je l’avais trouvé meilleur acteur que moi. Je me souviens encore du passage où, face caméra, il balance :

« J’t’ai toujours dit que je voulais pas d’une bande de chiards ! ».

 

 

Franck, ce vendredi 14 décembre 2018.