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Cinéma self-défense/ Arts Martiaux

Les Maîtres de l’Aïkido

Photo de couverture : Morihei Ueshiba au Kobukan Dojo en 1931 à 48 ans. Photo en médaillon : Morihei Ueshiba à l’Aïkikai Hombu Dojo en 1967 à l’âge de 84 ans.

 

Les Maîtres de l’Aïkido (élèves de Maître Ueshiba Période d’Avant Guerre) : Interviews recueillies par Stanley A.Pranin

 

Il existe un contraste saisissant entre l’admiration très haute encore portée à Maître Morihei Ueshiba ( décédé en 1969), fondateur de l’Aïkido, art martial créé au vingtième siècle, par les pratiquants ou les adeptes de l’Aïkido. Et l’image publique de l’Aïkido au moins dans le monde du « combat » sous ses diverses déclinaisons :

 

« Ce n’est pas efficace ». « C’est de la danse ».

 

Ces propos pour définir l’Aïkido sont devenus tellement banals qu’ils sont pratiquement devenus l’équivalent d’un sixième sens. C’est une évidence. Sans même avoir particulièrement pratiqué l’Aïkido, si l’on doit s’orienter vers un art martial ou un sport de combat efficace en matière de self-défense, on choisira plutôt une discipline aux rapports et contacts explosifs, directs, frontaux, brutaux et incapacitants qui nous convaincra, à condition bien-sûr de survivre à l’entraînement comme à son intensité cardiaque, qu’avec quelques coups bien placés, on pourra (se) sauver la mise en cas de rencontre avec un ou plusieurs agresseurs.

 

 Aucun des grands champions actuels ou de ces vingt à trente dernières années, femme ou homme confondus, ne se réclame de l’Aïkido. Que ces combattants évoluent dans des épreuves « traditionnelles » pour un match de boxe, sur un tatamis ou en Free Fight, on entendra souvent formulées dans leur CV des disciplines telles, dans le désordre, que le Ju-Jitsu brésilien, le Pancrace, la Boxe Thaï, la boxe anglaise ou française, le Judo, la lutte, le Sambo, le Pancrace, le Penchak silat, peut-être le Krav Maga ou le Sistema, peut-être le Karaté, peut-être le Kung-Fu.

 

Mais rarement, voire jamais, l’Aïkido.

 

Regards sur l’Aïkido dans la rue et au cinéma

 

 

Si l’on parle du Judo, on peut tomber sur un stade portant le nom du judoka Teddy Riner, judoka français, plusieurs fois champion olympique, multiple champion du monde, et encore en activité. J’ai fait cette découverte cette semaine, alors que j’ai dû changer d’itinéraire pour me rendre au travail vu qu’il se trouvait un colis suspect dans un train à la gare d’Argenteuil. Après avoir pris le bus 140 depuis la gare d’Argenteuil, j’ai ensuite dû me rabattre vers la ligne 13 du métro à Asnières pour me rendre au travail. Là, j’ai découvert ce stade Teddy Riner.

 

 

Je ne connais pas, pour l’instant, de stade Multisports ou de gymnase qui porte le nom de Morihei Ueshiba.

 

Si l’on parle Kung-Fu, plusieurs années après sa mort ( en 1973, soit “seulement” quatre ans après celle de Morihei Ueshiba) l’aura de Bruce Lee reste intacte. Même des journalistes intellectuels émargeant dans les Cahiers du cinéma pourraient raconter dans un livre l’émotion qu’a constituée, plus jeune, pour eux, le fait de voir Bruce Lee au cinéma. En outre, depuis son décès, d’autres personnalités ont perpétué ce prestige du Kung-Fu. Jackie Chan, Jet Li,  Donnie Yen ou des productions cinématographiques américaines telles que Matrix ou Kill Bill voire “françaises” ( Crying Freeman, 1995, par Christophe Gans avec l’acteur/artiste martial Mark Dacascos). Sans oublier bien-sûr d’innombrables productions asiatiques telles The Grandmaster ( 2013) de Wong-Kar WaiThe Assassin ( 2015) de Hsou Hsia Hsien ou encore The Blade ( 1996) de Tsui Hark. Et bien d’autres.

 

Le Karaté ne semble pas souffrir d’une trop grosse décote dans la perception que le grand public en a. En outre, souvent, Kung Fu et Karaté se confondent dans l’esprit de beaucoup de personnes.

 

Le Penchak Silat, art martial indonésien, effectue une percée depuis quelques années au moins depuis le film The Raid ( 2011) avec l’acteur  Iko Uwais. Acteur/artiste martial que l’on peut revoir dans 22 Miles ( 2018) de Peter Berg aux côtés de Mark Whalberg, John Malkovich, Ronda Rousey ( ex championne du monde Free Fight, mais aussi ex-médaillée olympique de Judo auparavant…), Iko Uwais sera apparemment dans Expandables 4 en 2022.

 

 

S’il existe des modes qui poussent davantage le grand public vers certains styles de combat, disons que certaines méthodes de combat déjà « connues » telles que la boxe (thaï, anglaise, française), le judo voire le karaté restent des expériences incontournables au moins pour débuter.

 

Alors que du côté de l’Aïkido, cela se passe différemment. D’abord, d’un point de vue cinématographique, il faut peut-être remonter jusqu’à Steven Cigale ( Seagal, bien-sûr) dans les années 90 pour avoir un héros d’un film à grand succès, adepte de l’Aïkido. Mais Seagal a laissé bien moins de souvenirs qu’un Bruce Lee, qu’un Jackie Chan, qu’un Jet Lee ou qu’un Jean-Claude Vandamme. Donc, concernant la perception de l’Aïkido au cinéma, il y a un déficit grandiose en termes d’images. Aujourd’hui, même l’acteur Jason Statham, que ce soit dans Le Transporteur ou dans Expendables, est bien plus connu que Steven Seagal. Idem pour Keanu Reeves/ John Wick ou Tom Cruise/ Jack Reacher. Aucune de ces grandes vedettes anglo-saxonnes ne pratique devant la caméra un art martial permettant d’identifier ou de penser à l’Aïkido.

 

Par ailleurs, Steven Seagal a peu œuvré pour la crédibilité de l’Aïkido en tant qu’art martial mais aussi comme art….de vivre. Et en parlant « d’art de vivre », on se rapproche de ce qui explique sans doute, aussi, en partie, ce qui peut rebuter dans l’apprentissage mais aussi dans la découverte de l’Aïkido.

 

On peut se battre mais on ne peut pas se battre

 

L’art de vivre, c’est autant la façon de combattre. Que la façon de percevoir le monde et son entourage. Et, dans ces quelques domaines, on peut dire que l’Aïkido tranche beaucoup avec la plupart des arts martiaux, disciplines et formes de combats citées précédemment. Puisqu’à la percussion et au rentre-dedans de ces autres disciplines où le KO ou le Ippon peut être recherché de façon compulsive, l’Aïkido préfère « l’harmonisation » avec l’opposant. Mais, aussi, l’absence de compétition. Donc, on peut se battre. Mais on ne peut pas se battre. Dans un monde où il s’agit d’être le meilleur ou de dominer, l’Aïkido détonne. Surtout lorsqu’on le connaît très mal.

 

La cérémonie du thé

 

Ainsi, Maitre Takako Kunigoshi, née en 1911, la seule femme interviewée parmi les Maitres, a arrêté de pratiquer et d’enseigner l’Aïkido depuis des années lorsque Stanley A. Pranin vient la rencontrer à son domicile d’abord en 1981 puis en 1992. Elle vit alors dans une semi-retraite et donne des cours de Cérémonie du Thé. Une activité qui n’a a priori rien de martiale pour le profane. Jusqu’à ce qu’elle affirme au cours de l’interview :

” Je passe la plus grande partie de mon temps à pratiquer la cérémonie du thé, mais quand je tiens la louche en bambou, c’est comme si je tenais un sabre. J’ai cette sensation et je me souviens de ce que O-Sensei nous disait. Que ce soit la cérémonie du thé ou l’arrangement floral, il existe des points communs avec l’Aïkido car le ciel et la terre sont faits de mouvement et de calme, de lumière et d’ombre. Si tout était continuellement en mouvement il y aurait un complet chaos”. 

Et, plus tard, Maitre Takako Kunigoshi conclut :

 

” (….) je suis persuadée que toutes les nations du globe ont accès à la même vérité. Quand le soleil brille, il y a forcément des ombres. Je pense que l’on peut dire la même chose des arts martiaux”.

 

Kendo et Aïkido 

 

Le Kendo, art martial à la pratique assez confidentielle qui a des points communs avec l’Aïkido, a pour lui  les assauts physiques visibles, audibles et puissants. Alors qu’avec l’Aïkido, on a l’impression que tout se passe ou se passerait en douceur. Comme si l’Aïkido consistait à tomber d’un arbre en se détachant d’une branche à la façon d’une feuille. Ce qui est difficile à faire concilier avec la soudaineté et la violence des attaques et des agressions du monde.

 

Un temps d’apprentissage fastidieux

 

Et puis, il y aussi un autre aspect qui rebute dans l’Aïkido. Et tout enfant en nous a sans doute connu ça, si, un jour, il a eu à choisir entre le judo, le karaté, la boxe thaï ou l’Aïkido. L’Aïkido prend du temps. Il est assez difficile de sortir du premier cours en se disant que l’on a maitrisé une technique. Autant, en judo, en karaté ou en boxe thaï, on peut avoir l’illusion d’apprendre très vite et de voir rapidement nos progrès, autant en Aïkido, le temps d’apprentissage peut devenir fastidieux. Décourageant. Frustrant. Très technique, très exigeant, l’Aïkido refuse sans doute durement les erreurs de placement comme d’intention. Alors que dans d’autres disciplines, on peut plus facilement  masquer ou compenser – ou essayer de le faire- nos lacunes techniques par notre engagement physique et notre « combativité ».

 

Quelques Maitres actuels qui s’y « connaissent » en Aïkido

 

Je parle d’Aïkido mais je n’en n’ai jamais pratiqué. J’ai lu à son sujet. J’ai croisé deux ou trois personnes, deux ou trois Maitres, encore vivants, qui, eux, le pratiquent et l’enseignent chacun à leur manière à Paris et ailleurs :

Maitre Jean-Pierre Vignau ( Arts Martiaux : un article inspiré par Maitre Jean-Pierre Vignau), Maitre Régis Soavi ( Dojo Tenshin-Ecole Itsuo Tsuda/ séance découverte), Maitre Léo Tamaki (Dojo 5).

C’est du reste en lisant une des interviews réalisées par Maitre Léo Tamaki que j’ai fait la connaissance de Maitre Jean-Pierre Vignau avec lequel j’ai commencé à pratiquer depuis deux semaines. Et c’est en lisant ou en regardant, je crois, une interview de Maitre Léo Tamaki que j’ai entendu parler pour la première fois de Stanley A. Pranin et de cet ouvrage. C’est aussi en regardant une vidéo d’une rencontre entre Greg MMA et Léo Tamaki et en écoutant celui-ci faire un peu l’historique de l’Aïkido que j’ai commencé à avoir une autre perception de l’Aïkido et à davantage le voir pour ce qu’il est à l’origine : un Art martial. 

L’association de la pratique d’un haut niveau, d’une bonne culture concernant la discipline enseignée et d’un goût pour la pédagogie me semble bien définir Maitre Léo Tamaki.

C’est ce que je recherche chez un Maitre ou un enseignant. Aptitudes que j’ai aussi trouvées chez Maitre Jean-Pierre Vignau ainsi que chez Maitre Régis Soavi. Mais aussi chez Yves,  Jean-PierreCarmelo et d’autres moniteurs d’apnée ( ou de plongée) rencontrés dans le club d’apnée – et ailleurs- où je m’entraîne aussi. Ou chez Jean-Luc Ponthieux, mon ancien prof de guitare basse au conservatoire d’Argenteuil. Lorsque je croyais encore pouvoir apprendre à en jouer. Sans pratiquer régulièrement et avec les autres….

 

Quelques enseignements de ce livre de Stanley A. Pranin

 

Ce livre d’interviews paru en 1993 dans sa version anglaise puis en 1995 dans sa version française est désormais assez difficile à trouver. On le trouve en seconde main à un prix assez élevé. J’ai acheté le mien environ 60 euros. Je ne le regrette pas.

 

La plupart des personnes, pour ne pas dire pratiquement toutes celles interviewées et impliquées dans cet ouvrage, ainsi que l’intervieweur, Stanley A. Pranin, sont désormais décédées ce vendredi 11 février 2022 alors que débute la rédaction de cet article.

 

Et ces personnes sont décédées depuis plusieurs années. ( Stanley A. Pranin, né en 1945, est lui-même décédé en 2017). Elles n’entendront jamais parler de la pandémie du Covid, de Gérald Darmanin, du pass vaccinal….

 

Mais grâce à Stanley A.Pranin, à son abattage et à sa culture considérables au moins dans le domaine de l’Aïkido, abattage et culture dont ce livre rend très bien compte, on apprend un peu mieux ce qu’est ou peut-être l’Aïkido. Car l’Aïkido, finalement, reste un art mystérieux. Voire “fantôme”. 

 

 

Premier enseignement : une certaine polyvalence martiale.

 

Cela m’a pris du temps pour le comprendre et cela se vérifie à nouveau avec ces Maitres interviewés (une seule femme parmi ces Maitres, Maitre Takako Kunigoshi, c’est dommage et cela rend aussi son témoignage d’autant plus important) qui ont été élèves de Maitre Ueshiba avant la Seconde Guerre Mondiale :

 

Tous les Maitres d’Arts martiaux, quelle que soit la discipline ou l’Art martial qu’ils décident ensuite d’enseigner, ont souvent un gros bagage d’expériences dans plusieurs arts martiaux ou techniques de combats. « Gros bagage », cela signifie qu’ils ont souvent un bon voire un très bon niveau dans d’autres disciplines martiales. Niveau obtenu au moins grâce à une certaine quantité d’entraînements. Dans ce livre, on apprend par exemple que les Uchideshis s’entraînaient…quatre fois par jour. Et on ne parle là que de leur pratique de l’Aïkido avec Maitre Ueshiba. On ne parle pas du vécu martial qu’avaient déjà ces uchideschis avant de rencontrer Maitre Ueschiba. La plupart de ces Maitres avaient souvent débuté enfants leur apprentissage martial. Et on parle d’un peu plus que deux à trois séances d’entraînement.

Ainsi, Maitre Ueshiba, avant de faire la rencontre de Maitre Sokaku Takeda qui allait lui enseigner le Daito-Ryu, un art martial six fois centenaire et secret, qui, en grande partie, allait lui inspirer l’Aïkido, avait auparavant vécu diverses expériences martiales soutenues. Un des Maitres interviewés décrivant Maitre Ueshiba comme une personne qui écumait en quelque sorte les lieux d’enseignement martial. Tant il aimait ça ! Par ailleurs, Maitre Ueshiba avait pu compter sur le soutien moral mais aussi financier de son père et d’un de ses oncles. Tant pour faire venir et  héberger un professeur de judo émérite et réputé à la maison pour des cours particuliers. Que pour faire construire un dojo pouvant permettre à Maitre Ueshiba, devenu adulte, de pratiquer et d’enseigner dans de bonnes conditions.

 

A cette ferveur martiale, Maitre Ueshiba allait ajouter une ferveur religieuse au travers de la secte religieuse Omoto suite à sa rencontre avec le prédicateur Onisaburo Deguchi. A la lecture de cet ouvrage, on comprend que les deux ferments de cette ferveur ont beaucoup contribué à transformer Maitre Ueshiba en ce futur fondateur de l’Aïkido qu’il est ensuite devenu. 

 

Second enseignement : une ferveur martiale et spirituelle.

 

Car tous ces Maitres interviewés par Stanley A. Pranin se caractérisent par un engagement profond dans l’apprentissage de leur pratique. Non seulement, elles et ils s’entraînaient régulièrement. Mais, en plus, avec implication. L’esprit « il fait froid et il pleut aujourd’hui, je n’ai pas trop envie de sortir m’entraîner » ne faisait pas partie d’eux. On parle ainsi, au moins, de Maitre Gozo Shioda ( également interviewé dans ce livre) qui venait au cours « religieusement ». Mais aussi du même, qui, comme d’autres Uchideshis, avait « les larmes aux yeux » – tant l’entraînement pouvait être douloureux- lorsqu’il servait de Uké à Maitre Noriaki Inoue dont l’interview ouvre le livre.

 

Le jour du « Shinaï »

 

Par ailleurs, les élèves étaient incités à donner constamment le meilleur d’eux-mêmes. L’entraînement pouvait être sévère, sans doute militaire, voire humiliant. Un des Maitres (Maitre Kiyoshi Nakakura )raconte comment il avait été brutalement puni pour, négligemment, peut-être sous l’effet de la fatigue, avoir marché sur le shinaï d’un de ses camarades. On est donc très loin d’une expérience du sport loisirs ou du sport Fitness ou Crossfit telle qu’elle s’est développée dans les pays occidentaux depuis les années 80. Ou il s’agit principalement de perdre des calories, de sculpter sa silhouette pour des raisons esthétiques et narcissiques. Et non d’apprendre à vivre ou à se connaître, en quelque sorte.

 

Pour se faire une idée du quotidien d’un Uchideshi, un élève qui reste sur place auprès du Maitre qui l’accepte et le forme, on peut se procurer le livre de Maitre Jacques Payet, Uchideshi ( Dans les pas du Maître), paru en 2021. Maitre Jacques Payet a été un des élèves de Maitre Gozo Shioda pendant cinq ans dans les années 80 durant cinq ans au Japon. Pour cela, Jacques Payet avait quitté La Réunion, son île natale, alors qu’il ne parlait pas ou très peu Japonais. J’ai aimé lire son livre il y a plusieurs mois. Un livre que je n’ai malheureusement pas-encore- pris le temps de chroniquer pour l’instant. Car j’avais alors opté pour parler d’un livre consacré à l’actrice… Béatrice Dalle ( Que Dalle un livre sur l’actrice et comédienne Béatrice DalleBéatrice DalleBéatrice Dalle, trois fois..)

 

Espérons que cette distraction ne me portera pas préjudice. Et que je n’aurai pas à connaître pour cela le même châtiment que Maitre Kiyoshi Nakakura «  le jour du Shinaï ».

Pour l’instant, à Paris, pour le peu que j’ai vu, c’est au Dojo Tenshin-Ecole Itsuo Tsuda de Maitre Régis Soavi, que l’on se rapproche le plus, de manière atténuée, du quotidien d’un Uchideshi “traditionnel”. Pour les horaires matinaux des cours ( à 6h30, en semaine, à 8h les week-end)du lundi au vendredi. Pour l’implication personnelle des pratiquants dans l’entretien et la vie du lieu. ( Dojo Tenshin-Ecole Itsuo Tsuda/ séance découverte et Trois Maitres + Un).

 

Enfin, dans Les Maitres de l’Aïkido, on comprend facilement en lisant les réponses et les témoignages de ces Maitres- et de Maitre Takako Kunigoshi– que l’Aïkido qu’ils pratiquaient n’avait strictement rien à voir avec cette « danse » à laquelle il peut être aujourd’hui régulièrement associé. Et que c’est un art martial « efficace » pour qui le maitrise et le comprend.

 

Un ami des chiens

 

Dans son interview, Maitre Gozo Shioda raconte par exemple comment, à une époque, il allait s’entraîner au petit matin, en allant en quelque sorte défier des chiens sauvages du voisinage. Il évoque le fait d’avoir été mordu quelques fois et parle aussi de ce moment où les yeux des chiens deviennent « vitreux », expliquant que cela signifie qu’ils vont attaquer. Et, lorsqu’ensuite, Maitre Gozo Shioda regrette la mort de ces chiens, il est difficile de savoir s’il est triste d’avoir perdu des « compagnons » d’entraînement. Ou s’il regrette d’avoir dû les tuer lors d’un de ses entraînements. Quoiqu’il en soit, ce genre d’anecdote, racontée en toute simplicité, contredit la vision de l’Aïkido comme étant un art martial inoffensif. Car, à ce jour, je n’ai pas encore entendu parler d’un pratiquant de boxe anglaise, de Krav Maga, de Pancrace, de Ju-jitsu brésilien ou autre qui serait régulièrement parti au petit matin afin de s’entraîner à combattre, seul et à mains nues apparemment, des chiens errants.

 

 

Aïkido et Zen

 

L’interview de Maitre Kisshomaru Ueshiba, un des fils de Maitre Ueshiba, clôture l’ouvrage. Maitre Kisshomaru Ueshiba est celui qui a prolongé l’œuvre de son père et a contribué à la reconnaissance internationale de l’Aïkido. Que ce soit par des enseignements, des ouvrages ou en autorisant le départ d’instructeurs japonais à l’étranger.

Dans son interview, pleine de franchise, franchise également présente dans les autres interviews, Maitre Kisshomaru Ueshiba souligne l’importance de la spiritualité dans la pratique de l’Aïkido.

 

Ainsi, il dit vers la fin de son interview (synthèse d’interviews réalisées à son domicile entre 1978 et 1988) :

 

« Mon Aïkido insiste sur l’esprit ( Kokoro). En Aïkido, le mental est important. Mon père avait crée cette discipline comme une voie chevaleresque qui ne comprenait aucune compétition ».

 

(….) « D’une certaine manière, il existe une correspondance entre l’Aïkido et le Zen. Notre discipline implique un complet changement des formes mentales (….) ».

 

J’aimerais que cet article puisse contribuer à restaurer l’image de l’Aïkido mais aussi à mieux comprendre l’un des buts des Arts Martiaux qui consiste aussi à apprendre que : Toujours chercher à être ou à devenir le plus fort ou la plus forte, c’est aller à sa perte.

 

 

Franck Unimon, ce vendredi 11 février 2022.

 

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