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Arts de la rue, Paris 13 ème : Mardi 16 novembre 2021.

Paris, gare St Lazare, mardi 16 novembre 2021. Une femme écoute un chanteur lyrique ( au centre) au milieu des voyageurs alors que je me rends à la Porte Dorée.

             Arts de la rue, Paris 13 ème, Mardi 16 novembre 2021     

 

Je suis en retard sur mes morts : des articles à écrire, des films à voir, des livres à lire, des expériences à vivre, des Maitres d’Arts martiaux à connaître, des mots à nourrir. Mais lorsque l’amie C…m’a parlé de cet endroit dans le 13ème arrondissement de Paris où il y avait une exposition d’arts de rue ou Street Art à laquelle elle voulait se rendre, j’ai répondu « oui ».

 

Cela fermait à 18h. Ce mardi 16 novembre 2021, nous nous sommes donnés rendez-vous au métro Porte Dorée à 16h30.

 

Nous sommes arrivés en retard chacun, notre tour. Moi, plus qu’elle. Elle arrivait du travail. J’arrivais de l’écriture.

Paris, Mardi 16 novembre 2021.

 

Ensuite, notre trajet aurait pu être plus court. Mais cela ne nous a pas contrarié même si la nuit commençait à nous torcher. Nous avons préféré marcher par ce temps assez froid et humide à côté de la ligne du tram et du bus. Des cyclistes pressés nous frôlaient régulièrement malgré les pistes cyclables. C’était la première fois, moi qui suis un pratiquant du vélo « Taffe », que je connaissais une telle proximité imposée par des adeptes du vélo « musculaire ».

 

Paris, Mardi 16 novembre 2021.

 

Arrivés sur les lieux, nos yeux ont dû se faire à la pénombre. A première vue, les meilleures conditions pour voir ces fresques avaient presque disparu. Sauf qu’approchées par  l’obscurité mais encore sensibles au regard,  ces fresques, ces dessins, ces tags et ces graffitis ont aboyé des secrets. Nous n’avons pas pu tous les parcourir et les photographier. Nous avons prévu de revenir.  

 

 

Paris, Mardi 16 novembre 2021.

La première fresque sur laquelle nous sommes tombés avant d’arriver à destination. Une oeuvre nous indiquant que nous nous rapprochions de l’endroit que nous recherchions. 

 

 

Après être passés sous un ou deux ponts, plus ou moins sombres, devant quelques tentes et leurs occupants, nous avons encore marché un peu.  Nous dépassons un café éclairé où se trouvent des étudiants. Il n’y a pas beaucoup de monde là où nous nous tenons. Cela fait drôle pour un lieu d’arts répertorié. Mais c’est très pratique pour le découvrir et faire des photos. 

 

Au fond, à gauche, sur le mur, Angela Davis, vraisemblablement dans les années 70.

 

Un artiste est encore présent. Lorsqu’il fera davantage nuit, celle qui est avec lui l’éclairera. Nous ne sommes restés qu’une vingtaine, voire une trentaine de minutes. Car on nous a fait comprendre ( les gardiens des lieux apparemment, lesquels faisaient du “Rap” pendant que nous visitions) à un moment donné que c’était “fermé”. Qu’il nous restait à voir d’autres fresques, plus grandes, que nous en aurions alors  pour “deux à trois heures”. Mais un autre jour, entre 11h et 18h.  

En prime abord, la beauté des fresques ne me saute pas aux yeux. Mais j’aperçois Angela Davis, telle qu’elle était dans les années 70. Un symbole militant pour les droits civiques des Noirs aux Etats-Unis. Celle qui avait été proche des Black Panthers. Qui croyait au communisme.  Qui avait connu une histoire d’Amour avec l’un des Frères de SoledadGeorges Jackson mort en prison. Celle qui avait été déclarée l’ennemie publique numéro Un aux Etats-Unis et suspectée pour un meurtre qu’elle n’avait pas commis. Et qui avait dû fuir avant de finir par être arrêtée, toujours aux Etats-Unis. Une mobilisation internationale, y compris en France, avait contribué à l’innocenter.

 Aujourd’hui, Angela Davis  est une lesbienne assumée dont le militantisme a perduré. Un documentaire lui a été consacré il y a quelques années ( Free Angela Davis par Shola Lynch en 2012). Mais elle est beaucoup moins médiatisée que dans les années 70. Cela m’étonne de tomber sur “elle”, comme ça, en 2021. Certains symboles perdurent, oui. Mais je n’attendais pas celui d’Angela Davis qui m’avait particulièrement parlé, adolescent, et dont j’étais allé voir le documentaire ( réalisé par Shola Lynch) qui lui avait été consacré . 

 

Cette image de Manu Dibango m’a beaucoup touché. Lui, qui est décédé il y a quelques mois du Covid. Avant Jacob Desvarieux ( Jacob Desvarieux).J’ai instantanément entendu dans ma tête l’air de Soul Makossa devant cette fresque. Un air qui, lui, aussi, comme cette image d’Angela Davis, doit avoir maintenant un demi-siècle. Les décès de Manu Dibango et de Jacob Desvarieux ne m’attristent pas grâce à leur musique. A toute cette musique qu’ils ont créé et qu’ils ont laissé. Qu’ils ont pu créer et pu laisser. Il est donné à  peu de personnes de pouvoir laisser ou de léguer un héritage qui a davantage à voir avec la vie. Et, pour moi, Manu Dibango fait partie de ces personnes même si ce n’est pas l’artiste que j’écoute le plus. Cette lumière qui arrive par dessus et qui laisse une partie de son “corps” dans l’ombre lui rend encore plus hommage. 

 

 

Sur le mur opposé à “Angela Davis” et ” Manu Dibango”, il y a, entre autres, cette oeuvre, qui, éclairée, telle quelle, avec ce regard, peut suggérer un autre ferment que celui de la douceur. 

 

 

La même oeuvre lorsque je l’ai d’abord vue. A gauche, tout à fait indépendamment, on peut reconnaître la figure du musicien Frank Zappa. Un artiste aujourd’hui oublié mais qui a beaucoup fait pour la musique. 

 

Je triche avec la chronologie des découvertes. Il est possible que j’aie “faite” celle-ci après certaines parmi celles qui vont suivre. 

 

L’acte de dessiner et de reproduire est un acte ancien chez l’être humain. Ces oeuvres, et toutes ces heures données et passées à les constituer, par des personnes qui ont perpétué cet acte du dessin et de la reproduction jusque là, dont certaines ont peut-être arrêté de dessiner et de reproduire depuis, donnent aussi de l’espoir. Aux artistes et à celles et ceux qui s’arrêtent. Tandis qu’autour d’eux, partout et en permanence, la destruction et l’oubli surgissent. J’ai pensé à toutes ces personnes – et il y en a sûrement beaucoup- qui passaient aux alentours, tous les jours, de cet endroit. Dans le tramway. Dans les bus. Dans les trains. Dans le métro de la ligne 14. Dans les restaurants. Dans les magasins. Dans les universités. Même dans les librairies et les cinémas.

Le dessin, c’est du sang. Celui de la vie qui s’étend et qui reste. On affirme le contraire lorsque l’on ne s’arrête pas- ou plus- pour regarder. 

 

              Ils vous attendent.

 

 

 

Il y avait le Magret de Canard. Il y a désormais le Magritte de Covid. 

 

 

 

 

La nuit s’avance.

 

 

Je n’ai pas pensé à leur demander depuis quand ils étaient là. Nous avons fait de notre mieux pour ne pas les déranger. Mais il en faut de l’envie pour continuer, comme ça, pour “rien”, pour le plaisir. A moins d’être vraiment-encore- jeune, désintéressé et sûrement aussi, un peu, déraisonnable. C’est peut-être aussi pour cela que ces fresques me parlent encore.  

 

En voyant la photo, C…m’a fait remarquer la forme de l’ombre. C’est vrai que l’on dirait qu’un animal aide l’artiste. Et qu’ils sont deux sur le mur. Avec l’éclaireuse qui permet de ne pas se perdre, ils sont maintenant trois. Avec l’oeuvre, ça fera quatre. En plein jour, cela ne se voit pas. 

 

 

 

 

 

 

En situation réelle, lorsque l’on capte un tel regard, il est déja trop tard. Mais cette fois, le mur ne bougera pas.

 

 

On dit parfois qu’il faut savoir baisser ou fermer les yeux. On préférait que celui-là, Doc Fatalis, les lève. Mais, bien-sûr, il ne le fera pas.

 

 

L’appréciation de l’Art fait oublier que certains endroits, empruntés avec un autre état d’esprit, pourraient passer pour dangereux ou maléfiques. 

 

 

 

 

Oeuvre d’Isaac Bonan.

 

On nous a d’abord dit qu’il n’était plus l’heure ! Que c’était fermé ! La voix nous est parvenue en provenance des rappeurs qui, jusque là, nous avaient plutôt ignorés. C… leur a demandé ce qu’il y avait à fermer…

 

 

Il nous a finalement été accordé de regarder rapidement. Il était 17h55. 

 

La physionomiste nous a laissé entrer dans le noir. 

 

 

C… a éclairé pendant que je photographiais. 

 

 

Cet homme très détendu m’a répondu qu’il n’avait pas le temps pour une interview. 

 

 

Dissimulés dans l’obscurité et parfaitement silencieux, ces assaillants auraient pu nous surprendre sans la lumière déployée par C….

 

 

 

 

La Baby-sitter. J’ai du mal à connaître la raison pour laquelle, malgré les apparences, j’ai envie de croire que cette divinité ou cette créature est plutôt bienveillante et protectrice. C’est peut-être son regard qui m’inspire. 

 

 

 

J’avais entendu parler de l’isolement et de la grande précarité de beaucoup d’étudiants à la suite de la pandémie du Covid. Mais j’ai découvert, là, l’existence de ce ” genre” d’épicerie sociale et solidaire.

 

 

 

 

 

Nous avions terminé notre “tour” pour cette fois. Finalement, nous étions un peu dans une grotte où le temps s’était arrêté. Et, là, nous retournions à la “civilisation”.

 

C…m’a laissé choisir. Après avoir hésité, nous avons opté pour un repas à emporter que nous avons mangé dehors, assis précisément sur ces bancs que dépasse la dame. Il n’y a pas d’ironie de ma part avec cette photo. Le cadre m’a plu et nous étions près d’une salle de cinéma. Même s’il s’agit d’un multiplexe. A l’intérieur, j’ai aussi appris que le festival de cinéma Chéries, chéris LGBTQ+ aurait lieu du 20 au 30 novembre. Cela fait des années que je n’y suis pas allé. Certains films seront projetés dans ce multiplexe. D’autres au MK2 Beaubourg et au MK2 Quai de Seine.  

 

Franck Unimon, jeudi 18 novembre 2021. 

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