
Paris sans passe : Atterrissage ethnique
Atterrissage « ethnique »
Ce mardi 1O aout 2021 a été ma première sortie sur Paris depuis l’instauration du passe sanitaire. Mon atterrissage a eu un caractère « ethnique ». Je me suis senti tel un aborigène exclu d’une certaine civilisation :
Celle des spectateurs et des consommateurs.

Et cette civilisation, pour continuer d’exister, me marcherait spontanément sur la figure sans faire attention mais aussi en toute ignorance.
« Cela ne tient qu’à toi ! » ou « C’est toi qui l’as choisi, ne te plains pas ! » mais aussi, « Ton comportement est délirant ! » pourraient être quelques unes des voix disponibles afin de commenter ma séparation d’avec la vie normale.
Mais aussi celle-ci :
« On dirait que tu prends du plaisir dans cette situation ! ».
Je ne prends pas de plaisir à cette situation. Même si les nouvelles contraintes qu’elle m’inflige ou qu’elle m’apporte vont m’obliger à faire le tri. A renoncer. Et aussi à me montrer créatif.

Il y a encore quelques semaines, je faisais encore partie de cette civilisation. Je préfèrerais continuer à me mouler dans le mouvement général comme je l’ai toujours fait dans les grandes lignes. Je n’ai pas un palmarès très impressionnant en tant que militant. Et encore moins une activité underground que je pourrais proposer à la vente, à mon avantage, à une maison d’édition ou à une galerie d’art.
Un délire « normal »
Quant Ă mon « dĂ©lire »….je le considère comme une rĂ©action tout Ă fait normale vu ce que nous vivons depuis dix huit mois, maintenant. Parce-que, depuis dix huit mois et la dĂ©claration officielle de la pandĂ©mie du Covid, ce que nous vivons tous est dĂ©lirant. Donc, quoi de plus normal que de dĂ©lirer dans une situation dĂ©lirante. Les gestes barrières ci-dessous ne sont pas dĂ©lirants pour moi. Je les applique– voire les rappelle– du mieux que je le peux depuis le dĂ©but de leur « prescription« . Ce que je trouve dĂ©lirant, c’est le climat voire toute cette culture de pensĂ©es et de certitudes contradictoires et antagonistes qui peuvent se dĂ©velopper autour de cet Ă©vĂ©nement qu’est la pandĂ©mie du Covid. Mais aussi de voir comme un « simple » virus a suffi depuis dix huit mois Ă nous aliĂ©ner de plus en plus, nous les ĂŞtres si « modernes » et si « libres ».

MalgrĂ© cela, le plus inquiĂ©tant pour moi serait de rencontrer quelqu’un qui m’affirmerait qu’elle ou qu’il se sent comme un festivalier en plein carnaval dans toute cette ambiance qui nous aspire le cerveau comme un tirebouchon peut extraire le bouchon de liège d’une bouteille de vin. Le pop Ă l’ouverture ne garantit pas que l’on conservera toute sa cervelle mĂŞme si le goĂ»t et le trou sont divins.
Sauf qu’il y a maintenant, depuis l’établissement par notre gouvernement du passe sanitaire, trois grandes tentes qui parsèment le pays ainsi que les territoires français à l’extérieur de l’hexagone :
Celles où le délire consiste à penser que les vaccins actuels contre le Covid, tels qu’ils ont été conçus, leur donne une immunité totale ou parfaite.
Et, celles où des personnes comme moi ne font pas suffisamment confiance aux vaccins actuels. Qui pensent que ces vaccins offrent une protection limitée. Et que cette protection, ensuite, se paiera peut-être au prix fort avec des conséquences sur la santé de celles et ceux qui auront choisi de les adopter.
Il y a une troisième tente où l’on entre encore sans QR Code, sans PCR et sans test antigénique préalables. On y trouve des vaccinés et des non-vaccinés qui s’acceptent et comprennent les raisons et les choix des autres. Même s’ils sont différents et, a priori, opposés.

Néanmoins, pour moi, depuis dix huit mois, tout le monde délire avec le Covid.
Fièvre ou pas fièvre. Réa ou pas.
Et celle ou celui qui affirmera avoir toujours, depuis le début, eu la même lucidité et le même calme est une personne qui se ment ou qui raconte des histoires. Peu importe sa fonction.
Seulement, maintenant, surtout depuis le 12 juillet 2021 et les annonces du gouvernement, je fais partie de cette minorité qui délire d’une façon « dissonante » par rapport à la majorité. Or, le nombre est dominant et l’emporte même en démocratie.

Je devrais marcher au pas et rejoindre le plus grand nombre de mes semblables vaccinés.
Je pourrais plus facilement faire autrement si j’avais de très grands pouvoirs telles certaines personnalités de ce monde. Celles et ceux qui sont riches, qui disposent de forts pouvoirs d’influences, qui dirigent une entreprise, un pays ou une armée. Une armée de l’ombre ou officielle.

Je ne fais pas partie de cette minorité dominante, qui sait attaquer et aussi se défendre. Les seules armées que je puisse peut-être récupérer et diriger, et encore, c’est celles de la diarrhée et de la logorrhée. La diarrhée et la logorrhée de la peur, de l’inaction et de l’ignorance.
La majorité dormante
J’ai plutôt, longtemps, fait partie et fais toujours partie de la majorité dormante. Et confiante.
Il n’y a que maintenant que je commence à vraiment me méfier. Et, c’est peut-être déjà trop tard. En tout cas, pour les personnes comme moi, vaccinées et non-vaccinées. Parce-que pour éviter le passe sanitaire et le projet de société qu’il dessine- vu que même des personnes vaccinées y sont opposées- il aurait fallu refuser, avant d’en devenir dépendants, au moins internet et la téléphonie mobile tels qu’ils se sont développés. Ou apprendre à les maitriser davantage. Ne pas les laisser aux mains de quelques unes et quelques uns qui sont les dirigeants d’aujourd’hui et encore de demain.
Et, c’était il y a trente ans ou un peu moins, qu’il aurait fallu faire ça. S’interposer. Mettre davantage de garde-fous. Je ne l’ai pas fait.
Il y a trente ans ou un peu moins, nous avions aussi d’autres préoccupations. Nous avons toujours eu d’autres préoccupations. En ce moment, beaucoup d’entre nous ont bien d’autres préoccupations.
Et, puis, internet, c’était fantastique. Oui, c’était fantastique. Et, c’est toujours fantastique. Mais le fantastique peut avoir un prix très élevé selon les projets des décideurs. Pour moi, ce mardi 10 aout 2021, son prix a été des situations inédites. Et, ce n’est que le début.
Des situations inédites
Pénis flots

Devoir trouver, en plein Paris, un jardin ouvert pour aller y pisser en toute discrétion mais aussi en toute dignité ?
Parce qu’il faut fournir un passe sanitaire pour entrer dans un café ou dans un restaurant afin d’y demander si l’on peut utiliser leurs toilettes. Gracieusement ou contre une petite pièce voire une consommation.
Depuis, j’ai commencé à faire des recherches en vue de m’acheter des péniflows. Afin de pouvoir me balader avec incognito, je devrai arrêter de porter des shorts en été, alors que cela fait partie de mes plaisirs. Pisser tranquillement et proprement tout en marchant dans Paris, cela deviendra assurément un de mes plus forts plaisirs. A condition d’éviter la palpation en cas de vérification et de palpitation identitaire.
Ma seule consolation pour l’instant : même des aviateurs ont à résoudre ce problème de besoin urinaire en plein vol.
En attendant, un mouvement de résistance de la vessie reste à structurer. Mais je crains que cela ne soit au dessus de mes forces. Car j’aime pisser en plein vol.
Persona non grata

Etre persona non grata devant les salles de cinéma. Je me demande à quoi va bien me servir ma carte mensuelle illimitée que je possède depuis une vingtaine d’années. Car je n’envisage pas de me faire trifouiller les narines pour un test PCR ou antigénique le matin ou quarante huit heures avant une séance de cinéma. Il fut une période où j’allais au cinéma 7 jours sur 7. Heureusement que je n’en suis plus là même si je le regrette un peu. Il y a tant de films que j’aimerais aller voir.

Par contre, si je l’avais voulu, j’aurais pu entrer Ă la Fnac. LĂ , peu importe le nombre de personnes qui s’y trouvent, le masque anti-Covid « suffit ». Extraordinaire. Je croyais que le gouvernement, très confiant dans l’explosion des commandes sur internet durant le premier confinement, allait tout axer lĂ dessus pour maintenir la dynamique de la consommation. Mais l’un n’empĂŞche pas l’autre. On peut, et, autoriser un accès « plus ou moins libre » Ă la Fnac avec un simple masque. Et, en mĂŞme temps voir coexister les achats sur internet. Mais une salle de cinĂ©ma, avec un simple masque anti-Covid, c’est impossible. Et, entrer dans une salle de cinĂ©ma sans visage, sans tĂŞte et sans vessie, est-ce possible?
Dans une salle de théâtre ?

MalgrĂ© ça, certaines allĂ©es et venues ailleurs sont possibles sans passe sanitaire. Dans une bibliothèque près du complexe de cinĂ©ma oĂą je n’aurais pas pu entrer, le passe sanitaire n’est pas obligatoire. J’ai pu entrer dans une grande pharmacie parisienne.

Pour retourner voir les colonnes de Buren. Je n’ai pas senti de tension particulière autour de moi. C’est plutôt moi qui, par moments, ai eu l’impression d’être un dangereux agent contaminant en circulation dans Paris. Je me demande combien de temps, sans passe sanitaire, je vais pouvoir continuer de me permettre ce genre d’infiltration clandestine comme celle d’aujourd’hui.

Je me suis aussi demandé dans quelle mesure certains des films à l’affiche que je ne verrai pas, parlent d’une situation plus ou moins proche de celle que l’on peut vivre aujourd’hui sans passe sanitaire.

On n’exige pas encore de passe sanitaire pour regarder les affiches.
Franck Unimon, ce mardi 10 aout et ce mercredi 11 aout 2021.
2 réponses sur « Paris sans passe : Atterrissage ethnique »
[…] Hier, j’ai effectuĂ© ma première sortie sans passe sanitaire. J’en parle dans un autre article.( Paris sans passe : Atterrissage ethnique) […]
[…] Dernièrement, j’ai Ă©crit que mon refus pour l’instant de la vaccination anti-Covid et du passe sanitaire obligatoire (puisque les deux ont Ă©tĂ© menottĂ©s ensemble par notre gouvernement) a fait de moi l’équivalent d’un aborigène exclu de la civilisation des spectateurs et des consommateurs dont je faisais partie jusque lĂ . ( Paris sans passe : Atterrissage ethnique) […]