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Cinéma self-défense/ Arts Martiaux

Sex & Fury un film de Norifumi Suzuki

 

L’actrice Reiko IKI

Sex & Fury un film de Norifumi Suzuki

 

 

Direction l’ère Meiji :

 

Un an après Nous ne vieillirons pas ensemble du rĂ©alisateur français Maurice Pialat, le rĂ©alisateur japonais Norifumi Suzuki sortait Sex & Fury (1973). La mĂŞme annĂ©e, toujours en 1973,  Bruce Lee, d’origine chinoise, première superstar asiatique internationale, dĂ©cĂ©dait lors du tournage du film Le jeu de la mort.  

 

Trois ans plus tard sortira L’Empire des sens de Nagisa Oshima, autre œuvre cinématographique japonaise.

 

 

Quel est le rapport entre Sex & Fury, qui fait partie de la catĂ©gorie Pinku Eiga et Yakusa Eiga, oĂą l’histoire se passe Ă  l’ère Meiji, ces autres Ĺ“uvres et ces artistes ? Car Sex & Fury n’est pas un remake du Nous ne vieillirons pas ensemble de Pialat. Encore moins du film Le Jeu de la mort.  Et, on imagine peu Marlène Jobert et  Jean Yanne, les deux acteurs principaux de ce film de Pialat, ou mĂŞme Bruce Lee- qui est absent de la filmographie de Pialat- Ă©voluer dans  l’époque relatĂ©e dans Sex & Fury :

 

En 1868, au Japon, Ă  l’ère Meiji.   

 

Les titres de ces films les rapprochent, bien-sûr.

L’actrice Reiko IKI dans le rĂ´le d’Ocho.

 

Celles et ceux qui affronteront Ocho, interprétée par l’actrice Reiko Ike, dans Sex & Fury ne vieilliront pas avec elle même si sa vision dégaine leur désir.

 

Ad Libido :

 

Selon le niveau oĂą se situe la libido et le sadisme du spectateur ou de la spectatrice – le film est rĂ©servĂ© aux plus de 16 ans–  Sex & Fury peut ĂŞtre vu comme un de ces films « druides Â»  qui savent modifier la constitution et la perception des corps et faciliter les fluides ainsi que toute Ă©tude les concernant :

 

Même si les scènes de combats et certaines séquences de jeu sont assez enfantines, la photographie, elle, n’a pas pris une ride. Entre le visage et le corps de Ocho/ l’actrice Reiko Ite et celui de Christina/ l’actrice Christina Lindberg, on a de quoi fuir l’ennui.

 

Si Reiko Ite est la femme parfaite très au fait de la bassesse et de la violence des hommes, Christina Lindberg, sait très bien ajouter l’innocence à la froideur.

L’actrice Christina Lindberg dans le rĂ´le de Christina.

 

Cependant, il existe d’autres plaisirs cinéphiliques dans la découverte de ce film.

 

Tarantino :

 

Sur la jaquette du dvd, il est spĂ©cifiĂ© que Tarantino s’est – aussi- inspirĂ© de ce film pour rĂ©aliser ses deux Kill Bill (2003 et 2004).  Et, cela saute aux yeux tant pour les membres que pour les combats -au sabre- d’Ocho/ Reiko Ite que pour la prĂ©sence de Christina/l’actrice Christina Lindberg. Laquelle interprĂ©tera- en 1974- le rĂ´le de Frigga/Madeleine dans le film Thriller (ou Crime Ă  froid) de Bo Arne Vibenius. Film qui a aussi influencĂ© Tarantino pour le rĂ´le de Elle Driver jouĂ© par l’actrice Darryl Hannah dans Kill Bill.

 

La plupart des hommes de Sex & Fury sont cupides, pervers et, bien-sĂ»r, lubriques. Les hommes honnĂŞtes et idĂ©alistes sont isolĂ©s ou minoritaires. Trahis et assassinĂ©s. Suzuki nous dĂ©peint donc un Japon corrompu Ă  l’intĂ©rieur alors qu’il s’agit d’un Japon de la majestuositĂ© et de l’honneur Ă  l’extĂ©rieur :

 

Ce Japon a défait la Chine et la Russie militairement et se modernise à toute vitesse.

 

Trois portraits de femmes :

 

Ocho/ l’actrice Reiko IKI

 

Dans ce Japon où les femmes sont opprimées, trois portraits de femme dominent dans ce film féministe. Celui d’Ocho ( l’actrice Reiko Iki), intrépide, dure au mâle, orpheline qui a grandi dans la rue après avoir assisté à l’assassinat de son père. Et qui doit son salut au fait d’avoir été recueillie par une femme qui lui a appris à voler et sans doute à se prostituer.

 

Celui de Christina (l’actrice Christina Lindberg) « l’occidentale Â» britannique, la jeune femme talentueuse, devenue espionne pour son pays, alors plus grande puissance coloniale, par amour pour revoir…. un Japonais.

 

Le dernier portrait de femme « dominant Â» est celui de Yaeji/l’actrice Yoko Mihara, qui campe la femme d’un haut dignitaire japonais. Yaeji est toute respectable jusqu’à ce que l’on comprenne qu’elle perd toute conduite devant le sexe. Et que «  sa peau dĂ©vore les hommes Â».

 

ProtĂ©ger ou couper :

 

Ocho/l’actrice Reiko IKI

 

Ces trois femmes sont trois tentatives  de coexistence avec les hommes de ce Japon. Pour Ocho, le rĂ©sultat de cette coexistence se dĂ©compose de la manière suivante :

 

Elle protège ou elle coupe.

 

Soit elle a un homme Ă  venger (son père) ; soit elle est porteuse des dernières volontĂ©s d’un homme ; soit elle sauve un homme (« l’anarchiste Â» Shunosuke interprĂ©tĂ© par l’acteur Masataka Naruse)  poursuivi par la police ;  soit elle tue des hommes aussi brutaux que des animaux derrière leurs airs raffinĂ©s. Car certains de ces nouveaux aristocrates qui ont rĂ©ussi sont d’anciens yakusas qui ont rĂ©alisĂ© des crimes et sont prĂŞts Ă  tout pour parvenir Ă  leurs fins. Tortures, viols, meurtres, trafic de drogue….

En tuant ces hommes, on pourrait dire qu’Ocho les libère car ils n’ont pas Ă©voluĂ©. Ils sont enfermĂ©s dans des instincts et des comportements dont ils sont devenus insĂ©parables. Elle, a Ă©voluĂ©. Au point qu’elle tient le sabre, arme souvent masculine, mieux que les hommes. Dans Sex & Furyune femme telle qu’Ocho est le vĂ©ritable honneur du Japon. Cet honneur vit dans la rue et est orphelin. 

Cependant, au contraire de Christina et de Yaeji, aucun dĂ©sir et aucun amour ne retient Ocho Ă  un homme en particulier. Et, il semble que cela contribue non seulement Ă  en faire une femme libre mais aussi Ă  lui sauver la vie en tant qu’individu. Ce qui, bien-sĂ»r, Ă©tait un sacrĂ© affront adressĂ© au Japon des annĂ©es 70 (et d’aujourd’hui ?) oĂą le groupe prĂ©vaut sur l’individu. Et oĂą la femme se doit d’être mariĂ©e Ă  un homme et de baisser les yeux.

 

Ocho/ L’actrice Reino IKI

 

 

Ocho fait tout le contraire. C’est ce qui lui permet, plusieurs annĂ©es plus tard, de faire toute la lumière sur le meurtre de son père. Et, nous, si nous arrivons Ă  lever les yeux,  cela nous permet de regarder ce film autrement après les Ă©vĂ©nements relatifs au harcèlement des femmes ou Ă  des mouvements tels que #balancetonporc.

 

Franck Unimon, ce samedi 17 juillet 2021.

 

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Vacciner plus pour soigner plus !

 

Vacciner plus pour soigner plus !

 

 

Ce que j’aime dans les enterrements, c’est que l’on y vit des moments de sincérité. C’est pareil avec l’humour.

 

Il y a deux ou trois jours, le PrĂ©sident de la RĂ©publique, Emmanuel Macron, le Ministre de la SantĂ©, Olivier VĂ©ran,  puis la Ministre du Travail, Elizabeth Borne, nous ont fait savoir qu’à partir du 15 septembre tout soignant non vaccinĂ© contre le Covid, en cas de contrĂ´le, s’exposerait Ă  des sanctions:

 

Mise Ă  pied, licenciement, suspension du salaire.

 

Ce n’est pas cela qui m’a fait sourire. Et, je n’ai pas vu de sincĂ©ritĂ© particulière non plus dans ces nouvelles dispositions dans l’intention de pousser les soignants Ă  se faire vacciner Ă  double dose d’ici le 15 septembre. J’ai plutĂ´t vu un passage en force. Je m’attendais Ă  ce que la vaccination anti-Covid devienne obligatoire pour les soignants ou, simplement, pour voyager hors de la France. Mais pas Ă  ce qu’elle le devienne aussi « vite Â». ( Des soignants hĂ©roĂŻques et irresponsables)

 

Un succès sanitaire et politique. Pour l’instant.

 

Le 15 septembre, c’est dans deux mois. Depuis l’intervention tĂ©lĂ©visĂ©e du PrĂ©sident Macron, « tout le monde Â» veut se faire vacciner. Donc, son intervention serait un succès.

 

Sanitaire. Et politique. Pour l’instant.

 

Mais si j’ai parlĂ© d’enterrement au dĂ©but de cet article, c’est parce-que le lendemain de l’allocution prĂ©sidentielle d’Emmanuel Macron pour « nous Â» exhorter, nous les soignants, Ă  nous faire vacciner, j’ai appris le dĂ©cès du père de mon meilleur ami. Cela m’a ramenĂ© Ă  Nanterre oĂą j’ai grandi, près du collège oĂą cet ami et moi nous Ă©tions rencontrĂ©s la première fois. Le collège Evariste Galois qui va bientĂ´t disparaĂ®tre en raison de l’impasse pĂ©dagogique oĂą il s’est emmurĂ©.

 

Je suis allĂ© Ă  l’enterrement le jour-mĂŞme. Ainsi que dans une mosquĂ©e, pour la première fois de ma vie. Une part de chagrin m’inspire donc peut-ĂŞtre certaines de mes pensĂ©es dans cet article. Mais, comme je l’ai annoncĂ©, j’aime, dans les enterrements «  les moments de sincĂ©ritĂ© Â» que l’on y vit. Et, je ne vais pas renoncer Ă  ces moments de sincĂ©ritĂ© alors que j’écris.

 

Les réactions de quelques journaux après l’allocution télévisée du Président Macron, ce 12 juillet

 

Il m’est déjà arrivé de rire ou de sourire lors d’un enterrement. Et je souhaite qu’on le fasse lors du mien. On pourra même danser. Avec ou sans vaccination anti-Covid.

Mais ce qui m’a fait sourire ou rire aujourd’hui, c’est plusieurs dessins du dernier numĂ©ro du journal Charlie Hebdo que je lis rĂ©gulièrement depuis « les attentats Â» de 2015.

 

 

 

Il y a quelques jours, je parlais de l’éditorial du journal La Croix dans mon article Des soignants hĂ©roĂŻques et irresponsables. Aujourd’hui, je parlerai plutĂ´t du dernier numĂ©ro de Charlie Hebdo : le numĂ©ro 1512 du 14 juillet 2021 que je n’ai pu acheter que ce matin( jeudi 15 juillet).

 

J’avais besoin de lire les réactions de différents journaux après l’intervention du Président Macron et des Ministres Véran et Borne. Car j’avais exposé mes réserves envers la vaccination anti-Covid. Même si je suis favorable à la vaccination. Mais pas n’importe comment.

 

En première page de Charlie Hebdo, parmi les titres, on peut lire : Les soignants boudent le vaccin (le verbe « boudent Â» est Ă©crit en rouge). Il y a la caricature du PrĂ©sident Macron qui plante sa seringue dans la tĂŞte d’un travailleur d’un certain âge, plutĂ´t fourbu, et qui dit, sur un fond rouge, avec un air assez diabolique ou sadique :

 

« Vacciner plus….pour travailler plus ! Â».

 

Soit une allusion à la réforme des retraites dont le Président Macron compte reculer l’âge. Je viens à l’instant de m’inspirer de cette phrase pour le titre de cet article qui était totalement différent au départ.

 

Puis, en deuxième page de Charlie Hebdo, dĂ©bute le bal Ă  propos du sujet qui me concerne particulièrement en tant que soignant non vaccinĂ© contre le Covid Ă  ce jour. Sujet qui touche aussi visiblement beaucoup plus de Français qu’il n’y a de soignants en France depuis l’intervention du PrĂ©sident Macron.  Puisque depuis, la prise de rendez-vous par Doctolib est dĂ©bordĂ©e :

 

Pour une vaccination anti-Covid.

 

Les dessins de Charlie Hebdo agrĂ©mentĂ©s du titre ANTIVAX A L’HĂ´pital (Pourquoi le personnel soignant rechigne-t’il Ă  se faire vacciner ?) m’ont fait sourire voire rire.

 

 

 

 

Pour moi, vivre, faire de l’humour et de l’autodérision vont de pair avec ma santé mentale.

 

L’article de GĂ©rard Biard qui suit est intitulĂ© Pour une vaccination inclusive. Seul le mot « inclusive Â» est inscrit en noir. Les mots qui le prĂ©cèdent sont en plus gros caractères et de couleur rouge.

Et le but de GĂ©rard Biard n’est pas de faire rire. Sauf un peu lorsqu’il avance que :

 

 Â« (….) depuis  un an et demi, les pontes de l’hĂ´pital public sont davantage susceptibles de contaminer un journaliste tĂ©lĂ© ou une maquilleuse qu’un patient…. Â».

 

Plus prĂ©cis que l’éditorialiste JĂ©rĂ´me Chapuis du journal La Croix pour son article Une obligation morale, GĂ©rard Biard, dans son article, Ă©nonce que les soignants rĂ©calcitrants au vaccin anti-Covid sont majoritairement des personnels infirmiers et aides-soignants ou autre personnels soignants. « 46% Â» d’entre eux, dit-il ne sont « toujours pas vaccinĂ©s Â». Alors que d’après les chiffres de l’AP-HP « seuls 9% des mĂ©decins ne sont Ă  ce jour pas du tout vaccinĂ©s, et 70 % ont reçu les deux doses Â».

 

Soit beaucoup mieux que les personnels aides-soignants et infirmiers.  Est-ce dĂ» Ă  leur esprit matheux, scientifique,  ou Ă  leur cĂ´tĂ© « premier de la classe Â» ? De toutes façons, les mĂ©decins ont toujours besoin de se dĂ©marquer par rapport Ă  nous, les personnels aides-soignants et infirmiers.

 

 

Si Biard reconnaĂ®t que la «  raison Â» de la rĂ©ticence de ces personnels soignants «  face Ă  la vaccination anti-Covid n’est pas forcĂ©ment inaudible (….) Â» il met cependant l’accent sur la prioritĂ© qui doit ĂŞtre accordĂ©e aux patients. Et, il conclut son article par ces deux phrases :

 

« On choisit de travailler Ă  l’hĂ´pital. On ne choisit pas d’y ĂŞtre soignĂ© Â».

 

La vaccination , un autre pass navigo

 

 

J’étais en dĂ©saccord avec les conclusions de Biard. Cependant, depuis l’intervention tĂ©lĂ©visĂ©e de Macron et celle de VĂ©ran et Borne, j’avais lu quelques articles supplĂ©mentaires sur le sujet de la vaccination. Dans des journaux de sensibilitĂ© assez diffĂ©rente :

 

Charlie Hebdo, donc, La Croix, mais aussi Le Canard Enchainé et L’Humanité. Si Charlie Hebdo et Le Canard Enchainé sont assez cousins, ils sont assez éloignés de La Croix et du journal L’Humanité. Sauf, peut-être, par le fait qu’ils sont, je crois, les quatre seuls journaux encore indépendants financièrement en France. Et ces quatre journaux font consensus en faveur de la vaccination anti-Covid. De même que le journal Les Echos.

J’ai aussi contacté une amie, connue durant mes études d’infirmier il y a plus de trente ans, qui, d’une part, perçoit la stratégie de Macron et de son gouvernement comme une stratégie dictatoriale derrière une effigie de démocratie mais qui, d’autre part, m’a répondu s’être faite vacciner contre le Covid, ainsi que son mari et leurs enfants ( 18 ans et plus). Afin de pouvoir voyager.

 

De mon cĂ´tĂ©, je vis près de Paris. Et je dĂ©pends Ă©conomiquement de mon travail en plein Paris, soit dans une rĂ©gion de plus en plus quadrillĂ©e. Une rĂ©gion oĂą il est dĂ©sormais impĂ©ratif d’avoir son pass navigo pour passer des portiques qui ont poussĂ© partout ces dix dernières annĂ©es et, oĂą, aussi, les contrĂ´les de titres de transport sont devenus rĂ©guliers. Nous sommes de plus en plus contrĂ´lĂ©s pour tout. ContrĂ´le technique pour la voiture. Niveau de pollution de la voiture. Nous nous devons d’avoir un tĂ©lĂ©phone portable. Mais aussi une connexion internet. Et d’avoir des mots de passe. Dans ce monde-lĂ , pour vivre sans le « pass Â» qui ouvre les portes,  les comptes ou qui dĂ©verrouille le tĂ©lĂ©phone, la tablette numĂ©rique ou l’ordinateur, il faut soit ĂŞtre un gĂ©nie de la fraude ou un Evariste Galois de l’informatique. Soit ĂŞtre Ă©tranger Ă  ces normes. Ou ĂŞtre un exclu ou un « inadaptĂ© Â». La personne « normale Â» ou nĂ©vrosĂ©e, elle, prĂ©fèrera avoir son « pass Â» afin de s’éviter d’avoir Ă  formuler tout un tas  de calculs en vue de se dĂ©barrasser de bien des contrĂ´les et des portiques de son quotidien.

 

Je vois donc cette vaccination anti-Covid, pour le sujet citadin lambda que je suis, comme une Ă©preuve de rĂ©alisme. Si je vivais en pleine campagne et dans une certaine autonomie  Ă©conomique, j’opterais sans doute pour une prolongation de mon abstinence vaccinale.

 

Je tenais Ă  ce passage dans mon article.

 

Par ailleurs, en repensant Ă  l’article de Biard et Ă  celui d’autres journalistes, je me suis aperçu que trois mots au moins manquent invariablement chaque fois qu’est mentionnĂ©e la « dĂ©fiance Â» des soignants envers la vaccination anti-Covid. Chaque fois qu’il est suggĂ©rĂ© que les soignants qui refusent la vaccination anti-Covid sont des irresponsables et des Ă©goĂŻstes.

 

L’épidĂ©mie des mots :

 

« Irresponsables Â», « Ă©goĂŻstes Â», « immatures Â», « idiots Â»,  «  capricieux Â» ce sont, pour, rĂ©sumer les quatre ou cinq mots qui servent de piliers pour essayer de comprendre cette « dĂ©fiance Â» ou cette « rĂ©ticence Â» ou ce « refus Â» de certains soignants concernant la vaccination anti-Covid.

 

Et, le fait que trois autres mots, au moins, soient rarement rappelĂ©s atteste, selon moi, que le mal est vraiment profond et bien antĂ©rieur, une fois de plus Ă  la pandĂ©mie du Covid. Et contre l’ « oubli Â» de ces mots, je me demande s’il y aura jamais un vaccin efficace. Car, ce n’est pas faute de connaĂ®tre ces mots Ă  propos des soignants :

 

 

Saturation. Epuisement. Surmoi.

 

On va commencer par le Surmoi des soignants. Je vais parler ici de celui des aides-soignants et des infirmiers. Tous les soignants ont un Surmoi. Mais concernant la vaccination anti-Covid, les « mauvais Ă©lèves Â» sont visiblement les personnels aides-soignants et infirmiers.

 

Le Surmoi des soignants :

Le « Surmoi Â» des soignants- ou leur sens du Devoir- est si prononcĂ© qu’à mon avis, il s’accompagne rĂ©gulièrement d’une certaine autodĂ©prĂ©ciation constante.

 

Ce qui est bien pratique.

 

Pour les gouvernements qui, depuis vingt Ă  trente ans, doivent se sentir en toute sĂ©curitĂ© lorsqu’ils entendent parler de manifestations de soignants qui espèrent des amĂ©liorations de leurs conditions de travail. Et, cela, aussi, pour «  le bien des patients Â».

 

Ce « Surmoi Â» des soignants est aussi bien utile Ă  bien des managers, responsables hiĂ©rarchiques ou directeurs d’hĂ´pitaux afin de faire accepter certaines conditions de travail difficiles et durables. Mais, aussi, pour culpabiliser les soignants qui feraient « mieux Â» ou « bien Â» de penser avant tout «  au bien des patients Â» ou d’être « solidaires Â» de leurs autres collègues. Et, c’est comme ça depuis vingt ans, trente ans, plus, moins, selon les services, selon les Ă©tablissements, selon les personnalitĂ©s des uns et des autres, selon les circonstances.

 

Il n’y a rien de nouveau.

 

Et puis, arrive la pandémie du Covid.

 

Surmoi + Pandémie du Covid =

Parmi ces journalistes, dont Biard et Chapuis, j’en suis sûr, qui ont su décortiquer le mal-être des soignants depuis des années, il se trouve aujourd’hui des journalistes qui ont oublié ou qui oublient ce qu’endurent bien des soignants depuis des années. Et, cela, bien avant la pandémie du Covid. En termes de conditions de travail.

 

Or, lorsque la pandémie du Covid a été officialisée en France l’année dernière avec le premier confinement, ce qui a été exigé de ces soignants, c’est d’en faire encore plus que d’habitude. Et avec moins de moyens. Dont, moins de masques ou pas de masques. Moins de personnel à certains endroits. Et, pas de vaccin anti-Covid fiable à cent pour cent.

 

S’il est « admis Â» maintenant que la vaccination anti-covid est actuellement le meilleur moyen, mĂŞme s’il est imparfait, pour peut-ĂŞtre se sortir de la pandĂ©mie du Covid, il est aussi « admis Â» que cette pandĂ©mie du Covid, en un an et demi, a aussi beaucoup Ă©prouvĂ©. Il y a les morts.  Et, il y a les vivants.

 

Dessin dans le « Charlie Hebdo » de ce 14 juillet 2021.

 

Beaucoup, parmi les vivants, ont Ă©tĂ© touchĂ©s Ă©conomiquement. Et, autant ont Ă©tĂ© touchĂ©s physiquement et moralement. Parmi ces personnes Ă©prouvĂ©es, on retrouve des soignants. Des soignants qui, depuis un an et demi, ont donnĂ© de leur personne encore plus que d’habitude, du fait de la pandĂ©mie, et qui constatent un an et demi plus tard que, malgrĂ© leurs efforts, la pandĂ©mie est toujours lĂ . Mieux : aujourd’hui, on les voit comme des irresponsables lorsqu’ils se disent opposĂ©s Ă  la vaccination anti-Covid. Car il est « admis Â» qu’il y a un manque de recul. Mais, aussi, qu’il peut y avoir des effets secondaires. Ou que, comme Biard le dit dans son article :

 

« Certes, il paraĂ®t que la vaccination n’empĂŞche ni la contamination ni la contagion. Mais elle en diminue grandement le risque et les effets (….) Â».

 

 

Face Ă  ces rĂ©serves des personnels soignants, la rĂ©ponse, ferme et, dĂ©sormais, autoritaire et gouvernementale, donc, hospitalière, est toujours la mĂŞme depuis vingt Ă  trente ans :

 

« Pan-pan, cul-cul ! Â».

 

Culpabilisation et infantilisation des soignants depuis des annĂ©es mène aussi Ă  cette saturation des soignants. Car, culpabiliser et infantiliser des soignants, c’est assez banal dans le milieu. Et, c’est ce que fait aussi Biard dans son article. Lorsqu’il conclut :

 

« On choisit de travailler Ă  l’hĂ´pital. On ne choisit pas d’y ĂŞtre soignĂ© Â». Sa phrase est pleine de bonne sens. Et, elle est inattaquable. On ne va pas reprocher Ă  un patient d’avoir besoin de soins. Ou alors dans un sketch humoristique.

 

Sauf que Biard, comme d’autres, oublie un autre mot, finalement : les limites.

 

Les limites des soignants :

Avoir un surmoi, un sens du Devoir, une conscience professionnelle, ça incite bien des fois Ă  se surpasser. A ne pas compter ses heures. A accepter de vivre- parfois jusqu’Ă  la saturation et l’Ă©puisement- des situations professionnelles et personnelles que le citoyen lambda sera bien content d’éviter. C’est ce qui s’est passĂ©, encore plus que d’habitude, l’annĂ©e dernière lorsque nous Ă©tions applaudis depuis des balcons. Avions-nous vraiment le choix d’aller mourir Ă  l’hĂ´pital en partant y travailler ? Ou avions-nous vraiment le choix de partir travailler Ă  l’hĂ´pital ?

Non.

 

Je ne crois pas que des soignants puissent s’offrir le luxe de « choisir Â». C’est plutĂ´t le contraire. Etre soignant, mĂŞme si l’on « choisit Â» de le devenir, ou de l’être, cela devient assez vite un non-choix. Puisque très vite, le Surmoi, le sens du Devoir, du sacrifice, la conscience professionnelle, ou le fait d’être sollicitĂ© ou dĂ©signĂ©, nous oblige en quelque sorte Ă  ĂŞtre lĂ .  Donc, parler de choix pour un soignant, c’est presque très vite une abstraction. Puisqu’être soignant, c’est faire abstraction de soi. Quel choix ?!

 

Constamment, régulièrement, les soignants doivent répondre ou ont à répondre à des injonctions diverses.

 

L’un des apprentissages les plus difficiles à faire pour le personnel soignant, lors de son exercice professionnel, lorsqu’il fait cet apprentissage, c’est celui de ses limites.

Un des dessins du Charlie Hebdo de ce 14 juillet 2021, page 2.

 

 

Si le personnel soignant s’en remettait uniquement à sa hiérarchie pour que celle-ci respecte ses limites ou les fasse respecter, il y aurait sans doute encore plus de personnel soignant en situation de burn-out ou en arrêt maladie. Tant le personnel soignant peut être incité, pour différentes raisons, à en faire plus. Donc, le choix, dans tout ça…..

 

 

Un profond malaise

 

 

Au lieu de percevoir les personnels soignants récalcitrants ou réticents à la vaccination anti-Covid, comme seulement des grands irresponsables, des grands égoïstes ou des grands idiots, il faudrait plutôt, je crois, se dire, que pour que des professionnels aussi dévoués s’arque-boutent de cette manière contre un vaccin, c’est qu’il existe un profond malaise. Envers ce vaccin. Dans la profession. Dans la société. Dans le monde. Et que c’est peut-être de là que vient toute cette résistance contre la vaccination anti-Covid.

 

Et si le malaise est aussi profond, ce passage en force du gouvernement pour la vaccination anti-Covid va dĂ©boucher sur des troubles  sociaux radicaux du type gilets jaune.

 

Franck Unimon, ce vendredi 16 juillet 2021.

 

 

 

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Cinéma

Nomadland-un film de Chloé Zhao

 

Nomadland un film de Chloé Zhao

 

 

Nous nous accrochons à des décors. S’ils nous sont familiers, ils ne sont pas là pour être apprivoisés. Car ils sont carnivores et nous dévorent.

 

Le lundi est un décor bien connu. C’est le premier jour de la semaine. Celui par lequel tout commence. La déprime ou l’enthousiasme. L’échine ou les miasmes.

 

Commencer une semaine, par la première séance de cinéma, celle de 8h05, par Nomadland de Chloé Zhao, j’ai dû le mériter. Peut-être parce-que la semaine dernière, j’ai osé préférer aller regarder Black Widow, un film de super-héros, une grosse production hollywoodienne.

 

Ce lundi, c’était tout Ă  l’heure, j’étais seul dans la salle. Dehors, il faisait gris, un peu frais et il pleuvait. Cela avait un peu dĂ©sespĂ©rĂ© une de mes collègues de ce matin :

 

« Un mois de juillet, sans soleil ! On se croirait en Novembre ! Â».

 

Mon collègue de nuit avait essayĂ© de la dĂ©samorcer en lui disant : « La pluie, c’est bon pour les tomates ! Â».

 

J’avais été content de pouvoir dire qu’après le travail, j’allais me rendre au cinéma. C’est peut-être pour ça que j’ai été puni en allant voir Nomadland. Ce qui n’était pas prévu, au départ.

 

 Les film Teddy et Sound of Metal  Ă©tant indisponibles, je me suis rabattu sur Nomadland dont j’avais entendu dire beaucoup de bien Ă  sa sortie il y a plusieurs semaines. Je n’étais pas – encore- tentĂ© par Sans un Bruit 2. J’ai hĂ©sitĂ© un peu en faveur de Benedetta de Verhoeven avec l’actrice Virginie Efira.  J’aime, sous sa fadeur apparente (il y a des actrices et des blondes plus attrayantes) la             Â« rapacitĂ© Â» de son jeu.

 

Mais j’ai opté pour Nomadland dont j’avais oublié l’histoire. De toute façon, j’aime en savoir le moins possible sur un film avant de le voir. J’avais même oublié que Zhao avait obtenu l’Oscar du meilleur film et de la meilleure réalisatrice en 2021 avec Nomadland. J’en étais resté au prix qu’elle avait obtenu à la Mostra de Venise en 2020.

 

L’actrice Frances McDormand, dans le rĂ´le de Fern.

 

 J’avais vu et aimĂ© le prĂ©cĂ©dent film de Zhao, The Rider. C’est surtout ça qui m’a dĂ©cidĂ© Ă  aller voir Nomadland. J’avais aussi oubliĂ© que l’actrice Frances McDormand, que j’aime voir jouer, occupait le rĂ´le principal.

 

On a sans doute, en parlant de Nomadland, fait des comparaisons avec l’œuvre Sur la Route de Jack Kerouac ou avec le film Into The Wild adapté au cinéma par Sean Penn.

 

Il y a sans doute de ça dans Nomadland. Mais, pour moi, ce film est un alcool fort sans l’ivresse. Malgré son titre, le film nous laisse sur le bord de la route. D’accord, on y roule beaucoup et c’est bien sûr mieux que de vivre parqué sans perspectives dans un hôpital ou ailleurs. Mais ce sont des rêves brisés qui roulent. Celles et ceux dont les décors de vie se sont plantés un jour ou l’autre. Pour raisons économiques. Pour raisons de santé. Pour cause de deuil. Pour cause de stress post-traumatique. A partir de là, le scénario de la vie normale faite de sédentarité, d’emploi en CDI et de réussite matérielle s’est arrêté pour eux. Le rêve américain prend bien-sûr une trempe supplémentaire sans doute nettement supérieure à celle subie le 11 septembre 2001. Sauf que cette blessure apparaît encore modérément dans les grosses productions américaines comme dans les unes des journaux parce-que le pays est encore suffisamment étendu. Parce-que les Etats-Unis sont encore la Première Puissance mondiale. Et parce-que les Etats-Unis n’en sont pas encore au stade où certains de leurs habitants, tels les migrants en provenance d’Afrique, du Maghreb, d’Asie ou du Moyen-orient, traversent la mer en espérant trouver mieux ailleurs.

 

Quelle ironie de voir ce pays, civilisation de l’automobile, recycler ici, mais en voiture, les transhumances qui avaient sans doute été celles des tribus indiennes, lorsque, à pied ou à cheval, celles-ci avaient été acculées par les colons européens à devoir quitter leurs territoires et leur histoire.

 

En France et dans les territoires d’Outre-mer, il a existĂ© et il existe des Ă©quivalents Ă  ces migrations intĂ©rieures mais aussi Ă  certains mouvements sociaux. En France, les mouvements sociaux rĂ©cents les plus marquants sont bien-sĂ»r ceux des gilets jaunes. En  Guadeloupe, en 2009, il y avait eu le mouvement Liyannaj kont pwofitasyon.

 

 Cependant,  on peut aussi penser Ă  tous les autres mouvements sociaux  qui ont essayĂ© ou qui essaient d’amoindrir ou de dĂ©fenestrer la  « violence du libĂ©ralisme Â». Il m’est impossible, Ă  un moment ou Ă  un autre, de faire l’économie de cette formulation :

 

« La violence du libĂ©ralisme Â».

 

Surtout lorsque certaines scènes de Nomadland se passent dans l’enceinte d’un site de l’entreprise Amazon, dont le propriĂ©taire, Jeff Bezos, est depuis plusieurs annĂ©es l’homme le plus riche du monde. Et, dans Nomadland, on voit bien ce que sa richesse et sa rĂ©ussite doivent – comme bien des richesses et des rĂ©ussites- aux conditions de vie et de travail plus que pĂ©nibles, de quantitĂ©s de gens, de tous âges, de toute origine ethnographique et de tout niveau socio-culturel confondus.

 

Le personnage de Fern (interprĂ©tĂ© par Frances McDormand) nous fait entrer dans le fleuve de toutes ces personnes qu’elle rencontre ou retrouve, et qui, comme elle, sont tout sauf des parasites. Ils travaillent, se font Ă  toutes sortes de jobs, le plus souvent saisonniers, au grĂ© de ce qui leur est possible. Ils forcent l’admiration et le respect tout en n’obtenant rien d’autre de leurs contemporains ou de leur gouvernement  des rĂ©actions et des sentiments inadaptĂ©s :

 

IncomprĂ©hension ( percevoir Fern comme « homeless Â» au lieu de « houseless Â» , peur,  des rĂ©ponses inhumaines (le montant des pensions de retraites, par exemple).

 

Un parallèle est évidemment possible avec notre avenir social en France. Même s’il nous est souvent rappelé que la société américaine et la société française diffèrent, on peut aussi se dire que certains exemples américains louchent de plus en plus vers l’hexagone. Lorsque l’on pense par exemple à la réforme des retraites. Ou à la décision gouvernementale récente, en France, de reculer désormais l’âge du départ à la retraite à 64 ans.

 

Les seuls maquillages Ă  mon sens trop prĂ©sents dans Nomadland sont les passages de violons et de piano. Je crois que le film – que j’ai aussi trouvĂ© un peu trop long- aurait Ă©tĂ© meilleur sans ces anesthĂ©siants :

 

Une scène entre Fern et sa sĹ“ur ou une autre entre Fern et Bob Wells, sans violons et sans piano,  en attestent.

Bob Wells in the film NOMADLAND. Photo Courtesy of Searchlight Pictures. © 2020 20th Century Studios All Rights Reserved

 

 

Si Nomadland est un alcool propre à déglinguer la moindre ivresse, il sait aussi mieux nous rapprocher de cette faiblesse qu’est la caresse.

 

 

 

Franck Unimon, ce lundi 12 juillet 2021.

 

 

 

 

 

 

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Corona Circus

Des soignants héroïques et irresponsables

Photo prise l’annĂ©e dernière pendant le premier confinement.

 

                                Des soignants hĂ©roĂŻques et irresponsables

 

La vaccination contre le Covid :

 

Les soignants, en France, se sont peu fait vacciner contre le Covid. 57 % des soignants environ se sont faits vacciner. De quels soignants parle-t’on ? Des mĂ©decins ? Des infirmiers ? Des aides-soignants ? Des « soignants Â»â€¦.ces anonymes qui Ă©taient autant de « hĂ©ros de la Nation Â» l’annĂ©e dernière lors du premier confinement. Et qui, aujourd’hui, compteraient parmi eux un certain nombre d’irresponsables. 

 

Facile….et obligatoire :

 

Car, aujourd’hui, contrairement à l’année dernière pendant le premier confinement, il est facile de se faire vacciner contre le Covid.

 

Il est aussi de plus en plus obligatoire de se faire vacciner pour partir Ă  l’étranger. En vacances, par exemple. Nous sommes au mois de juillet et, après un nouveau « confinement Â» pour parer Ă  la pandĂ©mie du coronavirus, beaucoup de gens sont partis en vacances.

 

Gare du Nord, juillet 2021.

 

On peut aussi voir des rĂ©clames encourageant Ă  la vaccination anti-covid afin de se rendre Ă  des Ă©vĂ©nements de masse festifs : matches de foot, concerts….

 

Mais on peut aussi s’attendre, à ce que, bientôt, ou dès maintenant, la vaccination anti-Covid soit un avantage lors de certaines démarches en vue d’obtenir un emploi. Ou, sur les sites de rencontres, pour « dénicher » un partenaire ou une partenaire.

 

 

Je m’étais dit que j’allais donner mon avis un de ces jours sur le sujet de la vaccination anti-covid. Mais je n’étais pas pressé. Et puis, la lecture de l’éditorial (signé Jérôme Chapuis) du journal La Croix de ce mercredi 7 juillet 2021 m’a tellement contrarié que je me suis dit que je ne devais plus traîner pour écrire à ce sujet.

 

 

Irresponsable :

Parce-que je fais encore partie de ces irresponsables. A ce jour, je ne me suis pas encore fait vacciner contre le ou la Covid. Je suis et serais donc un irresponsable en plus d’être un Ă©goĂŻste. Je retranscris ce passage de l’éditorial du journal La Croix de ce 7 juillet qui m’a particulièrement poussĂ© Ă  Ă©crire :

 

« (…..) A l’heure oĂą menace une quatrième vague de Covid, le chiffre laisse songeur. A l’hĂ´pital, au dĂ©but de l’étĂ©, seuls les deux tiers des soignants avaient reçu une première dose de vaccin (….). Cette dĂ©fiance persistante conduit le gouvernement Ă  envisager pour eux la vaccination obligatoire. De nombreux soignants y voient une atteinte Ă  leur libertĂ©. Argument discutable, d’abord parce que la libertĂ© individuelle doit toujours ĂŞtre mise en balance avec l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral. Ensuite parce que leur mĂ©tier amène ces professionnels Ă  cĂ´toyer malades et personnes âgĂ©es qui sont prĂ©cisĂ©ment les plus vulnĂ©rables face au virus. De ce point de vue, dès lors qu’il est admis qu’elle ne comporte pas d’effets indĂ©sirables, la vaccination des soignants apparaĂ®t comme une obligation morale (….) Â».

 

 

Discutable :

 

L’atteinte Ă  « ma Â» libertĂ© est un argument discutable selon cet Ă©ditorial. HĂ©, bien, discutons, car, autrement, une fois de plus, si je ne prends pas l’initiative de « discuter Â» c’est quelqu’un d’autre qui le fera Ă  ma place. Et, vu la façon dont l’éditorialiste du journal La Croix mais aussi d’autres journaux s’expriment, je prĂ©fère m’exprimer moi-mĂŞme. Pour changer avec cette « normalitĂ© Â» qui fait de beaucoup de soignants de simples exĂ©cutants.

 

Pour commencer,  je suis favorable Ă  la vaccination. Mais pas n’importe comment : je suis autant prudent vis Ă  vis de ce vaccin anti-Covid que je ne l’avais Ă©tĂ© vis-Ă -vis de tous ces applaudissements sincères et rĂ©pĂ©tĂ©s que l’on nous avait adressĂ©s l’annĂ©e dernière lorsque nous Ă©tions des « hĂ©ros Â». D’ailleurs, j’aimerais reparler un peu de cette Ă©poque un peu trop vite et trop facilement oubliĂ©e maintenant qu’il est devenu « entendu Â» que tout le monde doive se faire vacciner pour « l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral Â».

 

L’époque des « hĂ©ros Â» :

 

Elle a duré à peu près deux mois et demi d’un point de vue médiatique. De mi-mars à fin juin pour faire large. Mais c’est la période comprise entre le début du premier confinement en mars 2020 et début Mai qui m’importe le plus.

 

Quelques « Une » du journal LibĂ©ration l’annĂ©e dernière lors du premier confinement.

 

Cette « Ă©poque Â», qui a durĂ© cinq Ă  six semaines, a Ă©tĂ© une Ă©poque d’angoisse et de peur assez maximale. Je me souviens de cette angoisse pour l’avoir ressentie. Et, je me souviens, aussi, que, durant ces cinq Ă  six semaines, nous, les hĂ©ros, nous « devions Â» continuer d’aller au travail pour       « l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral Â» pendant que la quasi-totalitĂ©, ou une bonne partie, de la population restait confinĂ©e chez elle. Tant tout le monde avait peur et Ă©tait angoissĂ©.

 

 

Suite de quelques « Une » du journal LibĂ©ration l’annĂ©e dernière pendant le premier confinement.

 

Il y a sûrement eu des endroits, des régions, des quartiers en France, où des gens, lors du premier confinement, ont continué de se balader comme d’habitude. Mais ces endroits, ces régions ou ces quartiers n’étaient pas concernés par ceux que j’ai traversés lorsque je me suis rendu au travail lors de ces cinq à six semaines. Pareil dans les transports en commun.

 

J’ai Ă©crit : « Nous devions continuer d’aller au travail…. Â». Je vais prĂ©ciser : Je tenais Ă  aller au travail lors de cette Ă©poque particulière. MĂŞme si le service oĂą je travaillais a Ă©tĂ© moins exposĂ© que d’autres services (Ehpad, services d’urgences et de rĂ©animation somatiques ) Ă  des clusters, je savais que nous vivions une Ă©poque particulière, historique, et je tenais Ă  la vivre. Comme Ă  contribuer, Ă  mon niveau, Ă  ce que le travail pour « l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral Â» continue.

 

Photo prise l’annĂ©e dernière pendant le premier confinement.

 

 

 

J’allais dĂ©ja oublier de cette Ă©poque dorĂ©e le « privilège Â» qu’ont eus certains de mes collègues hĂ©roĂŻques, en France ou ailleurs, de recevoir des courriers anonymes de voisins. Non pour les encourager. Ou, plutĂ´t, oui. Mais pour les encourager Ă  dĂ©mĂ©nager. En leur expliquant qu’en tant que soignants, ils Ă©taient devenus une menace pouvant contaminer…. tout l’immeuble.

 

Aujourd’hui, c’est ni plus ni moins la Nation toute entière que des ex-soignants hĂ©roĂŻques seraient susceptibles de contaminer, selon certains esprits très dĂ©veloppĂ©s,  avec leurs âneries consistant Ă  traĂ®ner pour se faire vacciner.

 

Je repense aussi au tĂ©moignage -que j’avais lu- de cette soignante, qui, lors du premier confinement, expliquait s’être interdite d’embrasser sa fille pour des raisons sanitaires. Alors, je vais sĂ»rement paraĂ®tre complètement Ă  cĂ´tĂ© de la plaque mais j’ai toujours continuĂ© d’embrasser ma fille de la mĂŞme manière. Et, j’avais eu de la peine pour cette « collègue Â» ainsi que pour ces lourdes privations affectives qu’avaient pu connaĂ®tre sa fille.

 

Suite des « Une » du journal LibĂ©ration l’annĂ©e dernière pendant le premier confinement.

 

 

Des héros sans filets de protection

 

Pourtant lors de cette époque particulière, de mars à mai 2021, je ne me voyais pas et ne me vois toujours pas comme un héros. Même si cette ambiance a été pesante. Même si nous avons travaillé le plus souvent sans masques anti-Covid. Ou, sans masques FFP2 en tout cas, décrits comme ceux étant les plus à même de nous offrir la protection maximale contre ce virus si contagieux et potentiellement mortel.

 

Je me rappelle aussi ĂŞtre retournĂ© dans cette pharmacie oĂą, fin fĂ©vrier 2020, un pharmacien m’avait affirmĂ© que cette Ă©pidĂ©mie du Covid ne nous concernait pas. Quelques semaines plus tard, en plein confinement, non seulement cette pharmacie ne vendait plus de masques FFP2 ( Ă  près de 4 euros l’unitĂ©) pour cause de « rupture de stock Â»; mais tous les employĂ©s de cette pharmacie, du vigile aux pharmaciens, en passant par la femme ou l’homme de mĂ©nage, portaient , eux, un masque FFP2. Donc, moi, le hĂ©ros, je devais me contenter de l’air dĂ©solĂ© d’un(e ) des employĂ© (es) de cette grande pharmacie, situĂ©e en plein Paris, et des applaudissements du 20 heures, pour me « vacciner » contre le Covid.

 

Avec le lavage des mains.

 

 

DĂ©but Mai 2020 : Premier miracle

 

 

Et puis, début Mai 2020, premier miracle, les supermarchés- et les pharmacies- se sont mis à pondre des masques anti-Covid. Pas les FFP2. Mais des masques anti-Covid néanmoins. Qu’il a fallu payer. Moi, le héros, comme tout le monde, je suis passé à la caisse pour acheter ces masques. Et, plus d’un an plus tard, je continue, désormais, d’acheter des masques anti-Covid régulièrement. Mais, aussi, de me laver les mains. Je fais beaucoup confiance à ces deux gestes barrières (port du masque et lavage des mains). Et, je crois que, désormais, le port du masque fera souvent partie de notre quotidien.

 

A l’intĂ©rieur de la Gare du Nord, juillet 2021.

 

Juillet 2021 : Second miracle

 

Nous sommes le 8 juillet 2021, et, moi, « le hĂ©ros Â», Ă  ce jour, je n’ai pas contractĂ© le Covid. Ou alors j’ai contractĂ© une forme si « transparente Â», si « discrète Â», que je ne l’ai pas sentie passer.

 

Depuis mars de l’annĂ©e dernière, je n’ai pas Ă©tĂ© en arrĂŞt de travail pour cause de Covid. Par contre, certains de mes collègues ont Ă©tĂ© arrĂŞtĂ©s pour cause de Covid. Quelques uns de mes collègues, pour parler de ceux qui ont Ă©tĂ© touchĂ©s lors de ce mois de mars 2021, s’étaient relâchĂ©s concernant le port du masque. Or, je le rĂ©pète :

 

Je porte régulièrement un masque au travail et dans les transports en commun comme dans les lieux publics ( sur mon nez et ma bouche). Et, je me lave les mains.

 

Je porte si souvent un masque qu’il y a environ dix jours, c’est Ă  ce port prolongĂ© que j’ai attribuĂ© des Ă©coulements nasaux rĂ©pĂ©tĂ©s pendant un  Ă  deux jours. Alors que je n’étais pas enrhumĂ©. Je me suis fait quelques lavages de nez avec du stĂ©rimar et c’est passĂ©.

 

Certains de mes amis ou connaissances, aussi, ont attrapé le Covid.

Des amis et des connaissances qui l’ont attrapé à leur travail ou en d’autres circonstances. Circonstances auxquelles je suis extérieur. Je n’étais pas en contact direct avec eux.

 

Donc, au vu de ces quelques constatations, je « capte Â» assez difficilement cette urgence de la vaccination, me concernant. MĂŞme, si, je le redis, je suis favorable Ă  la vaccination. Mais pas n’importe comment. Passons maintenant au reste de ce qui est dit dans cet Ă©ditorial du journal La Croix.

 

« La libertĂ© individuelle doit toujours ĂŞtre mise en balance avec l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral Â»

 

J’admets complètement le fait que des soignants aient pu contaminer des patients. Bien avant la pandémie du coronavirus, on parlait déjà de certaines maladies nosocomiales.

 

Donc, oui, les soignants ont Ă  prendre certaines prĂ©cautions pour protĂ©ger celles et ceux dont ils s’occupent : c’est la moindre des choses. Et, je ne discute pas les chiffres qui ont pu ĂŞtre donnĂ©s en termes de contamination du Covid dans les Ehpad.

 

Par contre, je me demande si ces soignants « contaminants Â» avaient….des masques. S’ils avaient de quoi se laver les mains comme il se doit. S’ils avaient le temps de le faire, aussi.

 

Parce-que cette pandĂ©mie du Covid a aussi mis sur la table un fait chronique dans les institutions de soins de la France : une certaine pĂ©nurie de personnel et/ou une certaine pĂ©nurie de matĂ©riel.

 

S’il a manqué des masques anti-Covid dans les Ehpad comme il a pu en manquer dans d’autres services de soins, il n’y a rien d’étonnant à ce que la contagion du virus ait pu autant s’étendre.

 

Mais « La libertĂ© individuelle doit toujours ĂŞtre mise en balance avec l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral Â», ça, c’est une pensĂ©e forte !

 

Ce 8 juillet 2021, pour celles et ceux qui ont pu partir, les grandes vacances- ou vacances d’étĂ©- ont commencĂ©. Mais, que  je considère ces vacanciers ou ces personnes contentes d’être Ă  une terrasse de cafĂ© ou de restaurant, ou, simplement, en train de faire les soldes, je ne vois pas cet « intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral Â». Ce que je vois, c’est surtout un « intĂ©rĂŞt personnel Â» multipliĂ© pratiquement par toutes ces personnes environnantes ou parties en vacances.

 

 

Si l’on tient tant que ça Ă  me parler de « La libertĂ© individuelle doit toujours ĂŞtre mise en balance avec l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral Â», je me dis qu’à nouveau, on me prend pour un idiot. Comme lorsque, l’annĂ©e dernière, on a essayĂ© de me faire croire que j’étais un « hĂ©ros de la Nation Â». Et qu’il Ă©tait normal pour moi (et pour d’autres) de partir au combat sans armes ( sans masques)  au devant d’une mort presqu’assurĂ©e.

 

Parce qu’il y a plein d’exemples courants oĂą « l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral Â» est secondaire  :

 

Les industriels du Tabac qui vendent leur poison légalement depuis des années et font de gigantesques chiffres d’affaires. Pareil pour les vendeurs d’alcools et de spiritueux.

 

Les constructeurs automobiles et leur Diesel polluant qui a fait beaucoup de contents et de nostalgiques parmi les automobilistes.

 

Ces autres constructeurs automobiles qui avaient trafiqué leur logiciel anti-pollution sur leurs voitures.

 

On verra bientôt quels effets néfastes a engendré la téléphonie mobile dans nos vies.

 

J’imagine bien qu’un journal comme La Croix, et d’autres, relatent aussi ces faits. Sauf qu’il est bien plus facile de faire pression sur des soignants  qui restent des subalternes. MĂŞme si on veut bien les admirer et les applaudir de temps en temps tant qu’ils obĂ©issent et se dĂ©vouent pour trois fois rien. La profession de soignant a ceci de particulier qu’il semble souvent lĂ©gitime de pouvoir bĂ©nĂ©ficier du maximum de ses compĂ©tences et de ses disponibilitĂ©s pour un salaire et une reconnaissance minimale.

 

La suite est assez prĂ©visible. Les soignants, si l’on dĂ©signe ici des aide-soignants et des infirmiers, sont majoritairement des femmes : le sexe dit « faible » mĂŞme si les moeurs prennent l’ascenseur et Ă©voluent.

En attendant, « nous Â», les soignants ( aides-soignants et infirmiers, femmes et hommes), nous ne vendons pas de pop corn, d’automobiles ; nous ne vendons pas de coca-cola, de tabac, de bonbons, d’alcools, de films grands publics, de pubs,  d’engrais chimiques, de cosmĂ©tiques, de parfums, de spectacles, de cannabis, d’armes, de tĂ©lĂ©viseurs, de tĂ©lĂ©phones portables, d’ordinateurs, de mĂ©dicaments ou d’assurances. Nous essayons par contre de remĂ©dier Ă  certaines consĂ©quences de ces usages comme de ces objets.

Nos bonnes intentions nous honorent, certes. Mais cet honneur nous rĂ©tribue assez peu socialement mais aussi matĂ©riellement. De ce fait, nous disposons de moins de poids Ă©conomique et politique que tous ces industriels et entrepreneurs prĂ©citĂ©s – et d’autres- qui produisent et incitent Ă  certains usages en rĂ©alisant en permanence des contorsions autour de « l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral Â». A eux, les contorsions, les rĂ©seaux d’influence et le chiffre d’affaires. Pour nous, soignants, les pressions, la diminution des effectifs comme de nos moyens. 

 

Vers une vaccination obligatoire pour les soignants :

 

 

La vaccination anti-Covid va devenir obligatoire pour les soignants prochainement. D’une façon ou d’une autre. A moins, peut-ĂŞtre, de partir Ă  la retraite- en Ă©vitant l’EHPAD- dans les trois mois qui viennent. Sauf s’il survient un autre « miracle Â».

Un autre « miracle Â» :

Dans l’éditorial du journal La Croix, « j’aime beaucoup Â» la partie :

 

« De ce point de vue, dès lors qu’il est admis qu’elle ne comporte pas d’effets indĂ©sirables, la vaccination des soignants apparaĂ®t comme une obligation morale (….) Â».

 

Subitement, l’éditorialiste s’est rappelĂ© que les vaccins anti-Covid comportent quand mĂŞme quelques risques pour la santĂ©. Et qu’il serait prudent, pour lui, de se couvrir. Car par qui est-il « admis qu’elle (la vaccination) ne comporte pas d’effets indĂ©sirables Â» ?!

 

MĂŞme si la plupart des personnes vaccinĂ©es la supportent plutĂ´t bien, nous manquons de recul et de certitudes concernant ces vaccins. Et une « revue Â» ( en ligne) plutĂ´t sĂ©rieuse comme Prescrire mentionne aussi certains effets secondaires indĂ©sirables constatĂ©s et souligne le manque de recul actuel Ă  propos de ces vaccins anti-Covid.

 

Alors, l’autre « miracle Â», serait, pour moi, que d’ici quelques mois, on s’aperçoive qu’une vaccination gĂ©nĂ©ralisĂ©e reste insuffisante ou injustifiĂ©e.

Et, si ce miracle n’a pas lieu et que le vaccin devient obligatoire- le plus probable à mon avis- j’aurai non seulement gagné quelques mois supplémentaires de recul. Mais, en plus, en cas d’effet indésirable avéré par la suite, il me sera peut-être plus facile de le faire reconnaître.

 

Un ami- vacciné- m’a bien expliqué récemment qu’être vacciné n’empêchera pas d’attraper le Covid mais protègera contre des formes plus graves. Ce que je veux bien croire. Ce que j’ai plus de mal à croire, c’est à cet espoir que nous plaçons de plus en plus dans un vaccin pour continuer de vivre dans le même monde. Comme si un vaccin pouvait à lui seul nous permettre d’exister alors que nous faisons beaucoup par ailleurs pour nous détruire.

 

Entre les Tuileries et la place de la Concorde, juillet 2021.

 

Franck Unimon, ce jeudi 8 juillet 2021.

 

 

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Béatrice Dalle Cinéma Puissants Fonds/ Livres

Béatrice Dalle, trois fois.

 

 

Béatrice Dalle, trois fois.

 

Puisque c’est toujours de la faute des autres, tout est parti d’un cd du groupe Sonic Youth.

 

Je n’ai pas revu les films, ces forêts, où on la trouve. Je suis seul avec mes pensées, ces vieillesses condamnées sur lesquelles il faut apprendre à veiller. Si l’on tient à prévenir le déclin de notre humanité.

 

BĂ©atrice Dalle, trois fois. BĂ©atrice Dalle, pourquoi. Ma prudence me rĂ©pète que je ne la connais pas. Mais, dĂ©ja, pour la première fois dans mon blog, je crĂ©e une rubrique uniquement pour elle. Parce-que parler d’elle m’Ă©voque peut-ĂŞtre le cheval de Troie. 

Le physique de charme est un fusil de chasse. Mais cette arme a une particularitĂ© dangereuse : partout oĂą elle passe, on la repère au lointain. Sa dĂ©tentrice- ou son dĂ©tenteur- doit savoir s’en servir ou la quitter. Sinon, cette arme sera son enterrement ou sa rĂ©tention. Et, elle sera le trophĂ©e de celle ou celui qui la brandira. Qui la tisonnera.  

 

Je me rappelle un peu d’une partie de sa cinĂ©matographie. Dans son livre Que Dalle un livre sur l’actrice et comĂ©dienne BĂ©atrice Dalle / BĂ©atrice DalleLouvrier nous apprend qu’hormis avec les rĂ©alisateurs Jim Jarmusch et Abel Ferrara, elle a fait peu d’efforts pour connaĂ®tre une carrière aux Etats-Unis. Parce qu’elle ne parle pas Anglais. 

 

Si tu cours longtemps et vite, et que tu es sur la dĂ©fensive devant la moindre limite, comment te suivre, BĂ©atrice Balle ? Il faut un certain recul pour atteindre quelqu’un. Mais aussi pour l’attendre.

 

Louvrier parle du Rap et de Joey Starr. Mais il y a d’autres musiques. Peut-être du Free Jazz ou ne serait-ce que du Free…gaz.

 

En 1986, Dalle est dans 37°2. Après les Punks (que Louvrier cite). Après Nina Hagen, le Reggae de Police(groupe de Reggae blanc influencĂ© par le Punk), la mort de Bob Marley. La lecture de Que Dalle nous informe que Sting, l’auteur des tubes du groupe Police, Ă©tait « fou Â» d’elle et voulait la rencontrer. Mais « dans Â» la France de Mitterrand et de Jack Lang, elle avait d’autres Ă©vidences.

 

Dans la France de Giscard, je ne vois pas de place pour 37°2. Et puis, rester dans les années 70 et 80, c’est se tenir très loin d’aujourd’hui et de demain.

 

RĂ©cemment, Ă  l’anniversaire d’une amie, Ă  Levallois (oui, grâce Ă  Louvrier, je sais qu’à une Ă©poque, Dalle a vĂ©cu Ă  Levallois) en parlant de mon blog, j’ai rĂ©pondu Ă  quelqu’un avec qui je sympathisais que j’avais, entre-autres, Ă©crit sur BĂ©atrice Dalle. Il a Ă©tĂ© un peu Ă©tonnĂ©. SĂ»r de moi, j’ai alors avancĂ©, tel un attachĂ© de presse bien au fait de ses projets :

 

« Elle fait toujours des films Â».

 

 

J’étais nĂ©anmoins dans la salle pour voir le  film Lux Aeterna de Gaspar NoĂ©. Un rĂ©alisateur dont j’ai vu plusieurs des films depuis Seul Contre tous avec « feu Â» Philippe Nahon. Au contraire de Seul contre tous (un chef-d’œuvre, selon moi) je n’ai pas souscrit Ă  l’intĂ©gralitĂ© de Lux Aeterna. J’ai pour l’instant renoncĂ© Ă  Ă©crire dessus. Mais il m’en reste quelque chose. De mĂŞme pour Climax.

 

 

Dans le Que Dalle de Pascal Louvrier, il est plusieurs fois fait Ă©tat de sa bouche. Cet organe aurait Ă©tĂ© perçu comme « trop Â» grand chez elle au dĂ©but de sa carrière. Presqu’un naufrage.

 

J’ai oublié.

 

Sa bouche est la graine que nulle gravitĂ© n’aliène. Pourtant, dans J’ai pas sommeil, l’acteur Alex Descas- dont je parlerai un jour-  s’en prend Ă  elle :

 

« Tu ne seras jamais prĂŞte ! Â».

 

Devant sa nudité inquiète, mes articles, aussi, sans doute, ne seront jamais prêts.

 

 

Franck Unimon, ce mardi 6 juillet 2021.

 

 

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Me mesurer Ă  ses cendres

 

Me mesurer Ă  ses cendres

Aucun événement immédiat ou particulier porté à ma connaissance ne me permet de savoir la raison pour laquelle je pense à lui ce matin. Un dimanche.

 

Comme d’autres membres de ma famille, avant ma naissance, il Ă©tait venu par avion pour le mariage de son petit frère. Le dernier. Un de mes oncles paternels. Une force de la nature, le plus grand parmi ses frères et ses sĹ“urs, surnommĂ© «  Le dindon Â». Si mes souvenirs sont exacts. Car tout cela se passe en CrĂ©ole et en mĂ©tropole :

 

En France.

 

En France, on n’a pas de pétrole, mais on a une métropole. Du Créole. Et des people.

 

Il était petit. Peut-être l’un des plus petits parmi les frères de mon père, aussi présent.

 

Mais il avait une classe rĂ©glĂ©e comme une montre suisse. Une classe que je lui avais dĂ©couverte ce jour-lĂ . Plus que mon père qui s’y connaissait pourtant en « style Â». Plus que mon oncle qui se mariait.

 

Dans son costume gris, il portait l’élĂ©gance et l’assurance. Il avait fumĂ© une cigarette devant moi, mon père et cet oncle qui se mariait. Avec tout autant de prĂ©sence. Dans ma famille, du cĂ´tĂ© de mes oncles et de mes tantes, paternels comme maternels, fumer est un acte suffisamment rare, Ă©tranger voire proscrit, pour marquer un esprit.  Au moins le mien.

 

La cigarette, c’est bien-sĂ»r le fait du Blanc. Mais c’est aussi une aventure qui ne vaut pas, peut-ĂŞtre, celle de la fiertĂ©, de la rĂ©putation, de la force physique,  du sport, de la musique, de la voiture, de la voix ferme et haute, du geste, du rhum et  de la verge.

 

Lui, il avait fumĂ© comme s’il s’agissait d’une formalitĂ©. Aucune remarque ne lui avait Ă©tĂ© faite alors que l’on peut ĂŞtre si Ă  cheval concernant telle action qui signifie que l’on se prend pour un blanc. Et l’on reste, du moins suis-je souvent restĂ©, proche de ce poste frontière. Presque l’ultime intime d’un certain sentiment de noyade. Tout près de cette  limite oĂą s’observent- telles deux Ă©ternelles vierges maquerelles toujours en demande d’un godemichĂ©- celle qui serait d’un cĂ´tĂ© l’identitĂ© blanche et, de l’autre, l’identitĂ© noire.

 

Moi, l’adolescent, les cheveux encore hauts Ă  la MichaĂ«l Jackson d’avant le dĂ©frisage et la dĂ©pigmentation, emmĂ©nagĂ© dans des vĂŞtements et des chaussures que ma mère sans doute avait choisi pour moi, et derrière mes lunettes du mĂŞme acabit, j’étais bloquĂ© face Ă  ces trois hommes : cet oncle, celui qui se mariait, mon père.

 

Et je faisais peine à voir. Mes oncles et mon père me le faisaient bien savoir.

 

Reprenant un des arguments de mon père, cet oncle avait statuĂ© que « mĂŞme un handicapĂ© Â» faisait de son mieux. Alors que moi, j’étais gauche, contenu :

 

Plus dans le brouillard que débrouillard.

 

Les derniers souvenirs que j’ai de cet oncle avant ce mariage, c’étaient sa maison, en Guadeloupe Ă  Petit-Bourg. Sa femme, souriante et affirmĂ©e, leurs trois enfants, deux cousines et un cousin, dont chaque prĂ©nom dĂ©bute par la lettre U. Comme mon nom de famille. Je m’en aperçois seulement maintenant alors que je repense Ă  cette balançoire faite d’un pneu, chez eux,  qui nous envoyait presque au dessus du vide.

 

Quelques années après ce mariage, j’ai entendu parler de son divorce. Par bribes.

 

Car je n’étais pas adulte.

 

J’ai appris qu’il jouait. De retour en Guadeloupe pendant les vacances, où notre père nous conduisait, nous passions devant son ancienne maison, sans doute habitée par son ex-femme et les enfants sans nous arrêter. Cette vie-là n’avait pas existé.

 

J’ai revu cet oncle plusieurs fois ensuite. Souvent chez mon grand-père. Pas si loin que ça de son ancienne maison. Il ne portait plus de costume. Il vivait dans une case en tĂ´le, pas si loin que ça de son ancienne maison. Se dĂ©plaçait en mobylette. S’était fait des « amis Â» parmi des jeunes qui vivaient de peu.

 

Assez régulièrement, j’entendais ça et là des commentaires le concernant (mon père, mon grand-père) où l’on se désolait de son mode de vie. En métropole, à Paris, on aurait parlé de zonard plus ou moins SDF. Sauf qu’il avait son coin, ne mourait pas de faim et qu’il faisait toujours partie de la famille où il continuait d’avoir son mot à dire. Je ne crois pas qu’il exerçait un métier régulier et officiel. Et, je ne sais pas quel métier il exerçait dans son autre vie. Mais je le crois plutôt habile de ses mains. Comme bien des hommes de la famille de mon père et de mes ascendants du côté tant paternel comme maternel où le métier de maçon, voire charpentier, est une nomenclature.

 

Je n’ai jamais discutĂ© avec lui de ce qui s’était passĂ© dans sa vie. Je n’ai donc jamais pu Ă©couter ce qu’il en disait. Mais j’ai cru trouver dans son attitude une forme d’acceptation du verdict qui l’avait touchĂ© : le divorce et sa suite.

 

C’est au décès de mon grand-père paternel que j’ai eu un contact téléphonique avec une de ses filles. Je ne l’avais pas vue depuis des années.

 

J’étais venu pour l’enterrement de mon grand-père paternel.  J’avais fait un discours- le seul discours dit Ă  l’enterrement de mon grand-père par un membre de la famille ou un proche- dans l’église, remplie, de Petit-Bourg. Et, j’avais aussi filmĂ© une partie de l’enterrement.

 

Cette cousine souhaitait que je lui envoie les images. Je les lui avais envoyĂ©es et j’avais appris qu’elle Ă©tait devenue infirmière ou peut-ĂŞtre cadre-infirmière. J’avais senti en elle une certaine affection pour son père. Lequel, jusqu’à sa mort, est restĂ© dans cet Ă©tat de « vagabond Â» ou de semi-vagabond, se montrant souvent pieds nus, avec un short rapiĂ©cĂ©, un chapeau et une chemise, et tutoyant le rhum en certaines occasions.

 

Je n’ai jamais parlé de lui avec mon père. Car je ne suis pas un homme.

Cet oncle est un fantôme de plus dans la famille. Peut-être qu’écrire, c’est aussi s’adresser à ses fantômes, retranscrire leurs réponses ou les souvenirs qu’ils nous laissent. Après, on en fait toute une histoire que d’autres écouteront, caresseront ou liront peut-être.

 

Parler de cendres, ce n’est d’abord pas très réjouissant. Mais, ce matin, je ne prends pas les cendres par le biais dépressif. Je pense aussi à cette cérémonie où l’on marche sur le feu. En Inde mais aussi dans les régions d’Outre-Mer. Aux Antilles comme à la Réunion.

 

Je me dis aussi que les cendres, cela peut aussi être les migrations de tous ces oiseaux qui parcourent des milliers de kilomètres, chaque saison. Mais aussi de ces créatures terrestres ou animales qui nous entourent et que l’on connaît beaucoup moins bien que ces autoroutes, ces trains ou ces bateaux qui nous permettent de partir en vacances. Car elles sont là, nos principales migrations. Dans nos congés et nos week-end.

 

A moins d’être de grands voyageurs. D’effectuer des déplacements pour notre travail. Ou de changer d’emploi, d’adresse ou de rôle régulièrement.

 

Ce matin, je me mesure aux cendres de mon oncle. Celles de sa vie, de sa contre-vie ou de cette cigarette fumée devant moi à ce mariage. Car, peut-être, bientôt, vivrais-je moi aussi une certaine migration.

 

Notre imagination est faite de toutes sortes de migrations. Ensuite, c’est nous qui décidons. De jeter les dés et de nous lancer derrière eux. Ou de les regarder.

 

Franck Unimon, ce dimanche 4 juillet 2021.

 

 

 

 

 

 

 

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Béatrice Dalle

 

Béatrice Dalle

 

(cet article est une variation de l’article Que Dalle un livre sur l’actrice et comédienne Béatrice Dalle).

 

 

 

BĂ©atrice Dalle, aujourd’hui, fait moins parler qu’il y a « longtemps Â» : il y a dix ou vingt ans.

 

J’ai achetĂ© ce livre parce que BĂ©atrice Dalle me « parlait Â». Comme un conflit pourrait parler Ă  des vieux qui y avaient participĂ© en tant que simple appelĂ©s ou appuis militaires. Ce qu’ils sont devenus ensuite, c’est un autre problème. Et, avant tout, et surtout, le leur. Ce que je raconte ensuite, ici, c’est peut-ĂŞtre aussi, avant tout, et surtout, mon problème.

 

Lorsque j’avais achetĂ© ce livre consacrĂ© Ă  BĂ©atrice Dalle, je faisais dĂ©jĂ  partie des vieux. Mais, bien entendu, je ne l’avais pas vu comme ça, ce jour-lĂ . Aujourd’hui, je suis un peu plus rĂ©aliste :

 

Même si, en apparence, j’ai encore un look assez jeune, je vois bien que je fais partie des vieux. On peut être myope et visionnaire.

 

Ainsi, je vais spontanĂ©ment vers des musiques – mais aussi vers des pratiques- qui montrent bien que je ne suis plus jeune. RĂ©cemment, lors d’une rencontre professionnelle, celle qui m’a reçu m’a dit :

 

« De toute façon, si vous m’envoyez un mail, je le recevrai sur mon portable Â». Le fait que je sois autrement plus qualifiĂ© qu’elle pour le travail que j’effectuerai peut-ĂŞtre pour sa « boite Â»,  est ici accessoire. J’avais compris Ă  cette simple phrase que j’étais vieux. Tant pour ces valeurs et ce mode de vie que cette « jeune Â» justifie et dĂ©fend. Que pour cette façon d’offenser sans mĂŞme s’en apercevoir.

 

J’ai regardĂ© dans les yeux ma jeune interlocutrice. Ses beaux yeux bleus. Mais je n’étais pas amoureux. J’avais bien plus d’expĂ©rience qu’elle et voire qu’elle n’en n’aurait jamais pour ce travail pour lequel je la rencontrais. Pourtant, c’était elle qui dirigeait l’entretien.   Très certainement, m’a-t’elle trouvĂ© l’abord froid et rigide de celui qui borde un monde qu’elle ne connaĂ®t pas. Elle ne sait pas qu’une grande partie de ma vie comme celle d’autres que je connais ou ai connus, se dĂ©value Ă  mesure qu’elle devient un exemple Ă  suivre. Et, j’en suis aussi en partie responsable :

J’ai refusé de devenir responsable de ce monde qu’elle défend.

 

Béatrice Dalle, dans l’ouvrage de Louvrier, est un moment comparée à Brigitte Bardot et à Marilyn Monroe. Régulièrement, se succèdent des personnalités et des idoles de toutes sortes qui en rappellent d’autres. Et si cela se perpétue, c’est parce-que cela rend plus polis certains de nos échecs. Que l’on soit jeunes ou vieux.

 

Mentionner Bardot, Monroe et Dalle, c’est additionner les sex-symbol. Un sex-symbol, c’est festif. Ça met en alerte. Ça donne envie de consommer. De se transformer en superlatif.

 

Mais c’est une histoire triste. Telle qu’elle m’a racontĂ©e. Celle d’une enfant d’une famille nombreuse sacrifiĂ©e parmi d’autres. Bonne Ă©lève d’une Ă©cole dont elle a dĂ» se retirer Ă  l’école primaire. Afin de s’occuper de frères et de sĹ“urs plus jeunes. Mais, aussi, pour faire la cuisine. Pourquoi elle plus qu’une autre ? Et, en quoi, cela aurait-il Ă©tĂ© plus juste qu’une autre soit choisie ?

 

 

Ma mère est une femme gentille. Comme aurait pu l’être le personnage joué par l’acteur Tim Robbins dans Mystic River réalisé par Clint Eastwood.

 

Ma mère est donc l’opposĂ©e d’une BĂ©atrice Dalle. Si l’une et l’autre ont quittĂ© leurs parents avant leur majoritĂ©, leur tempĂ©rament les sĂ©pare.  BĂ©atrice Dalle a pu « se prendre la gueule Â» avec des femmes et des hommes, connus ou inconnus. Elle a aussi connu la rue. EtĂ© punk. Elle peut baptiser des injures et professer des menaces qui ont valeur de futur. Ma mère n’a jamais prononcĂ© le moindre gros mot devant moi. Elle a fait baptiser ses enfants.

 

Dans le livre qu’il a consacrĂ©e Ă  BĂ©atrice Dalle, le journaliste Pascal Louvrier relate que celle-ci a pu faire penser Ă  une « panthère Â». Ma mère n’a rien de la panthère. Mais j’aurais aimĂ© qu’elle le soit. Qu’elle puisse l’être. Qu’elle sache l’être. Qu’elle puisse griffer. Elle ne le fera jamais. Au lieu de griffer, elle priera. BĂ©atrice Dalle est croyante Ă  sa façon, parle de JĂ©sus-Christ mais elle et ma mère ne sont pas faites de la mĂŞme ferveur religieuse. J’attends de voir BĂ©atrice Dalle dans un film de Bruno Dumont.

 

Ma mère a été et est une très belle femme. C’est une femme capable. A son âge, beaucoup aimeraient avoir sa forme physique. Sa souplesse. Son endurance. Son dynamisme.

Mais elle est une de ces multiples femmes- déployées et employées- qui ont trop accepté un peu tout et n’importe quoi. Piégées sans doute par leur trop grande endurance, leur naïveté et leur indéfectible indulgence pour leurs peurs.

 

 

Certaines rĂ©ussites sont lĂ  pour masquer certains Ă©checs.  Normalement, ma mère a rĂ©ussi. Son mariage. Ses enfants. Sa maison. Ses activitĂ©s. Elle peut parler. Discrètement. Mais elle a plus subi de vĂ©ritĂ©s qu’elle n’en n’a dit.

 

 

Béatrice Dalle, c’est le contraire.

 

 

Ça tombe très bien qu’aujourd’hui, on parle moins de Béatrice Dalle comme sex-symbol.

 

Parce-que toutes ces histoires de sexe, de drogue et de frasques (des histoires de jeunes)  m’empĂŞchaient sans doute de comprendre qu’au cinĂ©ma, ou ailleurs, ce qui pouvait me dĂ©ranger chez BĂ©atrice Dalle mais aussi me donner envie d’aller la voir, c’était de pouvoir m’imaginer un peu ce que ma mère aurait pu ĂŞtre ou faire de diffĂ©rent.

 

Je vais peut-être au cinéma afin de pouvoir imaginer des différences. Et, pour moi, Béatrice Dalle permet ça.

Franck Unimon, Dimanche 4 juillet 2021.

 

 

 

 

 

 

 

 

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Que Dalle un livre sur l’actrice et comédienne Béatrice Dalle

 

                Que Dalle un livre sur l’actrice et comĂ©dienne BĂ©atrice Dalle

 

                         Ecrit par Pascal Louvrier et BĂ©atrice Dalle

 

 

HĂ©siter entre la lecture de UCHIDESHI Dans Les Pas du Maitre (Apprendre ce qui ne peut ĂŞtre enseignĂ©)  de Maitre Jacques Payet, 8 ème Dan, Shihan, au sein de l’organisation Aikido Yoshinkan. Et la lecture du livre sur l’actrice et comĂ©dienne BĂ©atrice Dalle.

 

Opter pour ce dernier. Et se sentir d’abord éclaboussé par de la poussière de honte. Une fois de plus, avoir cédé aux séductions de la forme. Au lieu de déterrer de soi ces peurs qui nous martèlent les vertèbres.

 

Nos peurs sont des productions incessantes. Les combattants sont celles et ceux qui, jour après jour, les voient s’amonceler sur leur compteur. Et qui ont appris et apprennent de leurs peurs. Et qui répètent des gestes, parfois des incantations, ou des Savoirs, en vue de leur répondre.

 

Ce sont des voix qui leur parlent, Ă  toute heure,  Ă  eux seuls, et que personne d’autre n’entend, d’abord. Du moins ont-ils souvent cette impression.

 

Pas de combattant sans peur.

 

Mais comparer une actrice ou un acteur, Dalle ou autre, à un combattant tel que Maitre Jacques Payet, c’est aussi tenter de vouloir parer un miroir des mêmes mérites et des mêmes héritages que le diamant.

 

La diffĂ©rence entre les deux reste quand mĂŞme que, une fois « choisi Â», l’un (l’actrice ou l’acteur) est si puissamment Ă©clairĂ©, entourĂ©, stylisĂ©, entraĂ®nĂ©, conseillĂ© qu’il est presque condamnĂ© Ă  rĂ©ussir.

Je repense Ă  l’actrice Adèle Exarchopoulos tellement mise en valeur par Kechiche dans La Vie d’Adèle ( 2013)  que je m’étais dit :

 

 Â« Si après ça, elle ne rĂ©ussit pas une belle carrière au cinĂ©ma, elle ne pourra pas dire qu’elle n’a pas Ă©tĂ© aidĂ©e Â».

 

 

La combattante ou le combattant, longtemps, est bien moins entourĂ© que l’actrice ou l’acteur. C’est peut-ĂŞtre, aussi, ce qui le pousse Ă  surgir. Car, soit il restera victime, oubliĂ©, dominĂ© ou enfermĂ©. Soit il vivra. En se mettant Ă  vivre, la combattante ou le combattant commence Ă  Ă©blouir celles et ceux qui l’entourent.  Parce que vivre, c’est notre histoire Ă  tous. Sauf que pour beaucoup, vivre reste une intention ou une tentation. Alors que pour la combattante ou le combattant, vivre est une action.

 

L’actrice et l’acteur se mettent Ă  vivre lorsque l’on dit : « Action ! Â». La combattante et le combattant vivent parce qu’ils agissent. En dehors du combat. Au cours du combat. Mais, aussi, après le combat.

 

Le combat, c’est le temps absolu. L’extrême. Aucun faux semblant possible.

 

Il y a maintenant un jeu de mot très facile Ă  faire : le contraire du combat, plus que la dĂ©faite, c’est le coma. Etre dans le coma, c’est bien-sĂ»r ĂŞtre allongĂ© dans un lit d’hĂ´pital dans un service de rĂ©animation. Peut-ĂŞtre en mourir. Peut-ĂŞtre en sortir. Peut-ĂŞtre en revenir diminuĂ©, paralysĂ© ou transformĂ©.

 

Mais le coma, c’est aussi laisser quelqu’un d’autre ou une substance agir ou faire des rĂŞves Ă  notre place. Puis exĂ©cuter au dĂ©tail près. Comme des rails nous menant vers une destination préétablie par quelqu’un d’autre que nous et Ă  laquelle nous accepterions de nous rendre sans conditions.  

 

 

A ce stade de cet article, par lequel je me suis laissĂ© « dĂ©tourner Â», il faudrait maintenant  vraiment parler du livre.

Normalement, ce que j’ai Ă©crit m’a dĂ©jĂ  disculpĂ© concernant le fait d’avoir « prĂ©fĂ©rĂ© Â» d’abord lire cet ouvrage sur BĂ©atrice Dalle. Mais la normalitĂ© peut aussi ĂŞtre une folie souvent acceptĂ©e par le plus grand nombre. Alors, je vais prendre mes prĂ©cautions et m’en tenir Ă  ce que j’avais prĂ©vu de mettre en prĂ©ambule.

 

La lecture de la « biographie Â» de l’acteur SaĂŻd TAGHMAOUI, SAĂŹD TAGHMAOUI De La Haine A Hollywood dont j’ai rendu compte il y a quelques jours m’a influencĂ©. SaĂŻd Taghmaoui/ De la Haine A Hollywood

 

Dans son livre, TAGHMAOUI ne dit pas un mot sur Béatrice Dalle et Joey Starr. Pourtant, il est impossible qu’ils ne se soient croisés.

 

Ils ont Ă  peu près le mĂŞme âge. Sont entrĂ©s dans le grand bal de la scène mĂ©diatique Ă  peu près au mĂŞme moment mĂŞme si Dalle fait un peu figure « d’aĂ®nĂ©e Â» avec 37°2  de Beineix, sorti en 1986.

Ils ont eu des amis et des intĂ©rĂŞts communs : Au moins Le Rap, Les Tags, les graffitis, la banlieue parisienne dĂ©favorisĂ©e ( Taghmaoui, Morville) Benoit Magimel, les frères Cassel ( Vincent et/ou Rockin’ Squat).

 

Si leur adresse et leur réussite artistique (TAGHMAOUI, DALLE, Joey Starr/ Morville) doivent à leur présence physique ainsi qu’à leurs origines sociales et personnelles, elles doivent aussi à leur intelligence particulière (du jeu, du texte, pour faire certaines rencontres existentielles et décisives) ainsi qu’à leur travail d’avoir duré alors, qu’au début, dans leur vie mais aussi comme lors de leur arrivée dans le milieu de la musique ou du cinéma, rien ne le garantissait.

 

Pour le dire simplement et sans mĂ©pris : Aucun des trois ne venait d’un milieu social et intellectuel privilĂ©giĂ© et, d’une façon ou d’une autre, tous les trois ont connu ce que l’on appelle la « zone Â». Que ce soit la prison, les gardes Ă  vue, la drogue, la rue. Dans un pays officiellement dĂ©mocratique et universel comme la France, celles et ceux qui rĂ©ussissent et sont aux avant postes de la sociĂ©tĂ© ont gĂ©nĂ©ralement d’autres profils, d’autres CV,  voire d’autres prĂ©noms, que ces trois-lĂ .

 

Et, avec ces trois-lĂ , aussi, le mĂŞme « miracle Â» s’est plus ou moins rĂ©pĂ©tĂ© (davantage avec Dalle et Joey Starr en France, toutefois) :

 

Une fois que chacun de ces trois-là a réussi à bien planter sa tente dans le décor avide de la réussite artistique, économique, commerciale et Jet Set de ce pays, ils sont devenus désirables. Respirables. Par le plus grand nombre. Spectateurs et parasites compris.

 

Je ne fais pas exception. Au dĂ©but du livre, avant sa toute première rencontre avec elle, Pascal Louvrier raconte son apprĂ©hension vis-Ă -vis des rĂ©actions de BĂ©atrice Dalle qui avait pour rĂ©putation d’être imprĂ©visible et, bien-sĂ»r, d’ĂŞtre peu frĂ©quentable. Une fĂ©tichiste des options racaille. Ces apprĂ©hensions, je les ai longtemps eues vis-Ă -vis d’elle comme vis-Ă -vis de Joey Starr . Et les jugements moraux dĂ©prĂ©ciatifs dĂ©finitifs -fondĂ©s bien-sĂ»r sur des Ă©clats mĂ©diatiques et certaines de leurs attitudes- que d’autres ont pu avoir sur eux, je les ai eus aussi.

 

Et, cela va dans les deux sens : Dalle, pour parler d’elle, ne brille pas non plus par une tolĂ©rance de tous les instants pour autrui. MĂŞme si elle est capable de gentillesse ou de prendre la dĂ©fense de celles et ceux qu’elle perçoit comme victime. Lors d’un tournage comme dans la vie.

Car, Dalle « vomit Â» aussi les tièdes. Et les mĂ©ritants. Toutes celles et tous ceux qui font de leur mieux et qui, Ă  ses yeux, sont « faibles Â» ou ne valent pas qu’on s’attarde sur eux : les gens sans particularitĂ© Ă©vidente, monocordes et lambda qui se fondent dans le dĂ©cor social comme dans une boite Ă  chaussures.

 

Ce faisant, elle rĂ©pète comme d’autres, y compris comme celles et ceux qui l’adorent, certaines injustices et certains prĂ©jugĂ©s, que, comme ses adorateurs,  elle condamnera ailleurs. Et en d’autres circonstances selon des critères sĂ©lectionnĂ©s par eux. Et par elle.

Cela, c’est le paradoxe permanent du « Star Système Â» que l’on Ă©volue dans le cinĂ©ma hautement commercial ou dans le cinĂ©ma d’auteur :

 

Pour peu que l’on soit admirĂ© et aimĂ© par des personnalitĂ©s du monde du spectacle, de l’art ou de l’intellect, on sera excusĂ© et dĂ©fendu contre les bien-pensants et les bons Ă©lèves besogneux qui, les abrutis ! , ne peuvent rien faire de mieux- et de plus- que de rĂ©flĂ©chir de travers. Comme on pisse sur le sol en ratant l’urinoir ou la cuvette des toilettes. Avant, Ă©videmment, de partir prestement et lâchement, en laissant tout en l’état sans mĂŞme se laver les mains. 

 

C’est mon principal reproche au livre de Louvrier : cette façon de mettre Dalle sur un piĂ©destal et de, pratiquement, tout justifier et tout accepter de certains de ses actes « dĂ©flagrants Â».

 

Je vais nĂ©anmoins m’abstenir de frimer dans ces quelques lignes. Au tout dĂ©but du livre, je me suis bien dit :

« J’aurais pu mieux Ă©crire Â». «  J’aurais pu mieux faire Â».

 

Mais, par la suite, je me suis avisĂ© que Louvrier a effectuĂ© un très gros et très bon travail de recherche. Que ce soit dans les archives mais aussi auprès de Dalle et de quelques personnes qui ont travaillĂ© avec elle et dont certaines sont devenues des proches :

 

Dominique Besnehard, l’agent qui l’a découverte et qui est aussi un de ses protecteurs et un de ses proches. Un protecteur dévoué et idéal.

Besnehard a aussi été l’agent de TAGHMAOUI. Mais à lire celui-ci, sa rencontre avec Besnehard a nettement moins été à son avantage.

 

Du reste, pour avoir lu- avec plaisir- l’ autobiographie Casino d’Hiver de Besnehard ( parue en 2014), je « sais Â» que TAGHMAOUI ne figure pas parmi les rencontres qui ont le plus marquĂ© Besnehard, humainement et artistiquement. Au contraire de BĂ©atrice Dalle, Jean-Claure Brialy, Nathalie Baye, Marlène Jobert ou Maurice Pialat par exemple.

 

Je garde d’ailleurs un très bon souvenir de ses pages sur Pialat.

 

La rĂ©alisatrice Claire Denis est aussi « convoquĂ©e Â» pour parler de BĂ©atrice Dalle dans Que Dalle.

 

Tout comme le photographe  Richard Aujard.

 

Ainsi que le rĂ©alisateur Jean-Jacques Beineix, bien-sĂ»r, dont j’avais aimĂ© lire l’autobiographie parue en 2006 : Les Chantiers de la Gloire.

 

Ma seconde excuse pour avoir choisi de lire Que Dalle avant celui de Sensei Payet est que le livre de celui-ci est sorti récemment. En 2021 pour la version française. Celui consacré à Dalle, en 2008 puis en 2013. Je crois l’avoir acheté en 2013. Cela fait donc huit ans que je l’avais parmi plein d’autres livres. Sur le cinéma et d’autres thèmes.

 

Entre les annĂ©es 80-90 et le « rĂ©cit Â» parcellaire, de sa relation Ă  ressorts et Ă  sorts avec Joey Starr/ Didier ou avec son premier mari et ses autres amants et mari(s) sans omettre certaines parties judiciaires de sa trajectoire, et les annĂ©es qui ont suivi, j’ai appris Ă  mieux regarder Dalle et celles et ceux qui lui ressemblent. Pour tout dire : je l’avais toujours fait. Car il n’y a aucune raison pour que, subitement, je sois devenu plus sensĂ©. Elephant Man

 

 

MĂŞme si je me distingue des mâles alpha et de ces personnes « destroy Â» ou « rock’n’roll Â» (femmes ou hommes) qui captent tant le regard de BĂ©atrice Dalle et l’imaginaire des rĂ©alisateurs et des photographes comme des stylistes de toutes sortes, ma vie normale et mentale, comme celle de beaucoup d’autres, est moins monocorde et plate qu’elle ne le paraĂ®t. Sauf que je le garde pour moi. Par prĂ©caution. Par peur.

 

Mais, aussi, pour protéger les autres.

 

Car c’est aussi, ça, l’un des très grands secrets de beaucoup de gens normaux : avoir cette capacitĂ©, trop grande sans doute, de tenir en laisse certaines folies. Et laisser Ă  d’autres l’initiative de se jeter dans les gueules mais aussi dans les trous de diverses folies que l’on a pu soi-mĂŞme, suivre, observer, tuyauter, tutoyer, dissimuler. Ou condamner.

 

Les gens normaux peuvent être de très grands comédiens. Ils le sont tant qu’ils jouent leur vie puis l’oublient. La folie, psychiatrique, comme la dépression, bien-sûr, est régulièrement proche à trop souvent se renier.

 

Alors, quelques fois, lorsque les gens normaux tombent sur une BĂ©atrice Dalle, ou une autre ou un autre, ça peut aussi leur donner envie de se rapprocher. Mais pas trop près. Car ça leur rappelle quelqu’un. Peut-ĂŞtre, aussi,  que ça leur rappelle leur adolescence. L’époque des rĂ©voltes, des mutations et des rĂŞves les plus excessifs. Lorsque ça bouge et que ça s’agite. Parce-que, c’est bien connu, le calme, le quotidien et l’immobilitĂ©, c’est l’extinction et la soumission assurĂ©es. Et, ça, c’est bien-sĂ»r pour les faibles et les moins que rien.

 

Franck Unimon, ce vendredi 2 juillet 2021.

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Zero Dark Thirty/ Un film de Kathryn Bigelow

ZERO DARK THIRTY ( 2012) un film de Kathryn Bigelow

 

« When you lie to me I Hurt you ! Â» ( Chaque fois que tu me mentiras, je te ferais du mal !)

 

 

C’est sûrement le fait, hier, dans un de mes articles, d’avoir mentionné l’acteur Reda Kateb qui m’a amené, ce matin, au réveil, à me rappeler du film ZERO DARK THIRTY de Kathryn Bigelow. J’avais vu le film dans une grande salle de cinéma à sa sortie. Et, j’avais été étonné de tomber sur….Reda Kateb quasiment dès l’ouverture du film dans le rôle d’un terroriste que l’on torture et qui finit par lâcher une information qui permettra de retrouver Ben Laden, l’homme alors le plus recherché du monde, après les attentats du 11 septembre 2001.

 

Attentats dont je me « rappelle Â». Je sais encore oĂą je me trouvais et ce que je faisais lorsque les images des attentats du 11 septembre avaient Ă©tĂ© distribuĂ©es et redistribuĂ©es Ă  la tĂ©lĂ© :

Au travail, dans le service de pĂ©dopsychiatrie oĂą je travaillais alors avec des adolescents. Mais, Ă  cette Ă©poque, en 2001, personne ne parlait des soignants comme de « hĂ©ros de la nation Â».

 

La dernière fois que j’avais aperçu l’acteur Reda Kateb sur un écran, c’était pour le voir dans des films d’auteurs français. Et, là, dans ce complexe de cinéma parisien, sur un très grand écran, c’était dans cette très grosse production américaine réalisée par Kathryn Bigelow.

 

Kathryn Bigelow, amĂ©ricaine, est connue pour ĂŞtre une gorgone-rĂ©alisatrice de  films membrĂ©s.  RĂ©alisatrice, amĂ©ricaine et gorgone, Bigelow  a sans doute beaucoup Ă  dire sur la question du genre. Et, elle le fait en poussant ses films comme une femme pourrait se mettre debout pour pisser.

 

J’avais dĂ©jĂ  vu- et aimĂ©- plusieurs de ses autres films. Hormis Point Break ( 1991) (je n’avais pas retenu qu’elle en Ă©tait la rĂ©alisatrice)

 

 

 

 

j’avais vu Strange Days ( 1995)

 

 

 

, K-19, le piège des profondeurs ( 2002)

 

 

ou Démineurs ( 2008) au cinéma.

 

Avec ZERO DARK THIRTY, nouveau « film d’action Â», on entre cette fois dans une autre actualitĂ© politique rĂ©cente. La traque reconstituĂ©e, au cinĂ©ma, et la « fin Â» de Ben Laden.

 

 

Si ZERO DARK THIRTY m’avait plu pour sa rĂ©alisation, j’étais restĂ© très perplexe quant aux motivations morales de ce film.

RĂ©alisĂ© avant que les Etats-Unis (ou les Extra-Terrestres) ne nous « envoient Â» Donald Trump, ZERO DARK THIRTY  expĂ©die quand mĂŞme Ă  la face du Monde, que « America Rules ! Â» et que si l’on s’en prend aux Etats-Unis, on s’expose Ă  de sĂ©vères « Retaliation Â» ( reprĂ©sailles) y compris mĂ©diatiques.

 

Je ne nie pas le trauma du 11 septembre 2001 pour les AmĂ©ricains. Cela est impossible. Mais cette façon de percevoir les Etats-Unis comme l’équivalent du « berceau de l’HumanitĂ© Â» et de justifier par ailleurs toutes les atrocitĂ©s, militaires ou autres, connues ou non, rĂ©alisĂ©es par les Etats-Unis m’a semblĂ© se confondre avec les intentions du film.

 

Une très mauvaise habitude :

Je parlais de l’acte de pisser debout tout à l’heure. Et, j’ai déjà raconté cette histoire.

 

Lorsque j’étais allé voir le film en salle, pratiquement à sa sortie, j’avais commencé à prendre l’habitude, de me rendre aux toilettes en pleine séance et de laisser mon sac dans la salle.

 

Très mauvaise habitude que j’ai perdue depuis.

 

 

A mon retour dans la salle, alors que je me rapprochais de ma place, j’avais été étonné d’apercevoir deux silhouettes presque collées à l’issue de secours. Debout. Et qui attendaient ou observaient. Plutôt inquiètes à leur attitude. Et, ce n’était pas pour pisser debout contre un des murs de la salle.

 

Car, alors que je commençais Ă  me diriger vers la rangĂ©e de fauteuils oĂą se trouvaient mes affaires, un homme, en dĂ©but de rangĂ©e m’avait alors demandĂ© :

 

« Elles sont Ă  toi, ces affaires ? Â». J’avais opinĂ© de la tĂŞte.

 

Il avait repris : « Quelle bande de cons ! Si tu les avais vus ! Â». J’avais alors compris que, sitĂ´t que mes affaires avaient Ă©tĂ© dĂ©couvertes sans leur propriĂ©taire- par quelques spectateurs- que pour plusieurs d’entre eux, le film Ă©tait soudainement devenu beaucoup plus rĂ©el dans la salle que sur le très grand Ă©cran.

 

Nous étions en 2012. Plus de dix ans après les attentats du 11 septembre. Ben Laden avait été exécuté un an plus tôt par des forces spéciales américaines. C’était ce que nous racontait Zero Dark Thirty.

 

Je m’étais rassis.  Aucune Ă©quipe de dĂ©mineurs n’était venue investir la salle. Et j’avais regardĂ© la suite du film.

 

Je crois que les deux silhouettes près de la sortie de secours étaient ensuite revenues s’asseoir. Mais je ne saurais jamais de quel film elles se souviennent le mieux.

 

Aujourd’hui, ce 16 juin 2021, et depuis plusieurs mois, nous parlons certes beaucoup de la pandémie du coronavirus, de ses variants et de ses vaccins. Mais, nous savons aussi que vingt ans après Al Quaïda et Ben Laden, que d’autres terrorismes subsistent, croissent et nous inquiètent de plus en plus. Qu’il s’agisse d’un terrorisme religieux, politique, économique, climatique, ou sanitaire. Lequel a plusieurs visages et différentes façons de se manifester et de tuer. Que l’on parle de Daech, de l’extrême droite, de certaines positions catholiques intégristes, de la déforestation intensive ou d’autres pratiques devenues si courantes qu’on les oublie ou les banalise.

 

Après tout ce bla-bla en préambule, je vais regarder à nouveau ce film et je vous en reparle.

 

 

« You Belong to me ! Â» ( Tu m’appartiens/ Je fais de toi de que je veux !/ Tu es ma chose ! Â»

Quelques jours sont passés depuis que j’ai commencé à rédiger cet article. Entre-temps, la vie courante, parfois mourante, m’a éloigné du terrain de l’écriture.

 

Je me reprends en main ce matin.

 

DivinitĂ©s de la lecture ! Alors que les terrasses des restaurants sont de nouveau sorties des bâches de la pandĂ©mie du Coronavirus et que l’on peut, depuis quelques jours, marcher dans les rues Ă  visage dĂ©couvert et y « rĂ©cupĂ©rer Â» celui de son prochain ou de sa prochaine alors que l’on ne pouvait, depuis des mois, que tomber dans ses yeux.

 

Faites prospĂ©rer l’attention des lecteurs ! Et, multipliez, aussi, les cercles et les sangs de celles et ceux qui, autour, pourront et voudront bien lire ces phrases aux pleins poumons. Car, dĂ©jĂ , je « sais Â» que cet article, vautour de mon temps, sera plus long que prĂ©vu.

 

A peine dix minutes de Zero Dark Thirty ont été vues que, déjà, mes pensées se resserrent sur un certain nombre de proies.

 

 

En commençant à revoir ce film, j’ai redécouvert ce plaisir qu’il y a se recueillir en soi…en entrant dans un film. J’ai déjà comparé le fait d’aller dans une salle de cinéma au fait d’aller à la messe. Pour moi, sur l’écran, comme sur ce que l’on entend et voit d’un représentant de la foi, on projette ce que l’on est. On regarde un film comme l’on est et comme on vit. Comme on a pu vivre. Ou comme l’on voudrait vivre. De là nous vient un certain nombre de nos certitudes par rapport à une scène, un film, un prêche religieux.

 

On veut faire Ă©tablir pour vĂ©ritĂ© ce qui nous parle Ă  nous, personnellement. Ce que l’on a compris et « vu Â». Et on veut convaincre.

 

Je veux donc convaincre. Une fois de plus. Et, une fois de plus, je n’y parviendrai pas forcément. Ou si peu. C’est notre histoire, à tous.

 

J’entends des voix :

 

 

Je me rappelais de ma surprise Ă  voir l’acteur Reda Kateb au dĂ©but de ce film. Mais j’avais oubliĂ© ces « voix Â» vraisemblablement de victimes des attentats du 11 septembre 2001 comme celles des services de secours qui leur rĂ©pondent au tĂ©lĂ©phone et qui tentent de les rassurer. Si ! Si ! Tout va bien se passer, vous allez voir !  Â« Je vous aime ! Â» crie une victime dans un message tĂ©lĂ©phonique qu’elle laisse Ă  ses proches. Aucune image.

 

Que des voix.

 

Un Ă©cran noir. Le noir sans doute pour le deuil. Sans doute pour la pudeur. Sans doute pour parler directement Ă  nos Ă©motions et Ă  nos consciences. Directement. Sans artifice. S’exfiltrer de l’artifice qu’est l’exercice du cinĂ©ma…en passant par le cinĂ©ma, ce film Zero Dark Thirty. Par un collage entre le rĂ©el ou supposĂ© rĂ©el et la mise en scène d’un film de cinĂ©ma :

 

Je n’ai pas vĂ©rifiĂ© si ces voix sont d’authentiques voix de victimes du 11 septembre 2001 Ă  New-York. Mais je le suppose. Je ne demande qu’à le croire. Voire : je trouverais presque indĂ©cent, moralement, d’en douter.

 

Des horreurs sĂ©parĂ©es et hiĂ©rarchisĂ©es :

 

Donc, lorsque le film débute vraiment avec l’acteur Reda Kateb en position de terroriste torturé afin qu’il permette de remonter la filière qui permettra d’attraper les responsables de cette horreur (les attentats du 11 septembre 2001), le premier but de la Kathryn Bigelow est atteint. Les deux horreurs sont séparées, hiérarchisées.

 

Il y a d’un côté cette horreur (les attentats du 11 septembre 2001) que l’on ne voit pas car on ne l’accepte pas. Parce qu’on la trouve ignoble. Et celle de la torture du terroriste (interprété donc par l’acteur Reda Kateb) que l’on va voir. Et accepter.

 

Première remarque Ă  propos de cette phrase- « You Belong to Me ! Â» que Dan (l’acteur Jason Clarke) le tortionnaire en chef , visage dĂ©couvert ( le seul Ă  avoir son visage dĂ©couvert face au terroriste Ă©galement mis Ă  nu, bien que porteur d’un pantalon et d’un tee-shirt) active :

 

Nous « appartenons Â» presqu’autant Ă  la rĂ©alisatrice dès ce moment du film que ce terroriste n’appartient Ă  Dan. Et, pour cela, moins de dix minutes de cinĂ©ma ont Ă©tĂ© nĂ©cessaires. On peut d’ores et dĂ©jĂ  saluer le Savoir faire de la rĂ©alisatrice. Se demander, si, dans notre vie courante, nous nous faisons, toujours, aussi rapidement manipuler.

 

Ou commencer à réprouver moralement son film.

 

Je n’ai pas encore tranché à propos de ces questions alors que je rédige cet article.

 

Dominant/dominĂ©/domino :

 

 

Mais, « You Belong to me ! Â», c’est Ă©videmment, la phrase qui peut se dire de dominant Ă  dominĂ©. Que cette situation de domination soit visible ou invisible. DĂ©tectable ou indĂ©tectable. Dans la vie conjugale. Entre des parents et leurs enfants. Au travail. Entre riches et pauvres. Entre l’occident…et le reste du monde.

 

Cette phrase a donc deux faces. Elle Ă©tale aussi au grand jour, au travers de Dan, cette domination qu’entend continuer d’exercer l’Occident, via les Etats-Unis, ici, sur un membre du Moyen-Orient :

 

Ammar, interprété par l’acteur Reda Kateb.

 

Et, en exposant la dualitĂ© de cette phrase, Bigelow montre aussi une certaine responsabilitĂ© de l’Occident. Ammar, et celles et  ceux qui lui ressemblent, ne sont peut-ĂŞtre pas que des terroristes. Mais, peut-ĂŞtre, aussi, des personnes qui refusent d’appartenir Ă  l’Occident. Et d’être ses esclaves ou ses choses.

 

 Mais c’est peut-ĂŞtre, moi qui l’interprète comme comme ça. D’autres, Ă  ma place, ne verront en Ammar qu’un bouffon terroriste qui va et doit en baver comme il le « mĂ©rite Â». Et les adeptes de cette croyance ( « Ammar/bouffon/terroriste/qui-doit-en-baver) vont prendre leur pied, et peut-ĂŞtre se lubrifier, devant les scènes de torture.

 

SubtilitĂ©s : j’ai mes règles.

 

 

Sauf que Bigelow est plus subtile que ça.

 

 

J’avais oubliĂ© ce visage de femme « prĂ©gnante Â» (de femme enceinte) de Maya – l’actrice Jessica Chastain qui a le rĂ´le principal- qui assiste, d’abord avec une cagoule, Ă  la torture d’Ammar.

 

Dan ironise quant au fait que, pour sa première mission, on lui confie un « cas Â» particulièrement difficile en la personne d’Ammar. Et l’on peut penser que cette sĂ©quence de torture a de quoi l’éprouver comme elle Ă©prouverait toute personne qui dĂ©bute par ce genre de mĂ©thode. Comme pour toute initiation qui peut rappeler aussi, celle, trois ans plus tard, de Kate Macer (l’actrice Emily Blunt) face Ă  Alejandro ( l’acteur Benicio Del Toro) dans le Sicario rĂ©alisĂ© en 2015 par Denis Villeneuve.

Au premier plan, l’actrice Emily Blunt. Derrière, Daniel Kaluuya dans « Sicario » de Denis Villeneuve ( 2015).

 

 

Attouchements/accouchement :

Stationed in a covert base overseas, Jessica Chastain plays a member of the elite team of spies and military operatives who secretly devoted themselves to finding Osama Bin Laden in Columbia Pictures’ electrifying new thriller directed by Kathryn Bigelow, ZERO DARK THIRTY.

 

 

Mais en revoyant Zero Dark Thirty, il me plait maintenant de me dire que Maya/ l’actrice Jessica Chastain est pâle au début du film parce qu’elle est enceinte. Et cela me plait d’autant plus qu’une séance de torture, un film, un jeu d’acteur est aussi un accouchement. Une séance de torture, c’est aussi une séance d’attouchements qui peut mal tourner en vue de provoquer un accouchement.

 

 

Bien des situations critiques, dans la vie, sont nos sĂ©rums de vĂ©ritĂ©. La sĂ©ance de torture  fait partie de ces sĂ©rums de vĂ©ritĂ©.

 

Ammar, Dan mais aussi Maya, dans cette scène de torture, accouchent de leur vĂ©ritable visage Ă  un moment ou Ă  un autre. De ce fait, inutile de porter une cagoule et de se cacher derrière elle. C’est sans doute la raison pour laquelle Dan n’en porte pas. D’abord parce qu’il a la certitude, comme il le rĂ©pond Ă  Maya, qu’Ammar ne sortira jamais de ce camp de torture. Mais, aussi, parce-que, comme le « hĂ©ros Â» du film DĂ©mineurs ( 2010) qui avait  valu l’Oscar Ă  Bigelow, Dan s’est totalement fondu dans sa fonction. Elle et lui ne font plus qu’un.

Un film paritaire

 

Maya, elle, en retirant sa cagoule, use sans doute d’une stratĂ©gie, pour, en se servant de sa vulnĂ©rabilitĂ© supposĂ©e, Ă©branler Ammar. Mais, elle montre aussi qu’elle est raccord avec cette sĂ©ance de torture.  Qu’elle est l’égale de Dan.

 

Maya/l’actrice Jessica Chastain

 

« You can Help Yourself by being truthful Â» ( vous pouvez vous en tirer en disant la vĂ©ritĂ©/ en vous montrant sincère) rĂ©pond/ment-elle avec son assurance de Bambi Ă  Ammar, lorsque, laissĂ©e seule avec lui, celui-ci essaie d’en faire son alliĂ©e.

 

Zero Dark Thirty  est donc aussi un film paritaire Femme/homme.  Vis-Ă -vis de Dan, le mâle occidental, plutĂ´t macho et physique. Mais aussi vis-Ă -vis d’Ammar, terroriste islamiste qui, probablement, « voit Â» la femme comme l’infĂ©rieure de l’homme.

 

 Maya expose qu’elle est plus solide qu’elle ne le paraĂ®t. C’est du reste, elle, qui convainc Dan de reprendre la sĂ©ance plus tĂ´t que celui-ci ne l’avait prĂ©vu. Et qui trouvera plus tard le subterfuge afin de faire parler Ammar….

 

 

Ammar accouche, donc. Se dĂ©livre. Et montre un autre visage que celui qu’il montrait jusqu’alors. Jusqu’alors, Ammar montrait le visage d’un homme dĂ©terminĂ© Ă  rĂ©sister. « Notre mission durera cent ans Â» est une phrase attribuĂ©e Ă  des Jihadistes du film. Ammar partage sans doute cette pensĂ©e.

 

Mais, finalement « grâce Â» Ă  Maya, Ammar s’ouvre. Et, la pâle Maya supplante -ou potentialise- la brutalitĂ© de Dan, le tortionnaire Ă©prouvĂ© et redoutĂ© : car, sans le travail prĂ©liminaire de Dan et d’autres, la seule apparition de Maya aurait peut ĂŞtre Ă©tĂ© insuffisante pour que la cuirasse d’Ammar ne se fissure.

 

 

Pour conclure avec la phrase « You Belong to me ! Â» avant de retourner revoir la suite du film :

Histoire de faire un peu de sĂ©mantique prĂ©tentieuse, « You Belong to me ! Â» est proche de l’expression « Longing for Â». « Se languir de…. Â».

 

La personne qui impose Ă  une autre son « Tu m’appartiens ! Â»/ « Tu es ma chose Â» lui dit aussi :

 

«  Je ne peux pas me passer de toi Â»/ Â« Tu me manques Â». «  Sans toi, je ne suis rien Â».

 

On retrouve donc dans ce « You Belong to Me ! Â»  de Dan son ambivalence envers Ammar. L’ambivalence de l’occident envers le Moyen-Orient. Le « With or Without you I can’t Live Â» ( «  Avec et sans toi, je ne peux pas vivre Â») chantĂ© entre-autre par le groupe –irlandais- U2 qui s’y connaĂ®t en relations-poudrières indissociables.

 

 

« Friandises Â» en filigrane

 

 

A travers Dan et Ammar, on peut aussi deviner en filigrane la Palestine et Israël.

 

Dan est donc sans doute moins libre qu’il n’y paraĂ®t. MĂŞme si, bien-sĂ»r, en pratique, il est plus libre d’aller, de venir et d’agir qu’Ammar. Le personnage le plus libre du trio mais aussi de l’ensemble, dans cette scène de torture, c’est vĂ©ritablement Maya. Elle vient pour cette scène. Se permet de montrer son visage, sa faiblesse apparente. Puis, elle repart. Tous les autres, armĂ©s, baraquĂ©s, restent sur les lieux. CagoulĂ©s ou Ă  visage dĂ©couvert. Dan, aussi, comme Ammar, ne quittera sans doute jamais cet endroit de torture. Vous parlez d’un accomplissement dans une vie ?! Passer son temps Ă  torturer d’autres ĂŞtres humains. Autant travailler dans un abattoir industriel oĂą l’on tue Ă  la chaĂ®ne des animaux. Si Dan torture Ă  visage dĂ©couvert, c’est peut-ĂŞtre aussi parce qu’il a dĂ©jĂ  du mal Ă  respirer Ă  cet endroit. Et, cela va sans doute ĂŞtre de pire en pire pour lui.

 

Et, Ammar, terroriste meurtrier, dans sa position d’être condamné à l’enfermement à perpétuité, a quand même aussi un statut de personnage tragique. Il lui sera nécessaire d’être sûr que ses actions qui l’ont mené à finir là en valaient véritablement la peine. Car en cas de moindre doute de sa part, son supplice à rester là, sera d’autant plus augmenté.

 

Mais après ces petites friandises, retournons maintenant revoir la suite du film.

 

Stationed in a covert base overseas, Jason Clarke plays a member of the elite team of spies and military operatives who secretly devoted themselves to finding Osama Bin Laden in Kathryn Bigelow’s electrifying new thriller, ZERO DARK THIRTY.

 

« Je voulais te dire Â»

 

Nous sommes Ă  la 43ème minute du film et Dan apprend Ă  Maya :

 

« Je voulais te dire, je me tire d’ici. Je dois en ĂŞtre Ă  100. J’ai besoin d’une activitĂ© normale Â». Un peu plus tard, Dan affirmera : « Ils ont tuĂ© mes singes Â». Ses singes en captivitĂ©, « doubles Â» inversĂ©s de cette centaine d’hommes (on ne voit pas de femmes torturĂ©es dans le film de Bigelow. Cela fait peut-ĂŞtre partie de ses limites) que Dan a torturĂ©s Ă©taient sa Â« rĂ©serve Â» d’humanitĂ©. La disparition de  ses singes lui indique que sa jauge d’humanitĂ© est dĂ©sormais dans le rouge.

 

Cette scène entre Maya et lui est un passage de tĂ©moin. La Maya que nous avons connue tout au dĂ©but n’est plus. MĂŞme si elle a toujours la mĂŞme allure. L’actrice Jessica Chastain passerait très bien en tant que crĂ©ature dans Alien. Ce qu’elle fera autrement, d’ailleurs, et avec rĂ©ussite, en 2019 dans le rĂ´le de Vuk dans X-Men : Dark Phoenix rĂ©alisĂ© par Simon Kinberg. Le professeur Xavier ( l’acteur James MacAvoy) lui demandant dans une scène : « What Are You ?! Â» ( « Qu’est-ce que vous ĂŞtes ?! Â»).

Jessica Chastain (Ă  droite) dans le rĂ´le de Vuk face Ă  Sophie Turner dans le rĂ´le de Phoenix.

 

 

Mais je parlais de « grossesse Â» pour Maya au dĂ©but du film. Environ cinq ans après le dĂ©but de son travail de terrain pour retrouver Ben Laden, il lui est dit :

 

« Je sais qu’Abou Ahmed est ton bĂ©bĂ©. Mais il faut couper le cordon Â». C’est une collègue, amie et mère de famille qui lui dit ça. Jessica (l’actrice Jennifer Ehle) qui se trouve sur le terrain depuis plus longtemps qu’elle.

 

Jessica.

 

President Obama on TV :

 

Avant de quitter le camp de torture, Dan avait prévenu Maya que la politique allait changer. Et, donc, qu’il ne serait plus possible de pratiquer la torture de la même manière.

 

A la 50ème minute du film, on peut voir et entendre le PrĂ©sident Obama dĂ©clarer Ă  un journaliste :

 

« L’AmĂ©rique ne pratique pas la torture Â».

 

Vrai/faux ? Toujours est-il que Bigelow montre dans son film que les mĂ©thodes d’interrogation changent. Mais, aussi, que rĂ©cupĂ©rer des informations devient plus difficile. Faut-il, oui ou non pratiquer la torture ? Bigelow pose la question.

 

 

« I Believe I was spared to finish the Job Â» ( « Je crois que j’ai Ă©tĂ© choisie/Ă©lue pour finir le boulot ! Â».

Stationed in a covert base overseas, Jessica Chastain plays a member of the elite team of spies and military operatives who secretly devoted themselves to finding Osama Bin Laden in Columbia Pictures’ electrifying new thriller directed by Kathryn Bigelow, ZERO DARK THIRTY.

 

Les terroristes sont convaincus d’être des « Ă©lus de Dieu Â». Maya, après avoir perdu plusieurs amis et avoir survĂ©cu Ă  un attentat, par cette phrase, est aussi portĂ©e par la mĂŞme conviction- d’être une Ă©lue- que ceux qu’elle combat.

 

Les annĂ©es passent. Et, jamais, Maya ne se lasse. «  Je vais tuer Ben Laden Â». Executive Woman version militaire, Maya ne compte pas ses heures.

 

 

Vers la fin du film, elle tient d’ailleurs tĂŞte mĂŞme Ă  certains de ses supĂ©rieurs et son niveau d’exigence  dĂ©passe le leur, pourtant situĂ©  » on a very high level ». 

From his command post inside the CIA, Mark Strong directs the fight against the world’s most dangerous man in Columbia Pictures’ revealing new thriller directed by Kathryn Bigelow, ZERO DARK THIRTY.

Tel Georges, l’acteur Mark Strong, qui, lors de sa première apparition intimide particulièrement ses hommes, Maya inclus. Georges, alors, veut des rĂ©sultats ! «  I want targets ! Â» ( Je veux des cibles !). « I want people to kill ! » ( Je veux des gens Ă  tuer ! « ).  Mais mĂŞme lui finit par faire du surplace. Et Maya le lui fait bien sentir. A travers ce face Ă  face que Georges subit, c’est sans doute l’immobilisme de la sociĂ©tĂ© que Bigelow dĂ©crit lorsqu’il s’agit de laisser un certain pouvoir dĂ©cisionnel Ă  des femmes. Car il s’en passe des semaines avant que la dĂ©cision de passer Ă  l’action ne tombe. Ces passages du film oĂą, au marqueur rouge, Maya Ă©crit avec colère le nombre de jours qui passent avant que ne soit prise la grande dĂ©cision sont les seuls moments un peu « comiques Â» du film. Mais, aussi, très critiques. NĂ©anmoins, ces passages montrent aussi que certaines dĂ©cisions sensibles ne se prennent pas Ă  la lĂ©gère.

 

Ensuite, une fois le feu vert donné, le film devient un western américain pur jus héliporté .

 

 

De Maya qui dit aux « garçons Â» : « Vous allez tuer Ben Laden pour moi Â». L’équivalent de : «  Soyez des bons et grands garçons ! Faites plaisir Ă  maman ! Â» Aux blagues viriles et trompe-la-mort en plein vol (« Qui s’est dĂ©jĂ  crashĂ© en hĂ©licoptère ? Â»).

 

 

« For God and country : Geronimo Â» : ( «  Pour Dieu et la Patrie : Geronimo (objectif atteint)

 

Ce n’est pas la première fois que j’entends un AmĂ©ricain parler de « Dieu Â» dans beaucoup de ses propos. Mais invoquer Dieu, la Patrie, un ancien chef Indien- mĂŞme si c’est en langage codĂ©- qui, comme d’autres, a vu ses peuples exterminĂ©s et dĂ©possĂ©dĂ©s de leurs terres par les colons europĂ©ens, pour confirmer le succès d’une opĂ©ration, m’a fait un drĂ´le d’effet. Ces paradoxes font partie de l’identitĂ© amĂ©ricaine.

 

Le contraire d’un film raté

 

 

Quoiqu’il en soit, raconter ces presque dix ans de traque de Ben Laden en seulement deux heures et vingt quatre minutes m’a laissé l’impression d’une très grande maitrise cinématographique.

 

Zero Dark Thirty est le contraire d’un film ratĂ©. Concernant mes interrogations morales du dĂ©but quant aux intentions de ce film, Bigelow montre aussi le prix plus qu’élevĂ© que cette traque a coĂ»tĂ© aux AmĂ©ricains.  En logistique, en dollars, mais aussi en vies humaines. Et, encore, Bigelow ne s’attarde-t’elle pas sur les Ă -cĂ´tĂ©. Je n’envie pas la vie personnelle d’une Maya ou d’un Dan.

 

L’apothĂ©ose de la vie de Maya aurait pu ĂŞtre de reconnaĂ®tre le visage d’un ĂŞtre cher Ă  sa naissance ou lors d’une rencontre amoureuse. Il consistera Ă  confirmer l’identitĂ© d’un mort qu’elle « suit Â» depuis des annĂ©es. Il y a des destinĂ©es plus heureuses.

 

Stationed in a covert base overseas, Jessica Chastain (center) plays a member of the elite team of spies and military operatives who secretly devoted themselves to finding Osama Bin Laden in Columbia Pictures’ electrifying new thriller directed by Kathryn Bigelow, ZERO DARK THIRTY.

 

Donc que Maya pleure un peu à la fin du film, est, pour moi, la moindre des choses. Car je ne vois pas quelle paire de bras pourra jamais l’étreindre suffisamment afin de pouvoir l’extraire de cette cellule, où, pendant plus de dix années elle a passé sa vie à désirer un cadavre.

 

Franck Unimon, ce jeudi 24 juin 2021.

 

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Cinéma

SaĂŻd Taghmaoui/ De la Haine A Hollywood

 

SaĂŻd TAGHMAOUI/ De La Haine A Hollywood

 

 

La main posée, il semble regarder par la fenêtre. Il observe. Ce qu’il aperçoit ne lui plait pas. C’est peut-être un braqueur ou une sentinelle à la recherche du moindre scintillement qui pourrait lui révéler la présence d’un tesson de bouteille, d’une infanterie du GIGN ou l’approche d’une très mauvaise nouvelle.

 

Ses cheveux noirs lisses et plaqués, sa petite moustache, sa peau basanée et son profil lui donnent une allure d’homme grec. L’Homme grec des Mythologies. Celui des péplum mais aussi celui des grands philosophes et des grands orateurs. Ceux qui ont contribué au rayonnement de la pensée humaine il y a des millénaires et que l’on continue d’étudier et de citer encore aujourd’hui. Y compris au sein des élites. Dans les grands Ministères. A côté de toutes celles et tous ceux que l’on nomme.

 

Lorsque l’on veut faire peur à toutes sortes de boxeurs, de rappeurs ou de personnes que l’on tient à amadouer. Que ce soit sur une scène politique, lors d’un combat ou lors d’une phase de séduction car tout cela se ressemble.

 

Lorsque l’on veut faire savoir que, nous aussi, on a des titres et du potentiel.

 

Ni magistrat, ni petit bras, son registre, c’est le cinéma.

 

A l’origine, et pendant longtemps, il n’a pas Ă©tĂ© aidĂ©. Famille nombreuse d’origine marocaine. Famille modeste et croyante appliquant Ă  la lettre les prĂ©ceptes de la religion. Le père s’use au travail pour peu d’argent. La mère reste Ă  la maison. CitĂ© de banlieue prĂ©caire. Un frère aĂ®nĂ© aimĂ© mais hĂ©roĂŻnomane qui mourra du Sida. Une personnalitĂ© « hyperactive Â» et souvent incomprise de ses propres parents. Une scolaritĂ© vite prise en dĂ©faut sur le modèle du titre du Rappeur Oxmo Puccino :

 

Peu de gens le savent  (interlude) oĂą l’on peut entendre, parmi d’autres, cette phrase

 

« Tu veux faire quoi, avec un BEP ?! Combien de millionnaires ont un BEP ?! Â» ou celle-ci

« Un BEP chaudronnerie ?! Tu veux faire quoi avec un chaudron ?! Â».

 

 Il a alternĂ© vols d’autoradio, gardes Ă  vue, Tags (sous le pseudo Airone), Rap, rencontres, multiples boulots tels chef de rang ou autre emploi manuel avec des rĂ´les au cinĂ©ma. 

 

 

Puis, il a fini par se stabiliser. S’il avait Ă©tĂ© blanc de peau, Ă  ses dĂ©buts, on l’aurait comparĂ© Ă  une Ă©poque Ă  un Nicolas Duvauchelle ou Ă  tout autre ex-jeune voyou du cinĂ©ma français lors de ses dĂ©buts (Depardieu, Dewaere, LĂ©otard, Lanvin…).  

 

« Mais Â», pour les autres, et aussi pour lui-mĂŞme, c’est un Arabe. Un de la « pire espèce Â» : des citĂ©s, peu Ă©duquĂ©. C’est  un « physique Â», dans le sens oĂą c’est davantage un instinctif et un affectif qu’un intellectuel. Et qu’il a d’abord Ă©tĂ© beaucoup chargĂ© en Rap et en roue arrière sans casque. Il a connu ou Ă©tĂ© tĂ©moin de ce qui peut se dĂ©crire de pire dans une citĂ©. Une de plus. Une de trop.

 Il a Ă©tĂ© ou il est encore un Arabe sans filtre comme on pourrait le dire d’une cigarette Ă  forte concentration nicotinique.

 

Comparaisons/ comparutions

Alors, comparons-le Ă  ses « cousins Â» et « frères Â» (masculins, donc) acteurs arabes ou d’origine arabe. Dans son livre, il ne cite pas ces autres acteurs et rĂ©alisateurs arabes ou d’origine arabe. C’est moi qui prends l’initiative de citer ces acteurs et ces rĂ©alisateurs.  Autant pour rĂ©viser. Que pour mieux « le Â» situer dans une gĂ©nĂ©alogie approximative de l’apparition des acteurs masculins arabes ou d’origine arabe ces trente ou quarante dernières annĂ©es dans le cinĂ©ma français. Cette gĂ©nĂ©alogie, et les rĂ´les attribuĂ©s, pourraient bien-sĂ»r permettre un dĂ©but d’analyse de l’évolution de l’image de l’homme arabe ou d’origine arabe dans le cinĂ©ma et la sociĂ©tĂ© française. Mais je ne pourrai pas le faire dans cet article.

 

Ces acteurs et ces rĂ©alisateurs que je vais citer, je les ai tous vus, regardĂ©s, dans un ou plusieurs films. J’en ai mĂŞme interviewĂ© deux : Sami Bouajila et Roschdy Zem pour le mensuel Brazil pour la sortie du film Hors-la-loi de Rachid Bouchareb (rĂ©alisĂ© en 2010). Du reste, j’avais aussi interviewĂ© Rachid Bouchareb Ă  propos de ce film.

 

 

« Lui Â», Il s’est fait connaĂ®tre sur grand Ă©cran dix ans après Le ThĂ© au harem d’Archimède (1985) de Mehdi Charef. Dans ce film de Charef,  Kader Boukhanef avait un des deux rĂ´les principaux aux cĂ´tĂ©s de RĂ©mi Martin.  

 

 

 

Roschdy Zem, Sami Bouajila et Zinedine Soualem l’ont prĂ©cĂ©dĂ© de quelques annĂ©es. Michel Polnareff, aussi. ( Bien-sĂ»r, Polnareff n’est ni acteur ni arabe. Et, alors ?!).

 

Je devrais citer Simon Abkarian parmi ceux qui l’ont prĂ©cĂ©dĂ© sur grand Ă©cran « mais Â», sans vouloir l’exclure, Abkarian est d’origine armĂ©nienne.

 

Il est plus ancien sur grand écran que Rachid Djaïdani, Reda Kateb, Samir Guesmi, Tahar Rahim ou Karim Leklou.

 

Le premier Taxi de Luc Besson qui avait fait connaĂ®tre Sami NacĂ©ri mais aussi Marion Cotillard au grand public ? 1998. Trois ans après lui.

 

 

 

L’acteur et rĂ©alisateur Jalil Lespert ? 1998 (Nos vies heureuses de Jacques Maillot) ou 1999 (Ressources humaines de Laurent Cantet).

 

Le film Le Ciel, les oiseaux… et ta mère de Djamel Bensalah, premier grand succès cinĂ©matographique de Jamel Debbouze ? 1999.

 

L’acteur/rĂ©alisateur Rabah Ameur-ZaĂŻmèche ? 2002 avec le film Wesh Wesh qu’est-ce qui se passe?

 

Mehdi Nebbou ? 2005 dans Munich de Steven Spielberg ou 2007 dans Truands de FrĂ©dĂ©ric Schoendoerffer.

 

Tomer Sisley ? 2006 pour Toi et moi de Julie Lopes-Curval, 2007 pour Truands de FrĂ©dĂ©ric Schoendoerffer et, bien-sĂ»r, 2008 pour Largo Winch de JĂ©rĂ´me Salle.

 

Slimane Dazi ? 2009 dans Un Prophète de Jacques Audiard.

 

 

DĂ©sormais, il a un CV assez chargĂ©. Et international. Plus cinĂ©matographique que judiciaire. ( Les Rois du DĂ©sert, Wonder Woman, John Wick, Ali Zaoua prince de la rue….) Ça dure comme ça depuis un peu plus de vingt ans, mais en France, personne ne le « connaĂ®t Â».

 

 

La Haine

 

Personne ne le connait ?! Sauf pour le film La Haine rĂ©alisĂ© par Matthieu Kassovitz en 1995.

 

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Dans son livre, cela en devient comique lorsqu’il relate le nombre de fois, où, dix voire vingt ans plus tard, après l’avoir vu dans La Haine, des grands noms du cinéma américain ( réalisateurs, producteurs) pensent à lui pour un rôle dans leurs projets.

 

 

1995, c’est vraiment loin. Par exemple, c’est quatre annĂ©es lumière avant le premier volet du film Matrix des ex-frères Wachowski. C’est avant l’an 2000. Avant les attentats du 11 septembre 2001. Avant Ben Laden. Et, bien avant que Kassovitz ( le mĂŞme) ne se fasse connaĂ®tre par son rĂ´le de l’agent Malotru dans la sĂ©rie ( cinq saisons) de Le Bureau des LĂ©gendes. Avant que Vincent Cassel (Vinz, dans La Haine) ne tourne avec le rĂ©alisateur David Cronenberg (Les promesses de l’ombre en 2007) puis ne joue Mesrine, ex ennemi public numĂ©ro 1 dans les deux films rĂ©alisĂ©s par Jean-François Richet en 2008 : L’Instinct de mort et L’Ennemi public numĂ©ro 1.

Hubert KoundĂ© (un acteur noir) l’autre « hĂ©ros Â» de l’aventure cinĂ©matographique, commerciale et sociĂ©tale du film La Haine est encore plus mal loti que lui. Car, aujourd’hui, qui connaĂ®t Hubert KoundĂ© au cinĂ©ma ?

 

Lorsque le film La Haine Ă©tait sorti au cinĂ©ma en 1995, je n’avais rien fait pour aller le voir. Je me rappelle de l’éclat mĂ©diatique du film. Des prix. Du fait que ce film avait propulsĂ© la carrière de Kassovitz et de Cassel. Mais, aussi, que Joey Starr, du groupe de Rap NTM avait qualifiĂ© Kassovitz…. Â« d’opportuniste Â».  

 

Plus j’avais entendu parler du film- et on en avait beaucoup parlé- et moins j’avais eu envie d’aller le voir. Aujourd’hui, on compare facilement La Haine (1995) avec Les Misérables de Ladj Ly (2019).

 

Cependant, les émeutes en banlieue en 1995 puis en 2005 avaient et ont donné d’autant plus de crédibilité à La Haine.

 

J’ai regardé La Haine bien plus tard (il y a moins de dix ans). Je lui préfère pour l’instant largement Le thé au harem d’Archimède qui lui est antérieur de dix ans. Cependant, il est indiscutable que La Haine a été dans le cinéma français l’équivalent du Rap dans la chanson et dans la société française. Peut-être que Joey Starrn’aurait pas eu la carrière cinématographique et théâtrale qu’il connaît, à juste titre, depuis des années maintenant, sans un film comme La Haine….

 

Les ricochets de La Haine blessent certains et en bénissent d’autres… de reconnaissance.

 

Littérature

Son livre a une faible teneur en littĂ©rature. Cependant SaĂŻd Taghmaoui tĂ©moigne. 

 

Je n’ai pas arrêté de parler de lui depuis le début de cet article. Même si j’ai cité beaucoup d’autres personnes qui sont désormais connues en France et ailleurs.

 

Dès que je suis tombé sur son livre dans la librairie, il y a quelques semaines, je l’ai acheté. Je connais mal sa filmographie. Mais, plusieurs années après La Haine, j’avais été étonné d’apprendre, au travers d’articles, que sa carrière d’acteur continuait. A l’étranger. Grâce à ses dons, découverts par hasard, pour apprendre des langues étrangères. Mais, aussi, parce qu’ailleurs, on le regardait d’abord comme un acteur capable. Et non comme une photocopie de clichés ou de l’Arabe de la cité.

 

Je l’avais vu dans Confession d’un dragueur (2001) rĂ©alisĂ© par….Alain Soral avec Thomas Dutronc. J’avais Ă©tĂ© marquĂ© par une rĂ©plique qu’il faisait Ă  Thomas Dutronc qui confiait, dĂ©jĂ , que son image, quoiqu’il dise, passerait moins bien que celle de Dutronc, homme blanc. Et fils « de Â».

 

J’avais oublié que ce film avait été réalisé par le Soral aujourd’hui ouvertement raciste et au moins antisémite. Taghmaoui dit sans ambigüité qu’il est aux antipodes des pensées racistes de Soral.

 

Notoriété et normalité

NotoriĂ©tĂ© et normalitĂ© sont incompatibles nous apprend-il. Nous en entendons parler de temps Ă  autre dans les journaux Ă  potins ou sur divers rĂ©seaux sociaux. Mais il nous donne quelques exemples. Il nous parle aussi de certaines dĂ©sillusions connues avec des acteurs ou des rĂ©alisateurs qu’il considĂ©rait comme des « frères Â». De la difficultĂ© de s’ouvrir Ă  une vie affective comme il a pu le faire avec sa carrière d’acteur.

Taghmaoui est peut-être du genre hérissé. Pas évident à approcher. Et, il est possible que dans ces désillusions amicales qu’il raconte, il ait pu être difficile de lui faire accepter certaines règles ou certaines limites. Néanmoins l’envers du décor de certaines vedettes qu’il raconte est crédible dans ce monde trait d’artifices qu’est le cinéma.

 

 

Franck Unimon, ce jeudi 24 juin 2021