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Basquiat

 

 

 

 

 

La double exposition Egon Schiele/ Jean-Michel Basquiat dĂ©marrĂ©e le 3 octobre 2018 est prolongĂ©e jusqu’au 21 janvier 2019 du fait de son succĂšs. Elle se dĂ©roule dans la Fondation Louis Vuitton. Celle-ci a Ă©tĂ© crĂ©Ă©Ă© dans le 16Ăšme arrondissement de Paris, quartier bourgeois (environ trois Ă  quatre fois le prix du mĂštre carrĂ© de la ville oĂč j’habite pour rester modeste), prĂšs du jardin d’acclimatation, par le fils du milliardaire dont j’ai retranscrit quelques propos au dĂ©but de mon article PrivilĂ©giĂ©( rubrique Echos statiques)

 

Pour un milliardaire, investir dans l’Art est un moyen de laisser son nom dans l’Histoire en « lĂ©guant » des Ɠuvres ou des lieux Ă  mĂȘme de permettre de venir les dĂ©couvrir et les admirer. C’est aussi un moyen lĂ©gal de pratiquer l’évasion fiscale. Je l’ai appris rĂ©cemment. Parce-que je suis un peu bĂȘte. En lisant cette interview (qui date d’environ six mois) du pĂšre milliardaire qui, bien que laissant son fils prendre sa relĂšve le critique un peu en passant.

Je l’ai aussi appris en le lisant dans quelque journal :

Dans PrivilĂ©giĂ©, j’ai Ă©crit que le mouvement des gilets jaunes – qui persiste de diffĂ©rentes maniĂšres- avait aussi d’autres origines que des motivations financiĂšres. Je le crois toujours. Mais les causes financiĂšres sont nĂ©anmoins bien prĂ©sentes et restent les premiĂšres raisons de mĂ©contentement pour bien des gilets jaunes. Un certain nombre de gilets jaunes – et d’autres- savent (pour le voir et le vivre) que les riches deviennent de plus en plus riches depuis vingt Ă  trente annĂ©es et que les pauvres deviennent de plus en plus pauvres. Mais aussi que les riches pratiquent de plus en plus et de mieux en mieux l’évasion fiscale. Et, ce, tandis que les pauvres et les classes moyennes doivent supporter de plus en plus d’efforts financiers. Les gilets jaunes et d’autres ont le sentiment que le rĂ©sultat de leurs efforts financiers est de moins en moins visible dans cette vie qui est la leur que ce soit pour s’alimenter, pour l’accĂšs aux soins, Ă  une bonne offre de scolaritĂ© pour leurs enfants ou pour partir en vacances pour parler de quelques sujets prioritaires.

 

Mais ces affirmations sont insuffisantes.

 

Pour rĂ©ussir dans la vie, pour espĂ©rer convaincre, il est d’usage Ă  un moment donnĂ© de recourir Ă  des chiffres. Seul le naĂŻf, le privilĂ©giĂ© fanatique ou le plus que chanceux, peut continuer de croire qu’il rĂ©ussira une entreprise ou Ă  convaincre par sa seule volontĂ©, dĂšs son premier essai, en s’adossant uniquement Ă  ses bonnes intentions, sa ponctualitĂ©, ainsi qu’à la chance et au hasard. Les chiffres, les maths et les probabilitĂ©s deviennent Ă  un moment ou Ă  un autre un passage obligĂ©. Je dois donc, aussi, en passer par les chiffres.

 

 Le Canard EnchainĂ© numĂ©ro 5120 de ce mercredi 19 dĂ©cembre 2018 en rappelle d’abord quelques uns. Le journaliste C.L , dans son article Les gĂ©ants d’Internet remercient les gilets jaunes explique pour dĂ©buter , qu’ironiquement, le mouvement des gilets jaunes a « (
.) fait, sans le vouloir, les affaires des multinationales du numĂ©rique, reconnues pour leur talent Ă  gruger le fisc ». Car, nous explique ce journaliste, Ă  quelques semaines des fĂȘtes de NoĂ«l, le blocage des ronds points par les gilets jaunes et la fermeture «  des magasins pour cause de manifs du samedi ont rempli les caisses des plateformes de vente en ligne comme Amazon. La colĂšre des gilets jaunes a aussi dopĂ© la frĂ©quentation de Facebook, Twitter et Google ».

Pourquoi ? Parce-que le mouvement des gilets jaunes a fait parler de lui tant du cÎté des média que des particuliers.

Cette médiatisation a néanmoins aussi servi le mouvement ; car, comme le notait une semaine plus tÎt encore dans Le Canard Enchainé du mercredi 12 décembre 2018 ( numéro 5119 ), le rédacteur en chef Erik Emptaz, dans son article Gilets sur le Feu :

MalgrĂ© les travers du mouvement des gilets jaunes ( « incapacitĂ© Ă  se trouver des reprĂ©sentants crĂ©dibles et non dĂ©rapants », «  le fatras souvent contradictoire et sans cesse rĂ©alimentĂ© de leurs revendications », le «  complotisme », « racisme », « l’antisĂ©mitisme », « l’homophobie et d’autres dĂ©testables penchants de quelques uns de leurs adhĂ©rents », «  pertes de points de croissance », «  la casse engendrĂ©e par leur venue Ă  Paris ou leurs dĂ©filĂ©s dans d’autres villes » ) celui-ci «  En moins d’un mois, sans tĂȘte pensante et Ă  seulement 136 000 personnes dans tout le pays dont 10 000 Ă  Paris samedi dernier, soit un score des plus moyens s’il s’était agi des manifs sociales ordinaires, ils ( les gilets jaunes) ont rĂ©ussi Ă  obtenir plus que les syndicats en trente ans ». Or, grossiĂšrement, on Ă©value Ă  une trentaine d’annĂ©es (voire une quarantaine d’annĂ©es si on veut se rĂ©fĂ©rer Ă  la date officielle du dĂ©but de la crise Ă©conomique en France et en Europe dans les annĂ©es 70) la pĂ©riode Ă  partir de laquelle, les acquis sociaux ont commencĂ© Ă  ĂȘtre entamĂ©s et la vie Ă  devenir de plus en plus chĂšre en France avec un saut dans l’hyperespace lors du passage Ă  l’euro il y’a bientĂŽt vingt ans.

 

Mais ce 19 dĂ©cembre 2018, le journaliste C.L, dans Le Canard EnchainĂ© , pointe le fait que malgrĂ© les succĂšs politiques du mouvement populaire des gilets jaunes, les grosses entreprises , responsables d’une façon ou d’une autre de l’appauvrissement gĂ©nĂ©ral, conservent une trĂšs bonne santĂ© Ă©conomique et financiĂšre. Ainsi, toujours selon C.L ce 19 dĂ©cembre 2018 :

«  Amazon, qui truste en France 20% des achats en ligne, n’a payĂ© Ă  Bercy l’an dernier que 8 millions d’euros d’impĂŽts. Le numĂ©ro 1 de l’e-commerce n’y est pas allĂ© avec le dos de la souris pour minimiser son activitĂ© dans l’Hexagone : 380 millions d’euros de chiffres d’affaires dĂ©clarĂ©, alors qu’il est, de l’avis des experts, quinze fois plus Ă©levĂ©, Ă  5,7 milliards !

MĂȘme tour de passe-passe pour Facebook, qui n’a donnĂ© au fisc que 1,9 million. Google, lui, n’a rĂ©glĂ© que 14 millions d’euros d’impĂŽts, sur un chiffre d’affaires annoncĂ© de 325 millions, alors qu’il atteint presque 2 milliards. Quant Ă  Twitter, avec une activitĂ© en France rapetissĂ©e Ă  12,5 millions d’euros, cinq fois moins que la rĂ©alitĂ©, il aura inscrit moins de 300 000 euros sur sa feuille d’impĂŽts ».

Les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), rappelons-le, sont des entreprises amĂ©ricaines qui doivent leur rĂ©ussite Ă©conomique Ă  la croissance d’internet et Ă  tous les produits et transactions qui en dĂ©coulent, sont actuellement et depuis des annĂ©es les plus puissantes du monde.

 

On peut voir cet article comme la venaison et la confirmation d’un esprit gauchiste aigri et anti-amĂ©ricain. Puisque j’y parle assez peu de Basquiat , l’artiste-peintre, et encore moins d’Egon Schiele. Et que je vais parler, maintenant, de cet article que j’avais lu et oubliĂ© dans
.le TĂ©lĂ©rama du 22 dĂ©cembre 2018 au 4 janvier 2019 (c’est-Ă -dire en ce moment) et sur lequel je suis Ă  nouveau tombĂ© tout Ă  l’heure par hasard.

Et que raconte entre-autre cet article, page 16, Le Mécénat Est-il Menacé signé Sophie Rahal ? :

 

«  (
) Mi-novembre une plainte contre X pour escroquerie et fraude fiscale a Ă©tĂ© dĂ©posĂ©e par une association anticorruption ; elle vise la Fondation Louis Vuitton. FinancĂ©e par le groupe LVMH, cette institution culturelle est soupçonnĂ©e d’avoir bĂ©nĂ©ficiĂ© de la loi Aillagon pour rĂ©duire son impĂŽt, pour un montant de 518 millions d’euros, entre 2007 et 2017. Depuis, le mĂ©cĂ©nat (surtout culturel) est sous le feu des critiques. C’est oublier qu’il permet de faire vivre de nombreux projets : crĂ©ation artistique, festivals, photographie
le secteur culture-patrimoine est d’ailleurs le deuxiĂšme Ă  bĂ©nĂ©ficier du mĂ©cĂ©nat, aprĂšs le social, et avant l’éducation ».

 

Et, lĂ , je retourne Ă  Basquiat et Egon Schiele.

 

Basquiat, pour moi, depuis une vingtaine voire une trentaine d’annĂ©es, c’est un visage et un nom. Quelques photos. Je fais une courte allusion Ă  Basquiat dans mon article (trĂšs long) Moon France.

J’ai oubliĂ© quand, pour la premiĂšre fois, j’ai vu une photo de Basquiat. Lequel fait partie de ces jeunes artistes morts avant la trentaine et cĂ©lĂ©brĂ©s autant pour leur Art et leur talent que pour le fait d’ĂȘtre morts avant la trentaine : Jim Morrisson, Jimi Hendrix, Janis Joplin, Amy Winehouse, James Dean
.

 

Je connais « mieux » le travail d’Egon Schiele. Il m’est arrivĂ© d’acheter des cartes postales reproduisant certains de ses tableaux.

 

J’avais 20 ans lorsque Basquiat est mort en 1988. Si son Art et ses messages parlaient et parlent de moi, je ne les comprenais et ne les connaissais pas. Et c’est encore le cas. Comme ce jeune que j’avais interrogĂ© Ă  mon arrivĂ©e il y’a 11 ans Ă  Argenteuil. Il ne comprenait pas et ne connaissait pas ce que je lui demandais. Assez souvent, il arrive que les gens ne comprennent pas ce que je leur demande. Et, ils croient que je me fiche d’eux. Il est vrai que je peux faire de la provocation surtout avec les personnes envers lesquelles j’éprouve sympathie ou affection.

Mais Je venais par le train du centre-ville d’Argenteuil. Et, je cherchais la mĂ©diathĂšque du Val d’Argenteuil. Nulle provocation de ma part.

Ce jeune du quartier, qui devait avoir entre 15 et 17 ans, peut-ĂȘtre plus, a rĂ©flĂ©chi quelques secondes, plutĂŽt perplexe. J’avais 8 ou 9 ans lorsque, pour la premiĂšre fois ( je l’en remercie encore), notre instituteur, Mr Pambrun de l’école primaire Robespierre, nous avait emmenĂ© Ă  pied, la classe entiĂšre, en longeant la piscine Maurice Thorez, jusqu’à la bibliothĂšque de Nanterre. Presque en vis-Ă -vis du lycĂ©e Joliot Curie oĂč j’allais poursuivre ma scolaritĂ© quelques annĂ©es plus tard. Et Ă  partir de cette premiĂšre fois avec la classe et Mr Pambrun, rĂ©guliĂšrement, les samedis aprĂšs-midis, je retournais seul ou avec un copain pour lire des bandes dessinĂ©es et emprunter des livres. Depuis, mon attachement aux bibliothĂšques et aux mĂ©diathĂšques s’est maintenu.

 

Trente ans plus tard, notre jeune de la dalle d’Argenteuil, Ă  peine parti, je m’étais aperçu que la mĂ©diathĂšque que je cherchais Ă©tait Ă  peine Ă  vingt ou trente mĂštres de nous. La mĂ©diathĂšque, lieu de culture et de rencontres, accessible et gratuit, ne faisait par partie du plan mental du jeune que je venais de rencontrer. C’est sans doute un prĂ©jugĂ© de ma part : mais je m’avise aujourd’hui que si je lui avais demandĂ© oĂč trouver du shit (PS : je ne consomme aucun stupĂ©fiant) il m’aurait peut-ĂȘtre mieux renseignĂ©.

Toujours est-il que vis-Ă -vis de Basquiat, avec ou sans shit, je suis Ă  peu prĂšs dans le mĂȘme Ă©tat d’esprit que notre jeune rencontrĂ© ce jour-lĂ  comme je cherchais la mĂ©diathĂšque du Val d’Argenteuil. Regarder cette nuit le documentaire Basquiat, une vie rĂ©alisĂ© en 2010 par Jean Michel Vecchiet m’en persuade. J’ai empruntĂ© le dvd dans la mĂ©diathĂšque de ma ville.

Si la musique et certains ralentis du documentaire me semblent trop appuyĂ©s, j’en ai nĂ©anmoins un peu plus appris sur Basquiat. Celui-ci est parti de chez lui Ă  15 ans comme beaucoup d’artistes et de personnes qui ont vĂ©cu dans la rue et qui ont « rĂ©ussi » affirme Suzanne Mallouk, une de ses ex-copines devenue psychiatre et spĂ©cialiste des addictions si j’ai bien compris. Mallouk se cite parmi ces jeunes partis de chez leurs parents Ă  15 ans. Ainsi que Keith Haring qu’elle et Basquiat ont cĂŽtoyĂ©. Madonna a fait partie de leur environnement. Elle se serait rapprochĂ©e de lui par intĂ©rĂȘt alors qu’il Ă©tait bien plus « famous » qu’elle.

 

A tort peut-ĂȘtre, en France, je pense Ă  BĂ©atrice Dalle comme faisant partie de ces artistes partis de chez eux Ă  15 ans.

 

Voir le documentaire en Anglais sans sous-titres m’expose Ă  certaines incomprĂ©hensions et quiproquos mais certains d’entre eux me plaisent. Par exemple, je crois d’abord qu’à Ă©voquer Basquiat, on parle d’un « Black Panther » alors que bien-sĂ»r, on parle de lui comme d’un « Black painter ». Mais son art militant a sĂ»rement un rapport aussi avec un mouvement comme celui des Black Panthers. Et je ne parle pas ici du film sorti en 2018, qui a bien marchĂ©, a eu de bonnes critiques, et qui m’a moyennement plu.

 

Dans le documentaire de Vecchiet, je dĂ©couvre que Basquiat a fait plusieurs sĂ©jours en Afrique : BĂ©nin, CĂŽte d’Ivoire. Mali ? Qu’il s’est rendu Ă  la Nouvelle-OrlĂ©ans qu’il considĂ©rait comme l’endroit du passage entre l’Europe et l’Afrique. Il Ă©tait curieux de ses origines. Ces lieux m’attirent que ce soit en Afrique ou Ă  la Nouvelle-OrlĂ©ans.

A parler de la consommation des drogues de Basquiat, Suzanne Mallouk affirme que celui-ci avait d’abord pris de la marijuana, puis de l’opium et ensuite qu’il alternait entre cocaĂŻne et hĂ©roĂŻne. Elle insiste quant au fait que l’usage des drogues faisait partie de la culture de l’époque dans leur milieu au mĂȘme titre que la consommation du LSD dans les annĂ©es 70. Pour elle, Basquiat Ă©tait un crĂ©atif constant (elle parle d’hypomanie crĂ©ative) indĂ©pendamment de la drogue et elle estime que celle-ci rendait ses Ɠuvres plus dĂ©taillĂ©es lorsqu’il Ă©tait sous cocaĂŻne et plus brutes sous hĂ©roĂŻne.

 

« Offended » par le racisme des Etats-Unis, sa relation difficile avec son pĂšre, la vulnĂ©rabilitĂ© de sa mĂšre, la cĂ©lĂ©britĂ© a peu rĂ©confortĂ© Basquiat. Souvent seul, finalement, Basquiat n’a pas su s’entourer lorsqu’il en aurait eu le plus besoin. En cela, il a peut-ĂȘtre manquĂ© de maturitĂ© et de luciditĂ©. Car trop tendre ( ce n’est pas une critique). Et la cĂ©lĂ©britĂ©, la richesse matĂ©rielle et les drogues n’ont rien arrangĂ©.

 

Lorsqu’arrive l’interview d’AgnĂšs B, je mesure comme je suis un clone de notre jeune homme rencontrĂ© prĂšs de la mĂ©diathĂšque du Val d’Argenteuil en matiĂšre d’ignorance :

Elle raconte comment, dans les annĂ©es 80, elle avait pu rencontrer Basquiat Ă  New-York dans une galerie ou Ă  une exposition et la façon dont elle avait Ă©tĂ© marquĂ©e par sa peinture. Et sa personnalitĂ©, simple, timide et sans chichis. J’aurais aimĂ©, depuis toutes ces annĂ©es, avoir eu la capacitĂ© de comprendre ou de ressentir l’Ɠuvre de Basquiat- et d’autres- comme AgnĂšs B et d’autres. Or, jusqu’à maintenant, l’Ɠuvre de Basquiat a eu sur moi Ă  peu prĂšs le mĂȘme effet que la mĂ©diathĂšque sur ce jeune croisĂ©. J’y suis restĂ© Ă©tranger. AgnĂšs B a grandi dans une famille « cultivĂ©e » mais cela est seulement une partie de l’explication.

 

 

Quelques mots sur Basquiat et , aprĂšs ça, je termine cet article afin qu’il soit d’une longueur encore Ă  peu prĂšs supportable pour le lecteur qui aura persĂ©vĂ©rĂ© jusque lĂ .

 

Au mieux, je crois que Basquiat m’avait marquĂ© dans le passĂ© car ses locks qui avaient fascinĂ© ou sĂ©duit AgnĂšs B et d’autres dans les annĂ©es 80 m’avaient sĂ»rement rappelĂ© Bob Marley ainsi que David Hinds, l’un des fondateurs et meneurs du groupe Steel Pulse. Et, le Reggae comme certaines de ses figures Ă©taient des messages et des symboles que je comprenais dans les annĂ©es 80. Sa coupe de cheveux rasĂ©e peut, elle, faire penser Ă  un Tricky avant l’heure, au mouvement punk ou peut-ĂȘtre Ă  la tonsure de certains Native American. Aujourd’hui, il est courant de voir des hommes crĂąne rasĂ© mais, selon mes souvenirs, dans les annĂ©es 80, la norme capillaire dans le civil Ă©tait d’avoir des cheveux.  Dans la vie courante, parmi les bien portants, seuls, les militaires, les moines, les punks et le skinheads, en occident ou en asie, se rasaient le crĂąne. Puis, des athlĂštes (noirs) amĂ©ricains ont commencĂ© Ă  populariser cette pratique, ou, en tout cas, Ă  me la rendre visible.

 

Il y’a un bon mois, maintenant, une de mes collĂšgues et moi avons discutĂ© de l’exposition Egon Schiele/ Basquiat qui se dĂ©roule dans la fondation Louis Vuitton. Nous avions ratĂ© les offres Ă  prix rĂ©duits proposĂ©es par le CGOS (comitĂ© de gestion des Ɠuvres sociales) qui peut nous permettre d’avoir environ cinquante pour cent de rĂ©duction sur certains Ă©vĂ©nements comme les expositions. Parce-que nous avons la chance que notre employeur nous permette de bĂ©nĂ©ficier des offres du CGOS. Mais Il n’y’avait plus de places proposĂ©es par le CGOS pour l’exposition. J’ai cru comprendre que celle-ci Ă©tait complĂšte. Et qu’il Ă©tait impossible de se procurer des places.

Nous ne saurons jamais si d’autres employĂ©s comme nous se sont prĂ©cipitĂ©s sur cet Ă©vĂ©nement ou si le CGOS disposait pour cet Ă©vĂ©nement d’un nombre de places infĂ©rieur Ă  d’autres offres.

 

Apprenant que l’exposition Ă©tait prolongĂ©e jusqu’au 21 janvier 2019, du fait de son succĂšs, je me suis dĂ©cidĂ© ce matin Ă  aller voir s’il y’avait des places disponibles. Il en restait : 16 euros la place Ă  plein tarif. Plus de cent francs dans l’ancien temps. En supplĂ©ment, on me proposait de bĂ©nĂ©ficier de la navette afin de me rendre jusqu’à la fondation. 2 euros de plus. Soit un total de 18 euros. Dans l’ancien temps, jamais je n’aurais acceptĂ© de payer plus de cent francs pour me rendre Ă  une exposition. MĂȘme si j’en avais eu les moyens.

 

RĂ©sumons. A 15 ans, Basquiat a quittĂ© ses parents pour aller vivre dans la rue. SĂ»rement parce-que la rue lui semblait un foyer et un Ă©chappatoire plus merveilleux que ce qu’il connaissait chez lui. Il s’est d’abord fait connaĂźtre par ses dessins et ses graffitis sur les murs de la ville de Brooklyn dans les annĂ©es 80. Il marchait beaucoup la nuit dans la ville. En zigzag car il avait du mal Ă  marcher droit assure Suzanne Mallouk. Il a sĂ»rement vĂ©cu dans des squats. A cette Ă©poque, artistiquement et culturellement, dit l’une des personnes qui tĂ©moigne dans le documentaire de Vecchiet, New York Ă©tait l’équivalent de Berlin aujourd’hui. Une ville dont au moins depuis sept ans, j’ai entendu dire du bien mais oĂč je ne suis toujours pas allĂ©.

 

Le jour oĂč Basquiat a vendu sa premiĂšre toile en 1981, il Ă©tait content : il avait empochĂ© 200 dollars. Un an plus tard, devenu un artiste cĂ©lĂšbre, une de ses toiles se vendait au minimum 20 000 dollars. Basquiat Ă©tait devenu riche. Puis, il est mort comme un pauvre six ans plus tard. Seul avec son overdose. Sa petite amie de l’époque (qui ne tĂ©moigne pas apparemment dans le documentaire) a d’abord cru qu’il dormait.

Sa mort Ă  peine rendue officielle, une des personnes interviewĂ©es dans le documentaire, tĂ©moigne qu’il y’a eu une forte spĂ©culation sur les Ɠuvres de Basquiat et que le prix de celles-ci a flambĂ©.

Trente ans plus tard, le groupe LVMH, groupe multimilliardaire, qui fait entre-autres dans les produits de luxe, organise via sa fondation Louis Vuitton une exposition Egon Schiele/ Jean-Michel Basquiat. L’exposition est un succĂšs. Cependant, LVMH est soupçonnĂ© d’avoir profitĂ© de la construction de la fondation Louis Vuitton pour pratiquer l’escroquerie et l’évasion fiscale. Et, il faut craindre les retombĂ©es du jugement qui sera rendu car cela pourrait avoir un effet nuisible sur la promotion de la culture.

Donc, en dĂ©boursant 16 euros tout Ă  l’heure pour me rendre Ă  cette exposition, je soutiens LVMH et la promotion de la culture. Tout en acceptant un effort financier supplĂ©mentaire au profit d’un milliardaire qui se contrefiche de moi et de tous les autres de mon espĂšce, avec ou sans gilets jaunes.

Comme Basquiat l’écrivait Ă  cĂŽtĂ© de ses Ɠuvres au dĂ©but de sa carriĂšre : SAMO.

Same Old Shit ! SAMO n’est pas mort contrairement Ă  ce qu’il a voulu croire.

 

Je me contenterai quant Ă  moi de signer simplement au bas de cet article en me convaincant que j’ai bien fait de donner 16 euros au groupe LVMH. En me disant que je vais vivre une expĂ©rience extraordinaire en me rendant Ă  cette double exposition (oĂč ma compagne a refusĂ© de m’accompagner). Et, puis, avec un peu de chance, il n’y’aura pas trop de monde.

 

Etant donnĂ© que j’ai eu du mal Ă  imprimer correctement ma place, j’espĂšre que l’on me laissera entrer dans la fondation.

 

Franck, ce mercredi 26 décembre 2018.

 

 

 

 

 

 

 

 

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