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Ici s’achĂšve le monde connu un court mĂ©trage de Anne-sophie Nanki

Ici s’achĂšve le monde connu un court mĂ©trage de Anne-Sophie Nanki

Il y a quelques jours, j’ai fait le nĂ©cessaire pour regarder Ici s’achĂšve le monde connu de Anne-Sophie Nanki. Un court mĂ©trage d’une vingtaine de minutes. Les fictions rĂ©alisĂ©es et produites par des artistes de l’Outre-Mer, d’OcĂ©anie et d’Afrique que l’on peut voir assez facilement restent rares. Et ces productions sont trĂšs nettement dĂ©savantagĂ©es en termes de diffusion. Il est beaucoup plus facile et plus simple de trouver des salles de cinĂ©ma pour y voir quantitĂ©s de productions occidentales- pour simplifier– bien plus largement distribuĂ©es et aussi mieux annoncĂ©es.

Je suis amateur de cinĂ©ma mais j’ai beaucoup moins de disponibilitĂ© qu’auparavant pour aller chercher des films qui passent dans deux ou trois salles de cinĂ©ma, pour une durĂ©e trĂšs limitĂ©e,  et seulement Ă  certains horaires. J’opte donc rĂ©guliĂšrement pour la facilitĂ© qui consiste Ă  aller voir dans une salle ce qui est dĂ©jĂ  facilement visible ou plus ou moins visible devant moi. Dans des salles de cinĂ©ma que je connais et oĂč j’ai mes habitudes :

Je cherche moins qu’avant dans les « coins », dans les productions plus ou moins discrĂštes ou les festivals dont on parle beaucoup moins.

Mais pour Ici s’achĂšve le monde connu, je me suis obligĂ© Ă  aller contre certaines de mes habitudes de facilitĂ©s. Le titre et l’affiche du film, ainsi que quelques avis favorables aperçus, m’ont donnĂ© le coup de pouce pour franchir la ligne du regard.  J’ai regardĂ© Ici s’achĂšve le monde connu deux fois de suite. En ligne.  Je le regarderai peut-ĂȘtre encore Ă  nouveau tant qu’il sera disponible en ligne gratuitement. On pourrait penser que mettre un film en ligne le rend plus accessible. Mais c’est sous-estimer Ă  quel point nous pouvons ĂȘtre dispersĂ©s ou captĂ©s par diverses sollicitations visuelles. Comme le fait que nous pouvons aussi prĂ©fĂ©rer une certaine passivitĂ© Ă  l’image de ces personnes affalĂ©es dans un transat, canapĂ© ou  lit bercĂ©es par l’action de prendre aucune dĂ©cision. 

L’histoire de Ici s’achĂšve le monde connu se dĂ©roule en 1645. Nous sommes en 2024. En 2024, en France, de quoi nous parle-t’on le plus en ce moment ? :

Des agriculteurs français qui, Ă  nouveau, bloquent certaines routes et qui pourraient arriver jusqu’à Paris ?  Suspense Ă©crasĂ©. De la guerre en Ukraine qui s’enlise. De la possible réélection/rĂ©-Ă©rection assez « crainte » de Donald Trump aux Etats-Unis ?

De l’armĂ©e israĂ©lienne et des milliers de Palestiniens tuĂ©s en reprĂ©sailles Ă  l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023. Des migrants qui se noient en plein mer ou qui se font refouler ou expulser. Des Jeux Olympiques en France de 2024, c’est cette annĂ©e, dans six mois. De la nomination rĂ©cente de Gabriel Attal comme Premier Ministre Ă  la suite d’Elizabeth Borne et des dĂ©fis qui l’attendent en tant que nouveau chef du gouvernement, plus jeune Premier Ministre de France et premier homosexuel Ă  ce poste, qui devrait faire ceci, qui devrait faire cela pour plaire Ă  tout le monde sans trop gĂȘner le jeune PrĂ©sident Emmanuel Macron qui l’a choisi.  De Rachida Dati, figure -et alibi- politique psychopathe, revenue dans le dĂ©filĂ© de mode mĂ©diatique  nommĂ©e pour casser des bras et embarrasser l’adversitĂ© plus que pour la Culture pour laquelle elle  a Ă©tĂ© officiellement nommĂ©e Ministre. Du prix de l’électricitĂ© et de l’essence qui gonfle. De la crise immobiliĂšre.

En ce moment, en France, en 2024, c’est l’hiver. Il arrive qu’il fasse froid. Qu’il y ait de la neige. Certains partent faire du ski ou envisagent de le faire. D’autres ne le peuvent pas.

Il fait assez gris par moments. MĂȘme si les jours se rallongent, mĂȘme s’il y a des trĂšs bonnes sĂ©ries tĂ©lĂ©visĂ©es Ă  regarder et que nous sommes de plus en plus en symbiose avec nos tĂ©lĂ©phones portables et nos Ă©crans garants de notre photosynthĂšse personnelle, mĂȘme s’il y a encore les soldes, nous sommes dans une pĂ©riode de l’annĂ©e, voire de notre vie, passablement dĂ©primante ou tĂątonnante. Une nouvelle fois.

MĂȘme si l’on sourit et que l’on affirme que l’on a plein de projets, autour de nous et prĂšs de nous, il y a toujours beaucoup de personnes isolĂ©es et plus captives de leur destinĂ©e qu’elles n’en sont les grandes dĂ©cisionnaires. Et, l’on peut se dire ou murmurer quelques fois :

« C’était mieux avant
 Â».

La rĂ©alisatrice Anne-Sophie Nanki a dit dans une interview qu’elle aurait aimĂ© qu’on lui raconte des histoires comme celle de son film Ici s’achĂšve le monde connu. Son court mĂ©trage est bien vu par la critique et bĂ©nĂ©ficie de bons Ă©chos. L’acteur et rĂ©alisateur Jean-Pascal Zadi, qui a commencĂ© Ă  ĂȘtre plus connu depuis son  film Tout simplement noir ( Tout simplement Noir), dit beaucoup de bien de son film.

Ici s’achĂšve le monde connu a reçu plusieurs prix et a Ă©tĂ© prĂ©sĂ©lectionnĂ© dans la catĂ©gorie Meilleur court mĂ©trage pour les CĂ©sars 2024.  J’en profite pour saluer Claire Diao, qui, je le sais, Ɠuvre depuis des annĂ©es maintenant, avec les personnes qui travaillent avec elle, Ă  faire en sorte que le cinĂ©ma d’Outremer, d’OcĂ©anie et d’Afrique soit autre chose qu’un cinĂ©ma d’Outre-tombe.

Dans Ici s’achùve le monde connu, nous sommes en 1645. Il fait beau. Nous sommes dans les Antilles françaises, en Guadeloupe.

En Guadeloupe, Ă  Ste Rose, mais fin dĂ©cembre 2023. Je n’avais pas de photo de 1645 Ă  ma disposition. Photo©Franck.Unimon

Pas de Poutine. Pas de Chine. Pas de Donald Trump. Pas de Hamas. Pas d’armĂ©e israĂ©lienne. Pas de risque de guerre mondiale, de catastrophe nuclĂ©aire, de dĂ©clin Ă©cologique. Ibatali, une jeune femme enceinte jusqu’à l’os, une indigĂšne Kalinago, marche pĂ©niblement dans la forĂȘt. Elle s’enfuit.

Elle souffre, oui, mais elle est libre. Elle a Ă©tĂ© vendue Ă  14 ans comme esclave par son pĂšre Ă  des colons blancs. Elle part retrouver sa famille. Courageusement. Sans Mondial Assistance et sans transports en commun. Sans tĂ©lĂ©phone satellite.  

Ibatali doit avoir à peine la vingtaine et a conclu que la vie, pour elle, parmi les blancs, ce n’est pas pour elle. Pour elle, aussi, finalement :

 » C’Ă©tait mieux, avant… ». Avant la colonisation. Avant d’ĂȘtre vendue. 

Ibatali essaie de franchir une riviĂšre. Dans Le seigneur des anneaux, c’est en franchissant une riviĂšre magique, qu’Aragorn, presque dĂ©funt, rĂ©cupĂ©rĂ© Ă  cheval par celle qu’il va aimer, Ă©chappe aux crĂ©atures de mort qui les poursuivaient sur leurs Ă©talons. Ibatali, elle, glisse sur une roche et se rĂ©tame. Elle arrive sur le dos. Lorsqu’elle parvient Ă  se redresser, difficilement, elle aperçoit un homme noir Ă  moitiĂ© nu qui s’avance lentement dans l’eau vers elle un peu comme un serpent qui la regarde. Rien de comparable avec le portrait de l’ange Gabriel blond aux yeux bleus ou du coup de foudre que l’on peut avoir pour le prince charmant aperçu sur un site de rencontres. Ibatali prend une raclĂ©e mentale.  Autant dire qu’elle a peur. L’homme noir, c’est un film d’horreur aussi vivant qu’il respire. C’est le pire de l’HumanitĂ©.  Pire que l’esclavagiste et ses chiens. L’homme blanc, mĂȘme s’il peut ĂȘtre trĂšs violent, comme un alcoolique lorsqu’il a trop bu, appartient au moins Ă  une espĂšce supĂ©rieure et conquĂ©rante. Alors que l’homme noir…d’ailleurs, l’homme noir n’est mĂȘme pas un ĂȘtre humain. Pourquoi ai-je utilisĂ© le terme de « homme Â» ?

Parce-que j’étais en train de rĂȘver. Ou par conflit d’intĂ©rĂȘt.

Parce-que je suis un complice : Un « homme » noir.  Et parce-que depuis Ibatali et Olaudah (la « chose » noire nous donne son prĂ©nom et sa signification plus tard), beaucoup de femmes et d’hommes noirs ont accĂ©dĂ© Ă  certains enseignements tels que celui qui consiste Ă  se servir d’un clavier d’ordinateur afin de domestiquer et Ă©crire leurs pensĂ©es pour les faire paraĂźtre sur internet ( sur un blog !) dans une langue que le monde occidental blanc peut aussi comprendre et plus ou moins accepter (oui, oui, oui !).  Puisqu’il s’agit de la langue du monde occidental blanc (oui, oui, oui !).

D’esclaves et de migrants forcĂ©s, nous sommes devenus des citoyens intĂ©grĂ©s et plus ou moins acceptĂ©s selon les circonstances. Gabriel Attal, nouveau Premier Ministre en 2024, est peut-ĂȘtre jeune et homosexuel mais il est blanc et a fait les (trĂšs) bonnes Ă©coles qui mĂšnent au Pouvoir. Rachida Dati, notre nouvelle Ministre de la Culture, maire prĂ©cĂ©demment du trĂšs «pauvre » 7Ăšme arrondissement de Paris,  a beau avoir des origines sociales modestes et ĂȘtre Arabe mais c’est pareil. Elle, aussi, a fait les trĂšs bonnes Ă©coles. Et, comme Attal vraisemblablement,  elle se distingue par une aptitude stratĂ©gique hors norme et remarquable en termes de plan de carriĂšre qui ne s’apprend pas dans les Ă©coles. En comparaison, toutes mes annĂ©es de travail et mes Ă©tudes ont la valeur et la force d’un simple aĂ©rosol et, pour eux deux, je suis Ă  peu prĂšs l’équivalent d’une Ibatali ou d’un Olaudah. Bien-sur, si on les interrogeait, les deux affirmeraient le contraire mais ils peuvent mentir.

Ai-je aimĂ© Ici s’achĂšve le monde connu ? J’ai aimĂ© la rencontre entre un esclave d’origine africaine qui s’est enfui (ce que l’on appelle un NĂšgre marron)  et une reprĂ©sentante du peuple «premier », d’avant la colonisation. C’est peut-ĂȘtre ça qu’a voulu dire Anne-Sophie Nanki lorsqu’elle a dĂ©clarĂ© qu’elle aurait voulu qu’on lui raconte des histoires de ce genre :

Que s’est-il passĂ©, au moment de la colonisation,  quand un esclave africain ou une esclave africaine a rencontrĂ© une membre ou un membre du peuple premier ?

Car le peu que nous « savons Â», c’est que les Arawaks, les CaraĂŻbes, les Kalinagos ou d’autres auraient trĂšs vite dĂ©clinĂ© aprĂšs l’arrivĂ©e ( l’intrusion ?) des colons europĂ©ens. Qu’ils auraient succombĂ© aux maladies importĂ©es par les colons et leur « puretĂ© Â» ;  qu’ils n’auraient pas survĂ©cu Ă  l’esclavage ou qu’ils auraient Ă©tĂ© rapidement laminĂ©s par les armes. Ils auraient disparu ou se seraient Ă©vaporĂ©s rapidement comme dans un rĂȘve.

Mais c’est flou.

Des femmes et des hommes indigĂšnes ont continuĂ© d’exister pendant la colonisation des Antilles. Mais on a peu de rĂ©cits de cette pĂ©riode. Comme le dit le jeune enfant Ă  propos de sa mĂšre disparue qu’il n’a jamais connue dans le film Le Cheval venu de la mer rĂ©alisĂ© par Mike Newell en 1992 :

« Je n’ai pas image ».

Enfants des Antilles que nous sommes, nous n’avons pas d’images de cette Ă©poque de la colonisation oĂč, pourtant, pour nous, notre vie a dĂ©butĂ© par nos ancĂȘtres. Comme si nous Ă©tions nĂ©s et que nos parents n’avaient jamais pris et laissĂ© de photos d’eux et de nous, plus jeunes. Et que l’on Ă©tait dĂ©ja passĂ© directement Ă  l’ñge adulte lorsque l’on pu se regarder, pour la premiĂšre fois, dans un miroir.

Beaucoup de nos images et de nos histoires ayant Ă©tĂ© privĂ©es de tirages, on peut parler pour beaucoup de nos ancĂȘtres d’une existence entiĂšre soumise au tirage au sort :

 Â« C’est toi et ta chance
 Â».

 L’Histoire des Antilles a  d’abord Ă©tĂ© (d)Ă©crite par des descendants de blancs qui avaient d’autres prioritĂ©s et d’autres aspirations que les esclaves et les IndigĂšnes prĂ©sents en 1645 puis les annĂ©es suivantes :

 S’il Ă©tait demandĂ© Ă  Emmanuel Macron, Gabriel Attal, Rachida Dati, Poutine, Trump, et d’autres de raconter les Ă©vĂ©nements importants qui les auront marquĂ©s Ă  la fin de cette annĂ©e 2024, il est  certain qu’ils Ă©voqueront des sujets trĂšs diffĂ©rents de ceux auxquels je peux tenir dans ma vie personnelle de simple citoyen. Donc, si eux et moi avions Ă  Ă©crire de notre point de vue l’annĂ©e 2024 actuellement en cours, il est prĂ©visible que les contenus de nos ouvrages seraient trĂšs Ă©loignĂ©s les uns des autres. Mais ils pourraient, aussi, par endroits, se complĂ©ter de maniĂšre Ă©tonnante Ă  condition que ces personnes soient capables de sincĂ©ritĂ© et d’introspection. Ce qui reste Ă  vĂ©rifier. Car la capacitĂ© de sincĂ©ritĂ© et la capacitĂ© d’introspection sont sans doute incompatibles, sur le long terme, avec certaines fonctions de dirigeants mais aussi avec certaines carriĂšres.

Je crois que Anne-Sophie Nanki, elle, a rĂ©alisĂ© une Ɠuvre sincĂšre en se livrant Ă  une certaine introspection. Je prĂ©fĂšre d’ailleurs comprendre son intention Ă  travers ce film  de cette façon plutĂŽt que de le voir comme une Ă©niĂšme crĂ©ation antillaise oĂč on doit nous parler Ă  nouveau de l’esclavage et de ses consĂ©quences- rĂ©elles- sur notre descendance :

Etant donnĂ© que l’on ne nous dit rien Ă  propos de ce qui a pu se passer, humainement, lors de cette rencontre un peu du troisiĂšme type entre une personne africaine et une personne indigĂšne, mais aussi, avec un colon blanc europĂ©en, essayons d’imaginer comment c’était, comme cela a pu ĂȘtre.

Les rĂ©alisatrices et les rĂ©alisateurs de cinĂ©ma (ainsi que les auteurs et les artistes d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale mais aussi des enquĂȘteurs et des journalistes) passent leur temps  Ă  faire ça. A partir d’un fait rĂ©el, essayer de raconter ce qui a bien pu se passer dans l’intimitĂ© – et la tĂȘte- des gens.

Le dernier film de Todd Haynes, sorti rĂ©cemment, dont les critiques sont plutĂŽt bonnes, en est un exemple parmi beaucoup d’autres. Pour son May December, avec les actrices Natalie Portman et Julianne Moore, des actrices blanches et amĂ©ricaines (Natalie Portman est israĂ©lo-amĂ©ricaine) plus que reconnues, Todd Haynes, rĂ©alisateur Ă©galement reconnu (blanc et amĂ©ricain Ă©galement)  est parti d’une histoire rĂ©elle pour raconter « son Â» histoire et faire son film . Avec le concours et la subjectivitĂ© des actrices et des acteurs engagĂ©s dans le projet.

On peut penser ce que l’on veut de ce qui est montrĂ© ou affirmĂ© dans le film de Todd Haynes d’autant que celui-ci s’est inspirĂ© librement de la vie de deux personnes ( et de leurs proches) rĂ©elles qui avaient par ailleurs racontĂ© et fait publier leur histoire par Ă©crit. Mais en voyant ce film (je l’ai vu quelques heures aprĂšs avoir regardĂ© Ici s’achĂšve le monde connu) on peut se dire qu’il y a du « vraisemblable Â» dans May December. MĂȘme si je reproche Ă  Todd Haynes d’avoir fait un film finalement assez convenu oĂč la femme ( jouĂ©e par Julianne Moore), civilement plus mature et coupable d’un point de vue lĂ©gal et moral que son amant qui avait 12 ou 13 ans au dĂ©but de leur relation avant de devenir son mari, est quand mĂȘme pointĂ©e du doigt Ă  la fin du film comme il se doit.

J’ai prĂ©fĂ©rĂ© les autres films de Todd Haynes, perçu comme un rĂ©alisateur assez anticonformiste, et, pour moi, Natalie Portman, malgrĂ© toute son application, et son statut de comĂ©dienne encensĂ©e et oscarisĂ©e, reste une actrice plate, froide, trĂšs propre sur elle, et ennuyante. Soit tout le contraire d’une Julianne Moore, d’une Virginie Efira ou d’une Laure Calamy.

Les deux acteurs de Ici s’achĂšve le monde connu le jouent bien.  

Sauf un peu au dĂ©but oĂč il y a quelques accrocs dans le regard de Ibatali ( la comĂ©dienne Lorianne Alami Jawari). Ma prĂ©fĂ©rence va Ă  Olaudah ( le comĂ©dien Christian Tafanier) :

Le « sauvage ».

J’écris « Le sauvage » car c’est comme ça que Ibatali le voit. Et c’est comme ça que le colon blanc- ou autre- le voyait ou le voit encore.

 Anne-Sophie Nanki a voulu croire possible une telle rencontre plutĂŽt « moderne Â» oĂč un esclave en fuite se prĂ©occupe d’une femme enceinte, donc porteuse d’avenir. Dans Les fils de l’homme trĂšs bon film mal connu de Alfonso Cuaron (2006), la grossesse d’une jeune femme noire migrante reprĂ©sente l’espoir dans un monde moderne oĂč l’humanitĂ© est devenue stĂ©rile. Et le hĂ©ros, jouĂ© par l’acteur Clive Owen la protĂšge.

On pourrait voir le personnage de Olaudah comme une version avant-gardiste de Clive Owen. Sauf que l’on est dans un autre monde que celui de Les fils de l’homme.

Olaudah est clandestin, isolĂ© et menacĂ©. Les colons veulent sa peau. Et il n’y a pas de Garde des Sceaux favorable aux esclaves Ă  cette Ă©poque.

Dans le Django Unchained ( 2012) de Tarantino, Django, interprĂ©tĂ© par Jamie Foxx, est un esclave noir Ă  cheval libĂ©rĂ© et habile de la gĂąchette qui dĂ©sarçonne et dĂ©range le NĂšgre (extraordinairement bien jouĂ© par Samuel Jackson) fondu dans le modĂšle du Maitre  blanc ( trĂšs bien jouĂ© aussi par LĂ©onardo dicaprio ). Le film a un cĂŽtĂ© spectaculaire et excessif afin de conjurer l’accablement de cette Ă©poque ainsi que la honte et la culpabilitĂ© qu’ont  pu engendrer chez certains le rĂ©gime esclavagiste et la traite nĂ©griĂšre. C’est un film de « dĂ©tente » oĂč Django est intrĂ©pide mais aussi alliĂ© Ă  un blanc abolitionniste et aventurier qui sait se servir d’une arme. Soit des anomalies assez peu crĂ©dibles dans l’Ă©poque oĂč se dĂ©roule l’action mĂȘme si la guerre de SĂ©cession ( 1861-1865) couve et avec son issue la fin de l’esclavage.

Dans Ici s’achĂšve le monde connu, l’atmosphĂšre est plus rĂ©aliste et, aussi, plus tentaculaire. Nous sommes dans les dĂ©buts de la colonisation deux cents ans plus tĂŽt dans les Antilles françaises. L’ Etat français fait partie des Etats nĂ©griers et esclavagistes de l’Ă©poque. Une Ă©poque qui va durer deux bons siĂšcles. Soit bien plus longtemps que la durĂ©e de vie moyenne d’un ĂȘtre humain ordinaire. Il n’y a pas de super hĂ©ros. Il n’y a pas d’intervention d’une Force autre que celle dont disposent les protagonistes et qui s’accompagne de leurs Ă©motions, de leur audace et de leurs tĂątonnements.

Nous sommes enracinĂ©s voire enchevĂȘtrĂ©s dans le film. Nous marchons avec eux. Et le fait de laisser enfouis  Â« hors champ » les blancs colons fait partie des aimants du film. Non pour les ignorer et les exclure car ils font partie de l’Histoire de toute façon. Mais parce-que cela permet de plus se concentrer sur l’Histoire des « autres », ces astres que l’on ignore ou que l’on a ignorĂ©s. Parce-que cela permet de donner plus de place Ă  ces personnes qui, autrefois ( ou aujourd’hui ) occupaient et occupent majoritairement l’espace et que, pourtant, on ne voit pas ou que l’on voit trĂšs peu que ce soit dans nos miroirs ou dans nos images.

J’espĂšre que Anne-Sophie Nanki rĂ©ussira Ă  mener Ă  bien son projet de donner une version long mĂ©trage de son Ici s’achĂšve le monde connu

Franck Unimon, ce lundi 29 janvier 2024.

 

 

 

 

 

 

 

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La Pointe des Chùteaux, Guadeloupe, ce 25 décembre 2023.

La Pointe des Chùteaux, commune de St François, Guadeloupe, le 25 décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

La Pointe des Chùteaux, Guadeloupe, ce 24 décembre 2023.

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Enfant, lorsque nous descendions vers la station du bus 304 en passant devant le théùtre des Amandiers, Ă  Nanterre, il me fallait multiplier les pas pour diviser l’allure de ma mĂšre.

Je trottinais Ă  cĂŽtĂ© d’elle sans toujours connaĂźtre la destination.

Un jour, alors que nous chevauchions le macadam depuis plusieurs minutes et que nous nous rapprochions du but, la station de bus, ma mĂšre, aprĂšs m’avoir interrogĂ©, malgrĂ© mes rĂ©ponses et plusieurs hĂ©sitations, avait dĂ©cidĂ© de rebrousser chemin.

Elle n’était pas sĂ»re d’avoir bien fermĂ© le gaz dans la cuisine de notre appartement en partant. Nous avions dĂ» remonter jusqu’au sixiĂšme Ă©tage de l’immeuble.

 

Bien-sĂ»r, elle l’avait fait.

 

Enfants, nos parents sont les archers, mais aussi les cochers ainsi que les sillons de nos horizons. La cible, pour nous, et les moyens de l’atteindre, peuvent ĂȘtre assez flous. Mais nous suivons.

Quelques années et des milliers de kilomÚtres plus tard, je me retrouve ce 25 décembre 2023 avec ma mÚre ( Tuer des noix de coco ) à la Pointe des Chùteaux, en Guadeloupe.

Ma prĂ©cĂ©dente venue en Guadeloupe remontait Ă  2014 avec ma compagne et notre fille alors Ă  peine ĂągĂ©e de un an. Pour ce sĂ©jour, il m’importait de venir seul en tant que fils aĂźnĂ©. Mon pĂšre avait eu des ennuis de santĂ© assez prononcĂ©s quelques semaines plus tĂŽt. Ma mĂšre m’avait exprimĂ© son souhait que je puisse venir avant la fin de l’annĂ©e 2023.

Pour l’annĂ©e 2024, j’ai entre-autres le projet de retourner au Japon  aprĂšs mon premier sĂ©jour lĂ -bas en 1999. Et, cette fois, ce sera en bĂ©nĂ©ficiant du sĂ©jour organisĂ© par LĂ©o Tamaki, expert en AĂŻkido ( Dojo 5 , Les 24 heures du SamouraĂŻ au dojo d’Herblay ce 20 et ce 21 Mai 2023, 2Ăšme Ă©dition ), qui nous a prĂ©parĂ© des rencontres avec des Maitres d’Arts martiaux ainsi que la visite de lieux culturels Ă  forte valeur ajoutĂ©e.

Il m’Ă©tait nĂ©cessaire, mĂȘme si je retournerai bien-sĂ»r en Guadeloupe, d’aller voir mes parents avant ce nouveau voyage au Japon ainsi qu’Ă  toute autre destination oĂč je me rendrai.

Lors de ce court sĂ©jour en Guadeloupe chez mes parents que j’avais dĂ» reporter (Le mystĂšre du Covid : Covid et embolie pulmonaire) , je me suis fixĂ© deux endroits oĂč retourner :

La Pointe des Chùteaux et la plage de Raisins clairs à St François.

A la Pointe des Chùteaux, commune de St François, Guadeloupe, le 25 décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

 

Pourquoi la Pointe des ChĂąteaux et la plage de Raisins clairs ? C’est arrivĂ© comme ça.

Je dois Ă  J
ancien collĂšgue croisĂ© Ă  l’hĂŽpital de Pontoise dans les annĂ©es 90, un peu plus jeune que moi de deux ou trois ans et qui a grandi en France comme moi, de m’avoir fait dĂ©couvrir une petite partie de cette Guadeloupe touristique que j’ai longtemps mĂ©connue.

Au point de me retrouver en France dans des situations honteuses :

Je n’oublierai pas ce moment oĂč une « connaissance Â» toute contente d’apprendre que j’étais originaire de la Guadeloupe avait commencĂ©, enthousiaste, Ă  Ă©grener devant moi la liste de ces endroits magnifiques qui l’avaient Ă©merveillĂ©e durant ses vacances en Guadeloupe.

Je l’avais regardĂ©e comme un idiot censĂ© s’exprimer Ă  propos d’un tableau extraordinaire que tout le monde admire et qu’il n’a jamais vu. Ou comme un croque-mort en train d’assister Ă  l’expression exagĂ©rĂ©e d’un bon moment.

Si, quelques annĂ©es plus tard, J
m’avait quelque peu dĂ©niaisĂ©, j’avais nĂ©anmoins Ă©tĂ© surpris par la suite, en apostrophant mon pĂšre, de l’entendre se dĂ©fendre en CrĂ©ole de la façon suivante :

« Mais ce sont des endroits oĂč, mĂȘme moi, je ne suis jamais allĂ© !».

Mon pĂšre qui patrouillait sur les routes de la Guadeloupe durant deux mois, nous trimballant de temps Ă  autre sur la plage, pour rencontrer (beaucoup) de personnes dont un certain nombre  faisait mine de s’intĂ©resser Ă  nous quelques secondes ou de m’apprendre « Je t’ai vu quand tu Ă©tais tout petit
 » avant de recommencer Ă  discuter avec mon pĂšre comme si je n’avais jamais existĂ©, n’était jamais allĂ© au Saut de la LĂ©zarde !

Cela se trouve Ă  Petit-Bourg, commune oĂč il Ă©tait nĂ©, oĂč il avait grandi, oĂč il revenait passer une grande partie de ses vacances chez ses propres parents et oĂč j’avais passĂ© mes tous premiers jours de vacances en Guadeloupe en 1975.

A Ste-Rose, Guadeloupe, décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

« La Guadeloupe, c’est ton pays ! » m’avait pourtant plusieurs fois rĂ©pĂ©tĂ© mon pĂšre avant que, enfant, nous n’allions Ă  nouveau prendre l’avion avec la compagnie Air France pour deux mois de vacances estivales lors des congĂ©s bonifiĂ©s.

Entre 1975 et 1986, avec mes parents, aucun de nos sĂ©jours en Guadeloupe ne nous a menĂ© jusqu’à la Pointe des ChĂąteaux. Il est ainsi un certain nombre d’endroits plĂ©biscitĂ©s par les touristes ou les personnes un peu curieuses en Guadeloupe dont j’ai pu, parfois, entendre le nom, sans jamais y mettre les pieds.

Par contre, La plage de Raisins clairs, Ă  St François, est un de mes premiers souvenirs de plage ou peut-ĂȘtre mon premier souvenir de plage en Guadeloupe en 1975. 

Lorsque l’on vient de l’üle de la Basse Terre, comme mes parents, il faut faire un peu de route pour se rendre Ă  St François, commune situĂ©e en Grande Terre. C’est sĂ»rement possible en car mais le plus pratique reste la voiture. Il n’existe pas de ligne de RER,  de mĂ©tro,  de train ou de TGV en Guadeloupe. 

Sur le trajet, en s’approchant de la Pointe des ChĂąteaux, ce 25 dĂ©cembre 2023. Photo©Franck.Unimon

 

 Avec J, sa copine et d’autres 
nous Ă©tions partis de la commune de Morne Ă  L’eau. Ce 25 dĂ©cembre 2023, ma mĂšre et moi sommes partis de la commune de Ste Rose. C’est plus long. Une bonne heure de route. C’est peut-ĂȘtre pour cette raison que mon pĂšre a prĂ©fĂ©rĂ© rester Ă  la maison. On peut en effet avoir l’impression de partir pour le bout du monde.

Mais, cette fois-ci, pas de course-poursuite Ă  cĂŽtĂ© de maman puisque je conduis la voiture de mon pĂšre. D’ailleurs, c’est moi qui ai attendu ma mĂšre dans la voiture tandis qu’elle finissait de se prĂ©parer. Ainsi, elle a sans doute pu prendre le temps de s’assurer que le gaz Ă©tait bien fermĂ©. 

Maman, à la Pointe des Chùteaux, commune de St François, Guadeloupe, ce 25 décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

Son sac Ă  main sous le bras, alors qu’elle regarde la Croix de la Pointe des ChĂąteaux, je n’ai aucune idĂ©e de ce Ă  quoi peut bien penser ma mĂšre. Et, si je sais que l’on peut apercevoir l’üle de la DĂ©sirade, j’ignore toujours la raison de cette Croix. J’ai mĂȘme appris la veille dans un guide touristique qui date de plusieurs annĂ©es- que m’a remis ma mĂšre- que la Pointe des ChĂąteaux serait le site touristique le plus visitĂ© de la Guadeloupe avec environ 500 000 personnes par an.

Cette forte affluence cause d’ailleurs des dĂ©gĂąts Ă©cologiques. S’il y a assez peu de voitures lorsque nous nous garons et que je trouve assez facilement une place de stationnement, je suis aussi Ă©tonnĂ© de voir un ou deux guichets touristiques oĂč l’on propose des promenades en kayak ou des randonnĂ©es. Je ne me rappelle pas de ça.

Etant donnĂ© l’heure de notre arrivĂ©e, prĂšs de 13 heures, et la chaleur, je propose d’abord de nous restaurer au restaurant La Saveur du soleil que je dĂ©couvre.

Mais la cuisiniĂšre n’est pas encore arrivĂ©e ou n’est pas encore revenue. Alors, nous partons pour la Croix, ma mĂšre et moi. Et, chemin faisant, je lui porte son sac et sa bouteille d’eau minĂ©rale.

Nous avançons tranquillement. L’endroit m’attire pour sa symbolique et son point de vue.

La Pointe des Chùteaux, commune de St François, Guadeloupe, le 25 décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

Lorsque nous arrivons prĂšs de la Croix, il y a encore Ă  peine dix personnes. A l’aller comme au retour, nous y avons rencontrĂ© principalement des francophones, plutĂŽt adultes, et majoritairement blancs. Lesquels, dans leur ensemble, ont soit devancĂ© nos salutations soit nous les ont « rendues Â».

PrÚs de la Croix de la Pointe des Chùteaux, commune de St François, Guadeloupe, le 25 décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

Quelques minutes plus tard, ma mùre et moi avons l’endroit pour nous deux. Si l’on peut sans doute s’y plaire en amoureux ou en famille, ou en tant que photographe ou artiste peintre, je trouve que l’on peut aussi aimer y venir pour se recueillir.

La Pointe des Chùteaux, commune de St François, Guadeloupe, le 25 décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

Ce n’est qu’une fois en bas, que ma mĂšre m’apprendra que c’était la premiĂšre fois qu’elle montait jusqu’à la Croix de la Pointe des ChĂąteaux. Quelques annĂ©es plus tĂŽt, avec son club de randonnĂ©e, elle avait marchĂ© vingt kilomĂštres pour s’arrĂȘter au bord de la plage et apercevoir la Croix qui pointait Ă  l’horizon.

Devant moi, ce 25 dĂ©cembre 2023, ma mĂšre ne se rappelle pas la raison pour laquelle elle et son groupe de marche s’en Ă©taient tenus Ă  ce trajet. Peut-ĂȘtre que quelqu’un, dans le groupe, s’était-il soudainement rendu compte qu’il avait oubliĂ© de fermer le gaz chez lui ?

Point de vue depuis la Pointe des Chùteaux, commune de St François, Guadeloupe, le 25 décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

A notre retour de la Croix, entre-temps, la cuisiniĂšre de La Saveur du soleil a pu revenir. Nous commandons notre repas.

Si le service a Ă©tĂ© un petit peu long, j’ai Ă©tĂ© trĂšs agrĂ©ablement surpris par l’originalitĂ©, la quantitĂ© et la qualitĂ© de ce que nous avons mangĂ©. J’avais commandĂ© le dernier bokit Ă  la morue disponible. Ma mĂšre en avait pris un au poulet. Le bokit, servi Ă©galement avec une salade accompagnĂ© d’une trĂšs bonne vinaigrette, est croustillant et n’est pas en « plĂątre » ou gorgĂ© d’huile. Le poulet adressĂ© a Ă©tĂ© grillĂ© sur la braise. 

On nous a aussi servi une purĂ©e d’igname et de giraumon faite sur place. En dessert, nous avons eu une trĂšs bonne salade de fruits locale.

AprĂšs notre repas, je suis allĂ© fĂ©liciter le personnel. J’ai appris que La Saveur du Soleil existait depuis au moins une vingtaine d’annĂ©es, ouvert au dĂ©part par le pĂšre d’une des employĂ©es. Et que la carte visait Ă  essayer de renouveler la cuisine traditionnelle de la Guadeloupe.

Ensuite, nous sommes partis pour la plage de Raisins Clairs oĂč, muni d’un de mes masques d’apnĂ©e,  j’ai pu faire des bulles dans l’eau pour la premiĂšre fois depuis mon embolie pulmonaire, courant novembre.

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Franck Unimon, ce dimanche 21 janvier 2024.

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Moon France Voyage

Tuer des noix de coco

La Guadeloupe, fin décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

                         Tuer des noix de coco

Depuis mon retour de Guadeloupe, j’ai l’impression d’avoir une petite vie. Ainsi qu’une petite bite. Cela a commencĂ© dans l’avion, pendant le vol du retour, alors que je voyais la Guadeloupe parcheminĂ©e et Ă©lectrifiĂ©e de lumiĂšre s’éloigner tout en bas. Je ne crois pas que partir vivre en Guadeloupe me donnerait plus de virilitĂ©.

Et, je crois ĂȘtre suffisamment immunisĂ© contre la croyance qui consisterait Ă  idĂ©aliser tout le bleu que l’on peut y trouver.

Vue depuis la Pointe des Chùteaux, commune de Saint-François, Guadeloupe, le 25 décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

Mais dans l’habitacle de l’avion suspendu dans l’air, alors que je regardais Ă  travers le hublot, je me trouvais Ă©videmment au chevet de mes pensĂ©es et de ma conscience. Dans un de ces moments, oĂč, telles des vagues, certains reflets de notre luciditĂ© nous parviennent puis repartent ou disparaissent si on les laisse faire. Si on l’accepte. Si on les rejette.

J’écris aussi pour essayer d’avoir une (plus) grande vie. Si j’ai eu l’impression d’avoir une petite vie, c’est sĂ»rement parce-que, soudainement, dans l’avion, je me suis aperçu que j’avais trop souvent pris soin de certaines conventions au dĂ©triment de mon inspiration et de mon intuition. Et, chaque fois que j’écris, j’essaie de remĂ©dier Ă  ce dĂ©tournement.

J’étais en train d’écrire, il y a quelques jours, chez mes parents, Ă  Sainte-Rose, lorsque devant le « studio » (plutĂŽt un F2 d’une bonne cinquantaine de mĂštres carrĂ©s), j’ai commencĂ© Ă  entendre un bruit rĂ©pĂ©tĂ© et plutĂŽt sec. MalgrĂ© mes dix sĂ©jours ici depuis mes sept ans, entre 1975 et 2023, je n’ai pas identifiĂ© ce bruit.

Citadin nĂ© et Ă©duquĂ© en rĂ©gion parisienne, je suis ce que mes compatriotes peuvent appeler un Moun Frans’ (  terme plutĂŽt mĂ©prisant au dĂ©part pour dĂ©signer celle ou celui qui est nĂ©(e)ou qui a Ă©tĂ© « fait(e) » en France ). J’avais sept ans la premiĂšre fois qu’en colĂšre, une mĂšre, Ă  Morne-Bourg, m’avait traitĂ© de Moun Frans’ pour une maladresse que j’avais dĂ» faire.

Depuis, j’ai transformĂ© cette expression de Moun Frans’…en Moon France. Cet article est dans la catĂ©gorie Moon France et Voyage de mon blog.  

Mais il y a aussi l’expression  » C’est un bounty !  » que m’avait apprise un collĂšgue d’origine guyanaise. Aucun rapport avec les rĂ©voltĂ©s du Bounty. Le ou la bounty, c’est celle ou celui qui ne connaĂźt pas son pays ( ici, la Guadeloupe) :

Noir(e) Ă  l’extĂ©rieur et blanc/che Ă  l’intĂ©rieur. Une vraie lessive. Plus blanc/che que blanc/che.

Il y a aussi l’expression NĂ©gropolitain. Celui-ci n’a rien Ă  voir avec le Napolitain.

Il y a quelques jours, donc, alors que j’Ă©tais encore en Guadeloupe chez mes parents, le  Moun Frans’/ bounty/ nĂ©gropolitain que je suis qui Ă©tait occupĂ© Ă  Ă©crire sur son ordinateur portable a voulu, une fois de plus, en savoir plus. 

J’ai ouvert les portes en bois du studio.

C’était ma mĂšre, 75 ans, debout en haut d’un escabeau, son sabre (une machette) Ă  la main. Elle finissait de tuer (cueillir) une grappe de noix de coco. Mais aussi de nettoyer l’arbre.

Chez mes parents, fin dĂ©cembre 2023. On aperçoit sur la gauche l’arme du « crime » qui a servi Ă  tuer les noix de coco. Photo©Franck.Unimon

Je suis allĂ© la rejoindre. A peine trois mĂštres nous sĂ©paraient. J’étais restĂ© sur l’idĂ©e, dont elle m’avait informĂ© la veille, que ce matin, elle partirait faire de la marche Ă  5h30. J’avais oubliĂ© cette histoire de noix de coco dont elle m’avait parlĂ© un ou deux jours plus tĂŽt.

Ma mĂšre n’avait pas encore pris son petit-dĂ©jeuner tout comme moi. Dans la brouette se trouvaient une dizaine de noix de coco et une grappe de bananes poyo.

Les victimes vues de plus prÚs, fin décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

Elle est partie chercher des feuilles de patchouli. Et, en se servant d’eau de pluie qu’elle avait versĂ©e dans un seau, elle a lavĂ© les noix de coco « Car les rats montent dans l’arbre Â» m’a-t’elle expliquĂ©.

Alors qu’elle s’activait, debout et courbĂ©e devant moi, je lui ai demandĂ© :

« Tu ne t’assieds pas ?! Â».

Tout en continuant, elle m’a rĂ©pondu :

« Le banc est lĂ  -haut, dans la maison. De toute façon, je n’en n’ai pas pour longtemps
 Â». 

« Moi, aussi, je n’en n’ai pas pour longtemps
 Â». Je suis parti lui chercher le banc. Ma mĂšre s’est assise dessus sans rien dire avec un certain soulagement.

Nous avons continuĂ© de discuter tandis qu’elle s’affairait. L’aider ? Je l’aurais plutĂŽt ralentie.

Ensuite, ma mĂšre m’a montrĂ© des pieds de patchouli, de dafalgan, d’efferalgan. Je les ai sentis pour essayer de les retenir dans ma mĂ©moire.

En 2023, on opposait et on classifiait gĂ©nĂ©ralement les gens selon leur rĂ©ussite sociale et Ă©conomique, leurs caractĂ©ristiques culturelles, physiques et personnelles ou d’aprĂšs la plaque d’immatriculation de leur vĂ©hicule.

En 2024, ce sera identique.

Nous nous imprĂ©gnons tous des conventions que nous apprenons et voyons dans l’environnement dans lequel nous grandissons. Cela nous influence et contribue Ă  faire de nous, quel que soit notre Pouvoir et notre Savoir, des ĂȘtres plus ou moins performants, plus ou moins adĂ©quats, plus ou moins dĂ©sirables et plus ou moins heureux.

Maman, à la Pointe des Chùteaux, le 25 décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

Ma mĂšre, aide-soignante en rĂ©animation pendant des annĂ©es en rĂ©gion parisienne – jusqu’à son dĂ©part en prĂ©-retraite en 1999- a vĂ©cu en France un peu plus de trente ans tout comme mon pĂšre. Tous deux avaient une vingtaine d’annĂ©es lorsqu’ils ont quittĂ© leur Guadeloupe natale Ă  la fin des annĂ©es 60.

Ces gestes qu’elle a accomplis pratiquement devant moi, tuer des noix de cocos, les laver, elle ne les a pas appris à Sciences Po. Elle les avait appris bien avant que je n’entende ces mots de Sciences Po pour la premiùre fois.

Jamais, en France, je n’ai vu ma mĂšre et mon pĂšre tuer des noix de coco. Que ce soit devant notre immeuble HLM ou dans le jardin de ce pavillon de banlieue qu’ils avaient fini par acheter Ă  crĂ©dit Ă  Cergy-Pontoise au milieu des annĂ©es 80 en s’éloignant de trente kilomĂštres de la ville de Nanterre oĂč ils avaient continuĂ© de travailler. Elle, Ă  l’hĂŽpital et lui Ă  la Poste.

J’ai demandĂ© Ă  ma mĂšre :

– Qui t’a appris Ă  faire ça ? ».

– Je ne sais pas. Un frĂšre ou ma mĂšre. J’ai dĂ» voir faire quelqu’un. Quand tu vois faire, ensuite, tu essaies de faire pareil
..

– Tu avais quel Ăąge quand tu as appris ça ? .

– J’étais jeune
je devais avoir 10-12 ans
..

 

Ce que j’ai appris et ce que j’apprends me permet de l’écrire quand j’y pense. Mais pas toujours de l’appliquer ou de le vivre. EduquĂ© ou bien Ă©duquĂ©, je pourrai sans doute parler du livre Une soudaine libertĂ© de Thomas Chatterton Williams ou de Le CƓur sur la table de Victoire Tuaillon, le livre que j’ai le plus offert Ă  la fin de cette annĂ©e 2023. Mais cela ne me permettra pas de connaĂźtre l’usage d’un sabre et de tuer des noix de coco comme ma mĂšre ou mon pĂšre.

Bien-sĂ»r, par chez moi, en rĂ©gion parisienne et lĂ  oĂč je rĂ©side principalement, les cocotiers, s’il y en a, savent se tenir Ă  distance  de la connaissance et de la vue telles ces crĂ©atures fantastiques ou lĂ©gendaires dont on peut entendre parler.

Aussi, je n’ai pas une grande nĂ©cessitĂ© a priori Ă  apprendre Ă  me servir de cette machette fabriquĂ©e au BrĂ©sil (j’ai regardĂ©) utilisĂ©e par ma mĂšre afin de tuer des noix de coco.

On ne brille pas dans les soirĂ©es, sur une piste de danse, sur un plateau tĂ©lĂ© ou lors d’un casting en sachant tuer des noix de coco. On ne serre pas plus de meufs ou de mecs sur Insta, au travail ou Ă  un barbecue en rĂ©gion parisienne ou dans une autre ville de France parce-que l’on sait faire pousser des ignames jaunes, occire un cochon comme un de mes oncles paternels et faire du boudin avec.

Ces Savoirs ont par contre toute leur importance Ă  la campagne, en Guadeloupe et ailleurs, lorsque la recherche de la survie est au menu dans un milieu naturel, lors d’une guerre ou d’une catastrophe ou dans des Ă©missions ou des films grand public tels que Koh-Lantah ou Hunger Games. Ou lorsque des touristes ou des voyageurs sont de passage et viennent dĂ©couvrir « autre chose» qui les dĂ©payse. 

Sauf que chaque Savoir est entouré de ses croyances et de ses valeurs. De ses codes et de sa langue ou de son langage. Mais aussi de ses hameçons.

On peut se marrer devant certaines de ces croyances et de ces valeurs ou avoir du mal Ă  les avaler mais il me semble pourtant que c’est comme ça dans chaque rĂ©gion du monde, dans chaque microcosme, aujourd’hui comme demain.

ImprĂ©gnĂ© des valeurs et des croyances campagnardes et traditionnelles de ma famille aussi bien paternelle que maternelle, mĂȘme sans avoir jamais essayĂ© de faire pousser un igname ou de tuer une noix de coco, j’ai Ă©tĂ© formĂ© puis influencĂ© par elles lors de mes voyages et de mes rencontres depuis des annĂ©es.

Pour le meilleur et aussi pour le pire :

Il m’est arrivĂ© d’ĂȘtre mal inspirĂ© dans mes rencontres personnelles et intimes. Amicales comme amoureuses. Mais aussi pour prendre certaines dĂ©cisions de tout ordre.

Et, en buvant ce matin-lĂ , Ă  jeun, avant mon petit-dĂ©jeuner, l’eau d’une des noix de coco que ma mĂšre m’a ensuite tendu, puis en mangeant ensuite avec plaisir le lait qu’elle avait retirĂ© de plusieurs de ces noix de coco, j’ai, sans mĂȘme y penser, comme des milliards d’ĂȘtres humains en ce dĂ©but d’annĂ©e, renouvelĂ© le pacte qui me liait Ă  mes parents et Ă  mes origines familiales. 

Parce-que c’est d’abord eux qui m’ont appris ou montrĂ© comment vivre.

Ensuite, il faut grandir. Apprendre à lire et à ajuster ce que l’on a reçu.

Savoir transposer lĂ  oĂč l’on est ce que nos parents- et nos maitres comme nos modĂšles- nous ont appris et montrĂ© en se taillant si possible une vie sur mesure qui, d’une part, les rassure, mais aussi, nous permet les meilleures aventures.

Vue depuis la Pointe des Chùteaux, le 25 décembre 2023. Photo©Franck.Unimon

Franck Unimon, ce lundi 1er janvier 2024.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Corona Circus Crédibilité

Le mystĂšre du Covid : Covid et embolie pulmonaire

Les terrasses du Trocadéro, ce mardi 28 novembre 2023. Photo©Franck.Unimon

Le mystĂšre du Covid : Covid et embolie pulmonaire

 

Il y a le mystĂšre de la Joconde mais aussi de la disparition d’artistes aux dĂ©buts de carriĂšre prometteurs. Pour moi, dĂ©sormais, il y aura, aussi, le mystĂšre du Covid.

Je « sais » que, désormais, on dit La Covid plutÎt que Le Covid. Mais je reste sur la toute premiÚre formulation.

Aujourd’hui, je reste accrochĂ© Ă  l’idĂ©e que le Covid que j’ai attrapĂ© dĂ©but septembre 2023 m’a donnĂ© mon embolie pulmonaire du dĂ©but de ce mois de novembre 2023.

MĂȘme si un certain nombre de personnes autour de moi a pu l’attraper avant moi sans faire d’embolie pulmonaire par la suite.

Pour avoir cette idĂ©e, il m’a fallu, aprĂšs avoir fait mon embolie pulmonaire et ĂȘtre sorti de l’hĂŽpital la semaine derniĂšre – le 22 novembre- effectuer quelques recherches sur le net qui m’ont rappelĂ© que le Covid provoque ou peut provoquer des problĂšmes de thrombose et de coagulation du sang.

Un essoufflement anormal

Cela a commencĂ© par un essoufflement anormal que j’ai ressenti le 3 novembre alors que je me rendais au pot de dĂ©part d’une de mes anciennes collĂšgues et amie, Zara, au restaurant La Timbale, dans le 18 Ăšme.

Je me suis senti Ă©trangement fatiguĂ©. Mais j’ai mis ça sur le compte de la nuit que j’avais travaillĂ©e la veille. Ce devait ĂȘtre ça. Et puis, j’ai trouvĂ© assez indigeste le repas que j’avais commandĂ© Ă  La Timbale. Bien que tous nos collĂšgues semblent satisfaits de ce qu’ils avaient mangĂ©.

Deux jours plus tard, j’avais toujours cet essoufflement anormal.  J’estimais mon amplitude respiratoire diminuĂ©e pratiquement de moitiĂ©.

J’avais mĂȘme l’impression d’avoir le diaphragme « bloquĂ© ». Je savais que c’était impossible car si cela avait Ă©tĂ© le cas, j’aurais Ă©tĂ© en bien plus mauvais Ă©tat. Mais je respirais mal. Avec un confort et une facilitĂ© bien moindres que d’habitude.

En amateur, pour mes loisirs, je pratique l’apnĂ©e en club depuis quelques annĂ©es. Et, mĂȘme avant cette expĂ©rience, j’avais ressenti l’importance de la respiration, que ce soit pour faire des massages, pour faire des Ă©tirements, pour me dĂ©tendre ou pour rĂ©viser des katas de karaté .

Pour obtenir un certain Ă©quilibre, une certaine force mais aussi une certaine aisance, la respiration a beaucoup d’importance. Si on respire mal, on se retrouve amputĂ© en partie de ça.

Infarctus pulmonaire

J’avais aussi mal sur le cĂŽtĂ© droit. J’étais un peu constipĂ©. Je ne savais pas que j’avais commencĂ© Ă  faire une embolie pulmonaire due Ă  un caillot de sang.

C’est l’un des pneumologues qui m’a vu le 21 novembre, dans ce service de pneumologie oĂč je suis restĂ© hospitalisĂ© trois jours, qui, la veille de ma sortie de l’hĂŽpital, me l’a appris :

« Le 3 novembre, votre embolie pulmonaire a commencĂ© Â».

Ce mĂȘme pneumologue a employĂ© les termes « infarctus pulmonaire Â». Je savais qu’il employait ces termes sciemment. Pour bien me faire comprendre la gravitĂ© de mon embolie pulmonaire.

Un caillot et des médecins

Restait le mystĂšre de ce caillot sanguin. Pour lui et ses deux collĂšgues femmes, restĂ©es en retrait, spontanĂ©ment, la piste pouvait ĂȘtre une phlĂ©bite voire devait ĂȘtre une phlĂ©bite. Alors, tandis que j’étais alitĂ©,  il a encore Ă©tĂ© question de mes pieds. 

Comme la veille avec ces deux femmes médecins, on a de nouveau regardé mes pieds.

Mais mes pieds n’avaient rien Ă  dĂ©clarer. Ils n’ont pas doublĂ© de volume lorsque j’ai commencĂ© Ă  ĂȘtre essoufflĂ©. Et je n’ai ressenti aucune douleur particuliĂšre Ă  une de mes jambes.

Pour expliquer l’origine de ce caillot, le Covid que j’ai attrapĂ© en septembre a Ă©tĂ© la premiĂšre suggestion que j’ai faite. Avec le rappel de mon vaccin contre l’hĂ©patite B. Le fait de travailler de jour et nuit. Et la pratique de l’apnĂ©e.

Mes suggestions les ont laissé froids.

Le  pneumologue m’a expliquĂ© que je faisais peut-ĂȘtre partie de ces deux personnes sur dix qui font une embolie pulmonaire sans que l’on sache trĂšs bien en expliquer l’origine. Je ne croyais pas beaucoup Ă  cette idĂ©e mais je n’ai rien dit.

La piste de mes facteurs de coagulation a aussi Ă©tĂ© envisagĂ©e. J’avais peut-ĂȘtre des problĂšmes de coagulation que j’ignorais. On m’a donc fait une prise de sang Ă  ce sujet.

Une sortie rapide de l’hîpital

J’ai Ă©tĂ© Ă©tonnĂ© de pouvoir sortir aussi vite aprĂšs une embolie pulmonaire (aprĂšs trois jours d’hospitalisation). J’aurais acceptĂ© de rester deux jours de plus Ă  l’hĂŽpital. Et j’ai appris depuis que la durĂ©e moyenne d’une hospitalisation aprĂšs une embolie pulmonaire serait de trois Ă  cinq jours. Et le scanner thoracique, pelvien et abdominal que l’on m’a fait passer le jour de ma sortie a montrĂ© que je n’avais pas de cancer.

Mon caillot ne pouvait donc pas provenir d’un cancer.

Je suis sorti de l’hĂŽpital il y a plus d’une semaine maintenant. Je vais de mieux en mieux. J’estime ĂȘtre Ă  60% de mes possibilitĂ©s  respiratoires et physiques.

Je considĂšre que je vais mieux qu’avant mon hospitalisation et le diagnostic de l’embolie pulmonaire. Je suis moins essoufflĂ©. Je ne ressens plus vraiment ma douleur basithoracique. Pendant environ deux jours, aprĂšs ma sortie de l’hĂŽpital, les antibiotiques que j’ai pris m’ont donnĂ© la diarrhĂ©e. AprĂšs en avoir pris durant six jours, je n’ai plus besoin de les prendre. Et, aujourd’hui, je vais  Ă  la selle comme tout le monde sans en mettre partout dans les toilettes. J’ai retrouvĂ© l’appĂ©tit. Je dors correctement mĂȘme s’il m’arrive de tousser encore un peu. Il m’est arrivĂ© de cracher du sang mais c’est terminĂ©.

Mon activitĂ© physique principale consiste Ă  marcher. J’ai perdu un peu de poids. Deux Ă  trois kilos. Mais cela me convient.

A l’hĂŽpital, certaines recommandations m’ont Ă©tĂ© faites afin de me mĂ©nager.

Mais on a oubliĂ© de me dire qu’il me faudrait attendre entre trois et six mois avant de pouvoir reprendre la pratique de l’apnĂ©e. C’est le mĂ©decin fĂ©dĂ©ral du sport que je consulte de temps Ă  autre qui me l’a appris plus tard lorsque je suis allĂ© le consulter ce mardi 28 novembre non loin du TrocadĂ©ro.

On a aussi oubliĂ© de me dire qu’il me faudrait entre six mois et un an pour rĂ©cupĂ©rer totalement de mon embolie pulmonaire. Car on rĂ©cupĂšre trĂšs bien d’une embolie pulmonaire Ă  condition bien sĂ»r d’ĂȘtre raisonnable. C’est mon thĂ©rapeute, ancien rĂ©animateur, qui me l’a dit aprĂšs ma sortie de l’hĂŽpital lorsque je l’ai vu ce lundi 27 novembre.

A l’hĂŽpital, on m’a appris que j’aurais un traitement anti-coagulant oral pendant au moins six mois et qu’il me faudrait attendre au moins un mois avant de pouvoir prendre l’avion en portant des bas de contention. Et que je serais aussi arrĂȘtĂ© pendant quinze jours. PĂ©riode d’arrĂȘt maladie qui pourrait ĂȘtre prolongĂ©e par mon mĂ©decin traitant.

Les voies du caillot

En attendant de revoir en consultation le pneumologue mi-janvier, donc environ sept semaines aprĂšs ma sortie de l’hĂŽpital , avec une Ă©chographie cardiaque que j’aurais passĂ©e au prĂ©alable, je vois deux ou trois explications possibles au fait d’avoir « fait » un caillot qui m’a ensuite donnĂ© cette embolie pulmonaire.

La phlĂ©bite et mes pieds n’ont rien Ă  voir lĂ -dedans.

1) Le fait d’avoir du cholestĂ©rol un peu Ă©levĂ© dans le sang a pu m’exposer Ă  la formation d’un caillot du fait du Covid qui perturbe la coagulation sanguine. ( 2,56 g/L de cholestĂ©rol total le 8 novembre, contre 2, 21 g/L hier, le 30 novembre 2023 pour une normale qui doit se situer au maximum Ă  2 g/ L de cholestĂ©rol total).

2 ) Le Covid Ă  lui tout seul a pu perturber ma coagulation sanguine. Les rĂ©sultats de mon bilan sanguin hier m’ont montrĂ© que mon dosage de plaquettes sanguines affiche un « score » de 444 Giga/L alors que la normale se situe entre 161 et 398.

J’aimerais bien que l’on m’explique ce chiffre de 444 Giga/L alors que j’ai dĂ©sormais- depuis le 19 novembre- un traitement anticoagulant bi-quotidien pour une durĂ©e de six mois.

Le 8 novembre, donc cinq jours aprĂšs le dĂ©but de mon embolie pulmonaire, le mĂȘme laboratoire avait trouvĂ© un « score Â» de 234 Giga/ L pour mes plaquettes sanguines.

3) La conjugaison des effets des vaccins contre le Covid
et des effets du Covid.

Ma compagne, opposĂ©e aux vaccins contre le Covid et suspendue pour cela durant dix huit mois, m’a assez vite parlĂ© des « vaccins » contre le Covid comme pouvant ĂȘtre la cause de ce caillot sanguin qui m’a donnĂ© cette embolie pulmonaire.

Je l’ai aussitĂŽt contredite car je ne voyais pas le rapport entre mes trois doses de Moderna  contre le Covid il y a deux ans et mon caillot dĂ©but novembre 2023.

Je pouvais admettre que le Covid attrapĂ© dĂ©but septembre 2023 provoque la production d’un caillot dĂ©but novembre 2023. Je trouvais par contre peu plausible que les trois injections d’un vaccin faites deux ans plus tĂŽt provoquent « subitement Â» la production d’un caillot
.

Parce-que je n’avais pas pensĂ© Ă  la synergie des effets des vaccins contre le Covid
avec les effets du Covid.

On sait que certains vaccins contre le Covid ont pu provoquer des troubles de la coagulation sanguine.

Je crois aujourd’hui que la rencontre entre les vaccinations contre le Covid et le Covid peuvent provoquer la production de caillot sanguin.

Cela varie selon les personnes et le moment oĂč elles attrapent le Covid. Puisque je connais des personnes vaccinĂ©es contre le Covid qui ont attrapĂ© le Covid par la suite  sans pour autant faire d’embolie pulmonaire.

Pour l’instant, dans mon entourage, je suis a priori la seule personne que je connaisse Ă  avoir fait une embolie pulmonaire deux mois aprĂšs avoir attrapĂ© le Covid pour la premiĂšre fois. Et deux ans (ou trois) aprĂšs avoir Ă©tĂ© vaccinĂ© trois fois contre le Covid.

Je ne suis pas diabĂ©tique. Je ne suis pas hypertendu. Je ne suis pas obĂšse. Je ne fume pas. Je bois peu d’alcool. Je suis assez sportif. Je ne suis pas dĂ©pressif. Mais je porte des lunettes tous les jours. Je fais parfois de l’humour, j’Ă©coute assez peu de Rap, j’Ă©coute de la musique de vieux, je frĂ©quente des mĂ©diathĂšques et des bonnes boulangeries et j’aime le cinĂ©ma d’auteur en version originale. MĂȘme si j’aime aussi regarder des films grand public.

Vertueux mais vulnérable

Sur les terrasses du Trocadéro, ce mardi 28 novembre 2023. Photo©Franck.Unimon

MalgrĂ© toutes ces « vertus Â», j’ai attrapĂ© le Covid dans un moment de vulnĂ©rabilitĂ© physique assez inhabituelle et importante.

AprĂšs ou alors que j’aidais mon frĂšre Ă  effectuer son dĂ©mĂ©nagement fin aout ou dĂ©but septembre alors qu’il faisait particuliĂšrement chaud.

Plus de trente degrés.

Cet Ă©tĂ©, mĂȘme si certains estiment que nous avons eu un Ă©tĂ© pourri, il a plusieurs fois Ă©tĂ© question de canicule.

Du fait de cette chaleur, le dĂ©mĂ©nagement de mon frĂšre a Ă©tĂ© physiquement particuliĂšrement Ă©prouvant. J’étais largement le plus ĂągĂ© ( 55 ans pour une moyenne d’Ăąge de 40 ans de mon frĂšre et de ses amis) parmi ceux qui aidaient mon frĂšre Ă  dĂ©mĂ©nager.

Et, c’était la premiĂšre fois, lorsque je participe Ă  un dĂ©mĂ©nagement, que je doive dĂ©cider d’arrĂȘter ma participation parce-que j’étais trĂšs ou trop fatiguĂ©.

Donc, il y a eu un moment de vulnĂ©rabilitĂ© physique particulier avant que j’attrape le Covid ou lorsque j’ai attrapĂ© le Covid. Car c’est peu de temps aprĂšs, deux ou trois jours aprĂšs ce dĂ©mĂ©nagement, que j’ai appris avoir le Covid. Un des copains de mon frĂšre a ensuite, lui aussi, attrapĂ© le Covid.

J’ai Ă©tĂ© en arrĂȘt maladie quelques jours. Et, attraper le Covid a Ă©tĂ© pour moi une trĂšs grande surprise. J’avais toujours Ă©tĂ© persuadĂ© que je ne l’attraperais pas. Avec ou sans vaccin.

J’ai passĂ© quelques jours chez moi sans difficultĂ© respiratoire particuliĂšre. J’ai eu un peu de fiĂšvre qui est passĂ©e trĂšs vite avec le repos sans prendre le moindre doliprane. J’ai Ă©tĂ© fatiguĂ© deux ou trois jours avec une perte d’appĂ©tit. J’ai peut-ĂȘtre un peu toussĂ©. Puis, comme aprĂšs mon arrĂȘt maladie j’avais des jours de congĂ©s, j’ai trĂšs vite rĂ©cupĂ©rĂ©.

Du moins Ă©tait-ce que je croyais lorsque j’ai repris mon travail mi-octobre 2023.

De l’épanchement pleural Ă  l’embolie pulmonaire importante

Puisque, ensuite, environ un mois plus tard, cela a Ă©tĂ© une trĂšs grande surprise pour moi d’apprendre Ă  l’hĂŽpital oĂč je m’étais fait hospitaliser au dĂ©part- le 19 novembre- pour un Ă©panchement pleural que j’avais « une embolie pulmonaire importante Â».

Cela faisait alors plus de deux semaines que je me sentais anormalement essoufflĂ© (depuis le 3 novembre) et, Ă  aucun moment, je n’ai pensĂ© Ă  une embolie pulmonaire.

A chaque fois que j’ai Ă©tĂ© par vu par un mĂ©decin, y compris aux urgences, je parlais de cet « essoufflement anormal » pour des efforts de la vie quotidienne, tels que le fait de monter des escaliers ou des escalators, qui, lĂ , Ă©trangement, me fatiguaient bien plus que d’ordinaire. 

J’estimais mon amplitude respiratoire diminuĂ©e de moitiĂ©. J’avais aussi une douleur persistante sur le cĂŽtĂ© droit. J’étais constipĂ©. Je n’avais plus beaucoup d’appĂ©tit.

Comme je gardais le moral, j’essayais de trouver ce que je pouvais bien avoir. J’ai pensĂ© Ă  une hĂ©patite, Ă  une pĂ©ritonite, Ă  une pancrĂ©atite voire Ă  une appendicite.

Mais Ă  aucun moment, je n’ai pensĂ© Ă  une embolie pulmonaire.

Stressé, angoissé, constipé et bronchitique

La femme mĂ©decin que j’ai  consultĂ© en premier dĂ©but novembre m’a auscultĂ© et examinĂ©.

Elle a suggĂ©rĂ© que j’étais peut-ĂȘtre « stressĂ© » ou « angoissĂ© ». Je n’ai pas voulu jouer au mec macho donc je n’ai pas protestĂ©. Je suis reparti avec une prescription de doliprane, de flector et de Macrogol (contre la constipation). J’ai dĂ» insister pour qu’elle accepte de me prescrire un bilan sanguin hĂ©patique. Puisqu’elle estimait en prime abord qu’il me fallait aller voir mon mĂ©decin traitant pour me faire prescrire un bilan sanguin.

J’ai passĂ© un test antigĂ©nique au Covid vers le 16 ou le 17 novembre. Le rĂ©sultat a Ă©tĂ© nĂ©gatif.

Puis, le 17 novembre, devant une radio pulmonaire normale, le rĂ©sultat de mon bilan sanguin et mes quintes de toux, le second mĂ©decin que j’ai revu pour la seconde fois en une semaine m’a appris que je faisais une bronchite :

« Il n’y a que ça en ce moment ! ».

Il m’avait  prescrit un bronchodilatateur la premiĂšre fois. Le fait que mes transaminases soient Ă©levĂ©es au delĂ  de la normale ne l’inquiĂ©taient pas. Il m’a rĂ©pondu que cela restait Ă©levĂ© dans des proportions raisonnables. Ce mĂ©decin, que j’ai vu Ă  deux reprises, ne m’a jamais auscultĂ© et n’a jamais pris ma tempĂ©rature. Mon temps de passage dans son cabinet, Ă  chaque fois, a durĂ© cinq minutes tout au plus.

L’ange au scanner

Le lendemain soir, aux urgences, dans la nuit du 18 au 19 novembre, on s’est focalisĂ© sur mon Ă©panchement pleural. Pour cela, il fallait m’hospitaliser afin de le ponctionner. Sauf que, dans la journĂ©e du 19 novembre, on ne voyait pas trĂšs bien Ă  l’échographie oĂč il se situait. Alors, il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© de me faire passer un angio-scanner. Lequel a beaucoup aidĂ© Ă  localiser et rĂ©vĂ©ler que je faisais « une embolie pulmonaire importante Â».

Deux semaines pour diagnostiquer une embolie pulmonaire.

Ralentir

Il y a beaucoup Ă  dire sur ce qui se peut se passer dans une vie en deux semaines. Bien-sĂ»r, on peut imaginer le pire en se remĂ©morant telle ou telle situation dans cet intervalle. MĂȘme si j’étais Ă©tonnĂ© par ce qui m’arrivait et ce que je ressentais de ce souffle qui continuait de me fuir, je n’ai pas paniquĂ©.  Je n’ai pas envisagĂ© le pire. MĂȘme alors que j’en Ă©tais quelques fois Ă  respirer un peu par la bouche debout dans des transports en commun bondĂ©s.

Ausculter

Pendant ces deux semaines, j’ai ralenti mon allure. J’ai arrĂȘtĂ© de faire une partie de mon trajet pour le travail Ă  vĂ©lo. J’ai uniquement pris les transports en commun. J’ai essayĂ© d’assembler et de trouver des Ă©lĂ©ments de comprĂ©hension. J’ai un peu parlĂ© autour de moi de ce qui m’arrivait. Jusqu’à ce qu’une de mes collĂšgues infirmiĂšres, la plus qu’aimable Florence-Jennifer, dans notre service d’urgences mĂ©dico-lĂ©gales, le 18 novembre, alors que nous travaillions de nuit, me suggĂšre de me faire ausculter par notre psychiatre de garde qui a entendu un Ă©panchement pleural. Ce qui a amenĂ© mon transport par un de nos collĂšgues aux urgences
.

J’ai plutĂŽt Ă©tĂ© « soulagĂ© Â» que l’on me trouve un Ă©panchement pleural. J’étais claquĂ©. Je me disais que, enfin, on tenait quelque chose. MĂȘme si, pour respirer, j’avais l’impression de devoir tirer comme lors d’une bronchite asthmatiforme et que le bronchodilatateur avait en effet calmĂ© mes quintes de toux, le fait d’ĂȘtre de plus en plus fatiguĂ©, de continuer de manquer d’appĂ©tit, d’ĂȘtre constipĂ©, de me « refroidir Â» ( j’avais 38 degrĂ©s 2 aux urgences) me faisait comprendre qu’il manquait quelque chose au diagnostic.

Ausculter l’univers

Je n’ai pas de colĂšre particuliĂšre concernant le temps qu’il a fallu pour dĂ©busquer cette embolie pulmonaire. Je ne suis pas mĂ©decin. Chaque ĂȘtre humain est un univers et le soigner et le comprendre est difficile.

Mais je comprends celles et ceux qui se sont beaucoup inquiétés pour moi ou qui sont en colÚre.

Et, j’ai aussi l’impression d’avoir Ă©tĂ© mal  Ă©coutĂ© par des personnes consciencieuses et travailleuses mais qui se  sont laissĂ©es tĂ©lĂ©guider par une façon de penser assez stĂ©rĂ©otypĂ©e ou qui n’ont fait que continuer de suivre la piste prĂ©alable signalĂ©e par d’autres sans essayer d’approfondir, de comprendre ou de remonter aux origines du « mal ».

Ce qui m’a Ă©tĂ© dit par les mĂ©decins, en rĂ©sumĂ©, aprĂšs le diagnostic de mon embolie pulmonaire, c’est :

« Vous n’avez pas le profil Â».

Tenir compte des signes

Moi, aussi, j’ai pensĂ© et cru que je n’avais pas le profil. Mais un profil, c’est aussi une apparence. Alors qu’il faut aussi tenir compte des signes. Les voir et les Ă©couter.

L’erreur principale, Ă  mon avis, a Ă©tĂ© celle-lĂ . Ne voir et ne regarder que le profil et se fermer au reste : l’essoufflement anormal, la douleur basithoracique. L’expĂ©rience de la personne qui consulte.

Quoiqu’il en soit, quoique l’on puisse penser de tout ça, ces surprises Ă©manent, ici, du Covid. Que les vaccinations contre le Covid jouent un rĂŽle ou non dans ce qui m’est arrivĂ© avec cette embolie pulmonaire.

Mais une autre surprise est arrivée avec le Covid.

Le Covid en librairie

On parle du Covid maintenant depuis presque quatre ans. L’annĂ©e prochaine, en 2024, on devrait entrer dans la cinquiĂšme annĂ©e de « l’apparition » du Covid sur la scĂšne publique et internationale. Il y a eu beaucoup d’avis, de controverses, d’examens, de recherches et de milliards consacrĂ©s au Covid.

Pourtant, lorsque cette semaine, que ce soit Ă  la librairie La Procure ou Ă  la mĂ©diathĂšque d’Eaubonne, j’ai cherchĂ© un livre qui synthĂ©tise ce que l’on avait appris de mĂ©dical sur le Covid, j’ai Ă©tĂ© surpris de dĂ©couvrir qu’il n’y en n’a pas.

A la trĂšs jolie et grande librairie La Procure, cette semaine, la libraire qui s’est occupĂ©e de moi m’a dit que les gens en avaient dĂ©sormais assez du Covid. Cela, je le comprends parfaitement. Sans mon embolie, je me serais dispensĂ© de ce genre de recherche. A part mes recherches d’un livre sur le Covid, je suis reparti de la librairie La Procure avec Le CƓur sur la table de Victoire Tuaillon, Au Nom du Temple ( IsraĂ«l et l’arrivĂ©e au pouvoir des juifs messianiques) de Charles Enderlin et Aikido Enseignements secrets de Morihei Ueshiba. Et j’ai commencĂ© Ă  lire StĂ©rĂ©o-scopie de la rĂ©alisatrice Marina De Van ainsi que Une Soudaine LibertĂ© de Thomas Chatterton Williams donc des ouvrages qui portent sur des sujets a priori fort distincts de la thĂ©matique du Covid.

La libraire, de son cĂŽtĂ©, a nĂ©anmoins fait de son mieux pour me trouver les livres disponibles sur le Covid. Elle m’en a rapportĂ© deux ou trois que j’ai feuilletĂ©s.

Il y a bien des livres sur le Covid. Mais c’est pour raconter ou dĂ©crypter comment la pandĂ©mie est arrivĂ©e, pour critiquer les erreurs rĂ©pĂ©tĂ©es de la gestion de la pandĂ©mie ou les mensonges qui ont Ă©tĂ© ou auraient Ă©tĂ© dits.

Par contre, pour trouver un livre qui Ă©tudie la maladie et qui vous explique ses symptĂŽmes, ses effets mĂ©dicaux connus, irrĂ©futables et recensĂ©s, de maniĂšre synthĂ©tique et simple, je n’en n’ai pas trouvĂ©.

Le Covid :  problĂšmes de coagulation et de publication

C’est sur le net que j’ai trouvĂ© des articles qui parlent du Covid et de ses effets sur la coagulation. Parce-que j’ai tapĂ© des mots clĂ©s comme « Covid et thrombose » ou « Covid et problĂšmes de coagulation » ou « Covid et embolie pulmonaire ». J’ai donc Ă©tĂ© dirigĂ© vers des articles en ligne ou vers des articles de journaux papier qui ont Ă©tĂ© digitalisĂ©s par la suite et qui Ă©voquent le fait que le covid augmente le risque de thromboses et d’embolies pulmonaires.

Mais je n’ai trouvĂ© aucun livre papier, concret et matĂ©riel qui synthĂ©tise les connaissances mĂ©dicales sur le Covid. MalgrĂ© tous les milliards et toute l’attention portĂ©e Ă  la pandĂ©mie du Covid, notre connaissance Ă  son sujet n’est pas fixĂ©e dans des livres et reste, apparemment, minimale, ou rĂ©servĂ©e Ă  une minoritĂ© mĂ©dicale.

Nous avons pourtant certaines connaissances mĂ©dicales sur le Covid mĂȘme si des mystĂšres demeurent.

Cette absence de « synthĂšse Â» mais aussi de diffusion Ă  grande Ă©chelle de certaines connaissances mĂ©dicales Ă  propos du Covid explique peut-ĂȘtre en partie l’incrĂ©dulitĂ© Ă  l’hĂŽpital des trois pneumologues devant moi, il  y a quelques jours, lorsque je leur ai entre-autres suggĂ©rĂ© la piste Covid pour expliquer l’origine probable de mon caillot responsable de mon embolie pulmonaire.

Mais aussi peut-ĂȘtre le fait qu’aucun des deux premiers mĂ©decins gĂ©nĂ©ralistes que j’avais d’abord consultĂ©s ne m’ait demandĂ© si j’avais attrapĂ© le Covid rĂ©cemment ou derniĂšrement alors que je leur disais ĂȘtre « essoufflĂ© de maniĂšre anormale ». Alors que le Covid est aussi connu pour donner certaines difficultĂ©s respiratoires.

Le Covid est vivant

On croit s’ĂȘtre dĂ©barrassĂ© du Covid parce-que l’on ne parle plus de pandĂ©mie. Parce-que nous avons nos vaccins. Parce-que nous ne parlons plus d’obligation vaccinale et ne sommes plus obligĂ©s de respecter certains gestes barriĂšres comme de porter des masques anti-Covid comme nous l’avons fait pendant des mois. Parce-que nous avons eu plus que nos doses du Covid dans les mĂ©dia.

Mais mon embolie pulmonaire et la difficultĂ© pour la diagnostiquer dĂ©montrent un peu que nous avons enterrĂ© et dĂ©cidĂ© d’ignorer le Covid un peu trop hĂątivement. Et que, ce faisant, c’est sans doute lui ou elle qui va mettre Ă  mal encore un certain nombre de personnes faute d’attention, d’ouverture d’esprit et de prudence. Je me dis que si, moi, qui n’ai pas le profil, j’ai pu faire une embolie pulmonaire, d’autres sont susceptibles d’en faire une ou en ont dĂ©jĂ  fait une dans des circonstances aussi surprenantes que celles que j’ai connues. 

Ce tĂ©moignage vise Ă  informer plutĂŽt qu’Ă  effrayer.

Les terrasses du Trocadéro, ce mardi 28 novembre 2023. Photo©Franck.Unimon

Franck Unimon, vendredi 1er décembre 2023.

 

 

 

 

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Cinéma

How to have Sex un film de Molly Manning Walker

Tara ( l’actrice Mia McKenna Bruce) et Badger ( l’acteur Shaun Thomas).

How to have Sex un film de Molly Manning Walker

Plus de deux semaines sont passĂ©es depuis que j’ai vu ce film en projection de presse.

Et je n’ai toujours rien Ă©crit dessus. Le film va bientĂŽt sortir et j’ai dĂ©jĂ  commencĂ© Ă  apercevoir – sur l’affiche du film- des commentaires de la presse dithyrambiques.

Pour « bien » m’aider Ă  rĂ©diger cet article, j’ai Ă©garĂ© les quelques notes, bicoques de mes pensĂ©es, que j’avais Ă©crites peu aprĂšs avoir vu le film. Je les retrouverai peut-ĂȘtre aprĂšs, lorsque le film sera sorti. Ce 15 novembre 2023. 

Ce matin, je me mets Ă  repenser Ă  ce film alors que, pour d’autres raisons qui n’ont rien Ă  voir avec lui, je raisonne tout seul Ă  propos de ces besoins que nous avons, qui nous poussent Ă  vivre certaines relations douloureuses ou heureuses, et qui se partagent  peu avec les contingences de la morale et du Devoir.

Le titre du film est une entourloupe. Le sexe. Le sexe, ça excite.

Tara ( l’actrice Mia McKenna Bruce) et Skye ( l’actrice Lara Peake)

Ou ça effraie.

C’est un peu comme une chouette qui nous surprend la nuit ou dans un environnement inconnu et dont on a du mal Ă  identifier, avec autoritĂ©, l’identitĂ© ou les vĂ©ritables intentions Ă  notre sujet. On s’est alors beaucoup trop avancĂ©, d’un pas dĂ©cidĂ©, pour passer de l’autre cĂŽtĂ© et, maintenant, on commence un peu Ă  hĂ©siter. A se hĂ©risser. Mais on ne peut plus reculer. On a oubliĂ© ou perdu le trajet qui pourrait nous faire revenir Ă  notre point de dĂ©part. Lorsque l’on Ă©tait sain et sauf et que l’on avait envie d’aller de l’avant. On s’Ă©tait voulu dĂ©terminĂ©, on se rencontre maintenant autrement. On se rend compte que l’on n’avait pas tout Ă  fait tout prĂ©vu comme on le croyait au dĂ©part, en terrain familier.

On croit que le sujet de How to have sex, c’est le sexe. On a de quoi se frotter les mains ou se caresser les lĂšvres du vagin en dĂ©couvrant ce titre si l’on est « intĂ©ressĂ© ( e) ».

Em ( l’actrice Enva Lewis) et Tara ( l’actrice Mia McKenna Bruce) deux des amies « for Life ».

Le rĂ©sumĂ© de l’histoire nous apprend que trois copines, Em, Skye et Tara, mineures, et encore collĂ©giennes, partent en vacances dans l’équivalent d’un endroit comme Ibiza afin de perdre leur virginitĂ© et de connaĂźtre ce grand moment de la premiĂšre fois contre le corps de l’autre. Sea, Sex and sun.

Mais il faut voir ce que l’on met dans la boite Ă  lettres du sexe. Cette boite Ă  lettres se trouve dans notre tĂȘte.

Badger ( l’acteur Shaun Thomas)

Pour certaines personnes, il s’agit de tirer son coup et de s’en battre les couilles- ou les ovaires- aprùs, que l’on soit un homme ou une femme.

Je suis tombĂ© rĂ©cemment sur une vidĂ©o de la chanteuse Miley Cirus affirmant crĂąnement qu’aprĂšs avoir couchĂ© avec quelqu’un, celle-ci ou celui-ci n’existe plus. C’est Ă  peu prĂšs l’équivalent d’un cadavre qui a rempli son office – ainsi que ses orifices- de son vivant et dont il faut se dĂ©barrasser ou dont il faut s’éloigner au plus vite par la suite sans laisser de traces. 

Avec Miley Cirus, lorsque l’on a un rapport sexuel, on n’est pas lĂ  pour vivre ensemble.  Ni pour concevoir une quelconque relation. Si l’on recherchait un suivi de relation comme on le fait d’une lettre suivie par la poste, on s’est trompĂ© d’endroit et de personne.

On s’est juste mis « bien » pour coucher ensemble. On est bien d’accord ! Que les choses soient claires !

Sous cette vidĂ©o de ce qui ressemblait Ă  une interview de Miley Cirus, on pouvait lire des commentaires admiratifs et enthousiastes de personnes vantant son inconditionnelle franchise. Je n’ai aucune idĂ©e de l’ñge moyen de ces admiratrices et admirateurs mais j’ai envie de croire qu’ils Ă©taient « jeunes Â», c’est Ă  dire, pour faire trĂšs simple :

Moins de trente ans.

Tara ( l’actrice Mia McKenna Bruce)

Lorsque l’on a moins de trente ans (ou plus ) et que, finalement, on a vĂ©cu assez peu d’histoires ou de relations qui comptent, on pourrait rejoindre cet avis de Miley Cirus ou de ces « fans Â».

« Moi, c’est juste pour baiser Â». « C’était pour s’amuser. Je ne lui ai rien promis. On n’est pas marié  Â».

Nous sommes rĂ©guliĂšrement « convaincus Â» que le sexe est devenu une livraison banale sans engagement particulier de notre part :

Entre les pubs dĂ©nudĂ©es ; les soirĂ©es plus ou moins festives; les occasions et les propositions diverses; les lieux et les sites dits de rencontres; les femmes et les hommes qui voient le sexe comme Miley Cirus ; les images Ă©laborĂ©es d’influenceuses ou de stars fĂ©minines (BeyoncĂ©, Rihanna etc
) acharnĂ©es Ă  se montrer suggestives et parfaitement Ă  l’aise pour nous expliquer que tout cela est transgressif et vise surtout Ă  secouer ou dĂ©molir la pudibonderie hypocrite, veule et patriarcale préétablie dont le seul projet- ou objet- est de domestiquer mais aussi d’éradiquer la femme ;

Beaucoup est fait, dit, rĂ©pĂ©tĂ© et montrĂ© pour nous convaincre que la sexualitĂ©, finalement, mĂȘme pas mal. C’est mĂȘme un outil ou un engin de dĂ©livrance et d’affirmation de soi en tant que personne libre, consciente et responsable.

 » Je fais de mon corps ce que je veux… »

Skye ( l’actrice Lara Peake), Em ( l’actrice Enva Lewis) et Tara ( l’actrice Mia McKenna Bruce).

 

Tel est Ă  peu prĂšs l’état d’esprit de Em, Skye et Tara, les trois « meilleures amies pour la vie Â» lorsqu’elles dĂ©cident de partir ensemble dans ce lieu de rĂ©-jouissances oĂč, Ă  la façon d’un club MĂ©d, bien des animations sont organisĂ©es (par des adultes souvent plus ĂągĂ©s que les jeunes venant s’y dĂ©fouler) afin de boire beaucoup d’alcool mais aussi de permettre des interpĂ©nĂ©trations charnelles faciles et rééditĂ©es sans, a priori, aucune consĂ©quence.

Sur le papier, un tel programme, cela peut ĂȘtre le pied Ă  condition d’accepter de se bourrer la gueule et de trouver ça festif. Personnellement, dans ce genre d’ambiance, j’aurais dĂ©rangĂ© et emmerdĂ© bien des gens car prendre une cuite, partir vomir ensuite et avoir plaisir Ă  le raconter ne m’a jamais fait bander. Probablement, je le sais maintenant, parce-que je suis un type coincĂ© et sans avenir.

Mais lĂ  oĂč se rendent nos trois hĂ©roĂŻnes, Em, Skye et Tara, fort heureusement, tout le monde ou Ă  peu prĂšs est beaucoup plus drĂŽle, sait prendre la vie du bon cĂŽtĂ© et se montre consentant et participatif puisque l’on y vient tous pour ça. Cela change tellement des mimiques et des corps embarrassĂ©s et des mĂ©thodes de dragues Ă  deux balles, lorsque, dans la rue, sur la plage, en pleine forĂȘt, sur l’autoroute ou dans le mĂ©tro, on croise un inconnu ou une inconnue qui nous plait sans trop savoir  comment l’aborder ou en prenant le risque-en public- de se faire jeter ou traiter de pauvre type, de pervers ou de harceleur.

En pratique, malgrĂ© leurs bonnes dispositions, nos trois jeunes collĂ©giennes vont dĂ©couvrir qu’elles manquent peut-ĂȘtre encore un peu de rĂ©alisme. Et que l’on peut ĂȘtre une fille intelligente et rusĂ©e, et, par ailleurs, se jouer des tours Ă  soi-mĂȘme. Ou se faire rouler dans la farine.

Le rĂ©alisme, How to have sex en est pourvu. On pourra donc, lors de certaines scĂšnes quasi-documentaires, se sentir quelque peu mal Ă  l’aise sans ĂȘtre dans une position de voyeur. Comme devant des images du film Kids ( 1995) de Larry Clark auquel ce film m’a au moins fait penser. On pourra aussi se rappeler le personnage interprĂ©tĂ© par l’actrice Thora Birch dans le  American Beauty de Sam Mendes ( 1999) ou de certaines des paroles plus rĂ©centes du titre Teenage Fantasy de la chanteuse Jorja Smith. Une chanson qui aurait pu faire partie de la bande son du film.

How to have Sex, avec mĂ©thode, nous dĂ©voile comment se forme le canevas qui va permettre la « chute » : on y trouve des personnes vulnĂ©rables qui se croient suffisamment prĂȘtes, ouvertes, adultes et fortes pour l’aventure dans laquelle elles se sont lancĂ©es; une figure maternelle et protectrice qui ne peut pas ĂȘtre omniprĂ©sente et deviner la prĂ©sence et l’imminence du danger; le sentimental crĂ©dule, timide, bienveillant et gentil dominĂ© par « l’ami » tapi en embuscade, infiltrĂ©, qui, lui, agit Ă  la moindre opportunitĂ© et sans le moindre scrupule.

Tout n’est pas pourri dans cet univers oĂč des jeunes viennent un peu de tous les pays pour « s’amuser Â». Mais il suffit qu’une personne malintentionnĂ©e s’invite et se cache parmi eux pour que les premiĂšres victimes apparaissent.

Initiatique, How to have sex l’est autant pour les trois protagonistes qu’il pourra l’ĂȘtre pour certaines spectatrices et spectateurs qui pourront aller voir ce film Ă  partir de ce 15 novembre 2023.  

 

Franck Unimon, ce samedi 4 novembre 2023.

 

 

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En Concert

PJ Harvey Ă  l’Olympia, octobre 2023

 

PJ Harvey, Ă  l’Olympia, Paris, ce 12 octobre 2023. Photo©Franck.Unimon

PJ Harvey à l’Olympia, octobre 2023

PJ Harvey, c’est lors des annĂ©es 90 et 2000 qu’elle avait tout emballĂ©.  Je l’avais ratĂ©e au festival Rock En Seine entre 2003 et 2005 au parc de St Cloud. J’avais trop hĂ©sitĂ©.

Trente ans plus tard, ses deux dates pour l’Olympia ont Ă©tĂ© complĂštes. S’il y avait moins la queue pour son concert que pour celui des deux sƓurs Ibeyi, PJ Harvey a nĂ©anmoins son public.

Ce 12 octobre 2023, aprÚs le concert de PJ Harvey. Photo©Franck.Unimon

On a plutĂŽt la quarantaine voire la cinquantaine lorsque l’on vient voir PJ Harvey en concert et l’on est plutĂŽt blanc, aussi. C’est ce que je me dis subitement alors que je me trouve dans la salle oĂč, Ă  part les vigiles pour filtrer les entrĂ©es ou dans la salle pour assurer la sĂ©curitĂ©, je n’ai pas vu un seul noir dans le public.

Il y a aussi pas mal de femmes. De la trentaine Ă  la cinquantaine.

Bien plus que lorsque j’étais allĂ© dĂ©couvrir Joe Bonamassa grĂące Ă  Christophe Goffette et, qu’à cĂŽtĂ© de moi, dĂšs le dĂ©but du concert, un homme avait chaussĂ© ses lunettes noires et ostensiblement refusĂ© toute interaction avec moi. Nous n’étions pas du tout du mĂȘme bord. Lui, c’était un pur. Et, moi, je devais ressembler Ă  un artĂ©fact. Il Ă©tait peut-ĂȘtre aussi dans la salle, parmi les spectateurs, ce soir.

PJ Harvey, Ă  l’Olympia, ce 12 octobre 2023. Photo©Franck.Unimon

A ce concert de PJ Harvey, je le sais, se trouvent aussi un ami, rencontrĂ© trente ans plus tĂŽt, et une de ses collĂšgues dont j’ai fait la connaissance un peu plus tĂŽt dans la journĂ©e. Avec eux, j’aurai un peu plus d’interactions car aucun des deux ne porte de lunettes noires.

Sans nous ĂȘtre consultĂ©s, tous les trois, nous avions pris notre place pour ce concert de PJ Harvey environ deux mois plus tĂŽt. Les places sont vite parties.

Les artistes, entre eux, ont souvent bien moins de frontiĂšres que celles et ceux qui les « suivent » et les Ă©coutent. C’est parce-que, progressivement, j’ai fait mien ce principe ou cette conduite de vie que j’ai Ă©tĂ© amenĂ©, il y a plusieurs annĂ©es, Ă  Ă©couter PJ Harvey. Tout en Ă©coutant du Zouk ( Jacob Desvarieux)  ou du Reggae ( En concert avec Hollie Cook au Trabendo).

Mon ami de trente ans, je le sais, n’écoute pas du tout du Zouk, du Kompa, de la Salsa ou du Reggae. Et encore moins du Dub :

( En concert avec Zentone Ă  la Maroquinerie) .

Pas mĂȘme du Funk. Lui, me (re)parlera de Franck Black (que j’ai eu la chance de voir un jour en concert et ce fut une trĂšs trĂšs belle performance), de John Zorn, de Roger Waters
 Des artistes que je peux aimer Ă©couter (Roger Waters) ou que j’ai essayĂ© d’entendre (John Zorn).

Sa collĂšgue, elle, aprĂšs le concert, me donnera envie en m’apprenant avoir vu Massive Attack avec Tricky en 2008. Ces derniers jours, j’ai beaucoup Ă©coutĂ© et réécoutĂ© Tricky. J’ai cherchĂ© des nouvelles versions de ses titres. Mon ami n’écoute pas Tricky. Mais PJ Harvey avait fait un titre avec lui :

Broken homes.

AprĂšs le concert, cependant, la collĂšgue de mon ami me laissera un peu pantois lorsqu’elle citera les Artic Monkeys. Car elle n’a pas trop aimĂ© la prestation que nous avons vue de PJ Harvey. Elle a trouvĂ© les paroles trĂšs belles mais le son mauvais. Pour elle, on ne sentait pas assez les basses. Elle aurait voulu se sentir « transpercĂ©e Â» par les basses comme cela s’était fait lors du concert des Artic Monkeys ou de Massive Attack par exemple. Je connais les Artic Monkeys seulement de nom. D’aprĂšs mes prĂ©jugĂ©s, c’est une musique froide, « blanche Â», ça ne se danse pas. Je n’ai pas envie d’y aller. Mais je n’ai rien Ă©coutĂ© d’eux Ă  ce jour alors que je peux beaucoup aimer des titres de Cure, Joy Division, Depeche Mode, Soft Cell, Radiohead
.

 D’ailleurs, j’ai vu le film consacrĂ© Ă  Ian Curtis, leader du groupe Joy Division : Control rĂ©alisĂ© en 2007 par Anton Corbijn. J’ai aimĂ© le film mĂȘme s’il est dĂ©primant.

Et, Tricky, lui-mĂȘme, ou Massive Attack, ont assurĂ©ment puisĂ© aussi dans des inspirations qui ont pu ĂȘtre communes aux Artic Monkeys. On ne peut pas dire non plus que les compositions de Tricky et Massive Attack soient des inventions particuliĂšrement festives.

PJ Harvey, A l’Olympia, ce 12 octobre 2023. Photo©Franck.Unimon

Mon ami, lui, pour nous redonner du tonus, aprĂšs le concert, nous dit :

« Je pense qu’on est venu la voir trop tard. Il aurait fallu la voir vingt ans plus tĂŽt Â».

Mon ami souligne aussi que la mise en scĂšne théùtrale de PJ Harvey ne l’a pas sĂ©duit. Il est vrai que, durant le concert, PJ Harvey a beaucoup posĂ© tout Ă  son rĂŽle ou aux histoires qu’elle nous a racontĂ©es dans ses chansons. Mais cela a Ă©tĂ© trĂšs pratique pour moi. Pour prendre des photos. Je n’ai peut-ĂȘtre jamais rĂ©ussi autant de photos en concert.

Nous avons vieilli. PJ Harvey, aussi. Mais nous le reprochons plus Ă  PJ Harvey qu’à nous-mĂȘmes. Toutefois, moi, qui ai moins bien compris les paroles de ses chansons que mon ami et sa collĂšgue, j’ai aimĂ© le concert. Jusqu’alors, je n’avais pas remarquĂ© le nombre de fois oĂč elle mentionne les mots « Amour Â» et  Â« JĂ©sus Â».  

Au plus prĂšs de la scĂšne afin de pouvoir faire mes photos, j’ai aimĂ© le dĂ©vouement de PJ Harvey. J’ignore si cela a toujours Ă©tĂ© comme ça mais nous savions que son concert commencerait Ă  20 heures piles comme annoncĂ© sur nos billets. Par ailleurs, des mesures ont Ă©tĂ© prises contre la revente des places de son concert au marchĂ© noir. Il vaut donc mieux avoir achetĂ© son entrĂ©e par les biais officiels. J’ai un peu oubliĂ© maintenant mais il me semble avoir payĂ© 55 euros pour ĂȘtre debout dans la fosse. Et, au dĂ©part, toutes les bonnes places prĂšs de la scĂšne m’ont semblĂ© dĂ©jĂ  prises.

PJ Harvey, ce 12 octobre 2023, Ă  l’Olympia. Photo©Franck.Unimon

La « prĂȘtresse du Rock Â» PJ Harvey (c’est ainsi qu’elle a Ă©tĂ© surnommĂ©e dans la presse pour ces concerts) a dĂ©veloppĂ© sa conscience du monde. J’ai lu ou appris qu’elle se prĂ©occupait de ce que nous faisions de notre planĂšte, de ce qui s’y passait. Devenue plus cĂ©rĂ©brale sans doute qu’à ses « dĂ©buts Â», comme Björk,  sa musique rentre moins dans le tas qu’avant. Et, il y a beaucoup moins de gravats aprĂšs les passages de sa voix et de sa guitare. Or, visiblement, c’est ce que un certain nombre d’entre nous attendaient.

PJ Harvey change d’ailleurs plusieurs fois de guitare. Il s’agit donc d’un instrument qui lui reste familier. Le public reste sage ou tout en dĂ©votion. Il s’anime d’emblĂ©e lorsque l’artiste entame certains de ses anciens « tubes Â» tels que Down by the water par lequel j’avais, je crois, entendu parler d’elle pour la premiĂšre fois dans un film de Laetitia Masson avec Sandrine Kiberlain. Alors que Laetitia Masson, dans les annĂ©es 90, Ă©tait une rĂ©alisatrice de films d’auteurs qui Ă©talonnait son Ă©poque.

PJ Harvey a aussi entonnĂ© Dress mais, si j’ai bien entendu, aucun titre de l’album Is it Desire ?

Je n’aurais pas dĂ» pouvoir prendre toutes ces photos au concert de PJ Harvey. MĂȘme si dans la salle, j’ai bien vu des personnes prendre des photos, ou filmer, y compris Ă  proximitĂ© d’un des vigiles, avec tout ce qu’il fallait pour bien zoomer, j’ai aussi vu une personne devoir dĂ©poser son appareil photo Ă  la consigne avant d’entrer dans la salle.

Je suis content ou trĂšs content de ces photos. Et, je m’en sers non pas pour me faire du fric sur le dos de l’artiste et de celles et ceux qui travaillent avec elle, mais afin d’avoir des photos originales, mes photos, et pour restituer aussi bien que possible cette expĂ©rience qu’a Ă©tĂ© pour moi ce concert ainsi que l’Ɠuvre d’une artiste. Avec autant de sincĂ©ritĂ© que possible ainsi qu’avec les moyens dont je dispose pour mon blog.

Pour le diaporama de photos que j’ai fait et qui arrive Ă  la fin de cet article, j’ai choisi des anciens titres de PJ Harvey. Cela lui dĂ©plairait peut-ĂȘtre. Mais je crois que cela devrait faire plaisir Ă  celles et ceux qui, comme moi, ont vieilli, et ont conservĂ© une partie de leur jeunesse et de leur vitalitĂ© dans les fĂ»ts et les refus de ces titres.

Franck Unimon, ce mercredi 1er novembre 2023.

 

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Théùtre

Zingaro : Cabaret de l’exil femmes persanes conception Bartabas

Au théùtre Zingaro, à Aubervilliers, ce samedi 28 octobre 2023. Photo©Franck.Unimon

Zingaro : Cabaret de l’Exil femmes persanes (conception Bartabas)

 

Cela faisait des annĂ©es que j’avais entendu parler de Bartabas, du théùtre Zingaro, de « ses » chevaux et que j’avais envie d’aller les voir. J’avais aussi lu un ou deux articles sur lui. Ou peut-ĂȘtre une interview. Cela m’avait dĂ©cidĂ©.

Bartabas, aprÚs la représentation ce samedi 28 octobre 2023 au théùtre Zingaro. Photo©Franck.Unimon

Mais mes envies sont aussi des bagages que je tire derriÚre moi. On peut me trouver excentrique et original. Pourtant, je vis le plus souvent avec les badges, les numéros, les heures, les consignes ou les directions qui me sont attribuées et pour lesquelles je (me) suis renseigné.

Il faut des sorts contraires ou en ĂȘtre arrivĂ© Ă  un stade particulier dans son histoire personnelle, pour, un jour, ou par moments, renoncer complĂštement et oublier beaucoup de ce que Ă  quoi l’on a pu tenir pendant des annĂ©es. Ou faire le nĂ©cessaire pour que tout arrive.

Il a fallu que je me marie et devienne pĂšre pour que je pense cette annĂ©e Ă  offrir Ă  ma fille un spectacle de Bartabas comme cadeau d’anniversaire et que je l’y emmĂšne avec sa mĂšre.

J’avais bien vu un de ses spectacles. Mais c’était au chĂąteau de Versailles. Dans une autre vie avec une autre personne. Nous Ă©tions loin. Cela allait vite. Il Ă©tait difficile de bien distinguer ce qui se passait mĂȘme s’il m’en Ă©tait restĂ© quelques visions. Et, cela n’était pas au théùtre Zingaro.

Une des parties du théùtre Zingaro, Ă  Aubervilliers, ce samedi 28 octobre 2023, lĂ  oĂč s’est tenu la reprĂ©sentation. Photo©Franck.Unimon

Créé en 1989, situĂ© dans la ville d’Aubervilliers, je m’étais toujours imaginĂ© que le théùtre Zingaro Ă©tait difficile d’accĂšs. Que c’était soit trop loin ou soit trop cher.

Je suis pourtant nĂ© en banlieue parisienne et ai toujours vĂ©cu en banlieue parisienne. Un de mes cousins vit depuis plus de vingt ans dans la ville de Saint Denis. J’ai dĂ©jĂ  fait des voyages Ă  l’étranger et en France. J’ai aimĂ© ça et continuer d’aimer faire des voyages. A Paris et en Ăźle de France, je prĂ©fĂšre largement les transports en commun Ă  la voiture et je les emprunte trĂšs facilement depuis des annĂ©es.

Je n’ai peut-ĂȘtre pas assez aimĂ©.

Tout est fait pour pouvoir se rendre Ă  la station Fort d’Aubervilliers, par la ligne 7 du mĂ©tro, et aller au théùtre Zingaro. C’est mĂȘme beaucoup plus pratique que la voiture, le soir de la finale de coupe du monde de Rugby au stade de France entre la Nouvelle ZĂ©lande et l’Afrique du Sud.

Lorsque, tous les trois, nous partons dĂ©couvrir le théùtre Zingaro et son dernier spectacle Cabaret de l’Exil femmes persanes, le match de Rugby n’a pas encore dĂ©butĂ©. Et nous sommes Ă  quelques heures du passage Ă  l’heure d’hiver. Mais nous sommes un samedi soir, entre 18 heures et 19 heures, en pleines vacances de la Toussaint.

Il y a beaucoup de monde dans le mĂ©tro. Des touristes. Des personnes habillĂ©es pour sortir le samedi soir. Des amatrices et des amateurs de Rugby qui se rendent au « stade » (au stade de France) ou ailleurs pour regarder le match. Telle cette jeune femme plutĂŽt longiligne d’une vingtaine d’annĂ©es en face de qui je m’assieds, qui porte un maillot ( de Foot ou de Rugby ?) de l’équipe de France et des Ă©couteurs intra-auriculaires sans fil.

ArrivĂ©s Ă  la station Fort d’aubervilliers, juste avant le terminus, nous descendons et, tels des exilĂ©s, nous cherchons notre chemin.

Sous le chapiteau oĂč il est possible de se restaurer et de s’asseoir prĂšs du théùtre Zingaro, ce samedi 28 octobre 2023. Photo©Franck.Unimon

Le jeune homme noir (la vingtaine) devant lequel je me fige et que je salue avant de l’interroger tient son tĂ©lĂ©phone portable Ă  la main. Il est un petit plus grand que moi, debout, prĂšs de l’une des sorties du mĂ©tro.

A l’intonation et aux accents de sa voix comparativement Ă  mes expressions en Français « soutenu », je mesure Ă  la fois sa surprise mais aussi que nous sommes, lui et moi, de deux mondes diffĂ©rents mais aussi que nous sommes bien en banlieue.

Pourtant, nous venons d’Argenteuil et je suis nĂ© Ă  Nanterre. Argenteuil et Nanterre – lĂ  oĂč j’y ai vĂ©cu en immeuble HLM- n’ont rien Ă  voir avec Versailles, St Germain en Laye, Neuilly sur Seine ou le 6 Ăšme arrondissement de Paris.

Mais nous sommes nĂ©anmoins deux Ă©trangers lui et moi qui parlons alors dans une mĂȘme langue, le Français, tout en ayant- a priori- des perspectives trĂšs diffĂ©rentes.

Toujours sous le mĂȘme chapiteau que prĂ©cĂ©demment, ce samedi 28 octobre 2023, au théùtre Zingaro. Photo©Franck.Unimon

Je vois bien que le théùtre Zingaro, Bartabas, ça ne lui dit rien mĂȘme s’il est du quartier vraisemblablement et qu’il me renseigne. J’ai Ă©tĂ© pareil que lui, durant des annĂ©es, adolescent, lorsque je passais devant le théùtre des Amandiers, Ă  Nanterre, et que je voyais, Ă©tonnĂ© et dubitatif, des personnes faire la queue dans la rue afin d’y entrer. Nous avons habitĂ© Ă  environ dix minutes Ă  pied du théùtre des Amandiers jusqu’en 1985. Soit quatre ans avant la crĂ©ation du théùtre Zingaro Ă  Aubervilliers, ville qui, comme Nanterre, avait alors probablement un maire communiste.

Chaque fois que je connais un peu plus l’histoire du théùtre des Amandiers de Nanterre, je me rappelle avec une certaine amertume de ce genre d’opportunitĂ©s que j’ai pu rater Ă  cause, dĂ©jĂ , de mon infirmitĂ© :

Le manque de curiositĂ©, de volontĂ© et d’autonomie de pensĂ©e. Tout cela conduit Ă  la cĂ©citĂ© – morale, intellectuelle, psychologique- et Ă  la lĂąchetĂ© tant morale, que sociale et physique.

Ou, comme cela est mon cas, par moments, Ă  une sorte de rage, de colĂšre et d’amertume contre moi-mĂȘme. Parce-que j’ai une certaine mĂ©moire contre moi-mĂȘme.

Personne, dans mon histoire, dans mon quartier, dans mes relations ou dans ma famille n’avait pu ou n’avait su saisir la chance ou l’intĂ©rĂȘt que cela pouvait ĂȘtre, pour nous, personnes de banlieue, de milieu social modeste ou moyen, quelles que soient nos origines ou nos religions, d’avoir un tel lieu culturel prĂšs de chez nous.

MalgrĂ© les ambitions d’ouverture et de mixitĂ© sociale du théùtre des Amandiers et de tous les endroits ou de toutes les personnes qui lui ressemblent ou qui lui ont ressemblĂ©.

Pourtant, j’étais une personne normale.

Quelques uns des artistes aprÚs la représentation, ce samedi 28 octobre 2023 au théùtre Zingaro. Photo©Franck.Unimon

J’allais Ă  l’école, Ă  la bibliothĂšque. Je regardais la tĂ©lĂ©, le journal tĂ©lĂ©visĂ©. Je lisais. Je faisais mes devoirs, scolaires ou autres.
Et, lorsque je ne les faisais pas et les remplaçais par des bĂȘtises ou des mauvais comportements et que j’étais dĂ©masquĂ©, j’étais puni ou corrigĂ©, que ce soit Ă  l’école ou Ă  la maison. Mauvaise note, gifles, oreilles tirĂ©es, remontrances devant la classe, coups de ceinture Ă  la maison ou en public, engueulades.
Je jouais aussi au Foot avec les copains ou un autre sport. Je rigolais aussi avec eux. Je n’étais pas un isolĂ©. Je partais en vacances. En colonie ou avec ma famille. J’avais des rĂȘves et de l’imagination. J’avais une vie semblable Ă  d’autres. Et, j’apprenais ce qu’il y avait Ă  apprendre pour que tout se passe bien pour moi, par la suite.

En montant les marches nous amenant à la sortie du métro, ce samedi soir, sous la pluie qui ne nous avait pas quittés, il a fallu interroger deux ou trois autres personnes à une station de bus pour trouver le théùtre.

Un homme noir d’une cinquantaine d’annĂ©es qui vendait des marrons grillĂ©s sous la pluie et qui ne connaissait pas le coin. Une femme noire, large, la quarantaine, qui voyait avec dĂ©livrance son bus se rapprocher. C’est une seconde femme, Ă©galement noire, nettement plus ĂągĂ©e et plus svelte, Ă  cĂŽtĂ© d’elle, qui m’a rĂ©pondu que c’était sur le mĂȘme trottoir, un peu plus loin.

MalgrĂ© les panneaux indiquant le théùtre Zingaro dĂšs la sortie du mĂ©tro, la pluie, la nuit et l’inconnu faisaient de nous des myopes ou des presque aveugles. Nous aurions tout aussi bien pu nous Ă©garer un peu. Un grand centre commercial ou une autoroute restent mieux signalĂ©s. D’autant que, lorsque je cherche un endroit en me dĂ©plaçant Ă  pied, malgrĂ© les GPS et les plans devenus courants depuis des annĂ©es dans nos smartphones, je persiste Ă  chercher parmi les personnes que je croise dans la rue, les Ă©toiles qui vont m’indiquer ma route jusqu’à ma destination.

L’entrĂ©e du théùtre Zingaro se trouve Ă  Ă  peine cinq minutes Ă  pied de la station de mĂ©tro.

Les musiciennes et chanteuses, lors de la représentation : Firozeeh Raeesdanae, Shadi Fathi, Farnaz Modarresifar, Niloufar Mohseni. Photo©Franck.Unimon

Puisque l’on nous parlait d’un Fort, je m’attendais Ă  ce que le théùtre Zingaro se dĂ©couvre dans l’enceinte d’un fort et soit en quelque sorte invisible Ă  l’extĂ©rieur. Mais c’est depuis la rue que le théùtre Zingaro s’expose. C’est aussi un lieu, un monde, qui impose son architecture et son univers dĂšs l’accueil et la prĂ©sentation des billets.
Il m’a fait penser au théùtre du Soleil « d’Ariane » Mnouchkine qui se trouve Ă  la cartoucherie Vincennes dont Bartabas s’était sĂ»rement en partie inspirĂ© comme il s’était sĂ»rement, aussi, inspirĂ© du théùtre des Amandiers.

Alors qu’aujourd’hui existe une crise sĂ©vĂšre de l’immobilier et qu’il a pu se construire Ă  l’excĂšs des logements en dĂ©figurant certains quartiers, le théùtre Zingaro fait penser Ă  ce qui reste de certains millĂ©simes d’espaces conçus pour ĂȘtre beaux, pour ĂȘtre accueillants, pour ĂȘtre divertissants, pour ĂȘtre chauds, pour ĂȘtre confortables, pour ĂȘtre aĂ©rĂ©s, pour y venir en famille avec ses enfants, pour libĂ©rer et faire rĂȘver et rĂ©flĂ©chir celles et ceux qui y viennent ne serait-ce que pour y voir un spectacle. Et, l’on comprend vite que ce programme vaut le dĂ©placement mais aussi le prix que l’on peut mettre pour le vivre et/ou y assister. J’ai payĂ© 39 euros la place pour ma fille, et deux fois 59 euros pour ma compagne et moi afin d’ĂȘtre bien placĂ©s de maniĂšre Ă  ce que je puisse faire des photos.

Finalement, alors que je fais partie des mitrailleurs anarchiques de la prise de vue, je n’ai fait aucune photo durant le spectacle car j’ai trĂšs rapidement acceptĂ© de respecter au moins les chevaux et les artistes mais aussi l’état d’esprit du lieu.

Avant la reprĂ©sentation, le public a Ă©tĂ© d’ailleurs invitĂ© Ă  appliquer le mot « Respect » mais aussi Ă  « Ă©teindre son intelligence artificielle mĂȘme si cela est difficile pour certains ». Les photos de cet article ont donc Ă©tĂ© prises- sans flash comme toujours- avant la reprĂ©sentation ou Ă  la fin de celle-ci. Je ne suis pas trĂšs content de ces photos (il va vraiment falloir que j’apprenne Ă  me servir correctement de mes appareils photos). Par contre, je suis content d’ĂȘtre allĂ© au théùtre Zingaro et que cela ait plu Ă  ma compagne et Ă  notre fille. Et, je me demande si je vais y retourner bientĂŽt.

PrĂšs d’un des deux bars au théùtre Zingaro, aprĂšs la reprĂ©sentation, ce samedi 28 octobre 2023. Photo©Franck.Unimon. Sur les deux photos du bas, on peut reconnaĂźtre Bartabas, il y a quelques annĂ©es.

Il est plutĂŽt rare d’envier la caissiĂšre ou l’employĂ© d’un supermarchĂ© lorsque l’on part y faire ses achats. Mais on peut croire et espĂ©rer que celles et ceux qui travaillent au théùtre Zingaro y ont une belle vie ou se consacrent Ă  une Ɠuvre qui a son importance bien au delĂ  de sa valeur marchande. Alors qu’il est tant d’autres endroits oĂč l’on donne de soi oĂč par lesquels on passe oĂč croyance et espĂ©rance passent pour des expĂ©riences de dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©s qu’il importe d’éconduire et de dĂ©truire.

C’est en partie ce que raconte Cabaret de l’Exil Femmes persanes oĂč les principaux rĂŽles sont tenus par des femmes de diffĂ©rents profils. Une jeune femme naine ouvre le spectacle et dĂ©clame. D’autres, cavaliĂšres, danseuses, acrobates, chanteuses ou musiciennes ont d’autres silhouettes. Mais avec leurs partenaires masculins, toutes rĂ©clament leur droit de vivre ainsi que leur droit Ă  l’Amour.

Bien-sĂ»r, on ne peut que penser Ă  ce qui se passe depuis quelques temps en Iran mais aussi partout oĂč des femmes sont martyrisĂ©es et tuĂ©es. Cela peut aussi se passer en France, prĂšs du théùtre Zingaro mais aussi Ă  Versailles ou dans le 6Ăšme arrondissement de Paris.

Le cercle dans lequel se déroule le spectacle ainsi que ses diverses dimensions vise sans doute à nous dire que notre vie se déroule souvent sur plusieurs niveaux. Il y a ce sur quoi nous fixons la plus grande partie de notre attention, ce vers quoi, aimantés, obsédés, nous nous dirigeons. Et, il y a tout ce qui nous entoure de merveilleux, de fantastique ou de possible et que nous ne voyons pas ou que nous ratons.

Ainsi, c’est la premiĂšre fois, oĂč, en me rendant Ă  un spectacle, j’ai Ă©tĂ© surpris d’ĂȘtre reçu par la chaleur thermique prĂ©sente alors que nous venions nous asseoir aux places que j’avais rĂ©servĂ©es et payĂ©es. Je m’attendais Ă  ce qu’il fasse froid. Pour moi, il fallait qu’il fasse froid dans l’enceinte du théùtre car, dehors, en plus de la pluie, la tempĂ©rature avait baissĂ© ces derniers jours. Et, pour les chevaux, je me disais qu’il valait mieux qu’il fasse assez froid.

Par ailleurs, devant nous, comme pour d’autres, la table Ă©tait mise : une thĂ©iĂšre remplie, quatre petits verres, quatre boudoirs et quatre serviettes en papier Ă©taient disposĂ©s sur notre table de quatre. Je ne pouvais que saluer la jeune femme qui nous avait prĂ©cĂ©dĂ© et, ensuite, lui proposer de lui servir du thĂ© comme je l’avais fait au prĂ©alable pour ma compagne et notre fille. Ce fut un contraste avec la brutalitĂ© et la totalitĂ© des concerts, des festivals, des piĂšces de théùtre, des sĂ©ances de cinĂ©ma et autres manifestations culturelles auxquels je suis parti assister et oĂč , gĂ©nĂ©ralement, c’est toujours chacun pour soi ou pour nos connaissances. MĂȘme si nous venons admirer ou dĂ©couvrir la mĂȘme Ɠuvre ou le mĂȘme artiste que beaucoup d’autres inconnus, nous nous comportons en ces circonstances de la mĂȘme façon que nous pouvons le faire dans les transports en commun, en voiture ou sur notre lieu de travail ! En troupeaux sĂ©parĂ©s ou en individualitĂ©s forcenĂ©es.

Pour conclure et pour l’anecdote, et, je suis un peu dĂ©solĂ© d’ĂȘtre quelque peu paralysĂ© avec ça car je sais que ce sujet revient assez rĂ©guliĂšrement dans mes articles :

La reprĂ©sentation de Cabaret de l’Exil Femmes persanes Ă  laquelle nous avons assistĂ© hier soir Ă©tait complĂšte ainsi que celle d’aujourd’hui. Mais lorsque les lumiĂšres se sont rallumĂ©es, en plus de moi, j’ai vu un seul homme noir dans la salle, au sein du public.

Je ne lui ai pas parlĂ©. Cependant, Ă  vue d’Ɠil, je dirais qu’il avait une bonne quarantaine d’annĂ©es.
Il demeure un paradoxe entre, d’un cĂŽtĂ©, beaucoup de noirs (et d’autres) prĂ©sents ou qui vivent aux alentours du théùtre Zingaro depuis des annĂ©es et si peu, manifestement, qui, de leur propre volontĂ© ou par curiositĂ©, viennent y voir ce qui s’y passe.

On devrait peut-ĂȘtre inventer le service culturel obligatoire.

Cela existe peut-ĂȘtre dĂ©jĂ  quelque part. A partir d’un certain Ăąge, et pour une certaine durĂ©e, on devrait peut-ĂȘtre obliger les jeunes femmes et les jeunes hommes, quelles que soient leurs origines, le volume de leur poitrine, la taille de leur pĂ©nis, celle de leurs religions, de leur classe sociale et de leur compte en banque, Ă  quitter pendant un certain temps leur quartier, leur famille et leur environnement afin de partir dĂ©couvrir mais aussi afin de participer Ă  la crĂ©ation d’oeuvres culturelles et artistiques diverses.

Et, toute personne ou toute famille qui s’y opposerait devrait ĂȘtre sanctionnĂ©e moralement ou pĂ©nalement ou considĂ©rĂ©e comme dĂ©sertant ses obligations civiques envers ses semblables. Ou perçue comme potentiellement dangereuse. AprĂšs tout, nous sommes beaucoup Ă  devoir quitter un jour notre famille, nos amis, nos copines, nos copains et notre environnement pour des obligations au moins d’ordre Ă©conomique ou personnelles. Et nous faisons avec gĂ©nĂ©ralement.

Au théùtre Zingaro, aprÚs la représentation, ce samedi 28 octobre 2023. Un feu de camp avait été fait. Photo©Franck.Unimon

La culture et l’Art, Ă  eux seuls, ne sauvent pas de la barbarie, mais avoir Ă  les crĂ©er, Ă  les transmettre, Ă  y assister et rencontrer vĂ©ritablement d’autres personnes mais aussi des figures qui y contribuent, cela procure sans doute plus facilement d’autres ambitions, d’autres armes, d’autres Ăąmes mais aussi d’autres responsabilitĂ©s que celles de morceler sa prochaine ou son prochain pour de vrai ou de les ensorceler avec des barbelĂ©s.

Franck Unimon, ce mercredi 1er novembre 2023.

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Catherine Breillat

Catherine Breillat, aussi insupportable que remarquable

Catherine Breillat, aussi insupportable que remarquable

 

Il y a trois ans, la citer dans mon article sur le film ADN de MaĂŻwenn qui allait sortir en 2020 a sans doute contribuĂ© Ă  me faire rayer de la liste des journalistes pouvant la rencontrer ou voir ses prochains films en projection de presse. ( ADN-un film de MaĂŻwenn au cinema le 28 octobre 2020 )

Cela a sans doute beaucoup dĂ©plu Ă  l’attachĂ© de presse qui s’occupe de ses films.

Comparer MaĂŻwenn Ă  Catherine Breillat ?!

Pour qui je me prenais ?!

Pourtant, j’avais aimĂ© ADN de MaĂŻwenn comme ses films prĂ©cĂ©dents et, cela, depuis son tout premier : Pardonnez-moi (2006).  

Mais je n’avais pas encore tout Ă  fait compris, alors, Ă  quel point Catherine Breillat peut exaspĂ©rer les autres  (elle dit elle-mĂȘme qu’elle est souvent « dĂ©testĂ©e ») mais aussi comme on peut s’empresser de s’éloigner d’elle comme d’une personne qu’il faudrait de toute urgence rebouter. Elle pourrait faire penser un petit peu au boxeur Muhammad Ali, Breillat, lorsque celui-ci fanfaronnait et que ses adversaires ou ses dĂ©tracteurs se disaient entre eux :

« Il faudrait lui faire fermer sa gueule une bonne fois pour toutes ! Oui, mais qui peut le faire ? Â».

Si la maladie de Parkinson finit par assagir Muhammad Ali, un AVC et une hĂ©miplĂ©gie avaient entrepris de faire Ă  peu prĂšs pareil pour Breillat :

« Ma mĂšre m’a coupĂ© horizontalement et l’hĂ©miplĂ©gie, verticalement » raconte Breillat dans ce livre d’entretiens avec Murielle Joudet, sorti rĂ©cemment ( Je ne crois qu’en moi) peu aprĂšs son dernier film L’étĂ© Dernier ( au cinĂ©ma depuis le 13 septembre 2023). Un film peut-ĂȘtre Ă©clipsĂ© par la prĂ©sence sur les Ă©crans de Anatomie d’une chute (Palme d’or Ă  Cannes) derniĂšre rĂ©alisation de Justine Triet qui rencontre un bon succĂšs en salles depuis sa sortie le 23 aout 2023 (plus d’un million  de spectateurs).  Un film que j’ai vu Ă  un jour prĂšs aprĂšs ou avant celui du dernier Breillat et dont mĂȘme le titre peut aussi l’évoquer.

Avant que, ces deux ou trois derniers mois, je ne rĂ©entende parler de Breillat, rĂ©alisatrice, la derniĂšre fois que je l’avais Ă©voquĂ©e, un peu amusĂ©, et en avais entendu parler, c’était vers 2010 ou 2011. Je venais d’assister Ă  un dĂ©bat lors du festival ChĂ©ries, chĂ©ris au forum des halles.

Peut-ĂȘtre Ă  propos du thĂšme « Qu’est-ce qu’ĂȘtre Queer ? Â». Je ne connaissais pas le terme. Je me demandais de quoi il s’agissait.

Aujourd’hui, j’en sais Ă  peine beaucoup plus mais, ce soir-lĂ , j’avais entendu et appris que le rĂ©alisateur Jacques Demy Ă©tait homosexuel. Cela semblait un fait Ă©tabli mais aussi une sorte de prix ou de trophĂ©e acquis Ă  la cause LGBT. C’était donc important, lors de cette soirĂ©e, de dire que Jacques Demy, le rĂ©alisateur et modĂšle admirĂ© et reconnu par la critique et le monde du cinĂ©ma, Ă©tait homosexuel.  

C’était l’équivalent de James Brown chantant des annĂ©es plus tĂŽt:

« Say it loud, I’m Black and proud ! Â». LĂ , on Ă©tait dans « Say it loud, I’m gay and proud ! Â».

Je comprenais la logique. MĂȘme si j’étais un peu Ă©tonnĂ© par ce besoin de dire.

A ce jour, je n’ai vu aucun des films de Demy mĂȘme si je connais bien sĂ»r de nom au moins Les Parapluies de Cherbourg. « On Â» nous en parle tellement ainsi que des sƓurs Deneuve si magnifiques


 Je le regarderai sans doute un jour mais je trouve que les critiques idolĂątrent beaucoup Demy  ce qui me donne beaucoup envie de m’en Ă©loigner. Et puis, je n’ai pas encore perçu, pour moi, la nĂ©cessitĂ© primordiale de voir ses films.

Lors de ce dĂ©bat trĂšs sĂ©rieux ( je ne me rappelle pas qu’il y ait eu beaucoup d’humour lors des interventions) j’avais aussi entendu un participant estimer que le cinĂ©ma de François Ozon ( dont j’ai vu et aimĂ© plusieurs de ses premiers films) Ă©tait « queer Â».

Assis en haut de cette salle amphithéùtre plutĂŽt remplie dans mon souvenir, j’entendais et dĂ©couvrais ce soir-lĂ  des avis et des visions qui m’étaient Ă©trangers.

A la fin de ce dĂ©bat, alors qu’un de ses animateurs en Ă©tait Ă  remonter les marches afin de sortir de la salle, je lui avais dit, un peu provocateur et amusĂ©, alors qu’il s’avançait devant moi :

« Il y a une personne dont vous avez oubliĂ© de parler : Catherine Breillat
 Â».

Celui-ci m’avait alors regardĂ©, et, comme on annonce un dĂ©cret, m’avait rapidement et trĂšs sĂ©rieusement rĂ©pondu :

« Catherine Breillat ? Elle s’est faite escroquer, je crois ! Â». Puis, aussitĂŽt, il Ă©tait parti, me plantant-lĂ  avec des restes me permettant de comprendre que Catherine Breillat Ă©tait dĂ©finitivement sur la touche. Que l’on n’entendrait plus parler d’elle. Que sa bouche avait Ă©tĂ© clĂŽturĂ©e pour de bon.

J’avais alors Ă  peine entendu parler du fait qu’elle s’était en effet bien faite (dĂ©)plumer par Christophe Rocancourt- le « bien connu» arnaqueur des stars- alors qu’elle Ă©tait encore quelque peu convalescente d’une hĂ©miplĂ©gie contractĂ©e Ă  la suite d’un AVC.

Comme je suis un demi-tiĂšde et une personne fonciĂšrement peu curieuse, je n’avais pas beaucoup poussĂ© mes recherches pour chercher Ă  en savoir plus. Catherine Breillat n’était pas une de mes proches. Et, je n’avais pas encore forcĂ©ment compris, alors, comme ce qu’elle Ă©tait ou pouvait raconter m’importait beaucoup plus que le fait de voir Les Parapluies de Cherbourg (1963) de Jacques Demy.

Il nous faut parfois des annĂ©es pour nous apercevoir que telle personne ou telle Ɠuvre a une importance trĂšs particuliĂšre pour nous. L’une des premiĂšres fois oĂč je me rappelle avoir eue cette impression, ce fut aprĂšs la dissolution du groupe
.NTM.

Tant que le groupe NTM de Kool Shen et de Joey Starr Ă©tait en activitĂ©, je les Ă©coutais et les regardais plus ou moins de loin. Je m’accrochais plutĂŽt Ă  leurs frasques que je rĂ©prouvais moralement. Je promettais alors Ă  Joey Starr une existence courte et un Ă©pilogue existentiel douloureux, honteux et brutal en raison de ses excĂšs. Je ne lui donnais pas plus de quarante annĂ©es de vie.

Je prĂ©fĂ©rais MC Solaar Ă  NTM. Je l’avais vu en concert au ZĂ©nith une fois. MC Solaar Ă©tait tellement plus classe, plus respectable. Il n’avait pas ces tics de langage ou gestuels auxquels, schĂ©matiquement, on identifiait et auxquels on identifie encore les personnes de la banlieue. Je venais aussi de la banlieue et je n’avais pas les attitudes et les propos de Joey Starr et Kool Shen. Je n’aspirais pas Ă  leur ressembler ou Ă  ce que l’on me confonde avec eux. Eux, c’étaient des mauvais garçons. Ils Ă©taient violents, ils Ă©taient agressifs, ils parlaient mal, se comportaient mal. Avec eux, tout pouvait partir en vrille Ă  n’importe quel moment. Or, moi, j’avais plutĂŽt l’esprit gazon de jardin britannique. Tout devait ĂȘtre impeccable et carrĂ© au centimĂštre prĂšs comme sur le stade de Wimbledon. Il ne devait pas y avoir de trous ou de bouteilles vides de biĂšre, de rhum ou de vodka par terre. Kool Shen et Joey Starr, c’était sĂ»r que si vous les invitiez chez vous, qu’en repartant, ils vous laissaient plein de mĂ©gots partout y compris dans les yaourts et les pots de confiture. En plus, votre logement Ă©tait dĂ©labrĂ© et, Ă  coup sĂ»r, ils (ou leurs copains ) vous auraient tabassĂ©s entretemps pour vous remercier de les avoir invitĂ©s ou parce qu’il n y avait pas assez de filles et que la musique ne leur avait pas plu.

Je n’aurais pas pris le risque de passer une soirĂ©e avec Kool Shen et Joey Starr. Alors qu’avec MC Solaar, j’aurais pu l’envisager. Nous aurions bu du thĂ©, discutĂ© de la banlieue et parlĂ© philosophie
.

MĂȘme si le voir en concert m’avait
.déçu. Mais pendant des annĂ©es, j’ai eu du mal Ă  faire mon coming out et Ă  reconnaĂźtre que son concert m’avait laissĂ© frustrĂ©.  Cela voulait  bien dire quelque chose mĂȘme si, sur scĂšne, et bien entourĂ© ( Soon MC, Les DĂ©mocrates D
) MC Solaar ne s’était pas mĂ©nagĂ©.

Les NTM, eux, j’avais eu peur d’aller les voir en concert. Pour leur public. Seul Ă  vouloir m’y rendre, je n’avais pas envie de me faire agresser en plein concert par une bande. Si on m’avait obligĂ© Ă  y aller, peut-ĂȘtre que je serais restĂ© trĂšs prudemment proche de la premiĂšre issue de secours. Et, si on m’y avait mal regardĂ©, peut-ĂȘtre que je me serais gelĂ© instantanĂ©ment sur place. Je n’aurais peut-ĂȘtre pas pu Ă©couter grand chose. J’aurais peut-ĂȘtre passĂ© la plus grande partie de mon temps, durant le concert, Ă  observer et Ă  surveiller autour de moi si quelqu’un me voulait du mal.  Et, Ă  la fin, je serais peut-ĂȘtre parti en courant. En sprintant pendant au moins cinq cents mĂštres. Jusqu’à ce que je me sente en sĂ©curitĂ© en quelque part.

Donc, Ă  la place de NTM, j’étais allĂ© voir, toujours seul, le premier concert de Me’Shell NdĂ©geocello Ă  l’ElysĂ©e Montmartre, je crois, aprĂšs son premier album : Plantation Lullabies. Une ambiance beaucoup plus safe. Sur scĂšne, Me’Shell nous avait fait un festival. Chant, claviers, basse, prĂ©sence, avec ses petites lunettes rondes et son allure longiligne/androgyne, elle avait tenu son groupe et nous avait servi de la vie. A aucun moment, je ne m’étais senti menacĂ©. ( Me’Shell NdĂ©geocello au festival Jazz Ă  la Villette ce 1er septembre 2023 )

Pour essayer de me racheter de ma lĂąchetĂ© concernant NTM, j’étais allĂ© voir I Am Ă  l’Olympia. Ils y avaient fĂȘtĂ© leur million d’albums vendus mais aussi entonnĂ© leur Je chante le Mia. Un des meilleurs concerts auxquels j’ai assistĂ©s tant pour les artistes que pour l’ambiance dans la salle. Mais aussi pour avoir la vie sauve peut-ĂȘtre.

C’était dans les annĂ©es 90. Alors que maintenant, Ă©couter du RAP, aller Ă  un concert de Rap, c’est tout Ă  fait mainstream. Vous allez rencontrer des personnes de bonne famille, d’un (trĂšs) bon milieu social, trĂšs bonnes Ă©tudes, blanc cachemire, vous dire qu’elle sont allĂ©es voir tel artiste de Rap ou les entendre employer des formules telles que « Je m’en bats les couilles Â» comme si c’était normal.

C’est Ă  peu prĂšs au milieu des annĂ©es 2000, aprĂšs avoir appris la dissolution du groupe NTM, aprĂšs quatre albums, que j’avais commencĂ© Ă  comprendre que plusieurs de leurs titres avaient Ă  voir avec mon histoire. Tant qu’ils faisaient partie du dĂ©cor sonore ou mĂ©diatique et semblaient permanents, je ne leur prĂȘtais pas une attention particuliĂšre ou alors, plutĂŽt pour rĂ©prouver ou craindre leurs maniĂšres et leurs façons de faire.

Leurs apparences me dĂ©rangeaient. Ce n’était pas comme ça qu’il fallait faire. Pour tout dire, Ă  l’époque, je trouvais mĂȘme Joey Starr trĂšs moche alors qu’aujourd’hui, lorsque je revois des images de lui Ă  cette Ă©poque, je le trouve beau gosse. C’est Ă©tonnant, hein ?

Lorsque Kool Shen et Joey Starr ont finalement disparu du dĂ©cor sonore et mĂ©diatique en tant que NTM, je me suis aperçu qu’il me manquait quelque chose. Et, avec Breillat, il y a sĂ»rement eu le mĂȘme phĂ©nomĂšne et la mĂȘme prise de conscience.

Assez ironiquement, l’histoire ou l’avenir, m’a donnĂ© en quelque sorte raison.

Puisque, par la suite, Joey Starr a commencĂ© Ă  faire du cinĂ©ma ( il m’a tout de suite convaincu en tant qu’acteur) et a rencontrĂ© MaĂŻwenn au moins pour faire le film Polisse (2011) qui avait marquĂ© le festival de Cannes, une annĂ©e oĂč j’y avais Ă©tĂ© comme journaliste de cinĂ©ma.

J’y avais alors croisĂ© une journaliste (pour Le Parisien, je crois) d’une bonne quarantaine d’annĂ©es toute fiĂšre de me rĂ©pondre qu’elle allait interviewer Joey Starr !

L’attachĂ© de presse qui s’occupait du film Polisse de MaĂŻwenn Ă©tant fĂąchĂ© avec le mĂ©dia cinĂ©ma (le mensuel papier Brazil) pour lequel j’écrivais, j’avais, moi, Ă©tĂ© privĂ© « de Â» Joey Starr comme l’on est privĂ© de dessert. Et, j’étais parti interviewer ValĂ©rie Donzelli pour La Guerre est dĂ©clarĂ©e, film qu’elle avait co-rĂ©alisĂ© avec JĂ©rĂ©mie ElkaĂŻm, Ă©galement prĂ©sent en tant qu’acteur dans Polisse.

 

De son cĂŽtĂ©, Kool Shen, lui, l’autre moitiĂ© de NTM, a fini par incarner Christophe Rocancourt au cinĂ©ma dans la fiction que Breillat a tirĂ©e de sa rencontre avec celui-ci d’aprĂšs son ouvrage Abus de faiblesse dont j’ai terminĂ© la lecture hier soir.

 

Joey Starr/ Maïwenn, Kool Shen/ Catherine Breillat, il sera difficile de me convaincre que l’une et l’autre n’ont absolument rien en commun.

Par ailleurs, que ce soit chez l’une ou chez l’autre, on peut trouver, dans leur cinĂ©ma, plutĂŽt que du Jacques Demy, du Pialat, du Jean Yanne ou mĂȘme
du Jean-Pierre Mocky. Je sais qu’en Ă©crivant ça, je leur attribue des rĂ©fĂ©rences « masculines Â» mais ce n’est pas une insulte. D’autant que, dans une certaine mesure, malgrĂ© leur machisme et leurs outrances, ces trois artistes masculins ont sans doute, aussi, eu des traits fĂ©ministes
.et fĂ©minins. Si l’on se rappelle, aussi, leur insolence, leur attachement Ă  leur indĂ©pendance ou leur mĂ©pris pour certaines convenances, on doit bien parvenir Ă  dĂ©boucher Ă  nouveau sur des artistes tels que Catherine Breillat, MaĂŻwenn
 NTM ou d’autres.

J’avais donc vu juste, Ă  la fin de ce dĂ©bat sur la question « Queer Â», en mentionnant Catherine Breillat. Et, j’avais aussi vu juste, dans mon article sur le film de MaĂŻwenn qui venait de sortir, de la citer Breillat Ă  nouveau. Sauf que je l’avais fait intuitivement comme je le fais, aussi, de l’usage de certains mots ou de certaines tournures de phrases sans ĂȘtre toujours capable, sur le moment, de l’expliquer ou de le thĂ©oriser.

Aujourd’hui, ce 1er novembre 2023, jour de la Toussaint, s’il me plait bien sĂ»r de parler de Catherine Breillat parce-que c’est le jour de la Toussaint, bien que je ne sache pas trĂšs bien dans les dĂ©tails Ă  quoi cela correspond Ă  part pour rĂ©citer que c’est « le jour de la fĂȘte des morts Â», je peux un peu plus expliquer ce qui me tient chez Breillat.

D’abord, il est difficile de se dĂ©barrasser de Catherine Breillat. Elle est toujours quelque part en train de mijoter une recette ou une action qui nous sera servi Ă  table Ă  un moment ou Ă  un autre, qu’on le dĂ©cide ou non.

Lorsque j’ai commencĂ© Ă  essayer de me rappeler par quel film je l’ai dĂ©couverte la premiĂšre fois, je me suis trompĂ©. J’avais oubliĂ© le titre. J’ai essayĂ© Parfait Amour (1996), Romance ( 1999). Ça ne collait pas. L’histoire dont je me rappelais, avec l’acteur Patrick Chesnay, ne figurait dans aucune distribution des films de Breillat que je regardais. L’histoire d’une femme, mariĂ©e, qui ne parvenait pas Ă  faire le deuil de son histoire d’amour avec son amant. Deuil difficile que son mari, Patrick Chesnais, encaissait stoĂŻquement avec cette patte qui lui est spĂ©cifique, Mi-droopy, mi-Pierre Richard.

A la fin du film, la femme, qui passait par tous les Ă©tats, finissait par se jeter dans une riviĂšre depuis un gros rocher la surplombant d’une bonne dizaine de mĂštres. Puis, elle rĂ©apparaissait, bien vivante, Ă  la surface. Pour moi, c’était du Breillat.

HĂ© bien, c’était du Brigitte RouĂ€n qui jouait d’ailleurs le rĂŽle principal ! Mais lorsque l’on regarde le titre du film, rĂ©alisĂ© en 1996, on aurait pu dire que c’était du Breillat :

Post-coĂŻtum, animal triste.

Dans son film Romance, on retrouve de ça. Mais on retrouve, aussi, la mĂȘme colĂšre et la mĂȘme violence que peut mettre MaĂŻwenn dans son Pardonnez-moi . Sauf que dans Romance, Breillat s’en « prend Â» Ă  l’Amour, au couple amoureux. C’est son sujet. Tandis que MaĂŻwenn ( mais je n’ai pas vu Mon Roi, rĂ©alisĂ© en 2015 ) s’attaque plus Ă  la famille. MĂȘme si j’ai relevĂ© que dans Je ne crois qu’en moi, le livre d’entretiens livrĂ© par Murielle Joudet, s’il est rĂ©guliĂšrement fait allusion Ă  sa mĂšre, avec laquelle elle a nouĂ© des relations trĂšs difficiles, et Ă  sa sƓur, son pĂšre n’est jamais mentionnĂ© une seule fois. Au point que j’ai cru que celui-ci Ă©tait dĂ©cĂ©dĂ© lorsqu’elle Ă©tait trĂšs jeune alors que dans les faits, il semble que non.

Sur la table de chevet de Breillat mais aussi Ă  l’intĂ©rieur de ses chevilles,, il doit sans doute y avoir en permanence une sorte de plan qui, toujours, la ramĂšne, vers ça. Le couple, l’Amour.

Et, elle bĂ©tonne, la Breillat. On peut dire, on a le droit de dire, qu’elle tringle sec et dur, Ă  mĂȘme la croupe, le sujet du couple et de l’Amour, Breillat.

C’est sans dĂ©tour.

S’il est interdit d’en parler ou d’y aller, c’est que c’est pour elle. Et, elle y va, Breillat. MaĂŻwenn, pour moi, n’est pas trĂšs diffĂ©rente. Elle, aussi, recherche le saut d’obstacles.

A cĂŽtĂ© de ça, on comprendra que L’Anatomie d’une chute de Justine Triet, mĂȘme s’il m’a plu (il m’a mĂȘme Ă©tĂ© recommandĂ© par mon thĂ©rapeute) m’a moins touchĂ© que L’étĂ© dernier de Catherine Breillat.

Dans L’étĂ© dernier, sorti donc il y a presque deux mois ( le 13 septembre), j’ai retrouvĂ© tout Breillat. Ses excĂšs, sa franchise «  Oui, c’est vrai que c’est beau, l’Amour conjugal mĂȘme si on s’emmerde Â» ( Breillat, dans le dernier livre d’entretiens sorti rĂ©cemment intitulĂ© Je ne crois qu’en moi).

Son humour.

Il peut m’arriver d’ĂȘtre mal Ă  l’aise devant des images de Breillat. Mais je ne peux pas dire que c’est faux. Breillat montre ce qui peut arriver ou ce qui arrive. Elle ne nous montre pas ce qui doit ou devrait arriver.

J’ai parlĂ© de Pialat, Jean Yanne, Mocky pour Breillat. Mais j’ai aussi pensĂ© Ă  Rohmer dont le cinĂ©ma me plait moins. Pialat, c’est quand mĂȘme celui qui a rĂ©alisĂ©, avec MarlĂšne Jobert et Jean-Yanne :

Nous ne vieillirons pas ensemble.

Ça a quand mĂȘme plus d’abattage que ce que peuvent se susurrer, avec un glaçon dans la bouche, les protagonistes des films de Rohmer que j’ai envie de voir se faire dĂ©capiter dans un film de zombies. Alors que dans les films de Pialat, Breillat ou MaĂŻwenn, leurs personnages s’occupent du service aprĂšs vente des aimables rĂ©glements de comptes.

J’ai oubliĂ© de dire que Breillat me fait penser, aussi, Ă  Cioran :

«  L’homme va disparaĂźtre. C’est ce que j’ai dit un jour. Depuis, j’ai changĂ© d’avis : Il doit disparaĂźtre Â».

J’en profite pour me rappeler de la premiĂšre fois que j’avais entendue la voix de Catherine Breillat. Une trĂšs belle voix, fort agrĂ©able. Dans son livre d’entretiens, Breillat dit qu’elle a Ă©tĂ© une trĂšs belle femme, avec une poitrine affolante, mais elle parle seulement de son physique et non de sa voix, pour moi, trĂšs sĂ©duisante. Je m’attendais davantage Ă  une voix de crĂ©celle vus ses films.  

Or, lorsque j’ai entendu la voix de Breillat pour la premiĂšre fois, c’était pour l’entendre dire :

« Les acteurs qui ne se donnent pas, moi, je les dĂ©teste ! Â».

Dans Abus de faiblesse, qu’elle a Ă©crit avec l’aide de Jean-François KervĂ©an, elle affirme :

« En tant que rĂ©alisatrice, je suis la propriĂ©taire des corps Â».

On peut reprocher Ă  Breillat ses mĂ©andres bourgeois, sa mauvaise foi, son Ă©gocentrisme, sa nĂ©gligence envers celles et ceux qu’elle est censĂ©e protĂ©ger et non exposer.

Il demeure que , sans employer les termes  dĂ©sormais trĂšs Ă  la mode tels que « dĂ©construire Â», « empowerment Â», « transgresser Â», sans s’affirmer ĂȘtre une personne « rock and roll Â» et sans ĂȘtre une influenceuse pourvue de millions de followers, Breillat est, pense et fait ce que d’autres ne font qu’annoncer, fantasmer ou rĂ©pĂ©ter.

Breillat, toute entiĂšre, n’en fait qu’à sa tĂȘte. Elle le fait comme quelqu’un d’insupportable peut le faire mais aussi comme un Joao CĂ©sar Monteiro que j’ai Ă©tĂ© Ă©tonnĂ© qu’elle cite et dont La ComĂ©die de Dieu (1995)  m’avait époustouflĂ©. Pour aimer ce film, il faut au moins aimer les gentils fous, la fantaisie, l’insolence, mais aussi le plaisir et l’érotisme.

C’est comme cela que je m’explique que Breillat puisse ĂȘtre l’amie de la rĂ©alisatrice Claire Denis (je l’ai appris en lisant Abus de faiblesse). Mais c’est aussi comme ça que je m’explique l’apparition dans L’étĂ© dernier de l’avocat- aux extrĂȘmes limites de la loi et des bonnes convenances- Karim Achoui.

Karim Achoui, en plus d’ĂȘtre cet avocat douĂ©, rouĂ© et charismatique trĂšs fortement soupçonnĂ© de baigner dans le grand banditisme, serait ou a Ă©tĂ© un des « amis Â» de Christophe Rocancourt d’aprĂšs ce qu’en dit Breillat Ă©galement dans Abus de faiblesse, paru en 2009. Karim Achoui est celui qui a « Ă©crit Â» en 2008 Un avocat Ă  abattre  d’aprĂšs la tentative d’assassinat dont il a Ă©tĂ© victime en 2007. On peut le voir, Ă  l’image de Rocancourt, mais aussi de Breillat, comme quelqu’un qui joue ou a  souvent jouĂ© sa vie- et ses rĂ©ussites- Ă  la roulette :

Achoui, avec son savoir faire avec la loi et son mĂ©tier d’avocat ; Rocancourt avec son habilitĂ© Ă  habiter ses mensonges et Ă  y faire entrer et participer – en toute confiance, jusqu’à les amener Ă  un Ă©tat avancĂ© de dĂ©pendance-  ses victimes ; Breillat, avec son Ɠuvre cinĂ©matographique et littĂ©raire dans lesquelles elle transpose sa conscience et son intimitĂ©.

Breillat aurait Ă©tĂ© capable de suivre le tueur en sĂ©rie Guy Georges dans une chambre d’hĂŽtel, de lui faire payer la chambre, de lui faire une scĂšne, sans coucher avec lui, de l’étudier et de lui parler toute la nuit de telle façon, qu’à la fin, soulagĂ© d’ĂȘtre dĂ©livrĂ© d’elle, Guy Georges aurait pu s’exclamer : « Elle m’a pris la tĂȘte ! Â».

Pour ces quelques raisons autant que pour ces dĂ©raisons, je n’ai pas fini de voir ou revoir, mais aussi de lire ou d’entendre les propos et les Ɠuvres de Madame Catherine Breillat, aussi insupportable que remarquable. J’aimerais bien, si elle le peut, si elle le veut, que Catherine Breillat fasse quelque chose avec « l’autre Â» Catherine, celle qui reste des Parapluies de Cherbourg de Demy. Mais c’est peut-ĂȘtre dĂ©jĂ  trop tard ou cela l’a peut-ĂȘtre toujours Ă©tĂ©. AprĂšs tout, LĂ©a Drucker dans L’étĂ© dernier, c’est un peu Catherine Deneuve ou Isabelle Huppert, plus jeunes.

Franck Unimon, ce mercredi 1er novembre 2023.

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Survie

Survival Expo Juin 2023 premiĂšre partie

Bunker Ă  vendre Ă  la Survival Expo en juin 2023. FacilitĂ©s de paiement proposĂ©es. Aucune l’aide de l’Etat fournie pour l’instant. Photo©Franck.Unimon

 

 

Survival Expo juin 2023-PremiĂšre partie

 

Coming out survivaliste

« Ohhh, le survivaliste ! » s’est marrĂ© A… au tĂ©lĂ©phone, un de mes amis, alors que je venais de lui apprendre que j’avais prĂ©vu de me rendre Ă  la Survival Expo 2023. EvĂ©nement qui, cette annĂ©e, pour la premiĂšre fois, allait se dĂ©rouler dans le parc floral de Vincennes. Non loin de son chĂąteau, de son bois, de sa caserne militaire aussi mais Ă©galement de la cartoucherie de Vincennes oĂč se trouve, entre-autres, la compagnie du théùtre du Soleil dirigĂ©e par Ariane Mnouchkine. Mais bien-sĂ»r, tout cela, en plus du fait que jusqu’alors j’avais connu le parc floral principalement pour ses trĂšs bons concerts estivaux (dont un du Cubain Chucho ValdĂšs) n’entraient pas en ligne de compte. Comme l’anecdote qui veut quand mĂȘme que cet ami et moi nous Ă©tions rencontrĂ©s pour la premiĂšre fois, plusieurs annĂ©es auparavant, lors de notre service militaire Ă  l’hĂŽpital inter-armĂ©es BĂ©gin qui se trouve assez proche, Ă  Saint-MandĂ©.

D’ailleurs, il avait pu arriver Ă  cet ami et moi de passer par la caserne de Vincennes au dĂ©but de notre service militaire.

Si on a suivi jusqu’alors ce que j’ai Ă©crit, un rapide calcul mental trĂšs simple nous apprend que j’ai pris plusieurs mois pour me dĂ©cider, aujourd’hui, Ă  parler dans mon blog de la Survival Expo 2023. Nous sommes en octobre, en automne. Et cette manifestation a eu lieu quelques semaines avant le dĂ©but de l’étĂ© le 9 et le 10 juin dernier….

Cela donne une idĂ©e des prĂ©cautions que j’ai prĂ©fĂ©rĂ© prendre avant de me lancer. ( J’en parle ou je n’en parle pas ?).

Le Programme des confĂ©rences de la Survival Expo de juin 2023, laquelle se dĂ©roulait en mĂȘme temps que l’Ă©vĂ©nement consacrĂ© Ă  la maison autonome, juste Ă  cĂŽtĂ©. Photo©Franck.Unimon

Mais en complĂ©tant ce calcul mental « trĂšs simple », on peut aussi dĂ©duire que je suis au bord de l’ñge, presque vieillard. Peut-ĂȘtre suis-je une personne presque sĂ©nile aprĂšs tout ? Pour l’instant, je ne peux pas encore le savoir. Cependant, ce qui est certain, c’est que la personne qualifiĂ©e de survivaliste est une bĂȘte curieuse.

 

On peut mettre de tout dans une personne survivaliste.

 

Comme dans une dent creuse. On peut dĂ©cider qu’il s’agit d’une personne complotiste, raciste, misogyne, esclavagiste, despotique, timbrĂ©e, paranoĂŻaque, dangereuse. On peut la voir comme une personne complĂštement Ă  cĂŽtĂ© de la plaque. Ou comme son opposĂ©, la super aventuriĂšre ou l’hĂ©roĂŻne sexy et indĂ©pendante, sosie de Lara Croft, Gamora ou Bear Grylls, Mike Horn des vrais hommes robustes, aptes Ă  tout, comme ils devraient tous l’ĂȘtre au lieu de ceux que l’on a, des fĂ©tichistes de la bandelette et du bandana. 

Oui, je connais un petit peu quelques classiques.  Je suis donc d’abord trĂšs suspect avant d’ĂȘtre prĂ©-sĂ©nile.

Mais j’ai nĂ©anmoins- j’y tenais- rĂ©pondu Ă  mon ami :

« Ă§a fait du crossfit – entre trois Ă  cinq fois par semaine– ça, se laisse pousser une barbe de plusieurs mois (qu’il prend soin d’aller se faire tailler chez son barbier attitrĂ© rĂ©guliĂšrement) et ça me traite de survivaliste!».

Mon ami a commencĂ© Ă  rigoler. Je devrais peut-ĂȘtre ajouter aussi que mon ami a plutĂŽt le crĂąne rasĂ©. Alors que quand je l’avais connu, il avait des cheveux, fumait et avait emmagasinĂ© quelques kilos en trop. Et, le sport, pour lui, Ă©tait une destination touristique Ă  haut risque ou un programme que l’on regardait Ă  la tĂ©lĂ©.

Petite ambiance Hunger Games lors de la Survival Expo de juin 2023 au parc floral de Vincennes. Photo©Franck.Unimon

Cependant, mon ami m’avait exprimĂ© spontanĂ©ment ce qui peut se profiler dans la tĂȘte de beaucoup lorsqu’on leur parle de survivalisme. Si pour certains, le survivalisme est une nĂ©cessitĂ© ou une Ă©vidence, pour d’autres, c’est une dĂ©marche louche.

Cet article, mon article, ne pourra ni combattre ni Ă©puiser ce qui peut ĂȘtre reprochĂ© au survivalisme par beaucoup. Car cet article, mon article, raconte surtout ma perception du survivalisme. Perception qui peut Ă©voluer selon mes expĂ©riences et certains Ă©vĂ©nements.

Pour tout « arranger » ou pour rajouter un peu de trouble et de mystĂšre, j’ai profitĂ© d’une Ă©tonnante et plutĂŽt rare insomnie pour commencer, cette nuit, Ă  rĂ©diger cet article alors qu’il Ă©tait quatre heures du matin. Alors que je suis en vacances depuis plusieurs jours et encore pour une bonne semaine. Je suis donc, en principe, tout ce qu’il y a de plus dĂ©tendu d’autant que personne chez moi n’a de problĂšme de santĂ© particulier ou dĂ©clarĂ©.

J’ai bien attrapĂ© le Covid pour la premiĂšre fois – Ă  ma grande surprise- dĂ©but septembre, mais c’était une forme minorĂ©e qui m’a permis en plus d’avancer de quelques jours mes vacances. Et, je sais avoir participĂ© auparavant Ă  un dĂ©mĂ©nagement par plus de trente degrĂ©s. Ce qui a sĂ»rement contribuĂ© Ă  rajouter de l’épuisement Ă  un Ă©tat de fatigue préétabli par une alternance de travail  de jour et de nuit ainsi que quelques heures sup travaillĂ©es durant cet Ă©tĂ©.

Pierre « 1911 » en pleine confĂ©rence. A la fin de celle-ci, celui-ci m’a rĂ©pondu qu’il s’Ă©tait surnommĂ©  » 1911″ en mĂ©moire de son grand-pĂšre nĂ© cette annĂ©e-lĂ . Photo©Franck.Unimon

Professionnellement, je sais aussi qu’un poste attractif m’attend dĂ©but janvier et mon banquier me laisse tranquille. Je n’ai donc pas de raison particuliĂšre, pas plus que d’habitude, pour ĂȘtre angoissĂ© ou me rĂ©veiller en sueurs en pleine nuit comme on peut le voir dans certains films. Je n’ai pas les inquiĂ©tudes de l’acteur Michael Shannon dans le film Take Shelter de Jeff Nichols. Ni celles des protagonistes de The Creator de Gareth Edwards. Un film ( The Creator) qui m’a assez ennuyĂ©, exceptions faites du regard ( et de la rĂ©flexion) qu’il porte sur l’intelligence artificielle, les relations multiculturelles et multiraciales mais aussi sur le handicap, j’ai vu dans ce film une nouvelle Ă©norme machinerie cinĂ©matographique dans laquelle les AmĂ©ricains refont Ă  nouveau leur guerre du Vietnam. Je ne vois pas trop non plus ce que l’on trouve Ă  l’acteur David John Washington si j’ai son pĂšre ( Denzel) en tĂȘte.  J’ai donc prĂ©fĂ©rĂ© nettement Anatomie d’un couple de Justine Triet et encore plus L’Ă©tĂ© dernier de Catherine Breillat. Pourtant, ces deux films n’ont rien Ă  voir avec The Creator et Breillat est une personnalitĂ© aussi insupportable que remarquable. Et, j’attends avec impatience la deuxiĂšme partie de Dune par Denis Villeneuve, un rĂ©alisateur, dont les films, pour l’instant, m’ont tous plu. Contrairement Ă  Christopher Nolan dont j’ai trouvĂ© le Oppenheimer beaucoup trop clinquant. 

Le dimanche

Selon l’ouvrage La Peur et la Haine de Mathieu Burgalassi, paru en 2021, « anthropologue français spĂ©cialiste de la pensĂ©e politique, des questions sĂ©curitaires et de la violence Â», les principales motivations des personnes survivalistes radicales seraient le racisme et la peur de l’autre.

J’ai aimĂ© lire son ouvrage il  y a plusieurs mois maintenant. Jusqu’à maintenant, je n’avais pas pris le temps d’en parler dans mon blog.

J’avais lu son La Peur et la Haine bien avant de connaütre les dates du Survival Expo de ce mois de juin.

C’est un livre qui m’a Ă©tonnĂ© car pendant plusieurs jours, alors que je continuais de le parcourir, je me demandais s’il s’agissait d’un roman noir Ă©tant donnĂ© la façon dont c’était Ă©crit, dans un style trĂšs entraĂźnant ou s’il s’agissait vĂ©ritablement d’une enquĂȘte anthropologique.

 Je me suis mĂȘme demandĂ© si Burgalassi avait inventĂ© ce qu’il racontait. Car je ne m’attendais pas Ă  cette façon de prĂ©senter ses expĂ©riences.

Dans son livre, Burgalassi nous explique avoir poussĂ© particuliĂšrement loin l’expĂ©rience du survivalisme. Il nous dit d’abord ce qui l’a amenĂ© Ă  entrer dans cet univers. Une agression physique dont lui et un de ses amis auraient Ă©tĂ© victimes une nuit en revenant d’une soirĂ©e ratĂ©e. Ainsi que le fait d’avoir grandi dans une certaine insĂ©curitĂ© Ă©conomique et sociale. Burgalassi, d’origine immigrĂ©e, est issu d’un milieu social trĂšs moyen. A le lire, les fins de mois ont Ă©tĂ© rĂ©guliĂšrement assez difficiles autant pour manger que pour se divertir. Certaines personnes sont habituĂ©es Ă  des soirĂ©es feutrĂ©es ou tout va bien, Burgalassi a plutĂŽt dĂ» se rabattre sur certaines soirĂ©es craignos. Ce genre de soirĂ©e oĂč l’on peut pronostiquer dĂšs le dĂ©part, avant mĂȘme de s’y rendre, qu’il va y avoir une embrouille car celle-ci est incluse dans le contrat.

Selon Burgalassi, il a commencĂ© Ă  se sortir de ça en dĂ©veloppant ses compĂ©tences dans le survivalisme. En dĂ©butant par les sports de combat et la Self DĂ©fense de type Krav Maga. En s’y montrant assidu. Et, tout porte Ă  devenir assidu si l’on craint pour sa peau.

Puis, avec le temps et devenu anthropologue, il a voulu en savoir plus sur le survivalisme et, pour cela, a rencontrĂ© des gens qui sont vĂ©ritablement dedans. En France mais aussi Ă  l’étranger, aux Etats-Unis. Dans certaines conditions limites ou trĂšs dangereuses par moments.

J’avais entendu parler de Burgalassi par un article lu dans TĂ©lĂ©rama. Il y Ă©tait fait rĂ©fĂ©rence Ă  un podcast dans lequel on pouvait entendre Burgalassi parler aussi de son livre. J’ai Ă©coutĂ© le podcast d’une vingtaine de minutes, je crois. Et, si ce que disait Burgalassi dans ses conclusions m’intriguait mais ne me dĂ©rangeait pas, car fondĂ© a priori sur son enquĂȘte, j’avais par contre Ă©tĂ© agacĂ© par les rĂ©actions des journalistes- quel(le)s cruches !- qui l’interviewaient ( je me souviens de femmes et d’hommes) trop contents de dĂ©peindre les survivalistes comme des abrutis chevronnĂ©s et dangereux. Tout allait au mieux dans le monde, il y avait juste quelques crĂ©tins, lĂ , des survivalistes, qui s’imaginaient qu’il fallait flinguer les autres Ă  bout portant et dont il fallait Ă©viter de s’approcher. Pour cela, il convenait de les laisser dans leur coin, lĂ  oĂč ils se terraient de toute façon, Ă  l’abri de la civilisation et, surtout, de la raison. Ils finiraient bien par crever en attrapant le tĂ©tanos aprĂšs s’ĂȘtre blessĂ©s avec une de leurs boites de conserves qu’ils auraient essayĂ© de perforer avec leurs dents ou en dĂ©veloppant un cancer aprĂšs avoir  bu l’eau de leur puits bourrĂ©e de phosphates pendant plusieurs annĂ©es.

Assez rĂ©guliĂšrement, durant la Survival Expo, se sont tenues Ă  cet endroit des interventions ( trĂšs) pratiques portant sur divers sujets, autant sur la maniĂšre de faire du feu assez simplement avec du matĂ©riel accessible, que sur des conseils pour faire de meilleures photos avec son tĂ©lĂ©phone portable ou un appareil photo… Photo©Franck.Unimon

Je suis un survivaliste du dimanche. Comme il existe des sportifs du dimanche. Ce que je « sais Â», je l’ai beaucoup lu ou regardĂ©.

Cela signifie que, comme beaucoup de personnes peuvent le faire avec le sport ou lorsqu’elles prennent certaines rĂ©solutions, en matiĂšre de survivalisme, je suis un faible. Mais je vais un peu mieux m’expliquer avant de repartir me planquer.

Je suis nĂ© en ville et ai toujours vĂ©cu en ville. Lorsque je me trouve en prĂ©sence de plantes ou d’arbres, je suis incapable de retenir le nom des plantes ou des arbres que je vois, lorsque j’en vois, comme de les dĂ©crire. Cela peut ĂȘtre pareil pour certains oiseaux. A part reconnaĂźtre les pigeons, peut-ĂȘtre parce-que je me reconnais en eux, je ne sais pas trĂšs bien reconnaĂźtre tel ou tel type d’oiseau que je croise. Je ne sais pas faire un feu. Je ne sais pas construire une cabane en bois avec quelques branches. Si on me parle de tarp, je suis capable de faire la diffĂ©rence avec un pĂ©tard. Je vois trĂšs bien de quoi il s’agit  parce-que j’ai lu et regardĂ© des images, j’en ai peut-ĂȘtre mĂȘme achetĂ© un, car-on-ne-sait-jamais, mais je ne m’en suis jamais servi.

Je sais casser des Ɠufs, je peux rĂ©ussir Ă  planter un clou dans un mur, je sais lacer mes chaussures tout seul, je peux porter un seau rempli d’eau, mais je ne suis pas trĂšs manuel. Au fond, et par bien des aspects, je suis un assistĂ©. Je m’en remets Ă  des personnes plus compĂ©tentes que moi, Ă  des artisans, Ă  des commerçants, Ă  des animateurs, aux services publics, Ă  l’Etat, aux autres, Ă  ma fainĂ©antise, Ă  ma patience mais aussi Ă  mes soumissions.

J’ai quand mĂȘme quelques capacitĂ©s. Je ne suis pas un incapable majeur ou complet. Autrement, je ne serais mĂȘme pas lĂ  Ă  Ă©crire cet article.

Mais si je peux encore m’émerveiller devant celles et ceux qui font du scoutisme dĂšs leur enfance ou en repensant au fait que mon grand pĂšre paternel, maçon lorsqu’il travaillait, avait construit sa maison pratiquement tout seul, durant ses congĂ©s, je me sens incapable de  faire de mĂȘme. De construire l’équivalent de cette maison oĂč, Ă  Morne Bourg, j’ai passĂ© mes premiĂšres vacances en Guadeloupe alors que j’allais avoir 7 ans. Pourtant, mon grand pĂšre paternel savait Ă  peine lire. Et il ne savait pas Ă©crire. J’ai donc une culture gĂ©nĂ©rale et une situation Ă©conomique et sociale qui lui sont, officiellement, trĂšs nettement supĂ©rieures, et, sans doute ai-je pu ĂȘtre une de ses fiertĂ©s et, pourtant, il est pratiquement Ă©vident que le survivaliste le plus accompli entre lui et moi, c’était lui, de trĂšs loin. Et, je ne parle pas d’un homme qui vous guettait dans la pĂ©nombre avec un fusil de chasse. Mais de quelqu’un que j’ai connu retraitĂ©, qui menait sa vie tranquille avec ses voisins, sa famille, qui se rendait rĂ©guliĂšrement sur sa mobylette- sans porter de casque- jusqu’à son jardin oĂč il avait Ă©tabli une petite cabane en tĂŽle et bois dans laquelle il se posait. Et oĂč se trouvaient les ananas ou les lĂ©gumes qu’il avait pu cultiver ainsi que ses « poules » qu’il appelait en sifflotant pour les nourrir de grains de maĂŻs tandis que ses coqs de combat, eux, Ă©taient dans leur cage. Je parle d’un homme de la campagne, qui, de temps Ă  autre, partait faire un tour Ă  Marie-Galante, et avait plus de soixante ans, lorsque, pour la premiĂšre fois, il a pris l’avion pour venir en France, en Ăźle de France, oĂč plusieurs de ses enfants- dont mon pĂšre- Ă©taient partis vivre.

On est ici trÚs loin du portrait de forcenés qui aspirent à vous «déflagrer » ou à vous délocaliser les vertÚbres cervicales.

Nos besoins

Les journalistes qui ont « entourĂ© Â» Burgalassi m’avaient agacĂ© car je les imaginais, relativement jeunes (la trentaine), citadins calfeutrĂ©s (ça existe), privilĂ©giĂ©s, trĂšs sĂ»rs d’eux mais en fait trĂšs ignorants et peuplĂ©s de prĂ©jugĂ©s. S’ils Ă©taient a priori dĂ©pourvus de toute intention de se servir d’une arme Ă  feu contre autrui, leur immaturitĂ© (je crois que l’on peut dire ça) lĂ©gitimĂ©e gratuitement et avec facilitĂ© au travers d’un mĂ©dium capable de toucher une grande audience m’est apparue assez irresponsable.

Dans d’autres circonstances, je me rappelle encore avoir entendu une jeune femme dire un jour fiĂšrement :

« Ce n’est pas parce-que je porte une jupe que je ne sais pas changer une batterie de voiture ! Â».

Pour moi, cette jeune femme avait un Ă©tat d’esprit survivaliste. Je suis persuadĂ© que ces journalistes qui ont reçu Burgalassi ne savaient pas changer une batterie ou une roue de voiture. Par contre, beaucoup de personnes survivalistes, Ă  mon avis, armĂ©es ou non, s’appliqueront Ă  apprendre Ă  le faire ou Ă  penser Ă  une solution alternative en cas de besoin.

Le terme « besoin » devrait ĂȘtre plus souvent employĂ© lorsque l’on parle de survivalisme  Ă  mon avis. De quoi avons-nous vraiment besoin ? Comment satisfaisons nous nos besoins ? Avec quels moyens? A quelles conditions ? A quel prix ?

Sortie de la Survival Expo de juin 2023. Photo©Franck.Unimon

Je me mĂ©fie des « c’était mieux avant Â». Cependant, lorsque je nous vois pratiquement tous, la tĂȘte penchĂ©e et rivĂ©s, quasi cramponnĂ©s Ă  nos tĂ©lĂ©phones portables dans les transports en commun oĂč dĂšs qu’il nous faut attendre cinq minutes ou plus, je me dis que nous nous sommes faits capturer.

Je ne crois pas que la satisfaction de nos besoins nĂ©cessite que nous soyons autant, aussi souvent et Ă  une telle frĂ©quence, en train de regarder nos tĂ©lĂ©phones portables. Je l’ai mĂȘme vu chez des couples dans les transports en commun. Un malaise s’installe au sein du couple, hop, baguette magique, je sors mon tĂ©lĂ©phone portable et je pianote dessus ou regarde quelque chose. Il vaut mieux ça que de se prendre le malaise- ou le problĂšme- de face.

Le silence, l’observation, la patience et la contemplation sont les ennemis de nos  Ă©crans mais aussi de nos « navigations Â» compulsives sur internet.

Je crois qu’ils font partie de nos besoins mais nous passons outre. Des cascades d’images et de stimulations Ă  volontĂ© se chargent de faire barrage entre eux et nous. Il ne faut surtout pas penser. Il ne faut surtout pas y penser. Il faut vibrer.

J’en suis dĂ©jĂ  Ă  cinq pages pour cet article. Et, je me dis que cela fait dĂ©jĂ  suffisamment. Il est certain que je vais retrouver plus facilement le sommeil cette fois. Mais je crois aussi que plus de pages, pour cet article, cela fera trop d’un seul coup. Il vaut mieux que je passe par une premiĂšre partie que je termine maintenant.

Fin de la premiĂšre partie. A bientĂŽt. Avant la fin du monde, bien-sĂ»r. Sourire. En attendant la deuxiĂšme partie, on peut lire quelles avaient Ă©tĂ© mes impressions lorsque, l’annĂ©e derniĂšre, je me rendais pour la premiĂšre fois au Survival Expo Paris, alors situĂ© du cĂŽtĂ© de la Villette Survival Expo Paris 2022 .

Franck Unimon, ce mercredi 4 octobre 2023.

 

 

 

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Rosalia au festival LOLLAPALOOZA 2023

Rosalia au festival LOLLAPALOOZA, Ă  l’hippodrome de Longchamp, samedi 22 juillet 2023. Photo©Franck.Unimon

Rosalia au festival LOLLAPALOOZA 2023

 

Avant le concert de Rosalia, au festival LOLLAPALOOZA, hippodrome de Longchamp, samedi 22 juillet 2023. Photo©Franck.Unimon

On a plutĂŽt la vingtaine voire un petit peu moins lorsque l’on va voir Rosalia ce samedi 22 juillet 2023 au festival LOLLAPALOOZA Ă  l’hippodrome de Longchamp. Beaucoup de jeunes femmes. Des hommes eau. MĂȘme un homme en fauteuil roulant, poussĂ© par un de ses amis, a voulu traverser la foule pour ĂȘtre au plus prĂšs de la scĂšne. Un des agents de sĂ©curitĂ©, pĂ©dagogue, a su ĂȘtre convaincant :

 Â« Au moindre mouvement de foule, la premiĂšre personne Ă  se faire Ă©craser, ce sera vous Â».

Plus d’une heure avant le concert de Rosalia, toutes les bonnes places face Ă  la scĂšne sont prises. Elles l’étaient dĂšs le concert prĂ©cĂ©dent. J’ai essayĂ© de me faufiler comme j’ai pu. Je n’ai pas pu faire mieux que d’ĂȘtre sur le cĂŽtĂ© Ă  plus d’une vingtaine de mĂštres de lĂ  oĂč ça s’est « passĂ© ». Mais j’avais un grand Ă©cran au dessus de moi et mon matĂ©riel photo et audio. Ci-dessous, le titre Saoko :

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J’ai beaucoup hĂ©sitĂ© avant de venir Ă  ce concert de Rosalia. 89 euros la place pour la journĂ©e du festival ( contre 28 euros pour aller voir Oumou SangarĂ© rĂ©cemment. Voir Oumou SangarĂ© en concert) . Seule Rosalia me donnait envie de venir. Rosalia, dont le dernier album Motomami – que j’avais achetĂ© et Ă©coutĂ©- avait Ă©tĂ© adoubĂ© par la critique. Rosalia dont les vidĂ©os provocantes dĂ©ployaient une audace et une assurance en mĂȘme temps qu’un certain « contraste».

Rosalia, hippodrome de Longchamp, au festival LOLLAPALOOZA, samedi 22 juillet 2023. Photo©Franck.Unimon

Ici, la langue espagnole prend le dessus sur la langue anglaise. Rosalia se joue des tendances musicales.  Techno, kizomba, Flamenco, Reggaeton, la forme piano/voix ou d’autres allures d’AmĂ©rique latine peuvent ainsi cohabiter. Elle peut aussi trĂšs bien danser. On peut considĂ©rer qu’elle sait tout faire et avoir l’impression d’assister Ă  un renversement de modĂšle oĂč l’Espagne, pays « minorĂ© » sur la scĂšne musicale internationale, prend en quelque sorte sa revanche sur les pays anglo-saxons qui, au moins depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale environ, dominent le monde avec leurs artistes et leurs nĂ©vroses Rock. Ci-dessous, une autre vidĂ©o montrant Rosalia lors du festival LOLLAPALOOZA:

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AdĂ©mas (en outre), Rosalia est une femme sĂ©duisante, affirmĂ©e, indĂ©pendante et ouverte aux diffĂ©rents genres. On a donc le Jackpot. Une musique et une culture diffĂ©rentes. MĂȘme si, mĂȘme si, lorsque l’on y regarde bien, Rosalia, par certains aspects, et sĂ»rement malgrĂ© elle, colle Ă  l’image que l’on se fait d’une femme espagnole. Brune, ardente, virilement- presque brutalement- et fiĂšrement sensuelle.

Rosalia, ce samedi 22 juillet 2023. Photo©Franck.Unimon

Mais c’est toujours ça. Ne nous privons pas d’un bon moment d’autant que l’on a payĂ©- plutĂŽt cher- pour cela. Et marchĂ© aussi prĂšs de deux kilomĂštres au moins depuis l’endroit oĂč l’on a pu trouver oĂč se garer.

Il fait beau ce samedi et il s’agit du dernier concert de la tournĂ©e mondiale de Rosalia qui a Ă©tĂ© un trĂšs grand succĂšs. DĂ©sormais, Rosalia fait partie des grandes vedettes et cette prestation a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e comme l’évĂ©nement Ă  ne pas manquer. Son concert de dĂ©cembre dernier, Ă  Paris, a bien Ă©tĂ© dĂ©clarĂ© « meilleur concert de l’annĂ©e Â». On n’a pas envie de rater des moments pareils.

 

DĂšs l’entrĂ©e sur scĂšne de Rosalia avec ses danseurs et le dĂ©but de son concert avec le titre Saoko, le public est happĂ© par la toile Rosalia. Laquelle a gardĂ© la main et la maitrise totale sur sa reprĂ©sentation. PassionnĂ©e et souriante, oui, mais pas liĂ©e Ă  l’approximatif.

Rosalia est trĂšs Ă  l’aise avec l’image et les technologies de communication moderne. Elle aime aussi beaucoup se voir mĂȘme si elle tourne cela aussi en dĂ©rision. Le public, lui, l’adore, et reprend plusieurs de ses paroles. Il se trouve bien un public hispanophone parmi nous mais d’autres se sont aussi visiblement mis Ă  l’Espagnol.

J’aurais prĂ©fĂ©rĂ© ĂȘtre plus prĂšs de la scĂšne, entendre des titres de quatre minutes ou plus, et y voir des « vrais Â» musiciens. Le festival, officiellement, entend proposer une alternative Ă  notre sociĂ©tĂ© d’argent en nous imposant un systĂšme de recharge. SystĂšme qui, d’aprĂšs mon expĂ©rience, expose surtout Ă  offrir au festival ce que l’on n’a pas pu dĂ©penser. Qu’est-ce que cela m’a agacĂ© par ailleurs de devoir me promener avec un gobelet en carton rempli d’eau simplement « pour des raisons de sĂ©curitĂ© Â». A moins de filouter, Il est devenu de plus en plus difficile de se trouver Ă  un concert avec une bouteille d’eau munie de son bouchon en plastique. Car trop d’artistes ont reçu des projectiles inopportuns lors de leur prestation.

Mais le spectacle valait le dĂ©placement. Et, lorsqu’ensuite, je me suis mis Ă  réécouter l’album Motomami, j’ai su que cela m’avait vĂ©ritablement plu.

Rosalia, festival LOLLAPALOOZA 2023, hippodrome de Longchamp, samedi 22 juillet 2023. Photo©Franck.Unimon

Franck Unimon, ce lundi 2 octobre 2023.