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L’humoriste Tania Dutel sur scène à la Nouvelle Eve

Ce jeudi 3 novembre 2022, devant l’entrée de la Nouvelle Eve.

L’humoriste Tania Dutel sur scène à la Nouvelle Eve

 

Ce jeudi soir, deuxième semaine des vacances de la Toussaint, il y a assez peu de monde dans le métro, ligne 12, qui m’emmène dans le 9ème arrondissement de Paris à la station Pigalle. Une fois dehors, deux videurs d’un sexodrome  m’indiquent obligeamment la route :

 

« La rue Pierre Fontaine,  après le Monoprix, c’est tout de suite à gauche ! ».

 

Depuis mon enfance, je suis déjà passé par Pigalle. Mais je ne connais pas la rue Pierre Fontaine. Cette rue où se trouve pourtant le Bus Palladium ( en travaux) non loin du cabaret Chez Moune, des endroits qui ont marqué l’Histoire de la nuit et de la vie artistique et culturelle de Paris. Et du monde occidental.

 

Je connais encore moins la salle la Nouvelle Eve où joue Tania Dutel ce jeudi soir et, ce, pour plusieurs semaines encore. Pour me diriger vers la Nouvelle Eve, je tourne le dos au Moulin rouge qui s’éloigne derrière moi.

 

Je ne l’ai pas fait exprès mais aller voir Tania Dutel, cela va bien avec le fait d’être allé voir Hollie Cook en concert la semaine dernière ( En concert avec Hollie Cook au Trabendo) dont le titre Postman en particulier continue sa route dans ma tête.

La salle de la Nouvelle Eve, depuis le balcon, non loin des toilettes, ce jeudi 3 novembre 2022, avant la prestation de Tania Dutel. La troisième table, en partant de la gauche, juste devant la scène, à côté des marches, c’est là où était « ma » place. J’ai demandé aux deux personnes attablées derrière moi de bien vouloir veiller sur mon sac. Ce qu’elles ont facilement accepté de faire. Photo©️Franck.Unimon

 

C’est par des vidéos sur internet que j’ai découvert Tania Dutel, 33 ans, il y a deux ou trois mois. Depuis des mois, par saccades, je regarde sur internet des sketches d’humoristes à Montreux ou ailleurs. Il y a les humoristes connus ou que « tout le monde » connaît. Et, il y a les autres qui marchent assez bien ou qui montent mais qui sont moins connus.

 

J’ai déja vu trois ou quatre humoristes sur scène dans le « passé » :

 

Jamel Debbouze, Dieudonné. C’était il y a plus de 12 ans.  Haroun a été le petit dernier, il y a à peu près deux ans entre deux confinements dus à la pandémie du Covid.

 

Mais je n’ai pas vu assez d’humoristes sur scène. Pas autant que je le voudrais ou l’aurais voulu. Cela fait des années que je me dis qu’il faudrait que je prenne le temps de le faire véritablement. Le seul en scène de l’humoriste est un exercice particulier. Si j’ai compris que le solo permet mieux à un certain type d’artiste de se trouver et de s’exprimer, je vois aussi le métier d’humoriste solo, sur scène, comme un métier colossal.

 

Pour moi, l’humoriste solo est l’artiste qui doit en faire des tonnes. Rire de soi, rire des autres, redonner le moral, être dans une forme physique olympique, dans un état d’intelligence et de vivacité monumental, et de tous les instants… au moins pour la façade sur scène ou lors d’une émission ou d’une interview.

 

Et répéter cela.

 

 

Redonner aussi, constamment ou régulièrement, de soi une image qui peut nous enfermer dans un certain type de rôle et de comportement. Dans le rôle de celle ou de celui qui se doit d’être toujours plein(e) de vie, d’être un marsupilami ou une super héroïne à temps complet, qui arrive toujours à resurgir à la surface et doit être léger ou légère même si, intérieurement, elle ou il touche le fond ou les bas-fonds. 

 

On aime beaucoup les histoires de celles et ceux qui « rebondissent » et qui nous offrent les  bouquets recomposés de leurs « résiliences ». Cela nous rassure et nous inspire. Parfois, aussi, cela nous rend fainéants.

Tania Dutel, sur scène à la Nouvelle Eve, ce jeudi 3 novembre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Je vois aussi le métier d’humoriste comme celui ou existe une grande dépendance aux rires du public. Puisqu’un humoriste qui ferait peur à son public ou qui le ferait pleurer aurait raté son cœur de cible. Hier soir, Tania Dutel nous a raconté cette fois où, sur scène, elle avait connu un échec total au point de devoir prendre la décision de couper court à son spectacle pour annoncer plus tôt l’artiste qui la suivait. C’est pour ce genre « d’anecdotes » en filigrane et d’expériences personnelles que sa prestation d’hier soir m’a plu.

Pourtant, malgré les risques qu’il comporte, j’aime le rire. Et j’ai besoin de lui. Il m’a aidé à me sortir un peu un certain nombre de fois de la glue de mes inquiétudes et de mes obsessions. Et c’est probablement pour cela que nous sommes beaucoup à tenir à celles et ceux qui nous font rire. Pour nous aider à reprendre un peu pied, ainsi que notre souffle, et à nous extirper un peu des marécages de nos fors intérieurs.

 

Tania Dutel, à la Nouvelle Eve, ce jeudi 3 novembre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Certaines personnes, lorsqu’elles tombent amoureuses de quelqu’un plutôt que d’une autre, disent que ça ne s’explique pas. Que c’est comme ça. C’est peut-être un peu pareil avec le fait de rire devant l’humour d’une personne au détriment de l’humour d’une autre personne.

 

Même si je ne crois pas tant que ça aux mystères tant dans le domaine de l’Amour que du rire. Pour moi, il y a bien une ou plusieurs raisons pour expliquer le fait que l’on aime ou que l’on désire une personne plutôt qu’une autre. Même lorsqu’il vaudrait mieux s’abstenir de le faire.

Comme il y a sûrement aussi une ou plusieurs raisons pour expliquer le fait que l’on va plus facilement rire devant l’humour d’une personne plutôt que devant celui d’une autre. Mais, là, il m’est difficile de savoir s’il vaudrait mieux, certaines fois, s’abstenir de rire devant un certain humour plutôt que devant un autre.

 

 

Lorsque j’ai parlé un peu autour de moi de Tania Dutel, on m’a demandé qui c’était. Et, j’ai été étonné car j’avais vu deux ou trois vidéos d’elle, ou plus. Je les avais trouvées drôles et bien pensées et comme elles semblaient avoir beaucoup de vues, j’ai cru que cela voulait dire que Tania Dutel était  très connue.

 

Tania Dutel, à la Nouvelle Eve, ce jeudi 3 novembre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Hier soir, Tania Dutel, au début de son spectacle, s’est présentée comme quelqu’un qui avait eu un Bac scientifique, qui était arrivée à 19 ans à Paris depuis sa région du Beaujolais  où vivaient un peu plus de mille habitants où tout le monde « se connaît ». Deux sœurs, deux frères ou j’en ai peut-être rajouté une ou un de trop. Une mère un peu « plus » imposante que le père qui sait à quoi s’en tenir juste par une inflexion de la voix de la mère.

 

Concernant son style d’humour, j’ai récemment envoyé le lien d’une de ses vidéos à deux de mes proches. Une de mes proches a comparé Tania Dutel à Blanche Gardin.

 

J’aime beaucoup Blanche Gardin.

 

Mais lorsque je regarde et écoute Tania Dutel, je vois Tania Dutel. Tania Dutel a par exemple sa façon personnelle de dire :

 

« C’est assez hilarant ».

Tania Dutel, à la Nouvelle Eve, ce jeudi 3 novembre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

En tout cas, la file d’attente que j’ai trouvée ce jeudi soir devant la salle de la Nouvelle Eve ne doutait pas des pouvoirs humoristiques de Tania Dutel. Et, moi, depuis longtemps, je vois la scène comme un sérum de vérité suprême. Une prestation scénique permet à un artiste de mieux se défendre…ou de se défaire. Pour connaître la vérité de ce spectacle, la place a coûté 22 euros.

 

Si, hier soir, nous avons été devant « une petite salle » comme le dira Tania Dutel en voyant la centaine de personnes présentes, le public a été assez varié. Couples homos et lesbiens, couples hétéros, amis hétéros et homos, personnes seules ou célibataires ? Les plus jeunes devaient avoir dans les 25 ans et les plus âgés, une bonne quarantaine d’années, de l’étudiant (e) à l’employé (e).

 

Je sortais des toilettes, en haut de la salle, au balcon, lorsque j’ai entendu l’arrivée de Tania Dutel sur scène. J’ai eu à peine le temps de revenir m’asseoir à ma place, juste devant la scène, lorsque Tania Dutel m’a interrogé. Qu’est-ce que je faisais ? Comment je m’appelais ? J’étais seul ?

 

Même si j’ai été surpris, j’ai été assez à l’aise pour répondre.  Cela fait partie du jeu du stand up et des spectateurs du premier rang. Et, Tania Dutel ne m’a pas trop poursuivi. Mais ce genre d’échange crée un lien particulier avec l’artiste sur scène. Durant quelques secondes, la spectatrice ou le spectateur vit un peu l’expérience de l’artiste qui se met à nu et à risque devant un public pendant plus d’une heure. Même s’il y a des « trucs » comme on dit dans la profession et que les années d’entraînement permettent de « faire » le spectacle, l’imprévu persiste. Puisque c’est le principe du spectacle vivant. D’ailleurs, Tania Dutel nous dira qu’au début, elle avait prévu de faire autre chose.

 

Tania Dutel, à la Nouvelle Eve, ce jeudi 3 novembre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

Tania Dutel a sollicité aussi deux ou trois autres spectatrices et spectateurs. Même si j’avais déjà observé cette aptitude chez d’autres artistes sur scène, j’ai été étonné par sa facilité pour écouter les réponses de son public. Comme pour retenir le prénom des spectatrices et spectateurs avec lesquels elle avait « conversé » un peu devant nous. A la fin du spectacle, je crois me souvenir qu’elle se rappellera de mon prénom.

 

Lors de son stand up qui a duré près d’une heure trente, avec une mise en scène minimale, un micro, un pied de micro, un tabouret, une lampe, un cahier, un thermos dans lequel elle ne boira rien, Tania Dutel a été espiègle, enfant, charmante, surprenante, bienveillante et très attentive à son public. Il a été question au moins de viol, de boulimie, d’anorexie, de sexualité, des relations entre les femmes et les hommes, du corps des femmes, de sa physiologie. De quoi gêner un petit peu au cours d’un apéro ou d’un barbecue lors d’une rencontre familiale ou amicale.

 

Il est possible que certaines sensibilités trouvent outranciers les sujets abordés par Tania Dutel ainsi que sa manière de le faire. Et, c’est sûrement une question de mesure mais je n’arrive pas à les trouver indécents ou déplacés.  Et, comme elle l’a expliqué, elle ne peut pas plaire à tout le monde même en faisant  de son mieux pour mettre les formes.

En racontant des situations très intimes comme le veut le stand up, Dutel table sur le fait qu’il peut se trouver dans le public des personnes qui ont vécu la même chose qu’elle et qui sont prêtes à ce que cela « sorte » de la bouche d’un( e) artiste.

 

Cela explique-t’il le fait que, très vite, le public présent, tant féminin que masculin, ait ri avec conviction ?

 

En tout cas, le public, dans sa grande majorité, a adhéré. Pour ma part, j’ai souvent souri. Peut-être ai-je moins ri que d’autres car je peux avoir un temps de décalage avec le réel. Mais aussi parce-que j’avais « vu » et entendu une partie des répliques de Tania Dutel sur internet.

 

Après le spectacle, nous sommes quelques uns à attendre Tania Dutel à la sortie. Elle arrive, prend le temps de discuter avec nous.

Tania Dutel s’est lancée dans le métier depuis 2009 et fait du stand up comme elle le pratique désormais depuis 2017. Pendant la représentation, alors qu’elle parlait de « pénis de sang et de pénis de chair », elle s’est aperçue que je la prenais en photo. Après s’être assurée que je n’étais pas en train de la filmer – car c’est interdit- elle m’avait demandé de la photographier plutôt à la fin du spectacle. J’avais alors posé mon appareil photo.

 

Tania Dutel, à la Nouvelle Eve, ce jeudi 3 novembre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Lors de ces quelques échanges avec elle, dans la rue Fontaine, je lui explique avoir pris ces photos pour parler d’elle- en bien- dans mon blog. Elle ne pouvait pas le savoir. Lors d’un passage de son spectacle, elle nous a raconté comment elle s’était faite « défoncer » par certains internautes qui n’avaient pas aimé un de ses sketchs ou un de ses spectacles. De ce fait, depuis, elle ne lit plus les commentaires sous ses vidéos. L’humoriste Elodie Poux a fait un sketch que je trouve réussi sur les « haters », ces personnes qui manquent de courage,  ou simplement de maturité et d’autocensure, lorsqu’elles parcourent un clavier en restant bien abritées dans la pénombre et dans l’anonymat. 

 

Comme d’autres spectatrices et spectateurs présents dans la rue Fontaine, hier soir, j’ai  remercié Tania Dutel pour son spectacle. Ainsi que pour son courage à parler, seule sur scène, de tous ces sujets. Alors que nous, spectateurs, nous pouvons avoir l’impression que c’est facile à faire. Je l’ai saluée puis je suis parti. Avant de revenir pour lui demander un selfie. Il est dommage, qu’avec l’éclairage, il y ait plus d’ombre sur son visage que sur le mien mais au moins, la photo et son sourire sont là.

Avec Tania Dutel, après son spectacle à la Nouvelle Eve, ce jeudi 3 novembre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

Franck Unimon, ce vendredi 4 novembre 2022.

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En Concert

En concert avec Hollie Cook au Trabendo

En concert avec Hollie Cook au Trabendo

 

Trois jours après avoir vu Zentone à la Maroquinerie dans le 20ème arrondissement de Paris ( En concert avec Zentone à la Maroquinerie), le concert de Hollie Cook arrive ce vendredi soir au Trabendo dans le 19 ème arrondissement. Prix de la place en prévente :

29,90 euros. 

 

Dans le métro, ligne 5, jusqu’à la porte de Pantin, la mixité sociale et culturelle saute aux yeux comparativement à trois jours plus tôt.

 

Se rendre à la gare du Nord et dans certains endroits du 19ème arrondissement, c’est aussi passer dans des « juridictions » où augmente le nombre de personnes addicts et SDF. Je parle de celles et ceux qui n’en sont plus à se demander quand part le dernier métro.

 

Mais le 19ème arrondissement, c’est aussi des lieux culturels dont le Zénith, la Philarmonie de Paris, la Villette et le Conservatoire de musique. Il y a également la salle de concert, le Trabendo. C’est en me dirigeant vers lui que je me rappelle y être allé une première fois pour voir Brinsley Forde et Vincent Segal en concert, il y a environ dix ans. Un très bon souvenir. 

 

 

Avec Hollie Cook, mon histoire a connu un effet rebond. Au départ, il y a eu le titre Far from me sur l’album Vessel of love, sorti en 2018, peut-être écouté après avoir lu un article élogieux sur elle.

Il y avait aussi eu le titre Sugar Water (Look at my face). Et puis, plus rien. Je ne pensais plus particulièrement à Hollie Cook. Je ne me rappelle pas si j’avais lu, comme je l’ai déjà beaucoup relu depuis, que Hollie Cook est la fille d’un des membres des Sex Pistols et d’une des membres du groupe The Belle Stars.

J’avais beaucoup aimé le titre Sign Of  The Times des The Belle Star qui avait été un tube à sa sortie en 1983.  Un tube que tout le monde, moi y compris, avait déja oublié lorsque Prince avait sorti son album et titre Sign « O » Times seulement quatre ans plus tard en 1987.

Hollie Cook, Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Ce vendredi 28 octobre 2022, lorsque je marche vers Hollie Cook, mon histoire a changé avec elle. Car j’ai écouté l’album Twice deux ou trois ans après Vessel of love. Je ne savais pas, alors, que Twice était antérieur (sorti en 2014) à l’album  Vessel of love.  Cependant, plusieurs titres m’ont très vite captivé dans l’album Twice :

99, Looking for real love et Superfast.

 

Et, lorsque j’ai découvert la vidéo officielle de Looking for real love, j’ai été suis séduit par la grâce de Hollie Cook. Laquelle, avec très peu de gestes, est habile pour happer notre attention. Sur une autre vidéo, je l’ai vue interpréter Sugar Water (Look at my face) en concert à Montreux avec Horseman à la batterie et à la voix. Sur une autre, 99. Et, j’en redemande. Je la cite d’ailleurs dans mon article sur l’ouvrage de Judith Duportail (L’Amour sous algorithme, un livre de Judith Duportail )

 

Hollie Cook a sorti un dernier album en 2022, Happy Hour, que je n’ai pas encore écouté.

 

Si les chansons de Hollie Cook parlent beaucoup d’Amour, la douceur de sa voix se plante dans un Reggae robuste. Et, cela me parle. Et, comme cela me parle, j’ai fait des recherches et vu qu’Hollie Cook était passée en concert à Paris il y a quelques années. Je l’avais donc manquée…. jusqu’à ce vendredi soir.

 

 

Ce soir, je ne saurais pas dire, comme j’avais pu le faire lors du concert de Zentone, quelle était la proportion de femmes et d’hommes dans le public. Car je me suis tout de suite mis devant la scène. Mais le public m’a paru un peu plus jeune en moyenne. Et les squaws étaient bien plus présentes tout près de la scène. Des squaws qui connaissaient les paroles des chansons de Hollie Cook.

 

Hollie Cook, au Trabendo, ce vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

 

 

Dès son entrée sur scène, Hollie Cook nous a charmé par son sourire et son envie. Derrière elle et sur ses côtés, un guitariste, un batteur, un bassiste et un claviériste, parfois dans les chœurs, ont tourné avec elle la clé du concert.

 

Hollie Cook est plus qu’une voix agréable et un sourire sympathique. C’est aussi un corps heureux qui laisse s’échapper la musique jusqu’au Dub. C’est aussi une professionnelle très concentrée.

Depuis des années, dans le Reggae, la basse m’attire le plus. Mais cela fait deux concerts de suite où le batteur, parmi les musiciens, a ma préférence. Pourtant, les autres musiciens étaient bien présents.

 

Hollie Cook, au Trabendo, ce vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Le concert a été si agréable et si léger, que, plusieurs fois, j’ai eu l’impression de vivre un rêve prolongé.

 

A la fin, Hollie Cook nous a nouveau remercié pour les bonnes vibrations et pour l’énergie que nous lui avions donnée. Elle nous a aussi dit que, dès le début de sa carrière, elle avait été très bien accueillie à Paris.

 

Après le concert, je l’ai aperçue à quelques mètres en compagnie de personnes qu’elle connaissait. Je me suis dit que je n’allais pas faire ma groupie. J’ai commencé à m’en aller tout en regardant. J’ai vu quelques personnes aller la voir et se faire prendre en photo avec elle. Je me suis dit que je ne pouvais pas partir comme ça.

 

J’ai redescendu les marches.

 

Lorsqu’est venu mon tour, je lui ai demandé :

 

« Hi, Hollie, May I ? ». Hollie a acquiescé. Si je recommence à me faire prendre en photo avec des artistes, il va falloir que je me détende un peu. Là, sur la photo, j’ai une tête d’assassin.

Avec Hollie Cook après le concert, au Trabendo, ce vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 Après la photo, je lui ai dit :

 

« I Took some pictures of you ». Tout en gardant le sourire, elle a fait « oui ». J’avais bien vu qu’elle m’avait vu la prendre en photo durant le concert. Puis, elle m’a demandé de lui en envoyer sur instagram.

 

Je lui ai répondu :

 

« I will try my best ».

 

Dans l’article précédent sur le concert de Zentone, j’avais oublié la pandémie du Covid. Je me suis davantage rappelé des attentats terroristes qui l’avaient précédée car, en plus de massacrer des personnes et de vouloir effrayer le monde,  l’un d’entre eux a aussi eu pour projet de détruire la musique. Et, aussi, parce-que, d’une façon ou d’une autre j’ai vu les morts de ces attentats.

 

J’ai eu la chance de n’avoir perdu personne du Covid.

 

Pendant le confinement décidé lors de la pandémie du Covid les manifestations publiques telles que les concerts ont été annulées. Se retrouver comme hier ou mardi soir, avec des inconnus, à visage découvert, sans avoir à fournir de passe sanitaire, dans une salle fermée à écouter la même musique, à danser voire à rêver ensemble grâce à la musique et des artistes  était devenu impossible. C’était il y a deux ans. Il n’y a pas si longtemps. ( Panorama 18 mars-19 avril 2020, Coronavirus Circus 2ème Panorama 15 avril-18 Mai 2020 par Franck Unimon). 

 

Ce à quoi nous tenons, ce que nous vivons, est éphémère. La musique renoue avec cet éphémère.

 

Voici mon « best of » des photos du concert d’Hollie Cook au Trabendo, ce vendredi 28 octobre 2022.

 

Franck Unimon, ce samedi 29 octobre 2022.

 

Hollie Cook, au Trabendo, ce vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

Hollie Cook, Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Hollie Cook, Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Hollie Cook, Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Hollie Cook, au Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Au concert de Hollie Cook, au Trabendo, ce vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

Hollie Cook, Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Hollie Cook, Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Hollie Cook, au Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

Hollie Cook, Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Hollie Cook, Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Hollie Cook, Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Hollie Cook, Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Hollie Cook, Trabendo, vendredi 28 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

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En Concert

En concert avec Zentone à la Maroquinerie

En concert avec Zentone à la Maroquinerie

 

Un de mes collègues, ancien animateur radio, compte parmi ses amis, un homme, célibataire, lequel, tous les soirs, se rend à un concert.

En une année, c’est beaucoup plus que le nombre de fois où je suis allé voir un groupe ou un artiste sur scène.

 

Un concert raconte souvent un bout de notre vie. Et, je crois aussi, comme quelqu’un l’a dit ou écrit, que la musique est une des meilleures machines à remonter le temps que nous ayons à notre portée. Elle piège aussi celle et ceux qui acceptent de s’en approcher qu’ils soient musiciens, chanteurs ou « simples » auditeurs. Car elle porte en elle une partie de la promesse que chacune et chacun a en soi et qu’elle peut lui apprendre à mieux connaître ou à découvrir. Et puis, mirage ou prodige, la musique nous autorise une jeunesse et une enfance renouvelées. On commence sans doute à se (b)rider lorsque l’on commence à décider que la musique, le jeu et le rire sont des activités de colonie de vacances qui ont fait leur temps, qu’il faut passer à tout autre chose, se mettre au travail pour de bon, et devenir, sans jamais dévier de la ligne, une personne en tout point de vue irréprochable, sérieuse et adulte.

La Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022, avant le début du concert de Zentone. Photo©️Franck.Unimon

 

 

J’avais dix neuf ans lorsque je suis allé seul, pour la première fois, à un concert. C’était pour aller voir Miles Davis, déjà mon musicien préféré, découvert alors que j’avais 17 ans. Grâce à un copain, d’origine franco-polonaise, par l’album Star People, sur sa platine disque vinyle. Un ami, un peu plus âgé que moi d’un an ou deux, que je connaissais de vue avant de véritablement faire sa connaissance dans le club d’athlétisme de notre ville. Club où il me rapprocha de quelqu’un, devenu mon meilleur ami, d’origine algérienne, qui avait connu les bidonvilles de Nanterre, que j’avais eu dans ma classe au collège, et que j’avais toujours évité en raison de sa nervosité et de son impulsivité.

  

Ce premier copain, franco-polonais, plus grand que moi de dix à quinze centimètres, habitait avec sa mère, divorcée, quatre étages en dessous de l’appartement où j’habitais avec mes parents, ma sœur et mon frère dans un F3, dans une tour HLM de 18 étages, à Nanterre. En face de l’école maternelle et primaire, Robespierre. A côté de l’usine Citroën.

 

J’ai connu les concerts, les cafés et les restaurants au cours desquels on se faisait enfumer par ses voisins et où l’on rentrait chez soi, avec sur ses vêtements, l’odeur du tabac. Ce qui n’a jamais été ma volonté mais c’était un passage obligé lorsque l’on souhaitait sortir de chez soi.

 

 

Beaucoup a changé depuis. Pourtant, beaucoup, aussi, est resté identique. Comme les enfants d’il y a quarante ans, les enfants d’aujourd’hui continuent d’aimer manger des frites. Et, des gens d’aujourd’hui continuent d’aimer écouter de la musique, d’en jouer ou d’en découvrir. La musique reste la musique. Seules ses déclinaisons et la façon dont on est allé vers elle la première fois, et où l’on retourne vers elle, peut avoir changé un peu ou beaucoup lorsque l’on est aujourd’hui « plus jeune ». Mais la musique continue de nous toucher. Et, il nous reste aussi la mémoire ainsi que la transmission.

 

La Maroquinerie, avant le début du concert de Zentone, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Combien de personnes « jeunes », aujourd’hui, écoutent une musique qu’ont pu écouter leurs parents ou leurs grands parents, en même temps que d’autres musiques. Car si la musique peut être une transition dans nos vies, elle est aussi une mémoire, une transmission et une acquisition.

 

 

Hier soir, lorsque je suis allé voir Zentone à la Maroquinerie, mon dernier concert dans une salle datait de plus de cinq années. C’était peut-être pour aller voir Marc Ribot à la cave Dimière d’Argenteuil. Après Arno et Danyel Waro au Figuier blanc, également à Argenteuil. Des très bons concerts.

 

J’étais alors devenu père ou allais le devenir.

 

En prenant de l’âge mais aussi en changeant de « statut », en passant de fils « d’employé » étudiant idéaliste plus ou moins puceau à père et conjoint employé et imposable, on sort, sans vraiment s’en souvenir ou s’en apercevoir d’un certain circuit. Pour, quelques années plus tard, assez facilement se convaincre que ce circuit nous est à tout jamais interdit. On serait devenu trop vieux ou infréquentable ou tout juste bon pour  rester chez soi.

 

Sauf que rien ne nous interdit de reprendre des études, de refaire connaissance ou d’acheter un billet d’entrée pour aller à un concert. Et, rien ne nous interdit non plus d’y aller seul si la majorité des personnes que nous connaissons, et qui nous ressemblent, sont indisponibles ou n’ont pas cette envie ou ce besoin-là.

 

 

En musique et en concert, je crois avoir raté l’aventure du Rap parce-que, dans les années 90, j’avais un travail qui me plaisait, enfin, et qui me permettait de gagner suffisamment ma vie. J’avais donc commencé à m’insérer socialement et entrevoyais la possibilité concrète d’un avenir. Même si mes projets d’avenir restaient approximatifs.

 

Mais j’ai sans doute aussi raté l’aventure du Rap, parce-que, dans les années 90, j’étais bien plus entraîné dans le Dub et le Reggae, ou, éventuellement, dans une certaine forme de techno.

 

Si Miles a bien fait un album inspiré du Rap, sorti après sa mort en 1991, cet album n’a pas suffi. Et, si j’étais allé voir MC Solaar au Zénith (un concert très correct mais frustrant) et I AM à l’Olympia (un de mes meilleurs souvenirs de concert), le Rap, qui, aujourd’hui, en France, désherbe « tout », ne m’a pas parlé aussi bien que le Dub, par exemple.

 

High Tone et Zenzile avaient déjà joué ensemble en 2006 a rappelé un des musiciens hier soir. Cela ne m’a pas marqué. J’ai dû le savoir et l’écouter « à l’époque » mais sans donner suite car je ne m’en souviens pas.

Pendant des années, j’ai eu beaucoup de mal avec « les » Zenzile de Angers. La voix de leur chanteuse, Jamika, ne passait pas pour moi. High Tone, j’aimais davantage. Mais je trouvais leurs titres trop longs ou trop expérimentaux.

 

La Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022, pendant le concert de Zentone. Photo©️Franck.Unimon

 

J’ai aimé High Tone lorsqu’ils ont joué avec le groupe Improvisators Dub, dans le groupe Highvisators. C’était en 2004. Les Improvisators Dub de Bordeaux, avec « feu » Manutention, étaient lestés de Dub. Avec eux, impossible de rater la percussion Dub. J’ai eu la chance de voir les Improvisators Dub à un concert à la salle de concerts l’Observatoire à Cergy St Christophe, la même soirée où j’ai découvert le groupe Brain Damage de St Etienne, alors conduit par Martin Nathan et le bassiste Raphaël Talis, parti par la suite.  

 

Depuis, Manutention est décédé et le groupe Improvisators Dub n’existe plus, ce qui me rend assez nostalgique. Hier soir, sur scène, à la Maroquinerie, aucun des artistes sur scène n’a mentionné les Improvisators Dub parce-que le temps est passé. Mais dans les années 1990-2000, les Improvisators Dub faisaient partie, avec High Tone et Zenzile des groupes français pionniers pour jouer du Dub sur scène «  avec des instruments » comme l’a dit un des spectateurs, hier soir.

 

Les groupes français Le Peuple de l’Herbe, Dubphonic ou Lab° ont aussi su faire partie ou font peut-être encore partie de la surface de réparation du Dub en France mais je les connais moins bien, ne les ai pas vus sur scène, ou leur prestation sur scène (telle celle de Lab° à Saint Germain en Laye) m’avait moins transporté.

 

J’ai aussi aimé High Tone lorsqu’il a croisé Brain Damage « de » Martin Nathan (après le départ de Raphaël Talis) pour former le groupe High Damage. J’étais allé les voir à l’EMB de Sannois.

 

Enfin, j’ai aimé High Tone lorsque, cette fois, il a retrouvé Zenzile pour Zentone.

 

J’avais raté cette deuxième « version » de Zentone en concert en juin à Paris. Je n’avais pas pu aller l’écouter sur scène à Lille fin septembre. Aussi, est-ce avec un grand plaisir qu’en tapant Zentone sur internet, machinalement, il  y a quelques semaines, que j’ai appris qu’ils allaient passer, à nouveau pour une date unique, cette fois à la Maroquinerie, salle de concerts dont j’avais déjà entendu parler mais qui m’était toujours restée inconnue. Je ne savais pas où la situer.

 

 

Se rendre seul à un concert, dans une salle que l’on ne connaît pas, ressemble un peu à un pèlerinage.

 

La Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022, avant le concert de Zentone. Photo©️Franck.Unimon

 

Pour ce pèlerinage, il m’a fallu me transplanter, vers 19h ce mardi soir, dans un métro bondé, ligne 3, depuis Paris St Lazare, avec une femme-parachutiste criant et se jetant presque dans mon dos, alors que les portes allaient se fermer :

 

« Mettez-vous dans les couloirs, s’il vous plait ! C’est pas vrai ! Tout le monde pourrait entrer si les gens se mettaient dans les couloirs ! ».

 

La station de métro suivante, la même « parachutiste » a préféré se cramponner à l’intérieur de la voiture, gênant le passage des personnes qui souhaitaient descendre.

 

L’atmosphère s’est ensuite pacifiée dans le métro alors que celui-ci s’est un peu vidé. J’ai alors pris le temps de regarder ces personnes qui étaient dans le métro. Il y avait un peu moins de monde sur son écran de smartphone que d’habitude.

 

A la station Gambetta, beaucoup de voyageurs sont descendus. On aurait presque dit qu’ils se rendaient tous à la Maroquinerie.

 

Dans les faits, non, bien-sûr.

 

Après un passage à la boulangerie La Gambette à Pain où j’ai dû me passer de Mamouna, car il n’y en n’avait plus, j’ai demandé mon chemin pour la Maroquinerie, rue Boyer.

 

C’est loin ! Vous n’y êtes pas du tout ! Je crois qu’il faut monter vers Ménilmontant….

Vous n’avez pas un téléphone ?

 

J’ai répondu : « Je suis archaïque. Je préfère demander aux gens… ».

 

Enfin, une dame d’une soixantaine d’années, la quatrième personne que j’interrogeais, et de loin plus âgée que les trois hommes que j’avais questionné précédemment, m’a confirmé :

 

« Vous continuez tout droit,  vous descendez la rue Villiers Adam. Jusqu’à la rue de la Bidassoa…vous en avez pour 15 minutes ou peut-être moins si vous marchez plus vite que moi ».

 

Dans la rue Boyer, ce mardi 25 octobre 2022, non loin de la Maroquinerie. Photo©️Franck.Unimon

 

Moins de quinze minutes plus tard, je passais devant les Tonton Bringueurs où se tenait un certain nombre de consommateurs, ainsi qu’à l’intérieur. Dans la rue Boyer, je suis aussi passé devant un club de Pilates ( «  En dix séances, vous sentez la différence ») et un futur projet de construction d’appartements luxueux.

 

Puis, la Bellevilloise et la Maroquinerie.

Devant la Maroquinerie, après le concert de Zentone ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

La Maroquinerie est le type de salle de concert que je préfère. Je suis allé une fois ou deux à Bercy. C’est trop grand même si j’y ai de très bons souvenirs :

 

Burning Spear et les Gladiators avec « feu » Albert Griffith.

 

Je suis allé une fois à la Défense Arena, c’était pour Kassav’. Je ne le regrette pas mais j’avais préféré, ensuite, retourner voir Kassav’ à la fête de l’Huma. J’ai ainsi pu voir « feu » Jacob Desvarieux avec le groupe, une dernière fois sur scène, sans le savoir.

 

 

Et puis, il y ‘a le prix de la place. 21,99 euros pour Zentone, hier soir. Je prends. A partir de 30 euros, il me faut une bonne raison. Je ne vais plus à un concert de Björk, que j’avais pu voir lors de son passage à l’Elysée Montmartre après son premier album, Debut, depuis que les places montent à des tarifs auxquels je préfère ne pas penser. La dernière fois que j’ai vue Björk, sur scène, c’était en clôture du festival Rock en Seine. Un très très bon concert. C’était il y a environ 15 ans. J’étais alors célibataire et sans enfant.

 

J’ai accepté de mettre près de 40 euros pour aller voir en décembre Rodolphe Burger au New Morning. Parce-que c’est Rodolphe Burger, que je ne l’ai jamais vu sur scène. Et, parce-qu’il sera accompagné des deux pointures que sont Medhi Haddab, dont je connais un petit peu l’univers,  et Sofiane Saïdi que je ne connais pas du tout.

 

Pour moi, le prix d’une place de concert ne dit rien de la valeur d’un artiste. En novembre, à Massy, il sera possible de voir en concert la plus que très grande chanteuse Oumou Sangaré pour moins de trente euros. C’est bien moins que d’autres artistes, dont les concerts sont plus chers, et dont la voix, à côté d’elle, est une brindille.

 

Je n’ai jamais vu Rodolphe Burger en concert mais cela fait des années que je l’écoute par morceaux. Récemment, j’ai aimé revoir et réécouter sa reprise du Billie Jean de Michaël Jackson. Où Burger joue avec Sarah Murcia, une artiste que je ne connaissais pas il y a encore deux mois et que j’ai aperçue en photo, collée à sa contrebasse,  pour la première fois, en me rendant à une exposition de tableaux d’une ancienne collègue au restaurant-café-salle de concerts le Triton.

 

Pour moi, parler de tout ça a aussi à voir avec le concert d’hier soir. Hier soir, un des guitaristes du groupe Zentone portait un tee-shirt sur lequel on pouvait lire :

 

New Order.

La Maroquinerie, concert de Zentone, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

Nous avons écouté du Dub et du Reggae hier soir. Mais les musiciens que nous avons vus et écoutés viennent d’horizons multiples et multipistes. Tout comme un certain nombre des spectateurs présents, sans doute.

 

La salle était pleine.

 

La Maroquinerie, au début du concert de Zentone, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

Je me demande certaines fois qui je vais voir, parmi les spectateurs. Quel sera leur profil. Même si un profil, une apparence, ne dit rien de définitif ou de notre humeur véritable. Hier soir, le public était un peu plus masculin que féminin. Je dirais à peu près 55 pour cent d’hommes pour 45 pour cent de femmes.

Un public plutôt blanc. Nous devions être dix noirs, en comptant très large, dans la salle. Pour l’âge, je dirais que cela commençait à 25 ans pour monter jusqu’à 50 ans et plus. Mais j’ai aussi vu une enfant d’une douzaine d’années qui devait être avec son père au fond de la salle de concert. J’ai vu une femme d’une bonne vingtaine d’années avec une casquette posée à  l’envers de façon recherchée, portant un blouson type Bombers, jeans troué aux genoux, baskets, le dos vouté, accompagnée au moins d’un homme d’à peu près du même âge, une pinte de bière à la main, allure de geek (ou de skateur), avec casquette, lunettes et barbe de plusieurs jours.

 

Mais j’ai aussi vu un homme d’une cinquantaine d’années, presque habillé comme un cadre sup, au bras de sa compagne énamourée.

 

Les bières étaient de sortie dans la salle. Elles avaient remplacé les cigarettes et les joints. Même si une personne ou deux a pu tirer des lattes sur sa cigarette électronique sans inquiétude.

 

D’abord plutôt au fond de la salle, devant la console de son, je me suis rapidement aperçu que j’étais trop loin pour prendre des photos. Alors que ce que j’aimerais, autant que possible, lors des quelques concerts où j’ai prévu de me rendre, c’est de pouvoir proposer des photos présentables. Des photos qui donnent envie d’aller à un concert, des photos qui donnent envie d’écouter de la musique dans un endroit public.Alors, suivant l’exemple de quelques personnes, que j’avais vu se faufiler vers la scène, je me suis mis à sillonner au sein du public. Et, très facilement, j’ai pu me rapprocher….

La Maroquinerie, pendant le concert de Zentone, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Au début du concert, je n’ai pas pu m’empêcher de penser aux attentats terroristes islamistes « du » Bataclan en novembre 2015. Peut-être que c’est la première fois ou l’une des première fois que je retourne dans une salle de concert depuis ces attentats. Ce n’est pas une histoire de peur.  Je crois que c’est parce-que j’avais été occupé par d’autres événements. Mais tout en étant là, devant Zentone, avec d’autres personnes dans la salle, je me suis dit que nous contribuions, aussi, à nous éloigner de ce trauma.

 

Ensuite, sur scène, Zentone a tenu toutes ses promesses. Le bassiste de Zenzile et celui de High Tone, toujours  devant au milieu de la scène, ont joué par alternance. Celui de Zenzile avait une énergie punk tandis que celui de High Tone était plutôt roots.

 

Le bassiste de Zenzile, pendant le concert de Zentone, ce mardi 25 octobre à la Maroquinerie. Derrière lui, Jolly Joseph. Photo©️Franck.Unimon

 

Le bassiste de High Tone, à la Maroquinerie pendant le concert de Zentone ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Trois ou quatre personnes étaient aux claviers, dont le chanteur Jolly Joseph.

 

Au premier plan, le chanteur Jolly Joseph, à côté de lui, le bassiste de Zenzile, au fond, le guitariste de High Tone. Maroquinerie, concert de Zentone, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Jolly Joseph aux claviers, au milieu, le musicien des instruments à vent et claviers, à droite, le guitariste de Zenzile. La Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022 pendant le concert de Zentone. Photo©️Franck.Unimon

 

Deux guitaristes étaient en lice. Un autre musicien tenait la partition des instruments à vent et de la percussion. A l’arrière scène, au milieu, le batteur a été le ferment d’un Dub intraitable.

Le batteur de Zentone, ferment d’un Dub intraitable. La Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Un des bassistes et le batteur de Zentone. La Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

La Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Concert de Zentone. Photo©️Franck.Unimon

 

Zentone, à la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Zentone, ce mardi 25 octobre 2022, à la Maroquinerie. Photo©️Franck.Unimon

 

Zentone, à la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Concert de Zentone, à la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Zentone à la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Zentone, à la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Zentone, à la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Zentone, à la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Zentone, à la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Zentone, à la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Zentone, à la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Zentone, à la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

Zentone, la Maroquinerie, ce mardi 25 octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

 

Franck Unimon, ce mercredi 26 octobre 2022.

 

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Puissants Fonds/ Livres

L’Amour sous algorithme, un livre de Judith Duportail

L’Amour sous algorithme, un livre de Judith Duportail.

 

 

Appât ou état, son apparition change la donne. Seconde peau de première main, l’Amour est une assez vieille croyance que, quel que soit l’âge, un jour, beaucoup mangent.

 

La journaliste indépendante Judith Duportail a 28 ans lorsqu’elle télécharge en 2014 l’application de rencontres Tinder. On apprend dans son livre que cette application, disponible en France en 2013, a été cofondée par Sean Rad – qui voulait être acteur initialement- en 2012 aux Etats Unis.

 

Judith Duportail est une jeune parisienne qui, lorsqu’elle écrit ce livre, pourrait être décrite comme « émancipée », urbaine, éduquée (un niveau d’études plutôt élevé, Anglais courant) et pourvue d’humour.

 

Sur le papier, Judith Duportail est une personne suffisamment armée pour être aimée.

 

Cela pourra étonner de voir rapproché, ici, le terme « arme » de celui qui consiste à trouver ou à être trouvé par l’âme sœur… mais lorsqu’il s’agit de séduire la personne qui s’aventure à nous plaire, un simple sourire pour elle  est déjà une tentative de capture. Même si sourire n’empêche pas la rupture. Hollie Cook hante cette vérité dans son titre 99 :

 

« Please, don’t give me your smile I Adore cause I can’t touch you no more…. » (« Je t’en supplie, ne m’adresse plus ce sourire que j’adore car je ne peux plus me rapprocher de  toi »).

 

 

Hollie Cook passe cette semaine en concert au Trabendo ce vendredi 28 octobre. Il est possible que j’aille la voir.

 

Le fait que L’Amour sous algorithme ait été écrit par une femme (apparemment en 2019) et ait été cité par d’autres femmes (Mona Chollet et Victoire Tuaillon) préoccupées également par les relations amoureuses entre les êtres humains a son importance. Car officiellement, les hommes hétérosexuels sont des larves de l’Amour.

Et, en tant que larves des sentiments et de l’engagement, ils font beaucoup souffrir les femmes qui sont des êtres beaucoup plus évolués en matière d’engagement et de sentiment. Je l’écris ici avec un peu de provocation misogyne. Mais je résume aussi, je crois, une partie du sujet principal. Parce qu’il y a l’algorithme.  Puis il y a celles et ceux qui l’utilisent et qui sont, en principe, tous, des êtres responsables.

 

Une Digital Native

 

La spécificité de Judith Duportail, qui a écrit L’Amour sous algorithme est d’être, sans doute comme Victoire Tuaillon (conceptrice du podcast et auteure du livre Les couilles sur la table, un livre de Victoire Tuaillon. Premières partiesLes Couilles sur la table, un livre de Victoire Tuaillon. 2ème partie. Ego Trip.) qui a à peu près le même âge, ce que l’on appelle une Digital Native.

 

Soit une personne née à partir des années 80 et très tôt familiarisée avec les environnements numériques et qui, par conséquent, peut être quotidiennement rivée à un écran d’ordinateur, de tablette numérique, de smartphone ou attachée à une console de jeux donnant généralement accès à internet avec un débit illimité.

 

Pour une personne Digital Native, télécharger une application telle que Tinder pour faire des rencontres fait partie du décor de son quotidien. Mais cela fait aussi partie de la norme sociale.

Paris, Place de la Concorde. Début octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

L’Après Meetic

 

Lorsque le site de rencontres Meetic fut créé en 2001, cela fut davantage un événement d’un point de vue sociétal que de s’y inscrire. Car c’était nouveau de s’y prendre de cette manière pour faire des rencontres. C’était plutôt une pratique secrète et honteuse. Il pouvait être plus facile de s’afficher comme une personne célibataire dans la vie ordinaire que de raconter que l’on avait passé plusieurs heures de sa journée ou de sa nuit à écluser un site de rencontres.

 

Dans les années 2000, le site Meetic était le site de rencontres dont on parlait le plus. Le site existe toujours et serait toujours un site de rencontres qui compte. Sauf que, depuis 2001, les sites de rencontres, les réseaux sociaux, la technologie informatique mais aussi la téléphonie mobile se sont beaucoup développés et ont transformé la façon de se rencontrer mais aussi d’interagir avec les autres tant d’un point vue professionnel, administratif, économique, amical qu’amoureux. En 2001, par exemple, il était impossible de consulter son compte bancaire sur son smartphone. Et, il était plutôt rare d’organiser des réunions ou des « rencontres » à distance sur Skype.

 

Judith Duportail, amatrice de Tinder

 

 

Judith Duportail, née en 1986, Digital Native, a voulu en savoir plus sur ce qu’il y avait dans le ventre de l’application Tinder qui a le pouvoir de retourner les tripes de ses usagers. Célibataire et en perte d’amour lorsqu’elle télécharge l’application Tinder, elle a ce réflexe à la fois féministe, personnel mais aussi journalistique.

 

Quand paraît son livre, nous sommes aussi dans l’ère des « lanceurs d’alerte ». Et, Judith Duportail a sans aucun doute eu connaissance de l’affaire mondialement médiatisée en 2013 de l’Américain Edward Snowden (son aîné de 3 ans) ou de l’affaire Wikileaks, d’abord, en 2006 avec Julian Assange.

 

Des « affaires » comme l’affaire Wikileaks et l’affaire Snowden mais aussi des œuvres cinématographiques comme Matrix ( réalisé en 1999) qui ont eu des retentissements médiatiques mondiaux auront démontré que le monde numérique a non seulement des failles mais peut aussi servir des intentions malveillantes.

 

Une personne Digitale Native un peu soucieuse et critique vis à vis de cet environnement numérique qui lui est aussi familier que peut l’être une forêt pour un garde champêtre, peut avoir à cœur de mieux connaître ce site de rencontres à qui elle confie sa vie sentimentale mais aussi son avenir. Mais aussi disposer de suffisamment de compétences et de culture technique pour mieux comprendre comment cette entreprise numérique et commerciale marche.

 

En plus de ces compétences et de cette culture numérique, Judith Duportail, devenue journaliste indépendante après avoir travaillé pour Le Figaro, fait aussi montre d’une grande créativité tant relationnelle que journalistique pour rencontrer certains représentants de Tinder France. Elle  réussira même à obtenir une interview-pré-programmée- même le cofondateur de Tinder, Sean Rad, qui est encore alors le PDG de Tinder.  Mais aussi de Whitney Wolfe, ex-cofondatrice de Tinder. Celle qui, «  a eu l’idée d’appeler l’application Tinder, qui se traduirait par « allume-feu » en Français ». (L’Amour sous algorithme, page 183).

 

Judith Duportail nous apprend que Whitney Wolfe, après avoir dû quitter Tinder a créé Bumble «  une application de rencontre qui se présente comme féministe. Avec ses 36 millions d’utilisateurs, l’appli est maintenant le principal concurrent de Tinder, et le groupe Match cherche à la racheter. Sur Bumble, ce sont les femmes seulement qui peuvent prendre l’initiative d’engager la conversation avec les hommes ». ( page 181, de L’Amour sous algorithme).

 

La salle ovale de la Bibliothèque Nationale Richelieu, octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

Le rêve sous algorithme

 

 

Si Duportail nous parle de Tinder et de la façon dont ce site de rencontres peut collecter une quantité invraisemblable d’informations personnelles de ses usagers, puis les revendre à d’autres entreprises, on comprend ( ou l’auteure nous l’explique) que cette « méthode » de siphonage des informations personnelles est aussi utilisée par un certain nombre des sites de rencontres et des réseaux sociaux qu’il est désormais courant d’utiliser quel que soit notre âge, notre sexualité, notre poids, notre religion, notre catégorie socio-professionnelle ou nos origines.

 

Le titre du livre de Judith Duportail s’appelle L’Amour sous algorithme mais il aurait pu aussi s’intituler Le rêve sous algorithme. Et le mot « algorithme » peut bien des fois se faire remplacer par le mot « cloche ».

 

Car l’auteure nous démontre comment sur Tinder, qui se veut démocratique,  les rencontres sont orientées et quadrillées selon les résultats de certains « échanges » entre usagers mais aussi selon certaines valeurs plutôt…conventionnelles.

Malgré la présentation « jeune » et « décontractée » affichée par les représentants et le discours de la « boite » Tinder, les entrailles des algorithmes, lorsque passées au scalpel de l’enquête de Duportail se montrent beaucoup moins novatrices.

 

Lorsque l’auteure questionne Sean Rad, alors PDG de Tinder, quant à la tendance consumériste des rencontres sur le site d’applications, celui-ci répond que beaucoup de personnes leur écrivent pour les remercier de leur avoir permis de trouver leur bonheur sur Tinder. Ce genre d’histoires existe bien-sûr. Mais pas pour d’autres et, cela, dans une proportion difficile à définir. Car des millions d’usagers persistent à se connecter telles des souris de laboratoire enfermées dans une cage- ou sous une cloche- qui continuent de faire tourner la même roue qui est la route du cash pour un site comme Tinder.

 

« Chaque jour, se produisent 2 milliards de matchs sur Tinder. L’application, présente dans 190 pays revendique être à la base d’un million de dates par semaine. Un million ! Le succès de Tinder est indéniable. C’est un outil incroyable ». ( page 219 de L’Amour sous algorithme ).

 

L’addiction à la connexion

 

 

 

Dans L’Amour sous algorithme, Duportail nous parle de l’addiction à la connexion au site qu’elle compare entre-autres à celle des joueurs de casino. Très vite, elle nous a parlé, lors de ses débuts sur Tinder, du fait que son ego a pu être rapidement boosté à recevoir un certain nombre de matches. Avant ensuite de déchanter devant ce besoin recomposé de recevoir de nouveaux shoots de matches mais aussi devant la désillusion que lui font vivre ses rencontres. Lorsqu’elle nous raconte certaines de ses rencontres et déconfitures, on se croit par moments dans un mauvais sketch de Blanche Gardin, de Tania Dutel ou de Marina Rollman.

 

Boire, fumer, draguer et coucher avec qui, quand et comme on veut, plus ou moins bien  gagner sa vie, vivre chez soi ou en coloc, conduire une moto ou une voiture, avoir son réseau d’amis, sortir la nuit, découcher, danser, voyager, dire des gros mots ou ce que l’on pense quand on le pense, bien s’exprimer, avoir de la répartie et un humour supersonique, avoir un très bon niveau d’études, une certaine réussite sociale, cela ressemble à une vie d’adulte émancipée. Mais cela n’empêche pas la claudication alternative devant l’alerte de La rencontre.

  

La dépendance affective

 

Après nous avoir parlé de l’addiction au site,  Judith Duportail fait bien de souligner  l’engrenage de la dépendance affective qu’entretient un site (tout site ?) de rencontres. Car les comportements d’addiction et la dépendance affective sont attachés. Et, lorsque l’on se retrouve imbriqué entre les deux, on peut avoir du mal à réellement s’émanciper de certaines conduites d’échecs lors de nos rencontres sentimentales :

 

« (….) Selon John Bowlby, la moitié des adultes dans le monde occidental souffrent d’un trouble de l’attachement plus ou moins prononcé. Certains arriveront à bien vivre avec, ou n’en seront pas trop handicapés. Car attention, toute relation sentimentale à un autre, tout attachement, induit une forme de dépendance. On dit bien à ses amis :

« Je peux compter sur toi » ou « Je suis là pour toi », ce qui signifie qu’on a besoin les uns des autres, qu’on se félicite d’honorer cette interdépendance. Une dépendance consentie, cadrée. Dans le cas des dépendants affectifs, le regard de l’autre prend trop de place, trop d’importance. Car ils cherchent à l’extérieur d’eux-mêmes comment soigner leur blessure initiale ». (page 139 de L’Amour sous algorithme).

 

 

A ce jour, je n’ai pas lu d’ouvrage de John Bowlby. Mais j’aimerais bien savoir quelles sont les causes, selon lui, de ce « trouble de l’attachement plus ou moins prononcé » dont « la moitié des adultes dans le monde occidental souffrent ». J’imagine que certains modes de vie doivent y être pour quelque chose. Même si le trouble de l’attachement « plus ou moins prononcé » a sans doute toujours existé en occident mais aussi ailleurs.

 

La salle ovale de la Bibliothèque nationale Richelieu, octobre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Faire le ménage dans nos méninges et nos névroses

 

 

Le mirage des sites de rencontres et des réseaux sociaux, qui sont des média plutôt extraordinaires à l’origine, c’est de nous abonner à la croyance qu’ils peuvent très facilement « nous aider » à gommer ce qui nous dérange dans notre vie ordinaire et nous faire vivre des miracles répétés. En nous offrant leurs « services ».

 

Alors qu’il faudrait d’abord, au préalable, vérifier dans quelle disposition mentale et affective on se trouve, et faire le ménage dans nos méninges et nos névroses, lorsque l’on se rend dans ce genre d’endroits :

 

Les sites de rencontres et les réseaux sociaux.

 

Après tout, toute personne qui va se lancer dans une aventure vérifie d’abord son matériel, sa condition physique et mentale, mais aussi la viabilité de son projet auparavant. Et, pour cela, le plus souvent, même si ensuite elle décide de tenter l’aventure, elle sait d’abord se faire entourer et conseiller par des spécialistes, des professionnels ou par des personnes qui ont tenté  cette aventure avant elle.

 

C’est pourtant le contraire qui se passe avec les sites de rencontres. Appâtés par le miracle qui nous attend après quelques mouvements de doigts, nous nous muons en Indiana Jones de la rencontre et sautons les étapes.

 

Lorsque j’avais connu l’expérience du site de rencontres Meetic à la fin des années 2000, j’étais célibataire, plus ou moins déprimé et en recherche d’une histoire d’Amour. Mais j’allais bien mieux que d’autres. Je n’étais ni sous anti dépresseurs et pas sous le coup d’une rupture toute fraiche de quelques minutes. J’avais besoin d’élargir mon cercle de rencontres. Et Meetic était une nouvelle façon pour peut-être élargir ce cercle.

En outre, le fait d’être actif dans la recherche, avait au départ quelque chose de sans doute valorisant. Agir plutôt que subir. Essayer cette nouvelle façon de faire au lieu de la dénigrer d’emblée. Pour ces raisons, au départ, l’expérience Meetic fut une expérience d’ouverture. Car toutes mes rencontres jusqu’alors s’étaient faites sans passer par un  site.

 

J’ai oublié combien de temps j’étais resté inscrit sur Meetic. Peut-être à peu près deux ans. A l’époque, le site de rencontres était exclusivement payant pour les hommes. Et gratuit pour les femmes. Cela m’a toujours paru injustifié.

 

J’ai toujours eu le sentiment que le fait de pouvoir s’inscrire gratuitement maintenait la plupart des femmes du site dans la position passive des princesses qui passaient leur temps  à attendre le prétendu prince charmant. Car j’avais été édifié de lire sur bien des annonces de femmes inscrites, qui se présentaient comme des femmes ayant la trentaine tout au plus, qu’elles recherchaient le « prince charmant ».

 

Que ce soit dans la vraie vie ou sur un site de rencontres, pour moi, celle ou celui qui recherche le prince charmant, consciemment ou inconsciemment, ne le trouvera pas.

En tout cas, moi, je ne me vois pas comme un prince charmant. Et, je perçois cette attente comme une dictature. Une telle attente me donne plutôt envie de me comporter de manière très provocante.

 

Et, j’avais peut-être eu tort alors, mais chaque fois que j’avais vu mentionnée cette quête ou cette attente du « prince charmant », j’avais fui. Je ne correspondais ni au portrait-robot ni au portrait-mental d’un prince charmant. Et, c’est toujours le cas aujourd’hui. 

 

Pourtant, je cherchais véritablement une histoire d’Amour sur Meetic. Et je sais qu’il y a des hommes qui cherchent aussi à vivre une sincère histoire d’Amour avec des femmes. Il reste donc énigmatique pour moi que des femmes instruites comme Duportail, Tuaillon et Chollet, et celles qui leur ressemblent, puissent avoir eu tant de mal à croiser ces hommes qu’elles ont cherché ou cherchent.

 

Pour moi, l’explication ne tient pas uniquement dans le patriarcat. Mais aussi dans le fait que certaines femmes dites émancipées le sont bien moins qu’elles ne le croient ou l’affirment. Et, un certain nombre d’entre elles continuent de suivre celle ou celui qui sera le mieux doué(e) pour leur jouer la comédie. Puisque dès lors que quelqu’un nous « fait quelque chose » ou nous « fait vibrer », on aime bien se raconter, même si assez vite cette personne honore très mal ses promesses ou ses engagements, que, malgré tout, cela vaut le coup. Et que cela vaut aussi le cul, par la même occasion.

 

 

Le grand remplacement

 

 

Sur Meetic, j’avais connu une histoire de cinq mois qui m’a fait un effet durable puisque je me rappelle toujours du prénom et du nom de cette personne comme de certains moments vécus avec elle près de quinze ans plus tard.

 

Mais j’avais aussi été très influencé par le côté supermarché du site.

 

Et, lorsque étaient apparues des tensions entre elle et moi, j’avais été rapidement agacé par ce que je voyais comme des caprices de petite fille. Me disant que si notre relation se terminait que je retrouverais rapidement- sur le site- quelqu’un d’autre de « bien » qui me ferait moins chier. Ma future ex de Meetic s’était sûrement comportée comme une personne capricieuse, quelque peu immature et tyrannique, exigeant de moi des gages d’Amour qui me déconcertaient mais aussi mettant en doute la sincérité de mon attachement. Peut-être que notre relation était-elle réellement privée de futur. Néanmoins, si elle et moi nous étions rencontrés dans mes conditions de vie habituelles (ce qui aurait été assez peu probable étant donné que nous évoluions et avons sans doute continué d’évoluer dans des univers culturels, économiques et professionnels très différents ), je crois que j’aurais été plus tolérant.

Je n’aurais pas eu ce réflexe, très vite acquis en étant inscrit sur le site alors que je n’avais pas rencontré tant de personnes que ça avant elle, de me dire que je pourrais très vite la remplacer. Et, lorsqu’elle m’avait fait sa « crise » d’autorité ou de caprice, je l’avais déposée en voiture là où elle me l’avait demandé/exigé. Afin de lui laisser cette assurance que, oui, je la considérais vraiment. Elle, qui aurait voulu qu’à notre retour de Normandie, je la dépose devant chez elle, à Paris, rue du Bac, en voiture. Pour qu’ensuite, je retourne chez moi toujours en voiture chez moi à Cergy le Haut où j’habitais alors. J’avais refusé de me retrouver inféodé au rôle de l’homme qui conduit sa compagne jusqu’au pas de sa porte et qui ne compte pas les kilomètres, le temps et l’essence pour ensuite retourner chez lui. Cette erreur-là, en plus de celle d’avoir refusé de rencontrer sa mère, me fut fatale.

 

Ma future ex de Meetic eut quelques pleurs. M’affirma sans doute que je n’avais pas de sentiments pour elle. De mon côté, je refusais que nous restions « amis » comme elle me le proposait. Nouvelle erreur stratégique de ma part. On croit que je parle d’une jeune femme d’à peine 18 ans ? Si j’avais bien 7 ou 8 ans de plus qu’elle, ma future ex avait alors près de trente ans. Ce qui n’excluait pas, visiblement, de pouvoir se comporter en certaines circonstances comme une adolescente d’à peine 18 ans.

 

Notre séparation devint définitive. Sans doute par orgueil, ainsi que dans la douleur, elle s’emmura dans sa décision, « conseillée », je crois, au moins par certaines de ses amies qui pensaient comme elle.  Nous nous revîmes elle et moi au moins deux fois, dont une fois dans cet appartement qu’elle avait acheté dans le 14ème arrondissement et qui faisait deux fois la superficie de mon studio de banlieue. Une autre fois, lorsque nous allâmes ensemble au festival de musique Rock en Seine clôturé avec maestria par Björk, elle avait rencontré quelqu’un.

Plusieurs années plus tard, j’appris par hasard sur Facebook qu’elle s’était mariée. Elle me répondit une première fois pour ne plus me répondre.

 

Hors bord relationnel

 

Après elle, je ne connus pas d’autre relation aussi notable d’un point de vue affectif en passant par Meetic. J’en avais aussi assez de passer mon temps sur le site telle une personne en recherche permanente d’emploi devant adresser d’innombrables CV qui ne débouchaient sur rien.

Pour être suffisamment inspiré et susciter l’intérêt d’une femme, il me fallait avoir le moral et être inspiré lorsque j’écrivais un message que je devais multiplier pour pouvoir, mathématiquement, provoquer une réaction ou deux favorables. Or, pour cela, il fallait passer du temps sur le site. Et, plus je passais du temps sur le site,  plus je me démoralisais devant le vide numérique qui revenait constamment à ma rencontre. En prenant son temps, c’est à dire le mien.  Mon temps qui était associé à mon espoir de « trouver » quelqu’un.

 

Je peux imaginer que mon ex de Meetic, apprenant cela, aurait vu dans mes déboires un châtiment juste et mérité pour mon « comportement » à son égard. Alors que je crois qu’il y a surtout eu de l’incompréhension entre elle et moi. Mais aussi, pour moi, une sorte de décalage, ou une forme de sentiment de dissociation, entre la réalité de cette relation sentimentale, car j’avais des sentiments pour elle contrairement à ce qu’elle a cru ou eu besoin de croire, et sa soudaineté.

 

Les rencontres via les sites abrègent beaucoup la durée du temps de rencontre. Si certaines personnes sont des adeptes du coup de foudre ou des rencontres flash, j’ai plutôt besoin d’une certaine « maturation » de la rencontre et du sentiment pour être « dans » l’histoire. Si j’avais été bien sûr content de rencontrer mon ex de Meetic et que nous avions une réelle connivence, je crois, sur certains sujets, le fait d’avoir « obtenu » cette rencontre aussi improbable, aussi « facilement », m’a empêché de me mettre dans les vraies conditions de la rencontre. Pour employer une image grossière, une fois la rencontre faite, j’avais sans doute l’impression que notre relation était une péniche, qu’il y avait le temps. Alors que j’étais sur un hors bord.

 

Je fus aussi très étonné par le gâchis fait par ces usagères du site soit par manque de sincérité ou par manque de maturité. Car le côté supermarché des sites de rencontre vaut aussi pour les femmes. Ce ne sont pas seulement certains hommes qui vont sur les sites de rencontres comme on se rend dans un supermarché.

Paris. Photo©️Franck.Unimon

Les croyances d’un vieux à propos des rencontres

 

Près de quinze années environ après mon expérience Meetic, la lecture facile et plaisante de l’ouvrage de Judith Duportail confirme mes anciennes impressions. Et, cela ne me donne pas du tout envie de retourner faire le mur un jour sur un site de rencontres.

Aujourd’hui, pour rencontrer quelqu’un, je recommanderais plutôt le cercle de connaissances et d’amis ; la découverte de nouvelles associations ou de clubs culturels sportifs ; le lieu de travail ou les voyages ; ou la fréquentation répétée de tout endroit qui permet des rencontres sociales et personnelles viables, agréables et autres que celles que l’on connaît déja.

Je connais par exemple un couple qui s’est formé dans mon club d’apnée. Tous deux séparés de leur côté, chacun mère et père. Je sais qu’elle, qui faisait au départ de la plongée dans le club a ensuite rejoint la section apnée lorsqu’elle l’a aperçu. C’est elle qui me l’a raconté.

 

 

Mais avant toute rencontre, il y a d’abord le préalable indispensable d’être d’abord véritablement « disposé » pour s’engager dans une relation intime. Parce-que si l’on a peur de partager son intimité ou si l’on préfère conserver exclusivement son territoire à soi et pour soi, on peut rencontrer un certain nombre de personnes tout à fait recommandables et très bien s’arranger pour leur tourner leur dos ou les dissuader de s’approcher.  

 

Je crois que ces dernières précautions restes valables même si l’on préfère ou si l’on ajoute les sites de rencontres, les forums ou les réseaux sociaux pour accroître ses chances de rencontrer quelqu’un et ainsi déjouer l’algorithme de l’accablement sentimental.

 

Franck Unimon, ce lundi 24 octobre 2022. 

 

 

 

 

 

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Addictions Puissants Fonds/ Livres

Rien ne dure vraiment longtemps, un livre de Matthieu Seel

Rien ne dure vraiment longtemps, un livre de Matthieu Seel.

 

Matthieu Seel, le métis adopté, a été la voix de la série podcast Crackopolis. Dans cette série, il racontait le hijack que peut-être le crack en plein Paris, en outre dans le 19ème arrondissement où il a d’ailleurs grandi et où, plus jeune, il avait eu Peter Chérif et les frères Kouachi comme copains de primaire et de collège.

 

Certains veulent voir, Matthieu Seel a tout vu sauf l’histoire de ses origines dont les barreaux, par condensation, lui résistent. C’est peut-être pour cette histoire qu’il ne connaît pas qu’il commence par fumer des paquets de joints dès l’âge de dix puis qu’il finit, plus tard, par consulter le caillou.

 

Matthieu Seel ne nous raconte pas tout. Pour cela, il faudrait absolument se souvenir et il a aussi besoin d’oublier. Mais il y en a assez pour dix dans ce qu’il nous dit. Celle ou celui dont la vie dévie pour dealer et pour attraper du caillou se surpasse jusqu’à un point culminant qui se déplace sans cesse et qui est à peine imaginable.  

 

Il y a des existences beaucoup plus simples et beaucoup plus reposantes. Mais pour cela, il faut être assez robot. Matthieu Seel n’en n’est pas un et il connaît difficilement le repos depuis assez tôt. Artiste photo un temps, vivant la nuit, il finit par vendre son appareil et par connaître des journées de 96 heures sans dormir lorsque le crack est devenu son métronome. Combien de personnes, ou plutôt de formes, a-t’il rencontrées parmi lui et qui, comme lui, pointaient vers les mêmes usages ? De toute façon, ces formes de rencontres ne tenaient pas.

 

Sa mère ( adoptive) fait partie de celles et ceux qui ont tenu. Et, je comprends qu’une Virginie Despentes ait cru en lui pour ce livre car il aurait pu avoir un rôle dans son film Baise moi. Comme je comprends aussi qu’une personnalité comme Slimane Dazi soit ce parrain qu’il remercie, ainsi que beaucoup d’autres, à la fin de son livre. J’aurais été beaucoup plus étonné si Guillaume Canet ou André Dujardin l’avait parrainé.

 

Dans Rien ne dure vraiment longtemps , sorti en septembre 2022, Seel raconte les mauvais passeurs d’histoires, les arnaques, les guet-apens, l’entraide, la survie dans la rue, les échecs sentimentaux, la paranoïa, sa famille, l’hôpital, les tentatives de sevrage à Pierre Nicole, le centre thérapeutique de la Croix Rouge, et à Marmottan ( La ferveur de Marmottan). Eduqué, autodidacte, il est loin d’être idiot. D’autres sont comme Matthieu Seel mais leurs mots, leur nom et leur visage ne nous parviendront pas.

 

 

Franck Unimon, ce mardi 18 octobre 2022.

 

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Puissants Fonds/ Livres

Les Argonautes, un livre de Maggie Nelson

Les Argonautes, un livre de Maggie Nelson.

 

 

Maggie Nelson est une femme de l’être. Debout dans mon train, que j’ai attrapé de justesse, alors que je suis en transit entre ma ville de banlieue parisienne et la gare de Paris St Lazare, je me répète cette phrase.

 

Maggie Nelson est une femme de l’être.

 

D’après sa photo en médaillon au début du livre, Maggie Nelson est l’Américaine « typique », blonde, yeux clairs, regard direct, sourire évident, plutôt jolie, svelte, fit.

 

Cette fille, née en 1973, respire la vie.

 

Mais les Etats-Unis, c’est de là que « vient » Maggie Nelson, est aussi le pays des positions extrêmes. Et, Maggie nous jette dans le refrain de ses extrêmes dès la première page de son livre coupée en deux. Une partie autobiographique où elle nous encule en nous parlant de son Amour pour son compagnon Harry, née femme, père d’un petit garçon. Puis, une autre, théorique ou conceptuelle, où elle nous parle de Wittgenstein :

 

« Avant notre rencontre, j’avais consacré ma vie à l’idée de Wittgenstein selon laquelle l’inexpressible est contenu – d’une manière inexpressible ! dans l’exprimé (….) ».

 

C’est ce que l’on appelle être une fille bordée par une cérébralité plutôt exacerbée. Et, dès ce passage, l’intellectualité poing fermé de Maggie Nelson me bouscule. Son compagnon Harry a donc vraiment quelque chose de particulier pour avoir non seulement pu la rendre hautement amoureuse mais aussi pour être capable de lui donner la répartie lors de leurs débats. Car, durant son livre de plus de deux cents pages, Maggie Nelson va alterner avec des passages de sa vie et des références poussées aux œuvres de diverses personnalités pour nous parler d’identité, de « genre », du « queer », de « binarité », « non-binarité » mais aussi de la famille, de la norme, l’Amour, de la solitude, du deuil, de la sexualité, du couple, du mariage, de la parentalité, de la grossesse et de la maternité… :

 

Eula Biss, Deleuze, Eve Kosofsky Sedgwick, Susan Fraiman, Lee Edelman, Michel Foucault, Judith Butler, Anne Carson, Luce Irigaray, D.W Winicott, Pema Chödrön, Leo Bersani, Elizabeth Weed, Susan Sontag, Jane Gallop, Rosalind Krauss, Jacques Lacan, Janet Malcolm, Kaja Silverman, Eileen Myles, Beatriz Preciado, Alice Notley, Audre Lord, Deborah Hay, Sara Ahmed, Roland Barthes ….

 

Les travaux mais aussi les noms de ces auteurs et de ces personnalités sont sûrement familiers à des universitaires comme Maggie Nelson entraînés à les triturer ainsi qu’à celles et ceux dont la vie personnelle requiert la compréhension et la connaissance des ouvrages de ces personnalités. Maggie Nelson et son compagnon Harry sont de ces personnes qui possèdent cette double caractéristique.

 

Pour ma part, jusqu’à maintenant, j’ai plutôt vécu à côté de l’expérience de toutes ces personnalités. Aussi, en lisant  Les Argonautes, j’ai connu bien des absences de compréhension. Bien des fois, il m’aurait presque fallu, comme lorsque l’on fait des mots croisés, un endroit où l’on peut trouver et vérifier les bonnes réponses.  Cela ne figure pas dans Les Argonautes. Pour cette raison, sa lecture m’a été difficile et m’a pris du temps.

 

Plus de deux mois. Et, je préfère (me) dire que j’ai peu compris ce que Maggie Nelson a pu extraire des diverses réflexions de ces auteurs qu’elle cite plutôt que de me ridiculiser en affirmant m’y être senti comme chez moi. Et d’ouvrir le gaz alors que je crois allumer la lumière. Première conclusion immédiate, jamais, je n’aurais pu convenir à une Maggie Nelson et la séduire.

 

La tranche autobiographique de Les Argonautes, elle, m’a par contre été plus « facile » à suivre, page 37 :

 

« (….) Mon beau-père avait ses défauts, mais tout ce que j’avais pu dire contre lui est revenu me hanter, maintenant que je sais ce que c’est que de se tenir dans cette position, d’être tenue par elle.

Quand tu es une belle-mère, peu importe à quel point tu es merveilleuse, peu importe l’amour que tu as à donner, peu importe à quel point tu es mûre ou sage ou accomplie ou intelligente ou responsable, tu es structurellement vulnérable à la haine ou au mépris ; et il y a si peu de choses que tu puisses faire contre ça, sinon endurer et t’employer à cultiver le bien-être et la bonne humeur malgré toute la merde qui te sera balancée à la gueule ».

 

Je lisais encore Les Argonautes, je crois, lorsque je suis allé voir le film Les enfants des autres de Rebecca Zlotowski. Le personnage interprété par l’active actrice Virginie Efira ( inspiré de la vie personnelle de la réalisatrice) se reconnaîtrait dans ce passage.

 

Le rôle joué par Virgine Efira dans Les enfants des autres est celui d’une femme qui ne peut pas ou ne peut plus enfanter mais qui est disposée à (se) donner son amour maternel à la fille de celui qu’elle aime, interprété par l’acteur Roschdy Zem.

 

Maggie Nelson, elle, est aimée de Harry qu’elle n’a pas à partager avec un ex ou une ex. Et, elle est aussi une œuvre d’endurance et de bien-être. Entre son rôle de fille qui a perdu son père, de belle-mère du fils de Harry, de compagne amoureuse qui entoure son mari (Harry) « en cours de transition », de personne et d’universitaire queer qui refuse de faire la retape de la norme patriarcale et hétérosexuelle puis de femme qui, la trentaine passée, aspire à devenir mère en recourant à l’insémination artificielle, Maggie Nelson porte beaucoup.

 

Y compris, je trouve, une partie de la « masculinité » de son mari, Harry Dodge, un artiste, qui est pourtant avant leur rencontre une personne qui s’affirme déjà comme un homme.

Cependant, Maggie Nelson nous parle de Harry de telle façon que nous voyons un homme, chaque fois qu’elle le mentionne. Avant même que celui-ci ne soit opéré et lorsqu’elle nous raconte ensuite lui faire ses injections de testostérone. En cela, et je peux imaginer que cela pourrait déplaire au couple que forment Harry et Maggie, il me semble que Maggie Nelson, en tant que « femme », contribue aussi à faire de sa moitié un homme. Son regard et sa pensée de femme sur sa moitié (Harry) me fait un peu l’effet du pollen sur la fleur.

 

Phénomène plutôt courant, finalement, car la biologie ne peut se suffire à elle-même pour former ou établir des rôles durables entre être humains :

Il ne suffit pas d’être une femme et un homme biologiquement fertiles pour être instinctivement mère et père lorsque le bébé naît. Il faut aussi suffisamment de volonté  mais aussi la capacité ou la solidité émotionnelle et affective pour l’être.

 

A la fin de son livre, Maggie Nelson nous le démontrera autrement que théoriquement en nous parlant des parents biologiques de Harry que celui-ci recherchera. Harry, vers la trentaine, retrouvera sa mère biologique, lesbienne séparée de son père, ainsi qu’un de ses frères resté vivre avec leur père, décrit comme un homme violent. On apprendra qu’Harry, née fille, éduquée avec amour par ses parents adoptifs, s’en est bien mieux sorti, que son frère ( élevé par leur père biologique) devenu toxico cumulant les incarcérations, et, sans doute, leur propre mère biologique.

 

 

La pensée très technique de Maggie Nelson, lorsqu’elle cite certains auteurs, m’a plusieurs fois distancé mais elle m’a, aussi, plus d’une fois averti.

Lorsqu’elle parle du film X-Men, le commencement, regardé avec Harry, on voit par exemple ce film commercial grand public, inspiré de comics américains lus par des millions d’enfants et d’adolescents de par le monde depuis plusieurs générations, autrement que comme nous pousse généralement à le faire, la pensée « mainstream », superficielle et hétéro.

 

A la fin de Les Argonautes, l’autobiographique et un certain humour prennent le dessus comme elle nous raconte sa grossesse puis son accouchement et sa maternité, concomitante, avec  la « testostéronisation » d’Harry. Il est alors très drôle de voir Harry adopter certains traits caricaturaux prêtés aux hommes. Des traits dont bien des femmes « féministes » se plaignent.

 

Et, paradoxalement, alors que Maggie Nelson, durant tout son livre,  s’est opposée- avec Harrry- à certaines normes de genre, on peut se demander si être une femme et un homme se résume à une somme d’hormones, page 206 :

 

« (….) J’ai une phobie de la salle de bain. Jessica veut sans cesse que je fasse pipi, mais m’asseoir ou m’accroupir est impensable. Elle me répète que je ne peux pas arrêter les contractions en restant immobile, mais je pense que je peux. Je suis allongée sur le côté, je serre la main de Harry ou celle de Jessica. Debout comme pour danser un slow avec Harry, je fais pipi sans le vouloir, puis encore une fois dans le bain, où des secrétions de mucus rouge sombre commencent à flotter. Incroyable : Harry et Jessica se commandent de la nourriture et mangent ».

 

Les Argonautes, paru en 2015 dans sa version originale, publié en Français en 2017, est un livre qu’il faut prendre le temps de lire et de relire.

 

Franck Unimon, ce mardi 18 octobre 2022.

 

 

 

 

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Cinéma

La Cour des miracles, un film de Carine May et de Hakim Zouhani

La Cour des Miracles un film de Carine May et Hakim Zouhani

 

 

Au travers de certains films, on peut quelques fois voir dans le cinéma comme dans le ciel ou la terre, ce qui pousse tous les jours autour de nous.

 

J’ai vu trois films au cinéma hier et aujourd’hui. Cela ne m’est pas beaucoup arrivé depuis que je suis devenu père de voir trois films en un jour et demi. Le premier film a été La Cour des Miracles de Carine May et Hakim Zouhani. Je me devais d’aller le voir.

 

Le premier miracle de Carine May et de Hakim Zouhani, derrière celui de leur premier passage au long métrage après plusieurs courts et moyens métrages, tels que La Rue des Cités,  La Virée A Paname et Molii , est d’avoir pu faire une réserve de leur comédie.

 

L’acteur Gilbert Melki.

 

La banlieue parisienne, en Seine Saint Denis, l’inégalité des expériences et des chances malgré les atouts dont on dispose et la vitrine de la réussite parisienne géographiquement proche mais historiquement et économiquement éloignée sont quelques uns des thèmes abordés dans les films de Carine May et de Hakim Zouhani. Devant leur film, on peut -aussi- penser au documentaire La Cour de Babel réalisé en 2013 par Julie Bertuccelli.

 

Quand Kielowski, dans les années 90,  avait réalisé sa trilogie Trois couleurs Bleu, Blanc et Rouge, il ne nous parlait ni de banlieue ni d’école publique mais de certaines épreuves morales. Après avoir vécu ces épreuves morales, et en avoir fait le deuil, on pouvait encore rêver. Devant La Cour des Miracles, c’est beaucoup plus difficile. Je me dis que la Man Tine du début du 20ème siècle de Rue Cases Nègres (l’œuvre de Joseph Zobel adaptée en 1983 par Euzhan Palcy) avait plus d’espoir pour son petit José que nous ne pouvons en avoir pour l’avenir  des enfants de l’école Prévert de La Cour des Miracles.

 

Les actrices Anaïde Rozam ( Marion, l’idéaliste) et Rachida Brakni ( Zahia, la directrice de l’école Jacques Prévert).

 

A ces sujets, proches de la chanson It noh funny de LKJ dans les années 80, on pourrait préférer regarder un nouveau combat de MMA, une nouvelle dystopie  ou écouter un titre de Dua Lipa. Cependant, Carine May et Hakim Zouhani parviennent à nous tirer vers leur optimisme.

 

« Ce n’est pas contre vous. Vous, vous défendez votre école et, moi, je défends mon enfant ! » dira Mme Nedjar, un des principaux personnages antagonistes du film                ( interprété avec délice par l’écrivaine Faïza Guène ) la mère d’un des enfants scolarisés à l’école Prévert à sa directrice, Zahia, interprétée par Rachida Brakni.

Carine May et Hakim Zouhani, eux, défendent leur vision- féministe et égalitaire- du monde comme leur usage du cinéma. Ils nous montrent des visages et un univers que nous voyons encore assez peu sur grand écran. La banlieue qu’ils filment (Paris, pour changer, n’y est jamais montrée)  n’est ni une expo de racailles ni une fontaine de crackeux. Leur casting est aussi à l’image de la mixité sociale à laquelle ils aspirent. Puisqu’il est composé de Rachida Brakni et de Gilbert Melki, des acteurs rapidement identifiables, pour leur carrière ou pour certains de leurs rôles « sociétaux » (Brakni dans Neuilly, sa mère) et d’acteurs et de personnalités vus et entendus ailleurs tels que Faïza Guène, donc, mais aussi Disiz, Steve Tientcheu ou Mourad Boudaoud. La photo de l’affiche de leur film ressemble à ces photos de classe d’il y a « longtemps » dans les écoles publiques, d’il y a trente ou quarante ans.

Les acteurs Anaïs Rozam, Disiz et Mourad Boudaoud.

 

Franck Unimon, ce vendredi 30 septembre 2022

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Addictions

La ferveur de Marmottan

A la Cigale, le vendredi 3 décembre 2021. Le poing levé, Alain, un des accueillants de Marmottan. Photo©️Franck.Unimon

La ferveur de Marmottan

 

( en cliquant sur ce lien , à droite, une petite vidéo apparaît ) Hommage de M.Hautefeuille aux anc de Marmottan .   

Cet article fait suite à Les cinquante Temps de Marmottan. 

 

Marmottan, le service d’accueil et d’hospitalisation spécialisé dans le traitement des addictions, situé dans le 17 ème arrondissement de Paris, rue Armaillé, près des Champs Elysées, a longtemps fait partie, pour moi, de ces services connus pour eux-mêmes. Porteurs d’un nom et d’une identité qui se suffisent à eux-mêmes pour parler d’eux. Un peu comme cela a pu être le cas pour Miles, qui reste mon musicien préféré, même plus de trente années après sa mort. Même après avoir, depuis, aimé découvrir et écouter d’autres artistes. Tout est fonction de la période de notre vie au cours de laquelle on a effectué certaines rencontres et du tournant que, pour nous, ces rencontres ont permis.

 

Je sais que Miles avait été un temps héroïnomane et alcoolique. « Comme » d’autres artistes de son époque, avant ou après lui. Et, pour moi, Miles et Marmottan étaient néanmoins deux bras et deux endroits bien distincts, l’un de l’autre. Puisque Miles, lui, officiellement, s’en était sorti.

 

 

Le service Marmottan, placé près du musée Marmottan  (qui, a priori, ne lui est pas apparenté), faisait de toute façon partie, pour moi, de ces éclats de la Santé mentale. J’en avais entendu parler, moi le jeune infirmier diplômé d’Etat qui, malgré ma culpabilité dans le fait d’abandonner la souveraineté technique des services de médecine et de chirurgie, avait choisi, finalement, de venir travailler en psychiatrie adulte.

 

J’avais sûrement entendu parler de Marmottan par des collègues, infirmiers diplômés en soins psychiatriques, plus âgés et plus expérimentés que moi.

 

Comme j’avais aussi entendu parler, par eux, du CPOA, des quatre UMD (Unités pour malades difficiles) qui existaient alors : Cadillac, Sarreguemines, Mont Favet, Carhaix. Mais aussi, sans doute ou peut-être, de la clinique La Borde….

 

Plus tard, j’entendrais parler d’éthno-psychiatrie de Tobie Nathan et de Devereux, de pédopsychiatrie, d’unités mères-bébé, d’Anzieu et d’autres.  Avant de découvrir des lieux et des personnes, ce sont souvent, d’abord,  des noms.

 

Et puis, j’avais d’abord à apprendre à me débourrer de certaines pensées, de certaines croyances et certitudes mais aussi de certaines ignorances. Et, pour cela, le premier service d’hospitalisation en psychiatrie adulte où je commençais à apprendre un peu plus à devenir adulte à Pontoise fut un grand bienfait.

 

Et un mal.

 

Car la psychiatrie institutionnelle, selon les époques, les tournants, les orientations et les équipes peut à la fois construire mais aussi enfermer. Et, on peut aussi aimer s’enfermer si cela nous protège et nous rassure. Même si on s’en plaint peu à peu.

Photo prise à Marmottan le samedi 4 Décembre 2021, lors du week-end portes ouvertes de Marmottan. Photo©️Franck.Unimon

 

D’autant que, plus jeune, même si l’on est supposé avoir la vie devant soi et que l’on aime la littérature de Romain Gary, on est aussi très myope, très étroit d’esprit et on peut manquer de curiosité. Ou on peut être très ou trop inquiet à l’idée de devoir changer de vie, de s’éloigner de ce que l’on connaît. On se laisse donc envelopper et étreindre par les contours des cercles qui nous ressemblent et qui nous permettent d’entrer, ou  de stagner, entre amis ou connaissances, dans un monde d’adultes qui nous rassure. Sans prendre trop de risques. Ou seulement ceux qui nous apparaissent connus et mesurés. On peut avoir déjà tellement peur du monde et de la vie adulte que l’on ne va pas en rajouter avec certaines de ces substances dont on avait entendu parler ou commencé à côtoyer, un peu, à partir de l’adolescence :

 

Le cannabis, principalement, un peu l’héroïne. Le tabac et l’alcool ayant des statuts soit plus acceptables soit plus familiers. Et puis, si l’overdose puis la transmission du VIH pouvaient faire peur pour leur possible immédiateté, entre 12 et 20 ans et encore après, on ne pensait pas nécessairement au cancer ou à la cirrhose du foie tandis que d’autres fumaient devant nous ou se prenaient des cuites, terminant leurs soirées à quatre pattes tels des lévriers en fin de course près d’un évier ou les deux pattes surélevées au dessus d’une cuvette des toilettes pour ne pas sombrer dans ce que l’on y rejetait.

 

Lorsque l’on entre dans l’âge adulte, on est, alors, dans la force de l’âge. Sexuellement, physiquement, socialement, intellectuellement. Aussi, peut-on, doit-on même, se permettre quelques petits excès. Car ensuite, il sera trop tard. Et puis, si on ne peut pas un peu s’amuser…

 

A Marmottan, lors du week-end portes ouvertes le 3 et 4 décembre 2021.

 

 

Le service Marmottan est sans doute resté longtemps « loin » de moi, physiquement et psychologiquement, parce-que, de cette manière, sans doute, je restais à une distance prudente – et mesurée- de l’aiguille de certaines de mes peurs et inquiétudes. Car géographiquement, toutes les fois où je me suis rendu sur les Champs Elysées, pour aller au cinéma ou au Virgin Mégastore, où même lorsque j’étais allé à la Fnac lorsqu’elle se trouvait avenue de Wagram, je n’étais pas très loin de Marmottan.

Mais, aussi, à aucun moment, je ne fis le rapprochement entre ce Francis Curtet que ma prof principale de 3ème nous avait un jour proposé de rencontrer dans notre collège Evariste Galois de Nanterre, en 1982 ou 1983…et Marmottan.

 

M.Hautefeuille parle d’anciens de Marmottan ( en cliquant sur ce lien à gauche, vidéo). 

 

En décembre dernier, en 2021, j’ai pu faire le rapprochement entre Francis Curtet et Marmottan.

 

En décembre dernier, Marmottan a fêté ses cinquante ans à la salle de concerts de la Cigale. Entre-temps, des années avaient passé. Et j’avais appris, depuis, où se trouvait Marmottan dans Paris. J’y avais effectué quelques remplacements et j’y avais même postulé afin d’y travailler.

 

La salle de la Cigale, ce vendredi 3 décembre 2021 avant que ne débute le cinquantenaire de Marmottan. Photo©️Franck.Unimon

 

C’était la première fois que je me rendais au cinquantenaire d’un service. Je n’ai pas pu m’empêcher de penser que le choix d’une salle de concert avait été fait aussi pour bien fêter cet événement historique. Car j’appris lors du cinquantenaire que lors de la création et de l’ouverture de Marmottan, en 1971, que Claude Olievenstein, son premier médecin chef -qui fut novateur dans le traitement des addictions – pensait que le service aurait une existence brève.

 

Photo©️Franck.Unimon

 

Marmottan n’est pas mort

 

Lorsque j’écris maintenant qu’en ouvrant Marmottan, Claude Olievenstein et ceux qui furent alors à ses côtés, furent novateurs dans le traitement des addictions, cela peut être abstrait pour beaucoup de personnes. Car, d’abord, qu’est-ce qu’une addiction ?

 

Il faudrait déjà commencer par le savoir.

 

Pour ma part, je préfère sourire lorsque je repense au fait que, très sûr de moi, il y a environ trois ou quatre ans maintenant, j’avais répondu à Mario Blaise (déja médecin chef  de Marmottan) qui venait de me demander si j’avais des addictions :

 

« Non ! Je n’ai pas d’addiction ! ».

 

J’aurais pu répondre «  Pas de ça entre nous ! » que cela aurait été pareil.

 

 

Mais j’ai un autre exemple de cet esprit novateur de Marmottan. J’aime lire de temps à autre la très bonne revue bimestrielle, assez peu connue finalement, Sport & Vie. Dans le dernier numéro de Sport & Vie, le numéro 194 de Septembre/Octobre 2022 l’article intitulé L’amour chimique nous parle de « Chemsex ». Dans cet article, selon moi très bien rédigé, le rédacteur, Olivier Soichot, précise dans un passage :

 

« (….) Dans le livre de Jean-Luc Romero-Michel, plusieurs phénomènes se télescopent douloureusement. Notamment la méconnaissance presque totale qui caractérise encore le chemsex en France. Avant le décès de son mari, l’auteur lui-même confesse qu’il en avait vaguement entendu parler mais sans se douter une seconde que son compagnon y avait recours ».

 

L’article de la revue Sport & Vie consacré au chemsex.

 

Peut-être qu’un certain nombre des lectrices et lecteurs de Sport & Vie, pour celles et ceux qui connaissent ce bimestriel,  ou que plusieurs lectrices et lecteurs de mon article, découvriront en cet automne 2022 ce qu’est le chemsex.

 

De mon côté, cela fait désormais deux ou trois ans que  j’ai découvert l’existence du chemsex. Lors de mes remplacements à Marmottan. A Marmottan, plus que dans un service de psychiatrie ou de pédopsychiatrie, je trouve, les patients informent les soignants de certaines de leurs pratiques. C’est aussi de cette façon que l’on peut apprendre son métier en tant que soignant et en tant qu’accompagnateur. Et, ensuite, mieux aider celles et ceux dont on « s’occupe ». Cet échange de Savoirs contribue à instaurer plus facilement une relation de confiance mais aussi une certaine égalité entre le patient et le soignant.

 

Dans un service de psychiatrie ou de pédopsychiatrie, une relation de confiance avec le patient ( ou le client ) est aussi nécessaire et recherchée. Mais elle diffère de celle qui peut se développer à Marmottan.  Sans pour autant idéaliser la relation patient/soignant,  usager/soignant ou client/soignant à Marmottan ( j’ai oublié le vocabulaire exact employé à Marmottan ). Car il existe des ratés à Marmottan. Et, aider à la cure d’une addiction peut être très long.

Patient:client

 

Mais j’ai l’impression que l’échange des Savoirs entre patients et soignants, en psychiatrie et en pédopsychiatrie, à moins de faire partie d’une association permettant ces échanges, est davantage asymétrique qu’à Marmottan.

 

A Marmottan, lors du week-end portes ouvertes, le samedi 4 décembre 2021.

 

Cela peut aussi peut-être s’expliquer par le fait que les personnes addict sont actives lorsqu’elles ont des conduites à risques. Tant pour prendre des substances que pour certains comportements. De ce fait, les personnes addict acquièrent certaines compétences pharmaceutiques ou médicales. Une ancienne collègue infirmière qui avait travaillé plusieurs années à Marmottan m’avait ainsi appris :

 

« Ce sont les patients qui m’ont appris à faire des prises de sang… ».

 

Ici, on se doute que les patients en question, à force de se chercher régulièrement une veine pour se piquer en intraveineuse avaient développé une dextérité hors du commun dépassant de loin celle de bien des infirmier ( es).

 

A Marmottan, ce samedi 4 décembre 2021, lors du week-end portes ouvertes. Installation faite pour la circonstance. Photo©️Franck.Unimon

 

 En comparaison, en psychiatrie adulte ou en pédopsychiatrie, lorsqu’il m’est arrivé de faire des prises de sang, je n’ai aucun souvenir de patient m’indiquant où le piquer ou comment m’y prendre si j’avais du mal à lui faire son prélèvement sanguin.

 

 

Mais pour revenir au contexte de l’ouverture de Marmottan, 1971, Le début des années 70, c’est la présidence de Georges Pompidou. Jimi Hendrix, Janis Joplin et Jim Morrisson sont morts d’overdose récemment. Et, Georges Pompidou, qui va bientôt mourir aussi, n’y est pour rien.

 

Aujourd’hui, seulement, je fais un peu le rapprochement entre l’année d’ouverture de Marmottan et les décès rapprochés de célébrités comme Hendrix, Joplin et Morrisson.

 

Auparavant, lorsque je pensais à Marmottan les premiers temps, je ne le faisais pas. Puisque, d’ailleurs, j’ignorais la date exacte de création et d’ouverture de Marmottan. Marmottan était déjà « là » lorsque j’ai commencé à travailler en psychiatrie au début des années 90. Et Hendrix, Joplin et Morrisson étaient pour moi des noms et des expériences musicales imprécises.

 

Cependant, en décembre 2021, je fais un autre rapprochement. C’est une intuition. A Marmottan, tout acte et tout propos raciste et homophobe de la part d’un patient vaut exclusion du service. Mais aussi tout acte de violence.

 

Maison de tolérance

 

C’est la première fois, dans un service, que j’ai pu voir afficher aussi explicitement de tels  interdits ou de telles limites. Dans tous les autres services où j’ai pu travailler, en psychiatrie adulte, en pédopsychiatrie ou même en soins généraux, ces agissements et ces propos (racistes, homophobes, actes de violence) font plutôt partie du métier. Au point que certaines de ces caractéristiques (risques de violence contre autrui, risques de troubles musculo-squelettiques….) peuvent même être stipulées dans les profils de poste de certaines offres d’emploi.

 

 

A Marmottan, le refus de ces comportements et de ces propos renseigne quant au fait que ses services d’hospitalisation et d’accueil s’adressent ou peuvent s’adresser à toutes sortes de publics. Dès lors qu’ils ont  des problèmes d’addiction et qu’ils sont estimés suffisamment volontaires, coopérants, et encore assez valides physiquement, pour ne pas nécessiter des soins d’urgence ou de réanimation médicale, sauf exception.

Car il existe des services d’addictologie où des patients sont perfusés par exemple.

 

Pas à Marmottan.

 

L’un des principes du service d’hospitalisation de Marmottan (là où j’ai fait mes quelques remplacements) est l’hospitalisation libre, mais avec le principe et le contrat moral, que, durant son hospitalisation, de trois semaines en moyenne, le patient ne sortira pas du service et n’aura aucun contact direct avec l’extérieur. Il n’aura donc pas accès à son téléphone portable ou à son ordinateur ou à sa tablette.  A la place, il bénéficiera de la disponibilité du personnel, mais aussi de celles d’autres patients, par le biais d’entretiens, de médiations et de moments passés ensemble. Que ce soit lors de la prise des médicaments ou lors des repas, du petit déjeuner au dîner. Ou, en regardant la télé. Ou, en discutant dans la salle « de thé ». Et l’on parle vraiment de thé ou de café et de quelques gâteaux , de goûters ou d’eau.  

 

 

Et puis, en décembre 2021, « connaissant » un petit peu la culture engagée et militante de Marmottan, je me suis dit que la salle de concert de la Cigale, pour fêter ce cinquantenaire, était sans doute un hommage aux victimes des attentats terroristes de Novembre 2015, Bataclan, inclus.

 

 

Je n’ai pas (encore) demandé confirmation. C’est une intuition.  Par contre, j’ai observé, à nouveau, ce jour-là, l’engagement des personnels de Marmottan. Passés et présents. Je le répète :

 

Je n’ai pas, à ce jour, connu d’équivalent en matière de commémoration de l’existence d’un service de santé mentale. Ou, alors, je ne peux comparer cette commémoration qu’avec celle des cinquante ans d’un groupe de musique, donc, dans le domaine artistique :

 

Pour moi, ce sera le groupe Kassav’. Puisque j’étais présent au concert de leur cinquantenaire à la Défense Arena. Avant le décès de Jacob Desvarieux.  

 

Mais je ne serais pas surpris qu’à Marmottan, musicalement, l’esprit soit plus Rock ou Punk que Zouk. Du reste, le lendemain, et le surlendemain de cette journée à la Cigale, lors d’une des deux journées portes ouvertes de Marmottan, il y aura une exposition de pochettes de disques du médecin chef depuis quelques années de Marmottan, Mario Blaise. Une exposition très bien intitulée « A vos disques et périls » où il sera possible de voir établie une certaine valorisation des addictions avec substances.

A Marmottan, lors du week-end portes ouvertes du 4 et 5 décembre 2021.

 

 

Et,  si mes souvenirs sont exacts, aucune pochette de disque de Zouk ne figurait sur les murs de la pièce. Au contraire de pochettes de disque ayant plutôt trait au Rock. Même si je me souviens d’une pochette d’un disque de U-Roy, chanteur de Reggae qui venait de décéder récemment.

 

 

 

Il y avait donc, plutôt, à mon sens, une certaine vitalité Rock, ou punk, dans la tenue de ce cinquantenaire. Voire, free Jazz. Car il m’a semblé qu’à Marmottan, que, même si une certaine ligne de conduite était nécessaire, qu’il importait, aussi, de savoir et de pouvoir improviser entre les lignes. Et de tenir sa partition. Avec les autres.

 

 

 

Cinquante ans plus tard, on peut dire que Marmottan a fait bien plus que tenir. J’ai vu dans cette salle de la Cigale des personnels de Marmottan qui y avaient travaillé et qui sont revenus pour l’occasion. Certains à la retraite. Je pense à l’un d’entre eux, en particulier, un infirmier à la retraite depuis les années 2010 qui m’a répondu avoir travaillé à Marmottan pendant une bonne vingtaine d’années. Il était aux côtés d’une ancienne de Marmottan. Celle que j’avais rencontrée dans mon service précédent et qui m’avait dit que les patients lui avaient appris à faire des prises de sang.

Sur la droite, portant un masque blanc, si je ne me trompe, il s’agit d’Aurélie Wellenstein, la documentaliste de Marmottan. Photo©️Franck.Unimon

 

J’ai revu des personnels de Marmottan que j’avais croisés lors de mes quelques remplacements: Aurélie Wellenstein, la documentaliste qui m’avait permis d’assister à l’événement, en charge de l’organisation de celui-ci comme des diverses formations proposées à Marmottan. Des infirmiers, médecins, accueillants, psychologues, assistantes sociales. Mais aussi des médecins ou autres intervenants qui avaient connu Olievenstein et travaillé avec lui avant de quitter Marmottan ou lui ayant succédé. Je pense, ici, à Marc Valleur qui avait succédé à Olivenstein avant que Mario Blaise, ensuite, ne lui succède en tant que médecin-chef de Marmottan.

De gauche à droite, Mario Blaise, médecin chef de Marmottan, Marc Valleur, le précédent médecin chef de Marmottan, Jan Kounen, réalisateur, Marc Batard, alpiniste. A la Cigale, ce vendredi 3 décembre 2021. Photo©️Franck.Unimon

 

Marc Valleur au micro

Marc Valleur, précédent médecin chef de Marmottan avec Jan Kounen, réalisateur. Photo©️Franck.Unimon

 

 

Je pense aussi à ces praticiens partis travailler ailleurs, toujours dans le domaine des addictions, et qui, comme les invités, se sont exprimés.

 

Mario Blaise et Marc Batard au micro

 

De gauche à Droite, Mario Blaise, Marc Valleur, Jan Kounen et Marc Batard. La Cigale, vendredi 3 décembre 2021. Photo©️Franck.Unimon

 

Tout comme d’anciens patients.

 

Marmottan m’a aidé à avoir une vie

 

Cela, devant une salle pleine de professionnels venant de la région parisienne ou d’ailleurs ( une psychologue assise à côté de moi venait de la région de Rennes).

La Cigale, ce vendredi 3 décembre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

 

Dans ces témoignages d’anciens de Marmottan, on entendait et on sentait certains de ces engagements maintenus année après année, en dépit d’une certaine adversité. Mais aussi malgré ou à cause de certains conflits internes. On percevait une observation affutée du monde et de la société qui nous entoure et qui, surtout, nous opprime. On recevait une partie de cette mémoire commune de ce qui avait pu être réussi envers et contre tout ainsi que, pour moi, une certaine forme de regret de n’avoir pas vécu cette histoire.

 

La Cigale, ce vendredi 3 décembre 2021. Photo©️Franck.Unimon

 

Maison de fous. Pas

 

Il y a eu au moins quatre mots en particulier qui m’ont marqué lors de ce cinquantenaire à la Cigale. Des mots qui, pour moi, expliquent Marmottan mais aussi la raison pour laquelle Marmottan a survécu et continue d’inspirer.

 

Photo©️Franck.Unimon

 

 

La Folie.

 

Plusieurs des professionnelles et professionnels venus témoigner de leur expérience de Marmottan, sur la scène, ont raconté que lors de leur entretien d’embauche avec Olievenstein, celui-ci, avait pu plus ou moins leur/lui dire :

 

« Je crois que vous êtes folle. Donc, je vous embauche ».

Photo©️Franck.Unimon

 

 

Par « folie », bien-sûr, il fallait, ici, comprendre que ces professionnelles et professionnels qui postulaient ne se contenteraient pas d’être des petits soldats ou des exécutants de la morale bien-pensante. Et qu’ils seraient impliqués dans leur travail bien plus qu’une personne venant juste pour faire ses heures de travail et pour toucher sa paie à la fin du mois. C’est en tout cas comme ça que je l’ai décrypté.

 

Car, oui, la folie peut aussi aider à vivre. Et à travailler. 

 

La folie créatrice de Marmottan

 

A cette folie s’associe un humour. Il y a donc eu de l’humour lors de ce cinquantenaire comme il en a existé et en existe à Marmottan.

 

M.Hautefeuille avec sa clé USB à air pulsé

 

Le mot Plaisir a été employé par Mario Blaise, le médecin chef actuel de Marmottan. Par ce mot, le principe est d’éviter de juger le mode de vie des uns et des autres. Ou ce qu’ils sont. Dès lors qu’ils n’agressent pas leur entourage.

 

Un autre mot m’a, d’un seul coup, fait comprendre la raison pour laquelle, Marmottan est un service à part. Et que c’est pour cela que j’avais senti, quelques fois, que lorsque je m’exprimais avec mes instruments de mesure psychiatriques, que cela avait fait flop et que quelques uns de mes collègues de Marmottan m’avaient alors regardé comme si j’appartenais à une espèce insolite :

 

Antipsychiatrie

 

 L’antipsychiatrie a été un courant dont j’ai pu entendre parler. Mais un peu. Comme d’une époque passée depuis longtemps. Bien avant que je ne commence à venir travailler en psychiatrie au début des années 90. Encore, qu’à cette époque, la psychiatrie n’avait rien à voir avec la psychiatrie actuelle en matière de moyens et de culture de pensée mais, aussi, de transmission.

 

Grossièrement, aujourd’hui, je dirais que la psychiatrie telle qu’elle a pu être argumentée par Frantz Fanon, lors de la guerre d’Algérie, avait à voir avec l’antipsychiatrie. Il s’agissait alors de libérer les individus, ou de contribuer à les aider à se sortir de leur asservissement. A Marmottan, pour commencer, il s’agit d’essayer d’aider des personnes à se sortir de leur asservissement à certaines pratiques lorsque celles-ci sont devenues dangereuses pour leur santé. Cet asservissement a une histoire. La rencontre avec cette pratique s’est faite à un moment particulier de leur histoire.

Le mode relationnel que j’ai pu « voir » à Marmottan entre patients et soignants était différent de celui que j’avais pu connaître ailleurs. On n’était pas, on n’est ni potes, ni amis. Cependant, la distance entre le soignant et le patient est différente comparativement à ce que j’ai pu connaître dans d’autres services de psychiatrie et de pédopsychiatrie. Et, je ne parle pas, ici, de l’absence de la blouse pour le soignant. Car j’avais déjà connu l’expérience de l’absence de blouse en tant qu’infirmier.

Fille ou garçon de joie à Marmottan

 

Mais la façon de parler du traitement à Marmottan avec le patient, de l’accompagner comme on dit, est différente. Peut-être que cela se faisait aussi un peu de cette façon dans la psychiatrie des années 60 et 70. Lorsque la société était différente ? Et que certains nouveaux neuroleptiques permettaient à certains patients d’aller mieux ?

 

 

Mais on ne parle pas des mêmes publics de patients. J’ai croisé assez peu de patients psychotiques lors de mes quelques remplacements dans le service d’hospitalisation de Marmottan. Et, on ne s’adresse pas de la même façon à une personne non-psychotique même si celle-ci répète des comportements extrêmes du fait de ses addictions.

 

 

 

Un autre mot, depuis décembre, revient par intermittences, lorsque je repense à ce cinquantenaire de Marmottan. Et, cela, d’autant plus que je n’ai pas vu le visage ni le corps de son locuteur, apparu soudainement hors-champ, à aucun moment présent sur la scène puis disparu aussi rapidement.

 

Et pourtant, cet homme était  bien conscient de l’histoire de Marmottan comme porteur d’une partie de sa mémoire. Le fait que cet homme, qui devait avoir dans les 70 ans, ait un accent antillais, a certainement eu sur moi un effet particulier. Celui d’un certain réveil de mes origines antillaises. Peut-être, mais je n’en suis pas sûr, que ce mot sur lequel il a insisté m’a autant parlé parce-que, dedans, j’ai entendu du Gro-Ka, cette musique traditionnelle, très lointaine, rattachée à la mémoire de soi, à la permanence d’une certaine vitalité malgré les trajectoires et qui a besoin de ça pour exister :

 

La Ferveur ( en cliquant sur le lien à gauche, une vidéo apparaît).

 

Photo©️Franck.Unimon

 

Franck Unimon, ce samedi 24 septembre 2022.

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Croisements/ Interviews

Eileen Myles au cinéma MK2 Bibliothèque ce jeudi 15 septembre 2022

Au cinéma MK2 Bibliothèque, ce jeudi 15 septembre 2022. Eileen Myles s’exprime au micro. Photo©️Franck.Unimon

Eileen Myles au Cinéma MK2 Bibliothèque ce jeudi 15 septembre 2022

 

Premier jour d’automne, ce vendredi 23 septembre. Je terminais mon petit-déjeuner ce matin lorsque j’ai commencé à penser à un article sur la conférence d’Eileen Myles la semaine dernière. Voici comment un certain nombre d’articles part dans ma tête. Ensuite, je décide de les suivre. Si j’estime avoir suffisamment de temps et de mots. Si j’ai suffisamment d’envie pour eux. Les mots sont ce qui contient l’incendie de mon esprit et pour les trouver, il faut que j’aie envie d’eux. Que je sois volontaire pour leur courir après afin de les rassembler.

 

J’ai envie d’écrire cet article sur Eileen Myles, l’auteur de Chelsea Girls, « figure majeure de la culture underground et LGBT aux Etats-Unis ». Un livre paru en 1994 dans sa version originale et récemment traduit et publié, pour la première fois, en Français.  

 

Je ne connais rien à l’univers d’Eileen Myles. Malgré ma bonne volonté, Je vais donc écrire et raconter dans cet article beaucoup de conneries réactionnaires et déverser au grand jour un certain nombre de ces jugements de valeurs dont je suis le réservoir.

 

Cet article, ce « coming out », n’était pas prévu. Bien des articles sont des « coming out ». Le mien sera sûrement celui de ma « beauferie ».

 

 Initialement, ce matin, je pensais plutôt à faire le nécessaire afin d’aller voir le dernier film de Rebecca Zlototwski sorti avant hier :

 

Les enfants des autres.

 

Il y a plein d’autres films que j’aimerais aller voir bien avant celui-ci. Mais je fais de celui-ci une priorité. Même si l’interview par la journaliste Guillemette Odicino de la réalisatrice Zlotowski dans l’hebdomadaire Télérama -auquel je suis abonné depuis des années- m’a plusieurs fois fait souffler d’agacement. En lisant, une nouvelle fois, telle une condamnation à perpétuité, les termes-poncifs :

 

 «(….) elle ( Rebecca Zlotowski) est l’une des cinéastes les plus brillantes de sa génération ».

 

Ou, plus loin, pour parler de l’actrice Léa Seydoux ( une actrice qui m’inspire des sentiments très contrariés au moins depuis sa polémique avec le réalisateur Abdelatif Kechiche après tourné sous sa direction La vie d’Adèle, où, pour moi, elle n’est pas la meilleure actrice du film mais aussi dans d’autres films par la suite) « irradiante de sensualité ». Léa Seydoux, « irradiante de sensualité » ? Sa première apparition- comme James Bond girl- dans le dernier James Bond avec l’acteur Daniel Craig cloue le film dans un cercueil.  

 

Pour parler du troisième film de Zlotowski, Planétarium, la journaliste Guillemette Odicino écrit : « son film maudit, incompris, elle osait une fresque à la fois charnelle et spirituelle ».

Bien-sûr, j’ai dû comprendre que la journaliste, elle, avait compris ce film que beaucoup n’avaient pas compris. Quant à l’idée d’une « fresque à la fois charnelle et spirituelle », j’ai trouvé cette description bien cérébrale, et, à nouveau, très fuyante par rapport au corps. Dans ces relations que l’on peut avoir, quotidiennement et étroitement, avec notre propre corps. Comme cela se pratique, je trouve, dans ces milieux très intello où l’on brille beaucoup plus par les concepts, la pensée, que par l’usage que l’on peut faire et vivre de son propre corps :

 

Je reproche à beaucoup d’intellectuels et à beaucoup « d’acteurs » culturels dont j’espère faire le moins partie possible d’être des très grands handicapés de leur propre corps. Et, je lisais tellement ça, une fois de plus, je crois, dans cette introduction à l’interview de Rebecca Zlotowski dans Télérama.

 

«  La chair, toujours, filmée comme une arme politique, et le questionnement sur la féminité moderne sont au cœur d’Une fille facile, son plus grand succès : en 2019, cette chronique ensoleillée enflammait la Croisette, imposant Zahia Dehar comme un corps fascinant de cinéma » poursuit la journaliste de Télérama (celui du 24 au 30 septembre 2022, le numéro 3793, page 4) toujours dans l’introduction de son interview de Zlotowski.

 

« enflammait la croisette » ; « comme un corps fascinant de cinéma », encore des stéréotypes de langage.

 

Une fille facile est le seul film que j’ai vu de Rebecca Zlotowski. Et, malgré mes réticences au départ, j’ai beaucoup aimé ce film. J’en parle d’ailleurs dans mon blog. ( Une fille facile ). 

 

« Corps fascinant de cinéma ? ». De quoi parle la journaliste  de Télérama ?!

 

Lorsque l’on regarde Zahia Dehar et que l’on sait « un peu », car cela avait été beaucoup médiatisé quand même !, qu’elle avait été « escort girl », on hésite très peu à trouver son corps « fascinant ». Que ce soit au cinéma ou dans la vraie vie.

 

Je n’ai pas oublié ce mélange d’admiration et de sentiment de privilège qu’avait pu ressentir la journaliste « star » Léa Salamé lors de sa rencontre-interview avec la belle Zahia Dehar qui avait défrayé la chronique. Cela m’avait rappelé le rôle de gigolo de Daniel Auteuil dans le film Mauvaise passe réalisé par Michel Blanc en 1999. ( Tiens, Michel Blanc est homo. Et il avait écrit le scénario avec Hanif Kureishi plutôt porté sur des sujets un peu tabous…).

 

Nous avons beau être des personnes responsables, présentables, très bien éduquées, bien maquillées,  nous exprimer de façon hautement civilisée… nous avons aussi besoin de notre giclée de sensations « premium » en tutoyant ce qui sort du stérile et du cadre. Ça flatte le côté rebelle ou « border line » en soi. On est ainsi rassuré quant au fait que l’on est beaucoup plus grunge et beaucoup plus ouvert, plus libre et démocrate qu’on peut le laisser croire.

 

Zahia Dehar n’est ni le premier ni le dernier corps – ou coup- vivant de femme que le cinéma servira comme plat pour attirer un public dans une salle. Et sans doute pas le dernier non plus qui inspirera bien des fantasmes et des branlettes empathiques à certains officiels de la Croisette. Rappelons-nous qu’assez récemment, des « influenceuses », à Dubaï, ont été payées par certaines grandes fortunes afin de se faire déféquer dans la bouche.

Ce que peut inspirer un corps désiré, désirable -et aussi médiatique- découle de ce qui se passe dans la tête ( et de son Pouvoir) de celle ou de celui qui peut disposer- et comment- de ce corps désiré et désirable. 

 

Eileen Myles, elle, c’est le contraire de tout ça. Eileen Myles fait partie de ces personnes qui ont décidé d’assurer leur corps. Mais lorsque j’écris ça, je m’aperçois que, finalement, Eileen Myles est plus proche d’une Zahia Dehar ou de certaines influenceuses qui ont décidé de se servir de leur corps pour réussir que de celles et ceux qui se résignent à être les caissières, les domestiques et les secrétaires des autres.

 

Pourtant, lorsque l’on met côte à côte, une Eileen Myles et une Zahia Dehar, la proximité est loin d’être marquante. Mais je crois que l’une comme l’autre a pu adopter des modes de vie réprouvés à un moment donné par l’ordre et la vertu publiques.

 

J’avais prévenu, dès le début de cet article, que j’allais écrire beaucoup de conneries. Et, c’est le moment, pour moi, de fournir mon mot d’excuse. Pour commencer, et c’est selon moi le principal et ce qui me pousse à écrire cet article :

Ce jeudi 15 septembre, j’aurais pu ( ou peut-être dû ) rester dans ma ville, à Argenteuil, afin d’aller rencontrer dans la librairie Presse Papier du centre ville, l’auteure Touhfat Mouhtare née en 1986 à Moroni aux Comores, pour son livre Le Feu du Milieu paru aux éditions Le bruit du monde. Aujourd’hui, Touhfat Mouhtare vit dans le Val d’Oise. 

A la place, je me suis éloigné de ma ville et du Val d’Oise. Je me suis véritablement déplacé pour assister à Paris à cette conférence-interview de l’Américaine Eileen Myles. J’ai vraiment pris ces photos et filmé ces quelques moments. 

 

 

J’ai entendu parler d’Eileen Myles récemment. En commençant à lire Les Argonautes ( paru en 2015) de Maggie Nelson. Une auteure de référence, au même titre qu’Eileen Myles, son aînée de plus de vingt ans,  pour les personnes préoccupées par les questions du genre, de dominations, comme par les violences engendrées par le patriarcat.

 

 

J’ai du mal à avoir une lecture suivie de l’ouvrage de Maggie Nelson. J’ai bien plus de « facilités» pour lire le premier volet de La Guerre d’Algérie d’Yves Courrière.

 

 Les Argonautes  de Maggie Nelson ( née en 1973) est un récit de sa vie personnelle avec son (ex ?) compagnon, Harry, originellement née femme, père d’un jeune fils dont Maggie Nelson, en tant que belle-mère, essaie de s’occuper au mieux (on voit mieux le rapprochement avec le dernier film de Rebbeca Zlotowski ? Je ne l’ai pas fait exprès) de réflexions critiques et théoriques poussées citant Butler, Winnicott, Foucault et d’autres, mais aussi  de certains moments de sa vie avant Harry comme de certaines de ses décisions en rapport avec ses engagements (ou son activisme).

 

La partie théorique et intellectuelle de l’ouvrage de Maggie Nelson, par moments, me coupe les neurones à défaut de me couper les jambes : je subis, par moments, des absences de compréhension. Et puis, le courant se rétablit. Dans ses Argonautes, Maggie Nelson (qui cite aussi Eileen Myles parmi ses références) établit que le mariage et l’armée comptent parmi les institutions historiques les plus répressives.

 

Je suis marié. J’ai pu ou peux, par moments, me sentir proche de certaines valeurs militaires. Mon attachement aux valeurs des Arts martiaux, par exemple, se rapproche quand même de l’attachement à certaines valeurs militaires. Si on les applique aveuglement ou de façon fanatique. Je fais donc ou ferais donc partie de « l’ennemi » pour des personnes comme Maggie Nelson ou Eileen Myles. D’autant qu’il est deux autres institutions, pour lesquelles je travaille, qui sont, aussi, « historiquement répressives » :

 

La psychiatrie et la pédopsychiatrie.

 

Donc, que faisais-je jeudi dernier à cette conférence-interview d’Eileen Myles comme devant ce livre de Maggie Nelson – dont je ne connaissais pas l’existence avant cet été- au lieu de lire un des articles de mon Télérama hebdomadaire ?

 

Nous voyons du Monde ce qui nous intéresse, ce qui nous attire l’œil ou l’attention, ce à quoi nous sommes habitués ou ce qui nous gêne ou nous dérange.

 

Ensuite, nous faisons plus ou moins nos choix. Nous décidons de retourner à nos occupations bien connues de nous-mêmes. Ou nous choisissons de prendre l’option qui consiste à aller nous éduquer un peu. Car le Monde est souvent plus multiple que ce que nous en savons ou en percevons à première vue.

 

J’avais une vingtaine d’années lorsque, pour la première fois, en stage au cours de mes études d’infirmier, dans un service de chirurgie orthopédique dans la banlieue ouest parisienne, dans une ville de banlieue plus favorisée que celle dans laquelle j’avais grandi, j’avais rencontré un patient transexuel. Un homme d’origine espagnol qui s’était fait renverser par une voiture alors qu’il marchait sur la route, alcoolisé. Le conducteur avait pris la fuite.

Je me rappelle que cet homme tenait une sorte de boutique de vêtements. Et qu’au téléphone, sa sœur lui témoignait une certaine affection.

 

J’avais 19 ou 20 ans, lorsqu’après avoir assisté à une soirée cinéma à Paris,  consacrée au réalisateur Jean-Pierre Mocky, je m’étais retrouvé comme un idiot, dans la rue. Après avoir vu les films SoloUn Linceul n’a pas de poches et, en avant Première, le dernier film, alors, de Jean-Pierre Mocky :

Agent Double

Puis, dehors, j’avais regardé la plus grande partie des spectateurs rentrer chez eux en voiture. Devant l’impossibilité de rentrer chez mes parents, à Cergy-St-Christophe. Car il n’y avait plus de RER A à deux heures du matin passées.

J’avais finalement été hébergé par un inconnu, un homme un peu plus âgé que moi, croisé non loin du centre Pompidou vers 4 ou 5 heures du matin. Celui-ci, étudiant en Droit selon ses dires, avait pris ma défense. Il m’avait proposé de m’acheter un Kebab puis, en taxi, m’avait emmené dans son studio, dans une ville de banlieue que je ne connaissais pas. Cet homme m’avait fait des avances que j’avais déclinées.

Mon cul contre un Kebab ? 

Il faut tout essayer dans la vie » m’avait conseillé cet homme « mûr ». Je lui avais suggéré de faire l’amour avec des plantes et des animaux. J’avais lu plein d’articles sur le sujet dans Télérama. Lui, avait trouvé tout cela contre nature. Et il m’avait laissé partir lorsqu’était arrivée l’heure des premiers RER.

 

 J’ai dû entendre le terme « Queer » pour la première fois il y a un peu plus de dix ans. Aujourd’hui encore, j’aurais du mal à expliquer ce terme. « Queer » par ci, « Queer » par là. Les activistes, les personnes engagées et/ou de média mais aussi les poètes, les artistes et les intellectuels savent que le langage, autant que le corps, est une arme.

 

Une arme de destruction, d’asservissement de dénigrement. Une arme d’ensemencement et de revitalisation de nos vies et de nos imaginaires. Pour cette dernière idée, je convoque évidemment des personnalités comme Aimé Césaire, Frantz Fanon ou d’autres, dont je maitrise aussi mal les œuvres et les pensées que je ne comprends véritablement le terme « Queer ». Et qui n’ont rien à voir, au départ, avec quoique ce soit de « Queer » au sens où l’entendent les activistes et penseurs LGBTQ+. Et, pourtant, d’un côté comme d’un autre, il s’agit toujours de s’affranchir comme de s’extraire du colonialisme, d’un certain conditionnement mais aussi des effets de toute forme d’esclavage et d’asservissement personnel, historique, culturel, social, économique, politique et corporel.

 

Au cours d’un débat auquel j’assistais, lors d’un festival de cinéma LGBTQ+, j’avais entendu un spectateur dire du réalisateur François Ozon ( qui a sans doute aussi été interviewé par Télérama ou qui le sera un jour en tant que « l’un des cinéastes les plus brillants de sa génération » ) :

 

« Il fait un cinéma Queer ». Ou «  Il est Queer ».

 

Au cinéma, j’ai vu un certain nombre des films de François Ozon, ses premiers films en particulier. Et, cela a été un peu pareil avec l’acteur et réalisateur Xavier Dolan jusqu’à Laurence Anyways (réalisé en 2012).  Deux réalisateurs ouvertement homosexuels. Pourtant, en allant voir leurs films, que j’ai aimés voir, je ne me suis jamais dit que je regardais un film, un monde ou un mode de vie « Queer ».

De la même façon que je ne me suis pas dit, je crois, qu’ils essayaient, au travers de leurs films, de déconstruire(un verbe que j’ai découvert sans doute à peu près au même moment que lorsque j’avais fait la connaissance du terme « Queer ») certaines conceptions de « genre », certaines « identités » imposées par le monde hétéro-normé, patriarcal, occidental, capitaliste et blanc encore dominant dans le Monde.

 

Peut-être que tout ce programme de déconstruction mentale et « civilisationnelle » n’est pas le leur, tout simplement. Que tout ce qu’ils veulent, eux, Ozon et Dolan, c’est d’abord exister en tant que personnes et artistes et faire des films.

 

Eileen Myles a sûrement dû voir plusieurs des films de François Ozon et de Xavier Dolan. Jeudi dernier, le premier extrait de film choisi pour sa conférence a été un passage du film… Les 400 coups de François Truffaut.

Lorsque Les 400 coups de François Truffaut sort en 1959, Eileen Myles, née en 1949, a dix ans. Nous regardons l’extrait. Nous voyons Jean-Pierre Léaud, alors enfant, courir à petits pas, vers la plage. J’ai souvent entendu parler de ce film comme étant un grand classique à voir. Je connais bien-sûr de nom François Truffaut et ai vu un ou deux de ses films dont La femme d’à côté (1981) et Domicile conjugal (1970), deux films vus plusieurs années plus tard à la télé, que j’avais beaucoup aimés. Mais je n’ai jamais vu et n’ai jamais eu envie de voir Les 400 coups.

 

En citant Truffaut, Eileen Myles, pour moi, fait partie de toutes ces personnes étrangères, souvent engagées, qui, régulièrement, dans les œuvres françaises, citent des classiques comme Truffaut. Un peu plus tard, je crois aussi qu’elle citera Proust. Mais je n’en suis plus très sûr.

Ce dont je me souviens par contre, c’est qu’en voyant Les 400 coups de Truffaut, Eileen Myles s’était demandée s’il existait un équivalent féminin. Puisque Truffaut, après Les 400 coups suivra l’évolution du personnage d’Antoine Doinel, depuis son enfance jusqu’à l’âge adulte. Et, de là est venu le projet d’Eileen Myles de concevoir un équivalent féminin à Antoine Doinel. Puis, elle s’est demandée comment s’y prendre pour raconter ça par écrit. Et, elle s’est aperçue qu’elle pourrait écrire comme on raconte un film.

 

L’enfance d’Eileen Myles semble avoir été une enfance où l’éducation artistique et culturelle a été présente et consistante. Je suis étonné par la facilité avec laquelle, Eileen Myles, comme Maggie Nelson ensuite, peut se déclarer poétesse. Moi, plus jeune, j’ai bien essayé. Mais comme cela ne m’a jamais permis de gagner ma vie convenablement, j’ai rapidement arrêté. Ces derniers temps, je me suis même fait la remarque qu’à force de coller aussi près au quotidien depuis des années, tant dans mon métier que dans mes articles ou dans ma vie de père et de conjoint peut-être, que je m’étais beaucoup éloigné voire étais peut-être devenu incapable ou infirme. Infirme d’exprimer mon imaginaire comme auparavant. 

Eileen Myles, à plusieurs reprises, nous a parlé de l’importance de son père, décédé lorsqu’elle était encore jeune, qu’elle perçoit a posteriori comme ayant été une personne « Queer ». Elle a répété plusieurs fois que son père était « Queer ». Il se travestissait en femme.

 

C’était aussi un père alcoolique mais qui avait le chic, chaque fois qu’elle manifestait un intérêt pour un sujet donné, d’apparaître avec un ouvrage ou deux en rapport avec ce sujet, de le(s) lui remettre. Puis, de disparaître.

 

D’autres extraits de films ont été montrés lors de la conférence. Un, montrant un milieu lesbien underground aujourd’hui disparu, dans les années 70. Un autre au cours duquel, dans un film, s’inspirant des écrits d’Eileen Myles, une femme souhaite que se présente aux élections Présidentielles une personne ayant tous les handicaps possibles :

 

HIV +, transgenre, chômeure /chômeuse, atteint( e) d’une maladie incurable, homosexuel( le), noir ( e), grosse….

 

Le public, dans la salle, était constitué d’une bonne centaine de personnes, sans doute assez familières avec l’œuvre, les engagements et/ou la personnalité d’Eileen Myles. J’ai compté deux ou trois personnes noires dans la salle en m’incluant dans le recensement. Pour la répartition hommes/femmes au sein du public, je ne saurais pas dire. Peut-être une légère prévalence féminine. Mais ce n’est pas sûr.

 

Par contre, la journaliste qui interviewait Eileen Myles était une femme. La traductrice était une femme.

 

La plupart des spectateurs ou spectatrices qui ont posé des questions à Eileen Myles étaient soit anglophones soit très à l’aise avec la langue anglaise ou américaine.

 

J’ai noté en tout cas qu’une bonne partie du public était particulièrement au fait avec la langue natale d’Eileen Myles. Puisqu’il a été capable à plusieurs reprises – contrairement à moi- de rire de ses blagues immédiatement sans avoir à en passer par leur traduction différée.

 

S’il y avait bien quelques personnes dépassant la quarantaine d’années dans la salle, j’ai trouvé le public plutôt jeune dans sa majorité. Autour des 30 ans. Ce qui atteste, pour moi, d’une certaine conscience plus visible ou plus affirmée, mais aussi plus « facile », à propos des questions de genre comparativement à il y a, disons, une vingtaine d’années.

Je n’ai pas reconnu ou pas vu de « jeune » que je suis susceptible de croiser ou d’avoir croisé dans un des services de pédopsychiatrie où j’ai pu travailler et qui sont préoccupés (comme beaucoup d’adolescentes et d’adolescents) par leur identité et/ou par leur genre ou qui l’affirment d’une certaine façon :

 

En se réclamant d’un sexe ou d’un genre opposé à celui qui leur a été assigné à leur naissance. En ayant une relation sentimentale homosexuelle.

 

 

 Pour ma part, je peine encore à assimiler le fait qu’aujourd’hui, je devrais davantage, selon les milieux, afin d’éviter d’être perçu comme homophobe ou transphobe, me présenter comme une personne « cisgenre ». Afin de ne pas heurter une personne faisant partie d’un genre minoritaire. Mais j’ai du mal avec cette obsession qui consiste à se définir par un vocabulaire obligé. Comme si c’était une obligation de tendre notre genre ou nos éventuelles préférences lorsque l’on se présente à quelqu’un :

 

« Je m’appelle Franck, je suis diabétique insulino-dépendant, hypertendu, farceur, cancéreux en phase terminale, je chausse du 34, je suis abonné à Télérama, je fais du Cross fit. J’adore les films de Emmanuel Mouret, le nouveau Rohmer. J’ai plein de posters XXL de l’actrice Léa Seydoux dans ma chambre. Et je travaille à la bourse. Et toi ? ». 

 

Mais il est vrai que nous portons souvent des masques dans notre vie sociale. Et que certains de ces masques permettent à la fois des crimes (à l’image du Ku Klux Klan) mais aussi bien des mensonges.

 

 

Lorsque je regarde la photo d’Eileen Myles sur l’écran géant, j’ai l’impression de voir un équivalent féminin d’Iggy Pop. Pour moi, Eileen Myles est une sorte de Punk. Un Punk à visage et à allure masculine qui est une femme. Même si je me demande un peu si elle s’est faite opérer, je ne me le demande pas plus que ça.

Enfant, Eileen Myles avait rencontré un couple de femmes butch auquel ses parents avaient loué une partie leur maison. Lors de la conférence, Eileen Myles raconte que ce couple lesbien s’était vite avéré être un couple de locataires problématiques, alcoolique, je crois, se disputant souvent, et, qui plus est, très mauvaises artistes peintres. Soit une erreur de casting que la mère d’Eileen Myles avait très vite regretté. De son côté, Eileen Myles, elle, ne s’était pas sentie inspirée par ce modèle de femmes….

 

Plusieurs jours après cette conférence, sur internet, j’ai cherché et trouvé quelques photos d’Eileen Myles, plus jeune. Si je l’ai trouvée belle, je lui ai aussi trouvé un certain côté garçon manqué. Ce qui, pour moi, veut dire « Butch ». J’ai bien écrit « Butch ». Et non «  Bitch ».

 

Eileen Myles nous a lu un extrait de son livre, Chelsea Girls. Sans doute parce-que je n’ai pas suffisamment compris ce qu’elle disait, cela ne m’a pas donné envie d’acheter son livre. Mais dans la salle, le public l’a écoutée de façon recueillie.

 

A la fin de la conférence, Eileen Myles nous a dit sa certitude que le patriarcat était en train de mourir. Qu’il s’agissait de savoir si « nous » allions mourir avant lui ou s’il allait mourir d’abord. Mais qu’elle était confiante quant au fait qu’il n’en n’avait plus pour longtemps. Aujourd’hui, je me peux m’empêcher de penser que c’est aussi ce que dit une personnalité comme Pablo Servigne, un des collapsologues les plus connus en France, et aussi sans doute critiqué pour cela car il la ramène trop avec ses propos de fin du monde. Lorsqu’il explique et répète que nous sommes des « drogués du pétrole », que notre système de vie économique et de société, tel qu’il est, est en train de s’effondrer et que nous ne sommes plus dans l’ère dans « de la sobriété » mais déjà dans celle qui nous rapproche du « sevrage ».

 

 

Touhfat Mouhtare, Maggie Nelson, Rebecca Zlotowski, Zahia Dehar, Pablo Servigne, Peaux noires, masques blancs ( ou d’autres de ses oeuvrs) de Frantz Fanon, Aimé Césaire, il est étonnant qu’Eileen Myles, aussi portée sur certains excès d’alcool en particulier, ait quelques  rapports, directs ou indirects, avec ces quelques « personnes », décédées ou vivantes, et que certaines de ses réflexions et de ses expériences rejoignent les réflexions, les expériences mais aussi les œuvres de certaines de ces premières personnes citées.

 

Mais c’est pourtant de cette façon-là que, souvent, notre vie se déroule. Car celle-ci est multipistes. Je me devais donc de me rendre à cette conférence d’Eileen Myles puis d’essayer d’en rendre compte. Même si, sans aucun doute, cet article comporte déja beaucoup d’erreurs, beaucoup de conneries et beaucoup de hors sujets.

 

Franck Unimon, ce vendredi 23 septembre 2022.

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Une société bienveillante

Gare de Paris St Lazare, début septembre 2022. Photo©️Franck.Unimon

Une société bienveillante

 

 

Cette nuit, j’ai lu quelques articles dans la rubrique littéraire d’un journal. On y parlait de plusieurs livres. Plusieurs de ces livres parlaient de la violence des hommes. Une phrase, dans l’un des articles, disait quelque chose comme :

 

« Comprendre ne suffit pas pour pardonner ».

 

Je n’ai pas aimé cette phrase.

 

Pour appliquer l’éducation bienveillante, la « psychologie positive » il faut aussi, dans une certaine mesure, pouvoir bénéficier, quand même, d’une certaine bienveillance dans la société, dans le monde, dans la vie. Mon métier principal, malgré sa noblesse, ou peut-être grâce ou à cause d’elle, m’expose à diverses formes de violences.

 

Hier matin, mon thérapeute a d’abord tiqué lorsque je  lui ai dit délibérément :

 

«  Je ne suis qu’un infirmier. »

 

Face à son thérapeute, tout le monde le sait, il ne suffit pas de claquer des consonnes et des voyelles pour dire quelque chose. Il doit comprendre. Et, si nous pensons droit, nous nous devons de lui en faire la démonstration. Autrement, son travail, si c’est un thérapeute valable et consciencieux, est de nous remettre dans l’axe.

 

Hier matin, j’ai expliqué à mon thérapeute que d’un point de vue social, ce métier d’infirmier n’est pas considéré comme un métier très valorisé ou très prestigieux.

De ce fait, maintenant que, en plus, ma compagne est suspendue de ses fonctions d’infirmière depuis dix mois, cela va être un handicap pour faire admettre notre fille à l’école privée de notre ville. Si, comme me l’a dit la libraire récemment, l’école privée prend principalement les enfants dont les parents ont une bonne situation professionnelle.

 

J’ai cru et crois encore à la sincère et spontanée désapprobation, hier, de mon thérapeute lorsque je lui ai dépeint mon métier d’infirmier comme un métier de bas étage. Cependant, j’ai malheureusement su et pu, je pense, lui démontrer que j’avais raison.

Paris, Gare St Lazare, Septembre 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

La plupart des parents d’enfants que notre fille a côtoyée dans son école publique – et qui sont désormais dans l’école privée de notre ville- ont des professions socialement et économiquement plus « évoluées » ou « supérieures » à celle que ma compagne et moi pratiquons.

 

Je le sais pour avoir côtoyé un temps ces parents. Comme cela se fait lors de toute rencontre sociale « cordiale » à la sortie de l’école. Ou chez l’assistante maternelle. Où, si l’on se sourit entre parents et que l’on s’adresse quelques propos convenables, on se jauge aussi beaucoup socialement, personnellement et économiquement. En toute bienveillance.

 

D’ailleurs, quel est l’un des meilleurs moyens pour s’assurer que certains parents mais aussi certains enfants sont véritablement fréquentables ?

 

Prenons un verre avec eux, soit chez eux, soit chez nous. Recevons tel enfant pour un goûter ou un anniversaire. Ensuite, on se fait notre propre idée.

 

C’est ce qui s’est passé avec plusieurs parents d’enfants que notre fille a pu connaître dans son école maternelle. Aujourd’hui, nous n’avons plus de contacts avec ces parents alors que leurs enfants sont à l’école privée de notre ville. Une école qui se trouve à  cinq minutes à pied de l’école publique de notre fille.

 

Les parents de ces enfants ne sont ni infirmiers, ni aide soignants. Un ou deux ingénieurs. Ou équivalents. Cadres sup. Je connais personnellement un couple dont les deux enfants sont également à l’école privée de notre ville. La femme du couple était une ancienne très bonne amie de ma sœur. Donc, je connais vraiment plutôt personnellement ce couple. Profil de cadre sup.

 

Donc, même si j’ai pu entendre dire que pour faire admettre son enfant dans cette école privée, qu’il convient de persévérer et de s’y reprendre à plusieurs fois, où est, déjà, la bienveillance dont nous bénéficions, ma compagne, notre fille et moi, à devoir constater que la plupart des parents, dont les enfants sont aujourd’hui dans cette école privée depuis plusieurs années, occupent des fonctions professionnelles « supérieures » socialement et économiquement aux nôtres ?!

Paris, rue de Rivoli, Aout 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

Hier matin, j’en ai rajouté dans les arguments devant mon thérapeute pour démontrer à quel point le métier d’infirmier est déclassé. Mais peut-être, aussi, pour bien lui faire comprendre à quel point j’avais encore besoin de ses services.

 

Pendant le premier confinement dû à la pandémie du Covid, en 2020, on applaudissait les soignants à 20h. Pour les encourager et les remercier pour leur « courage » et leur « héroïsme ». Un an plus tard, on suspendait certains de ces héros car ceux-ci refusaient de se faire vacciner contre le Covid. Ainsi depuis la fin de l’année dernière, ma compagne est-elle sans salaire. Où est la bienveillance dont ma compagne, comme d’autres dans sa situation, suspendus pour les mêmes raisons, bénéficie ? Dont notre fille et moi bénéficions ?

 

Néanmoins, il arrivera un jour où je devrais aussi rappeler à ma compagne deux points auxquels elle devra se conformer que cela lui plaise ou non :

 

Si être fonctionnaire assure en principe la sécurité de l’emploi, cela impose aussi des Devoirs. Un fonctionnaire se doit à certains actes si son employeur le lui demande ou l’exige de lui. En contrepartie, son employeur lui verse un salaire et lui assure la sécurité de l’emploi. Et, cela, je crois, a été oublié par ma compagne et d’autres.

 

En refusant la vaccination obligatoire contre le Covid.

 

Après tout, même des Ministres ou des députés qui sont des très hauts fonctionnaires de l’Etat sont amenés à démissionner lorsqu’ils ne correspondent plus à certains critères exigés, à certaines obligations décidées, par l’Etat. Alors, des « petits » infirmiers et aides soignants, qui sont des tout petits fonctionnaires en comparaison n’ont aucune possibilité de s’opposer à l’Etat si celui-ci décide de les suspendre ou de les révoquer en cas de désaccord majeur ou autre.

 

 

Il a été question quelques temps, devant la pénurie soignante, de réintégrer le personnel soignant non vacciné. Hier matin, mon thérapeute m’a confirmé que la Haute Autorité de Santé (la HAS) l’avait finalement refusé. Et, c’est facile à comprendre :

 

Des personnes sont mortes du Covid car celui-ci a été transmis ou aurait été transmis par du personnel soignant non vacciné contre le Covid. Avant que la vaccination contre le Covid ne devienne obligatoire. Je connais au moins une personne, dans notre ville, que ma compagne a croisée une fois, dont le père est mort du Covid dans l’EPHAD où il se trouvait. Selon cette connaissance, que je crois fiable, son père était en bonne santé. Et c’est une infirmière ou une soignante, porteuse du Covid, qui aurait transmis le Covid à plusieurs pensionnaires de l’EPHAD.

 

Comment voulez-vous après ce genre d’événement réintégrer dans des lieux de soins des soignants non vaccinés contre le Covid ?

Et comment vont le prendre celles et ceux qui se sont obligés (ou soumis) à la vaccination obligatoire contre le Covid ?

 

 

Enfin, beaucoup plus cynique mais le livre Les Fossoyeurs  de Victor Castanet, qui a fait « scandale » concernant le mode de gestion des EPHAD, va dans ce sens :

 

Cet été, malgré la pénurie de soignants, on n’a pas entendu parler de scandale sanitaire, de surmortalité dans les hôpitaux malgré la canicule. Donc, on a pu ou su se passer des soignants suspendus. Pire :

 

Ce qui est très pratique avec ces soignants suspendus, c’est qu’ils permettent de faire des économies. Puisque l’on n’est plus tenu de leur verser de salaires depuis bientôt un an. Ce qui reste raccord à la fois avec la politique de l’autruche et des économies budgétaires imposées aux établissements de soins depuis plusieurs décennies. Donc bien avant que l’ouvrage de Victor Castanet ne paraisse début 2022 et ne fasse « scandale ». L’oubli est l’une des plus grandes compétences espérées chez celles et ceux qui décident de la gestion de l’avenir des lieux de soins depuis des années.

 

Je crois donc de plus en plus que les soignants suspendus comme ma compagne, s’ils persistent à refuser le vaccin anti-Covid, vont être ni plus ni moins oubliés et sacrifiés par le gouvernement. Mais aussi par les établissements qui les « emploient ». Là encore, de quelle bienveillance, ma compagne, notre fille et moi bénéficions-nous ?

 

 

Aucune.

 

 

Je vais rajouter un autre thème ou deux.

 

Paris, Aout 2022. Photo©️Franck.Unimon

 

D’un point de vue familial, comme beaucoup de personnes, ma compagne et moi avons vécu des événements plutôt « névrotisants » en tant qu’enfants. La violence, l’alcoolisme et/ou la dépression ont auréolé notre enfance. Ces héritages laissent des traces. Des habitudes. Des automatismes. De défense, de repli, de fuite, de combat, de recherche ou de….réplication.

Un soignant, d’autant plus en pédopsychiatrie et en psychiatrie, ou dans tout service de santé mentale, est un individu qui vient se poster qu’il s’en aperçoive ou non, près des frontières de son histoire originelle. Cela peut l’aider pour aider d’autres personnes. Mais cela peut aussi le troubler et le désemparer. Sauf s’il décide de rester sourd, barricadé et aveugle devant son histoire. C’est bien ce que les dirigeants au moins politiques- qui se répliquent- font en matière de politique de santé publique depuis des années :

Rester sourds, barricadés et aveugles. Et budgéter. Il est plus facile de compter des chiffres et de regarder des statistiques. 

L’une des conséquences est que bien des soignants ont l’impression de faire l’expérience du servage. 

Reculons encore en arrière dans le temps et on tombe sur la toile d’araignée de….l’esclavage. Soit sur l’expérience de l’esclavage. Soit sur la mémoire plutôt traumatisante de l’esclavage. Une mémoire -enfouie ou non- qui résiste sur l’arbre du temps que l’on porte en soi. Et où l’on peut s’apercevoir que, blancs ou noirs, on peut être nombreux à avoir une certaine expérience, plus ou moins lointaine, de l’esclavage. 

 

Mais sans aller jusqu’à l’esclavage car cela ennuie d’en entendre encore parler, rappelons tout simplement le racisme. En tant qu’homme noir, je suis content de dire que je préfère vivre dans la France en 2022 plutôt que dans la France de 1822. Néanmoins, je reste un homme noir dans un pays de blancs. Et notre fille est une métisse dans un pays de blancs.

 

Mais aussi dans un pays où les prénoms ont aussi leur importance. Lorsque j’ai eu trouvé le prénom de notre fille ( ce prénom est le résultat à la fois des exigences de sa mère mais aussi de ma petite créativité), j’étais content. Cependant, à aucun moment je n’ai pensé au fait que certains prénoms passent « mieux » que d’autres les filtres des sélections lorsque l’on présente un dossier pour une candidature. Il n’en demeure pas moins que, noir en France, portant un prénom plutôt qu’un autre, cela expose ou peut exposer à certaines violences. Des violences directes et indirectes, immédiates ou différées, visibles ou invisibles. A moins de rester à la place qui nous a été allouée. Si notre place consiste à faire dame pipi ou silhouette d homme de ménage sur un plateau de tournage aucun problème. On peut porter le nom que l’on veut. Et être noir ou arabe peut alors se révéler un avantage.

 

Est-ce-que notre fille aurait déjà été admise à l’école privée si elle s’était prénommée Marie, Elizabeth, Théresa, Geneviève ou Victorine ?

 

Aucune idée. D’autant que je sais qu’il y a des petites Arabes et musulmanes admises à l’école privée.

 

Donc, on peut et on sait applaudir des soignants par temps de pandémie tandis que l’on reste bien à l’abri chez soi. Par contre, lorsqu’il s’agit d’admettre leur enfant dans une école privée ou dans une bonne école, on fait les difficiles.

 

L’école publique de ma fille a perdu un tiers de son budget par rapport à l’année dernière. Comme d’autres parents, je l’ai appris la semaine dernière par son nouveau Maitre d’école lors de la réunion de rentrée. Un maitre d’école en qui je crois et qui a pu dire à la fin de la réunion, durant laquelle il aura gardé son sourire :

 

« J’aime la difficulté ».

Ce maitre d’école nous a appris faire trois heures de trajet pour venir à l’école puis trois autres heures pour rentrer chez lui à chaque fois.

 

Hier après-midi, le papa d’une ancienne copine de ma fille m’a appris que dans son école (une autre école publique de notre ville), il y ‘avait une pénurie de rames de papier.

 

 

Où est la bienveillance dans tout ça ?

 

 

Lorsque ces quelques expériences de violences de rejet, d’indifférence ou de maltraitances finissent par croiser, ce qui est inévitable, l’anxiété mais aussi l’épuisement ou le découragement d’un parent concernant l’avenir de son enfant, mais aussi son propre avenir en tant qu’individu, il ne faut pas s’étonner si celui-ci en arrive, par moments, par secréter de la violence et l’infliger à sa descendance ou à son entourage. Ou à lui-même.

 

Mais on parle très peu de ça dans notre société « bienveillante ». Dans notre société « bienveillante », il y a d’un côté les travailleurs qui en veulent, qui s’en sortent, parce-qu’ils le voulaient vraiment. Et puis, d’un autre côté, il y a tous les suspendus, les contaminés, les pauvres types, celles et ceux qui passent leur temps à se plaindre au lieu de se sortir les doigts du cul et que l’on condamne.

 

Car, dans notre société « bienveillante », tout le monde sait que celles et ceux qui restent sur le côté, qui échouent et qui n’arrivent à rien, sont toujours celles et ceux qui l’ont bien cherché et qui l’ont mérité. Et qu’il faut éviter. Sauf si l’on est soignant ou travailleur social. Dans ce cas, on nous parle de vocation. Alors même qu’il faudrait plutôt, un certain nombre de fois, parler plutôt de sacrifice compte tenu des conditions qui sont faites à ces soignants et à ces travailleurs sociaux non seulement pour travailler mais, aussi, pour vivre. 

 

 

Une école privée est-elle véritablement l’assurance d’une vie réussie ? Disons que dans un monde et un pays où il est devenu résiduel et même normal d’avoir peur de tout que l’on s’en convainc plus facilement. Sauf que je suis incapable d’affirmer si ce dernier point de vue est le résultat de mon esprit résigné ou de la vitalité encore conservée de ma lucidité.

 

 

Paris, Aout-Septembre 2022. Photo©️Franck.Unimon

Franck Unimon, mardi 20 septembre 2022.