Catégories
Cinéma self-défense/ Arts Martiaux

Les Maîtres de l’Aïkido

Photo de couverture : Morihei Ueshiba au Kobukan Dojo en 1931 à 48 ans. Photo en médaillon : Morihei Ueshiba à l’Aïkikai Hombu Dojo en 1967 à l’âge de 84 ans.

 

Les Maîtres de l’Aïkido (élèves de Maître Ueshiba Période d’Avant Guerre) : Interviews recueillies par Stanley A.Pranin

 

Il existe un contraste saisissant entre l’admiration très haute encore portée à Maître Morihei Ueshiba ( décédé en 1969), fondateur de l’Aïkido, art martial créé au vingtième siècle, par les pratiquants ou les adeptes de l’Aïkido. Et l’image publique de l’Aïkido au moins dans le monde du « combat » sous ses diverses déclinaisons :

 

« Ce n’est pas efficace ». « C’est de la danse ».

 

Ces propos pour définir l’Aïkido sont devenus tellement banals qu’ils sont pratiquement devenus l’équivalent d’un sixième sens. C’est une évidence. Sans même avoir particulièrement pratiqué l’Aïkido, si l’on doit s’orienter vers un art martial ou un sport de combat efficace en matière de self-défense, on choisira plutôt une discipline aux rapports et contacts explosifs, directs, frontaux, brutaux et incapacitants qui nous convaincra, à condition bien-sûr de survivre à l’entraînement comme à son intensité cardiaque, qu’avec quelques coups bien placés, on pourra (se) sauver la mise en cas de rencontre avec un ou plusieurs agresseurs.

 

 Aucun des grands champions actuels ou de ces vingt à trente dernières années, femme ou homme confondus, ne se réclame de l’Aïkido. Que ces combattants évoluent dans des épreuves « traditionnelles » pour un match de boxe, sur un tatamis ou en Free Fight, on entendra souvent formulées dans leur CV des disciplines telles, dans le désordre, que le Ju-Jitsu brésilien, le Pancrace, la Boxe Thaï, la boxe anglaise ou française, le Judo, la lutte, le Sambo, le Pancrace, le Penchak silat, peut-être le Krav Maga ou le Sistema, peut-être le Karaté, peut-être le Kung-Fu.

 

Mais rarement, voire jamais, l’Aïkido.

 

Regards sur l’Aïkido dans la rue et au cinéma

 

 

Si l’on parle du Judo, on peut tomber sur un stade portant le nom du judoka Teddy Riner, judoka français, plusieurs fois champion olympique, multiple champion du monde, et encore en activité. J’ai fait cette découverte cette semaine, alors que j’ai dû changer d’itinéraire pour me rendre au travail vu qu’il se trouvait un colis suspect dans un train à la gare d’Argenteuil. Après avoir pris le bus 140 depuis la gare d’Argenteuil, j’ai ensuite dû me rabattre vers la ligne 13 du métro à Asnières pour me rendre au travail. Là, j’ai découvert ce stade Teddy Riner.

 

 

Je ne connais pas, pour l’instant, de stade Multisports ou de gymnase qui porte le nom de Morihei Ueshiba.

 

Si l’on parle Kung-Fu, plusieurs années après sa mort ( en 1973, soit « seulement » quatre ans après celle de Morihei Ueshiba) l’aura de Bruce Lee reste intacte. Même des journalistes intellectuels émargeant dans les Cahiers du cinéma pourraient raconter dans un livre l’émotion qu’a constituée, plus jeune, pour eux, le fait de voir Bruce Lee au cinéma. En outre, depuis son décès, d’autres personnalités ont perpétué ce prestige du Kung-Fu. Jackie Chan, Jet Li,  Donnie Yen ou des productions cinématographiques américaines telles que Matrix ou Kill Bill voire « françaises » ( Crying Freeman, 1995, par Christophe Gans avec l’acteur/artiste martial Mark Dacascos). Sans oublier bien-sûr d’innombrables productions asiatiques telles The Grandmaster ( 2013) de Wong-Kar WaiThe Assassin ( 2015) de Hsou Hsia Hsien ou encore The Blade ( 1996) de Tsui Hark. Et bien d’autres.

 

Le Karaté ne semble pas souffrir d’une trop grosse décote dans la perception que le grand public en a. En outre, souvent, Kung Fu et Karaté se confondent dans l’esprit de beaucoup de personnes.

 

Le Penchak Silat, art martial indonésien, effectue une percée depuis quelques années au moins depuis le film The Raid ( 2011) avec l’acteur  Iko Uwais. Acteur/artiste martial que l’on peut revoir dans 22 Miles ( 2018) de Peter Berg aux côtés de Mark Whalberg, John Malkovich, Ronda Rousey ( ex championne du monde Free Fight, mais aussi ex-médaillée olympique de Judo auparavant…), Iko Uwais sera apparemment dans Expandables 4 en 2022.

 

 

S’il existe des modes qui poussent davantage le grand public vers certains styles de combat, disons que certaines méthodes de combat déjà « connues » telles que la boxe (thaï, anglaise, française), le judo voire le karaté restent des expériences incontournables au moins pour débuter.

 

Alors que du côté de l’Aïkido, cela se passe différemment. D’abord, d’un point de vue cinématographique, il faut peut-être remonter jusqu’à Steven Cigale ( Seagal, bien-sûr) dans les années 90 pour avoir un héros d’un film à grand succès, adepte de l’Aïkido. Mais Seagal a laissé bien moins de souvenirs qu’un Bruce Lee, qu’un Jackie Chan, qu’un Jet Lee ou qu’un Jean-Claude Vandamme. Donc, concernant la perception de l’Aïkido au cinéma, il y a un déficit grandiose en termes d’images. Aujourd’hui, même l’acteur Jason Statham, que ce soit dans Le Transporteur ou dans Expendables, est bien plus connu que Steven Seagal. Idem pour Keanu Reeves/ John Wick ou Tom Cruise/ Jack Reacher. Aucune de ces grandes vedettes anglo-saxonnes ne pratique devant la caméra un art martial permettant d’identifier ou de penser à l’Aïkido.

 

Par ailleurs, Steven Seagal a peu œuvré pour la crédibilité de l’Aïkido en tant qu’art martial mais aussi comme art….de vivre. Et en parlant « d’art de vivre », on se rapproche de ce qui explique sans doute, aussi, en partie, ce qui peut rebuter dans l’apprentissage mais aussi dans la découverte de l’Aïkido.

 

On peut se battre mais on ne peut pas se battre

 

L’art de vivre, c’est autant la façon de combattre. Que la façon de percevoir le monde et son entourage. Et, dans ces quelques domaines, on peut dire que l’Aïkido tranche beaucoup avec la plupart des arts martiaux, disciplines et formes de combats citées précédemment. Puisqu’à la percussion et au rentre-dedans de ces autres disciplines où le KO ou le Ippon peut être recherché de façon compulsive, l’Aïkido préfère « l’harmonisation » avec l’opposant. Mais, aussi, l’absence de compétition. Donc, on peut se battre. Mais on ne peut pas se battre. Dans un monde où il s’agit d’être le meilleur ou de dominer, l’Aïkido détonne. Surtout lorsqu’on le connaît très mal.

 

La cérémonie du thé

 

Ainsi, Maitre Takako Kunigoshi, née en 1911, la seule femme interviewée parmi les Maitres, a arrêté de pratiquer et d’enseigner l’Aïkido depuis des années lorsque Stanley A. Pranin vient la rencontrer à son domicile d’abord en 1981 puis en 1992. Elle vit alors dans une semi-retraite et donne des cours de Cérémonie du Thé. Une activité qui n’a a priori rien de martiale pour le profane. Jusqu’à ce qu’elle affirme au cours de l’interview :

 » Je passe la plus grande partie de mon temps à pratiquer la cérémonie du thé, mais quand je tiens la louche en bambou, c’est comme si je tenais un sabre. J’ai cette sensation et je me souviens de ce que O-Sensei nous disait. Que ce soit la cérémonie du thé ou l’arrangement floral, il existe des points communs avec l’Aïkido car le ciel et la terre sont faits de mouvement et de calme, de lumière et d’ombre. Si tout était continuellement en mouvement il y aurait un complet chaos ». 

Et, plus tard, Maitre Takako Kunigoshi conclut :

 

 » (….) je suis persuadée que toutes les nations du globe ont accès à la même vérité. Quand le soleil brille, il y a forcément des ombres. Je pense que l’on peut dire la même chose des arts martiaux ».

 

Kendo et Aïkido 

 

Le Kendo, art martial à la pratique assez confidentielle qui a des points communs avec l’Aïkido, a pour lui  les assauts physiques visibles, audibles et puissants. Alors qu’avec l’Aïkido, on a l’impression que tout se passe ou se passerait en douceur. Comme si l’Aïkido consistait à tomber d’un arbre en se détachant d’une branche à la façon d’une feuille. Ce qui est difficile à faire concilier avec la soudaineté et la violence des attaques et des agressions du monde.

 

Un temps d’apprentissage fastidieux

 

Et puis, il y aussi un autre aspect qui rebute dans l’Aïkido. Et tout enfant en nous a sans doute connu ça, si, un jour, il a eu à choisir entre le judo, le karaté, la boxe thaï ou l’Aïkido. L’Aïkido prend du temps. Il est assez difficile de sortir du premier cours en se disant que l’on a maitrisé une technique. Autant, en judo, en karaté ou en boxe thaï, on peut avoir l’illusion d’apprendre très vite et de voir rapidement nos progrès, autant en Aïkido, le temps d’apprentissage peut devenir fastidieux. Décourageant. Frustrant. Très technique, très exigeant, l’Aïkido refuse sans doute durement les erreurs de placement comme d’intention. Alors que dans d’autres disciplines, on peut plus facilement  masquer ou compenser – ou essayer de le faire- nos lacunes techniques par notre engagement physique et notre « combativité ».

 

Quelques Maitres actuels qui s’y « connaissent » en Aïkido

 

Je parle d’Aïkido mais je n’en n’ai jamais pratiqué. J’ai lu à son sujet. J’ai croisé deux ou trois personnes, deux ou trois Maitres, encore vivants, qui, eux, le pratiquent et l’enseignent chacun à leur manière à Paris et ailleurs :

Maitre Jean-Pierre Vignau ( Arts Martiaux : un article inspiré par Maitre Jean-Pierre Vignau), Maitre Régis Soavi ( Dojo Tenshin-Ecole Itsuo Tsuda/ séance découverte), Maitre Léo Tamaki (Dojo 5).

C’est du reste en lisant une des interviews réalisées par Maitre Léo Tamaki que j’ai fait la connaissance de Maitre Jean-Pierre Vignau avec lequel j’ai commencé à pratiquer depuis deux semaines. Et c’est en lisant ou en regardant, je crois, une interview de Maitre Léo Tamaki que j’ai entendu parler pour la première fois de Stanley A. Pranin et de cet ouvrage. C’est aussi en regardant une vidéo d’une rencontre entre Greg MMA et Léo Tamaki et en écoutant celui-ci faire un peu l’historique de l’Aïkido que j’ai commencé à avoir une autre perception de l’Aïkido et à davantage le voir pour ce qu’il est à l’origine : un Art martial. 

L’association de la pratique d’un haut niveau, d’une bonne culture concernant la discipline enseignée et d’un goût pour la pédagogie me semble bien définir Maitre Léo Tamaki.

C’est ce que je recherche chez un Maitre ou un enseignant. Aptitudes que j’ai aussi trouvées chez Maitre Jean-Pierre Vignau ainsi que chez Maitre Régis Soavi. Mais aussi chez Yves,  Jean-PierreCarmelo et d’autres moniteurs d’apnée ( ou de plongée) rencontrés dans le club d’apnée – et ailleurs- où je m’entraîne aussi. Ou chez Jean-Luc Ponthieux, mon ancien prof de guitare basse au conservatoire d’Argenteuil. Lorsque je croyais encore pouvoir apprendre à en jouer. Sans pratiquer régulièrement et avec les autres….

 

Quelques enseignements de ce livre de Stanley A. Pranin

 

Ce livre d’interviews paru en 1993 dans sa version anglaise puis en 1995 dans sa version française est désormais assez difficile à trouver. On le trouve en seconde main à un prix assez élevé. J’ai acheté le mien environ 60 euros. Je ne le regrette pas.

 

La plupart des personnes, pour ne pas dire pratiquement toutes celles interviewées et impliquées dans cet ouvrage, ainsi que l’intervieweur, Stanley A. Pranin, sont désormais décédées ce vendredi 11 février 2022 alors que débute la rédaction de cet article.

 

Et ces personnes sont décédées depuis plusieurs années. ( Stanley A. Pranin, né en 1945, est lui-même décédé en 2017). Elles n’entendront jamais parler de la pandémie du Covid, de Gérald Darmanin, du pass vaccinal….

 

Mais grâce à Stanley A.Pranin, à son abattage et à sa culture considérables au moins dans le domaine de l’Aïkido, abattage et culture dont ce livre rend très bien compte, on apprend un peu mieux ce qu’est ou peut-être l’Aïkido. Car l’Aïkido, finalement, reste un art mystérieux. Voire « fantôme ». 

 

 

Premier enseignement : une certaine polyvalence martiale.

 

Cela m’a pris du temps pour le comprendre et cela se vérifie à nouveau avec ces Maitres interviewés (une seule femme parmi ces Maitres, Maitre Takako Kunigoshi, c’est dommage et cela rend aussi son témoignage d’autant plus important) qui ont été élèves de Maitre Ueshiba avant la Seconde Guerre Mondiale :

 

Tous les Maitres d’Arts martiaux, quelle que soit la discipline ou l’Art martial qu’ils décident ensuite d’enseigner, ont souvent un gros bagage d’expériences dans plusieurs arts martiaux ou techniques de combats. « Gros bagage », cela signifie qu’ils ont souvent un bon voire un très bon niveau dans d’autres disciplines martiales. Niveau obtenu au moins grâce à une certaine quantité d’entraînements. Dans ce livre, on apprend par exemple que les Uchideshis s’entraînaient…quatre fois par jour. Et on ne parle là que de leur pratique de l’Aïkido avec Maitre Ueshiba. On ne parle pas du vécu martial qu’avaient déjà ces uchideschis avant de rencontrer Maitre Ueschiba. La plupart de ces Maitres avaient souvent débuté enfants leur apprentissage martial. Et on parle d’un peu plus que deux à trois séances d’entraînement.

Ainsi, Maitre Ueshiba, avant de faire la rencontre de Maitre Sokaku Takeda qui allait lui enseigner le Daito-Ryu, un art martial six fois centenaire et secret, qui, en grande partie, allait lui inspirer l’Aïkido, avait auparavant vécu diverses expériences martiales soutenues. Un des Maitres interviewés décrivant Maitre Ueshiba comme une personne qui écumait en quelque sorte les lieux d’enseignement martial. Tant il aimait ça ! Par ailleurs, Maitre Ueshiba avait pu compter sur le soutien moral mais aussi financier de son père et d’un de ses oncles. Tant pour faire venir et  héberger un professeur de judo émérite et réputé à la maison pour des cours particuliers. Que pour faire construire un dojo pouvant permettre à Maitre Ueshiba, devenu adulte, de pratiquer et d’enseigner dans de bonnes conditions.

 

A cette ferveur martiale, Maitre Ueshiba allait ajouter une ferveur religieuse au travers de la secte religieuse Omoto suite à sa rencontre avec le prédicateur Onisaburo Deguchi. A la lecture de cet ouvrage, on comprend que les deux ferments de cette ferveur ont beaucoup contribué à transformer Maitre Ueshiba en ce futur fondateur de l’Aïkido qu’il est ensuite devenu. 

 

Second enseignement : une ferveur martiale et spirituelle.

 

Car tous ces Maitres interviewés par Stanley A. Pranin se caractérisent par un engagement profond dans l’apprentissage de leur pratique. Non seulement, elles et ils s’entraînaient régulièrement. Mais, en plus, avec implication. L’esprit « il fait froid et il pleut aujourd’hui, je n’ai pas trop envie de sortir m’entraîner » ne faisait pas partie d’eux. On parle ainsi, au moins, de Maitre Gozo Shioda ( également interviewé dans ce livre) qui venait au cours « religieusement ». Mais aussi du même, qui, comme d’autres Uchideshis, avait « les larmes aux yeux » – tant l’entraînement pouvait être douloureux- lorsqu’il servait de Uké à Maitre Noriaki Inoue dont l’interview ouvre le livre.

 

Le jour du « Shinaï »

 

Par ailleurs, les élèves étaient incités à donner constamment le meilleur d’eux-mêmes. L’entraînement pouvait être sévère, sans doute militaire, voire humiliant. Un des Maitres (Maitre Kiyoshi Nakakura )raconte comment il avait été brutalement puni pour, négligemment, peut-être sous l’effet de la fatigue, avoir marché sur le shinaï d’un de ses camarades. On est donc très loin d’une expérience du sport loisirs ou du sport Fitness ou Crossfit telle qu’elle s’est développée dans les pays occidentaux depuis les années 80. Ou il s’agit principalement de perdre des calories, de sculpter sa silhouette pour des raisons esthétiques et narcissiques. Et non d’apprendre à vivre ou à se connaître, en quelque sorte.

 

Pour se faire une idée du quotidien d’un Uchideshi, un élève qui reste sur place auprès du Maitre qui l’accepte et le forme, on peut se procurer le livre de Maitre Jacques Payet, Uchideshi ( Dans les pas du Maître), paru en 2021. Maitre Jacques Payet a été un des élèves de Maitre Gozo Shioda pendant cinq ans dans les années 80 durant cinq ans au Japon. Pour cela, Jacques Payet avait quitté La Réunion, son île natale, alors qu’il ne parlait pas ou très peu Japonais. J’ai aimé lire son livre il y a plusieurs mois. Un livre que je n’ai malheureusement pas-encore- pris le temps de chroniquer pour l’instant. Car j’avais alors opté pour parler d’un livre consacré à l’actrice… Béatrice Dalle ( Que Dalle un livre sur l’actrice et comédienne Béatrice DalleBéatrice DalleBéatrice Dalle, trois fois..)

 

Espérons que cette distraction ne me portera pas préjudice. Et que je n’aurai pas à connaître pour cela le même châtiment que Maitre Kiyoshi Nakakura «  le jour du Shinaï ».

Pour l’instant, à Paris, pour le peu que j’ai vu, c’est au Dojo Tenshin-Ecole Itsuo Tsuda de Maitre Régis Soavi, que l’on se rapproche le plus, de manière atténuée, du quotidien d’un Uchideshi « traditionnel ». Pour les horaires matinaux des cours ( à 6h30, en semaine, à 8h les week-end)du lundi au vendredi. Pour l’implication personnelle des pratiquants dans l’entretien et la vie du lieu. ( Dojo Tenshin-Ecole Itsuo Tsuda/ séance découverte et Trois Maitres + Un).

 

Enfin, dans Les Maitres de l’Aïkido, on comprend facilement en lisant les réponses et les témoignages de ces Maitres- et de Maitre Takako Kunigoshi– que l’Aïkido qu’ils pratiquaient n’avait strictement rien à voir avec cette « danse » à laquelle il peut être aujourd’hui régulièrement associé. Et que c’est un art martial « efficace » pour qui le maitrise et le comprend.

 

Un ami des chiens

 

Dans son interview, Maitre Gozo Shioda raconte par exemple comment, à une époque, il allait s’entraîner au petit matin, en allant en quelque sorte défier des chiens sauvages du voisinage. Il évoque le fait d’avoir été mordu quelques fois et parle aussi de ce moment où les yeux des chiens deviennent « vitreux », expliquant que cela signifie qu’ils vont attaquer. Et, lorsqu’ensuite, Maitre Gozo Shioda regrette la mort de ces chiens, il est difficile de savoir s’il est triste d’avoir perdu des « compagnons » d’entraînement. Ou s’il regrette d’avoir dû les tuer lors d’un de ses entraînements. Quoiqu’il en soit, ce genre d’anecdote, racontée en toute simplicité, contredit la vision de l’Aïkido comme étant un art martial inoffensif. Car, à ce jour, je n’ai pas encore entendu parler d’un pratiquant de boxe anglaise, de Krav Maga, de Pancrace, de Ju-jitsu brésilien ou autre qui serait régulièrement parti au petit matin afin de s’entraîner à combattre, seul et à mains nues apparemment, des chiens errants.

 

 

Aïkido et Zen

 

L’interview de Maitre Kisshomaru Ueshiba, un des fils de Maitre Ueshiba, clôture l’ouvrage. Maitre Kisshomaru Ueshiba est celui qui a prolongé l’œuvre de son père et a contribué à la reconnaissance internationale de l’Aïkido. Que ce soit par des enseignements, des ouvrages ou en autorisant le départ d’instructeurs japonais à l’étranger.

Dans son interview, pleine de franchise, franchise également présente dans les autres interviews, Maitre Kisshomaru Ueshiba souligne l’importance de la spiritualité dans la pratique de l’Aïkido.

 

Ainsi, il dit vers la fin de son interview (synthèse d’interviews réalisées à son domicile entre 1978 et 1988) :

 

« Mon Aïkido insiste sur l’esprit ( Kokoro). En Aïkido, le mental est important. Mon père avait crée cette discipline comme une voie chevaleresque qui ne comprenait aucune compétition ».

 

(….) « D’une certaine manière, il existe une correspondance entre l’Aïkido et le Zen. Notre discipline implique un complet changement des formes mentales (….) ».

 

J’aimerais que cet article puisse contribuer à restaurer l’image de l’Aïkido mais aussi à mieux comprendre l’un des buts des Arts Martiaux qui consiste aussi à apprendre que : Toujours chercher à être ou à devenir le plus fort ou la plus forte, c’est aller à sa perte.

 

 

Franck Unimon, ce vendredi 11 février 2022.

 

Catégories
Musique

Les rappeurs Joey Starr, Orelsan et Tricky : quelques idées pour réussir

Gare du Nord, ce lundi 31 janvier 2022.

 

 

 Les rappeurs Joey Starr, Orelsan et Tricky : quelques idées pour réussir

 

Ces derniers temps, Orelsan est le rappeur ou l’un des rappeurs français dont on parle le plus et le «mieux ». Même le Président Macron, qui va sans doute se représenter lors des prochaines élections présidentielles d’avril 2022, tenait des propos élogieux à son sujet à la fin de l’année dernière. Comparant Orelsan à un « sociologue » décrivant bien la société française.

Interrogé au sujet de cette flatterie présidentielle, alors qu’il faisait la promotion de son dernier album, Civilisation,  Orelsan a répondu quelque chose comme :

« Il ( le Président Macron) ne serait pas en train de gratter mon buzz ? ».

Avant de réussir et d’être ce rappeur à propos duquel, désormais, beaucoup de monde est content de dire : «  Je l’admire », Orelsan a beaucoup douté. Je le sais comme d’autres car j’ai un peu lu sur lui. Auparavant. Sans trop insister.

 

Lorsque mon petit frère de 14 ans mon cadet, qui a grandi dans le Rap, m’avait offert à Noël il y a trois ou quatre ans maintenant, un album d’Orelsan, je l’avais un peu écouté. Mais, d’une part, avant d’écrire cet article, lorsque j’ai cherché ce cd, j’ai dû constater qu’il n’était plus là où je l’avais initialement rangé. A un endroit facile d’accès. Ce qui signifie que je l’ai rangé avec d’autres cds, dans un carton. Et, d’autre part, j’ai oublié le titre de cet album. Je me rappelle d’Orelsan sur la pochette, attendant à une station de bus en tenue de ninja. Tenue que j’avais trouvée modérément appropriée. A la fois car il est courant que des rappeurs se réclament des Arts martiaux. Mais, aussi, parce-que je trouvais que ces habits ne lui allaient pas. Je me rappelle aussi d’Orelsan derrière une vitre humidifiée. 

On comprend donc facilement qu’Orelsan, aujourd’hui salué et reconnu pour son originalité, ses vertus de rappeur et la qualité de ses textes, ne m’avait pas particulièrement marqué. Alors que cet album, déjà, contenait plusieurs titres que bien des amateurs de Rap, et d’ailleurs, citeront comme des références, tout en s’étonnant de mon ignorance voire de mon handicap psychique et auditif total et évident.

Même si, depuis, j’ai quand même commencé à goûter des textes et des vidéos de l’artiste Orelsan, je vais choisir de continuer de m’enfoncer encore un petit peu plus à parler de lui, de Joey Starr et du Rap en général.

 

Aujourd’hui, tout le monde écoute du Rap. Je ne vais pas prétendre le faire autant que d’autres parce-que je respecte le Rap. Mais, aussi, parce-que, pour moi, écouter de la musique, cela se fait « sérieusement ». En profondeur plutôt qu’en passant. Je n’ai jamais aimé le terme de « musique d’ambiance » ou de « musique d’ascenseur ». Encore moins de « musique de chiottes ».

Or, je sais que je n’ai pas, à ce jour, consacré ou pu consacrer toute mon attention au Rap comme je l’aurais pu ou l’aurais dû. Pour cet article, je vais donc conserver le statut de celui qui sait à moitié de quoi il en retourne lorsque l’on parle de Rap. 

 

Ce faisant, je continuerai de triquer la musique de l’artiste Tricky dont je réecoute et découvre des titres en ce moment.

 

Puisque, selon moi, cela est compatible avec le fait de parler davantage, ici, de Joey Starr et Orelsan. Tricky est du reste un artiste que je vois très mal l’un ou l’autre me reprocher d’écouter. Non seulement il m’est déja arrivé de me dire que Joey Starr et Tricky ont une certaine ressemblance physique. Ensuite, pour sa façon qu’a Tricky d’être envouté par sa propre musique, comme pour ses compositions, je ne peux qu’imaginer Joey Starr et Orelsan plutôt adeptes de la « filière » Tricky. Reste à savoir si toutes celles et tous ceux qui, aujourd’hui et demain, écoutent Joey Starr et Orelsan savent qui est Tricky. Mais cela n’est pas directement le sujet de l’article…

 

 

Cette nuit, dans un de ces moments d’égarement devenu fréquent pour tout individu « connecté », je me suis laissé aller à regarder des rubans d’images et de vidéos. Parmi elles, une intervention de Joey Starr, qui, cinq minutes durant, revenait sur quelques uns des titres qui ont « fait » l’histoire du groupe NTM.  

NTM  : Groupe de Rap aujourd’hui devenu « mythique » ? « Iconique ? » « Intergénérationnel ? ».

Au point qu’aussi bien des personnes qui l’ont connu en activité que des biens plus jeunes le citent comme faisant partie des groupes de Rap qui ont compté et continuent de compter. Là, aussi, c’est ce que l’on appelle la réussite. Et si cette réussite revêt maintenant le panache des pionniers et des anciens, on peut facilement concevoir que plus tard, bien des personnes parleront d’Orelsan et d’autres rappeurs et chanteurs actuels avec le même reflux de dynamisme et de nostalgie : 

Aya Nakamura, Niska, Maes, PNL, SCH, Ninho, Soprano, Damso,  et beaucoup d’autres. 

 

Dans cette vidéo où l’on voit Joey Starr parler de quelques uns des titres de NTM – c’était apparemment avant la sortie du film Suprêmes d’Audrey Estrougo ( sorti en novembre 2021) que Starr cite un moment- il lui est demandé qui, parmi les nouveaux rappeurs, il écoute. Starr finit alors par citer :

«  Orelsan ».

 

Si Orelsan ne fait pas partie de ma catégorie d’âge, Joey Starr, si. A un ou deux ans près. Je reste convaincu que si nous avions habité dans la même cité que nous nous serions connus de vue :

Dans la cité où j’ai grandi à Nanterre, je connaissais de vue, de nom ou de réputation, certains jeunes « durs » ou « voyous ». La fascination qu’ils exerçaient, avant de se faire rattraper par les tridents de la Loi, de l’échec scolaire ou des substances était suffisante pour qu’ils soient connus. Sans oublier cette impression de liberté et de force qui se dégageaient d’eux ou qu’on leur prêtait.

Dans ma jeunesse, j’ai donc connu « des » Joey Starr. Mais ils ne faisaient pas de Rap. Ils ne sont pas devenus célèbres. Ou s’ils l’ont été, cela a peu duré et cela s’est ensuite très mal terminé pour eux. Au point de finir par se faire oublier. Leur jeunesse ayant été sans doute leur acmé fut-il fait d’actes et de comportements hors-la-loi.

 

Mais, moi, comme la majorité des jeunes et sûrement aussi comme la majorité de ces personnes qui écoutent aujourd’hui du Rap, j’ai toujours respecté la loi. J’ai toujours obéi et marché droit. C’est la raison pour laquelle je crois que plus jeune, si nous avions fréquenté la même cité, Joey Starr et moi n’aurions pas été amis ou proches. Je l’aurais peut-être même fui. Par peur ou par jugement moral. Et lui, comme d’autres, m’aurait perçu comme un petit intello de plus ou de trop. 

 

Une peur et un jugement moral qui m’ont suivi même, lorsqu’adulte, le groupe NTM, dans les années 90, a commencé à faire parler de lui.

Je me rappelle encore un peu de ce jour, où j’avais eu à choisir entre :

 

Me rendre à un concert de NTM. J’avais acheté leur album j’appuie sur la gâchette ( sorti en 1993. J’avais 25 ans, et, grâce à mon métier d’infirmier avais alors commencé à m’insérer en trouvant en psychiatrie une discipline qui me plaisait).

 

Et un concert de Me’Shell Ndégeocello après son premier album : Plantation Lullabies.

 

 Si j’avais été dans une bande ou avais connu un groupe d’amis solidaire et curieux d’aller à ce concert, peut-être me serais-je risqué  à aller voir NTM. Après être allé voir le gentil Mc Solaar (que j’aimais beaucoup alors mais dont la prestation sur scène m’avait déçu car trop molle) au Zénith. Et avant d’aller voir I AM à l’Olympia à l’époque de je danse le Mia (un des meilleurs concerts auxquels je sois allé).

 

Mais j’allais seul en concert et avais été plus rassuré par le public de MeShell Ndegeocello. Son concert à l’Elysée Montmartre avait d’ailleurs été très très bon. Artiste que je suis ensuite retourné voir deux ou trois autres fois en concert.

MeShell Ndegeocello, moins connue en France que Joey Starr et Orelsan, mais sûrement connue par au moins l’un des deux (puisque une grande culture musicale est souvent une des caractéristiques des artistes qui « marchent » quel que soit leur genre musical) est une artiste bien plus qu’honorable :

 

Chanteuse, poétesse, rappeuse, bassiste, claviériste, compositrice, elle a joué au moins avec les Rolling Stones, Marcus Miller et, de plus, aujourd’hui, fait figure de féministe militante et LGBT. Donc, MeShell Ndegeocello est tout sauf une artiste de surface.

 

 

Sauf que, ne pas aller à ce concert de NTM, dans les années 90, c’est quand même rater un sacré coche. Parce qu’il m’a fallu du temps pour comprendre l’importance du groupe dans ma vie. Pour dépasser certaines images défavorables du groupe.

 

 

Rencontrer Joey Starr

 

Comparativement à Joey Starr, Orelsan fait plus fréquentable. Il fait plus attention à son image que Joey Starr au même âge. Il a par ainsi gommé la casquette de sa présentation après s’être aperçu que certaines personnes restaient « bloquées » devant un jeune en casquette.

 J’avais aussi oublié qu’il était ce rappeur, qui, il y a presque dix ans, avait fait polémique avec un titre considéré comme misogyne. Un titre que je n’ai pas vraiment écouté. Comme d’autres rappeurs avant lui, Orelsan avait choqué avec un titre et il avait plus été question de ce titre et du sens à donner à son texte qu’au reste de sa discographie. Le groupe Ministère Amer ou le rappeur Disiz La Peste étaient aussi passés par là.

 

Pour NTM, le scandale passait- aussi- beaucoup par les frasques de Joey Starr : frapper un singe dans une cage, insulter une hôtesse de l’air, se battre dans la rue, faire de la prison, prendre des substances, son ancienne relation avec Béatrice Dalle etc….

 

Au point que, pour moi, il était évident que cet homme peu recommandable mourrait jeune. Telle était la sanction morale et pudibonde qui l’attendait d’après ce que j’avais alors compris de l’existence.

 

Mais Joey Starr a survécu. Et moi, aussi. 

Il était également vivant ce jour où je l’ai croisé. La seule fois, à ce jour. C’était en 2007  vraisemblablement. Au festival Furia, aux étangs de Cergy-Pontoise. Festival qui n’existe plus aujourd’hui.

Joey Starr, après la « dissolution » de NTM continuait une carrière en solo. C’était  avant son rôle dans la série Mafiosa ( 2008). Avant son rôle dans le film Polisse ( 2011) de Maïwenn. Film que je verrais d’ailleurs au festival de Cannes, sans pouvoir l’interviewer, car l’attaché de presse du film n’aimait pas le journal cinéma pour lequel j’écrivais alors, journal cinéma aujourd’hui disparu : Brazil.

 

Octobre, 2019, au centre Joey Starr, à sa droite, Béatrice Dalle, aux moments des saluts, à la fin de la pièce « Elephant Man » que j’étais allé voir aux Folies Bergères.

 

Aujourd’hui, on peut trouver normal de voir Joey Starr acteur, au théâtre ou à la télé. Mais, à cette époque, en 2007, Joey Starr -ou simplement le fait d’être rappeur-, en France,  ne rimait pas du tout avec le fait d’être comédien de théâtre ou acteur de cinéma. Mc Solaar, rappeur « chouchou » des média, était du reste allé au festival de Cannes, en tant que membre du jury, plusieurs années avant Joey Starr. En 1998, au sein du jury présidé par Martin Scorsese.  Et, autant que je me souvienne, Mc Solaar, malgré son élégance, n’a jamais fait d’apparition marquante par la suite ou carrière dans le cinéma ou sur des planches de théâtre. Alors que Joey Starr, dans ces domaines, fait aujourd’hui figure d’exemple mais aussi d’exception. Il est ainsi, en France, le premier rappeur à avoir réalisé ce grand écart avec autant de réussite entre son univers artistique d’origine ( le Rap) et le cinéma, le théâtre et la télé. 

 

Joey Starr, quittant la scène, oct 2019, aux Folies Bergères, après voir joué le rôle « d’Elephant Man ».

( Voir l’article Elephant Man ). 

 

 

Hormis peut-être Eddy Mitchell ou Marc Lavoine, que je trouve aussi bons acteurs que chanteurs, il faut ensuite regarder plutôt aux Etats-Unis pour voir une carrière à peu près équivalente d’un chanteur ou rappeur qui a, par ailleurs, une carrière cinématographique notable. Je pense d’emblée, au choix, soit à Harry Connick Jr ou à Common. 

Mais en 2007, en France, Joey Starr était encore Joey Starr. Un rappeur ainsi qu’un bonhomme incontrôlable qui faisait peur ou qui pouvait encore faire peur. En tout cas, en 2007 , avant même son arrivée sur le festival Furia, il m’avait indirectement fait peur ainsi qu’à certaines personnes de l’organisation du festival.

 

Grâce à un ami, Luc Rajaonarison ( chanteur et musicien, alors, du groupe Full Screen, et, aujourd’hui du groupe September Boy ) j’avais pu faire partie de l’organisation du festival, en tant que bénévole. Côté production. Derrière la scène. Je pouvais donc et voir les artistes avant leur concert. Mais aussi sur scène.

 

C’est ainsi que j’ai croisé Joey Starr. J’avais alors une jambe dans le plâtre. Rupture du tendon d’achille. Entre le jour où je m’étais porté volontaire pour être bénévole et le moment où le festival avait débuté, je m’étais rompu le tendon d’achille en faisant du sport.

 

Ce jour-là, je n’ai pas osé aborder Joey Starr. Par contre je l’ai observé. Qui n’observait pas Joey Starr ?

Je me rappelle que le groupe The Roots, convoyé par mon ami Luc, avait tenu, jusqu’au bout à son statut de groupe Star. Le trajet menant du backstage jusqu’à la scène était très peu pratique à monter en camion ou en voiture. Mais par le biais de son meneur, le batteur ?, le groupe avait tenu à se faire emmener en camion jusqu’à la scène. Les roues du camion patinaient dans le ridicule alors qu’il se rapprochait péniblement de la scène située à une centaine de mètres.

 

En attendant son concert, assis, Joey Starr « l’énervé », avait été particulièrement calme. Discret. Aucune frasque. Au moment de monter sur scène, sans faire d’histoire, lui et ses musiciens avaient fait le trajet à pied. Puis avaient donné leur concert. Et étaient ensuite repartis sans plus d’accrochage.

 

Mon admiration pour Joey Starr :

 

Un certain nombre de fois, dans le passé ou même récemment, Joey Starr a déconné. Dans ses comportements comme dans certains de ses propos.

 

Mais en le regardant cette nuit, j’ai listé quelques raisons qui me font l’admirer.

 

D’abord avec NTM, parti de nulle part, car la ville de Saint Denis, et là où il vivait, c’était alors nulle part, Joey Starr a créé quelque chose. Dans la musique, le Rap.

 

Même relativement éloigné de cette scène du Rap qui s’est construite dans les années 90 avec Assassin, NTM ou d’autres groupes, je « sais » que la musique dominante,  dans les années 90 alors, en France, était loin d’être le Rap. Mais, aussi, que cette musique était loin d’être incarnée par des artistes noirs ou arabes comme maintenant avec le Rap.

 

Si je commence à faire un effort de mémoire pour essayer de trouver des artistes noirs ou arabes qui, en France, dans la musique, avaient une grande ou assez grande audience, dans les années 90, qui vais-je trouver ?

 

Henri Salvador ? Kassav’ ? Zouk Machine ? Francky Vincent ? Laurent Voulzy ?

J’ai oublié si La Compagnie Créole tournait encore dans les années 90. Et, avant les années 90, qui avions-nous autrement comme artiste français non-blanc :

 

 

Carte de séjour ? Karim Kacel ? Ottawan ? David Martial ? 

 

En découvrant ce lundi 31 janvier 2022, cette vidéo du groupe Ottawan de ce tube qui doit dater de la fin des années 70, je me dis qu’il a dû falloir beaucoup de courage à ce duo pour surmonter bien des préjugés racistes de l’époque. Cette remarque vaut aussi pour Karim Kacel : je me rappelle d’une de ses interventions, où, agacé, il avait rappelé  » Je ne m’appelle pas Michaël Jackson. Je m’appelle Karim Kacel ! ». 

 

J’ai peut-être oublié un ou deux artistes arabes ou noirs tels qu’Alain Bashung ( en partie Kabyle) ou voire Etienne Daho ( né à Oran) ou peut-être Mirwais ( moitié afghan par son père et ex-membre du groupe Taxi Girl ).

 

 

 

Mais, autrement, il faut s’imaginer que tous les autres artistes de la chanson française, jusqu’à l’installation du Rap dans les années 90, étaient principalement ou beaucoup des artistes de variété. Bien des sujets graves sont abordés au travers de la variété et il serait trompeur de croire que les artistes de variétés ne sont que des petites midinettes et des petits gars qui interprètent des chansons « douces ». Sauf que les canons d’expression dominants de l’époque, d’avant le Rap excluaient certaines catégories de populations ainsi que certains codes de langage ou vestimentaires.

 

Le Rap porté et popularisé par des groupes et des artistes comme NTM mais aussi Mc Solaar et I AM  a permis de « voir » certaines de ces catégories de populations jusque là exclues des plateaux télés mais aussi de l’industrie du disque et du spectacle.

 

Si fin 2021, le Président Macron a pu essayer de « gratter le buzz » d’Orelsan en l’encensant, dans les années 90, le Président de la République de l’époque, Mitterrand puis, ensuite, Chirac, s’y sont pris différemment. Jack Lang, le Ministre de la culture de Mitterand avait peut-être tenté de récupérer le groupe NTM. Chirac, lui, ne m’a pas marqué pour ses tentatives de rapprochement avec des artistes Rap. Alors que Nicolas Sarkozy, déjà, une fois Président, lui, s’était « fait » le rappeur Doc Gynéco.

 

Mais j’extrapole.

 

 

Avec le Rap, donc, Joey Starr et NTM  ou NTM et Joey Starr ont créé une nouveauté.

D’autres diraient qu’ils ont créé une rupture plutôt. Une rupture conventionnelle avec la musique qui se faisait avant. Avec les textes qui se disaient avant.

 

Donc, une rupture. Une certaine radicalité. Mais aussi une énergie. D’autres diraient :

Une urgence.

L’urgence de quoi ? L’urgence de faire un voyage, de vivre une expérience, une rencontre.

Une rencontre et une expérience suffisamment proches de soi, de l’auditrice et de l’auditeur qui écoute, pour s’identifier à ce qui est raconté dans le Rap. Mais, aussi, pour donner envie à l’auditrice et à l’auditeur de se rapprocher davantage de ces artistes et de ce qu’ils racontent.

 

Un peu comme on se rapproche d’un feu de camp dans une forêt sombre ou d’une cheminée qui crépite dans une maison où l’on se sent enserré par un certain froid mais aussi par une presque solide solitude.

 

On se rapproche de ces artistes afin de changer d’univers, d’histoire, de condition. On l’espère tout au moins.

 

Créer. Apporter une énergie (ou une chaleur particulière qui, jusque là a manqué à d’autres) dans une certaine radicalité. Que faut-il d’autre pour réussir et ce qui me fait, aussi, admirer Joey Starr ?

 

 

La Longévité :

 

Joey Starr est encore présent pour raconter. Il est un ensemble de héros, artistes ou autres, morts très tôt, et dont l’exemple marque, instruit et guide. Mais je trouve qu’une personne qui vit suffisamment vieux pour transmettre, c’est mieux. C’est mon point de vue.

 

 

Mais il manque encore quelques pièces pour réussir.

 

 

Se canaliser :

 

Joey Starr, d’après ses frasques, a du mal ou a pu avoir du mal à se canaliser. Du moins en apparence. Car, tel le joueur de tennis Mc Enroe, qui, régulièrement, se mettait en colère sur un court de tennis, Joey starr s’est toujours canalisé dans le Rap. Il a su tenir ses engagements. Comme Mc Enroe avait su tenir son tennis. 

 

Je citais Doc Gynéco un peu plus haut. Alors que Doc Gynéco avait fait un très bon premier album solo, toujours plébiscité par certaines personnes, j’ai l’impression que l’on ne compte plus les tentatives de retour ratées de Doc Gynéco. Comme s’il s’était dissous. D’autres artistes, très bons, se sont ainsi évaporés. Par exemple, je pense de temps  à autre, avec tristesse à Finley Quaye, qui, dans les années 90, avait tout un avenir devant lui : Jazz, Reggae, dub, électro….

 

Pour moi, il avait réalisé une fusion unique de plusieurs genres musicaux. Et puis, il s’est en quelque sorte désagrégé.

 

Joey Starr, lui, est resté non seulement compact. Mais, il a continué à se canaliser et à se concentrer dans le Rap malgré ses accidents de parcours, et ses aller-retour en prison.

 

Il a donc cumulé de hautes doses et aussi de hautes charges de travail dans le Rap. Au point de devenir, d’une manière ou d’une autre, un expert dans le Rap. Qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, son travail et sa persévérance ont été au rendez-vous. Et, cela, sans compter ses heures. Mais, bien-sûr, s’il n’a pas compté ses heures, ses heures de travail n’ont pas compté pour du beurre. Il fallait qu’à un moment, tout ce travail se « voit » et se « matérialise » concrètement. Etre le meilleur rappeur, ou parmi les meilleurs, dans ses toilettes, c’est bien. L’être sur scène ou sur des millions de disques, c’est bien mieux.

 

C’est là où l’on en arrive à ce qui, selon moi, est sans doute, le plus déterminant, et, cela, sans doute dès le début de toute entreprise.

 

 

L’entourage

 

J’ai oublié de parler de la sincérité de Joey Starr ou d’Orelsan lorsqu’ils ont commencé à se lancer dans le Rap. Pour réussir, il me semble que la sincérité est indispensable. On continue, des années après leur mort, de nous parler de la sincérité d’artistes comme Georges Brassens, Jacques Brel  ou Barbara. Et on continuera de nous parler de leur sincérité pendant encore des années. Cela veut bien dire que la sincérité d’un artiste nous touche particulièrement. Comment expliquer, autrement, le succès actuel de l’humoriste Blanche Gardin ?

 

Cependant, à la sincérité de l’artiste, de Rap ou dans un autre domaine, doit correspondre la sincérité de son entourage. Car celui-ci fait, à un moment ou à un autre, la différence. Vers le succès ou vers l’échec.

 

Que cet entourage soit intime ou non, qu’il soit présent dès le début de l’aventure ou ensuite, pour que la réussite soit atteinte, il faut que cet entourage soit un entourage qui :

 

Conseille ; qui guide ; qui soutient et qui fournit du courage plutôt qu’un comportement anthropophage.

 

Il faut aussi que cet entourage soit facilement disponible en cas de besoin. Et prêt à se dévouer, à se battre voire à se sacrifier pour le projet. Et pour sa réussite.

 

Dans la réussite de bien des personnalités que je regarde, chaque fois que je regarde de près, il y a toujours un entourage constitué, permanent et solide autour d’elle. Telle une toile d’araignée.

 

Il y a ensuite d’autres paramètres à prendre en compte.

 

L’époque/ La chance

 

On dit de certaines œuvres et de certains artistes qu’ils arrivent au bon « moment ». Que d’autres sont trop en avance sur leur temps ou trop en retard. Il est vrai que j’ai du mal à m’imaginer le groupe NTM,  Orelsan ou Blanche Gardin dans les années 60. Et, il peut être très drôle de les imaginer à cette époque.

 

Cependant, s’ils avaient vécu dans les années 60, sans doute ou peut-être auraient-ils proposé une œuvre en rapport avec cette époque. Soit mus par leurs envies et leurs instincts mais, aussi guidés par l’exemple ou les conseils de quelqu’un de leur entourage.

 

Enfin, pour conclure, on va terminer avec ce qui est le plus souvent mis en exergue lorsqu’un artiste ou une personnalité « réussit » :

 

Le talent/ Le don :

 

On résume souvent la réussite d’une personne à son talent ou à son don. Beaucoup de personnes ont du talent mais ne réussissent pas pour autant. Soit parce qu’elles s’égarent. Parce qu’elles n’ont pas le meilleur ou le bon entourage. Parce qu’elles manquent de persévérance. Ou parce qu’elles se reposent trop sur leurs dons et leurs « facilités ».

 

Enfin, le mot « réussite » est un mot féminin. Mais on dirait, aussi, parfois, que pour réussir, ne serait-ce que pour réussir tout simplement à vivre, qu’il vaut mieux être un homme qu’une femme.

Charlie Hebdo, de ce 26 janvier 2022.

 

Ainsi, la jeune Shaïna Hansye : « une jeune fille de Creil, dans l’Oise » (….) « retrouvée brûlée dans un cabanon abandonné d’un jardin ouvrier, à l’âge de 15 ans, en 2019. Le meurtrier présumé venait d’apprendre qu’elle était enceinte de lui. Avant cela, la jeune fille avait été victime d’un viol collectif, commis par d’autres garçons de la cité, et avait eu le courage de porter plainte » (….) « Dossier dans lequel nous révélons que, à plusieurs reprises, policiers, experts ou magistrats n’ont pas entendu la parole de Shaïna ». ( Charlie Hebdo numéro 1540 du 26 janvier 2022).

 

Paris, près de la Gare de l’Est, ce lundi 31 janvier 2022.

 

Franck Unimon, ce lundi 31 janvier 2022.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Catégories
self-défense/ Arts Martiaux

Je cours depuis longtemps

Spot 13, samedi 15 janvier 2022. Paris 13ème.

                               Je cours depuis longtemps

 

Plus jeune, je courais après les bus et les trains que je voyais arriver. Puis, j’ai arrêté et j’ai cru que j’avais arrêté de courir. Lorsqu’ensuite, j’en voyais d’autres qui couraient après des moyens de transports, j’ai pu sourire. Bien-sûr, cela me permettait aussi d’oublier qu’entre-temps, j’avais vieilli. Mais comme j’arrivais généralement à destination et honorais mes rendez-vous les plus importants, je n’y ai pas accordé d’attention particulière.

 

Je n’ai rien contre le fait de courir, de faire du sport et de transpirer. Mais je n’aime pas courir pour rien. Je n’aime pas m’inquiéter pour rien non plus. Ou, du moins, de fournir beaucoup d’efforts pour, après, devoir m’apercevoir que je me suis éreinté pour très peu de résultats. Les travaux d’Hercule tous les jours seulement pour arriver à l’heure, cela ne vaut pas le clou.

 

 

Alors, j’ai arrêté de courir. Soit je suis à l’heure ou très en avance. Soit je suis en retard. Mais je suis moins en retard qu’avant. On parlera de sagesse, d’expérience, d’économie de moyens, d’anticipation, de maturité, de meilleure perception de soi-même comme de son environnement proche et lointain.  Ou de meilleur système d’évacuation sudoripare. Peut-être. Si on veut.

 

Car, par ailleurs, j’ai continué de courir. Je n’avais jamais véritablement arrêté. En pensées, en actions, en projets, en regrets, en illusions, en désirs, en devoirs, en écriture.

 

Prenons mon blog. Prenons les films qui sortent au cinéma.

 

A ce jour, mes cinq articles les plus lus sont consacrés aux Arts Martiaux. A ma rencontre avec deux Maitres d’Arts Martiaux : respectivement, par ancienneté, à Maitre Jean-Pierre Vignau et à Maitre Léo Tamaki. ( Dojo 5 et Arts Martiaux : un article inspiré par Maitre Jean-Pierre Vignau)

 

Puis suit un article sur le métier infirmier, celui que je pratique depuis quelques années en psychiatrie et en pédopsychiatrie : Crédibilité

 

Devant un article qui raconte ma rencontre avec l’acteur Steve Tientcheu et son co-scénariste et co-réalisateur Tarik Laghdiri dans leur ville en Seine Saint Denis : Le cinema-A ciel ouvert avec Steve Tientcheu et Tarik Laghdiri

Et, enfin….un article que j’avais écrit après avoir écouté un podcast sur l’ex-actrice française de porno Brigitte Lahaie : Brigitte Lahaie en podcast

 

Je n’ai pas choisi cette chronologie. Comme je ne choisis pas la fréquence de sortie des films dans les salles de cinéma. Malgré ou en dépit des différentes plateformes sur internet qui permettent de voir des films ou des séries chez soi.

 

Plus jeune, j’allais voir autant de films que possible. J’ai aimé ça. Au festival de Cannes, où j’ai pu aller deux fois en tant que journaliste de cinéma, j’ai aussi aimé bouffer du film de manière très rapprochée. Aujourd’hui, je regarde tous ces films sortir en salles. Dont certains en avant-premières lors de projections de presse. Si, auparavant, il m’était impossible de tous les voir, c’est encore plus vrai aujourd’hui.

Si, auparavant, il m’était possible d’écrire sur les films que je voyais en avant-premières, c’est moins vrai aujourd’hui.

 

Abdel, un copain de lycée m’avait dit un jour : «  Si tu veux te battre contre le Temps, c’est perdu d’avance ». C’était à la fac de Nanterre. Je sortais du bassin de la piscine où je venais de terminer mes longueurs. Il arrivait. Abdel devait être en fac de Droit ou d’Economie. J’étais alors en Fac d’Anglais. Pourtant, j’avais parfaitement compris son langage.

 

Le Temps peut faire penser à des arbres ou à ces êtres qui nous entourent que l’on abat et bouscule en permanence. Mais on ne s’en aperçoit pas. Car ces arbres et ces êtres ne crient pas, restent passifs et, aussi, parce qu’on ne les voit pas. Ils font partie du décor. Et lorsqu’ils disparaissent, on ne le voit pas tout de suite.

 

Nous prenons davantage en compte celles et ceux qui crient et réagissent. Qui nous font réagir. Ou qui sont mobiles.

Sauf que le Temps, lui, a cette particularité, qu’il nous repousse toujours vers nous mêmes. Pas besoin de crier ou de s’agiter. Pas besoin d’être vu, non plus. Il s’impose. C’est tout. Tels tous ces films qui sortent, toutes ces pensées et ces expériences qui défilent par bobines et qu’il est impossible de retranscrire exactement.

 

Il faut choisir. Il faut trancher. Il faut écouter. Ecrire. Parfois, c’est réussi. Du titre au contenu. D’autres fois, c’est moins bien. Mais on ne peut jamais savoir avant d’avoir effectué le geste. Et avant de l’avoir publié. Ce que l’on sait, c’est que l’on ne peut pas courir éternellement et après tout ce qui se passe autour de nous. C’est perdu d’avance.

 

 

Lors de mon dernier entraînement d’apnée, ce samedi matin, notre moniteur d’apnée, Maitre Yves (il sera gêné d’apprendre que je le vois comme un Maitre) m’a rappelé l’importance du relâchement :

Alors que j’effectuais une de mes longueurs sous l’eau, mon partenaire qui assurait ma sécurité, au dessus de moi à la surface, avait été dans l’impossibilité de me suivre. J’avais accéléré. J’avais accéléré parce-que je manquais d’air et que je voulais arriver au bout des vingt cinq mètres. Yves m’a alors répondu que, dans ce cas, il fallait se relâcher, et permettre à celui qui est en surface, de pouvoir suivre. Puisque l’on va bien plus vite sous l’eau qu’en surface. Maitre Léo Tamaki, aussi, insiste sur le relâchement en Aïkido.

 

Cela doit être pareil pour mes articles. Au lieu de chercher à aller vite afin de voir le plus de films possibles qui sortent, ou de traiter le maximum de sujets, je vais ralentir.

Hier ou avant hier, ma fille m’a demandé s’il y avait des journaux où j’avais écrit. Je lui ai répondu :

« Oui, dans un mensuel de cinéma papier qui s’appelait Brazil ».

Ce matin, je lui ai montré quelques articles de Brazil en bas desquels se trouvaient mon prénom et mon nom. C’était en 2009. Il y avait d’abord l’interview de Reda Kateb, Lucide à Paris, à la Place d’Italie. Pour le film Qu’un seul tienne et les autres suivront de Léa Fehner.

 

 

 

Puis, je suis tombé sur l’interview que j’avais faite du réalisateur philippin Brillante Mendoza pour son film Kinatay ( Massacre). Kinatay avait eu un prix à Cannes mais avait également choqué pour sa violence. Le film avait fait réagir. Mais aujourd’hui, qui s’en rappelle ?

 

 

 

 J’ai relu quelques bouts de l’interview de Brillante Mendoza. Les piles de mon enregistreur numérique avaient capitulé dès le début. J’avais fait l’erreur de mal les recharger et de ne pas avoir prévu de piles de rechange. En rentrant chez moi, je m’étais empressé de tout restituer de tête.

 

C’était en 2009. Il y a 13 ans. On peut se dire que c’est très ancien. Que c’est ressasser le passé, et les souvenirs de nos « réussites ». Mais en quoi, le passé et l’ancien sont-ils nécessairement des camouflets ? En quoi, la nouveauté est-elle obligatoirement et, toujours, meilleure ?

 

Ce week-end, je me suis demandé la raison pour laquelle, par moments, ou souvent, nous nous tenons régulièrement éloignés de ce qui nous fait du bien ou le plus de bien ?

 

Par soumission ? Par Devoir ? Par lâcheté ? Par idiotie ? Par illogisme ? Par sacrifice ?

 

J’ai commencé hier la lecture de l’ouvrage de Stanley Pranin, paru en 1993, Les Maîtres de l’Aïkido ( Elèves de Maître Ueshiba Période d’Avant Guerre). Un livre d’interviews que j’avais acheté d’occasion, il y a déjà plusieurs mois. A un prix assez élevé (environ 60 euros) car devenu difficile à trouver.

 

 

1993, c’est encore plus ancien que 2009. Et, la période d’Avant Guerre ( avant la Seconde Guerre Mondiale), c’est encore pire. Pourtant, qu’est-ce que la lecture de ces interviews m’a fait du bien ! Cela fait des mois, voire des années, que je cours. Que je m’abreuve à des informations anxiogènes en continu par devoir ou par masochisme. Et que je passe à côté de nourritures bien plus saines qui se trouvent près de moi et qui, comme les arbres et le Temps, ne font pas de bruit et gesticulent très peu.

 

En lisant une partie de l’interview de Brillante Mendoza, pour son film Kinatay, je me suis dit :

 

C’est plaisant à lire. Tout ce travail que j’avais initié avec Brazil mais aussi tous ces films que j’ai pu voir dans le passé, qui m’ont marqué et dont j’ai les dvds et les blu-rays, doivent me servir pour mes articles cinéma. Je ne peux pas et ne veux pas courir après tout ce qui sort à la vitesse d’un Ball-trap, au cinéma ou ailleurs. Par contre, je peux prendre le temps de m’arrêter sur des expériences qui ont été particulières pour moi. Ce qui signifie prendre le contre-pied de cette furie dans laquelle, trop souvent, notre vie prend souche. Comme si nous étions toujours condamnés à mourir.

 

Franck Unimon, ce lundi 17 janvier 2022.

Catégories
Corona Circus Photos

Mes photos préférées de 2021

Mes  photos préférées de 2021 

 

Ce sont des moments et des sentiments que j’ai photographiés avec mon smartphone et mon appareil photo.

 

Au centre commercial des Halles, alors que les magasins étaient fermés pour cause de pandémie du Covid.

 

 

Paris 13 ème. Il faisait assez froid, ce matin là. Pas très loin du spot 13 que je ne connaissais pas encore.

 

 

 

 

 

Près de la Tour Eiffel. Nous pouvions de nouveau sortir sans limitation horaire ou kilométrique.

 

 

Dans un jardin botanique à Amiens.

 

 

Près de la gare du Nord.

 

 

En revenant du travail, je suis tombé sur ce tournage.

 

 

Du côté de Montreuil, en allant acheter un cd d’Erykah Badu à quelqu’un.

 

Certaines oeuvres, alors que vous passez en voiture, arrêtent votre regard. Je suis ensuite revenu quelques jours plus tard. Paris, près de la Place d’Italie.

 

 

Non loin du jardin des Tuileries.

 

Un matin en partant au travail. En haut, le « luxe » lumineux et étincelant de Dalloyau qui reste. En bas, ceux de passage et dans l’ombre, sans qui le luxe plus haut et ailleurs ne tiendrait pas.

 

 

Au spot 13, Paris 13 ème, que C…m’a fait découvrir.

 

A Cergy-St-Christophe, dans une région où j’ai passé la deuxième partie de ma vie. Cette médiathèque m’a connu.

 

 

 

 

Dans Paris, alors que j’allais recevoir ma première ou ma seconde injection de Moderna. J’ai attendu le dernier moment. Lorsque la vaccination est devenue obligatoire ( passe sanitaire ou test négatif obligatoire).

 

Paris 13ème.

 

 

Paris, vers St Michel.

 

Paris. Cette religieuse pourrait être celle de l’affiche du film. Cette idée m’a plu.

 

 » Screws » d’Alexander Vantournhout. Un des événements dans la catégorie Cirque/Danse de la manifestation Cergy’soit ! A Cergy-Préfecture ce samedi 25 septembre 2021.

 

A la cathédrale d’Amiens.

 

Sur l’autoroute.

 

A la gare de Cergy St Christophe.

 

Au cimetière le Père Lachaise, le jour de l’enterrement du réalisateur Jacques Bral.

 

Le croisement entre le film  » Les Oiseaux » de Hitchcock avec le rappeur Jay-Z en « sosie » de l’artiste Basquiat avec sa femme, la chanteuse/comédienne Beyoncé en arrière plan, tout cela en plein Paris, c’était une belle opportunité à photographier.

 

Du côté de Quiberon, avec mon club d’apnée.

 

J’ai aimé croire que ces deux femmes, confortablement installées dans leur grand jardin, voient subitement surgir toutes ces personnes inconnues. Au jardin des Tuileries, bien-sûr.

 

Toutes ces photos m’ont donné faim. Mon club d’apnée compte des spécialistes de la chasse sous-marine. Ce qui nous assure, lors des stages, des repas plus qu’améliorés. Un seul plat, sur cette table, comporte un mets acheté. Le reste a été pêché ou chassé. Saurez-vous le découvrir ?

 

Tout ce pouvoir, toutes ces ambitions, parfois toute cette culture… et tout ce ridicule. Avant qu’on ne les oublie : De gauche à droite, Eric Ciotti, Valérie Pécresse, Marine Le Pen, et allongé en Nabilla bimbo, Eric Zemmour.

 

Paris 13 ème, au spot 13.

 

« Grâce » au Général de Gaulle, référence des femmes et des hommes politiques de France, les Indigènes avaient été exclus du défilé de la victoire sur les Champs Elysées, à la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Car trop arabes, trop noirs, trop sauvages et trop colonisés. Ces deux agents de sécurité auraient pu faire partie des Indigènes. A quelques minutes à pied des Champs Elysées, je me suis demandé à quoi ils pensaient. Et ce lion, non loin de là, pouvait aussi bien être avec eux, pour s’assurer que tout se passe bien. Autant pour le touriste, le passant que pour celui qui part ou revient de son travail comme moi ce jour-là.

 

Paris, près des Galeries Lafayette.

 

 

 

A la cathédrale d’Amiens.

 

 

 

 

 

Paris, spot 13.

 

 

Paris, spot 13.

 

Paris, spot 13.

 

Paris, spot 13.

 

Gare de Paris St Lazare.

 

Paris, spot 13.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

A Cergy Préfecture. Pendant Cergy, Soit !  » Screws » d’Alexander Vantournhout dans la catégorie Cirque/ Danse, ce samedi 25 septembre 2021.

 

 » Screws » d’Alexander Vantournhout, ce samedi 25 septembre 2021, à Cergy-Préfecture, aux Points Communs/Théâtre 95.

 

 

Cergy-Préfecture.

 

 

 

 

Gare du Nord.

 

 

Argenteuil.

 

Argenteuil. Dans le parc du conservatoire.

 

Cergy St Christophe, pendant Cergy, Soit !

 

Quiberon.

 

Franck Unimon, mardi 11 janvier 2022. 

Catégories
Corona Circus Puissants Fonds/ Livres

Panser les attentats- un livre de Marianne Kédia

 Panser les attentats –un livre de Marianne Kédia

 

(Pour ne pas céder à la peur)

 

Détermination et bienveillance

 

 

La couverture découvre deux mains l’une dans l’autre. C’est un geste simple. On pourrait se dire qu’il concerne un adulte et un enfant. Mais il s’adresse à tous. Les derniers mots du livre de la psychologue et psychothérapeute Marianne Kédia sont « détermination et bienveillance ».

 

Une détermination et une bienveillance dont elle entoure son livre et celles et ceux qui le touchent.  Un livre paru en 2016. 2016, cela paraît loin maintenant. Il y a quelques jours encore, nous fêtions Noël 2021. Puis a suivi la nouvelle année, 2022.

L’année 2016, c’est loin alors que la pandémie du Covid reflue lors de l’hiver. Avec le variant Omicron, ses plus de trente mutations- contre moins de dix pour le variant Delta encore présent du Covid. Alors que plus de cent mille personnes attrapent le Covid tous les jours, que le gouvernement, après le passe sanitaire, aspire désormais à imposer le passe vaccinal et sans doute la vaccination anti-Covid pour les enfants de moins de 11 ans.

 

La mort kilométrique

 

 

En 2016, nous étions « ailleurs ». L’assassinat par un terroriste de l’enseignant Samuel Paty, a eu lieu le 16 d’octobre 2020. Mais, déjà,  en 2020, les attentats terroristes nous semblaient plus loin qu’ en 2016. Peut-être aussi parce-que, comme l’explique également Marianne Kédia dans son livre, avec le principe de la « mort kilométrique », notre perception de l’assassinat de Samuel Paty a t’elle été influencée par notre distance avec l’événement :

 

Plus la mort est donnée loin de nous, moins elle nous terrorise. Conflans Ste Honorine, où Samuel Paty a été assassiné, c’est une ville de banlieue distante de vingt kilomètres de Paris. Conflans Ste Honorine est une ville de banlieue parisienne moins connue que d’autres.

 

Bien que située dans les Yvelines, la ville de Conflans Ste Honorine est moins connue que Versailles ou St Germain en Laye, lesquelles, déjà, font sans doute plus partie de l’histoire- ancienne- ou du Patrimoine de France. Même si, ces derniers temps, au travers de la candidate aux élections Présidentielles de 2022, Valérie Pécresse, on entend peut-être un petit peu plus parler de ces deux villes des Yvelines :

 

Saint Germain en Laye et Versailles.

 

Pour ma part, je connais la ville de Conflans Ste Honorine au moins pour y avoir travaillé. Mais aussi pour y avoir vu le guitariste John McLaughlin en concert. Et, une de mes ex y vit sans doute encore. Donc, pour moi, la ville de Conflans Ste Honorine est bien plus qu’un simple nom sur une carte. Je sais également comment m’y rendre. D’ailleurs, j’y suis passé avant hier en train. Mais je fais ici partie d’une minorité même si cette minorité se compte en milliers de personnes.

 

Alors que les attentats du 13 novembre 2015- dont le procès se déroule encore pendant quelques mois, à Paris- avaient eu lieu en plein Paris. Ou à Saint-Denis.

Contrairement à  la ville de Conflans Ste Honorine ou de Magnanville (ville située dans l’agglomération de Mantes la Jolie, à 60 kilomètres de Paris, ou en juin 2016, un policier et sa compagne s’étaient faits  assassiner par un terroriste islamiste) Saint Denis, déjà, est une ville de banlieue proche de Paris.

 

Le 13 novembre 2015, les attentats avaient débuté dans un endroit où peuvent se retrouver beaucoup de personnes de tous les environs dont Paris : Au Stade de France qui peut accueillir un peu plus de 80 000 personnes et où se déroulent des événements sportifs de masse. Le Stade de France reçoit des événements sportifs qui bénéficient d’un retentissement médiatique mondial. C’est donc un lieu sans doute plus connu dans le monde que Conflans Ste Honorine ou Magnanville.

 

Puis, après le Stade de France, le 13 novembre 2015, les attentats avaient essaimé en plein Paris. Je me rappelle encore où j’étais cette nuit-là : au travail, dans le 18 ème arrondissement de Paris. J’avais appris la « nouvelle » des attentats par ma collègue de nuit, qui, elle-même, l’avait appris par son compagnon. Autrement, de notre côté, tout était calme. Tant dans le service que dans le quartier.

Le lendemain matin, vers 7 heures du matin, j’était rentré chez moi. On rentre chez soi différemment lorsque l’on sait que durant la nuit ont eu lieu des attentats dans la ville où l’on se trouve.

Photo prise ce 22 décembre 2021 au Spot 13, à Paris.

En 2016, quand paraît ce livre de Marianne Kédia, notre attention, tant géographiquement, psychologiquement que chronologiquement, est davantage happée par les attentats- rapprochés–  comparativement à aujourd’hui, en 2022.

Rappelons aussi qu’à Nice, le 14 juillet 2016, un attentat terroriste effectué  » au camion-bélier » sur la promenade des Anglais- donc pendant les réjouissances nationales du 14 juillet- avait fait 86 morts et plus de 400 blessés.

 

Détermination et bienveillance

 

 

En 2016, ces attentats semblaient partis pour muter sans s’arrêter. C’est dans ce contexte que Marianne Kédia a écrit ce livre, Panser les attentats.  En psychologue et psychothérapeute dont les armes sont faites de….détermination et de bienveillance. Il faut bien se rappeler que les deux termes- détermination et bienveillance– sont ici rassemblés et clôturent le livre. C’est qu’ils prononcent l’intention principale de l’ouvrage. Une personne terroriste, peu importe son idéologie, islamiste ou autre, est également déterminée. Mais elle est rarement ou exceptionnellement bienveillante pour autrui lorsqu’elle passe à l’action.

 

Selon le dernier ouvrage de Hugo Micheron, Le Jihadisme Français : Quartier, Syrie, Prisons paru en 2020 (cité comme l’ouvrage actuel de référence sur le sujet par Charlie Hebdo dans son numéro de cette semaine), la stratégie des jihadistes serait désormais de privilégier davantage l’infiltration dans la société française par le biais de l’action sociale, politique et culturelle surnommée le « soft power ».  Par ailleurs, d’autres attentats auraient été désamorcés à temps par les services dont c’est la fonction.

 

Mais cela ne nous préserve pas pour autant définitivement d’autres attentats. Notre monde continue de se transformer. Et, ce qui se déroule par exemple en Afghanistan avec les Talibans qui ont repris le Pouvoir, ou ailleurs, peut avoir pour conséquence la réalisation d’autres attentats.

 

Les atouts et attraits de cette lecture

 

La prévention

 

Souvent, nous attendons que certains événements nous heurtent. Comme s’ils étaient à jamais improbables ou disparus pour toujours. Comme si nous devions constamment ou régulièrement découvrir ou redécouvrir que certaines violences et certaines catastrophes subsistent et existent. Alors que nous avons la possibilité mais aussi la capacité, en nous informant mais aussi en nous formant, de le savoir voire de nous y préparer.

 

Aujourd’hui, en 2022, on peut aussi lire cet ouvrage à titre préventif pour diverses situations – extrêmes- de notre vie courante. La prévention est une précaution dont on fait trop souvent l’économie. Je pars du principe qu’il y a de fausses économies :

 

A être trop sûrs de soi, certaines fois, on néglige certains domaines. Et, ensuite, il arrive de se retrouver dans l’embarras, du genre en panne sèche sur l’autoroute à cinquante kilomètres de la première station d’essence, ou en état de panique face à une situation réellement inquiétante qui, pourtant, s’était déjà produite. Dans certains pays tels le Japon, sujet aux tremblements de terre, la population est éduquée ou entraînée de façon à savoir comment réagir lorsque la terre tremble.  

 

Marianne Kédia le rappelle bien : le terrorisme a pour but de détruire la cohésion sociale.

Vu comme ça, la « cohésion sociale », peut faire penser à une chose abstraite, floue et générale, donc très distante de soi. La « cohésion sociale », on peut penser que c’est les autres à vingt ou trente kilomètres de soi. Ou que cela concerne l’assistante sociale. Même si c’est vrai, ce qui va se passer à vingt ou trente kilomètres de soi- ou plus proche de soi- aura des effets, d’une façon ou d’une autre, sur nous.

 

Si le but du terrorisme, c’est de détruire la cohésion sociale, ce qui nous tue, aussi, d’abord, tous les jours, c’est d’être de plus en plus, chacun dans son camp, étrangers les uns aux autres. Cela a ses avantages : une certaine liberté hors du jugement des autres. Sauf que si nous sommes étrangers les uns ou autres, il arrive aussi que nous soyons aussi des étrangers pour nous-mêmes.

Dans la vie sociale, nous sommes souvent plus superposés ou amenés à occuper un espace et un moment qu’ensemble. Donc, déjà, nous sommes plus ou moins quelque peu extérieurs à une certaine cohésion sociale :

 

Si une personne dans les transports en commun, ou ailleurs, se fait agresser devant plusieurs témoins qui restent passifs. Alors que ces témoins sont numériquement plus nombreux que le ou les agresseurs, c’est aussi parce-que cette personne qui se fait agresser devant eux leur est « inconnue ». Distante et inconnue. Etrangère. Le destin de cette victime leur semble d’abord n’avoir aucun rapport avec leur propre destin ou ne serait-ce qu’avec leur réputation.

 

 

Cependant, je ne passe pas mes jours et mes nuits à guetter l’attentat qui rôde. Je continue de préférer d’autres occupations que celles de « chasseur » ou de « pisteur » d’attentats. Et puis, je n’ai pas de compétences ou de dons pour détecter les attentats.

 

Par contre, j’ai trouvé dans les propos de Marianne Kédia des réponses qui peuvent s’appliquer, aussi, à bien d’autres situations que des attentats.

 

Trop souvent, la tendance est à cloisonner les disciplines comme les expériences. Alors que ce que l’on apprend dans une discipline ou dans une expérience peut se transposer dans d’autres domaines. C’est pour cela que j’ai lu l’ouvrage de Kédia autant en tant que personne qu’en tant que soignant.

Par exemple, lors de la nuit des attentats du 13 novembre 2015, après avoir appris par son compagnon que des attentats avaient lieu en plein Paris, où notre service d’hospitalisation pédopsychiatrique pour adolescents se trouve , ma collègue de nuit m’avait alors dit :

 

« J’ai envie d’allumer la télé pour regarder les infos…. »

 

Ma réaction avait été instinctive :

 

« Tu peux. Mais sans moi ! ».

 

Avant même d’allumer la télé, je savais ce sur quoi nous allions tomber. Regarder la télé, à ce moment-là, c’était se faire gaver comme des oies, en continu, avec des informations anxiogènes. Je ne voyais pas en quoi cela allait ou pouvait m’apporter quoique ce soit de bénéfique. Cette certitude me venait sans aucun doute de mes souvenirs de ces heures passées, chez mes parents, à rester cramponné, pendant des heures, à des programmes télé de plus en plus débiles à mesure que je les regardais. Je m’apercevais que je m’avançais de plus en plus sur l’autoroute du néant de la pensée. Pourtant, je restais fixé, crucifié, devant l’écran.

 

Mes souvenirs des spots d’informations répétitifs de la radio France Info, écoutés à une époque où j’ambitionnais ainsi de m’informer et me cultiver, sont sans doute aussi remontés la nuit du 13 novembre 2015. Lorsque j’ai répondu à ma collègue et amie.

 

A la fin de son livre, Marianne Kédia, donne entre-autres, comme recommandation, de limiter notre exposition à la télé en période d’attentats précisément pour éviter de connaître une anxiété galopante qui pourrait franchir toutes les frontières. A la place, elle préconise, à juste titre, de s’informer en lisant des journaux voire, en écoutant la radio (en évitant les radios qui répètent les mêmes flashes en continu).  Car la surinformation fait des dégâts comme le surarmement.  Marianne Kédia fait ainsi cette analyse :

 

Le plus souvent, lorsque des informations nous sont « données »à chaud par rapport à un événement catastrophique ou choquant, ces informations, masquent leur vide par leur répétition industrielle. Elles nous injectent principalement du bruit sonore, des suppositions, de l’agitation et du parasitage qui mettent et maintiennent en alerte. Alors que cet état d’hyper-vigilance, de peur et d’alerte maximale n’a aucune utilité pour la majorité des personnes qui écoutent ou regardent ces informations. 

 

Marianne Kédia considère que les média, lorsqu’ils se comportent de cette manière, agissent comme un « cerveau traumatisé » qui répète en boucle la même information. Je me dis ce soir qu’à comparer alors certains média à un  « cerveau traumatisé » que Kédia est encore trop indulgente. Et qu’elle pense encore en soignante bienveillante et optimiste qui peut aider à guérir.

 

Je suis peut-être moins bienveillant ou moins optimiste qu’elle car, moi, devant cette banalisation et cette hyperproduction de bruit sonore, de suppositions, d’agitation et de parasitage, je vois surtout ce avec quoi notre civilisation et notre société nous  éduque, nous nourrit et nous dirige régulièrement. Et, il faut des événements plus marquants que d’autres, tel un attentat, une pandémie ou les fêtes de Noël avec toute sa mise en scène avec les illuminations, les promotions et les réclames où, d’un seul coup, on se doit d’être joyeux coûte que coûte pour s’apercevoir de certains aspects disproportionnés et pathologiques de notre mode de vie.

 

Pedigree, pédagogie

 

Je n’avais jamais entendu parler de Marianne Kédia avant ma lecture récente de Ricochets-Un livre de Camille Emmanuelle qui la cite, entre autres. Dans son livre, Camille Emmanuelle cite aussi Patrick Pelloux, lequel avait également écrit sur son deuil après les attentats de Charlie Hebdo ( voir L’instinct de vie ). 

 

 

Marianne Kédia, spécialisée dans le traitement des psycho-traumas (ou PTSD dans son appellation anglaise) a également écrit Dissociation et mémoire traumatique et participé à la rédaction de L’aide-mémoire psycho-traumatique.

 

Par ailleurs, elle cite entre autres Bessel A. Van Del Kolk qu’elle présente comme l’un des plus grands spécialistes actuels du syndrome post-traumatique. Lequel a écrit l’ouvrage Le corps n’oublie rien.

 

Diplômée en 2003, Marianne Kédia compte déjà une certaine expérience clinique dans plusieurs univers. Dans le monde de l’entreprise, dans l’Humanitaire, dans des associations et à l’hôpital.

 

J’ai été marqué par son engagement dans son travail. Je me demande comment on peut maintenir un tel engagement, sur la durée, comme elle le fait, là où elle le fait. Son métier est autrement plus éprouvant que d’autres. Pour moi, le métier de soignant consiste à « manger de la violence et de la souffrance ».

 

Son très grand engagement vient-il de son « jeune » âge ou d’une passion comme elle le dit ?

 

Quoiqu’il en soit, dans une période de grande violence et de grande souffrance, les personnes qui savent nous divertir, nous faire rêver mais aussi celles qui visent à nous rassurer et nous soigner jouent un rôle prépondérant dans une société. On l’oublie souvent- même des soignants l’oublient- mais un soignant joue également un rôle fondateur, pacificateur, égalitaire, démocratique et stabilisateur dans une société. Soit l’opposé du terrorisme qu’il soit religieux, intellectuel, économique ou politique.  Ou de l’inquisition.

 

L’ouvrage, Panser les attentats (sans doute aussi un jeu de mot avec le verbe « penser ») de Marianne Kédia est paré de ces vertus fondatrices, pacificatrices, égalitaires, démocratiques et stabilisatrices.

 

Son livre se parcourt plutôt facilement. Il est très pédagogique. L’humour le ponctue dans certains passages. La fin me donne un peu l’impression d’avoir été écrite plus rapidement que les trois premiers quarts. Je trouve aussi qu’elle insiste beaucoup pour orienter vers son corps de métier, en cas de besoin, les psychologues.  Mais elle connaît son sujet. Son livre est à avoir, à lire et  à appliquer. Avec détermination.

 

Franck Unimon, ce dimanche 9 janvier 2022.

 

 

Catégories
Corona Circus

Pour prendre son temps en main

                         Pour prendre son temps en main

 

« Après la folie des achats de cadeaux de Noël, la folie du retour des vacances de Noël… »

 

 

C’est ce que je me suis dit, il y a quelques jours. Seulement perché sur mon petit vélo pliant acheté dans l’enseigne Décathlon  l’année dernière. Tandis que je me rendais à mon travail depuis la gare St Lazare.

 

Depuis, comme à chaque fois, je m’y suis fait. Puisque je suis aussi fait de cette folie. Nos ennuis avec les autres commencent peut-être – ou toujours- lorsque notre folie est par trop différente de celle des autres. Et qu’elle nous contraint, eux et nous, à nous adapter, à nous adopter, les uns aux autres.

 

A force d’efforts, d’épuisement, de découragement ou peut-être parce-que, précisément, nous n’avons pas du tout envie de faire des efforts, de trop nous fatiguer ou de persister et que nous estimons que c’est aux autres de faire le plus d’efforts, les conflits éclatent. Nos dérailleurs sautent. Nos freins ne fonctionnent plus. Nos phares s’éteignent. Nos cerveaux disjonctent, batterie faible.

 

Ensuite, nous nous escrimons dans l’absolu et la violence, tels des vers de terre emmêlés les uns aux autres, milliers de spaghettis obsédés par cette destination que nous voulons à tout prix atteindre- et au plus vite- hors de l’assiette et surtout hors de portée de la Grande Fourchette. Comme si cet endroit- hors des bouchées du néant-   nous possédait. Sauf que les autres ont, aussi, la même obsession et sont tout autant possédés que nous. Eux, aussi, veulent sortir, par n’importe quel moyen de leur statut de ver de terre ou de spaghetti qui s’enlise dans de la très mauvaise sauce tomate et où toutes les artères, un beau jour, se figent.

 

 

Ce matin, rien de tout ça. Je suis simplement allé emmener ma fille à l’école, à pied, à quelques minutes de chez nous. Je voulais discuter avec le directeur. Mais pas pour lui parler de vers de terre et de spaghettis.

 

Le directeur de l’école était absent dans la cour. Par contre, à l’entrée de l’école, la maitresse de ma fille, et une de ses anciennes maitresses, vérifiaient que chacun ait bien l’attestation sur l’honneur des parents, à la date du jour, spécifiant que, oui, leur enfant avait bien effectué ( ou subi) un autotest antigénique à la maison. Et que celui-ci était bien négatif. Devant moi, j’ai vu un môme d’à peine huit ans, venu seul à l’école, faisant de son mieux pour répondre lorsque la maitresse lui a demandé avec gentillesse s’il avait bien fait un test et s’il avait l’attestation sur l’honneur signée par ses parents. Non, il ne l’avait pas. Elle lui a alors demandé- avec indulgence- d’entrer dans la cour et d’attendre sur le côté.

 

La rentrée des classes s’est faite ce lundi. Premier cas positif du Covid dans la classe de ma fille. Jusque là, j’en entendais parler ailleurs, dans la classe d’un de mes neveux, dans l’ancien service où je travaillais où, cette semaine, une de mes ex-collègues et amie m’a parlé de cluster. Comme j’avais entendu parler des plus de cent mille cas positifs de Covid par jour depuis les vacances de Noël. Mais jusque là, nous y avions échappé. Après m’être fait matraquer, comme tout le monde, par l’abattage médiatique – et autre-  supra anxiogène, à partir de juillet 2020, j’ai quitté l’aussi gigantesque que tentaculaire tapis mécanique qui semblait n’avoir que pour principale activité de faire de nous des soldats de plomb qu’il s’agissait de convoyer d’un champs de mines de la peur à d’autres champs de mines de la peur. Je porte des masques, je me lave les mains avec du savon, j’ai fait mes deux injections de Moderna et bientôt trois quand ce sera le moment. Je ne peux pas faire plus. Et je ne veux pas faire plus en matière de folie viscérale et sociétale.

 

J’avais beaucoup aimé la phrase du psychiatre Serge Hefez. J’ai retenu ça de celle-ci :

 

« La pandémie du Covid a plutôt tendance à stabiliser les patients psychotiques et à rendre fous les gens normaux ».

 

 

Qu’est-ce que nous sommes nombreux à être devenus fous depuis le début de cette pandémie du Covid. Et nous avons encore un très grand potentiel créatif. Je suis sûr que nous sommes encore éloignés de nos plus grands chefs d’œuvre en matière de comportement et de raisonnement à propos du Covid. D’abord, en un temps record, nous sommes pratiquement tous devenus épidémiologistes. Soit la version sanitaire de toutes celles et ceux qui se font les arbitres et les sélectionneurs éminents de matches de Foot,  de hand, de tennis ou de combat UFC. Comme de toutes celles et ceux qui se font critiques de cinéma.

 

Un peu plus fou que d’habitude :

 

 

Moi, ce matin, je suis devenu un peu plus fou que d’habitude parce-que :

 

Trois jours de cours ( ce mardi, la maitresse était absente l’après-midi et le mardi matin, notre fille est restée avec nous) trois tests antigéniques ?

 

Mais j’ai su rester calme et digne devant ma fille. Alors qu’elle s’éloignait dans la cour vers son destin d’écolière, j’ai demandé à discuter avec la maitresse.

 

Fort heureusement, nous sommes rapidement arrivés à nous entendre, la maitresse et moi. Et puis, le troisième test était déjà fait.

C’est un mail adressé par la maitresse et le directeur d’école, lu hier soir sur le compte Beneylu, qui a amené une certaine confusion.

 

Et, ce matin, la solution à cette confusion a été donnée par cette pratique ancestrale, traditionnelle, archaïque, primitive et révolutionnaire :

 

La discussion.

 

 

Une pratique ancestrale, traditionnelle, archaïque, primitive et révolutionnaire :

 

Prendre le temps de s’adresser à l’autre. De le rencontrer. Lui parler calmement. Lui expliquer qu’il puisse comprendre ce qui nous « motive ». Lui laisser le temps d’incorporer et d’additionner les informations que nous lui donnons. Des informations qu’il ne peut pas deviner même si celles-ci sont évidentes pour nous tant nous avons pu les ruminer. Le laisser respirer. Ne pas le saisir comme on jette de l’huile sur un poêle qui se trouve sur le feu depuis une bonne heure. Parler de manière aussi détendue que possible.  Si possible, articuler. Etre écouté de lui. Ecouter sa réponse. Prendre sa réponse comme l’on pourrait prendre notre propre pouls. Avoir encore la croyance ou l’optimisme que cette personne en face de nous est aussi sincère que nous.

 

Cela nécessite du temps. Un peu de temps.

 

En moins de trois minutes – je n’ai même pas eu le temps de chronométrer- la discussion était terminée et l’accord trouvé. Je n’ai, à aucun moment, eu l’impression que ces trois minutes de conversation (cinq si l’on inclue la petite attente afin que la maitresse qui accueillait les enfants qui arrivaient puisse se rendre disponible) m’ont demandé un effort surhumain.

 

Je n’ai pas eu besoin de me ronger les ongles, d’allumer une cigarette ou de donner des coups de pied dans la grille ou de hurler devant l’école pour patienter. Et, je n’ai pas eu l’impression, non plus, de passer pour un moins que rien parce-que la maitresse m’a demandé d’attendre un petit peu.

 

Cela valait la peine d’attendre un peu :

 

Ma fille n’avait pas à subir un nouvel autotest antigénique aujourd’hui après en avoir  déjà eu un la veille. Mais demain, samedi. Soit tous les deux jours. Au passage, la maitresse de me dire qu’elle compatissait beaucoup avec les enfants. Elle-même trouve ça très dur, ces tests à répétition. Merci madame et bonne journée.

 

Le minimum des corrections

 

En rentrant, je passe saluer cette commerçante. Cela fait des années que, quelques fois, je passe pour discuter un peu avec elle. Cela n’a rien à voir avec de la drague. On peut être un spaghetti ou un ver de terre et avoir d’autres intentions que celle de se reproduire.

 

Il existe des commerçants et des commerçantes qui prennent le temps de discuter avec leur clientèle. Même si cette clientèle ne les a sollicités qu’une fois ou deux. J’ai ce profil.

 

Ce matin, je passe la voir parce-que je me dis que, quand même, une nouvelle année a commencé. Et, il y a plus d’un mois, je lui avais demandé de me refaire des masques en tissu anti-Covid. Elle m’avait alors répondu que certains clients le lui avaient demandé, pour, finalement, ne jamais revenir les acheter. Je lui avais passé commande et lui avais  alors assuré :

« Moi, je reviendrai ».

 

Je reviens donc aussi pour ça. C’est le minimum des corrections. Elle m’apprend qu’elle n’en fait plus. Elle s’est renseignée : elle n’a plus le droit d’en vendre car les masques qu’elle fait ne sont pas homologués. Pourtant, elle a pris un de ces masques homologués, l’a ouvert. Ils sont faits de la même manière que les siens. Elle ajoute que certaines entreprises ont beaucoup de stocks de masques en tissus à écouler. Qu’elle pourrait en vendre. Cela lui a peut-être même été proposé.

 

Je lui demande « Pourquoi vous n’en vendez pas ? ».

 

Elle me répond :

 

« Pour vendre des masques cinq euros alors que je vendais les miens, deux euros ? Déjà que je ne prenais pas d’argent sur la vente de ces masques. Je prenais juste sur mon temps personnel. Mais, là, je ferais ça pour gagner un euro ? ».

 

Il existe donc, encore, des commerçantes et des commerçants comme cette personne. Mais la suite de notre discussion se fait plus personnelle lorsque je lui demande :

 

« Alors, quels sont vos projets pour cette année ? »

 

Elle me répond : «  Prendre soin de moi ».

Je lui réponds : « C’est un beau projet ». Elle m’en dit plus alors que je l’interroge. Elle se raconte. Je comprends complètement son expérience. Et l’encourage. Je lui parle aussi un peu de moi, de ma fille qu’elle « connaît ». Tout ce qu’elle me dit m’encourage aussi et concorde avec mes projets de vie. Nous nous apercevons que, malgré une quarantaine   d’années d’écart, certaines de nos expériences de vie se ressemblent. Elle a été une grande prématurée à la naissance. Ma fille a été une grande prématurée à la naissance.

 

Je découvre qu’elle écrit, qu’elle peint, qu’elle a fait du théâtre. 

 

Notre conversation aura duré dix minutes. Peut-être quinze. C’est le genre de discussion qui peut devenir le moteur de toute une journée. Alors que nous passons tant de temps, tous les jours, à nous défoncer pour des actions et des résultats qui ne nous apportent même pas le quart de ce que cette discussion m’a donné ou redonné. Et c’est comme ça, tous les ans. Presque tous les jours. 

 

Donner du temps psychique

 

 

Tout à l’heure, je vais revoir un ancien collègue, éducateur spécialisé. Son pot de départ à la retraite devait avoir lieu hier dans ce service où nous nous sommes rencontrés il y a plus de dix ans. Mais il a été annulé pour cause de pandémie du Covid. C’est lui qui, assez embarrassé de me reprendre, m’avait dit, un jour, alors que je faisais passer le temps en regardant mon téléphone portable :

 

« Notre travail, c’est de donner du temps psychique ».

 

 Après avoir publié cet article, je vais passer le voir chez lui. Comme nous en avons convenu, lui et moi.  Je prendrai le train. Une autre façon de bien prendre mon temps en main.

 

 

Franck Unimon, ce vendredi 7 janvier 2022.

 

 

 

 

 

 

 

Catégories
Apnée

Aujourd’hui, nous avons repris l’entraînement d’apnée

La piscine de Colombes, fin novembre 2021.

   Aujourd’hui, nous avons repris l’entraînement d’apnée

 

Ce soir à 20 heures, nous avons repris l’entraînement d’apnée dans la piscine de Colombes. Dans quelques mois, nous irons nous entraîner dans la piscine d’une autre ville. La municipalité va entreprendre des travaux afin que le bassin où nous nous entraînons habituellement soit réservé à l’entraînement d’une discipline olympique.

 

La température extérieure ce soir, 7 ou 8 degrés, m’a peut-être un peu refroidi pour venir. Mais je savais qu’une fois dans l’eau, tout cela serait oublié. En conduisant, j’écoute des titres du groupe haïtien Tabou Combo : Mario Mario et Bambou Penche – Pa Casse.

 

 

Jean-Pierre, le plus ancien du club, cinquante ans de présence, plus de 70 ans, est le moniteur du groupe dans lequel je suis. Je l’ai rencontré dès mes débuts dans le club il y a quatre ou cinq ans. Dès mes premières séances sous l’eau. J’ai un peu évolué depuis.

 

Mais moins que lui.

 

Avant notre échauffement qui  consiste à faire « au moins » deux cent mètres de natation, il nous apprend être allé nager ce matin aux étangs de Cergy.

« Je vais nager tous les deux jours » nous rappelle-t’il. Ce matin, aux étangs de Cergy, il faisait moins un degré. Lorsque je l’entends parler de sa sortie aux étangs ce matin, je me dis que j’ai encore raté une occasion d’aller nager aussi.

 

Après les deux cents mètres d’échauffement, Jean-Pierre nous demande, par binôme, sur deux cent mètres, d’alterner vingt cinq mètres en apnée suivis de vingt cinq mètres de récupération active. Et ainsi de suite. Pour « digérer » les excès des repas de Noël nous dit-il avec son petit sourire.

 

A ce moment de la séance, nous avons tous nos palmes aux pieds. Je fais partie de ceux qui s’échauffent en nageant sans palmes. J’ai aussi mis ma souris ( une combinaison en néoprène sans manches de 2 à 3 mm) qui comporte une capuche. Dans la piscine, nous avons obligation de porter un bonnet.

Assis au premier plan, au milieu, T. A sa droite, S. A gauche, M. Debout qui s’éloigne, avec le nécessaire de secours, Yves, le responsable de la section apnée du club. La piscine de Colombes, un samedi matin, fin novembre 2021.

 

Je suis avec T. T dit régulièrement en début de séance qu’il n’est pas en forme. Qu’il a trop fumé. Qu’il a trop ceci. Qu’il a trop cela. Ce soir encore. Mais une fois sous l’eau, je constate alors que je le regarde onduler qu’il se porte bien.

 

Vingt cinq mètres d’apnée d’emblée, c’est généralement trop pour moi dès le début. J’ai besoin de me rôder. C’est étonnant comme chacun selon son tempérament- mais aussi ses capacités- a besoin de plus ou moins de temps pour bien entrer dans l’eau. Par exemple, souvent, lors de l’échauffement, je vois des copains et des copines d’entraînement fuser dans l’eau comme pressés ou catapultés. Je ne peux pas faire ça. Je risquerais la fracture.

 

Pourtant, ce soir, je tiens assez bien l’exercice de départ. Les vingt cinq mètres  d’apnée, la prise d’appui, respirer, faire le signe OK à mon partenaire. Faire vingt cinq mètres en récupération active. Puis repartir pour vingt cinq mètres d’apnée. Pendant deux cents mètres.

 

Tout le monde termine l’exercice. Nous récupérons. Jean-Pierre nous demande cette fois-ci de commencer par faire vingt cinq mètres d’apnée. De récupérer une minute. Et de repartir pour vingt cinq mètres d’apnée. Et de souffler quarante cinq secondes. Avant de se lancer pour vingt cinq autres mètres en apnée. Retirer quinze secondes de récupération à chaque arrêt. C’est moi qui tiens le chrono pour mon partenaire et moi. Ma montre, désormais rayée, a une petite histoire avec l’apnée dans cette piscine. Mais je la raconterai un autre jour.

 

Lorsque nous avons effectué la série où il s’agit de récupérer quinze secondes, T me répond qu’à son avis, il s’agit ensuite d’augmenter de quinze secondes les phases de récupération. Nous prenons trente secondes de récupération puis nous nous arrêtons après vingt cinq mètres d’apnée. Le reste du groupe nous rejoint dont Jean-Pierre.

 

Le nouvel exercice est le suivant : nous commencerons pas quinze secondes d’apnée statique puis nous partirons pour vingt cinq mètres d’apnée. A la sortie de l’eau, une minute de récupération. Puis trente secondes d’apnée statique avant de repartir pour vingt cinq mètres d’apnée. Suivis d’une minute de récupération, quarante cinq secondes d’apnée statique et vingt cinq mètres d’apnée. Jusqu’à arriver à une minute de récupération pour une minute d’apnée statique suivie de vingt cinq mètres d’apnée.

 

Cette alternance apnée statique/apnée dynamique met le corps et l’esprit en condition pour l’apnée. Il nécessite un relâchement ainsi qu’une certaine prise de confiance en soi. Car, instinctivement, après avoir arrêté de respirer pendant un certain temps, le réflexe est plutôt de sortir sa tête hors de l’eau pour reprendre de l’air. Alors que, nous, nous faisons tout le contraire. Nous faisons un canard et descendons vers le fond de la piscine  jusqu’aux vingt cinq mètres.

 

Nous avons déjà fait cet exercice. Si je me rappelle bien, il avait pu nous arriver de monter jusqu’ à deux minutes d’apnée statique avant de descendre ensuite pour faire  vingt cinq mètres en apnée.

 

Mais ce soir, lorsqu’arrive le moment où nous devons faire une minute d’apnée statique avant de partir, je n’y arrive pas. Je sors alors ma tête pour respirer, regarde la trotteuse. Et lorsque c’est le moment, je touche T pour lui signifier le départ et le suit en apnée.

 

J’ai dû mal récupérer à un moment donné. Ou peut-être que le fait de tenir la montre m’a-t’il empêché de me détendre suffisamment. Habituellement, durant cet exercice, lorsque quelqu’un d’autre annonce le départ, je ferme les yeux dans la phase d’apnée statique et m’allonge le plus possible. Je n’ai pas pu fermer les yeux ce soir vu que je regardais ma montre. Et regarder les secondes passer aide assez peu pour effacer le temps.

 

Après un nouveau moment de récupération, Jean-Pierre nous demande de faire vingt cinq mètres en apnée, puis, passés les vingt cinq mètres, de « vider nos poumons » en expirant jusqu’aux trente sept mètres cinquante. Et de récupérer activement ensuite jusqu’aux cinquante mètres. Expirer est ici la consigne donnée par Jean-Pierre et elle permet de se détendre. Hors de cette consigne, une personne pratiquant l’apnée qui expire sous l’eau et qui lâche des bulles évoque un début de noyade.

 

Pour finir, Jean-Pierre nous propose de faire un cinquante mètre en apnée au maximum. Nous en faisons un premier. Le groupe prend le temps de se reposer. Jean-Pierre fait quelques rappels afin de bien se relâcher et de bien faire baisser son diaphragme afin de prendre le plus possible d’air.

 

En tout, nous ferons trois cinquante mètres en apnée. Ce dimanche, il y aura une sortie en fosse à Conflans Ste Honorine. Mais je ne pourrai pas y aller.

 

Sur le parking de la piscine, je recroise Yves, le responsable la section apnée en pleine discussion avec d’autres responsables du club.

 

Je lui dis qu’il est trop couvert : Yves- très peu frileux- porte un petit blouson en cuir grand ouvert sur un tee-shirt manches courtes. Il me répond que c’est sa tenue de ville. Puis m’apprend que les réservations sont ouvertes sur le site du club pour le stage d’apnée et de chasse sous-marine prévu en Bretagne au moins de juin. Pour moi, c’est un stage à ne pas manquer. Si j’y vais, ce sera mon quatrième stage d’apnée avec le club, à chaque fois en Bretagne.

 

Du côté de Quiberon, avec le club, Mai 2021.

 

 

En repartant, j’écoute Tricky & Radagon sur le titre Street Times de Sly and Robbie.

 

Franck Unimon, ce jeudi 6 janvier 2022.

 

 

 

 

 

 

Catégories
Cinéma

Matrix Résurrections- un film de Lana Wachowski

 

                           Matrix Resurrections un film de Lana Wachowski

 

 Dix huit ans plus tôt, Matrix Révolutions clôturait de manière bâclée la trilogie Matrix. Le premier Matrix, réalisé en 1999, avait été le mieux réussi. Les deux suivants, Matrix Reloaded puis Matrix Révolutions s’étaient suivis de trop près. Même si j’avais aimé voir ces deux suites, j’avais été soulagé de voir la fin de Matrix Révolutions des « frères » Wachowski.

 

Après ça, même si les frères Wachowski, devenus ensuite des femmes, avaient réalisé d’autres films, ceux-ci avaient moins captivé le public. Ou m’avaient moins donné envie de tous les voir. Matrix avait fait beaucoup parler. V pour Vendetta ? Parlez en à celles et ceux qui connaissent l’œuvre d’Alan Moore que les Wachowski avaient adapté. Je ne suis pas sûr qu’ils aient unanimement apprécié le rendu. Alan Moore, quant à lui, a renié toutes les adaptations cinématographiques qui ont pu être faites de ses œuvres.

 

L’acteur Keanu Reeves/ Néo avait aussi du mal à se remettre de ce gros coup de booster que lui avait donné la trilogie Matrix. La carrière de Keanu Reeves est vraiment très particulière. Passé par le cinéma d’auteur avec My Own Private Idaho de Gus Van Sant qui dérangerait certaines mœurs, il avait ensuite « décollé » commercialement dans des films de très grands réalisateurs tels Francis Ford Coppola dans Dracula où il jouait un jeune romantique innocent puis dans des films d’action pour adolescents : Speed, Point Break.

Keanu Reeves était un peu l’un des alter-ego, en moins populaire, d’un Tom Cruise d’avant Magnolia de Paul Thomas…Anderson.

 

Anderson, l’homme quelconque que personne ne remarque. Même pas frustré comme José Garcia ou Philippe Harel dans le film Extension du domaine de la lutte  adapté d’un des livres de Michel Houellebecq.

 

Même pas bouffi de rage comme Chris Penn dans Nos Funérailles d’Abel Ferrara.

 

Même pas.

 

Gigolo dans My Own Private Idaho, Keanu Reeves/ Néo/ Thomas Anderson est asexué dans le premier Matrix. Ses pulsations érectiles sont au plus bas vu qu’elles sont inexistantes. Aucun stéthoscope sophistiqué ni aucune main habile ne saurait détecter chez lui ne serait-ce que des fourmillements d’ailes de papillon.

 

Malgré cette particularité assez fréquente dans les rôles de Keanu Reeves, cette asexualité et cette absence de…vice ou de sournoiserie dans ses rôles (comme savent en mettre un Samuel Jackson ou un Benicio Del Toro) Keanu Reeves a su véritablement retrouver une carrière après Matrix grâce à John Wick.

 

John Wick est un homme qui aspire à vivre tranquillement avec son chien et les chevaux de ses voitures et que quelqu’un contraint toujours à exécuter des gens.

 

Dans Matrix Resurrections, on retrouve du John Wick pour la coupe de cheveux. Cette coupe de cheveux est raccord avec le job qu’occupe désormais Thomas Anderson :

 

Celui de concepteur vedette dans une entreprise de jeux vidéos. J’ai beaucoup aimé cette réminiscence du succès qu’a pu connaître Thomas Anderson grâce à son jeu vidéo. Et, comment, elle a pu lui faire perdre un moment, un certain sens de la « réalité ».

 

J’ai aussi trouvé à Thomas Anderson un côté Bob Sinclar, le DJ français. Bien-sûr, Néo/Thomas Anderson, lui, s’y connaît davantage en mixage de scènes de combats qu’en mixage de titres de musique.

 

De quoi nous parle Matrix Resurrections  qui dure près de 2h40 ?

 

De la solitude.

 

Et de l’amour comme principal parachute devant le vertige de notre solitude. Les trois premiers Matrix parlaient déjà ça.

 

Bound réalisé auparavant par les frères Wachowski rajoutait de l’érotisme à cet amour entre deux héroïnes. Etonnamment, cet érotisme a disparu, a toujours été absent, entre Néo et Trinity (l’actrice Carrie Anne-Moss). Peut-être parce-que le tempérament de Trinity, « plus masculin ? », apparaît comme incompatible avec l’érotisme compte tenu de la « féminité » de Néo pour les Wachowski ?

 

Cela surprend pour des réalisateurs qui ont été capables de changer de genre. Et c’est d’autant plus étonnant après un film comme Border réalisé par Ali Abassi ( d’après une œuvre littéraire) qui nous montre que les rôles masculin et féminin peuvent être inversés tout en préservant de l’érotisme au sein d’un couple.

 

Pourquoi est-ce que j’insiste autant que ça sur ces questions de « genre » ? Parce-que les scènes d’actions, même si elles sont bien sûr réussies dans Matrix Resurrections, sont là pour assurer le spectacle et y arrivent bien dans l’ensemble. Et puis, en regardant un peu, on voit bien que Lana Wachowski met des indices de « genre » selon moi moins affirmés dans la trilogie initiale.

Le jeune Morpheus est ainsi au minimum queer ou homo dans Matrix Resurrections ou flirte en tout cas plusieurs fois avec le coming out homosexuel selon certains codes. Quant à ces histoires de pilule bleue et de pilule rouge, difficile, aujourd’hui, de ne pas penser un peu au chemsex ou, peut-être, au GHB.

 

L’allusion au ciel arc en ciel à la fin du film fait aussi penser au drapeau homo et à tous les mouvements militants LGBTQ+ où ce drapeau est visible. Il me semble que ces signes étaient moins présents dans la trilogie de départ.

 

J’ai beaucoup aimé la relation de Néo avec son analyste. Une relation de dépendance qu’a peut-être connue Lana Wachowski ou d’autres personnes. L’analyste étant le garant mais aussi le gardien d’une certaine réalité. Et, comme tout chaman, tout gourou malveillant, ou toute société mortifère, de cette réalité dans lequel il nous retient prisonnier, il peut décider de garder la clé. Dans Matrix Resurrections, la psychanalyse confesse et guide le Christ ( Néo). L’analyste semble avoir pris le pouvoir sur la religion. 

 

 

 

Les miroirs, dans Matrix, sont souvent présents. Et on les traverse. Mais les traverser, c’est aussi traverser notre propre identité. Nos limites seraient donc perméables de la même manière que nos muqueuses. Et ça, ça peut effrayer. Un analyste, c’est aussi un miroir. Un miroir qui nous fixe et qui nous empêche de le franchir. Comme de déborder hors de certaines limites. Dans Matrix Resurrections, Lana Wachowski continue de se battre avec les limites. On peut vraiment dire du film qu’il est « border line ».

La paranoïa environnante fait toujours l’atmosphère du film. Au point que l’on peut se demander comment, malgré ça, Néo et Trinity peuvent-ils arriver à s’aimer et se comprendre. Le coup de foudre, la destinée, nous répond à nouveau Lana Wachowski. Ouais….

 

Contrairement à Néo, Trinity semble toujours bien ancrée dans la réalité et très pragmatique.

 

 

Le film a aussi conservé ses moments de grand bavardage. C’est supposé être explicatif ou doit sans doute servir à créer un équilibre entre l’action et la réflexion. Mais Lana Wachowski a moins de verve que Tarantino. Et son style est trop « lourd » pour être un « pousseur d’âme » comme peut l’être le cinéma de Kieslowski.

 

Le scénario continue de tourner autour de : il faut absolument sauver quelqu’un que l’on aime. Autrement, cette personne va mourir. Pour cela, il nous faut désobéir. Notre temps est compté. Sinon, nous aussi, nous allons tous mourir, et, alors, nous ne pourrons plus jamais désobéir à qui que ce soit.

Les machines auront gagné.

 

 

Par contre, question humour, on a quelques scènes très réussies ( Ah, Lambert Wilson !).

 

Les autres bons côtés du film :

 

C’est très plaisant, en tant que cinéphile, de pouvoir aller voir la suite d’une trilogie que l’on a aimé découvrir au cinéma vingt ans plus tôt. Et Lana Wachowski sait inclure quelques scènes de cette trilogie dans le film.

 

Je me suis montré assez critique envers les vertus de l’amour selon Sainte Lana Wachowski, pourtant l’histoire d’amour entre Néo et Trinity m’est apparue réaliste. Et je trouve vraisemblable le rôle de femme joué par Trinity/Tiffany lorsqu’ils se revoient. J’aurais même aimé qu’elle se transforme en une sorte de Hancock au féminin avec ses deux « gamins » lorsqu’elle commence à se « réveiller ».

 

 

Ce Matrix Resurrections nous fait aussi du bien car il fait partie d’une histoire où nous étions davantage insouciants. Le premier Matrix était sorti avant les attentats du 11 septembre 2001 à New-York. C’était aussi une époque où internet et la téléphonie mobile se démocratisaient. Nokia, alors, était la référence mondiale en téléphone portable. L’iphone mais aussi Facebook n’existaient pas. L’urgence climatique, déja connue, était aussi moins discernée. Le diesel « coulait » alors à flots dans les réservoirs des voitures. 

 Matrix Resurrections, c’est aussi ça : un film qui se veut visionnaire et qui l’est à sa manière (il va être très difficile de traverser le miroir de la salle de bain chez soi même en étant éperdument amoureux) et qui appartient aussi à un passé où l’on pouvait faire certains choix disparus ou plus difficiles à faire aujourd’hui.  

 

La réalisatrice milite d’ailleurs aussi en faveur des salles de cinéma. Son film passe uniquement dans les salles de cinéma- comme c’était encore la norme au début des années 2000- alors que depuis quelques années, certaines maisons de production contournent les salles de cinéma pour promouvoir « leurs » films. Tandis que de nouvelles entreprises étrangères au cinéma telles Amazon se lancent de plus en plus dans des productions cinématographiques.

 

En conclusion :

 

 Matrix Resurrections n’est pas un chef d’œuvre mais je suis content d’être allé le voir dès son premier jour de sortie au cinéma. Par contre, je n’irai pas le revoir. Alors que j’avais vu Matrix trois fois à sa sortie.

Paris, 13 ème arrondissement, mercredi 22 décembre 2021.

 

 

Franck Unimon, mercredi 22 décembre 2021.

 

Catégories
Vélo Taffe

Repousser ses limites pour Noël

Paris, près de l’église de la Madeleine, samedi 18 décembre 2021, entre 18h45 et 19h10.

 

 » C’est bientôt, Noël, il faut se faire plaisir ».

Le train arrivait à la gare de Paris St Lazare. Deux dames conversaient entre elles. Une femme africaine d’une cinquantaine d’années et une européenne un peu plus jeune. La première avait eu du mal à se servir de son téléphone portable. La seconde lui avait expliqué que son téléphone portable était trop surchargé en documents. La plus âgée venait de prendre une résolution tandis que le quai se rapprochait :

« Je vais effacer toutes les photos et m’acheter un autre téléphone portable! ».

 

 

Près de l’église de la Madeleine, Paris, samedi 18 décembre 2021, entre 18h45 et 19h10.

 

Hier soir, j’ai repris mon vélo pour rejoindre mon lieu de travail depuis Paris St Lazare. Il y avait du monde en partance. Chacun semblait savoir précisément où il se rendait. Il y avait une espèce  d’urgence. Entre la gare St Lazare et la place de la Concorde, beaucoup de monde. Beaucoup de voitures.

 

Paris, le long des Tuileries, ce samedi 18 décembre 2021, vers 19h.

 

 

Mais aussi des gens contents d’être là et de se détendre. Les vacances de Noël avaient commencé.

 

 

Place de la Concorde, Paris, quelques minutes avant la photo précédente, ce samedi 18 décembre 2021.

 

 

Après la place de la Concorde, j’ai aperçu un homme avancer d’un pas pressé. Il portait des sacs que j’ai devinés remplis d’achats pour les cadeaux de Noël. Il fallait faire vite.

 

Parti en avance, j’ai pris mon temps pour quelques photos. Puis, au début du Bd Raspail, un cycliste m’a dépassé. Je me suis rappelé que j’allais au travail et j’ai voulu le rattraper. Au début, j’y suis arrivé. Celui-ci suivait une autre personne sur un deux roues équipe d’un moteur à pneus larges. Il se mettait en danseuse pour sprinter dès le début afin de se mettre « dans » la roue de l’homme « motorisé ». Difficile de savoir s’ils se connaissaient ou si celui que j’essayais de rattraper entendait profiter de cette opportunité pour s’entraîner. Il portait un Jean’s. Il était sur un vélo de « cycliste ». Moi, je me tenais droit sur mon vélo pliant, avec mon sac à dos transportant mes vêtements de rechange et mon repas pour le dîner et le petit-déjeuner. Ainsi qu’un livre ( Celui qui s’est échappé de Chris Ryan ). Je voyageais « léger ». Et, je voyagerai encore plus léger en reconnaissant qu’après plusieurs dizaines ou centaines de mètres, à mesure que le Bd Raspail montait et qu’il fallait s’arrêter au feu rouge puis repartir et se relancer, j’ai eu du mal à suivre. A repousser mes limites. Je n’ai pas été à la hauteur. Me mettre en danseuse comme l’autre devant ? Sur mon vélo pliant, acheté dans la chaine de magasins de sport grand public Décathlon, j’ai développé, plutôt qu’un braquet impitoyable, une sorte d’orgueil snob qui m’interdit de soulever mes fesses. Je pédale « droit » sans tortiller mes fesses de droite à gauche, surélevé au dessus de ma selle, laissant mes membres inférieurs faire leur travail et mon buste et ma tête s’occuper de la direction et de la stratégie à adopter. 

 

Mais hier soir, cette hiérarchie n’a pas suffi. Il en faut peu pour être distancé. Ensuite, l’écart se rallonge. Et, soit on persiste. Soit on revient à soi-même en se disant que l’on est à l’heure. Que l’on n’est pas là pour faire la course. Et, aussi, que douze heures de travail nous attendent.

 

Je suis arrivé tranquillement au travail. Lorsque j’ai pris ma douche, j’avais totalement oublié que je venais de perdre le maillot à pois du meilleur grimpeur du Bd Raspail.

 

Ce matin, j’ai fait le chemin en sens inverse en profitant pleinement de ce calme mental et matinal, dans les rues de Paris, un dimanche matin mais aussi un jour de vacances. J’ai croisé un homme qui faisait son footing. Sa belle foulée m’a donné envie de faire comme lui. Cela m’arrive quelques fois. Mais je ne peux pas être partout. 

 

Paris, ce dimanche 19 décembre 2021, un peu avant 9 heures du matin.

 

Paris, ce dimanche 19 décembre 2021, vers 9 heures du matin, près de la gare St Lazare.

 

 

Paris, ce dimanche 19 décembre 2021, vers 9 heures du matin, près de la Gare St Lazare.

 

 

Paris, ce dimanche 19 décembre 2021, vers 9 heures du matin, près de la gare St Lazare.

 

 

Paris, ce dimanche 19 décembre 2021 vers 9 heures du matin, près de la gare St Lazare.

 

Paris, ce dimanche 19 décembre 2021 vers 9 heures du matin, près de la gare St Lazare.

 

Paris, ce dimanche 19 décembre 2021, vers 9 heures du matin.

 

Franck Unimon, ce dimanche 19 décembre 2021. 

 

 

Catégories
Corona Circus Puissants Fonds/ Livres

Helie de Saint Marc par Laurent Beccaria

Helie de Saint Marc par Laurent Beccaria

 

 

« Tu veux être bon ?! Va où est le chaos… ».

 

Nous sommes des millions, en France, à considérer qu’à partir de ce soir ( ce vendredi 17 décembre 2021)  vont débuter les vacances de Noël. Et de nombreux préparatifs, dans cette intention, ont déjà été entamés.

 

Qu’est-ce qu’on va manger ? Avec qui on va faire la fête ? Quoi offrir ?

 

Pour certains, Noël et ses vacances sont une période joyeuse. Pour d’autres, il s’agira d’un bataillon de leurres à endurer plus que d’autres jours. Une croix à porter.

Gare de Paris St Lazare, 7 décembre 2021.

 

 

Toutes ces illuminations et ces airs de musique optimistes. Avec ces suggestions de cadeaux qui se déversent même dans  des média « sérieux ». Forêts hormonales- et de nitrates- surgies brutalement et à travers lesquelles il s’agira de cheminer comme si tout cela était normal. Et qui disparaitront ensuite pour être remplacées par d’autres ténors magistraux : les soldes, la galette des rois….

 

Hélie de Saint Marc, lui, ne fêtera pas Noël. Il est mort en 2013…à 91 ans.  Après plus de 90 Noël. C’est une longévité étonnante pour un homme qui a fait beaucoup plus que de décorer des sapins de Noël.

 

Il a envoyé quelques hommes au sapin, en a vu d’autres se faire harponner par lui. Et, lui-même, dans sa jeunesse, avait évité de peu sa transformation en sapin. C’était pendant la Seconde Guerre Mondiale, dans un camp de concentration nazi. Il avait à peu près vingt ans. Puis en Indochine. Il y avait eu, aussi, la Guerre d’Algérie….

 

Les décorations militaires qu’ Hélie de Saint Marc avait reçues ne venaient pas d’un magasin vendant des articles pour Noël.  

 

Je serai peut-être décédé bien avant mes 91 ans, moi qui bénéficie encore de la sécurité sociale, d’une certaine sécurité de l’emploi et qui réussis à manger à ma faim. Mais aussi à me plaindre, à être insatisfait. Et si, un jour, on parle un petit peu plus de moi que lui et de toutes celles et tous ceux qui lui ont ressemblé, qui lui ressemblent ou lui ressembleront, noirs, blancs, jaunes, arabes, hétérosexuels ou homosexuels, transgenres ou queer, femmes, hommes ou enfants, cela ne changera rien aux faits.

 

Les faits sont que Hélie de Saint Marc, comme celles et ceux qui lui ressemblent, pour moi, est une très grande personne. Beaucoup plus que moi. Et, obtenir plus de « popularité » que lui, si cela arrivait, n’y changera rien.

L’écrivaine Annie Ernaux, vraisemblablement en 1963.

 

Soyons précis : c’est ce que j’ai cru entrevoir chez l’homme qu’a été Hélie de Saint Marc, malgré son parcours de militaire qui me fait écrire ça. Certaines de ses…valeurs. Il aura été un homme engagé et un résistant. Il existe différentes formes de résistances. Pour moi, lorsque Annie Ernaux, dans sa nouvelle, L’événement, raconte son avortement clandestin, en 1963, alors qu’elle a une vingtaine d’années, dans le périmètre de Rouen, je vois aussi une résistante.

Et, lorsqu’en Guadeloupe, le musicien Vélo, joue du Gwo-Ka, alors que ce genre de musique est alors mal perçu ( ou le Maloya à la Réunion à une certaine époque), je vois aussi un résistant.

 

Aujourd’hui, le mot Résilience, beaucoup transmis par Boris Cyrulnik, est souvent « dicté » comme une évidence, mêlés parmi d’autres termes qui seraient nos boussoles et nos idéaux communs et immédiats :

 

Humanité, tolérance, bienveillance, être une famille, entraide, solidarité, écologie, démocratie, égalité, liberté, écoute, assistance, conseil, rebondir…

 

Les personnes résistantes sont celles qui s’aperçoivent que la pensée dominante est un échec. Et que le chaos auquel cette pensée obéit ne fera rien sortir de bon ou de meilleur chez l’être humain.

 

« Tu veux être bon ?! Va où est le chaos…. ». Cette phrase ne signifie pas :

 

« Fais-toi plaisir, écrase tout le monde autour de toi parce-que tu es très fort et que tu as beaucoup de pouvoir ».

 

Cette phrase ne signifie pas : « Bâtis un empire de carnage à ton image et prends ton pied absolu sans te retourner. Et sans jamais te préoccuper des autres ou te consacrer à eux ».

 

Contexte de lecture

 

Hélie de Saint Marc, un prénom et un nom  inconnus, aujourd’hui.

 

Comparativement au variant Omicron de la pandémie du Covid. Au rappeur Orelsan .

Gare de Paris St Lazare, 7 décembre 2021. En haut à droite, au dessus de la sortie, une affiche montrant le rappeur Orelsan pour la promotion de son nouvel album  » Civilisation ».

 

 

Pardon pour la chronologie mais j’essaie de trouver des actualités qui parlent ou parleront rapidement au plus grand nombre :

 

Ouvrage dirigé par Zineb El Razhaoui, ancienne journaliste de  » Charlie Hebdo », dans lequel elle recueille 13 témoignages de victimes ou de proches de victimes des attentats islamistes du 13 novembre 2015 à Paris. Elle fait aussi le portrait du meneur de ces attentats.

Le procès des attentats islamistes du 13 novembre 2015 ; Le candidat aux élections présidentielles polémiste-journaliste-écrivain-extrémiste de droite-futur papa Eric Zemmour ; la pénurie infirmière et médicale ;

 

 

L’hebdomadaire Télérama de ce 15 décembre 2021.

 

 

le refus du passe sanitaire et de l’obligation vaccinale en Guadeloupe et dans d’autres régions de France et d’outre-mer ;

 

 

Le journal  » Charlie Hebdo » de ce 15 décembre 2021.

 

 

la normalisation des relations de certains pays du Machrek tels le Maroc avec Israël ; L’emprise croissante de la Chine sur Hong-Kong et dans le Monde ; L’incarcération à la prison de la Santé de Claude Guéant , l’ancien Ministre de l’intérieur très sûr de lui, de l’ex Président de la République, Nicolas Sarkozy pour détournement de fonds ; L’accusation de viol portée à l’encontre de personnalités populaires ( masculines) telles que Nicolas Hulot, ancien Ministre mais aussi animateur de télé vedette, Yannick Agnel, ancien champion olympique de natation ; La Turquie qui brûle ou ampute les doigts de certains de ses écrivains afin qu’ils ne puissent plus écrire ; La sonde Parker Solar Probe, de la NASA, qui a « touché le soleil pour la première fois » (La sonde lancée en 2018  «   a franchi une bordure symbolique appelée la frontière d’Alfvèn » située à 15 millions de kilomètres de la surface du Soleil ». Article de France info publié le 16 décembre 2021) ; la sortie du « nouveau » film Matrix Résurrections ce 22 décembre 2021. La mort récente de Pierre Rabhi, écologiste modèle, homophobe et assez misogyne.  

 

 

Première page de couverture du journal  » Charlie Hebdo » de ce 8 décembre 2021. Avec, à gauche, l’homme politique, Eric Ciotti, au centre, la femme politique Valérie Pécresse, à droite, la femme politique Marine Le Pen et, allongé, à plat ventre, Eric Zemmour ex-journaliste, polémiste, écrivain qui s’est déclaré récemment candidat aux élections présidentielles de 2022.

 

 

Hélie de Saint Marc n’appartient plus à cette époque. Mais je cite ces quelques événements car je crois que connaître un peu le contexte qui entoure une lecture peut rajouter du relief et une certaine profondeur à un article.

 

La couverture de l’hebdomadaire Télérama de ce 15 décembre 2021. Le rappeur Joey Starr, un des meneurs du groupe de Rap NTM ou Suprême NTM y est montré en première page. Aujourd’hui, le groupe NTM n’existe plus. Mais un film consacré au groupe  » Les Suprêmes » d’Audrey Estrougou est sorti au cinéma le 24 novembre 2021 et marche plutôt bien en salle. Par ailleurs, Joey Starr, depuis cette photo en 1988, est depuis devenu un acteur et un comédien ( tant au cinéma qu’au théâtre) reconnus. Ce que rien en particulier ne laissait présager lorsque le groupe NTM a sorti ses premiers albums dans les années 90, Joey Starr se faisant plus « connaître » pour ses frasques ainsi que pour sa musique et ses prestations scéniques.

 

 

Ma « découverte » de Hélie de Saint Marc  :

J’avais « entendu » parler de Hélie de Saint Marc sans doute un peu avant sa mort.

 

« Tu veux être bon ?! Va où est le chaos » n’est pas de lui.

 

Le Maitre Kacem Zoughari en couverture d’un précédent numéro de la très bonne revue d’Arts martiaux, Yashima.

 

 Cette phrase- à laquelle j’ai déjà fait référence- a été prononcée par Kacem Zoughari, Maitre d’Arts martiaux, lorsqu’il avait été interviewé pour le magazine Yashima par Léo Tamaki, un autre Maitre d’Arts Martiaux. Un des Maitres d’Arts Martiaux de Kacem Zoughari , devenu un Sensei lui-même, lui avait donné un jour ce « conseil ».

 

 

 Hélie de Saint Marc n’était ni prêtre, ni rappeur, ni Maitre d’Arts Martiaux :

Il a été résistant, déporté dans un camp de concentration nazi, militaire, légionnaire parachutiste, officier. Il a avait été entaché par sa participation au putsch des généraux en Algérie en 1961 qui s’est opposé au Général de Gaulle. Condamné pour cela à faire de la prison. Puis réhabilité après plusieurs années d’incarcération. Enfin, il est devenu écrivain et ses livres, où il raconte « ses » guerres et ses époques, sont bien cotés.

Je n’en n’ai lu aucun pour l’instant par contre j’ai lu cette biographie que lui a consacré, de son vivant, un des membres de sa famille, Laurent Beccaria, historien, ainsi que cet ouvrage qui retranscrivait sa rencontre avec un ancien officier nazi :

Notre Histoire avec August Von Kageneck , conversations recueillies par Etienne de Montety.  

 

Autant que je le comprenne, Hélie de Saint Marc n’a jamais eu d’ambitions politiques et n’a jamais cherché à se montrer dans les média ou  à participer à une émission de téléréalité. Il était plutôt à l’opposé de ce mode de « vie ».

 

Ce qui le différencie complètement d’un Général de Gaulle, son aîné de plusieurs années, qui avait désobéi au Maréchal Pétain en entrant dans la Résistance, c’est son absence d’ambition et stratégie politique. C’est aussi ce qui le sépare de certains des généraux qu’il avait rejoints lors du putsch des généraux en Algérie en 1961. C’est, entre autres, ce qui ressort de cette biographie.

 

Qu’ai-je retenu de cette biographie ?

 

Si le variant Omicron de la pandémie du Covid est de aujourd’hui le variant dont on parle de plus en plus depuis le début officiel de cette pandémie en France en mars 2020, j’avais lu ou commencé à lire cet ouvrage lorsque le variant Delta de la pandémie était dominant. Peut-être avant l’obligation vaccinale comme celle du passe sanitaire décidée par le Président Macron et son gouvernement ce 12 juillet.  

 

J’ai terminé sa lecture il y a maintenant deux ou trois mois. Je me rappelle d’un jeune Hélie de Saint Marc, issu d’une famille vivant dans les environs de Bordeaux depuis plusieurs générations, plutôt d’un bon milieu social. Une famille cultivée. Catholique pratiquante. Je me rappelle d’un père (celui de Hélie de Saint Marc) avocat ou notaire, ôtant son chapeau avec respect lorsqu’il croisait des juifs forcés par le gouvernement Pétain à porter l’étoile jaune.

 

Je me souviens d’un jeune Hélie de Saint Marc plus à l’aise pour parcourir la région à vélo que pour réaliser des prouesses intellectuelles à l’école. Le travail scolaire lui demandant beaucoup d’efforts afin d’obtenir des résultats moyens ou corrects. Par contre, le jeune Hélie, qui avait au moins un frère, lisait avec admiration les récits de certains grands hommes ou aventuriers.

 

 

Lorsque l’Allemagne nazie envahit la France jusqu’à se répandre à Bordeaux, c’est la colère qui anime le jeune Hélie de Saint Marc. Dans cet ouvrage ou dans Notre Histoire, il rappellera comme il avait alors fait l’expérience douloureuse – voire traumatique- et s’en rappellera plus tard, qu’un grand empire établi et semblant parti pour durer peut péricliter en très peu de temps. La France d’aujourd’hui n’est peut-être qu’une vitrine de Noël pour touristes, consommateurs, extrémistes ou terroristes et apparaît assez souvent comme la spectatrice un peu consultée des décisions prises par les plus grandes Puissances (La Chine, les Etats Unis, la Russie, Le Japon, l’Allemagne, Israël…). Le récent raté où l’Australie a préféré, finalement, rompre le contrat par lequel elle s’était engagée à acheter des sous-marins nucléaires à la France au bénéfice des Etats-Unis et de la Grande Bretagne « prouve » à quel point la France a reculé ou recule dans le classement des Nations qui « comptent ».

 

 Mais la France des années 1940 était encore une des plus grandes Puissances mondiales. Ainsi qu’une des plus grandes Puissances coloniales. C’est dans cette France et dans sa mémoire concrète et directe qu’Hélie de Saint Marc est né et a grandi. Mémoire d’autant plus concrète qu’il était né dans l’hexagone et qu’il avait suffisamment d’aisance et de conscience sociale et intellectuelle pour en ressentir une certaine fierté.

Mes grands parents paternels et maternels, de la même génération qu’Hélie de Saint Marc, tous nés en Guadeloupe, un peu plus de cinquante ans après l’abolition de l’esclavage, dans un milieu social rural, manuel, modeste voire pauvre, avaient très certainement une autre perception de la France. Mais aussi de leur propre importance dans le monde en tant que personnes.

 

 

 

 

Extrait du journal  » Charlie Hebdo » du 15 décembre 2021 à propos du refus, en Guadeloupe, de la vaccination anti-Covid et du passe sanitaire obligatoires.

 

 

Bien-sûr, être issu d’un milieu modeste et « sinistré » n’empêche pas, malgré tout, d’être pourvu d’une certaine conscience de soi et de s’accorder de l’importance. Mais cela nécessite sûrement une très grande confiance en soi, une pulsion de vie particulièrement développée, voire hors norme, un farouche optimisme en même temps que certaines qualités ou vertus d’opportunisme. Soit des aptitudes qui peuvent être présentes en beaucoup d’entre nous. Encore faut-il s’autoriser à les exprimer. Or, ce qui opprime et refrène aussi, beaucoup, les êtres, c’est toute cette armada de censures et d’interdits qu’ils se sont copieusement entraînés à assimiler pour être acceptés ou aimés.

 

 

A telle époque et dans telle région, il s’agira d’adopter telle religion pour être bien vu ou pour éviter la mort et l’humiliation économique, sociale ou physique.

Ailleurs, ce sera telle langue plutôt qu’une autre. Ou telles mœurs. Aller à contre-courant de ces normes et de ces pensées dominantes nécessite plus que de la chance et de la « simple » volonté. C’est l’une des raisons pour lesquelles, après avoir été des fidèles croyants, nous sommes majoritairement des consommateurs et des exécutants.

 

Parce qu’être lucide en permanence, s’opposer,  résister (la créativité culturelle et artistique font partie de la résistance) ou devenir un meneur exige des efforts particuliers. Efforts qui ne sont pas toujours loués, compris, encouragés ou partagés par nos familiers ou proches. Efforts qui ne rencontrent pas toujours le succès et la reconnaissance….

 

Le contraire du mot « consommateur », c’est peut-être, dans sa version active et radicale, de devenir un transformateur. Et dans sa version plus sociable et plus indulgente, cela consiste à essayer de devenir un transmetteur.

Première page du New York Times du 8 décembre 2021.

 

 

La résistance

 

 

Résister, s’affirmer, c’est donc, à un moment ou à un autre,  être prêt, si nécessité, à s’exiler même si cela peut devenir dangereux. Parce-que s’exposer à l’inconnu et à l’isolement pour une durée indéterminée est une aventure dangereuse.

 

C’est  pourtant ce que va faire le jeune Hélie de Saint Marc. Sa connaissance de la région va d’abord faire de lui un messager opportun, et de confiance, pour la résistance française. Un univers d’hommes  plus âgés que lui. Dans un mouvement de résistance bien organisé.

En lisant ce livre, je découvrirai que si l’on a souvent une image idéalisée a posteriori de la résistance comme d’une action collective héroïque et bien structurée, qu’il était,  aussi, des mouvements de résistance si mal organisés qu’un certain nombre de leurs membres, pourtant exemplaires, se sont fait attraper ou tuer comme des amateurs. Leur tort étant d’avoir confié trop facilement leur vie à des meneurs…incompétents en termes d’organisation. Ce qui,  aujourd’hui, pourrait aussi nous faire penser à  des cadres, des entraîneurs, des conjoints, des amis, des proches, des professionnels ou des chefs d’entreprise (ou d’Etats) incompétents.

 

Dans le numéro du journal Le Parisien d’hier, je suis retombé sur ce fait divers arrivé le 8 juin 2018 à Argenteuil, dans ma ville, dans le centre commercial Côté Seine. Un centre commercial que je n’aime pas et, où, le 8 juin 2018, une mère a perdu un de ses jeunes enfants. Son erreur ? Avoir fait confiance à l’ascenseur qui permettait d’accéder à l’étage supérieur. Des ascenseurs dans des immeubles ou dans des centres commerciaux, nous en prenons tous. Celui-ci a « lâché » sur plus de deux mètres. Le môme n’a pas eu le temps de sortir. Il est mort écrasé sous les yeux de sa mère et de son jeune frère. Trois ans plus tard, aucun des responsables des diverses entreprises chargées de la maintenance de l’ascenseur n’a eu à s’expliquer devant un tribunal. Chacune des entreprises renvoie à l’autre à la responsabilité de la défaillance.

 

Voici ce que m’évoque, aujourd’hui, ces résistantes et résistants, qui, hier, comme aujourd’hui, confient ou confieront facilement leur vie à certains décideurs ou dirigeants qui, de leur côté, affirmeront que tout va bien se passer sans, par ailleurs,  prendre le temps et la précaution de véritablement s’impliquer afin que tout se déroule comme prévu ou puisse être résolu en cas d’imprévu.

 

Hélie de Saint Marc, lui-même, fera cette expérience en cherchant à s’affranchir du mouvement de résistance qui l’a initié. Il voudra s’engager davantage et tombera, comme d’autres volontaires, dans une embuscade qui le déportera dans un camp de concentration. Bien que moins robuste que d’autres, il y survivra deux fois. Une première fois grâce à l’entraide concrète dont il bénéficiera du fait de certaines amitiés et relations. Et, une seconde fois parce qu’un homme plus âgé que lui, un Lithuanien, je crois, taillé pour le travail de mineur, et aussi voleur intrépide de nourriture, décidera de le prendre sous sa protection et de partager avec lui ses vols alimentaires.

 

 

Lorsque l’on apprend déjà « ça » de Hélie de Saint Marc, comme de ceux qui l’environnent et qui vivent cela avec lui, on comprend mieux ce qu’il faut avoir comme parcours et ressources en soi pour être un résistant.

 

Mais on peut être un héros et un résistant et avoir des convictions idéologiques contraires. Cela arrivera à Hélie de Saint Marc qui croisera Jean-Marie Le Pen, « le père de », qui sera un de « ses » lieutenants et un de ses « subordonnés ». La biographie de Beccaria s’étend peu sur cette connaissance de Saint Marc en Indochine, je crois. Mais il ressort que Saint Marc ne partage pas les buts de l’OAS et, plus tard, de l’Extrême droite fasciste. Même s’il a pu connaître et combattre aux côtés de certains de ses futurs membres et meneurs.

 

Pour comprendre ce qui lui prend d’être du côté des généraux qui, en Algérie, organisent le Putsch en 1961 contre le Général de Gaulle, il faut savoir ce qui s’est passé en Indochine :

 

Lorsque la France, après avoir fait de certains asiatiques ses alliés et ses soldats (des villages), les abandonne sur place après avoir perdu la guerre, faisant d’eux les victimes des  vainqueurs.

En Algérie, l’histoire se répète avec les harkis et les tergiversations autant politiques que militaires de De Gaulle ainsi que ses visions coloniales pour ne pas dire colonialistes. Saint Marc est décrit comme un idéaliste qui s’attache aux indigènes en toute sincérité comme à leur loyauté et qui croit aussi à une réelle égalité des droits entre Algériens et pieds noirs. Alors que le gouvernement français de l’époque voudrait tantôt garder l’Algérie française telle quelle ou la « rendre » au FLN alors que, militairement, la France serait en train de gagner la guerre. Et que des soldats français, après avoir « perdu » face aux nazis et après avoir perdu la guerre d’Indochine voudraient, pour leur honneur et celui de la France, imposer cette victoire française.

 

Je ne suis pas pro-Algérie française et encore moins pro-OAS. Mais j’ai aussi appris que le FLN a aussi produit des horreurs. Et, je crois que le Martiniquais Frantz Fanon, psychiatre de référence ( sur lequel le réalisateur d’origine haïtienne Raoul Peck serait en train de réaliser un film), très engagé auprès du FLN, a eu une certaine  « chance » de mourir- jeune, à 39 ans- d’une leucémie avant l’indépendance de l’Algérie. Car l’Algérie qu’il a défendue comme d’autres, un demi siècle plus tard, n’est pas devenue la démocratie – plutôt laïque- pour laquelle il s’était battu. L’Algérie devenue indépendante en 1962, peu après sa mort,  semble l’avoir plutôt rapidement « oubliée ».

 

 

 

La jouissance du danger

 

 

Parler, un peu, de Hélie de Saint de Marc ,  c’est aussi parler de cette  «  jouissance du danger » qui pousse certaines personnes à agir comme elles le font. Cette jouissance du danger, dans sa partie la plus visible, serait d’abord propre aux résistants, combattants civils et autres, aux militaires, mais aussi sans doute à bien des membres de certains groupes d’intervention tels que le RAID, le GIGN, les SAS, la BRI, dans le banditisme et le grand  banditisme, dans les organisations terroristes.

 

 Mais, également, aussi à celles et ceux qui participent à certaines actions militantes :

 

Sea Sheperd ;

 

Txai Surui ? la jeune indigène brésilienne de 24 ans, présente à la récente COP de Glasow, en novembre, consacrée au réchauffement climatique et à l’épuisement des ressources de la planète, qui a affirmé, après la jeune suédoise, Greta Thunberg :

 

« La planète nous dit que nous n’avons plus le temps ».

 

 Nous pouvons aussi penser aux personnes qui vivent certaines passions. Mais aussi certaines addictions.

Cinquantenaire de Marmottan, à la cigale, à Paris, ce vendredi 3 décembre 2021.

 

Le 3 décembre dernier, dans la salle- remplie- de concerts de la Cigale, le service Marmottan spécialisé dans le traitement des addictions fêtait son cinquentenaire.

 

Sur place, j’ai eu l’impression qu’étaient présentes principalement des personnes préoccupées directement par le sujet des addictions. Soit en tant que professionnels de santé. Soit en tant qu’usagers s’étant sevrés ou ayant du mal- et cherchant- à se décrocher de leur(s) addiction (s).

 

 

Je ne peux pas avoir de certitude mais j’ai eu l’impression que la majorité des personnes de ce pays, la pensée dominante, se sent assez peu concernée directement par ce sujet. Et qu’entendre parler de Marmottan ou de tout autre service dévoué aux addictions n’est pas la priorité de la majorité qui dispose de la pensée dominante. A moins d’y être obligée.

J’ai bien prévu de consacrer un article sur à ce cinquentanaire de Marmottan dès que cela sera possible. Mais je m’attends à ce qu’il soit en grande partie parcouru par des professionnels de santé des addictions ou par des personnes qui ont envie d’entreprendre de mieux faire le tri parmi leurs addictions. 

 

Une addiction particulière :

 

Pourtant, l’être humain est porteur d’une addiction particulière : celle de la destruction d’autrui, de son environnement comme de sa propre autodestruction. Et, cela, peu importe son niveau intellectuel, social, politique ou son histoire.  Invariablement, l’être humain  retourne à cette addiction de destruction et d’autodestruction.

 

Les fêtes de ce Noël, et d’autres festivités, permettront à certaines et certains de vivre la courte trêve de cette addiction.

Paris, décembre 2021.

 

 

Donc, finalement, avec ou sans sapin, ces fêtes de Noël ont du bon. De même que la lecture de cette biographie d’Hélie de Saint Marc.

 

 

Franck Unimon, ce samedi 18 décembre 2021.