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Cinéma

La beauté du geste un film de Sho Miyake

La beauté du Geste un film de Sho Miyake

 

De cĹ“ur Ă  cĹ“ur. « Ishin Denshin Â».

 

La beautĂ© du geste est un titre dĂ©jĂ  utilisĂ© pour un certain nombre d’ouvrages et d’œuvres. On peut mĂŞme trouver un album du chanteur français GĂ©rald de Palmas, sorti en 2016, qui porte ce titre. Le film de Sho Miyake passe par un de ces principes assez radical, voire dogmatique, Ă©noncĂ© par le rĂ©alisateur ukrainien Myroslav Slaboshpytskyi lorsqu’il a prĂ©sentĂ©,  son film The Tribe, rĂ©compensĂ© Ă  Cannes en 2014 :

Le fait d’employer des mots pour parler nous sert souvent Ă  mentir ou Ă  dissimuler nos pensĂ©es. De ce fait, dans The Tribe ( 132 minutes), tous les protagonistes (en majoritĂ© sourds et muets) s’expriment dans la langue des signes sans le moindre sous-titre pour les spectateurs.  

Keiko Ogawa ( l’actrice Yukino Kishii)

Keiko Ogawa, l’héroïne de La beauté du geste, malentendante (pour éviter de dire sourde) utilise principalement la langue des signes pour s’exprimer. Et la boxe. Elle écrit aussi dans son journal intime.

 

Il faut avoir pratiquĂ© un Art martial durant dix mille heures en moyenne afin de pouvoir peut-ĂŞtre  « obtenir Â» le premier niveau de la ceinture noire ou son Ă©quivalent.

C’est une règle- ou une vérité- qui varie selon les individus, selon le degré d’intimité qu’ils développent avec leur intériorité mais aussi avec celle de leurs enseignants ou leurs Maitres, des compétences de ces derniers, de leur sincérité, mais aussi selon les époques et les contextes.

 

Il est très difficile de savoir à l’avance à combien de rencontres, de gestes et d’expériences correspondent ces dix mille heures. Il s’agit juste d’un chiffre, d’une indication, pour donner un repère comme on pourrait signaler une étoile, une métaphore ou un indice afin de montrer vers où continuer de se diriger. Il ne s’agit pas d’une vérité rigide et comptable.

 

La ceinture noire ou tout autre « grade Â», quelle que soit la discipline concernĂ©e,

est aussi une culture du coeur.  

 

Et du gong.

 

On peut aussi comparer ça à une histoire d’Amour. Ou à toute rencontre qui, pour nous, dispose d’un décompte particulier.

Keiko Ogawa est sans doute en dessous des 10 000 heures de pratique quand « Monsieur le directeur Â» ( l’acteur Tomokazu Miura) de son petit club de boxe la remarque.

 

Le gong est une frontière. Ce n’est pas un mur.

 

Une des erreurs possibles, Ă  parler de La BeautĂ© du geste, film franco-japonais ( par la production)  qui sortira dans les salles ce mercredi 30 aout 2023, serait de seulement l’enfermer dans le ring pour toute comparaison avec  le film Million Dollar Baby  rĂ©alisĂ© en 2004 par l’AmĂ©ricain Clint Eastwood. Un film  adaptĂ© par l’acteur et rĂ©alisateur Clint Eastwood d’après une des Ĺ“uvres de l’auteur FX Tool, très grand connaisseur- et amateur sur le tard- de boxe anglaise.

Le directeur et entraĂ®neur du club de boxe ( l’acteur Tomokazu Miura ) et Keiko Ogawa ( l’actrice Yukino Kishii).

Certes, l’hĂ©roĂŻne de La BeautĂ© du geste, Keiko Ogawa -interprĂ©tĂ©e par l’actrice Yukino Kishii- peut rappeler celle de  Million Dollar Baby  jouĂ©e par l’actrice Hillary Swank. Deux femmes venues sur le tard Ă  la boxe anglaise et dont l’engagement va saisir les regards de deux entraĂ®neurs vĂ©tĂ©rans de la boxe. D’un cĂ´tĂ©, Monsieur le directeur d’un petit club de boxe japonais (l’acteur Tomokazu Miura), de l’autre, l’ancien cow-boy et inspecteur Dirty Harry, Clint Eastwood, devenu rĂ©alisateur après avoir d’abord Ă©tĂ© un acteur mondialement connu.

 

19 annĂ©es sĂ©parent ces deux films et le Japon est diffĂ©rent des Etats-Unis. MĂŞme si au dĂ©cours de Hiroshima,  Nagasaki et d’abord de Pearl Harbour leurs histoires se sont confrontĂ©es mais aussi rapprochĂ©es.

 

Pour moi, en 1h39, La BeautĂ© du geste Ă©meut plus loin que Million Dollar Baby.

Sans vedettes mondialement connues. Avec un budget moindre.  Sans musique insidieuse.

 

Le film défie aussi – et fait oublier- la pandémie du Covid dont on aperçoit les masques et qui avait fait de nous des sacs (ou des visages) de peur et d’angoisse.

 

Keiko Ogawa n’a pas peur. Elle n’aime pas avoir mal. Célibataire, femme de ménage plutôt modeste dans un hôtel et dans le pays des mangas qui reste un pays riche et machiste corseté et entraîné par la recherche perpétuelle de la victoire économique, elle prend des coups et donne du courage. Celles et ceux qu’elle croise sont à son image.

 

La beauté du geste de Sho Miyake est un très bon film à voir avant le gong de la rentrée mais aussi après.

 

Franck Unimon, ce lundi 28 aout 2023.

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Addictions Crédibilité

Dissociation

L’artiste Rosalia en concert au festival Lollapalooza, ce samedi 22 juillet 2023. Photo©️Franck.Unimon

Dissociation

 

Les algorithmes puissants d’internet ou de youtube m’ont amenĂ© cette nuit Ă  regarder un documentaire d’une trentaine de minutes en replay sur Arte consacrĂ© au sujet des addictions Ă  la pornographie. J’y ai dĂ©couvert le tĂ©moignage de quelques jeunes  Allemands (des hommes exclusivement), plutĂ´t d’un bon milieu socio-culturel apparemment ( journaliste….) qui ont dĂ©veloppĂ© cette addiction.

Ps : Concernant notre addiction Ă  nos Ă©crans et aux vidĂ©os qui nous sont très facilement proposĂ©es sur nos ordinateurs, tablettes et smartphones via internet, et aux consĂ©quences possibles de cette addiction, je vous invite Ă  lire l’ouvrage Algocratie (vivre libre Ă  l’heure des algorithmes) d’Arthur Grimonpont, paru en 2022.

Cette nuit, après avoir studieusement regardĂ© ce documentaire sur l’addiction Ă  la pornographie, toujours sur « recommandation» des algorithmes, parmi plusieurs propositions manifestement aiguisĂ©es par mes navigations prĂ©cĂ©dentes, j’ai regardĂ© un second documentaire d’une trentaine de minutes (c’est la durĂ©e Ă  laquelle je me suis limitĂ©, que je me suis astreint cette nuit Ă  ne pas dĂ©passer) consacrĂ© Ă  ces personnes ( des « hippies »)  venant se «rĂ©fugier Â» sur l’ile des Canaries afin d’y changer de vie.

Dans ce documentaire, nous voyons quatre personnes vivant dans une grotte ou ayant vĂ©cu dans une grotte. Des personnes de 30-45 ans (mĂŞme si un homme de 62 ans, devenu riche après avoir travaillĂ© dans l’immobilier, est ensuite venu se joindre Ă  eux) sans enfants.

On pourrait se dire : après avoir prĂ©tendu s’intĂ©resser aux addictions en regardant un documentaire tout de mĂŞme consacrĂ© Ă  la pornographie, voilĂ  que maintenant il se mate un documentaire sur un mode de vie inspirĂ© des hippies. Alors que  l’on sait très bien que les hippies ne sont pas les derniers pour s’envoyer en l’air et partouzer. 

 

Comme on peut se dire, aussi, que « Changer de vie, les addictions », ces deux sujets semblent peut-être ne rien avoir en commun.

Il est vrai que ce ne sont pas ces deux documentaires « nocturnes » abordant le sujet de l’addiction Ă  la pornographie et de la volontĂ© de changer de vie  qui m’ont inspirĂ© le titre de « dissociation Â» pour ce chapitre. Chapitre, qui, pour ce blog, se rĂ©sumera Ă  cet article. 

 

En revanche, il y a une forme de dissociation dans le fait, d’une part, que des algorithmes prennent le relais de multiples et incessantes incantations ou sollicitations sociales, culturelles, Ă©conomiques, publicitaires, mensongères, informationnelles, politiques ou autres pour   tenter de tirer parti -et profit- de nos failles psychologiques afin de nous faire adopter des comportements qui nous contredisent, nous nuisent et nous font ignorer nos besoins les plus Ă©vidents. Et, d’autre part, le fait qu’un mĂ©tier comme celui d’infirmier consiste plutĂ´t Ă  ĂŞtre au chevet de celles et ceux qui ont des failles psychologiques et autres sans volontĂ© voire sans espoir d’en tirer un quelconque profit Ă©conomique et/ou politique.

 

D’un cĂ´tĂ©, une sociĂ©tĂ© qui « s’enrichit Â»  Ă©conomiquement avec mĂ©thode en vampirisant les forces vives d’une majoritĂ© d’ĂŞtres humains. En lui faisant payer le prix fort en termes de santĂ© physique, mentale, Ă©conomique et autre.

D’un autre cĂ´tĂ©, des infirmières et des infirmiers (pour ne parler que de ces « acteurs Â» de la santĂ© sociale mais aussi mentale et physique) qui puisent ou ont constamment Ă  puiser dans leurs ressources et leurs rĂ©serves personnelles ( qui peut encore croire que la seule application d’horaires Ă  la minute, de protocoles, de slogans, de « trucs Â», de « recettes Â», de sĂ©ances de mĂ©ditation et de yoga et de cours appris Ă  l’école suffisent pour s’appliquer Ă  veiller sur les autres pendant une bonne quarantaine d’annĂ©es ?! ) pour en soutenir d’autres, et qui, parallèlement Ă  cela, trinquent et subissent comme la majoritĂ© les coĂ»ts et les coups de la vie sans s’enrichir matĂ©riellement Ă  l’image de ces nouvelles grandes fortunes ou de ces milliardaires qui passent souvent pour des gĂ©nies, des pionniers, des visionnaires, ou des personnes d’autant plus respectables, exemplaires et indispensables qu’elles ont :

« rĂ©ussi Â».

 

Qu’est-ce que la rĂ©ussite ? Pour moi, ce serait de ne pas ĂŞtre pris , d’abord,  pour une serpillère ou un domestique. Mais, Ă©galement, de ne pas ĂŞtre essorĂ©, bousillĂ©, cancĂ©risĂ© et dĂ©primĂ© alors que je suis  jeune et dĂ©sireux de vivre. De parvenir Ă  me maintenir, le plus longtemps possible, en bonne ou en très bonne santĂ© mentale et physique. Ou que, en cas de dĂ©faillance de ma part, qu’il se trouvera suffisamment de personnes autour de moi pour intervenir rapidement afin de veiller sur moi afin de me sauver, de me protĂ©ger et de m’aider Ă  me remettre sur pied.

 

Mais aussi pour me conseiller, me guider voire m’escorter hors de ce qui peut m’ atteindre ou me nuire.

 

Au vu de ces quelques critères, je ne suis pas sûr que la réussite soit au rendez-vous pour beaucoup de monde y compris pour moi-même.

Et, cela, malgrĂ© tous les efforts ou sacrifices consentis, jour après jour, annĂ©e après annĂ©e en Ă©change d’une Ă©ventuelle, future ou hypothĂ©tique reconnaissance sociale, Ă©conomique et personnelle.

Amen. 

 

La reconnaissance faciale est peut-ĂŞtre plus certainement ce qui risque de m’attendre au lieu de la grande reconnaissance sociale attendue par tous après bien des annĂ©es d’efforts, de responsabilitĂ©s, de sacrifice et de travail. 

Pourtant, constamment, nous baignons dans une sorte de liquide et d’ambiance amniotique, pour ne pas dire hypnotique, qui nous laisse croire ou entrevoir que  rĂ©ussite et bonheur crĂ©pitent, gisent – voire, rugissent- et se rĂ©pandent Ă  nos pieds telles des cascades auxquelles il suffirait de s’abreuver.  Alors mĂŞme que la rĂ©ussite et le bonheur nous glissent entre les doigts ou que nous n’en apercevons que les reflets sans cesse difractĂ©s et qui, bien-sĂ»r, s’éloignent « un peu » lorsque nous en approchons. 

 

Ma vision, lors de ce dernier dimanche du mois de juillet, un mois de grandes vacances estivales, est sans doute trop pessimiste. Pourtant, je n’ai pas promis de me tuer cette nuit ou avant l’arrivée du mois d’aout 2023. Et encore moins de me muter en grand gourou ou en marabout.

Ni gourou, ni loup-garou, j’aimerais seulement être sûr de pouvoir et de savoir quand arrêter de m’agiter lorsque l’on me présente, comme cela arrive fréquemment, toutes sortes d’opportunités, d’affaires à ne pas manquer et des bons coups qui sont, finalement, des plans foireux ou stériles, pour ne pas dire des plans de désespoir, des pertes de temps, d’argent et d’énergie.

Dire qu’il faut apprendre à faire le tri ne suffit pas.

Je crois qu’il faut aussi être discipliné. Savoir être discipliné. Apprendre à se discipliner. Apprendre à rester lucide et concentré. Et clairvoyant. Ne pas partir dans tous les sens.

C’est Ă  dire :  

Savoir rester suffisamment attentif et permĂ©able Ă  ce qui nous entoure sans pour autant se laisser ou se faire embarquer n’importe oĂą et vers n’importe quoi, n’importe qui.

Savoir rester ancré.

En se mettant dans un état finalement assez proche d’une certaine…dissociation.

Je sais que ce terme de « dissociation » fait partie des symptĂ´mes d’une maladie psychiatrique. Mais je sais aussi que ce terme est employĂ©, selon moi Ă  bon escient, au moins par LĂ©o Tamaki, un expert en AĂŻkido qui se reconnaĂ®tra s’il parcourt les lignes de cet article et qui en sourira certainement ( lire Les 24 heures du SamouraĂŻ au dojo d’Herblay ce 20 et ce 21 Mai 2023, 2ème Ă©dition ).

Nous ne parlons sans doute pas de la mĂŞme dissociation, bien-sĂ»r.  Au sens psychiatrique, la dissociation emporte ou dĂ©vie son sujet ou sa victime. Un peu comme un sous-marin qui, par cinquante ou cent mètres de fond, prendrait l’eau par ses Ă©coutilles et qui tenterait de rester maitre de sa trajectoire et de sa vitesse malgrĂ© la force des courants et les grands volumes d’eau qui le perturbent de plus en plus.

Le terme « dissociation » employĂ© par cet expert en AĂŻkido pourrait aussi ĂŞtre employĂ© par un musicien, un batteur par exemple, lorsque celui-ci est capable, avec sa main droite de rĂ©aliser de façon  rĂ©pĂ©tĂ©e et harmonieuse un geste diffĂ©rent de celui de sa main gauche. Et l’on pourrait dire ça, bien-sĂ»r, d’une pianiste. Ou d’une personne adepte du jonglage. 

 

Un exemple simple de cette action très difficile Ă  maitriser- la dissociation-  me suffira, je pense, pour l’illustrer. 

 

RĂ©cemment, j’ai revu sur youtube ( dont les sĂ©duisants et puissants algorithmes savent nous retenir pendant des heures devant des vidĂ©os qu’ils nous proposent) un extrait de ce concert du bassiste Foley McCreary avec le batteur Chris Dave. Ils Ă©taient accompagnĂ©s du saxophoniste Zhenya Strigalev. Voici la vidĂ©o en question. Si « sa majestĂ©  » Youtube accepte que je la partage : 

https://youtu.be/2ZaMEGnI5iQ

C’était à Londres aux alentours de 2009 dans une reprise spéciale de You are under arrest, un titre interprété par Miles Davis dans les années 80.

 

Au dĂ©but du titre, Foley McCreary dĂ©cide d’une ligne de basse qu’il rĂ©pète. Une ligne de basse qu’on pourra estimer comme « simple Â» si l’on fait abstraction du fait que Foley est un exceptionnel joueur de basse et que, nous, nous sommes surtout les spectateurs moyens d’un concert de musique ou, plus simplement :

 

Nous sommes des amateurs de musique qui regardons des professionnels qui sont, généralement, aussi, des passionnés ou des « fous » de musique.

Je ne suis pas certain que je pourrais vraiment supporter de passer plusieurs jours de suite avec ces musiciennes et musiciens que j’admire. De suivre leur rythme de vie intĂ©gralement. Car celles-ci et ceux-ci, probablement, me parleraient de musique, parleraient de musique et joueraient de la musique bien au delĂ  de ce que je serais capable de supporter. Et sans doute, cette analogie est-elle possible avec d’autres artistes ou des Maitres d’Arts martiaux comme avec toute personne passionnĂ©e par et pour….sa discipline. Peut-ĂŞtre aussi peut-on se dire que cette passion serait aussi envahissante et dĂ©vorante que certains dĂ©lires, mal maitrisĂ©s et mal canalisĂ©s, qui amènent certaines personnes Ă  se retrouver enfermĂ©es…dans un service de psychiatrie. Ou isolĂ©es de leurs proches.

 

Dans cette vidĂ©o, neuf minutes durant, Foley  » le mutant » va tenir sa ligne de basse malgrĂ© les « attaques Â» rythmiques variĂ©es de Chris Dave et ses chorus avec le saxophoniste Zhenya Strigalev.

 

On pourrait s’amuser à imaginer que Chris Dave et Zhenya Strigalev sont des algorithmes qui font tout pour détourner Foley McCreary de ses limites et de sa ligne de basse. Pour nous, spectateurs et amateurs de musique, ces neuf minutes de musique sont une expérience hors norme. Et un très grand plaisir si l’on aime ce genre de musique. Foley McCreary réalise devant nous la dissociation parfaite.

 

Sauf que dans la vraie vie, nous sommes rarement des Foley McCreary. Et, en plus, il nous faut tenir bien plus que neuf minutes par vingt quatre heures pour tenir notre propre cap. Celui qui nous assure de nous rapprocher véritablement de ce qui nous convient véritablement.

 

Franck Unimon, ce dimanche 30 juillet 2023. 

 

 

 

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Cinéma

Au cinéma : Limbo ou Mission : Impossible Dead Reckoning partie 1 ?

 

Limbo de Soi-Cheang avec les flics Will Ren ( l’acteur Mason Lee) et Cham Lau ( l’acteur Ka Tung Lam).

Au cinĂ©ma : Limbo de Soi Cheang ou Mission : Impossible Dead Reckoning partie 1 de Christopher McQuarrie ?

Hier, après plusieurs semaines ou plusieurs mois d’absence, je suis retournĂ© au cinĂ©ma. J’ai d’abord vu le film Limbo du rĂ©alisateur Hong-Kongais Soi Cheang. Un film très plĂ©biscitĂ© par la critique. Je viens par exemple de lire sur le net, pour le qualifier, la phrase « un bijou de noirceur Â». Mais, aussi : « Le polar de l’annĂ©e ».

A Paris, j’avais interviewĂ© Soi Cheang, je crois, lorsque j’étais journaliste cinĂ©ma bĂ©nĂ©vole pour le magazine Brazil. Sans doute pour le film Accident  rĂ©alisé…en 2009. Il y a 14 ans, donc. Comme nous vivons avec notre temps, je vais plutĂ´t parler d’hier.

 

Hier, après Limbo, au lieu de rentrer chez moi, je suis allĂ© voir Ă  la suite le premier volet du dernier Mission : Impossible Dead Reckoning partie 1  Â« avec Â» l’acteur Tom Cruise en Star du film.

Tom Cruise ( ou sa doublure) sur sa monture au dessus du vide dans Mission : Impossible Dead Reckoning partie 1.

Ce sont deux films sortis rĂ©cemment ( ce 12 juillet 2023 pour l’un et l’autre) que j’avais très envie d’aller voir. Et ce sont deux films qui m’ont « déçu Â».

 

J’ai tout de même une nette préférence pour Limbo.

« Limbo » de Soi Cheang avec Ka Tung Lam dans le rôle de Cham Lau.

J’ai d’abord aimé la photo, le noir et blanc. L’ambiance polar. Les nervures colorées des installations électriques de la ville où se tient l’enquête. Ou, plutôt, la tempête.

 

 J’ai aimĂ© le cĂ´tĂ© « confucĂ©en Â» de Limbo, je dirais, oĂą plusieurs des protagonistes portent un fardeau ou sont dans une impasse tel un destin et essaient ou de se racheter ou de l’accepter. J’ai aimĂ© le personnage fĂ©minin de Wong To, plusieurs fois maltraitĂ©e, et qui est une description assez complète des multiples violences infligĂ©es aux femmes dans notre sociĂ©tĂ© masculine, urbaine, jeune, riche et moderne.

Wong To ( l’actrice Yase Liu) dans « Limbo ».

J’ai aimé la combattivité de Wong To, sa débrouillardise supérieure, bien supérieure finalement, à celle des femmes des deux flics qui sont les autres héros du film.

Cham Lau et Wong To.

Je me suis dit que ce film ne pouvait ĂŞtre qu’asiatique pour avoir pu s’autoriser Ă  montrer un personnage fĂ©minin sur grand Ă©cran se faire malmener de cette façon. En France, on estimera peut-ĂŞtre que ces violences rĂ©pĂ©tĂ©es sur le personnage de Wong To font de nous des voyeurs et des complices. Pour ma part, je considère ces parties du films  plutĂ´t comme les documents testamentaires des victimes de violences morales et physiques qui disparaissent gĂ©nĂ©ralement dans l’indiffĂ©rence gĂ©nĂ©rale.

 

J’ai moins aimé le côté Seven du film, pour faire un rapprochement avec le film américain avec Brad Pitt et Morgan Freeman, pour l’ambiance.

 

J’ai moins aimé l’antagonisme, car il fallait bien en créer un, assez toc entre, d’un côté le flic expérimenté de terrain, instinctif, roublard, assez expéditif, adepte de la justice personnelle et le jeune flic intello, premier de la classe, bon élève, bien sous tous rapports, d’une intelligence très supérieure, binoclard et bien-sûr marié à une épouse toute docile, patiente, compréhensive et bien-sûr enceinte de lui.

 

D’un cĂ´tĂ©, le bourrin au grand cĹ“ur, de l’autre, la classe politique de celui qui a fait de très bonnes Ă©tudes et qui pourrait prĂ©tendre plus tard Ă  une carrière exceptionnelle.Pourtant, au dĂ©part, cela me plaisait beaucoup que l’un des deux hĂ©ros porte des lunettes. Car on voit encore très rarement des hĂ©ros de films d’action ou de polars qui portent des lunettes. Mais dans Limbo, cette caractĂ©ristique est un peu trop tĂ©lĂ©phonĂ©e, un peu trop scolaire. Le rĂ©alisateur ne fait pas grand chose, je trouve, pour dĂ©velopper davantage le personnage de Will Ren Ă  partir de ses lunettes. C’est juste un « truc » qui va permettre, Ă  un moment donnĂ© du film, d’avoir son importance. MĂŞme si, bien-sĂ»r, on peut très bien avoir une très bonne vue organique et ĂŞtre frappĂ© de cĂ©citĂ© morale ou de coeur….

 

On remarquera aussi que les deux femmes des flics qui sont bien-sĂ»r des Ă©pouses « modèles Â» et des PĂ©nĂ©lope n’ont pas d’autre possibilitĂ© que de vivre dans un Ă©crin ou dans un cocon en demeurant dans l’enceinte d’une ignorance complète- ou virginale- du monde et de sa violence. Pour l’avoir peut-ĂŞtre ignorĂ©e, une des deux est  durement exposĂ©e Ă  la violence du monde extĂ©rieur qui Ă©clate bien-sĂ»r par surprise.

 

Comme un viol.

 

Comme on le voit, il  y a des très bonnes choses dans Limbo. Ces deux hĂ©ros, flics, ainsi que Wong To, qui vont jusqu’au bout d’eux-mĂŞmes et au delĂ . Pour rĂ©soudre des mutilations et des assassinats de femmes marginales, tout en bas de l’échelle sociale (immigrĂ©es, camĂ©es, prostituĂ©es mais aussi mutilĂ©es autant socialement que physiquement…) dont, finalement, la sociĂ©tĂ© hong-kongaise, comme toute « bonne Â» sociĂ©tĂ© bien propre sur elle aurait plutĂ´t tendance Ă  se foutre. Sauf, bien-sĂ»r, pour satisfaire en express et en liquide certains besoins honteux ou difficilement assumĂ©s.

 

Tom Cruise, Ving Rhames et Simon Pegg.

 

Ensuite, il y a Mission : ImpossibleDead Reckoning  partie 1 avec Tom Cruise, Simon Pegg, Ving Rhames et sa voix caverneuse.

 

Quel que soit ce que l’on peut penser de Tom Cruise « le scientologue Â», je considère maintenant depuis des annĂ©es que c’est un très bon acteur. Et qu’il aurait pu ou aurait dĂ», depuis longtemps, recevoir un Oscar. Je le pense d’autant plus que durant des annĂ©es, Tom Cruise l’acteur-vedette m’a beaucoup exaspĂ©rĂ©. Jusqu’à ce que je le voie dans NĂ© un 4 juillet qui n’est pas mon film prĂ©fĂ©rĂ©. Ou dans Magnolia qui m’a davantage conquis.

 

 Mais je ne vais pas plaindre  Tom Cruise. D’autant qu’il s’en sort très bien tout seul avec ou sans cascade. Que ce soit dans des films d’action qui marchent tels que Mission : Impossible ou Jack reacher. Ou dans des films d’auteur.

 

Tom Cruise peut et réaliser des prouesses physiques et des cascades étonnantes. Comme il peut aussi être très drôle. Je me souviens encore de son rôle secondaire dans Tonnerre sous les Tropiques de Ben Stiller où il apparaît déguisé et se montre particulièrement drôle en producteur de cinéma et aussi très porté sur l’autodérision. Pourtant, le film date de….2008.

 

Si je me permettais une comparaison, je dirais que Tom Cruise est peut-être au cinéma ce que Novak Djokovic est au tennis. On peut ne pas les aimer pour leurs positions, leurs attitudes ou leurs propos. Des positions, des attitudes et des propos, d’ailleurs, que je désapprouve (concernant la scientologie, le nationalisme serbe, à propos du Covid…).

 

Par contre, il est impossible de leur dénier leur professionnalisme dans leur domaine ainsi que le niveau exceptionnel ou hors-norme de leurs performances mais aussi de leur longévité comme de leur carrière.

 

Dans Mission : Impossible – Dead Reckoning partie 1, on retrouve bien-sĂ»r tout le cĂ´tĂ© « James Bond Â» de Tom Cruise. Car, pour moi, dès que Tom Cruise a commencĂ© Ă  mettre la main sur le personnage de Ethan Hunt dans Mission : Impossible, ça a toujours Ă©tĂ© pour se tailler sur mesure son costard de « James Bond Â».  Ce qui est bien sĂ»r très loin de la sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e que nous avons pu voir dans les annĂ©es 70-80. Mais, ça, c’est le cinĂ©ma.

 

Bon, dans Mission : Impossible- Dead Reckoning, il y a du spectaculaire, des grandes cascades, des courses poursuites, de l’humour.

Mais c’est très bourrin. J’ai très envie d’Ă©crire :

« C’est très AmĂ©ricain-bourrin ». C’est « Nous sommes les AmĂ©ricains et on va tout dĂ©foncer ! ». Soit version militaire, soit version parc d’attractions gigantesque Ă  l’AmĂ©ricaine.

 Je sais bien que l’on va voir ce film pour se distraire. Et, je suis d’ailleurs allĂ© le voir pour cela. Autrement, je serais allĂ© voir L’Amour des forĂŞts de ValĂ©rie Donzelli avec l’actrice Virginie Efira qui continue de beaucoup me plaire et m’étonner et l’acteur Melvil Poupaud, qui nous raconte apparemment de façon rĂ©aliste une histoire d’emprise psychologique au sein d’un couple.

Sauf que je trouve Ă  Mission : impossible-Dead Reckoning partie 1 des allures de fĂŞte foraine des annĂ©es 70. On a des très gros moyens pour faire boum-boum alors on fait boum-boum et vroum-vroum. Je ne vois pas ce qu’il y a des très novateur dans ce film. En termes de cascades il y a nĂ©anmoins sans aucun doute du très bon travail de rĂ©alisĂ©.

 

Mais en termes d’intrigue. De personnages….on est très très loin de la subtilitĂ© de Casino Royale avec Daniel Craig ( ou les Jason Bourne auquels les Mission : Impossible Â«Â de » Tom sont aussi comparĂ©s) qui cumulait action musclĂ©e et surprenante et, tout de mĂŞme, un peu de mystère. Plus d’épaisseur quant aux personnages jouĂ©s. Alors que lĂ , tout est souvent caricatural. Rentre-dedans. Presque vulgaire. Beaucoup trop pop-corn pour moi.

 

Il faut nous le dire si ce film est plus une comĂ©die qu’un film d’action. Les femmes dans Mission-impossible : Dead Reckoning partie 1 ? Il y en a quatre qui ont un rĂ´le a priori consĂ©quent et qu’il vaut mieux Ă©viter de prendre Ă  la lĂ©gère. Ce serait donc un film fĂ©ministe ?

Sans surprise, Ethan Hunt les retourne toutes ou devient d’une façon ou d’une autre leur protecteur imminent. Car il les lui faut toutes bien-sĂ»r tandis que ses deux acolytes, Simon Pegg, Ving Rhames mais aussi tous les autres mâles de la bande ont bien d’autres prĂ©occupations.

 

Et Ethan Hunt rĂ©alise cela sans coucher car ce n’est pas un proxĂ©nète. Comment fait-il ? La scientologie peut-ĂŞtre.

 

Néanmoins, j’ai bien aimé la définition de Ethan Hunt :

«  Un camĂ©lĂ©on tĂ©lĂ©pathe Â». C’est bien trouvĂ©.

Tom Cruise Ă  Venise ( ou sa doublure) dans Mission : Impossible Dead Reckoning- partie 1.

Si dans Limbo, on ressent les coups portĂ©s mais aussi de l’empathie pour les personnages, devant Mission-impossible : Dead Reckoning partie 1, tout le dĂ©cor fait toc. On a beau faire dĂ©filer les endroits et flirter avec bien des rĂ©fĂ©rences cinĂ©matographiques ou autres ( Venise…) on se rappelle tout le temps ou souvent que l’on est au cinĂ©ma. Alors que dans Limbo, le film nous enserre quand mĂŞme dans sa toile.

 

Franck Unimon, ce mardi 18 juillet 2023.

 

 

 

 

 

 

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self-défense/ Arts Martiaux

Les 24 heures du SamouraĂŻ au dojo d’Herblay ce 20 et ce 21 Mai 2023, 2ème Ă©dition

Au dojo d’Herblay, lors des 24 heures du SamouraĂŻ, 2ème Ă©dition. Membre d’une association parisienne, ce trio qui se connait depuis une dizaine d’annĂ©es a jouĂ© de la musique traditionnelle et, cela, dès l’ouverture des 24 heures du SamouraĂŻ. Photo©Franck.Unimon

Les 24 heures du Samouraï au dojo d’Herblay ce 20 et 21 Mai 2023, 2ème édition

 

Chevrotine peut-ĂŞtre cinglĂ©e, ce samedi 20 Mai 2023, je traçais depuis quelques minutes sur l’autoroute A15 lorsque, malgrĂ© toute l’attention prĂ©alable portĂ©e Ă  mes prĂ©paratifs, je me dis que j’aurais peut-ĂŞtre dĂ», finalement, la veille, acheter deux nouveaux kimonos plutĂ´t qu’un seul. J’allais tourner avec deux kimonos lors de ces 24 heures du SamouraĂŻ. ( Avant les 24 heures du SamouraĂŻ au dojo d’Herblay ce 20 et ce 21 mai 2023). 

 

Le trio Ă  l’initiative de l’Ă©vĂ©nement, ce samedi 20 Mai 2023, vers 11h, en face du dojo d’Herblay avant le dĂ©but des 24 heures du SamouraĂŻ : ( de gauche Ă  droite) Tanguy Le Vourch, Issei Tamaki et LĂ©o Tamaki. Photo©Franck.Unimon

 

Nous étions plus de deux cents ce week-end pour cette deuxième édition des 24 heures du Samouraï au dojo d’Herblay. Soit, à bien y repenser aujourd’hui, à peine un petit peu moins de personnes qu’il n’y en aura lors du concert de Beyoncé qui se déroulera demain soir au stade de France, ce vendredi 26 Mai 2023.

 

Dix disciplines : Ni combat, ni compĂ©tition

Au dojo d’Herblay, dans la nuit du 20 au 21 Mai 2023, lors des 24 heures du SamouraĂŻ. Photo©Franck.Unimon

Pour pratiquer dans notre couvent martial situĂ© dans le Val d’Oise, nous avons troquĂ© nos vĂŞtements ordinaires et civils pour des amas de kimonos majoritairement blancs faisant de nous des volontaires pour cet Ă©vĂ©nement…peu ordinaire. Mais l’état d’esprit, plus que la couleur, le « niveau Â» d’expĂ©rience, la discipline martiale ou de combat pratiquĂ©e, ou le grain de la tenue vestimentaire, a Ă©tĂ©, ici, ce qui importait.

A gauche, en pleine démonstration lors de ces 24 heures du Samouraï, Didier Lorho, expert en Uechi-Ryû. Photo©️Franck.Unimon

Débutant(e)s comme chevronné(e)s, élèves ou Maitres, femmes ou hommes, adolescent(es) ou vétérans, marcheurs ou en fauteuil roulant, issus du Karaté, du Systema, du Penchak Silat, Ju Jitsu brésilien, de l’hapkido, de l’Aïkido, du Wing Chun, du Tae Kwondo ou de toute autre expérience martiale ou de combat ont été acceptés une fois le droit d’entrée acquitté. Pour moi, le tarif solo avait été de 85 euros en prévente.

Au dojo d’Herblay, ce samedi 20 Mai 2023 lors des 24 heures du SamouraĂŻ. Photo©️Franck.Unimon

 

Dans ce « couvent Â» restĂ© ouvert entre ciel et terre et souhaitĂ© comme tel, c’est en passant par la porte d’entrĂ©e principale que nous avons tous empruntĂ©s, qu’un peu avant midi, ce samedi 20 Mai 2023, une reprĂ©sentante de l’Etat est venue nous saluer, nous encourager et aussi nous apprendre qu’elle avait vu ce dojo sortir de terre plusieurs annĂ©es auparavant.

 

Lors de la création de ce dojo, certaines et certains des personnes qui ont participé à ces 24 heures du Samouraï ce week-end étaient déjà nées, d’autre pas. Et l’on peut souhaiter que d’autres qui naîtront après cette deuxième édition vivront un jour cette expérience. Qu’elles et qu’ils proviennent de Tours, de Toulon, de Limoges, de Normandie, de Bretagne, de Belgique, de l’Est de la France, du Mexique, de l’île de France ou d’ailleurs comme cela a été le cas ce week-end.

 

Une organisation clés en main

Au dojo d’Herblay, lors de ces 24 heures du SamouraĂŻ, 2ème Ă©dition. De dos, une des bĂ©nĂ©voles, par ailleurs pratiquante d’AĂŻkido, qui assure alors la couverture son, ambiance musicale comprise, des 24 heures du SamouraĂŻ, 2ème Ă©dition. Photo©Franck.Unimon

 

L’équipe organisatrice (constituĂ©e de bĂ©nĂ©voles fĂ©dĂ©rĂ©s par Tanguy Le Vourch, Issei Tamaki et LĂ©o Tamaki) de ces 24 heures du SamouraĂŻ avait tout prĂ©vu :

 

Rappelons d’abord que deux Ă  trois jours avant le dĂ©but de « l’étape Â» de ces 24 heures du SamouraĂŻ, un mail avait Ă©tĂ© envoyĂ© aux participantes et participants les informant qu’il Ă©tait prĂ©vu un certain retard sur la ligne J de train reliant Paris Ă  la gare d’Herblay (environ 25 minutes dans les conditions normales). Ce mail mentionnait l’heure du dĂ©but des inscriptions fixĂ© Ă  10h45 pour une cĂ©rĂ©monie d’ouverture Ă  11h45. Et recommandait de prĂ©voir son sac de couchage, un oreiller, son nĂ©cessaire de toilette, mais aussi de s’hydrater rĂ©gulièrement.

 

A son arrivée, chaque participant (e ) après s’être acquitté(e) de son droit d’entrée a reçu un sac en carton à l’effigie de l’événement contenant une bouteille d’eau minérale, une banane, une pomme et une canette de coca-cola. Une carte lui a également été remise. Celle-ci allait lui permettre de faire tamponner chacune de ses implications aux ateliers animés par dix experts. Après avoir participé à quatre ateliers, la participante ou le participant obtenait un bracelet avec une couleur correspondant à son nombre d’expériences martiales vécues.

 

Lors de ces 24 heures du Samouraï, 16 ateliers d’une heure quinze chacun furent proposés avec, en moyenne, quinze minutes de pause durant l’intervalle.

Lors de ces 24 heures du SamouraĂŻ, 2ème Ă©dition. On peut apercevoir LĂ©o Tamak dans le fond, tenant un bokken, lors de sa première intervention entre 1h45 et 3h du matin dans la nuit de samedi Ă  dimanche. On peut voir sur le poignet droit de ce pratiquant au premier plan, par ailleurs, professeur d’Arts martiaux, les bracelets vert et bleu qu’il porte. Ce qui signifie qu’il avait participĂ© Ă  au moins huit sĂ©ances lorsque cette photo a Ă©tĂ© prise. Photo©Franck.Unimon

Dans le dojo suffisamment grand (750 mètres carrĂ©s ?), des vestiaires, des douches et des toilettes sont disponibles facilement et gratuitement. Un service de restauration propose Ă  un tarif très abordable de la nourriture de qualitĂ© ou faite main (2 euros une part de quiche lorraine, autant pour un bol contenant quatre ou cinq portions de pastèque…). Une Ă©quipe de pratiquants de shiatsu est repĂ©rable sur une partie du tatami et opère Ă  titre gracieux. Des ostĂ©opathes et des infirmières sont prĂ©sents sur l’évĂ©nement. Une petite salle est rĂ©servĂ©e Ă  l’aire de repos. Quelques bokken et bâtons peuvent ĂŞtre prĂŞtĂ©s Ă  celles et ceux venus les mains nues.

Trois musiciens traditionnels faisant partie d’une association parisienne font résonner leur voix et leurs tambours lors de certains moments de l’événement.

Une ambiance musicale de circonstance et humoristique est entretenue à la fin de chaque intervention au moment de la séance de photo du groupe de participants entourant l’expert (Opération Dragon, Kill Bill, la série Kung Fu, Highway to hell d’AC/DC et d’autres références….).

 

Une équipe de bénévoles, pratiquant aussi lorsqu’elle le peut, permet de se sentir bien accueilli, contribue à nous donner des repères, et assure, aussi, le très bon déroulement de ces diverses séquences.

Lors des 24 heures du SamouraĂŻ. Nous Ă©tions encouragĂ©s Ă  changer de partenaire lors de chaque « exercice ». C’est ainsi que j’ai pu pratiquer avec un partenaire plus lourd que moi de 40 kilos, un pratiquant en chaise roulante, un adolescent, des partenaires fĂ©minines. Et, Ă  chaque fois le niveau de pratique des uns et des autres comme leur discipline variait. Photo©Franck.Unimon

L’intrigue et les « excuses Â» de l’annĂ©e dernière concernant les 24 heures du SamouraĂŻ

 

L’année dernière, quand je pris connaissance de la première édition des 24 heures du Samouraï à Nantes, je fus d’abord intrigué.

 

Je me suis demandĂ© comment, en passant 24 heures Ă  pratiquer des Arts martiaux ou des disciplines de combat, on pouvait vĂ©ritablement y prendre plaisir. Je percevais plus ça comme de la surconsommation et de la frĂ©nĂ©sie Ă  l’image de ce mode de vie et de ces millions d’images par secondes  dans lesquels nous sommes rĂ©gulièrement immergĂ©s et reclus. 

 

Mais il Ă©tait dĂ©jĂ  trop tard pour participer. Et puis, Nantes, c’était « trop loin Â» pour moi.

 

Par contre, pour Herblay, je n’avais aucune excuse.

 

Herblay est la ville oĂą j’ai vĂ©ritablement dĂ©couvert le monde du travail dans un service de nuit, dans lequel je travaillais seul, douze heures durant. La personne qui m’avait recrutĂ© pour ces vacations de nuit ne m’avait pas prĂ©venu.  J’avais vingt ans. Je n’avais pas le choix. J’avais besoin de commencer Ă  gagner ma vie. A l’époque, je n’avais pas le permis de conduire et je prenais le train depuis chez mes parents. Cela me prenait environ 45 minutes pour faire le trajet et en marchant un petit peu depuis la gare d’Herblay. En prenant des trains gris qui me faisaient penser Ă  des trains de Blues.

 

Depuis, j’ai quittĂ© mes parents. J’ai dĂ©mĂ©nagĂ©. J’ai un emploi fixe dans lequel je travaille de jour comme de nuit.  Je me suis mariĂ©. Je suis devenu père. Et, j’ai mĂŞme appris Ă  conduire une voiture.  La gare de Herblay est dĂ©sormais Ă  moins d’une vingtaine de minutes en train par la ligne J depuis chez moi. Et, me rendre en voiture au dojo d’Herblay depuis mon domicile me prend Ă  peu près autant de temps.

 

Sans le faire exprès, en me rendant aux 24 heures du SamouraĂŻ, malgrĂ© la technologie de guidage aujourd’hui prĂ©sente sur tous nos smartphones, je me suis un peu trompĂ© d’itinĂ©raire ce samedi  Ă  un moment donnĂ©. Et, pour retrouver ma route vers le dojo d’Herblay, pour la première fois depuis Ă  peu près trente ans, je suis repassĂ© devant cet Ă©tablissement oĂą, Ă  20 ans, j’avais commencĂ© Ă  dĂ©couvrir le monde du travail ainsi que le travail de nuit en 19h/7h.

Lors des 24 heures du SamouraĂŻ, 2ème Ă©dition. On peut voir sur l’horloge qu’il est alors 23h45 ce samedi 20 Mai 2023. Photo©Franck.Unimon

 

 

CuriositĂ© et Ă©tonnement : Mon doudou

 

Je suis aussi allé à cette deuxième édition des 24 heures du Samouraï par curiosité.

Durant ces 24 heures, j’ai pratiqué avec plus d’une vingtaine de participants et participantes. J’ai d’ailleurs reconnu deux ou trois personnes que j’avais croisées quelques mois plus tôt au Centre Tissier, à Vincennes, lors du stage animé par Hino Akira Sensei et organisé par Léo Tamaki.

Hino Akira Sensei, en septembre de l’annĂ©e dernière au Cercle Tissier, Ă  Vincennes. Photo©Franck.Unimon

Certains des pratiquants que j’ai rencontrés lors des 24 heures du Samouraï (comme moi pour elles et eux) ont parfois voulu savoir ce que je pratiquais.

 

Je me suis Ă©tonnĂ© Ă  chercher mes mots et Ă  avoir un peu de mal Ă  rĂ©pondre. 

Maitre Jean-Pierre Vignau, à la SACD, rue Ballu, Paris, lors de la soirée qui lui a été consacrée ce mardi 25 avril 2023. Photo©️Franck.Unimon

Officiellement, je suis un très jeune et sporadique élève (depuis l’année dernière) de Jean-Pierre Vignau, Maitre en karaté Shotokan. J’ai aussi pratiqué le judo avec Pascal Fleury, aujourd’hui 6ème ou 7ème Dan de Judo, il y a plus de vingt ans.

 

Cependant, aujourd’hui, je crois être moins cloisonné qu’il y a plusieurs années.

 

Lors de ces 24 heures du SamouraĂŻ, j’ai dit que je faisais du karatĂ© pour rĂ©pondre quelque chose. Mais je crois que je suis moins dans cette « limite Â».  

 

« Avant Â», je me cantonnais Ă  une discipline et j’étais presque fier de m’emmitoufler dedans. Dans cette croyance et cette certitude que « ma Â» discipline Ă©tait la meilleure.

Bien-sûr, on a compris que c’était surtout moi qui, une fois que je marchais sur le tatami, me sentais meilleur que d’ordinaire. Une fois que je quittais kimono et tatami et que je retrouvais la vie courante, certaines difficultés de l’existence restaient insaisissables et résistaient terriblement à mes ippon.

 

Il y a plusieurs années, encouragé en cela par Pascal Fleury, mon prof de Judo, il m’était arrivé d’aller un peu au dojo d’été. Nous étions nombreux à être sur le tatami.

Un jour, un des intervenants dont j’ignore Ă©videmment le nom – vu que, lorsque l’on est ignorant, on l’est souvent Ă  peu près jusqu’à l’infini– nous avait tenu un petit discours. Beaucoup de judokas ceinture noire Ă©taient parmi nous.

 

L’ intervenant, très certainement ceinture noire de Judo et enseignant de judo,  nous avait exhortĂ© Ă  apprendre, aussi :

« A donner des coups de poing et des coups de pieds ! ».

Ce jour-lĂ , j’ai commencĂ© Ă  comprendre Ă  quel point j’étais restĂ©  beaucoup trop collĂ© au Judo qui Ă©tait devenu pour moi l’équivalent d’un doudou.

 

Depuis, bien-sûr, j’ai aussi compris qu’apprendre à donner des coups de poing et des coups de pied pour simplement en donner est une application très limitée des Arts martiaux ou de toute discipline de combat.

 

Non sens, enfermement et perte de goût

 

Pour diffĂ©rentes raisons, aveuglement, fainĂ©antise, facilitĂ© ou petites lâchetĂ©s, on apprend très vite Ă  croire que nous devons ou pouvons rester recroquevillĂ©s, enchevĂŞtrĂ©s, enfermĂ©s et cadenassĂ©s, dans un seul « style Â», une seule attitude et tournure d’esprit. Et que cette seule expĂ©rience suffira Ă  nous offrir le reste de l’univers et ce dont nous rĂŞvons ou avons besoin dans notre existence. Comme si l’Art Martial ou la discipline de combat que nous pratiquons Ă©tait notre lampe d’Aladin.

 

 

Je crois donc que je suis allĂ© Ă  ces 24 heures du SamouraĂŻ aussi pour me « soigner Â» un peu en quelque sorte de cette maladie de l’enfermement qui me captive et que je cultive passivement ou très activement. Consciemment ou inconsciemment, voire, souverainement. Et, cela, dans le plus grand calme ainsi qu’avec une certaine maitrise ou une maitrise quasi-totale.

De gauche à droite, à la fin des 24 heures du Samouraï, ce dimanche 21 Mai 2023 : Léo Tamaki, Aikido, Tanguy Le Vourch, Aikido, Issei Tamaki, Aikido, Bertrand Jaillet, Karaté Shotokan, Ronan Datausse, Penchak Silat, Didier Lorho, Karaté Uechi-Ryû, Lionel Froidure, Karaté et Eskrima, Didier Beddar, Wing Chun et Tai Chi. Manquent sur la photo Kang Jong Lee, Hapkimudo, David Pierre-Louis, Jiujitsu brésilien, Jérôme Kadian pour le Systema. Photo©Franck.Unimon

Les experts des 24 heures du Samouraï et Beyoncé

 

Les experts sont les mannequins ou les tops modèles d’un événement. Ce sont les Beyoncé des Arts martiaux, si l’on préfère.

 

Les experts présents lors des 24 heures du Samouraï m’ont aussi poussé à venir.

Didier Beddar, ce dimanche 21 Mai 2023, lors de l’avant dernière sĂ©ance de ces 24 heures du SamouraĂŻ pour un enseignement de Tai Chi. Il est alors entre 10h30 et 11h ce dimanche. Photo©Franck.Unimon

Je « connaissais Â» ou avais croisĂ© deux ou trois de ces experts. Mais je savais que c’était une très bonne occasion que de les rencontrer en aussi grand nombre, de façon aussi rapprochĂ©e, dans un temps limitĂ© et concentrĂ©. Car je le « sais Â» aussi, maintenant :

Tous ces experts sont souvent très occupés ainsi que passionnés par leur Art comme a pu le souligner Léo Tamaki à la fin de ces 24 heures du Samouraï. C’est donc une chance et une très grande et une très belle opportunité que d’avoir pu les approcher ou leur parler.

Lionel Froidure à gauche et Didier Beddar, ce dimanche 21 Mai 2023 à la fin des 24 heures du Samouraï. Photo©Franck.Unimon

A partir de ces quelques raisonnements, payer 85 euros, cela se justifiait facilement. Passer 24 heures à pratiquer, aussi. Pour aller au concert de Beyoncé ce week-end, le prix des places démarrait à 79,60 euros pour monter jusqu’à 200 euros.

Il ne reste dĂ©sormais plus de places pour ce concert de BeyoncĂ© sans doute depuis plusieurs semaines ou plusieurs mois. A moins de pouvoir recourir au système D : acheter des billets sur place le jour mĂŞme ou sur internet s’il est possible d’en trouver. Toutefois, car il faut bien savoir se changer les idĂ©es de temps en temps, si l’on tient Ă  profiter de ce concert du Renaissance World Tour de BeyoncĂ©, on peut aussi se rabattre sur les places au salon VIP Cocktail. Il en reste. Il semble qu’elles aient Ă©tĂ© mises en vente rĂ©cemment. Le prix par personne hors taxe est de 699 euros et de 838.80 euros TTC, une « ambiance festive » et « un cocktail dinatoire » sont inclus. Il faut savoir vivre avec son temps.

 

J’aurais bien-sûr aimé pouvoir aller découvrir Beyoncé en concert au stade de France. Mais j’aurais eu- aussi- beaucoup de mal à lâcher l’équivalent de cent euros pour aller assister de loin à un concert en étant aussi éloigné d’un(e) artiste sur scène. Même si je suis certain que l’organisation technique du concert de Beyoncé est exemplaire voire unique. Et que son concert sera vraisemblablement un très grand spectacle.

 

Un événement à taille humaine

Dimanche matin, un peu avant 8 heures, un ou une pratiquant(e ) récupère tandis que les musiciens traditionnels font résonner leurs tambours. Photo©Franck.Unimon

La normalité, c’est être raisonnable, mais aussi presque tout faire pour oublier que l’on va mourir. Et, entre les deux, éviter certaines aventures car elles exposent à des risques et demandent certains efforts qui paraissent hors normes ou impossibles.

 

Sans doute ai-je Ă©tĂ© un tout petit dĂ©raisonnable de comparer les experts martiaux de ce Week-end Ă  BeyoncĂ©. Car, comparer des experts en Arts Martiaux ou d’une discipline de combat Ă  une chanteuse amĂ©ricaine sensuelle et rythmĂ©e, mondialement connue et presque milliardaire, cela pourrait irriter quelques personnes. Puisque certaines et certains sont capables de consacrer une partie de leur activitĂ© Ă  se « clasher Â» par Ă©crit, sur youtube ou sur un rĂ©seau social, sans jamais se rencontrer et sans vĂ©ritablement prendre le temps de discuter, seulement parce qu’un commentaire publiĂ© sous une vidĂ©o leur a dĂ©plu.

 

Pourtant, si aux 24 heures du Samouraï, lors de ce week-end, il y avait eu Jackie Chan, Jet Li ou Donnie Yen (présent dans le dernier John Wick 4 sorti au cinéma il y a plusieurs semaines) il est probable que le prix du billet aurait augmenté mais aussi que l’événement aurait attiré bien plus de public y compris parmi des non-participants. Ainsi qu’un public en partie différent. Imaginons un peu ce que cela aurait donné si Bruce Lee était encore vivant et qu’il avait été présent aux 24 heures du Samouraï. Ou une des vedettes actuelles de MMA…

 

Avant de me rendre aux 24 heures du Samouraï, je me suis demandé qui j’allais rencontrer parmi les quelques personnes que j’ai déjà pu croiser aux cours de Jean-Pierre Vignau (qui compte parmi ses élèves des fidèles de vingt ans ou plus), ailleurs ou parmi mes collègues de travail que je sais portés sur les Arts martiaux ou les sports de combat.

 

Hé bien, je n’y ai rencontré personne parmi mes connaissances. J’apprendrai sans doute plus tard que telle personne n’avait pas entendu parler de l’événement.

 

Je crois que la donne aurait changĂ© s’il s’était trouvĂ© un Jackie Chan, un Jet Li ou un Donnie Yen. Parce qu’un Jackie Chan, un Jet Li, un Donnie Yen ou une « star Â» de la boxe ou du MMA, cela pousse très facilement dans les agendas personnels.

 

Mais l’évĂ©nement des 24 heures du SamouraĂŻ aurait alors pris une toute autre saveur. Car, BeyoncĂ© au stade de France, c’est dĂ©jĂ  une industrie. Economiquement, c’est très rentable. Car rien que le nom et l’image de BeyoncĂ© « draguent Â» très rapidement des milliers de personnes. BeyoncĂ© n’a pas de problème d’anonymat. Tout le monde ou beaucoup de monde sait très vite de qui il s’agit et elle ne fait pas encore partie de celles et ceux que l’on oublie. L’anonymat et l’oubli Ă©tant les signes avant coureurs frĂ©quents d’une mort au moins sociale.

 

 

On peut aimer se retrouver dans un très grand stade comme dans certains jeux gigantesques. Cela permet aussi très facilement d’oublier notre anonymat en vibrant avec des centaines et des milliers d’autres. Mais le vécu n’est pas le même. La foule et le spectacle l’emportent complètement sur l’individu présent à l’événement.

 

Les 24 heures du SamouraĂŻ ont sĂ»rement demandĂ© beaucoup de travail et beaucoup d’énergie Ă  l’équipe organisatrice. De façon dĂ©raisonnable et passionnĂ©e. « Mais Â» cela a Ă©tĂ© mis au service d’une expĂ©rience Ă  taille humaine. MĂŞme si au dojo d’Herblay, ce week-end, j’ai compris qu’il y avait eu deux fois plus de personnes que l’annĂ©e dernière Ă  Nantes lors de la première Ă©dition (Plus de 200 contre 100 personnes), ce qui a Ă©tĂ© vĂ©cu avait assez peu de points communs avec un spectacle ou une certaine forme de divertissement. MĂŞme si certaines dĂ©monstrations ont pu ĂŞtre spectaculaires et que ces heures passĂ©es ont pu ĂŞtre divertissantes ou très divertissantes.

Léo Tamaki, lors des 24 heures du Samouraï, 2ème édition. Photo©Franck.Unimon

 

L’ambiance de l’événement

 

Du reste, l’équipe organisatrice des 24 heures du SamouraĂŻ l’avait bien rappelĂ© :

 

Le but n’est pas de rester absolument sur le pont durant 24 heures. Mais d’être dans l’ambiance de l’événement. Que ce soit en se reposant lorsque l’on en éprouve le besoin, en allant se faire masser, en partant se restaurer ou en discutant avec d’autres personnes venues vivre cet événement.

Lors des 24 heures du Samouraï, 2ème édition. Photo©Franck.Unimon

Et, à la fin des 24 heures du Samouraï, lorsque Léo Tamaki prendra la parole devant nous tous, en présence des experts présents, ce sera aussi pour nous dire qu’ils ont créé cet événement car, plus jeunes, ils auraient aimé qu’un tel événement existe pour eux.

 

 

En y repensant, ces 24 heures ont leur intĂ©rĂŞt pour au moins deux autres raisons :

 

Une expérience, pour qu’elle soit marquante, doit avoir un effet suffisamment durable. Pour cela, il faut qu’elle soit suffisamment intense et qu’on l’ait vécue un certain temps.

Dimanche matin, lors des 24 heures du Samouraï. Photo©Franck.Unimon

On pourrait ajouter la nécessité de la répétition de l’expérience pour que celle-ci nous marque. Pour contrecarrer ou renouveler, un peu, notre expérience de notre vie quotidienne, il nous faut bien un événement qui nous sorte de ce que nous avons l’habitude de faire ou de vivre dans la durée, en intensité mais aussi de ce que nous faisons d’habitude.

 

L’autre raison a à voir avec les uchideshi.

Léo Tamaki, en pleine démonstration avec un de ses élèves. Photo©Franck.Unimon

En « restant Â» 24 heures dans ce bain martial, en vivant sur place de façon quasi-autonome, pour peu que l’on se soit dĂ©branchĂ© de son tĂ©lĂ©phone portable et d’internet durant ces 24 heures (ce que j’ai fait), je crois que l’on peut entrevoir un aperçu de la vie des uchideshi. Et les bĂ©nĂ©voles de l’évĂ©nement, en particulier celles et ceux qui ont pratiquĂ© par ailleurs lors des 24 heures du SamouraĂŻ (en grande partie, j’ai l’impression, des Ă©lèves de Tanguy Le Vourch, Issei et LĂ©o Tamaki) se sont ainsi mis dans les sillons des uchideshi.

 

Impressions

 

24 heures, cela peut sembler long ou très long. Pourtant, les 12 premières heures sont passées très vite.

 

 

Pour ma part, lors de ces 24 heures du Samouraï, il y a eu des interventions qui sont passées rapidement ou plus rapidement que d’autres. Et, deux ou trois autres, lors desquelles j’ai dû fournir plus d’efforts afin de maintenir mon attention et mon implication. Et où le temps m’est apparu plus long.

 

Je crois que certaines disciplines nous flattent plus facilement parce-que leurs gestes sont plus proches de nous et sont plus rapides Ă  « obtenir Â» mais aussi Ă  rĂ©pĂ©ter. Mais aussi parce qu’elles nous semblent directement et visiblement plus « efficaces Â».

 

Je crois que nous avons cette sensation parce-que ces disciplines reposent sur des actions musculaires et explosives assez simples et qu’elles nous donnent le sentiment d’être aussi puissants que des taureaux ou des machines.

Par contre, lorsque cela devient plus subtil, qu’il nous faut sentir certaines poussées ou certaines forces plus profondes, contradictoires ou plus intimes peut-être, cela nous demande des efforts auxquels nous ne sommes pas habitués ou qui nous dérangent parce-que cela nous demande plus de temps ou plus de maturité émotionnelle peut-être.

 

Ces disciplines présentées devant nous durant ces 24 heures reposent sur beaucoup de fondements communs. Mais leurs formes et leurs présentations sont différentes. Et c’est ce qui va nous attirer, nous barber, nous décourager ou nous repousser.

 

J’ai bien vu comment nous étions un certain nombre à être à la peine lors des interventions de Didier Beddar que ce soit en Kung Fu Wing Chun ou en Tai Chi.

Didier Beddar, le virtuose, entouré de deux de ses assistants, à la fin de la séance de Tai Chi, ce dimanche matin vers 11h aux 24 heures du Samouraï. Photo©Franck.Unimon

J’étais alors l’équivalent d’un lourdaud saccadé, bruyant et poussif qui saccageait l’espace autour de lui alors que j’essayais seulement de marcher tandis que Didier Beddar et ses assistants étaient des ballerines pleines de grâce.

Lorsque j’avais dĂ©butĂ© le judo il y a quelques annĂ©es, j’avais eu la gratification assez immĂ©diate de « rĂ©ussir Â». Le Kung Fu et le Tai Chi m’ont fait exactement l’effet inverse. MalgrĂ© leur intĂ©rĂŞt Ă©vident, ils m’ont adressĂ© un reflet de moi-mĂŞme peu valorisant.

 

J’ai aussi eu l’impression que l’enseignement de Didier Beddar fait particulièrement appel au Yin et au Yang, au féminin et au masculin, alors que dans le Penchak Silat, le Hapkimudo, le karaté ou dans le Sistema, on peut n’être « que » bourrin.

 

Ou « masculin Â». Ou « viril Â». Ou « macho Â».

 

Arrivera un moment oĂą passer en force finira pas nous limiter ou nous rigidifier mais on peut  arriver Ă  « y faire des choses Â» tout de suite et durant un certain temps. C’est efficace. Ou c’est plus saccadĂ©. Plus heurtĂ©. Plus frontal.

 

C’est un peu comme, dans la pratique de l’apnée ou de la plongée, utiliser la méthode vasalva pour descendre en profondeur. On est très volontaire. On s’impose. C’est efficace jusqu’à une certaine profondeur ainsi que pendant un certain nombre d’années. Mais c’est aussi plus traumatisant pour l’organisme même si on ne le ressent pas tout de suite.

 

Lors des 24 heures du Samouraï, j’ai croisé un pratiquant qui a été un moment mon partenaire qui m’a dit qu’étant donné son âge, la cinquantaine, le karaté Shotokan commençait à être dur pour lui. J’ai compris que la brutalité qu’il s’imposait au travers du karaté shotokan depuis des années commençait à avoir raison de lui.

 

 

Jusqu’à maintenant, je n’avais pas pensĂ© aux Arts martiaux comme une possible expĂ©rience ou rĂ©flexion sur le « genre Â» masculin et fĂ©minin, sur la façon de l’habiter de façon « masculino-viriliste Â» et/ou de façon « fĂ©mino-douce Â». Bien-sĂ»r, voir la fĂ©minitĂ© comme le versant de la douceur et la masculinitĂ© comme celui de la brutalitĂ© est un clichĂ©. Mais ce sont des repères pour dire que s’obliger Ă  faire ou Ă  passer en force parce-que l’on est un homme lorsque l’on pratique est une erreur très commune. Et, j’ai trouvĂ© que parmi les diffĂ©rents experts, Didier Beddar Ă©tait celui qui incarnait le mieux ou le plus cette synthèse du fĂ©minin et du masculin dans son expression martiale. Expression martiale que je n’ai aucune difficultĂ© Ă  percevoir comme très efficace dans des conditions de combat.

Didier Beddar et ses deux assistants, ce dimanche matin. Photo©Franck.Unimon

Quelques notes sur les sĂ©ances :

 

J’ai pris quelques notes à la volée après certaines des séances auxquelles j’ai participé lors de ces 24 heures du Samouraï. C’était une façon, pour moi, de conserver des impressions que l’on oublie souvent par la suite.

 

J’ai beaucoup aimé les interventions de Kang Jong Lee, expert en hapkimudo. Ses formulations et son humour, aussi. D’ailleurs, les experts, lors de ces 24 heures du Samouraï, ont souvent su faire concilier l’humour avec leurs démonstrations ce qui a pu contribuer à désacraliser un certain niveau d’exigence.

 

J’ai été amusé de voir Kang Jong Lee avec son pantalon tendance pattes d’éléphant. Il y a sans doute une raison à cela. Mais je n’ai pas pensé à le lui demander. Je me dis que c’est peut-être une façon de dissimuler les déplacements de ses pieds.

 

Chez Kang Jong Lee, j’ai aussi noté sa formulation :

«  Le monde a changĂ© ».

Pour dire que lors d’un affrontement, la situation évolue très vite et que ce qui aurait pu marcher quelques secondes ou quelques dixièmes de secondes auparavant est devenu obsolète. Et qu’il faut s’adapter, trouver autre chose pour parvenir à la résolution du conflit.

« Accepter Â» a aussi Ă©tĂ© employĂ© par Kang Jong Lee. Soit, au lieu de rĂ©sister ou de forcer, de se servir ou de suivre l’action de l’autre.

Kang Jong Lee enseigne à divers endroits, entre autres au gymnase le Patriarche, rue Monge mais aussi dans le 16èmearrondissement, toujours à Paris.

 

JĂ©rome Kadian, pour le systema, juste après Kang Jong Lee, m’a beaucoup fait plaisir lorsqu’il nous a parlĂ© de la respiration. Depuis  ma formation au massage bien-ĂŞtre et ma pratique amateur de l’apnĂ©e en club, je suis devenu assez sensible Ă  ce qui touche la respiration. Ceinture jaune de karatĂ© shotokan avec Jean-Pierre Vignau, donc niveau dĂ©butant, lors de certains mouvements de mes katas que je rĂ©pète, je me sens gĂŞnĂ©. Car je n’ai pas encore trouvĂ© la bonne façon, le bon moment, pour respirer, expirer ou arrĂŞter de respirer.

 

La respiration est l’acte le plus important et le plus profond que nous faisons. Pourtant son apprentissage fait partie des apprentissages les plus souvent nĂ©gligĂ©s. Peut-ĂŞtre est-ce parce qu’en plus d’être un acte, la respiration est une fonction qui nous est « donnĂ©e Â» dès la naissance et qu’elle est automatique. Donc acquise.  

J’ai aussi notĂ© avec JĂ©rome Kadian :

Expirer quand on reçoit un coup. Accepter le contact. Travailler sur les appuis. Pivot du bassin. Plier les genoux.

Benjamin, responsable de l’Ă©cole Kinshikai AĂŻkido, Belgique. Photo©Franck.Unimon

Jérome Kadian nous a aussi appris que tomber était une de nos plus grandes peurs. Et qu’il fallait donc apprendre à tomber sans se faire mal.

 

Malheureusement, je n’ai pas pu prendre de photo de Jérome Kadian, qui enseigne à Paris, rue Bleue.

 

« Vous êtes armés ? » a commencé Lionel Froidure.

 

Lionel Froidure se trouve derrière Léo Tamaki en train de souhaiter un bon anniversaire à une des participantes. Photo©Franck.Unimon

Lionel Froidure nous a expliquĂ© qu’aux Philippines, ils ne parlaient pas de techniques mais de principes. Il a insistĂ© sur la nĂ©cessitĂ© de se « bâtir une mĂ©moire Â» lorsque l’on pratique. De prendre le temps d’apprendre Ă  se servir d’une arme avant d’en dĂ©couvrir une autre. De garder le contact avec son adversaire lors du combat.

 

« La peur, ça se travaille Â».

 

L’Arnis m’est apparu très technique ou exigeant de moi des efforts certains d’apprentissage.

 

De 19h30 Ă  20h45, Didier Beddar est intervenu en expert Wing Chun.

Au centre, Didier Beddar. Photo©Franck.Unimon

« En Wing Chun, on travaille sur les rĂ©flexes Â». Didier Beddar a soulignĂ© qu’il s’agissait de travailler relâchĂ©. Il a prĂ©sentĂ© le Wing Chun comme un Art « tout en dĂ©viations Â».

 

Lorsque l’on est à distance de pied, contrôle visuel du genou de son adversaire. Lorsque l’on est à distance de poignet, contrôle visuel du coude de son adversaire.

 

Didier Beddar nous a parlé du triangle pour créer le déséquilibre chez l’autre. Il nous a aussi parlé du centre. Garder ou protéger notre centre. L’importance du contact physique permanent pour connaître le mouvement de son adversaire. Mais aussi de notre colonne vertébrale. La garder droite.

 

 

Avec l’Arnis, le Kung Fu Wing Chun m’est apparu comme l’autre discipline la plus technique à assimiler. C’étaient pour moi deux disciplines qui ne se donnent pas facilement en prime abord. Plus tard est arrivée la séance Taï Chi, le lendemain matin, avec Didier Beddar également. Et, là, j’ai parfois eu l’impression d’être dans une expérience métaphysique lorsqu’il nous a parlé de l’importance de garder ou de protéger notre centre mais aussi de la nécessité d’entraîner son adversaire vers le triangle.

Même si j’ai retenu grâce à Didier Beddar que le gros orteil est en quelque sorte l’appendice de la motricité et le petit doigt de pied, celui de la stabilité.

 

De 0h15 Ă  1h30, Ronan Datausse est intervenu comme expert en Penchak Silat. C’était assez « drĂ´le Â», de manière dĂ©calĂ©e, de nous entraĂ®ner Ă  une heure du matin Ă  rĂ©aliser des torsions cervicales en cas d’agression.

Ronan Datausse est le deuxième en partant de la droite. Le premier est Didier Lorho. Après Ronan Datausse, vers la gauche, Bertrand Jaillet, Issei Tamaki et Tanguy Le Vourch. Photo©Franck.Unimon

Ronan Datausse nous a dit que nous devions imaginer que nous Ă©tions des araignĂ©es tissant notre toile autour de notre proie, notre agresseur qui, au dĂ©part, nous avait pris « pour un agneau Â».

Ronan Datausse nous a appris qu’au départ, le Penchak Silat était un art de guerre appris par les Indonésiens qui ont des petits gabarits. Le Penchak Silat, originellement, est un art de destruction.

Ronan Datausse nous a aussi fait travailler les frappes multidirectionnelles. Cela m’a beaucoup plu.

 

Léo Tamaki, à 1h45, dans la nuit de samedi à dimanche aux 24 heures du Samouraï. Photo©Franck.Unimon

Léo Tamaki est intervenu de 1h45 à 3 heures. Je n’ai plus rien noté à partir de ce moment-là mais je vais écrire de tête.

 

Ce crĂ©neau horaire est un horaire tranchant. Peut-ĂŞtre le plus charnière. Nous entrons alors dans la deuxième partie de ces 24 heures. En plus, le Penchak Silat « de » Ronan Datausse a Ă©tĂ© dynamique et aussi « ludique ». L’ AĂŻkido, c’est une autre allure. C’est donc quitte. Ou double. Soit on s’ennuie, soit on se laisse entraĂ®ner. 

 

Léo Tamaki a été permanent et pédagogique dès le coup de gong. Chaque séance débutait par un coup de gong. J’ai même eu l’impression que Léo Tamaki avait fait retentir le gong une à deux minutes plus tôt. Ensuite, Léo a pris le train en main.

Il y avait du rythme. Des séquences d’entraînement de 2 à 4 minutes. De la martialité et de l’humour. La nuit et le sommeil ont semblé sans prise sur lui. J’ai réentendu parler de

« dissociation Â». Mais aussi :

« Recommencez, s’il vous plait Â». Ce qui fait partie de ses signatures.

Je tenais comme je pouvais le long bâton qui m’avait Ă©tĂ© prĂŞtĂ© face Ă  G, plus avancĂ© que moi en AĂŻkido lorsque LĂ©o Tamaki est passĂ© pour me montrer. Il s’agissait de laisser la gravitĂ© agir sur le bâton sans mettre de force. Je n’ai rien vu venir. Mon bâton a volĂ© hors de mes mains trois ou quatre mètres plus loin  comme si je ne l’avais pas tenu.

 

Un peu plus tard, il convenait de « couper Â» son partenaire avec le tranchant de la main au niveau de ses deux poignets qu’il tenait joints devant nous. LĂ©o Tamaki est repassĂ©. Il m’a montrĂ© sur mes poignets. Il n’a pas mis (beaucoup) de force. J’ai senti la coupe. Le temps de me relever, il Ă©tait dĂ©jĂ  Ă  nouveau parti.

 

L’intervention était variée, attractive. Même si, pour moi, l’Aïkido a fait partie des disciplines les plus délicates techniquement de ces 24 heures du Samouraï avec le Wing Chun, l’Arnis….et le Tai Chi dispensé par Didier Beddar.

 

C’était bien pensé de clôturer ces 24 heures par le Tai Chi Quan et l’Aïkido.

Sortie de Dojo :

 

A l’issue des 24 heures, 80 personnes avaient participé aux 16 séances proposées, glanant les quatre bracelets. L’année dernière, à Nantes, seules 10 personnes y étaient parvenues. Les 80 personnes ont été applaudies.

 

Quant à moi, arrivé aux 24 heures du Samouraï avec un point de contracture à la cuisse et désobéissant aux recommandations de mon kiné (« Cela revient à jeter une pièce en l’air »), j’ai participé à 11 séances ratant d’une séance le troisième bracelet que j’aurais bien aimé obtenir. Je n’avais pas l’ambition de faire toutes les séances ( 16).

« Tous les voyants sont au vert » m’a dit mon kinĂ© il y a quelques heures Ă  propos de ma cuisse. Je n’ai pas- encore- osĂ© lui dire que j’avais participĂ© ce week-end aux 24 heures du SamouraĂŻ.

Au début des 24 heures du Samouraï, j’ai cru que je n’obtiendrais même pas le bracelet vert, ce qui correspond à quatre séances. Mais, finalement, cela tend à démontrer que les soins apportés par mon kiné sont bons et qu’une pratique raisonnable des Arts martiaux est possible sans se blesser. Je me suis par exemple abstenu d’essayer de faire les déplacements toniques, presque sautés, proposés par Bertrand Jaillet en karaté shotokan. J’ai aussi laissé passer la première séance de Ju-Jitsu brésilien avec David Pierre-Louis en pensant, à tort, aux randoris.

Et, je dormais lors de sa seconde séance. Car entre 4h40 et 7h50, après une douche et une seconde séance de shiatsu (séances de shiatsu qui ont aussi très certainement aidé à la prévention de blessures supplémentaires), j’ai dormi dans mon sac de couchage sur un coin du tatami comme deux ou trois autres, la petite salle de repos étant pleine lorsque je m’y suis présenté.

A partir d’une certaine heure, la salle de repos Ă©tant pleine, on se couchait lĂ  oĂą l’on pouvait dans le dojo. J’ai un moment enviĂ© ces deux personnes qui avaient su trouver un coin. Puis, finalement, non loin de lĂ , une place sur le tatamis, Ă  cĂ´tĂ© du stand de shiatsu m’a très bien convenu pour m’endormir dans mon sac de couchage, vĂŞtu de mon tout nouveau kimono bleu. Photo©Franck.Unimon

 

 

En sortant du dojo plus de 24 heures après y être entré, j’ai été moins décalé que ce à quoi je m’attendais.

 

Depuis, je me demande ce que cela a changé ou contribué à changer en moi.

 

Même si je suis loin d’avoir assimilé tout ce que j’ai vu, vécu, entendu ou essayé de pratiquer, commençons d’abord par dire que je suis content d’avoir vécu l’expérience.

 

J’avais envisagé d’écrire sur cet événement bien plus tard. A la lecture de cet article, rédigé finalement beaucoup plus rapidement que prévu, on pourra mesurer comme les 24 heures du Samouraï m’ont inspiré.

 

Concernant la « performance Â» des 24 heures, si je n’avais pas de doute  quant au fait que trois heures de sommeil me conviendraient pour me remettre Ă  un moment donnĂ© (comme d’autres, j’ai dormi de manière immĂ©diate et compacte une fois couchĂ© sur le tatami malgrĂ© l’animation et les stimulations environnantes), je n’avais pas d’idĂ©e prĂ©cise quant Ă  ma capacitĂ© de rĂ©sistance physique et mentale Ă  la fatigue. C’était bien de pouvoir pratiquer malgrĂ© ou avec la fatigue tant mentale que physique. C’était Ă©videmment la première fois que je pratiquais autant en si peu de temps.

Je pourrais faire un trait d’humour et Ă©crire que, depuis les 24 heures du SamouraĂŻ, j’ai surtout l’impression de mieux comprendre le crĂ©ole haĂŻtien. Mais le fait est qu’après avoir pris part Ă  autant de « sĂ©ances Â» (sans combats) martiales sans me faire mal, je me dis que je pourrais quand mĂŞme prendre le temps de faire le nĂ©cessaire pour obtenir et « donner Â» Ă  Pascal, mon prof de judo, cette ceinture noire qu’il attend de moi depuis une vingtaine d’annĂ©es. La ceinture noire n’étant qu’un dĂ©but, comme il l’a rappelĂ©, et non une fin en soi.

Il me reste d’autres photos ( sur lesquelles, notamment, figurent Kang Jong Lee et David Pierre-Louis ) que j’aurais bien voulu insĂ©rer dans cet article. Mais, pour l’instant, je n’ai pas rĂ©ussi Ă  le faire malgrĂ© diverses tentatives pour des raisons techniques qui me dĂ©passent. Des histoires de codes et de tĂ©lĂ©chargement de fichier. J’ai optĂ© pour rĂ©diger cet article et le publier maintenant tel quel quitte Ă  le complĂ©ter plus tard. Car, ce jeudi, c’est Ă  dire dans quelques heures, je pars quelques jours Ă  Camaret, en Bretagne, avec mon club d’apnĂ©e, afin de continuer Ă  m’initier Ă  la chasse sous-marine. 

Il est probable que le concert de Beyoncé sera passé lorsque je parviendrai, enfin, à rajouter ces autres photos des 24 heures du Samouraï.

Avec Léo Tamaki, ce dimanche 21 Mai 2023, à la fin des 24 heures du Samouraï.

Franck Unimon, ce jeudi 25 mai 2023.

 

 

 

 

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Avant les 24 heures du SamouraĂŻ au dojo d’Herblay ce 20 et ce 21 mai 2023

Avant les 24 heures du Samouraï au dojo d’Herblay ce 20 et 21 Mai 2023.

 

Demain, Ă  midi, dĂ©butent les 24 heures du SamouraĂŻ. Il y a environ quarante huit heures, nous avons reçu un mail de l’équipe des 24 heures du SamouraĂŻ pour nous donner quelques informations et nous faire quelques recommandations. Cela donne peut-ĂŞtre un cĂ´tĂ© secret Ă  l’évĂ©nement, unique en France. Pourtant, il n’y a rien de secret pour quiconque s’attarde un peu sur ce qu’il y a de relatif aux Arts Martiaux. L’annĂ©e dernière, les 24 heures du SamouraĂŻ s’étaient dĂ©roulĂ©es Ă  Nantes. Dans le magazine Yashima de ce mois de mars 2023, Tanguy Le Vourch’ en raconte la genèse, au sein de l’école Kishinkai AĂŻkido d’après une idĂ©e de LĂ©o Tamaki.

 

Pour cette deuxième Ă©dition des 24 heures du SamouraĂŻ qui se dĂ©rouleront dans le dojo d’Herblay oĂą enseigne Issei Tamaki, dans le Val d’Oise, seront prĂ©sents les experts suivants :

 

Didier Beddar pour le Wing Chun et le Tai Chi.

Kang Jong Lee pour le Hapkimudo.

Lionel Froidure pour le karaté et l’Eskrima.

David Pierre-Louis pour le Jiujitsu brésilien.

Jérôme Kadian pour le Systema.

Didier Lorho pour le Uechi-RyĂ».

Ronan Datausse pour le Penchak Silat.

Léo Tamaki pour l’Aikido.

Bertrand Jaillet pour le Shotokan.

 

Un stand de pratiquants de Shiatsu sera également présent.

 

J’ai dĂ©jĂ  croisĂ© ou rencontrĂ© deux ou trois de ces experts ( LĂ©o Tamaki (Dojo 5) , David Pierre-Louis, Didier Beddar ( Marcher jusqu’Ă  un Maitre de Kung Fu Wing Chun traditionnel ). Je vais dĂ©couvrir les autres. Le judo est la discipline que je « connais Â» le mieux. Mais je n’ai pas pratiquĂ© depuis très longtemps. Lorsque j’ai appelĂ© mon professeur, Pascal Fleury, cette semaine, celui-ci m’a Ă  nouveau « reprochĂ© Â» de ne toujours pas avoir passĂ© ma ceinture noire. Pascal m’a aussi rappelĂ© ce temps oĂą, il y a plusieurs annĂ©es, LĂ©o Tamaki venait enseigner l’AĂŻkido, rue Michel Lecomte, lĂ  oĂą j’ai passĂ© mes ceintures de judo dans les annĂ©es 90.

Je suis aussi un très jeune Ă©lève- irrĂ©gulier- de Maitre Jean-Pierre Vignau en karatĂ© Shotokan. ( Maitre Jean-Pierre Vignau Ă  la SACD, rue Ballu, Paris, ce mardi 25 avril 2023). 

Ces dernières semaines, je suis aussi devenu un pratiquant irrégulier de mon blog. Mais je ne pouvais pas laisser passer cet article la veille des 24 heures du Samouraï.

Demain matin, les inscriptions commenceront Ă  10h45. J’ai dĂ©jĂ  mon billet d’entrĂ©e. La cĂ©rĂ©monie d’ouverture aura lieu Ă  11h45. Il faudra ĂŞtre prĂŞt et en kimono. PrĂ©voir plusieurs kimonos pour des raisons d’hygiène. Je suis allĂ© en acheter un second ce matin. Bien s’hydrater durant ces 24 heures. J’ai prĂ©vu ce qu’il faut et un stand de restauration est prĂ©vu sur place. Amener son nĂ©cessaire de toilette pour se rafraĂ®chir. Mais aussi son sac de couchage et un oreiller. Une aire de repos est prĂ©vue dans le dojo.

 

Les 24 heures du Samouraï sont ouvertes à toute personne curieuse, de bonne volonté et en suffisamment bonne condition physique quelle que soit son niveau ou sa discipline de pratique.

 

Je me demande si je suis « prĂŞt Â».  Des sĂ©ances d’1h15 environ pendant 24 heures. Avec dix Ă  quinze minutes de pause entre chaque intervention.

Je n’avais pas prĂ©vu de tout « faire Â» de toute façon. Mais, cette semaine, mon kinĂ© m’a rĂ©pondu que participer Ă  cet Ă©vĂ©nement revenait pour moi Ă  « lancer une pièce en l’air Â». J’ai une contracture Ă  la cuisse. Le vĂ©lotaf, je peux, l’apnĂ©e ( hors compĂ©tition), je peux. Mais pas les Arts Martiaux ou les sports de combat qui exigent ou peuvent exiger une disponibilitĂ© soudaine et totale en termes d’engagement physique et mental.

 

J’ai encore le choix. Renoncer. Forcer. Regarder. Ou me faufiler.

 

Tout à l’heure, j’ai changé de sac. Après ma sieste, je me suis avisé que je pouvais mieux faire en matière de rangement.

J’en ai pris un autre pour disposer mes kimonos. S’économiser autant que possible. Disposer ses affaires de la façon la plus pratique. PrĂ©voir ce qu’il faut mais sans pour autant trop s’encombrer. Un vrai voyage ! Mes appareils photos, deux sacs. Je vais sans doute emmener une petite glacière rigide afin d’y mettre bouteille d’eau, thermos et un peu de nourriture. Cela ne m’empĂŞchera pas d’aller faire un tour au stand de restauration pour avaler ou manger quelque chose de chaud. Et pour discuter.

 

L’équipe des 24 heures du SamouraĂŻ nous a appris par mail qu’il Ă©tait prĂ©vu des retards sur la ligne de train de banlieue qui dessert Herblay depuis Paris. Pour une fois, en qualitĂ© de banlieusard, je suis favorisĂ© :

J’habite à Argenteuil, pas très loin. Et je viendrai avec ma voiture. J’ai repéré l’endroit il y a plus d’un mois.

 

Je m’attends Ă  ce qu’il y ait beaucoup de monde. Plus d’une centaine de personnes puisque le dojo est grand ( 750 mètres carrĂ©s ?). De Paris, de banlieue et de province.

Dans cet univers gĂ©nĂ©ralement très masculin, je me demande, sans arrière pensĂ©e particulière, dans quelle proportion il y aura des femmes. Je dirais : 20 pour cent. Et, je me hasarde Ă  croire que l’avenir des Arts martiaux serait peut-ĂŞtre davantage assurĂ© s’il y avait plus de pratiquantes et d’expertes fĂ©minines dans ces domaines. Pour aller acheter mon second kimono, ce matin, j’ai proposĂ© Ă  ma fille de venir avec moi Ă  Paris. Elle a spontanĂ©ment acceptĂ©. J’en suis très content. Pour la première fois, j’ai rompu avec la tradition en achetant un kimono bleu. 85 euros.

 

Demain, le dojo d’Herblay deviendra un couvent martial où nous essaierons de nous extraire du cratère de nos enchevêtrements. Nous chercherons le merveilleux voire un monde qui a disparu et nous tenterons de lui réattribuer un espace dans nos corps et dans nos rêves.

 

Franck Unimon, ce vendredi 19 Mai 2023.

 

 

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Maitre Jean-Pierre Vignau Ă  la SACD, rue Ballu, Paris, ce mardi 25 avril 2023

Maitre Jean-Pierre Vignau, ce mardi 25 avril 2023, à la SACD, rue Ballu, Paris. Photo©️Franck.Unimon

Maitre Jean-Pierre Vignau Ă  la SACD, rue Ballu, Paris, ce mardi 25 avril 2023.

 

 

On trouve chez un Maitre ce que l’on croit et ce que l’on craint.

 

On trouve chez un Maitre ce que l’on cherche, ce que l’on a perdu ou égaré.

 

Jean-Pierre Vignau, président de l’I.B.A France, 9ème dan I.B.A de Karaté Shotokan, 6ème dan I.B.A d’Atemi-jitsu (Self-défense), 3ème dan I.B.A de Kobudo, 2ème dan I.B.A de judo et d’Aïkido, pour moi, fait partie de ces Maitres.

 

Peut-être que les apparences ou la forme de cet article sont contre lui et contre moi, son auteur. Et qu’en commençant la lecture de cet article, on se dit qu’il s’agit d’un exercice de philo ou d’une révision avant les épreuves du Bac dans quelques mois.

 

Peut-être aussi que l’on peut se dire que c’est un article de plus à ranger dans la catégorie de la branlette intellectuelle. Alors que ce l’on que l’on veut, c’est surtout, et rapidement, et toujours, plus d’efficacité, du concret et des techniques qui marchent tout de suite, tout le temps et à volonté.

 

Pas du bla-bla.

 

Mais je crois qu’il faut quand même commencer cet article comme ça. Et que c’est surtout de la vie, de notre vie, de nos choix, de notre santé mentale et physique, de nos décisions et de nos libertés dont je parle.

 

Et dont les Arts Martiaux, toujours, nous parlent.

 

Jean-Pierre Vignau ne dira rien à beaucoup de personnes aujourd’hui, en 2023. Moi-même, il y a encore trois ans, je ne connaissais pas Jean-Pierre Vignau, Maitre d’Arts Martiaux, 78 ou 79 ans cette année.

 

Il y a encore trois ans, je ne connaissais pas Jean-Pierre Vignau malgré le fait que depuis plus d’une trentaine d’années, j’ai souvent été attiré par les Arts Martiaux sous plusieurs de leurs représentations ou expériences. Sur un tatamis, au cinéma, dans mes lectures ou même dans certains de mes voyages (le Japon en 1999).

Enfant, comme beaucoup, j’avais Ă©tĂ© fascinĂ© par Bruce Lee. Evidemment. Et, j’avais « fait Â» un peu de karatĂ© jusqu’à la ceinture verte. J’avais 12 ou 13 ans. J’étais assez appliquĂ©, je connaissais mes katas. Puis, j’ai arrĂŞtĂ©. Sans doute parce-que, pour moi, alors, faire du karatĂ© ou de la boxe anglaise, c’était avant tout apprendre Ă  se dĂ©fendre, Ă  donner des coups de pied et des coups de poing. Apprendre Ă  devenir « fort Â» et viril. A devenir un Homme.

 

A ne pas avoir peur. A n’avoir-jamais- peur de rien.

 

Peu m’importait la diffĂ©rence qu’il pouvait y avoir entre du Kung Fu et du karatĂ©. Le karatĂ© Ă©tait ce qui me parlait le plus ou ce qui Ă©tait connu de moi, lĂ  oĂą je vivais alors, avec mes parents, dans une citĂ© Ă  Nanterre. Dans un immeuble HLM de 18 Ă©tages. Si nous avions vĂ©cu Ă  l’époque dans le 13ème arrondissement de Paris, peut-ĂŞtre aurais-je pu mieux commencer Ă   faire la diffĂ©rence entre le Kung Fu et du KaratĂ©.

 

Puis, grâce à un concours de circonstances, après le karaté, plus tard, il y a eu la pratique du Judo pendant une dizaine d’années. Un sport de combat découvert à l’université de Nanterre. Un peu par hasard. Une histoire d’horaires de cours qui m’a empêché d’aller plutôt découvrir la boxe anglaise comme je le souhaitais.

Le judo m’avait rapidement flattĂ©. Parce-que la nouveautĂ© et mes aptitudes athlĂ©tiques, toniques, explosives et instinctives, enfin, me permettaient d’être « bon Â». De « battre Â» des pratiquants plus expĂ©rimentĂ©s que moi. Ou de leur donner du mal. Et puis, je pouvais, Ă  nouveau, m’entraĂ®ner rĂ©gulièrement sans me blesser. Sans me donner ces contractures aux ischio-jambiers que le sprint, en athlĂ©tisme, m’avait « laissĂ©es Â».

 

Beaucoup de pratiquants d’un sport ou d’une activitĂ© physique ou martiale ont dans leur pratique ou leurs « bagages Â» des cicatrices liĂ©es Ă  l’engagement de leur corps et de leur volontĂ© dans leur activitĂ© sportive ou physique prĂ©fĂ©rĂ©e. Une activitĂ© ou, souvent, ils se sont constituĂ©s des amitiĂ©s, des amours ou des inimitiĂ©s passionnelles, profondes ou dĂ©finitives.

 

Ces cicatrices, liées à une pratique répétée ou intensive, sont souvent vécues comme des injustices ou, au contraire, regardées avec fierté comme des blessures de guerrier. Des blessures de combattant. Des blessures de samouraï.

 

Il faut du temps pour comprendre qu’un certain nombre de ces blessures physiques, mais aussi morales, prĂ©datrices de notre temps et de notre organisme ou de nos relations, ne sont pas aussi nĂ©cessaires que l’on a besoin de le croire afin de devenir « bon Â» ou le « meilleur Â» ou le « champion Â» que l’on aspire Ă  ĂŞtre Ă  nos yeux ou dans le regard des autres.

 

Comme je ne l’avais pas encore compris en pratiquant le judo, j’ai continuĂ© de me blesser. Ou j’ai recommencĂ© Ă  me blesser en «faisant Â» du judo.

 

Et puis, j’en ai eu assez du Judo. J’ai fait un petit peu de Ju-Jitsu brésilien. A l’époque, les frères Gracie étaient la référence ultime du Ju-Jitsu brésilien.

 

Puis, quelques annĂ©es plus tard, j’ai « fait Â» un petit peu de boxe française oĂą, lĂ , je me suis cette fois rompu le tendon d’achille lors d’un exercice tout simple. Après ça, pendant quelques annĂ©es, j’ai arrĂŞtĂ© tout ce qui pouvait ressembler Ă  la pratique du combat ou d’un Art martial. Tout en continuant bien-sĂ»r, de temps Ă  autre, Ă  lire ou Ă  regarder ici ou lĂ , ce qui pouvait avoir trait aux Arts Martiaux, au combat etc…

Photo prise à Paris en septembre 2020. ©️Franck.Unimon

Puis sont arrivés la pandémie du Covid en 2020 et les confinements. Le passe sanitaire, la restriction de nos sorties, de nos déplacements géographiques ou kilométriques. L’angoisse et la peur massive de notre anéantissement proche ou quasi-immédiat.

 

J’ai fait partie des personnes dont la profession a Ă©tĂ© jugĂ©e comme « essentielle Â». Je suis infirmier en pĂ©dopsychiatrie et en psychiatrie depuis des annĂ©es. J’ai donc continuĂ© Ă  travailler durant la pandĂ©mie. D’abord sans masque et sans protection matĂ©rielle rĂ©elle. Mais aussi, au dĂ©but, sans vaccin anti-Covid.

Photo prise le 1er septembre 2021 dans les transports en commun. Sans doute dans le métro parisien. Photo©️Franck.Unimon

 

Et pour limiter ce refuge dans l’angoisse dans laquelle nous étions nombreux à être tombés et séquestrés, j’ai un moment décidé de trouver des échappatoires aussi dans la lecture de journaux.

 

Par chance, il y avait près de mon lieu de travail, dans le 13 ème arrondissement de Paris, Ă  mĂ©tro Gobelins, un des rares centres de presse restĂ©s ouverts durant la pandĂ©mie et les confinements successifs : Le Canon de la Presse.

Le Yashima d’octobre 2020, achetĂ© au Canon de la Presse, mĂ©tro Gobelins, Paris 13ème.

C’est là que j’ai commencé à me fournir, aussi, en Yashima, Aïkido, Self & Dragon…..et à découvrir, donc, Maitre Jean-Pierre Vignau, lors de son interview par Maitre Léo Tamaki dont j’avais découvert l’existence à peine quelques jours ou quelques semaines auparavant.

 

« Les Arts Martiaux, ça ne se rĂ©sume pas Ă  seulement apprendre Ă  donner des coups de pied et des coups de poing… Â».

 

C’est ce que j’ai affirmé il y a encore quelques jours à ma propre compagne qui avait voulu voir dans mon souhait de participer au Masters Tour proposé et organisé annuellement au Japon par Léo Tamaki, Maitre d’Aïkido, un temps élève de Maitre Jean-Pierre Vignau, une simple démarche touristique.

 

La quĂŞte d’une certaine spiritualitĂ© et d’un certain sens Ă  notre vie se trouve aussi dans la pratique des Arts Martiaux. Les religions ne sont pas les seuls domaines ou les seules disciplines grâce auxquelles on peut s’aider Ă  s’élever spirituellement mais aussi en tant qu’être humain. Et, il me semble que beaucoup de personnes l’ignorent ou l’ont oubliĂ© lorsqu’elles (vous) parlent des Arts Martiaux. Pour ces personnes, les Arts Martiaux mais aussi les sports de combat, c’est surtout du spectacle, une mise en scène proche du cirque. Ou ça revient Ă  se rendre Ă  un concert ou Ă  une sĂ©ance de cinĂ©ma afin de se distraire ou de se dĂ©fouler pour se vider la tĂŞte avant de rentrer chez soi ou repartir au travail le soir ou le lendemain. Ou ça revient Ă  apprendre Ă  se « dĂ©fendre Â» et Ă  pouvoir se sentir fort lorsque l’on sort ou afin de protĂ©ger une personne Ă  laquelle on tient.

Photo prise à la gare St-Lazare, le 7 septembre 2020. Photo©️Franck.Unimon

 

Je me suis plusieurs fois senti très fort il y a plusieurs années alors que je revenais d’une bonne séance de Judo dans mon club. Je marchais très sûr de moi en rentrant. C’était une sensation très agréable et, pourtant, trompeuse. Surtout dans des rues désertes, la nuit, où personne ne nous veut du mal. Alors qu’en plein jour, lors de certaines situations émotionnellement et affectivement difficiles pour moi, je pouvais perdre mes moyens comme si je n’avais rien appris ou étais un incapable majeur.

 

 

Ce mardi soir, Ă  la SACD, un des Ă©lèves de Maitre Jean-Pierre Vignau depuis plus de quarante ans, l’a d’abord remerciĂ© pour tout ce qu’il lui avait apportĂ© dans sa vie. Puis, il lui a demandĂ© :

 

« Pourquoi tu contiens toujours autant tes Ă©motions, Jean-Pierre?».

 

Debout face Ă  nous tous dans la salle, après la projection du premier documentaire (de Jean de Loriol) qui faisait son portrait dans Le Maitre et le batard, et avant la projection du documentaire Dans la tĂŞte du videur ( toujours rĂ©alisĂ© par Jean de Loriol) Jean-Pierre a rĂ©pondu :

 

« Je n’ai pas le temps ! Â».

 

Nous avons sans doute tous rigolé dans la salle. Beaucoup de Jean-Pierre est contenu dans cette phrase. Simple. Concret. Direct. Pratique. Tranchant. Efficace. Impliqué.

 

Un Maitre d’Arts martiaux, c’est quelqu’un, qui, incessamment, se remet à son ouvrage et donne le meilleur de lui.

 

Sans se décourager.

 

Après plus d’une vingtaine d’annĂ©es d’existence, son dojo le Fair-Play Sport a dĂ» fermer, pour raisons Ă©conomiques,  Ă  cause de la pandĂ©mie et du Covid ( lire  Le Dojo de Jean-Pierre Vignau ?) DĂ©sormais, Jean-Pierre dispense ses enseignements Ă  la Maison du Taiji au 57, rue Jules Ferry Ă  Bagnolet, mĂ©tro Robespierre, ligne 9.  

 Dans son interview par LĂ©o Tamaki, par lequel je l’avais dĂ©couvert en plein confinement sanitaire, Jean-Pierre disait Ă  un moment donnĂ© :

 

« Mais, moi, pour certains, je suis un malade mental ! Â». Cela m’avait beaucoup plu.

 

Mais ce qui m’avait aussi beaucoup plu, c’était ce qu’il disait de son Dojo, le Fair-Play Sport. Un endroit où il demandait à chaque pratiquant de laisser ses soucis à l’extérieur et où il acceptait tout le monde dès lors que celui-ci respectait les règles du Dojo.

 

Et ce qui continue de me plaire chez lui, c’est sa longévité, sa liberté.

 

J’ai appris seulement cette semaine que le boxeur Marvin Hagler, surnommĂ© « The Marvelous Â», très grand champion de boxe, Ă©tait dĂ©cĂ©dĂ© seulement Ă  l’âge de 66 ans en 2021.

 

Pour moi, un Maitre, c’est aussi sa longévité. Car sa longévité démontre aussi que ce qu’il pratique et enseigne est favorable à la vie. Et au meilleur de la vie. Entre-autres, à une vie active où, au delà de soixante dix ans au minimum, on continue de pouvoir pratiquer, de transmettre et d’être un exemple pour d’autres.

 

Cette remarque est sans doute lapidaire ou peut-être injuste. Mais lorsque l’on prend le temps de regarder de près l’âge de décès de bien des Maitres d’Arts Martiaux, étrangers ou français, ou encore en activité, on s’aperçoit qu’ils dépassent souvent ou régulièrement les 70 années d’existence.

 

Lorsque l’on sait que Jean-Pierre a eu le contraire d’une vie pépère et casanière, cela nous convainc encore plus facilement des bienfaits de la pratique martiale.

 

Cette longévité nous assure aussi que les choix de vie, les décisions mais aussi les libertés que ces Maitres ont pris ou su prendre, avec les risques qu’ont comporté et que comportent ces choix de vie et ces décisions, étaient les bons ou les meilleurs pour eux mais aussi pour celles et ceux qui les entourent et viennent chercher auprès d’eux Savoir et Expérience.

 

Le terme de « Maitre Â» peut aussi beaucoup dĂ©ranger dans un pays dĂ©mocratique et libre oĂą l’on confond facilement les libertĂ©s dont on croit disposer avec nos libertĂ©s rĂ©elles et vĂ©ritables. Pourtant, il est tout un ensemble de Maitres que nous prĂ©fĂ©rons suivre ou croire par facilitĂ©, conformitĂ©, fainĂ©antise, ignorance ou volontĂ© de « rĂ©ussite Â» ou…de maitrise :

 

Le smartphone dernier cri, tous nos écrans dans lesquels nous sommes plongés et ancrés en permanence, gagner plus d’argent, certaines influenceuses ou influenceurs, certaines tendances, certains types d’informations, certains types de rencontres ou de relations. L’anxiété. La peur. L’envie. Certains désirs.

 

Donc, pour moi, le terme de « Maitre d’Arts martiaux Â» ne doit pas faire peur pour peu que l’on a bien-sĂ»r pris le temps de bien choisir ce qui nous correspond et ce que l’on recherche chez un Maitre.

Enfin, la reconnaissance par certains de leurs pairs, Maitres d’Arts martiaux également, nous confirme aussi la légitimité de ces Maitres d’Arts martiaux.

 

Ce mardi 25 avril 2023, à la SACD, rue Ballu, à Paris, lors de cette soirée consacrée à Maitre Jean-Pierre Vignau, j’ai ainsi pu reconnaître en personne Maitre Pierre Portocarrero ainsi que Maitre Remi Mollet. Malheureusement, je n’ai pas eu la présence d’esprit de les prendre en photo.

Cependant, je crois que leur prĂ©sence comme celle de diffĂ©rents Ă©lèves de Jean-Pierre Vignau, comme celle de certains de ses proches et amis de plusieurs annĂ©es ( dont sa femme Tina et Jean-Pierre Leloup) continuait d’attester de sa totale lĂ©gitimitĂ© en tant que Maitre. 

Maitre Jean-Pierre Vignau à la SACD, rue Ballu, ce mardi 25 avril 2023. Photo©️Franck.Unimon

Sur Jean-Pierre Vignau, on peut aussi lire entre-autres dans ce blog Arts Martiaux : un article inspirĂ© par Maitre Jean-Pierre Vignau 

Franck Unimon, jeune élève de Maitre Jean-Pierre Vignau, ce jeudi 27 avril 2023.

 

 

 

 

 

 

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Cinéma Théâtre

Etre déprimé : ébauche de texte pour du Stand Up

Etre dĂ©primĂ© : Ebauche de texte pour du stand Up.

 

Il est bien sûr préférable d’être déprimé plutôt que dépressif.

 

Mais on ne choisit pas.

 

En surface, et en société, lorsque l’on nous demande:

« Tu vas bien ? Â», il « vaut Â» mieux bien sĂ»r rĂ©pondre – et dans un grand et magnifique sourire- (un peu comme si on venait de se dĂ©saltĂ©rer en buvant un grand verre d’eau bien fraĂ®che ou de sortir d’une très bonne sĂ©ance de massage non Ă©rotique ) :

 

« Oui, ça va !  Â».

Notre sourire doit ĂŞtre un tourbillon de bien-ĂŞtre. Une mini-rĂ©plique de Autant en emporte le bonheur

 

Peu importe que l’on ait surtout envie d’immoler par le feu ou de démolir à peu près tout ce que l’on approche à commencer par soi-même.

 

 Et, il vaut mieux y croire soi-mĂŞme un petit peu lorsque l’on affirme que tout va bien.

 

Tout va hyper-bien. Nous ne nous sommes jamais sentis aussi bien. C’Ă©tait ce que nous avions dĂ©ja affirmĂ© toutes les autres  fois. Mais, cette fois-ci, c’est encore plus vrai que d’habitude.

 

Il s’agit d’être crĂ©dible dans son rĂ´le. Et tout de suite. 

 

Si on peut, on peut mĂŞme en rajouter en disant :

 

« Bien-sur que ça va ?! Toujours ! Pourquoi ?! Y a un problème ?!  Quel problème ?! Et toi, ça va ?! Â».

Il faut bien montrer qu’il faudra s’y mettre au moins Ă  quatre pour essayer de nous abattre.

 

Cette réponse, c’est un peu notre carte de visite.

 

Notre coefficient de fréquentabilité voire de respectabilité.

 

Cette rĂ©ponse nous rend « bankable Â», dĂ©sirable ou non. Allez voir votre conseillère bancaire pour obtenir un prĂŞt en lui laissant imaginer que votre vĂ©ritable projet est surtout de vous suicider sitĂ´t que vous l’aurez quittĂ©e….

 

Personne ne désire un bout de bois tout vermoulu plein de champignons dont même les vers se séparent.

 

Personne.

 

Si l’on rĂ©pond ou dĂ©cide de rĂ©pondre :

 

« Ă§a ne va pas… », les rĂ©actions et les divers algorithmes autour de soi se mettent Ă  varier selon les interlocuteurs.  

 

Cela peut aller de la fuite Ă  la curiositĂ© voyeuriste et quasi-extatique ( « Enfin… Â»).

 

En passant par la pitié ou le dédain.

 

Et, tout de mĂŞme, aussi, on peut rencontrer de l’attention bienveillante proche du partage. C’est le cĂ´tĂ© jardinier chez certains. Ou le cĂ´tĂ© mitoyen. Car quelqu’un peut ainsi vous souffler dans l’oreille : «  Moi, aussi…tu sais Â».

 

 

Etre dĂ©primĂ©, c’est la honte. C’est comme ne pas savoir danser lors d’une soirĂ©e zouk ou salsa alors que tout le monde danse et a l’air de très bien s’amuser. Il n’y a plus qu’Ă  attendre qu’un peu plus de monde soit alcoolisĂ© ou dĂ©foncĂ© pour que cela perde de son importance. Ou, peut-ĂŞtre vaut-il mieux envisager de partir pendant que personne ne semble nous remarquer. MĂŞme si l’on sait qu’une fois que l’on sera parti (e) que tout le monde parlera de nous ensuite comme de la personne pathĂ©tique et seule dans son coin qui ne parlait Ă  personne. Et Ă  qui personne n’avait envie d’aller parler. 

 

Etre dĂ©primĂ© est plutĂ´t l’exemple Ă  ne pas suivre. L’image Ă  ne pas donner de soi. La dĂ©prime est au moral ce que la vergeture ou l’embonpoint est au corps. Ça dispose d’une volontĂ© propre aspirĂ©e par la pesanteur et le fond de l’abysse. Non seulement ça vous entraĂ®ne mais, en plus, ça vous suit partout Ă  un moment donnĂ©. ça vous attire mĂŞme de nouveaux amis tout autant dĂ©primĂ©s.

 

A moins d’être habile pour savoir à qui s’adresser en de pareilles circonstances sans que cela n’ait de graves conséquences.

 

Car, le dĂ©primĂ© ou la dĂ©primĂ©e, c’est « le Â» loser. Celle ou celui que l’on va Ă©pier dans Closer.

 

C’est celle ou celui qui attire la malchance ou le mauvais sort sur elle ou sur lui et qui pourrait le transmettre à toute personne proche de son corps.

 

Cette personne est rarement photogénique ou ciné-génique. On n’a pas très envie de se faire prendre en selfie avec. A moins de s’appeler Tiger Woods, Serge Gainsbourg, Amy Winehouse, Céline Dion ou Stromae.

 

 Bien des productions du spectacle « vivant Â» l’ont bien compris.

Il y a quelques jours, je suis allĂ© voir le film  Les Trois Mousquetaires. D’Artagnan de Martin Bourbolon. Un film français sorti ce 5 avril 2023 et qui marche très bien.

 

Je n’ai pas Ă©crit :  Â«  Un film français qui dĂ©prime Â». Mais un film français qui « marche très bien Â». Afin, aussi, de faire savoir que les rĂ©alisateurs français savent ou ont appris Ă  faire des films qui marchent plutĂ´t que des rĂ©clames publicitaires pour le prozac et le lexomil.

 

Hé bien, dans Les Trois Mousquetaires. D’Artagnan, aucun des protagonistes principaux ne déprime.

 

Sauf Athos, très bien joué par Vincent Cassel. On peut même déclarer que Athos/ Vincent Cassel est dépressif.

Athos joué par Vincent Cassel.

 

Mais « sans pathos Â».

 

Dans le film, Athos le dĂ©pressif dont les « remords Â» ou les « tourments Â» ont appris Ă  nager reste un modèle auquel on aimerait beaucoup ressembler. Et ça, c’est un grand tour de force.

 

La force, qu’elle soit mentale, morale, intellectuelle, affective, viscérale ou physique, c’est ce qui manque au déprimé et encore plus au dépressif. Et, c’est, aussi, ce qu’on lui reproche.

 

Ou, ce dont on peut abuser.

Athos/ Vincent Cassel entre Aramis/ Romain Duris et D’Artagnan/ François Civil.

Cependant, Athos,  lui, ne manque pas de force.  Son caractère subversif ou « disruptif Â», sa libertĂ©, son sens de l’honneur, son humour, son courage, sa vitalitĂ© Ă©rectile et, bien-sĂ»r, son expertise dans les armes et l’art du combat font d’Athos un homme fort. Sa dĂ©pression est un peu son aurĂ©ole d’être humain. Sans elle, Athos serait un demi Dieu ou un Dieu.  

 

Un surhomme.

 

On ne le dirait pas comme ça parce-que nous sommes beaucoup influencĂ©s par la « modernitĂ© Â» de ce que nous voyons, mais les trois Mousquetaires sont bien l’équivalent des ninjas ou des super-hĂ©ros que nous pouvons voir dans des productions asiatiques et amĂ©ricaines :

 

La scène de combat, nocturne, en pleine forĂŞt, et Ă  l’épĂ©e, entre D’Artagnan (jouĂ© par François Civil) et Athos/ Vincent Cassel «  le dĂ©pressif Â» vaut bien une scène de combat de « type Â» ninja. Ou une tentative de sodomie dans une back room.

 

Mais cette scène d’escrime peut nous sĂ©duire au point de nous faire oublier le sujet de la dĂ©prime. Alors, redevenons terre Ă  terre. Retournons aux « bouseux Â».

Cait/ l’actrice Catherine Clinch dans The Quiet Girl

 

Dans le film The Quiet girl («  film en langue irlandaise le plus rentable de tous les temps Â») on retrouve aussi la mĂŞme idĂ©e vis Ă  vis de la dĂ©prime.

 

The Quiet Girl  est un film rĂ©alisĂ© par Colm BairĂ©ad et sorti en salles ce 12 avril 2023.

 

 

Je suis allĂ© le voir cette semaine, ce lundi 17 avril 2023 très prĂ©cisĂ©ment. Puisque les critiques Ă©taient très Ă©logieuses :

 

«  La pĂ©pite irlandaise Â» ; «  un film irlandais tout en sensibilitĂ© Â» ; « la belle histoire d’un petit film qui devient grand…. Â».

 

Le film a été retenu pour les Oscars. C’est un grand succès en devenir tant commercial que critique.

Dès le gĂ©nĂ©rique du film, j’ai appris que The Quiet Girl  Ă©tait inspirĂ© de la nouvelle, Les Trois lumières, Ă©crite par Claire Keegan. Il se trouve que j’avais lu et beaucoup aimĂ© cette nouvelle de Claire Keegan il y a environ cinq ans. Grâce Ă  l’action de la mĂ©diathèque de ma ville, Ă  Argenteuil, qui nous sollicitait pour lire plusieurs ouvrages venant de paraĂ®tre afin d’en discuter entre nous mais, aussi, pour Ă©lire celui que nous avions prĂ©fĂ©rĂ©s.

 

Mais dans The Quiet Girl, nous ne sommes pas à Argenteuil, ville de banlieue parisienne, très bétonnée, mal réputée. Et beaucoup moins exotique que l’Irlande.

 

Car cela se passe en Irlande. La jeune héroïne, Cait, peut faire penser à Cosette ou à une héroïne de Rue, cases nègres.

 

Je croyais au dĂ©part qu’il s’agissait d’une histoire d’inceste. J’ai dĂ» confondre avec un autre film, Ă©galement plĂ©biscitĂ© par la critique,  et sorti rĂ©cemment, oĂą une jeune fille subit un inceste.

 

Non. Pas de ça dans The Quiet girl.

 

Cependant, la petite Cait en prend néanmoins plein la tête dans sa famille.

 

Sa mère est une femme volontaire, travailleuse, croyante mais ignorante- ou rejetante- de tout moyen de contraception comme d’avortement. Nous sommes en Irlande.

 

 ET dans les annĂ©es 1970-1980.

 

Question mariage, la « pauvre Â» mère de Cait, comme beaucoup de femmes dirons-nous, a tirĂ© le mauvais numĂ©ro Ă  la loterie. Pour effectuer ce portrait du père, Picasso aurait sans doute accompli un nouveau chef d’œuvre.

 

Le père de Cait est en effet fumeur, fumiste, buveur de bière, joueur, queutard, reproducteur de viande – ou d’enfants- à la chaine mais aussi débiteur de défaites en tout genre.

 

Et c’est un violent moral.

 

Le père de Cait est le portrait du bon beauf ou du mec « normal Â» diraient certaines personnes. Ce qui n’empĂŞchera pas certaines de ces mĂŞmes personnes de finir leur nuit ou leur vie avec ce mĂŞme genre de mec par ailleurs. Car chacun sa vie, chacun ses choix et tout le monde est libre de faire Ă  peu près ce qu’il ou elle veut comme tout le monde le sait.

 

Etant donné les dispositions de ses parents, on se dit que la jeune Cait pourrait peut-être trouver refuge dans cette solidarité qui se trouve parfois entre frères et sœurs ou chez quelque enfant de son âge.

 

Mais c’est chacun pour soi. La jeune Cait passe plutĂ´t pour ĂŞtre « weird Â» ( « bizarre Â») auprès des autres. Et le Professeur Xavier, mentor des X-Men, ne lui trouve pas de super-pouvoir de mutante pour avoir envie de venir la sauver en Irlande ou lui parler dans sa tĂŞte afin de lui recommander de continuer de croire en elle. Quant Ă  Dieu, ou un autre, il ne se manifeste pas particulièrement sous la forme de visions pouvant au moins faire d’elle l’équivalent d’une Jeanne d’Arc ou d’une quelconque aventurière.

 

MoralitĂ© : Cait n’est pas du tout faite pour cette guerre totale qu’est sa vie sur terre depuis son plus jeune âge. Et, elle est vraiment très seule sur terre. Il n’y a mĂŞme pas un rĂ©seau social de disponible sur lequel elle pourrait se trouver deux-trois amis. Et mĂŞme si ça avait dĂ©ja existĂ© Ă  cette Ă©poque, il est certain que dans son coin, il n’y aurait pas eu de rĂ©seau ou que son père aurait gardĂ© en permanence la main dessus afin de se trouver ses plans cul comme on peut se trouver des plans came.

 

Aujourd’hui, en 2023, oĂą l’on a « beaucoup Â» de recul et accompli diverses Ă©tudes sociologiques, psychologiques et bien-sĂ»r scientifiques sur ce type de conditions de vie prĂ©coces ou « inaugurales Â», mais aussi beaucoup lu, on dirait que Cait a le profil type, voire le morphotype, de la jeune souffre-douleur destinĂ©e Ă  ĂŞtre sacrifiĂ©e sur l’autel de la collectivitĂ©.

 

En se faisant harceler, tabasser ou, pourquoi pas, violer, engrosser, psychiatriser, clochardiser ou prostituer avant même sa majorité. En passant, bien sûr, par la consommation concentrée et répétée de diverses substances telles que tabac, stupéfiants ou autres.

 

Qu’est-ce que l’on croit ? Fille-mère toxicomane ou prostituĂ©e, c’est un projet de vie parfaitement normal pour une fille comme Cait vue de lĂ  d’oĂą elle vient.

 

 

Chacun son karma.

 

 

 En plus, Cait, contrairement Ă  Billy Elliot ne sait mĂŞme pas danser et ne montre mĂŞme pas de disposition particulière pour cela. Elle pourrait au moins essayer d’esquisser quelques petits pas de danse.

 

MĂŞme pas.

 

 Alors que contrairement Ă  Billy Elliot mais aussi Ă  l’adolescent du film Girl de Luke Dhont, Cait a pour elle d’appartenir dès sa naissance au genre sexuĂ© consacrĂ© pour la danse, la petite « idiote Â» dĂ©laisse complètement cet avantage et n’offre aucune volontĂ© pour s’en sortir.

 

Sans prendre trop de risques, on peut se hasarder à conclure que Cait n’a aucune –bonne- carte en main. Et, alors qu’elle touche à peine ses dix ans, qu’elle a largement de quoi être dépressive, suicidaire ou très agressive.

 

 

Hé bien, pas de ça entre nous dans The Quiet Girl …

 

Tout le film durant, la petite Cait reste aussi douce, mignonne, gentille, sensible et jolie que le bon lait.

 

Cait sait se tenir.

Jamais, Cait ne se montre en colère. Une véritable petite sainte sur terre.

 

Une future femme soumise, peut-ĂŞtre. Ou une âme « pure Â» et sans dĂ©fauts comme on dit. Et qui a pour elle, non seulement, d’avoir gardĂ©, malgrĂ© elle, sa virginitĂ© mais aussi… son insouciance. Les deux vont peut-ĂŞtre ensemble. Cela n’est pas tout Ă  fait soulignĂ© dans le film. J’ai pourtant fait attention de bien lire les sous-titres en Français.

 

Cait est l’enfant parfaite qui peut donner très facilement bonne conscience- et gratification- aux adultes qui savent prendre soin d’elle.

 

Ce qui n’est pas très difficile pour les adultes « Ă©clairĂ©s Â» que nous sommes devant ce film.

 

Alors que dans la vraie vie, c’est étonnant comme notre aveuglement nous guide très facilement.

 

Résilience et rebondissements

 

 

Il y a Ă  peine deux mois maintenant, au salon du livre d’Argenteuil, lors d’une discussion  avec une adulte, peut-ĂŞtre grand-mère aujourd’hui, celle-ci a louĂ©, voire presque revendiquĂ©, la très forte capacitĂ© de « rĂ©silience Â» des enfants.

 

A Ă©couter cette personne sincère et convaincue, on aurait presque pu  conclure que tout enfant qui rencontre et vit des expĂ©riences difficiles ou très difficiles se « doit Â» d’être « rĂ©silient Â». En caricaturant un peu sa logique, cela aurait pu donner Ă  peu près ceci :

 

« Les enfants qui vivent la guerre en Ukraine ? RĂ©silients ! Les enfants des gilets jaunes ? RĂ©silients ! Les enfants de celles et ceux dont la rĂ©cente rĂ©forme des retraites imposĂ©e Ă  coup de 49.3 a un peu plus  dĂ©truit celles et ceux, pour qui, deux annĂ©es de travail supplĂ©mentaire, en raison de leurs conditions pĂ©nibles de travail, c’est beaucoup ? RĂ©silients !

Les enfants des migrants morts en pleine mer après s’être faits arnaquer par des passeurs ? RĂ©silients !  Â».

 

J’en arrive Ă  me dire que ce genre de raisonnement Ă©mis par des adultes, qu’ils soient des « spĂ©cialistes Â» de la petite enfance, de l’éducation ou d’anciens parents a pour but principal de rassurer ces adultes.

 

Et de leur donner bonne conscience en toute circonstance.

 

Il doit bien se trouver quelques unes et quelques uns de ces adultes parmi ces critiques et journalistes qui ont encensé The Quiet girl. Toujours prompts pour applaudir. Souvent absents lorsqu’il s’agit de véritablement tendre la main.

 

Pour ces quelques raisons, j’ai beaucoup de mal avec certains de ces termes avec lesquels nous sommes rĂ©gulièrement badigeonnĂ©s comme on peut le faire sur la plage avec de la crème de bronzage avant une exposition prolongĂ©e au soleil :

 

« RĂ©silience Â», « rebondir Â»â€¦

 

Pour moi, la petite Cait attendrit parce qu’il est possible, sans trop de difficultés, de s’identifier à elle ou aux parents de substitution qui, dans le film, peuvent la sauver.

 

La « petite Â» est touchante. Les adultes qui la recueillent le sont tout autant. Et, entre les deux, il y a des mĂ©chants et des ignorants qui n’en valent vraiment pas la peine ainsi qu’une petite musique qui fait le service comme il se doit.

 

Tout ça, dans une période post-covid et de pénurie où l’on est devenu d’autant plus sensible au fait d’avoir une maison, son espace de liberté et d’autonomie à soi. Ce qui est le cas des parents de substitution qui ont également une souffrance intime et secrète. Ainsi qu’une grande maison bien chauffée à la campagne où l’on ne manque pas d’amour et de confort matériel.

 

Dans le film As Bestas de Rodrigo Sorogoyen, sorti en juillet 2022, les hĂ©ros (adultes) paient par la mort et le harcèlement leur droit de passage dĂ©finitif  dans ce paradis Ă©tranger pour lequel ils avaient quittĂ© un monde parisien et urbain fait d’artificialitĂ©.

 

Dans The Quiet Girl, nous sommes de plain pied dans la ruralitĂ© sauf que nous dĂ©butons  par le plus mauvais et le plus misĂ©rable de ses extrĂŞmes. Et, il s’agit de nous montrer que, malgrĂ© cela, il reste possible de sauver la petite Cait, et, Ă  travers, elle, de sauver notre âme. MĂŞme si ses sĹ“urs et son petit frère sont aussi mal partis qu’elle mais de cela on s’en contrefiche puisque l’on se focalise sur Cait.

 

Et puis, ce sera bientôt les vacances d’été et l’Irlande, c’est vraiment une très chouette destination pour le tourisme.

 

 

A la fin du film, à Paris, dans cette salle de cinéma près d’Odéon, j’ai aperçu deux personnes dont l’émotion était très visible. L’une d’elle essuyait ses larmes délicatement.

Je me suis quand mĂŞme laissĂ© prendre par l’émotion. Mais quelque chose m’a gĂŞnĂ© dans le film :

 

On nous montre la petite Cait aux « meilleurs Â» moments de sa vie. LĂ  oĂą il est encore, de manière visible, possible de la sauver. Et lorsqu’elle est encore très « prĂ©sentable Â». Mignonne, polie, naĂŻve, sans rancĹ“ur, vulnĂ©rable….

 

Cait est à peu près tout ce que l’on veut pouvoir attribuer à l’enfance et que nous avons plus ou moins perdu en devenant adultes ou que, une fois devenus adultes, nous avons pour devoir, en principe, de préserver chez les autres.

 

Chez celles et ceux qui nous entourent, petits ou grands, ou que nous aimons.

 

Ou sur ceux envers lesquels nous avons certaines responsabilités et sur qui nous pouvons exercer une certaine autorité.

 

Sauf que, sauvée ou non, pour moi, il est impossible que la jeune Cait reste aussi douce et aussi parfaite qu’on nous la montre.

 

Et, c’est pareil pour ses parents de substitution.

 

 

Pour moi, l’avenir de Cait pourrait ressembler Ă  quelque hĂ©roĂŻne  du film Moi, Christiane F, 13 ans, droguĂ©e, prostituĂ©e ( 1981) ou du film Requiem for a dream ( 2000).

 

Mais cela, je l’écris seulement parce-que je suis déprimé, aigri, ou démesurément pessimiste et défaitiste. Parce-que j’ai des idées trop noires.

 

Ou parce-que je n’ai absolument rien compris au film.

Ce qui est le propre de la mentalité de tout cynique et de tout perdant.

 

Seuls celles et ceux qui sont combattifs, mĂ©ritants – et rĂ©silients– peuvent vĂ©ritablement apprĂ©cier le film Ă  sa juste valeur.

 

The Quiet Girl  est le film-filtre qui dĂ©partagera les rĂ©silients de tous les autres. Après la sĂ©ance, les « autres Â» seront priĂ©s de retourner au nĂ©ant prĂ©alable de leur existence sans dĂ©ranger. Puisqu’ils ne sont mĂŞme pas capables de saisir la chance qui leur a Ă©tĂ© proposĂ©e, au travers de ce film, de croire en leur avenir et de se battre pour lui.

 

Parce-que, dans la vraie vie, on aime celles et ceux qui en prennent plein la gueule et qui résistent avec le sourire. Parce-que c’est cela, être sain d’esprit.

 

Pourtant, quoi de plus « normal Â» que la dĂ©prime ?

 

Il y a du faux et du suspect, voire de l’inquiĂ©tant, chez celle ou celui qui, en toutes circonstances, en dĂ©pit de ses ratĂ©s, de ses doutes, de ses inquiĂ©tudes ou de ses deuils affirme que tout va très bien ou que tout se dĂ©roule « absolument comme prĂ©vu Â».

 

Le dirigeant actuel de la Chine, future Première Puissance Mondiale hypothĂ©tique, a ratĂ© neuf fois son admission au parti communiste chinois. On peut louer sa persĂ©vĂ©rance ou parler de « rĂ©silience Â» Ă  son sujet et chercher Ă  s’inspirer de son exemple. Pourtant, on peut aussi se dire que les refus qu’il avait rencontrĂ©s ou sa persĂ©vĂ©rance, finalement couronnĂ©e de succès, avaient leurs raisons d’être. Pour notre avenir.

 

Si déprimer est un état désagréable dont on aimerait souvent se dispenser, on peut aussi se dire que cela aurait été mieux si certaines personnes pouvaient simplement accepter de déprimer.

Mais nous sortons de l’hiver. Et mĂŞme si je ne parle pas de celui Ă©voquĂ© dans la sĂ©rie Game of thrones, succès dĂ©jĂ  datĂ©,  quoi de plus normal que de dĂ©primer un peu ou beaucoup en ce moment?

Alors que nous avons changĂ© d’annĂ©e et sommes repassĂ©s Ă  l’heure d’étĂ©. Alors que nous avons Ă©tĂ© plus ou moins Ă©prouvĂ©s par le changement des saisons comme par certains Ă©vĂ©nements divers personnels ou autres  : guerre en Ukraine, pĂ©nuries diverses, augmentation du prix des denrĂ©es alimentaires, du prix de l’essence, rĂ©forme des retraites, conflits sociaux qui en dĂ©coulent, rĂ©chauffement climatique, crise des migrants…

Quoi de plus normal que de dĂ©primer devant certains de ces Ă©vĂ©nements extĂ©rieurs mais aussi intimes et personnels ? Et d’avoir besoin de rester quelque peu en jachère, ou en retrait, durant quelques temps ?

Le temps de récupérer. Un temps parfois ou souvent difficile à évaluer.

 

Il faudrait ou nous devrions être capables de prédire combien de temps nous sera nécessaire afin de pouvoir véritablement récupérer des efforts et des événements passés. Et, autant que possible, nous devrions raccourcir au plus vite cette période de récupération, pouvoir annoncer son terme afin de pouvoir être à nouveau opérationnels et disponibles et en première ligne sur tous les fronts du monde pour le confort et la satisfaction de quelques autres.

 

Comme s’il ne s’était jamais rien passĂ© de marquant dans notre vie. Comme si le deuil et sa nĂ©cessitĂ© n’existaient pas dans notre vie. Comme si nous Ă©tions des ĂŞtres Ă©ternels et inchangĂ©s malgrĂ© le temps qui passe. Comme si nous Ă©tions indiffĂ©rents Ă  notre usure ou Ă  notre sentiment d’usure ou de blessure intĂ©rieur et personnel.

 

Comme si nous étions, aussi, des pièces mais aussi des expériences interchangeables.

 

Chaque fois que l’on refuse l’idée d’être déprimé, on refuse aussi l’idée de faire partie de l’humanité et de notre particularité. Et, on devient, alors, autre chose ou quelqu’un d’autre. Un personnage de film ou de bande dessinée. Un dictateur ou une petite sainte.

 

MalgrĂ© nos « victoires Â» et nos « succès Â» publics ou d’estime.

Notre sourire intĂ©rieur importe plus que celui qui se voit, se rĂ©compense et s’entend. Lui seul peut vĂ©ritablement nous tenir Ă  distance de la dĂ©prime et de la dĂ©pression. Et, il est plus difficile Ă  obtenir et Ă  prĂ©server.

 

Franck Unimon, ce vendredi 21 avril 2023.

 

 

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Vélo Taffe

Vélo taffe, réforme des retraites et 49.3

Paris, jeudi 16 mars 2023, Bd Haussmann, à quelques minutes à pied des Galeries Lafayette et de la gare St Lazare. Photo©️Franck.Unimon

Vélo taffe, réforme des retraites et 49.3

 

 

Ce jeudi 16 mars 2023, vers 20H30, après le travail, pour rentrer chez moi, j’ai pris le même chemin que d’habitude.

 

Banlieusard de naissance, je travaille à Paris depuis l’été 2009. Depuis février 2021, j’ai découvert l’usage et le plaisir du vélo pliant pour parcourir la seconde partie de mon trajet lorsque je vais au travail. La première partie se déroule en prenant le train avec mon vélo depuis Argenteuil, une ville de banlieue, où j’habite.

 

Faire le trajet en utilisant uniquement les transports en commun jusqu’à mon lieu de travail m’avait vite rebutĂ© lorsque j’avais commencĂ© dans mon nouveau service en janvier 2021, du cĂ´tĂ© de Denfert Rochereau, dans le 14 ème arrondissement de Paris. A cause des correspondances, des « problèmes Â» de train et de la foule aux heures de pointe.

 

Je n’invente rien. Et je ne me plains pas. Il me faut entre trois quarts d’heure et une heure pour me rendre à mon travail. Certains de mes collègues ont besoin d’une heure et demi ou de deux heures pour le faire que ce soit en voiture ou par le train. Ils n’ont pas eu d’autre choix que de s’éloigner pour pouvoir s’acheter une maison ou un appartement à crédit. Où ils n’ont pas pu trouver d’emploi plus près de chez eux.

 

Comme moi, et comme d’autres, je crois, mes collègues prennent de l’âge. Lorsque l’on prend de l’âge, mĂŞme si l’on vit de plus en plus vieux, certaines contraintes nous pèsent davantage. Et encore plus si l’on s’efforce depuis des annĂ©es de remplir nos obligations  malgrĂ© tout. MalgrĂ© les difficultĂ©s inhĂ©rentes Ă  notre mĂ©tier, malgrĂ© les problèmes de santĂ©, les inquiĂ©tudes et les contraintes diverses et personnelles, malgrĂ© l’augmentation du coĂ»t de la vie.

 

 

Comme n’importe qui pourrait l’être après une deuxième journĂ©e de travail de 13 heures qui a commencĂ© par un rĂ©veil vers 5h30 du matin, j’étais fatiguĂ© tout Ă  l’heure  en montant sur mon vĂ©lo après ĂŞtre sorti de mon service. Mon but Ă©tait en prioritĂ© de rentrer sans accident puisque j’étais fatiguĂ© et Ă  vĂ©lo.

Paris, rue de Rivoli, jeudi 16 mars 2023. Photo©️Franck.Unimon

Je n’avais pas prévu de m’asseoir en rentrant pour écrire un article sur la réforme des retraites, le 49.3, les gilets jaunes, la pandémie du Covid et le confinement. Et en montrant des photos que j’ai pu prendre tout à l’heure sur ce trajet que je prends d’habitude lorsque je me rends à mon travail et que j’en reviens. Mais certaines des réactions suscitées ce soir par cette réforme des retraites font partie de notre histoire. Ces photos et cet article auront donc sans doute une certaine importance plus tard.

Paris, rue St Florentin, près de la place de la Concorde, jeudi 16 mars 2023. Photo©️Franck.Unimon

C’est la deuxième fois, maintenant, qu’en sortant de mon travail, je me retrouve un peu dans la mĂŞme situation que le personnage de David Vincent, lorsque celui-ci, en rentrant chez lui en pleine nuit en voiture, aperçoit une soucoupe volante d’extra-terrestres malveillants en train d’atterrir discrètement sur « terre Â».

Paris, rue St Florentin, près de le rue de Rivoli et de la place de la Concorde, jeudi 16 mars 2023. Photo©️Franck.Unimon

La première fois que je m’étais senti un peu comme le personnage David Vincent, c’était en tombant sur ce qui allait devenir la dernière manifestation officielle des gilets jaunes quelques jours avant le premier confinement en mars 2020. ( Gilets jaunes, samedi 14 mars 2020)

 

Ce soir, la même situation s’est répétée avec ces manifestations suite à l’utilisation du 49.3.

Paris, rue St Florentin, près de la rue de Rivoli et de la Place de la Concorde, jeudi 16 mars 2023. Photo©️Franck.Unimon

Pourtant, on ne peut pas dire que la rĂ©forme des retraites ait Ă©tĂ© un sujet « discret Â». On en entend parler depuis des annĂ©es. Avant la première Ă©lection du PrĂ©sident Macron, je crois. Et depuis des annĂ©es, c’est un sujet de tension et d’inquiĂ©tude sociale. En France, l’image idĂ©ale du dĂ©part Ă  la retraite rime avec celle d’un repos bien mĂ©ritĂ© après des annĂ©es de travail. Si l’on peut au dĂ©part aimer exercer son travail, ses conditions d’exercice et sa pĂ©nibilitĂ© peuvent, avec les annĂ©es, nous le rendre de plus en plus difficile Ă  vivre ou Ă  supporter. Surtout si ses conditions d’exercice se dĂ©tĂ©riorent comme on le voit dans bien des institutions publiques.

Paris, rue St Florentin, en s’Ă©loignant de la rue de Rivoli et de la place de la Concorde, jeudi 16 mars 2023. Photo©️Franck.Unimon

Dans mon métier d’infirmier en psychiatrie et en pédopsychiatrie, par exemple, un milieu touché par la pénurie depuis des années et encore plus depuis la pandémie du Covid, à mesure que l’on prend de l’âge, le travail de nuit, reconnu comme un travail pénible, peut avoir des répercussions sur la santé. Certains horaires matinaux, aussi. Car pour débuter une journée de travail à 6h45, selon le temps de trajet à effectuer, un réveil plus précoce peut nécessiter, avec le temps, des efforts de plus en plus contraignants. Ensuite, chaque profession a ses difficultés. Et, certaines de ces difficultés, selon moi, restent impraticables pour d’autres.

Paris, rue St Honoré, jeudi 16 mars 2023. Photo©️Franck.Unimon

Mais si Paris brĂ»le ou a brĂ»lĂ© par endroits, ce jeudi 16 mars au soir, c’est ,selon moi, parce-que depuis trois ans, se sont accumulĂ©es des contraintes et des contrariĂ©tĂ©s diverses. J’en discutais quelques heures plus tĂ´t avec deux collègues dans mon service avant de dĂ©couvrir le rĂ©sultat dans certaines rues de Paris en rentrant :

 

Le mouvement des gilets jaunes avait pour origine une usure sociale et Ă©conomique profonde. Le mouvement a fini par ĂŞtre Ă©touffĂ© Ă  la fois, par certaines de ses dissensions ou ses excès mais aussi parce-que le gouvernement Macron a profitĂ© de la pandĂ©mie du Covid pour dĂ©cider d’un confinement strict et interdire les rassemblements publics. Pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois, nous avons dĂ» accepter une suppression de nos libertĂ©s, limiter nos dĂ©placements, les justifier. Puis, nous avons dĂ» fournir des passe sanitaires et donc nous faire vacciner pour les obtenir. Si bien des personnes ont rapidement Ă©tĂ© consentantes et rassurĂ©es par les vaccins anti-Covid fabriquĂ©s en express, il y a un nombre assez important de personnes- dont je fais partie- qui a acceptĂ© de se faire vacciner sous la contrainte. Afin de pouvoir recouvrer une partie de ses libertĂ©s mais aussi pour conserver son emploi.  

Après toute cette pĂ©riode de pandĂ©mie du Covid, du confinement et de ses excès, dont nous semblons nous Ă©loigner depuis Ă  peu près un an ou plus maintenant, la guerre en Ukraine est « arrivĂ©e Â» en fĂ©vrier de l’annĂ©e dernière. Le prix de l’essence a alors enflĂ©. Jusqu’à deux euros le litre d’essence 95. Peut-ĂŞtre plus. Aujourd’hui, on peut trouver des stations service oĂą le litre d’essence est redescendu Ă  1,89 euro le litre. C’est Ă  dire qu’il coĂ»te plus de 40 centimes qu’avant la guerre en Ukraine. Et, Ă  mon avis, son prix ne retrouvera pas le niveau qui Ă©tait le sien avant la guerre en Ukraine.

En plus du coût l’essence, celui des produits alimentaires a aussi augmenté de quinze pour cent depuis le début de la guerre en Ukraine. Dix pour cent d’augmentation supplémentaires sont prévus d’ici le mois de juin de cette année.

Ensuite, se rajoute le fait que depuis cette année, les taux bancaires remontent et que les banques sont plus réticentes pour prêter de l’argent aux personnes qui souhaitent obtenir un prêt immobilier. Donc, même dans l’immobilier, l’horizon se bouche.

Paris, près de la Madeleine, jeudi 16 mars 2023. Photo©️Franck.Unimon

Et, maintenant, la rĂ©forme des retraites avec le recul de l’âge du dĂ©part Ă  la retraite qui passe de 62 ans  Ă  64 ans est imposĂ©e Ă  coup de 49.3. Et, par qui ?

 

Par le gouvernement Macron. Le gouvernement du Président Macron, un homme qui n’a pas 50 ans, dont la retraite est déjà largement plus que bien assurée- et bien entourée- et qui donne le sentiment d’avoir toujours été privilégié.

 

Si le sentiment d’appartenance et le sentiment de sécurité ou d’insécurité font partie des sentiments qui nous inspirent ou qui permettent de nous dominer, le sentiment de justice ou d’injustice, aussi, peut pousser à agir lorsqu’il est conséquent.

Paris, jeudi 16 mars 2023. Photo©️Franck.Unimon

Ce jeudi soir, lors de ces quelques minutes oĂą j’ai « Ă©chouĂ© Â» au milieu de ces manifestations, et oĂą je suis descendu de mon vĂ©lo pour marcher tout en prenant des photos sur mon trajet habituel, j’ai croisĂ© des personnes assez jeunes (dans la vingtaine et trentaine) plutĂ´t souriantes qui se sentaient aussi sans aucun doute victimes d’une grande injustice. Comme les gilets jaunes trois ans plus tĂ´t. Sauf que, lĂ , cette rĂ©forme des retraites concerne une plus grande partie de la population et donc, aussi, des classes sociales plus favorisĂ©es, ou des personnes plus destinĂ©es Ă  occuper des fonctions « supĂ©rieures Â» que les gilets jaunes.

Paris, Bd Haussmann, près des Galeries Lafayette et de la gare St Lazare, jeudi 16 mars 2023. Photo©️Franck.Unimon

Même si l’on vit désormais plus vieux qu’il y a vingt, trente ou quarante ans, nous savons aussi que nous pouvons mourir à n’importe quel âge. Et que notre mort n’est pas automatiquement corrélée avec les mauvais choix de vie que nous aurions pu faire. Dans ma famille, on vit vieux. Cela devrait me suffire pour me convaincre que tout ira bien pour moi. Car des personnes retraitées, que j’ai connues actives, j’en connais désormais quelques unes. Et, elles vivent plutôt bien leur retraite alors qu’elles l’ont prise entre 55 et 64 ans. Sans compter quelques personnes de 70 ans ou plus que je peux côtoyer qui me donnent le sentiment de bien profiter de la vie et de conserver un entrain pour celle-ci. Sauf que deux ans de plus, lorsque ça ne va pas, c’est beaucoup.

 

Si cette rĂ©forme des retraites ne passe pas, c’est parce-que l’avenir continue d’inquiĂ©ter et de se refermer. Après les jeunes « de Â» banlieue populaire ou dĂ©favorisĂ©e dans les annĂ©es 90-2000, après le terrorisme islamiste et l’intĂ©grisme religieux,  après les gilets jaunes, c’est au tour des jeunes mais aussi des moins jeunes de classes sociales diverses de refuser de se faire enfermer dans un monde et une vie dont ils ne veulent pas.

Paris, gare St Lazare, jeudi 16 mars 2023. Photo©️Franck.Unimon

Etonnamment, à la gare St Lazare, tout est calme. Et, quelques minutes plus tard, lorsque je retrouve Argenteuil, ville de banlieue proche de Paris, dont la réputation est plutôt mauvaise, tout est calme. Devant ce calme, on pourrait penser que ce je viens d’apercevoir dans la capitale n’a jamais existé.

 

 

Franck Unimon pour balistiqueduquotidien.com, ce vendredi 17 mars 2023.

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Argenteuil

Au salon du livre d’Argenteuil les 4 et 5 fĂ©vrier 2023

Au salon du livre d’Argenteuil, au lycĂ©e Georges Braque d’Argenteuil, les 4 et 5 fĂ©vrier 2023.

 Au Salon du livre d’Argenteuil les 4 et 5 fĂ©vrier 2023

 

 

Ailleurs, ces ilots réfléchis dans la prose et dans des bulles, ont été avalés par le goulot du passé.

 

Depuis des années, telle une fin du monde pronostiquée et ingérée cul sec une nouvelle fois, puis une autre fois, et encore une fois, jusqu’à ne plus savoir compter, leur disparition est annoncée voire souhaitée avec une certaine ferveur.

 

« Ils Â» seraient devenus pĂ©rimĂ©s, auraient perdu pied. Ils n’auraient plus rien Ă  dire. Toute musique et toute vitalitĂ©, en eux, auraient dĂ©finitivement abdiquĂ©. Ils se seraient taris et auraient abandonnĂ© l’HumanitĂ©.

Au Salon du livre d’Argenteuil, au lycĂ©e Georges Braque d’Argenteuil, les 4 et 5 fĂ©vrier 2023.

 

Ils ne feraient plus le poids face Ă  la vitesse et aux pulsations volatiles- et versatiles- des images et des Ă©motions que celles-ci nous administrent Ă  hautes doses, face aux croyances technologiques de pointe, aux rumeurs acĂ©rĂ©es, cutanĂ©es et instantanĂ©es, aux publicitĂ©s, au pavot, au feu, Ă  la mĂ©diocritĂ©. Face  aux tombeaux, au pessimisme et Ă  la dĂ©pression. Face aux destructions de toutes sortes y compris celles des arbres.

Au Salon du livre d’Argenteuil, les 4 et 5 fĂ©vrier 2023.
Au Salon du livre d’Argenteuil, au lycĂ©e Georges Braque, les 4 et 5 fĂ©vrier 2023.

Ils seraient des ronces et des gadgets dont il faudrait  se dĂ©barrasser. ArrivĂ©s Ă  un certain âge, Ils prendraient beaucoup trop de place comme des jeux d’enfants sans lendemains.  A peine solvables en bourse, ce sont des combustibles beaucoup moins performants qu’une bĂ»che de bois. Si peu savoureux en bouche, Ă  peine vecteurs de protĂ©ines, de glucides ou de lipides, et mĂŞme pas conducteurs d’électricitĂ©, ils ne produisent pas de pĂ©trole, ni de gaz ou de vent. Ils ne se rechargent pas en plein soleil. En plus, ils sont fragiles et ils ne donnent pas l’heure.

 

Au Salon du livre d’Argenteuil, au lycĂ©e Georges Braque, les 4 et 5 fĂ©vrier 2023.

A cela, il faut ajouter que fabriquer un livre, le lire, le conseiller, le proposer, le commander, le vendre, c’est du boulot.

Au Centre, Gilles, l’un des gĂ©rants de la librairie Presse Papier d’Argenteuil. Avec Agnès REINMANN, PrĂ©sidente de l’association sous les couvertures et l’un des photographes de l’association et de l’Ă©vĂ©nement. Photo©️Franck.Unimon
De profil, Catherine, l’une des gĂ©rantes de la librairie Presse Papier avec Pamela ( de face), une des employĂ©es du rayon librairie. Au salon du livre d’Argenteuil les 4 et 5 fĂ©vrier 2023. Photo©️Franck.Unimon
Dominique Mariette, interviewĂ© au Salon du livre d’Argenteuil par de jeunes argenteuillaises. Photo©️Franck.Unimon
A gauche, la main levĂ©e, Margot, une des employĂ©es de la librairie Presse Papier d’Argenteuil, avec plusieurs des bĂ©nĂ©voles, lors de la pause dĂ©jeuner au Salon du livre d’Argenteuil, les 4 et 5 fĂ©vrier 2023. Photo©️Franck.Unimon

 

Parce qu’il faut prendre son temps pour bien s’occuper d’un livre et pour lui accorder autant d’importance. Par saccades. En hĂ©sitant. En se demandant oĂą l’on se rend et Ă  quoi l’on joue.

 

Au Salon du livre d’Argenteuil, au lycĂ©e Georges Braque, les 4 et 5 fĂ©vrier 2023.

Parfois, il faut même relire ou regarder plusieurs fois les mêmes passages, tourner des pages attentivement pour bien comprendre. Porter l’objet de lecture. Alors que ce que l’on voudrait, désormais, lorsque l’on est bien dans le coup, ce serait des objets de plus en plus légers, des contenus simplifiés, ainsi que des interactions beaucoup plus faciles d’usage, à profusion. Et aussi plus de goudron pour avoir devant soi des grands boulevards qui nous emmènent partout et tout de suite là où on le désire.

 

Tout le temps. Sans interruption. Sans avoir besoin de respirer. Sans digestion.

 

Sans imagination, aussi. Mais, cela, ce « n’est pas » une prioritĂ© semble-t’il.

Au Salon du livre d’Argenteuil, au lycĂ©e Georges Braque, les 4 et 5 fĂ©vrier 2023.

La prioritĂ©, ce serait de prĂ©voir l’avenir avec exactitude et le temps qu’il nous faudra pour effectuer les bonnes opĂ©rations. Pour tout planifier avant « leurre Â». Puisqu’il n’y a que cela de vrai. Et de concret. Alors que lire, c’est d’abord accepter de se faire surprendre. D’oublier le temps que l’on prend. D’accepter d’en perdre. C’est un peu, une folie.

Au Salon du livre d’Argenteuil, les 4 et 5 fĂ©vrier 2023, au lycĂ©e Georges Braque.

Le salon du livre d’Argenteuil organisĂ© par la librairie d’Argenteuil, Presse Papier,  les bĂ©nĂ©voles de l’association Sous les couvertures et d’autres partenaires, l’a pourtant rappelĂ© ces 4 et 5 fĂ©vrier dernier, dans le lycĂ©e Georges Braque d’Argenteuil, Ă©galement partenaire de l’évĂ©nement :

 

En 2023, au 21 ème siècle, il reste encore beaucoup d’otages volontaires qui se laissent prendre et surprendre par des livres afin de devenir plus libres.

Au Salon du livre d’Argenteuil, au lycĂ©e Georges Braque, les 4 et 5 fĂ©vrier 2023.

Tant qu’il y aura des personnes qui voudront faire des pauses et reprendre leur souffle, il y aura des livres. Et tant qu’il y aura des livres, il y aura des personnes qui viendront les ouvrir et puiser dedans divers remèdes et intermèdes.

 

Car on lit peut-être comme on se soigne. Chacun empoigne son remède en adoptant la posologie qui lui est propre. La lecture étant cette bougie allumée avec laquelle chacune et chacun s’avance et s’éclaire dans cette pénombre qui lui est personnelle.

Xavier Leclerc, l’auteur du livre  » Un homme sans titre » au Salon du livre d’Argenteuil, au lycĂ©e Georges Braque. A ses cĂ´tĂ©s, avec la loupe, un des bĂ©nĂ©voles du Salon du livre. Photo©️Franck.Unimon

Il y avait beaucoup Ă  parcourir ce  4 et 5 fĂ©vrier 2023 dans ce salon du livre d’Argenteuil dont l’un des thèmes Ă©tait En quĂŞte d’AlgĂ©rie.

Plusieurs heures étaient nécessaires pour bien arpenter ce salon préparé aussi avec le Collège Paul Vaillant Couturier d’Argenteuil, Les Amis de Georges Braque et la Société Historique et Archéologique d’Argenteuil et du Parisis.

Un atelier peinture proposĂ© par l’association NĂ©nuphar d’Argenteuil, au Salon du livre d’Argenteuil les 4 et 5 fĂ©vrier 2023. Photo©️Franck.Unimon

 

Plusieurs animations, en plus des interviews d’auteurs et de traducteurs, ont Ă©tĂ© proposĂ©es telles qu’un Escape Game et Le Grand Jeu « En QuĂŞte de Braque Â».

 

Thibaut Dumonet, de la Librairie Presse Papier, en train d’interviewer les auteurs Pierre et François Place au Salon du livre d’Argenteuil, au lycĂ©e Georges Braque. Photo©️Franck.Unimon

Lors de ce salon, beaucoup de vies étaient dans ces livres, autour d’eux, sur leurs couvertures, parmi les auteurs et artistes invités (Pierre et François Place, Xavier Leclerc…) ainsi que dans ce public venu en très grand nombre (près de 3000 visiteurs) les rencontrer.

 

En quittant ce salon, beaucoup sont repartis Ă  la ligne en emportant ailleurs avec eux des parties de vies traduites dans des livres et dans des rencontres.

Franck Unimon, ce lundi 13 mars 2023

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Cinéma

Les Rascals un film de Jimmy Laporal-Tresor

Les Rascals un film de Jimmy Laporal-Trésor

 

 

Sorti en janvier 2023, aurĂ©olĂ© d’assez bonnes critiques, Les Rascals est passĂ© assez inaperçu devant le public derrière les « colosses Â» Black Panther 2 et Avatar 2 prĂ©sents Ă©galement en salles en ce dĂ©but d’annĂ©e. Cependant, comme dans certaines oeuvres cinĂ©matographiques oĂą l’on a pu voir « dĂ©buter », certaines actrices et acteurs, amusons-nous Ă  mĂ©moriser aujourd’hui le visage et les noms des acteurs principaux de cette pièce visuelle. Nous aurons plaisir Ă  nous en rappeler plus tard lorsque certains membres du casting deviendront des artistes « reconnus ».

 

En effet, parmi les assez innombrables sorties de films, de sĂ©ries, et leurs copies, peut-on dire que  Les Rascals est un petit film d’auteur de plus ?

 

CĂ´tĂ© filiation, l’œuvre de Jimmy Laporal-TrĂ©sor, dont l’histoire se dĂ©roule Ă  Paris ainsi qu’en banlieue parisienne dans les annĂ©es 70-80 d’avant l’explosion de l’épidĂ©mie du Sida, m’a tout de suite fait penser Ă  Un Français rĂ©alisĂ© par Diasteme en 2014 et Ă  The Club (Neil Thompson, 2008). Mais, bien-sĂ»r, il peut ĂŞtre reliĂ© Ă  d’autres oeuvres antĂ©rieures en particulier anglo-saxonnes.

Adam ( l’acteur Victor Meutelet) convaincant dans son rĂ´le.

Croquis social, Les Rascals se situe à l’époque où le groupe de rockabilly les Stray Cats avait la côte tandis que refluait en France hors des cendres du temps un racisme anti arabe et anti noir de plus en plus pressé sur la scène politique française par le Front National du papa de Marine Le Pen. Laquelle était alors étrangère à toute ambition politique comme à toute exposition médiatique. Sa nièce était alors à peine issue de la conception. Et Eric Zemmour était peut-être encore étudiant, jeune journaliste ou devait faire du porte à porte quelque part en essayant de vendre des tapis de sol pour la pratique du yoga.

FrĂ©dĂ©rique ( l’actrice Angelina Woreth) et Adam( l’acteur Victor Meutelet) « RASCALS »
un film de JIMMY LAPORAL-TRESOR
Paris, FRANCE le 16/07/21
© Jean-Philippe BALTEL / SPADE / AGAT FILMS ET CIE

Comme dans Un Français de Diasteme, le film réussit bien le portrait féminin fascisant de la jeune Frédérique (l’actrice Angelina Woreth). Il m’est difficile de savoir si cela a été voulu par Jimmy Laporal-Trésor mais le personnage de la jeune Frédérique peut, à un moment donné, évoquer celui de la jeune femme qui avait appâté Ilan Halimi en 2006.

NĂ©anmoins, il est peut-ĂŞtre encore un peu tĂ´t pour que le cinĂ©ma français s’empare d’un rĂ´le fĂ©minin comme celui de la jeune FrĂ©dĂ©rique et le regarde dans les yeux de bout en bout. A l’image de ce que  Diasteme avait pu faire avec le personnage interprĂ©tĂ© par Alban Lenoir dans Un Français.

 

Mais l’un des autres personnages très importants du film, c’est la musique.

Musicalement, Ă  l’époque que nous raconte Les Rascals, le Rap  dĂ©marrait pour de bon mais on ne le savait pas encore. Ses danses attiraient davantage l’attention en particulier au TrocadĂ©ro. Dans Les Rascals, on aperçoit Sidney, l’ancien animateur radio, « hĂ©ros Â» d’une Ă©poque avec son Ă©mission tĂ©lĂ©visĂ©e consacrĂ©e au Hip Hop.

 

Bob Marley, lui,  Ă©tait mort depuis peu. Serge Gainsbourg Ă©tait encore vivant. La New Wave avait dĂ©jĂ  ses standards. Le Hard Rock Ă©tait entrĂ© par effraction dans les collèges avec AC/DC et Ă©tait Ă  certains ados  ce que le Rap allait devenir ensuite d’abord pour des ados de citĂ©s et de banlieue. Le Zouk arrivait mais le monde ne connaissait pas encore le groupe Kassav’. Le Rock semblait encore ĂŞtre le plus grand armateur musical du monde.

Les Rascals, film sonorisé par le groupe Delgrès, prend particulièrement soin d’ancrer son histoire aussi avec quelques pochettes de disques telles celle de l’album vinyle Thriller de Michaël Jackson ou celle du groupe antillais Lazair.

 

Culturellement, Jimmy Laporal-TrĂ©sor a d’ailleurs axĂ© son film selon un point de vue antillais. Et, j’ai beaucoup aimĂ© sa description de certains des codes de la culture antillaise. Qu’il s’agisse du recours au CrĂ©ole lors de certains passages ou des relations du hĂ©ros Rudy (l’acteur Jonathan Feltre) avec sa mère. Depuis au moins Rue Cases-Nègres adaptĂ© par Euzhan Palcy en 1983, en passant par les films de Jean-Claude Flamand-Barny plus tard, Les Rascals contribue Ă  l’édification d’une mĂ©moire cinĂ©matographique qui inclut les Antilles françaises…dans l’Histoire de France. Car le film montre au grand jour que les Antillaises et Antillais, en France, Ă  l’image de bien des immigrĂ©s, ont pu ĂŞtre considĂ©rĂ©s comme les restes d’un univers souterrain, ignorĂ©, vitrifiĂ©, sacrifiĂ©.

 

De gauche Ă  droite, Mandal ( l’acteur Marvin Dubart), Boboche ( l’acteur Taddeus Kufus), Rudy ( l’acteur Jonathan Feltre) Rico ( l’acteur Missoum Slimani) Sovann ( l’acteur Jonathan Eap).

Mais Les Rascals est aussi de ces films Ă  classer dans la catĂ©gorie des Stand By me : des copains qui se connaissent depuis l’enfance et meurtris par un environnement et un trauma communs se soudent jusqu’à espĂ©rer franchir ensemble le mur du son du monde adulte.

 

Franck Unimon, ce jeudi 23 février 202