« Ohhh, le survivaliste ! » s’est marré A… au téléphone, un de mes amis, alors que je venais de lui apprendre que j’avais prévu de me rendre à la Survival Expo 2023. Evénement qui, cette année, pour la première fois, allait se dérouler dans le parc floral de Vincennes. Non loin de son château, de son bois, de sa caserne militaire aussi mais également de la cartoucherie de Vincennes où se trouve, entre-autres, la compagnie du théâtre du Soleil dirigée par Ariane Mnouchkine. Mais bien-sûr, tout cela, en plus du fait que jusqu’alors j’avais connu le parc floral principalement pour ses très bons concerts estivaux (dont un du Cubain Chucho Valdès) n’entraient pas en ligne de compte. Comme l’anecdote qui veut quand même que cet ami et moi nous étions rencontrés pour la première fois, plusieurs années auparavant, lors de notre service militaire à l’hôpital inter-armées Bégin qui se trouve assez proche, à Saint-Mandé.
D’ailleurs, il avait pu arriver à cet ami et moi de passer par la caserne de Vincennes au début de notre service militaire.
Si on a suivi jusqu’alors ce que j’ai écrit, un rapide calcul mental très simple nous apprend que j’ai pris plusieurs mois pour me décider, aujourd’hui, à parler dans mon blog de la Survival Expo 2023. Nous sommes en octobre, en automne. Et cette manifestation a eu lieu quelques semaines avant le début de l’été le 9 et le 10 juin dernier….
Cela donne une idée des précautions que j’ai préféré prendre avant de me lancer. ( J’en parle ou je n’en parle pas ?).
Mais en complétant ce calcul mental « très simple », on peut aussi déduire que je suis au bord de l’âge, presque vieillard. Peut-être suis-je une personne presque sénile après tout ? Pour l’instant, je ne peux pas encore le savoir. Cependant, ce qui est certain, c’est que la personne qualifiée de survivaliste est une bête curieuse.
On peut mettre de tout dans une personne survivaliste.
Comme dans une dent creuse. On peut décider qu’il s’agit d’une personne complotiste, raciste, misogyne, esclavagiste, despotique, timbrée, paranoïaque, dangereuse. On peut la voir comme une personne complètement à côté de la plaque. Ou comme son opposé, la super aventurière ou l’héroïne sexy et indépendante, sosie de Lara Croft, Gamora ou Bear Grylls, Mike Horn des vrais hommes robustes, aptes à tout, comme ils devraient tous l’être au lieu de ceux que l’on a, des fétichistes de la bandelette et du bandana.
Oui, je connais un petit peu quelques classiques. Je suis donc d’abord très suspect avant d’être pré-sénile.
Mais j’ai néanmoins- j’y tenais- répondu à mon ami :
« ça fait du crossfit – entre trois à cinq fois par semaine– ça, se laisse pousser une barbe de plusieurs mois (qu’il prend soin d’aller sefairetailler chez son barbier attitré régulièrement) et ça me traite de survivaliste!».
Mon ami a commencé à rigoler. Je devrais peut-être ajouter aussi que mon ami a plutôt le crâne rasé. Alors que quand je l’avais connu, il avait des cheveux, fumait et avait emmagasiné quelques kilos en trop. Et, le sport, pour lui, était une destination touristique à haut risque ou un programme que l’on regardait à la télé.
Cependant, mon ami m’avait exprimé spontanément ce qui peut se profiler dans la tête de beaucoup lorsqu’on leur parle de survivalisme. Si pour certains, le survivalisme est une nécessité ou une évidence, pour d’autres, c’est une démarche louche.
Cet article, mon article, ne pourra ni combattre ni épuiser ce qui peut être reproché au survivalisme par beaucoup. Car cet article, mon article, raconte surtout ma perception du survivalisme. Perception qui peut évoluer selon mes expériences et certains événements.
Pour tout « arranger » ou pour rajouter un peu de trouble et de mystère, j’ai profité d’une étonnante et plutôt rare insomnie pour commencer, cette nuit, à rédiger cet article alors qu’il était quatre heures du matin. Alors que je suis en vacances depuis plusieurs jours et encore pour une bonne semaine. Je suis donc, en principe, tout ce qu’il y a de plus détendu d’autant que personne chez moi n’a de problème de santé particulier ou déclaré.
J’ai bien attrapé le Covid pour la première fois – à ma grande surprise- début septembre, mais c’était une forme minorée qui m’a permis en plus d’avancer de quelques jours mes vacances. Et, je sais avoir participé auparavant à un déménagement par plus de trente degrés. Ce qui a sûrement contribué à rajouter de l’épuisement à un état de fatigue préétabli par une alternance de travail de jour et de nuit ainsi que quelques heures sup travaillées durant cet été.
Professionnellement, je sais aussi qu’un poste attractif m’attend début janvier et mon banquier me laisse tranquille. Je n’ai donc pas de raison particulière, pas plus que d’habitude, pour être angoissé ou me réveiller en sueurs en pleine nuit comme on peut le voir dans certains films. Je n’ai pas les inquiétudes de l’acteur Michael Shannon dans le film Take Shelter de Jeff Nichols. Ni celles des protagonistes de The Creator de Gareth Edwards. Un film ( The Creator) qui m’a assez ennuyé, exceptions faites du regard ( et de la réflexion) qu’il porte sur l’intelligence artificielle, les relations multiculturelles et multiraciales mais aussi sur le handicap, j’ai vu dans ce film une nouvelle énorme machinerie cinématographique dans laquelle les Américains refont à nouveau leur guerre du Vietnam. Je ne vois pas trop non plus ce que l’on trouve à l’acteur David John Washington si j’ai son père ( Denzel) en tête. J’ai donc préféré nettement Anatomie d’un couple de Justine Triet et encore plus L’été dernier de Catherine Breillat. Pourtant, ces deux films n’ont rien à voir avec The Creator et Breillat est une personnalité aussi insupportable que remarquable. Et, j’attends avec impatience la deuxième partie de Dune par Denis Villeneuve, un réalisateur, dont les films, pour l’instant, m’ont tous plu. Contrairement à Christopher Nolan dont j’ai trouvé le Oppenheimer beaucoup trop clinquant.
Le dimanche
Selon l’ouvrage La Peur et la Haine de Mathieu Burgalassi, paru en 2021, « anthropologue français spécialiste de la pensée politique, des questions sécuritaires et de la violence », les principales motivations des personnes survivalistes radicales seraient le racisme et la peur de l’autre.
J’ai aimé lire son ouvrage il y a plusieurs mois maintenant. Jusqu’à maintenant, je n’avais pas pris le temps d’en parler dans mon blog.
J’avais lu son La Peur et la Haine bien avant de connaître les dates du Survival Expo de ce mois de juin.
C’est un livre qui m’a étonné car pendant plusieurs jours, alors que je continuais de le parcourir, je me demandais s’il s’agissait d’un roman noir étant donné la façon dont c’était écrit, dans un style très entraînant ou s’il s’agissait véritablement d’une enquête anthropologique.
Je me suis même demandé si Burgalassi avait inventé ce qu’il racontait. Car je ne m’attendais pas à cette façon de présenter ses expériences.
Dans son livre, Burgalassi nous explique avoir poussé particulièrement loin l’expérience du survivalisme. Il nous dit d’abord ce qui l’a amené à entrer dans cet univers. Une agression physique dont lui et un de ses amis auraient été victimes une nuit en revenant d’une soirée ratée. Ainsi que le fait d’avoir grandi dans une certaine insécurité économique et sociale. Burgalassi, d’origine immigrée, est issu d’un milieu social très moyen. A le lire, les fins de mois ont été régulièrement assez difficiles autant pour manger que pour se divertir. Certaines personnes sont habituées à des soirées feutrées ou tout va bien, Burgalassi a plutôt dû se rabattre sur certaines soirées craignos. Ce genre de soirée où l’on peut pronostiquer dès le départ, avant même de s’y rendre, qu’il va y avoir une embrouille car celle-ci est incluse dans le contrat.
Selon Burgalassi, il a commencé à se sortir de ça en développant ses compétences dans le survivalisme. En débutant par les sports de combat et la Self Défense de type Krav Maga. En s’y montrant assidu. Et, tout porte à devenir assidu si l’on craint pour sa peau.
Puis, avec le temps et devenu anthropologue, il a voulu en savoir plus sur le survivalisme et, pour cela, a rencontré des gens qui sont véritablement dedans. En France mais aussi à l’étranger, aux Etats-Unis. Dans certaines conditions limites ou très dangereuses par moments.
J’avais entendu parler de Burgalassi par un article lu dans Télérama. Il y était fait référence à un podcast dans lequel on pouvait entendre Burgalassi parler aussi de son livre. J’ai écouté le podcast d’une vingtaine de minutes, je crois. Et, si ce que disait Burgalassi dans ses conclusions m’intriguait mais ne me dérangeait pas, car fondé a priori sur son enquête, j’avais par contre été agacé par les réactions des journalistes- quel(le)s cruches !- qui l’interviewaient ( je me souviens de femmes et d’hommes) trop contents de dépeindre les survivalistes comme des abrutis chevronnés et dangereux. Tout allait au mieux dans le monde, il y avait juste quelques crétins, là, des survivalistes, qui s’imaginaient qu’il fallait flinguer les autres à bout portant et dont il fallait éviter de s’approcher. Pour cela, il convenait de les laisser dans leur coin, là où ils se terraient de toute façon, à l’abri de la civilisation et, surtout, de la raison. Ils finiraient bien par crever en attrapant le tétanos après s’être blessés avec une de leurs boites de conserves qu’ils auraient essayé de perforer avec leurs dents ou en développant un cancer après avoir bu l’eau de leur puits bourrée de phosphates pendant plusieurs années.
Je suis un survivaliste du dimanche. Comme il existe des sportifs du dimanche. Ce que je « sais », je l’ai beaucoup lu ou regardé.
Cela signifie que, comme beaucoup de personnes peuvent le faire avec le sport ou lorsqu’elles prennent certaines résolutions, en matière de survivalisme, je suis un faible. Mais je vais un peu mieux m’expliquer avant de repartir me planquer.
Je suis né en ville et ai toujours vécu en ville. Lorsque je me trouve en présence de plantes ou d’arbres, je suis incapable de retenir le nom des plantes ou des arbres que je vois, lorsque j’en vois, comme de les décrire. Cela peut être pareil pour certains oiseaux. A part reconnaître les pigeons, peut-être parce-que je me reconnais en eux, je ne sais pas très bien reconnaître tel ou tel type d’oiseau que je croise. Je ne sais pas faire un feu. Je ne sais pas construire une cabane en bois avec quelques branches. Si on me parle de tarp, je suis capable de faire la différence avec un pétard. Je vois très bien de quoi il s’agit parce-que j’ai lu et regardé des images, j’en ai peut-être même acheté un, car-on-ne-sait-jamais, mais je ne m’en suis jamais servi.
Je sais casser des œufs, je peux réussir à planter un clou dans un mur, je sais lacer mes chaussures tout seul, je peux porter un seau rempli d’eau, mais je ne suis pas très manuel. Au fond, et par bien des aspects, je suis un assisté. Je m’en remets à des personnes plus compétentes que moi, à des artisans, à des commerçants, à des animateurs, aux services publics, à l’Etat, aux autres, à ma fainéantise, à ma patience mais aussi à mes soumissions.
J’ai quand même quelques capacités. Je ne suis pas un incapable majeur ou complet. Autrement, je ne serais même pas là à écrire cet article.
Mais si je peux encore m’émerveiller devant celles et ceux qui font du scoutisme dès leur enfance ou en repensant au fait que mon grand père paternel, maçon lorsqu’il travaillait, avait construit sa maison pratiquement tout seul, durant ses congés, je me sens incapable de faire de même. De construire l’équivalent de cette maison où, à Morne Bourg, j’ai passé mes premières vacances en Guadeloupe alors que j’allais avoir 7 ans. Pourtant, mon grand père paternel savait à peine lire. Et il ne savait pas écrire. J’ai donc une culture générale et une situation économique et sociale qui lui sont, officiellement, très nettement supérieures, et, sans doute ai-je pu être une de ses fiertés et, pourtant, il est pratiquement évident que le survivaliste le plus accompli entre lui et moi, c’était lui, de très loin. Et, je ne parle pas d’un homme qui vous guettait dans la pénombre avec un fusil de chasse. Mais de quelqu’un que j’ai connu retraité, qui menait sa vie tranquille avec ses voisins, sa famille, qui se rendait régulièrement sur sa mobylette- sans porter de casque- jusqu’à son jardin où il avait établi une petite cabane en tôle et bois dans laquelle il se posait. Et où se trouvaient les ananas ou les légumes qu’il avait pu cultiver ainsi que ses « poules » qu’il appelait en sifflotant pour les nourrir de grains de maïs tandis que ses coqs de combat, eux, étaient dans leur cage. Je parle d’un homme de la campagne, qui, de temps à autre, partait faire un tour à Marie-Galante, et avait plus de soixante ans, lorsque, pour la première fois, il a pris l’avion pour venir en France, en île de France, où plusieurs de ses enfants- dont mon père- étaient partis vivre.
On est ici très loin du portrait de forcenés qui aspirent à vous «déflagrer » ou à vous délocaliser les vertèbres cervicales.
Nos besoins
Les journalistes qui ont « entouré » Burgalassi m’avaient agacé car je les imaginais, relativement jeunes (la trentaine), citadins calfeutrés (ça existe), privilégiés, très sûrs d’eux mais en fait très ignorants et peuplés de préjugés. S’ils étaient a priori dépourvus de toute intention de se servir d’une arme à feu contre autrui, leur immaturité (je crois que l’on peut dire ça) légitimée gratuitement et avec facilité au travers d’un médium capable de toucher une grande audience m’est apparue assez irresponsable.
Dans d’autres circonstances, je me rappelle encore avoir entendu une jeune femme dire un jour fièrement :
« Ce n’est pas parce-que je porte une jupe que je ne sais pas changer une batterie de voiture ! ».
Pour moi, cette jeune femme avait un état d’esprit survivaliste. Je suis persuadé que ces journalistes qui ont reçu Burgalassi ne savaient pas changer une batterie ou une roue de voiture. Par contre, beaucoup de personnes survivalistes, à mon avis, armées ou non, s’appliqueront à apprendre à le faire ou à penser à une solution alternative en cas de besoin.
Le terme « besoin » devrait être plus souvent employé lorsque l’on parle de survivalisme à mon avis. De quoi avons-nous vraiment besoin ? Comment satisfaisons nous nos besoins ? Avec quels moyens? A quelles conditions ? A quel prix ?
Je me méfie des « c’était mieux avant ». Cependant, lorsque je nous vois pratiquement tous, la tête penchée et rivés, quasi cramponnés à nos téléphones portables dans les transports en commun où dès qu’il nous faut attendre cinq minutes ou plus, je me dis que nous nous sommes faits capturer.
Je ne crois pas que la satisfaction de nos besoins nécessite que nous soyons autant, aussi souvent et à une telle fréquence, en train de regarder nos téléphones portables. Je l’ai même vu chez des couples dans les transports en commun. Un malaise s’installe au sein du couple, hop, baguette magique, je sors mon téléphone portable et je pianote dessus ou regarde quelque chose. Il vaut mieux ça que de se prendre le malaise- ou le problème- de face.
Le silence, l’observation, la patience et la contemplation sont les ennemis de nos écrans mais aussi de nos « navigations » compulsives sur internet.
Je crois qu’ils font partie de nos besoins mais nous passons outre. Des cascades d’images et de stimulations à volonté se chargent de faire barrage entre eux et nous. Il ne faut surtout pas penser. Il ne faut surtout pas y penser. Il faut vibrer.
J’en suis déjà à cinq pages pour cet article. Et, je me dis que cela fait déjà suffisamment. Il est certain que je vais retrouver plus facilement le sommeil cette fois. Mais je crois aussi que plus de pages, pour cet article, cela fera trop d’un seul coup. Il vaut mieux que je passe par une première partie que je termine maintenant.
Fin de la première partie. A bientôt. Avant la fin du monde, bien-sûr. Sourire. En attendant la deuxième partie, on peut lire quelles avaient été mes impressions lorsque, l’année dernière, je me rendais pour la première fois au Survival Expo Paris, alors situé du côté de la Villette Survival Expo Paris 2022 .
On a plutôt la vingtaine voire un petit peu moins lorsque l’on va voir Rosalia ce samedi 22 juillet 2023 au festival LOLLAPALOOZA à l’hippodrome de Longchamp. Beaucoup de jeunes femmes. Des hommes eau. Même un homme en fauteuil roulant, poussé par un de ses amis, a voulu traverser la foule pour être au plus près de la scène. Un des agents de sécurité, pédagogue, a su être convaincant :
« Au moindre mouvement de foule, la première personne à se faire écraser, ce sera vous ».
Plus d’une heure avant le concert de Rosalia, toutes les bonnes places face à la scène sont prises. Elles l’étaient dès le concert précédent. J’ai essayé de me faufiler comme j’ai pu. Je n’ai pas pu faire mieux que d’être sur le côté à plus d’une vingtaine de mètres de là où ça s’est « passé ». Mais j’avais un grand écran au dessus de moi et mon matériel photo et audio. Ci-dessous, le titre Saoko :
J’ai beaucoup hésité avant de venir à ce concert de Rosalia. 89 euros la place pour la journée du festival ( contre 28 euros pour aller voir Oumou Sangaré récemment. Voir Oumou Sangaré en concert) . Seule Rosalia me donnait envie de venir. Rosalia, dont le dernier album Motomami – que j’avais acheté et écouté- avait été adoubé par la critique. Rosalia dont les vidéos provocantes déployaient une audace et une assurance en même temps qu’un certain « contraste».
Ici, la langue espagnole prend le dessus sur la langue anglaise. Rosalia se joue des tendances musicales. Techno, kizomba, Flamenco, Reggaeton, la forme piano/voix ou d’autres allures d’Amérique latine peuvent ainsi cohabiter. Elle peut aussi très bien danser. On peut considérer qu’elle sait tout faire et avoir l’impression d’assister à un renversement de modèle où l’Espagne, pays « minoré » sur la scène musicale internationale, prend en quelque sorte sa revanche sur les pays anglo-saxons qui, au moins depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale environ, dominent le monde avec leurs artistes et leurs névroses Rock. Ci-dessous, une autre vidéo montrant Rosalia lors du festival LOLLAPALOOZA:
Adémas (en outre), Rosalia est une femme séduisante, affirmée, indépendante et ouverte aux différents genres. On a donc le Jackpot. Une musique et une culture différentes. Même si, même si, lorsque l’on y regarde bien, Rosalia, par certains aspects, et sûrement malgré elle, colle à l’image que l’on se fait d’une femme espagnole. Brune, ardente, virilement- presque brutalement- et fièrement sensuelle.
Mais c’est toujours ça. Ne nous privons pas d’un bon moment d’autant que l’on a payé- plutôt cher- pour cela. Et marché aussi près de deux kilomètres au moins depuis l’endroit où l’on a pu trouver où se garer.
Il fait beau ce samedi et il s’agit du dernier concert de la tournée mondiale de Rosalia qui a été un très grand succès. Désormais, Rosalia fait partie des grandes vedettes et cette prestation a été présentée comme l’événement à ne pas manquer. Son concert de décembre dernier, à Paris, a bien été déclaré « meilleur concert de l’année ». On n’a pas envie de rater des moments pareils.
Dès l’entrée sur scène de Rosalia avec ses danseurs et le début de son concert avec le titre Saoko, le public est happé par la toile Rosalia. Laquelle a gardé la main et la maitrise totale sur sa représentation. Passionnée et souriante, oui, mais pas liée à l’approximatif.
Rosalia est très à l’aise avec l’image et les technologies de communication moderne. Elle aime aussi beaucoup se voir même si elle tourne cela aussi en dérision. Le public, lui, l’adore, et reprend plusieurs de ses paroles. Il se trouve bien un public hispanophone parmi nous mais d’autres se sont aussi visiblement mis à l’Espagnol.
J’aurais préféré être plus près de la scène, entendre des titres de quatre minutes ou plus, et y voir des « vrais » musiciens. Le festival, officiellement, entend proposer une alternative à notre société d’argent en nous imposant un système de recharge. Système qui, d’après mon expérience, expose surtout à offrir au festival ce que l’on n’a pas pu dépenser. Qu’est-ce que cela m’a agacé par ailleurs de devoir me promener avec un gobelet en carton rempli d’eau simplement « pour des raisons de sécurité ». A moins de filouter, Il est devenu de plus en plus difficile de se trouver à un concert avec une bouteille d’eau munie de son bouchon en plastique. Car trop d’artistes ont reçu des projectiles inopportuns lors de leur prestation.
Mais le spectacle valait le déplacement. Et, lorsqu’ensuite, je me suis mis à réécouter l’album Motomami, j’ai su que cela m’avait véritablement plu.
UNSPECIFIED – JANUARY 01: Photo of Finley QUAYE (Photo by Marc Marnie/Redferns). Finley Quaye, probably in the beginning of the 2000’s.
Finley Quaye
« You, alone ? » is what I heard in one of John Lee Hooker’s songs.
Maybe in that song where John Lee Hooker says « Oh, come back, baby, please don’t go one more time… ».
I surely wish he would come back.
He did not seemed to be impressed when he came a few years after Portishead, Massive Attack, Tricky (supposed to be his nephew but I never knew if they are really relatives) and Björk in the end of the nineties.
That is probably why he escaped memories. Finley Quaye.
Because Portishead, Massive Attack, Tricky, Björk and others by then were the musical ships which had already taken us to the 21 first century which had to be our next target.
For sure, this is not the only reason why Finley Quaye, today, does not appear in many play lists and I know it but I can barely face it.
Because it’s too hard.
Music is about memory. Our intimate memory. It’s like skin. But some skin we blend with what our lives are made of when when we listen to it. Every time I read the comments below some videos I watch on Youtube you will find someone writing « It reminds me of this, it reminds me of that ». It happened that night while catching Tricky’s Christiansands on video and on stage. While watching some videos of Finley Quaye.
That’s right.
Since we were born and even before, we listen to various amounts of music. Music, for us, in rich and « peaceful » countries, can also be like abundant water. It is so easy to get some that many times we do not really care about what’s going on. Apart for what we already like and are focused on, the « rest » is just here and we do not have to particularly pay attention until many years later, suddenly, we remember the rest we had left.
And we say :
It was really the good times. I was doing this. Everything was easy then and all smiles were open.
Of course, this feeling is deceiving in some way. But Music does not interfer with our sense of happiness. It stimulates us. It rarely bury us even if we are listening to some depressive music. By saying this I think of all the fans in the world who are so fond – almost to the grave- of artists like Leonard Cohen and Nick Cave.
I have tried to get involved with their music but all I can hear until now is a grave coming next to me. We cannot dance while hearing Leonard Cohen or Nick Cave. But we can probably pray for our souls while hearing their songs and I do not want to pray for my soul while listening to some music because I must probably have sinned some day.
I want to live even if what I am going through is painful. Even if I feel responsible for that.
We cannot plan to dance if we want it while listening to Miles Davis’s albums too but I don’t mind. Perhaps because Miles did not sing and it was for the best. The voice can be everything.
But Finley Quaye was someone else.
Finley Quaye’s Music was utter stimulation. It was not a burial.
Most Reggae artists can be divided in three or four sections.
Those who made History :
Burning Spear, Bob Marley, Albert Griffith and the Gladiators, Lee Scratch Perry, Steel Pulse, Aswad, U-Roy, Black Uhuru, LKJ, and many many more.
Those who respectfully follow the greatest and do nothing really new almost like musicians and singers playing in a zoo or for tourists.
Those who play dancehall.
Those who get Dub.
Finley Quaye Managed to do something else without denying the best the eldest had done before. His « obedience » to some standards of the Rastafarism even sounded odd when he spoke in a jamaican way . What had this young man ( he was about 25 then when he became famous ) to do with Rastafarism by the end of the 1990’s in a world dealing with the dope of internet, cellular phones and a movie like Matrix by the then brothers Wachowski ? Despite the irresistible clocks of Rap Music.
I ignored- or I easily forgot- at that time that Finley Quaye had spent most of his life in Scotland, a country I was very pleased with in the beginning of the 1990’s. But in my opinion it does not explain the sort of blast Finley Quaye remains in my mind when I listen to his music today almost 25 years later.
Reggae, Electro ( some say Trip Hop), Jazz, Soul. And what a voice ! In his voice, I find a crooner, a charmer and a…muezzin.
You want to listen to a musician and singer who does not pretend when he is in Music ? Finley Quaye is one of these artists you can rely on. Dig his albums Maverick A Strike and Vanguard.
I confess ( this is my Leonard Cohen and Nick Cave part) I p(r)ay little attention at what Finley Quaye says in his songs whose texts I guess can somewhat be heard like the result of a mix of esoteric, crazy stuff and automatic writing.
But, musically….
Speaking of Finley Quaye, some People often recall the titles Even after all or Sun is Shining. It is only recently I have heard that Rita Marley gave Finley Quaye the permission to « replay » that song of Bob Marley whereas she had always refused any permission of that kind for years.
I am OK with Sun is shining and I like the symbol of Finley Quaye playing it after Bob Marley. And like many others I really enjoy Even after all so delicate and yet so warm and strong like blood taking care of Life in our veins as if it will never stops. And that song never stops when you love it.
But what about Falling ? How can people forget about that song ? Again, Finley Quaye does not force you. He simply has all the keys (notes) to open your mind in 3 minutes and 19 seconds against 3 minutes and 56 seconds for Even after all.
There are others songs of Finley Quaye in Maverick A Strike ( 1997) and Vanguard (2001) that are worth listening : Ultra Stimulation, It’s great when we are together, When I burn off the distance, Feeling Blue and others….
But I want to deal with another song of Finley Quaye that is not very famous :
White Paper.
Probably that song is not a masterpiece for its lyrics. But hear the Music ! At first, this song has some sort of psychedelic atmosphere and seems only to be fun. Nothing special. Then the break occurs at 2’43. What a break. Only great musicians can do that. Finley Quaye did not need to sing to hide himself. His music can speak for itself.
I saw him once at a concert, when he came to France, in Paris in the nineties at Le Zenith, I think, or at L’Elysée Montmartre ?
He seemed to be bored when he sung his most known songs. Perhaps because he had to and was fed up with this permanent do it again during his tour.
After a while, about an hour, (after his contract was honoured ?) we had a different Finley Quaye in front of us. Playing good music and definitely enjoying it.
That night, he was dressed with military clothes. I forgot when Finley decided to throw his vest at the crowd as a gift. But the circles made by his arm were too strong and too fast. The vest got so high it reached one of the spotlights. It never went down. Like Finley Quaye’s music.
When we listen to his Music now, we find pleasure and some regrets about our Youth. Finley Quaye found addiction to bad experiences and drugs.
Nostalgia, too, and its unsung dreams can be an addiction. From the start, Finley Quaye’s Music was safe due to its riddles of Nostalgia. But I wouldn’t notice. Because I was then getting old and I was not ready yet to admit for I was still hooked on my Youth.
Our Youth can vanish before we see it. Let’s enjoy it. Perhaps Finley Quaye ‘s Music is also a lot about that warning. I hope Finley Quaye – and his female and male twins- will recover enough from this to be at his best again.
Franck Unimon, the 2 of october, 2023. Today is my birthday and when I woke up this morning I had not scheduled to write my very first article in English for my blog balistiqueduquotidien.com. It came in English and I have tried my best. I hope this article will be enough enjoyable for a reading despite my english mistakes. See you !
Sa voix est un empire, un jaillissement. Ses chants sont des troncs sans artifices. Il est difficile pour moi, le citadin occidental handicapé, qui a touché des bouts de l’Afrique seulement au travers de musiques ou de films, d’en dire beaucoup sur Oumou Sangaré en évitant les erreurs. Après l’avoir entendue ou avoir entendu parler d’elle pendant des années, c’était seulement la première fois que je la voyais en concert. Oumou Sangaré, la féministe « Quand je rencontre un homme intelligent, je me dis, ah, lui, sa maman l’a bien éduqué ! ». Oumou Sangaré, l’optimiste, malgré les blessures « On va oublier ces petits problèmes ». La voyageuse « Hier, on était à Lisbonne ». Celle qui multiplie les projets avec d’autres artistes et les inspire (Cheikh Lô, Tony Allen….). Celle qui danse et qui fait de l’humour. Oumou Sangaré nous a présenté l’Afrique « traditionnelle », des siècles et des villages, mais aussi l’Afrique moderne.
Moins connue que les vedettes anglaises et américaines ( elle ne chante pas en Anglais et ne fait pas de strip tease) qui en Europe ou aux Etats-Unis monopolisent les grandes scènes, c’est pourtant une diva qui était présente dans le 19èmearrondissement de Paris, à la Villette, ce mercredi 6 septembre 2023. Celles et ceux qui l’avaient précédée ou qui étaient avec elle sur scène ne dépareillaient pas.
Me’Shell Ndégeocello au festival Jazz à la Villette ce 1er septembre 2023.
« Elle est fatiguée et elle joue pour elle ».
C’est téléphone éteint, que je suis retourné voir Me’Shell Ndégeocello. La première fois, c’était après son premier album, Plantation Lullabies, sorti en 1993. Et, ce vendredi 1er septembre 2023, je suis assis au premier rang (j’ai récupéré la place d’une personne partie un peu plus tôt) quand, après le concert, en sortant de la salle, deux hommes passent devant la scène. Ce faisant, l’un des deux livre son opinion à l’ami qui l’accompagne.
Après son premier album, Plantation Lullabies, Me’Shell (cela s’écrivait comme ça à l’époque. Aujourd’hui, cela s’écrit Meshell) était passée à l’Elysée Montmartre. J’étais allé la voir seul, comme ce vendredi soir. Je ne voyais pas qui aurait pu venir assister à ce concert avec moi.
Me’Shell, c’est trente ans de carrière ou plus. Me’Shell n’est pas
« connue ».
Pour ce concert, j’ai lu qu’on la présentait comme celle qui avait joué avec David Bowie ? On l’aura peut-être confondue avec quelqu’un d’autre. Peut-être avec la bassiste et chanteuse Gail Ann Dorsey que je connais moins bien et qui a pu être particulièrement médiatisée après la mort de David Bowie récemment….
Autrement, pour rendre Me’Shell Ndégeocello un peu plus familière, on dit aussi qu’elle a joué avec les Rolling Stones. Je n’ai pas vérifié.
J’ai bien davantage retenu que Me’Shell avait fait un très bon duo avec le bassiste, compositeur, arrangeur et producteur Marcus Miller (Rush Over). Je continue de me demander pourquoi leur collaboration s’est limitée à un seul titre. Marcus Miller, depuis près de vingt ans maintenant, est devenu un très grand nom des festivals de Jazz. Il est désormais en tête d’affiche au premier plan devant la scène alors que, traditionnellement, le bassiste est plutôt « derrière ».
Me’Shell n’a pas le pedigree de Marcus Miller mais elle a quand même joué avec pas mal de musiciens qui comptent sur les étoiles autant que sur leurs doigts pour faire de la musique. Elle a ainsi pu jouer avec Marc Ribot et Chocolate Genius. C’était aussi à la Villette.
Je me suis aussi mis dans la tête que Oren Bloedow, sans pouvoir le certifier, l’un des membres du groupe Elysians Field avec Jennifer Charles, avait été un de ses guitaristes sur scène lors d’un de ses concerts à l’Elysée Montmartre ou à la Cigale.
Sinéad O’Connor, décédée récemment, a aussi chanté sur un des disques de Me’Shell. Peut-être sur le disque hommage à Nina Simone dont a été retrouvé l’enregistrement d’un de ses concerts mémorables dans les années 60.
Il y a aussi eu le saxophone Jacques Schwarz-bart qui a pu revendiquer, pour son premier album, d’avoir joué du Gwo-ka Jazz. Elle ( Me’Shell) avait aussi participé au disque hommage à Fela en reprenant le titre Gentleman qu’elle avait fait plus que fredonner.
Elle a aussi côtoyé Ravi Coltrane, l’un des enfants de John Coltrane et Alice Coltrane. Ou collaboré avec Anthony Joseph.
Me’Shell Ndégeocello aurait beaucoup aimé pouvoir jouer avec Prince mais celui-ci, de son vivant, ne le lui a jamais permis.
Funk, Jazz, Soul, Punk Rock, Reggae, folk, Rap, chant, compositions, interprétations, et sans doute d’autres tempos, militante, Me’Shell Ndégeocello n’a eu peur de rien et celles et ceux qui aiment la musique le lui rendent bien.
J’ai dû la voir quatre ou cinq fois en concert en incluant le concert de ce vendredi soir.
En réécoutant plusieurs de ses titres tout en écrivant cet article, je me dis qu’il y a très peu de bassistes, qui, comme elle, peuvent aussi bien varier du Funk ou du Jazz au Reggae sans que cela ne ressemble à un pastiche. Lorsque, pour Miles, Marcus Miller avait composé le titre Don’t Lose your mind sur l’album Tutu (c’était en 1986), je me rappelle d’un camarade de lycée, joueur et chanteur de Reggae, qui avait reconnu la rythmique du duo Sly Dunbar et Robbie Shakespeare. Cela m’avait fait drôle de « voir » le grand Marcus Miller devenir en quelque sorte l’élève de deux artistes Reggae incontestés ( Serge Gainsbourg les avait bien sollicités pour ses albums Reggae).
Lorsque j’écoute la basse de Me’Shell sur ses titres Reggae, je l’entends, elle, et non Robbie Shakespeare, décédé il y a quelques mois, que j’ai pu et peux particulièrement aimer écouter avec le groupe Black Uhuru des Michaël Rose, Duckie Simpson et Puma Jones ou sur des titres Dub.
J’aime particulièrement, par exemple, ce que fait Me’Shell sur le titre Forget my name, selon moi, un titre contre le fanatisme religieux.
Beaucoup moins connue que Depeche Mode, Sting et U2 ( elle est arrivée après eux).
Bien moins connue que les vedettes de ces dix à quinze dernières années aux concerts ou festivals à 100 000 personnes ou davantage pour lesquelles il faut débourser facilement plus de cinquante euros pour les voir en concert. Sans doute, doit-elle être située aux côtés de Sinéad O’Connor, déjà citée, mais aussi de PJ Harvey ou Björk, des artistes qui se sont imposées à partir des années 90 et qui avaient d’autres quêtes que la recherche de la célébrité.
Des quatre, aujourd’hui, il en reste trois. PJ Harvey passera bientôt en Octobre à l’Olympia pour deux dates qui ont été rapidement complètes. J’irai la voir pour la première fois afin d’essayer de rattraper le fait de l’avoir ratée au festival Rock en Seine au début des années 2000 moyennant une place de concert aux alentours de 60 euros.
Björk, je l’ai « vue » plusieurs fois sur scène depuis ses débuts. La dernière fois étant cette année où elle avait clôturé le festival Rock en Seine (2007 ?) avec Declare Independance. Il y a plus de dix ans. C’était avant qu’elle (Björk) ne joue dans des salles à cent euros la place en moyenne.
Pour Me’Shell, ce vendredi 1er septembre 2023, après au minimum trente ans de carrière, la place assise et numérotée a coûté 35 euros. C’est un peu plus que pour Oumou Sangaré que j’irai voir ce 6 septembre, également à la Villette : 28 euros.
Il est indiscutable que depuis « You say that’s your boyfriend, funny, he wasn’t last night….maybe he needed a little change, a switch…. », il y a trente ans, Me’Shell s’est assagie et a grossi. Elle n’est plus cette bitch garçon manqué qui gouvernait le public et son groupe avec son allure et sa basse.
« Elle est fatiguée et elle joue pour elle ».
Même assise comme elle l’a été ce vendredi durant tout le concert, mettez-lui une basse dans les mains, alignez à côté une des vedettes actuelles avec le même instrument et regardez ce qu’il en sort. J’ai aimé voir l’artiste Rosalia au mois de juillet lors d’un festival à l’hippodrome de Longchamp. Pour elle et cette date unique en région parisienne cette année, j’ai finalement accepté de payer près de 90 euros.
Juste pour elle.
Si Rosalia maitrise tout ce qui a trait à la mise en scène et les technologies actuelles de communication, réseaux sociaux inclus, pour moi, entre elle et Me’Shell, il en est une des deux qui est bien plus musicienne que l’autre. Et une qui est plus plasticienne que la précédente.
Ce vendredi, quand le bassiste, placé derrière Me’Shell, a commencé à lancer les premières notes de son titre Virgo présent sur son dernier album The Omnichord Real Book, rejoint par une batterie afro-beat qui rappelle autant Fela que le batteur Tony Allen ( décédé durant la pandémie du Covid) je me suis dit qu’il lui fallait toujours très peu pour nous atteindre.
Me’Shell Ndégeocello fait partie de cette minorité d’artistes (musicaux ou autres) qui ont décidé de prendre beaucoup de risques pour vivre de leur Art et qui y sont parvenus, trente ans durant.
Rosalia n’a pas encore ces trente ans de carrière.
Il en est tant d’autres, artistes ou spectateurs que l’on ne voit pas et que l’on n’entend pas sur aucune scène trente ans après. A la Villette ou ailleurs. Il m’arrive d’ailleurs de regretter encore le Finley Quaye de Even after All .
On peut rater un concert. Cela reste moins grave que de rater sa vie.
Me’Shell a-t’elle joué pour elle, ce vendredi soir ? Me’Shell n’a plus envie de performance. Lorsqu’elle a chanté en Anglais « Je suis reconnaissante d’avoir des yeux, je suis reconnaissante d’avoir des oreilles pour entendre », c’était sincère. On peut la trouver mystique. Elle s’est bien convertie un moment à la religion musulmane ou a semblé en tout cas s’en rapprocher. Mais elle fait ce qu’elle peut afin de se désabonner de l’ego. Bien d’autres artistes, avant elle, sont passés par là. Prince y compris, qui, un temps, ne voulait plus s’appeler Prince.
Alors que, nous, spectateurs, nous sommes nombreux à venir en concert afin de satisfaire ou de soigner notre ego. Souvent, nous repartons comme nous sommes venus et lorsque nous avons changé un peu, les effets de ce changement sont transitoires. Nous ne prenons pas beaucoup de risques à venir en spectateurs.
Il y avait sûrement un côté « prêche » dans l’attitude de Me’Shell ce vendredi soir. Elle n’était pas là pour nous flatter et nous caresser le ventre avec sa basse. Même si elle est passée par I’m digging you like an old soul record ( un de ses titres les plus connus de son premier album, Plantation Lullabies ) mais aussi par Love Song ( titre qui a plusieurs variantes, dont une variante Reggae, sur son album Comfort Woman sorti en 2003).
Et, il faudra un moment mentionner, aussi, qu’elle a perdu ses parents. Elle les a d’ailleurs dessinés sur son dernier album. Un album sur lequel on peut d’ailleurs trouver certains de ces croquis un peu à la façon de Miles sur son album Star People…
Me’Shell Ndégeocello restera celle qui n’est pas très connue et qui fait partie de ces artistes évitant la célébrité. En cela, on peut peut-être aussi la rapprocher de bien d’autres artistes. Cependant hier soir, dans la salle, on a pu voir quelques enfants d’une dizaine d’années, des jeunes d’une vingtaine d’années ainsi que des personnes, noires et blanches, d’une cinquantaine ou d’une bonne soixantaine d’années. Il y avait des Français mais aussi, à l’oreille, des Américains. On doit sans doute penser qu’une grande majorité de ce public était venue écouter de la musique de « vieux » car, aujourd’hui, ce que joue Me’Shell est en dehors de certains codes de cette musique-spectacle qui marche :
Aucune chorégraphie en forme de fesse, principalement des musiciens sur scène avec leurs instruments, pas de Rap ou de Reggaeton, pas d’autotune. Tout cela est d’un ringard car, selon certains critères, ce concert aurait donc été une sorte de « troisième âge » de la musique. Et, Me’Shell, pourtant novatrice, serait donc une artiste dépassée et nous aussi qui sommes venus ou revenus l’écouter. Même si, cachés ou non, il doit bien y avoir des artistes qui marchent très bien actuellement, depuis des années (ou plus tard) qui connaissent leur Me’Shell par cœur.
Bien-sûr, j’aurais préféré un autre concert de Me’Shell d’autant que j’ai l’impression que l’acoustique de la philarmonie est un peu un filet de pêche qui empêche la musique de passer. Mais on mesure la réussite d’un concert au fait qu’en rentrant chez soi, on aime ensuite réécouter les titres de l’artiste que l’on a vu (e) sur scène. Si ce vendredi soir, dans le train du retour, j’ai écouté Crash Landing et Come down hard on me de Jimi Hendrix suivi du Botanical Roots de Black Uhuru, alors que j’écris cet article aujourd’hui, je ne me fatigue pas de réentendre un certain nombre des titres de Me’shell.
La beauté du geste est un titre déjà utilisé pour un certain nombre d’ouvrages et d’œuvres. On peut même trouver un album du chanteur français Gérald de Palmas, sorti en 2016, qui porte ce titre. Le film de Sho Miyake passe par un de ces principes assez radical, voire dogmatique, énoncé par le réalisateur ukrainien Myroslav Slaboshpytskyi lorsqu’il a présenté, son film The Tribe, récompensé à Cannes en 2014 :
Le fait d’employer des mots pour parler nous sert souvent à mentir ou à dissimuler nos pensées. De ce fait, dans The Tribe ( 132 minutes), tous les protagonistes (en majorité sourds et muets) s’expriment dans la langue des signes sans le moindre sous-titre pour les spectateurs.
Keiko Ogawa ( l’actrice Yukino Kishii)
Keiko Ogawa, l’héroïne de La beauté du geste, malentendante (pour éviter de dire sourde) utilise principalement la langue des signes pour s’exprimer. Et la boxe. Elle écrit aussi dans son journal intime.
Il faut avoir pratiqué un Art martial durant dix mille heures en moyenne afin de pouvoir peut-être « obtenir » le premier niveau de la ceinture noire ou son équivalent.
C’est une règle- ou une vérité- qui varie selon les individus, selon le degré d’intimité qu’ils développent avec leur intériorité mais aussi avec celle de leurs enseignants ou leurs Maitres, des compétences de ces derniers, de leur sincérité, mais aussi selon les époques et les contextes.
Il est très difficile de savoir à l’avance à combien de rencontres, de gestes et d’expériences correspondent ces dix mille heures. Il s’agit juste d’un chiffre, d’une indication, pour donner un repère comme on pourrait signaler une étoile, une métaphore ou un indice afin de montrer vers où continuer de se diriger. Il ne s’agit pas d’une vérité rigide et comptable.
La ceinture noire ou tout autre « grade », quelle que soit la discipline concernée,
est aussi une culture du coeur.
Et du gong.
On peut aussi comparer ça à une histoire d’Amour. Ou à toute rencontre qui, pour nous, dispose d’un décompte particulier.
Keiko Ogawa est sans doute en dessous des 10 000 heures de pratique quand « Monsieur le directeur » ( l’acteur Tomokazu Miura) de son petit club de boxe la remarque.
Le gong est une frontière. Ce n’est pas un mur.
Une des erreurs possibles, à parler de La Beauté du geste, film franco-japonais ( par la production) qui sortira dans les salles ce mercredi 30 aout 2023, serait de seulement l’enfermer dans le ring pour toute comparaison avec le film Million Dollar Baby réalisé en 2004 par l’Américain Clint Eastwood. Un film adapté par l’acteur et réalisateur Clint Eastwood d’après une des œuvres de l’auteur FX Tool, très grand connaisseur- et amateur sur le tard- de boxe anglaise.
Le directeur et entraîneur du club de boxe ( l’acteur Tomokazu Miura ) et Keiko Ogawa ( l’actrice Yukino Kishii).
Certes, l’héroïne de La Beauté du geste, Keiko Ogawa -interprétée par l’actrice Yukino Kishii- peut rappeler celle de Million Dollar Baby jouée par l’actrice Hillary Swank. Deux femmes venues sur le tard à la boxe anglaise et dont l’engagement va saisir les regards de deux entraîneurs vétérans de la boxe. D’un côté, Monsieur le directeur d’un petit club de boxe japonais (l’acteur Tomokazu Miura), de l’autre, l’ancien cow-boy et inspecteur Dirty Harry, Clint Eastwood, devenu réalisateur après avoir d’abord été un acteur mondialement connu.
19 années séparent ces deux films et le Japon est différent des Etats-Unis. Même si au décours de Hiroshima, Nagasaki et d’abord de Pearl Harbour leurs histoires se sont confrontées mais aussi rapprochées.
Pour moi, en 1h39, La Beauté du geste émeut plus loin que Million Dollar Baby.
Sans vedettes mondialement connues. Avec un budget moindre. Sans musique insidieuse.
Le film défie aussi – et fait oublier- la pandémie du Covid dont on aperçoit les masques et qui avait fait de nous des sacs (ou des visages) de peur et d’angoisse.
Keiko Ogawa n’a pas peur. Elle n’aime pas avoir mal. Célibataire, femme de ménage plutôt modeste dans un hôtel et dans le pays des mangas qui reste un pays riche et machiste corseté et entraîné par la recherche perpétuelle de la victoire économique, elle prend des coups et donne du courage. Celles et ceux qu’elle croise sont à son image.
La beauté du geste de Sho Miyake est un très bon film à voir avant le gong de la rentrée mais aussi après.
Les algorithmes puissants d’internet ou de youtube m’ont amené cette nuit à regarder un documentaire d’une trentaine de minutes en replay sur Arte consacré au sujet des addictions à la pornographie. J’y ai découvert le témoignage de quelques jeunes Allemands (des hommes exclusivement), plutôt d’un bon milieu socio-culturel apparemment ( journaliste….) qui ont développé cette addiction.
Ps : Concernant notre addiction à nos écrans et aux vidéos qui nous sont très facilement proposées sur nos ordinateurs, tablettes et smartphones via internet, et aux conséquences possibles de cette addiction, je vous invite à lire l’ouvrage Algocratie (vivre libre à l’heure des algorithmes) d’Arthur Grimonpont, paru en 2022.
Cette nuit, après avoir studieusement regardé ce documentaire sur l’addiction à la pornographie, toujours sur « recommandation» des algorithmes, parmi plusieurs propositions manifestement aiguisées par mes navigations précédentes, j’ai regardé un second documentaire d’une trentaine de minutes (c’est la durée à laquelle je me suis limité, que je me suis astreint cette nuit à ne pas dépasser) consacré à ces personnes ( des « hippies ») venant se «réfugier » sur l’ile des Canaries afin d’y changer de vie.
Dans ce documentaire, nous voyons quatre personnes vivant dans une grotte ou ayant vécu dans une grotte. Des personnes de 30-45 ans (même si un homme de 62 ans, devenu riche après avoir travaillé dans l’immobilier, est ensuite venu se joindre à eux) sans enfants.
On pourrait se dire : après avoir prétendu s’intéresser aux addictions en regardant un documentaire tout de même consacré à la pornographie, voilà que maintenant il se mate un documentaire sur un mode de vie inspiré des hippies. Alors que l’on sait très bien que les hippies ne sont pas les derniers pour s’envoyer en l’air et partouzer.
Comme on peut se dire, aussi, que « Changer de vie, les addictions », ces deux sujets semblent peut-être ne rien avoir en commun.
Il est vrai que ce ne sont pas ces deux documentaires « nocturnes » abordant le sujet de l’addiction à la pornographie et de la volonté de changer de vie qui m’ont inspiré le titre de « dissociation » pour ce chapitre. Chapitre, qui, pour ce blog, se résumera à cet article.
En revanche, il y a une forme de dissociation dans le fait, d’une part, que des algorithmes prennent le relais de multiples et incessantes incantations ou sollicitations sociales, culturelles, économiques, publicitaires, mensongères, informationnelles, politiques ou autres pour tenter de tirer parti -et profit- de nos failles psychologiques afin de nous faire adopter des comportements qui nous contredisent, nous nuisent et nous font ignorer nos besoins les plus évidents. Et, d’autre part, le fait qu’un métier comme celui d’infirmier consiste plutôt à être au chevet de celles et ceux qui ont des failles psychologiques et autres sans volonté voire sans espoir d’en tirer un quelconque profit économique et/ou politique.
D’un côté, une société qui « s’enrichit » économiquement avec méthode en vampirisant les forces vives d’une majorité d’êtres humains. En lui faisant payer le prix fort en termes de santé physique, mentale, économique et autre.
D’un autre côté, des infirmières et des infirmiers (pour ne parler que de ces « acteurs » de la santé sociale mais aussi mentale et physique) qui puisent ou ont constamment à puiser dans leurs ressources et leurs réserves personnelles ( qui peut encore croire que la seule application d’horaires à la minute, de protocoles, de slogans, de « trucs », de « recettes », de séances de méditation et de yoga et de cours appris à l’école suffisent pour s’appliquer à veiller sur les autres pendant une bonne quarantaine d’années ?! ) pour en soutenir d’autres, et qui, parallèlement à cela, trinquent et subissent comme la majorité les coûts et les coups de la vie sans s’enrichir matériellement à l’image de ces nouvelles grandes fortunes ou de ces milliardaires qui passent souvent pour des génies, des pionniers, des visionnaires, ou des personnes d’autant plus respectables, exemplaires et indispensables qu’elles ont :
« réussi ».
Qu’est-ce que la réussite ? Pour moi, ce serait de ne pas être pris , d’abord, pour une serpillère ou un domestique. Mais, également, de ne pas être essoré, bousillé, cancérisé et déprimé alors que je suis jeune et désireux de vivre. De parvenir à me maintenir, le plus longtemps possible, en bonne ou en très bonne santé mentale et physique. Ou que, en cas de défaillance de ma part, qu’il se trouvera suffisamment de personnes autour de moi pour intervenir rapidement afin de veiller sur moi afin de me sauver, de me protéger et de m’aider à me remettre sur pied.
Mais aussi pour me conseiller, me guider voire m’escorter hors de ce qui peut m’ atteindre ou me nuire.
Au vu de ces quelques critères, je ne suis pas sûr que la réussite soit au rendez-vous pour beaucoup de monde y compris pour moi-même.
Et, cela, malgré tous les efforts ou sacrifices consentis, jour après jour, année après année en échange d’une éventuelle, future ou hypothétique reconnaissance sociale, économique et personnelle.
Amen.
La reconnaissance faciale est peut-être plus certainement ce qui risque de m’attendre au lieu de la grande reconnaissance sociale attendue par tous après bien des années d’efforts, de responsabilités, de sacrifice et de travail.
Pourtant, constamment, nous baignons dans une sorte de liquide et d’ambiance amniotique, pour ne pas dire hypnotique, qui nous laisse croire ou entrevoir que réussite et bonheur crépitent, gisent – voire, rugissent- et se répandent à nos pieds telles des cascades auxquelles il suffirait de s’abreuver. Alors même que la réussite et le bonheur nous glissent entre les doigts ou que nous n’en apercevons que les reflets sans cesse difractés et qui, bien-sûr, s’éloignent « un peu » lorsque nous en approchons.
Ma vision, lors de ce dernier dimanche du mois de juillet, un mois de grandes vacances estivales, est sans doute trop pessimiste. Pourtant, je n’ai pas promis de me tuer cette nuit ou avant l’arrivée du mois d’aout 2023. Et encore moins de me muter en grand gourou ou en marabout.
Ni gourou, ni loup-garou, j’aimerais seulement être sûr de pouvoir et de savoir quand arrêter de m’agiter lorsque l’on me présente, comme cela arrive fréquemment, toutes sortes d’opportunités, d’affaires à ne pas manquer et des bons coups qui sont, finalement, des plans foireux ou stériles, pour ne pas dire des plans de désespoir, des pertes de temps, d’argent et d’énergie.
Dire qu’il faut apprendre à faire le tri ne suffit pas.
Je crois qu’il faut aussi être discipliné. Savoir être discipliné. Apprendre à se discipliner. Apprendre à rester lucide et concentré. Et clairvoyant. Ne pas partir dans tous les sens.
C’est à dire :
Savoir rester suffisamment attentif et perméable à ce qui nous entoure sans pour autant se laisser ou se faire embarquer n’importe où et vers n’importe quoi, n’importe qui.
Savoir rester ancré.
En se mettant dans un état finalement assez proche d’une certaine…dissociation.
Je sais que ce terme de « dissociation » fait partie des symptômes d’une maladie psychiatrique. Mais je sais aussi que ce terme est employé, selon moi à bon escient, au moins par Léo Tamaki, un expert en Aïkido qui se reconnaîtra s’il parcourt les lignes de cet article et qui en sourira certainement ( lire Les 24 heures du Samouraï au dojo d’Herblay ce 20 et ce 21 Mai 2023, 2ème édition ).
Nous ne parlons sans doute pas de la même dissociation, bien-sûr. Au sens psychiatrique, la dissociation emporte ou dévie son sujet ou sa victime. Un peu comme un sous-marin qui, par cinquante ou cent mètres de fond, prendrait l’eau par ses écoutilles et qui tenterait de rester maitre de sa trajectoire et de sa vitesse malgré la force des courants et les grands volumes d’eau qui le perturbent de plus en plus.
Le terme « dissociation » employé par cet expert en Aïkido pourrait aussi être employé par un musicien, un batteur par exemple, lorsque celui-ci est capable, avec sa main droite de réaliser de façon répétée et harmonieuse un geste différent de celui de sa main gauche. Et l’on pourrait dire ça, bien-sûr, d’une pianiste. Ou d’une personne adepte du jonglage.
Un exemple simple de cette action très difficile à maitriser- la dissociation- me suffira, je pense, pour l’illustrer.
Récemment, j’ai revu sur youtube ( dont les séduisants et puissants algorithmes savent nous retenir pendant des heures devant des vidéos qu’ils nous proposent) un extrait de ce concert du bassiste Foley McCreary avec le batteur Chris Dave. Ils étaient accompagnés du saxophoniste Zhenya Strigalev. Voici la vidéo en question. Si « sa majesté » Youtube accepte que je la partage :
https://youtu.be/2ZaMEGnI5iQ
C’était à Londres aux alentours de 2009 dans une reprise spéciale de You are underarrest, un titre interprété par Miles Davis dans les années 80.
Au début du titre, Foley McCreary décide d’une ligne de basse qu’il répète. Une ligne de basse qu’on pourra estimer comme « simple » si l’on fait abstraction du fait que Foley est un exceptionnel joueur de basse et que, nous, nous sommes surtout les spectateurs moyens d’un concert de musique ou, plus simplement :
Nous sommes des amateurs de musique qui regardons des professionnels qui sont, généralement, aussi, des passionnés ou des « fous » de musique.
Je ne suis pas certain que je pourrais vraiment supporter de passer plusieurs jours de suite avec ces musiciennes et musiciens que j’admire. De suivre leur rythme de vie intégralement. Car celles-ci et ceux-ci, probablement, me parleraient de musique, parleraient de musique et joueraient de la musique bien au delà de ce que je serais capable de supporter. Et sans doute, cette analogie est-elle possible avec d’autres artistes ou des Maitres d’Arts martiaux comme avec toute personne passionnée par et pour….sa discipline. Peut-être aussi peut-on se dire que cette passion serait aussi envahissante et dévorante que certains délires, mal maitrisés et mal canalisés, qui amènent certaines personnes à se retrouver enfermées…dans un service de psychiatrie. Ou isolées de leurs proches.
Dans cette vidéo, neuf minutes durant, Foley » le mutant » va tenir sa ligne de basse malgré les « attaques » rythmiques variées de Chris Dave et ses chorus avec le saxophoniste Zhenya Strigalev.
On pourrait s’amuser à imaginer que Chris Dave et Zhenya Strigalev sont des algorithmes qui font tout pour détourner Foley McCreary de ses limites et de sa ligne de basse. Pour nous, spectateurs et amateurs de musique, ces neuf minutes de musique sont une expérience hors norme. Et un très grand plaisir si l’on aime ce genre de musique. Foley McCreary réalise devant nous la dissociation parfaite.
Sauf que dans la vraie vie, nous sommes rarement des Foley McCreary. Et, en plus, il nous faut tenir bien plus que neuf minutes par vingt quatre heures pour tenir notre propre cap. Celui qui nous assure de nous rapprocher véritablement de ce qui nous convient véritablement.
Limbo de Soi-Cheang avec les flics Will Ren ( l’acteur Mason Lee) et Cham Lau ( l’acteur Ka Tung Lam).
Au cinéma : Limbo de Soi Cheang ou Mission : Impossible Dead Reckoning partie 1 de Christopher McQuarrie ?
Hier, après plusieurs semaines ou plusieurs mois d’absence, je suis retourné au cinéma. J’ai d’abord vu le film Limbo du réalisateur Hong-Kongais Soi Cheang. Un film très plébiscité par la critique. Je viens par exemple de lire sur le net, pour le qualifier, la phrase « un bijou de noirceur ». Mais, aussi : « Le polar de l’année ».
A Paris, j’avais interviewé Soi Cheang, je crois, lorsque j’étais journaliste cinéma bénévole pour le magazine Brazil. Sans doute pour le film Accident réalisé…en 2009. Il y a 14 ans, donc. Comme nous vivons avec notre temps, je vais plutôt parler d’hier.
Hier, après Limbo, au lieu de rentrer chez moi, je suis allé voir à la suite le premier volet du dernier Mission : Impossible Dead Reckoning partie 1 « avec » l’acteur Tom Cruise en Star du film.
Tom Cruise ( ou sa doublure) sur sa monture au dessus du vide dans Mission : Impossible Dead Reckoning partie 1.
Ce sont deux films sortis récemment ( ce 12 juillet 2023 pour l’un et l’autre) que j’avais très envie d’aller voir. Et ce sont deux films qui m’ont « déçu ».
J’ai tout de même une nette préférence pour Limbo.
« Limbo » de Soi Cheang avec Ka Tung Lam dans le rôle de Cham Lau.
J’ai d’abord aimé la photo, le noir et blanc. L’ambiance polar. Les nervures colorées des installations électriques de la ville où se tient l’enquête. Ou, plutôt, la tempête.
J’ai aimé le côté « confucéen » de Limbo, je dirais, où plusieurs des protagonistes portent un fardeau ou sont dans une impasse tel un destin et essaient ou de se racheter ou de l’accepter. J’ai aimé le personnage féminin de Wong To, plusieurs fois maltraitée, et qui est une description assez complète des multiples violences infligées aux femmes dans notre société masculine, urbaine, jeune, riche et moderne.
Wong To ( l’actrice Yase Liu) dans « Limbo ».
J’ai aimé la combattivité de Wong To, sa débrouillardise supérieure, bien supérieure finalement, à celle des femmes des deux flics qui sont les autres héros du film.
Cham Lau et Wong To.
Je me suis dit que ce film ne pouvait être qu’asiatique pour avoir pu s’autoriser à montrer un personnage féminin sur grand écran se faire malmener de cette façon. En France, on estimera peut-être que ces violences répétées sur le personnage de Wong To font de nous des voyeurs et des complices. Pour ma part, je considère ces parties du films plutôt comme les documents testamentaires des victimes de violences morales et physiques qui disparaissent généralement dans l’indifférence générale.
J’ai moins aimé le côté Seven du film, pour faire un rapprochement avec le film américain avec Brad Pitt et Morgan Freeman, pour l’ambiance.
J’ai moins aimé l’antagonisme, car il fallait bien en créer un, assez toc entre, d’un côté le flic expérimenté de terrain, instinctif, roublard, assez expéditif, adepte de la justice personnelle et le jeune flic intello, premier de la classe, bon élève, bien sous tous rapports, d’une intelligence très supérieure, binoclard et bien-sûr marié à une épouse toute docile, patiente, compréhensive et bien-sûr enceinte de lui.
D’un côté, le bourrin au grand cœur, de l’autre, la classe politique de celui qui a fait de très bonnes études et qui pourrait prétendre plus tard à une carrière exceptionnelle.Pourtant, au départ, cela me plaisait beaucoup que l’un des deux héros porte des lunettes. Car on voit encore très rarement des héros de films d’action ou de polars qui portent des lunettes. Mais dans Limbo, cette caractéristique est un peu trop téléphonée, un peu trop scolaire. Le réalisateur ne fait pas grand chose, je trouve, pour développer davantage le personnage de Will Ren à partir de ses lunettes. C’est juste un « truc » qui va permettre, à un moment donné du film, d’avoir son importance. Même si, bien-sûr, on peut très bien avoir une très bonne vue organique et être frappé de cécité morale ou de coeur….
On remarquera aussi que les deux femmes des flics qui sont bien-sûr des épouses « modèles » et des Pénélope n’ont pas d’autre possibilité que de vivre dans un écrin ou dans un cocon en demeurant dans l’enceinte d’une ignorance complète- ou virginale- du monde et de sa violence. Pour l’avoir peut-être ignorée, une des deux est durement exposée à la violence du monde extérieur qui éclate bien-sûr par surprise.
Comme un viol.
Comme on le voit, il y a des très bonnes choses dans Limbo. Ces deux héros, flics, ainsi que Wong To, qui vont jusqu’au bout d’eux-mêmes et au delà. Pour résoudre des mutilations et des assassinats de femmes marginales, tout en bas de l’échelle sociale (immigrées, camées, prostituées mais aussi mutilées autant socialement que physiquement…) dont, finalement, la société hong-kongaise, comme toute « bonne » société bien propre sur elle aurait plutôt tendance à se foutre. Sauf, bien-sûr, pour satisfaire en express et en liquide certains besoins honteux ou difficilement assumés.
Tom Cruise, Ving Rhames et Simon Pegg.
Ensuite, il y a Mission : Impossible – Dead Reckoning partie 1 avec Tom Cruise, Simon Pegg, Ving Rhames et sa voix caverneuse.
Quel que soit ce que l’on peut penser de Tom Cruise « le scientologue », je considère maintenant depuis des années que c’est un très bon acteur. Et qu’il aurait pu ou aurait dû, depuis longtemps, recevoir un Oscar. Je le pense d’autant plus que durant des années, Tom Cruise l’acteur-vedette m’a beaucoup exaspéré. Jusqu’à ce que je le voie dans Né un 4 juillet qui n’est pas mon film préféré. Ou dans Magnolia qui m’a davantage conquis.
Mais je ne vais pas plaindre Tom Cruise. D’autant qu’il s’en sort très bien tout seul avec ou sans cascade. Que ce soit dans des films d’action qui marchent tels que Mission : Impossible ou Jack reacher. Ou dans des films d’auteur.
Tom Cruise peut et réaliser des prouesses physiques et des cascades étonnantes. Comme il peut aussi être très drôle. Je me souviens encore de son rôle secondaire dans Tonnerre sous les Tropiques de Ben Stiller où il apparaît déguisé et se montre particulièrement drôle en producteur de cinéma et aussi très porté sur l’autodérision. Pourtant, le film date de….2008.
Si je me permettais une comparaison, je dirais que Tom Cruise est peut-être au cinéma ce que Novak Djokovic est au tennis. On peut ne pas les aimer pour leurs positions, leurs attitudes ou leurs propos. Des positions, des attitudes et des propos, d’ailleurs, que je désapprouve (concernant la scientologie, le nationalisme serbe, à propos du Covid…).
Par contre, il est impossible de leur dénier leur professionnalisme dans leur domaine ainsi que le niveau exceptionnel ou hors-norme de leurs performances mais aussi de leur longévité comme de leur carrière.
Dans Mission : Impossible – Dead Reckoning partie 1, on retrouve bien-sûr tout le côté « James Bond » de Tom Cruise. Car, pour moi, dès que Tom Cruise a commencé à mettre la main sur le personnage de Ethan Hunt dans Mission : Impossible, ça a toujours été pour se tailler sur mesure son costard de « James Bond ». Ce qui est bien sûr très loin de la série télévisée que nous avons pu voir dans les années 70-80. Mais, ça, c’est le cinéma.
Bon, dans Mission : Impossible- Dead Reckoning, il y a du spectaculaire, des grandes cascades, des courses poursuites, de l’humour.
Mais c’est très bourrin. J’ai très envie d’écrire :
« C’est très Américain-bourrin ». C’est « Nous sommes les Américains et on va tout défoncer ! ». Soit version militaire, soit version parc d’attractions gigantesque à l’Américaine.
Je sais bien que l’on va voir ce film pour se distraire. Et, je suis d’ailleurs allé le voir pour cela. Autrement, je serais allé voir L’Amour des forêts de Valérie Donzelli avec l’actrice Virginie Efira qui continue de beaucoup me plaire et m’étonner et l’acteur Melvil Poupaud, qui nous raconte apparemment de façon réaliste une histoire d’emprise psychologique au sein d’un couple.
Sauf que je trouve à Mission : impossible-Dead Reckoning partie 1 des allures de fête foraine des années 70. On a des très gros moyens pour faire boum-boum alors on fait boum-boum et vroum-vroum. Je ne vois pas ce qu’il y a des très novateur dans ce film. En termes de cascades il y a néanmoins sans aucun doute du très bon travail de réalisé.
Mais en termes d’intrigue. De personnages….on est très très loin de la subtilité de Casino Royale avec Daniel Craig ( ou les Jason Bourne auquels les Mission : Impossible « de » Tom sont aussi comparés) qui cumulait action musclée et surprenante et, tout de même, un peu de mystère. Plus d’épaisseur quant aux personnages joués. Alors que là, tout est souvent caricatural. Rentre-dedans. Presque vulgaire. Beaucoup trop pop-corn pour moi.
Il faut nous le dire si ce film est plus une comédie qu’un film d’action. Les femmes dans Mission-impossible : Dead Reckoning partie 1 ? Il y en a quatre qui ont un rôle a priori conséquent et qu’il vaut mieux éviter de prendre à la légère. Ce serait donc un film féministe ?
Sans surprise, Ethan Hunt les retourne toutes ou devient d’une façon ou d’une autre leur protecteur imminent. Car il les lui faut toutes bien-sûr tandis que ses deux acolytes, Simon Pegg, Ving Rhames mais aussi tous les autres mâles de la bande ont bien d’autres préoccupations.
Et Ethan Hunt réalise cela sans coucher car ce n’est pas un proxénète. Comment fait-il ? La scientologie peut-être.
Néanmoins, j’ai bien aimé la définition de Ethan Hunt :
« Un caméléon télépathe ». C’est bien trouvé.
Tom Cruise à Venise ( ou sa doublure) dans Mission : Impossible Dead Reckoning- partie 1.
Si dans Limbo, on ressent les coups portés mais aussi de l’empathie pour les personnages, devant Mission-impossible : Dead Reckoning partie 1, tout le décor fait toc. On a beau faire défiler les endroits et flirter avec bien des références cinématographiques ou autres ( Venise…) on se rappelle tout le temps ou souvent que l’on est au cinéma. Alors que dans Limbo, le film nous enserre quand même dans sa toile.
Les 24 heures du Samouraï au dojo d’Herblay ce 20 et 21 Mai 2023, 2ème édition
Chevrotine peut-être cinglée, ce samedi 20 Mai 2023, je traçais depuis quelques minutes sur l’autoroute A15 lorsque, malgré toute l’attention préalable portée à mes préparatifs, je me dis que j’aurais peut-être dû, finalement, la veille, acheter deux nouveaux kimonos plutôt qu’un seul. J’allais tourner avec deux kimonos lors de ces 24 heures du Samouraï. ( Avant les 24 heures du Samouraï au dojo d’Herblay ce 20 et ce 21 mai 2023).
Nous étions plus de deux cents ce week-end pour cette deuxième édition des 24 heures du Samouraï au dojo d’Herblay. Soit, à bien y repenser aujourd’hui, à peine un petit peu moins de personnes qu’il n’y en aura lors du concert de Beyoncé qui se déroulera demain soir au stade de France, ce vendredi 26 Mai 2023.
Pour pratiquer dans notre couvent martial situé dans le Val d’Oise, nous avons troqué nos vêtements ordinaires et civils pour des amas de kimonos majoritairement blancs faisant de nous des volontaires pour cet événement…peu ordinaire. Mais l’état d’esprit, plus que la couleur, le « niveau » d’expérience, la discipline martiale ou de combat pratiquée, ou le grain de la tenue vestimentaire, a été, ici, ce qui importait.
Débutant(e)s comme chevronné(e)s, élèves ou Maitres, femmes ou hommes, adolescent(es) ou vétérans, marcheurs ou en fauteuil roulant, issus du Karaté, du Systema, du Penchak Silat, Ju Jitsu brésilien, de l’hapkido, de l’Aïkido, du Wing Chun, du Tae Kwondo ou de toute autre expérience martiale ou de combat ont été acceptés une fois le droit d’entrée acquitté. Pour moi, le tarif solo avait été de 85 euros en prévente.
Dans ce « couvent » resté ouvert entre ciel et terre et souhaité comme tel, c’est en passant par la porte d’entrée principale que nous avons tous empruntés, qu’un peu avant midi, ce samedi 20 Mai 2023, une représentante de l’Etat est venue nous saluer, nous encourager et aussi nous apprendre qu’elle avait vu ce dojo sortir de terre plusieurs années auparavant.
Lors de la création de ce dojo, certaines et certains des personnes qui ont participé à ces 24 heures du Samouraï ce week-end étaient déjà nées, d’autre pas. Et l’on peut souhaiter que d’autres qui naîtront après cette deuxième édition vivront un jour cette expérience. Qu’elles et qu’ils proviennent de Tours, de Toulon, de Limoges, de Normandie, de Bretagne, de Belgique, de l’Est de la France, du Mexique, de l’île de France ou d’ailleurs comme cela a été le cas ce week-end.
L’équipe organisatrice (constituée de bénévoles fédérés par Tanguy Le Vourch, Issei Tamaki et Léo Tamaki) de ces 24 heures du Samouraï avait tout prévu :
Rappelons d’abord que deux à trois jours avant le début de « l’étape » de ces 24 heures du Samouraï, un mail avait été envoyé aux participantes et participants les informant qu’il était prévu un certain retard sur la ligne J de train reliant Paris à la gare d’Herblay (environ 25 minutes dans les conditions normales). Ce mail mentionnait l’heure du début des inscriptions fixé à 10h45 pour une cérémonie d’ouverture à 11h45. Et recommandait de prévoir son sac de couchage, un oreiller, son nécessaire de toilette, mais aussi de s’hydrater régulièrement.
A son arrivée, chaque participant (e ) après s’être acquitté(e) de son droit d’entrée a reçu un sac en carton à l’effigie de l’événement contenant une bouteille d’eau minérale, une banane, une pomme et une canette de coca-cola. Une carte lui a également été remise. Celle-ci allait lui permettre de faire tamponner chacune de ses implications aux ateliers animés par dix experts. Après avoir participé à quatre ateliers, la participante ou le participant obtenait un bracelet avec une couleur correspondant à son nombre d’expériences martiales vécues.
Lors de ces 24 heures du Samouraï, 16 ateliers d’une heure quinze chacun furent proposés avec, en moyenne, quinze minutes de pause durant l’intervalle.
Dans le dojo suffisamment grand (750 mètres carrés ?), des vestiaires, des douches et des toilettes sont disponibles facilement et gratuitement. Un service de restauration propose à un tarif très abordable de la nourriture de qualité ou faite main (2 euros une part de quiche lorraine, autant pour un bol contenant quatre ou cinq portions de pastèque…). Une équipe de pratiquants de shiatsu est repérable sur une partie du tatami et opère à titre gracieux. Des ostéopathes et des infirmières sont présents sur l’événement. Une petite salle est réservée à l’aire de repos. Quelques bokken et bâtons peuvent être prêtés à celles et ceux venus les mains nues.
Trois musiciens traditionnels faisant partie d’une association parisienne font résonner leur voix et leurs tambours lors de certains moments de l’événement.
Une ambiance musicale de circonstance et humoristique est entretenue à la fin de chaque intervention au moment de la séance de photo du groupe de participants entourant l’expert (Opération Dragon, Kill Bill, la série Kung Fu, Highway to hell d’AC/DC et d’autres références….).
Une équipe de bénévoles, pratiquant aussi lorsqu’elle le peut, permet de se sentir bien accueilli, contribue à nous donner des repères, et assure, aussi, le très bon déroulement de ces diverses séquences.
L’intrigue et les « excuses » de l’année dernière concernant les 24 heures du Samouraï
L’année dernière, quand je pris connaissance de la première édition des 24 heures du Samouraï à Nantes, je fus d’abord intrigué.
Je me suis demandé comment, en passant 24 heures à pratiquer des Arts martiaux ou des disciplines de combat, on pouvait véritablement y prendre plaisir. Je percevais plus ça comme de la surconsommation et de la frénésie à l’image de ce mode de vie et de ces millions d’images par secondes dans lesquels nous sommes régulièrement immergés et reclus.
Mais il était déjà trop tard pour participer. Et puis, Nantes, c’était « trop loin » pour moi.
Par contre, pour Herblay, je n’avais aucune excuse.
Herblay est la ville où j’ai véritablement découvert le monde du travail dans un service de nuit, dans lequel je travaillais seul, douze heures durant. La personne qui m’avait recruté pour ces vacations de nuit ne m’avait pas prévenu. J’avais vingt ans. Je n’avais pas le choix. J’avais besoin de commencer à gagner ma vie. A l’époque, je n’avais pas le permis de conduire et je prenais le train depuis chez mes parents. Cela me prenait environ 45 minutes pour faire le trajet et en marchant un petit peu depuis la gare d’Herblay. En prenant des trains gris qui me faisaient penser à des trains de Blues.
Depuis, j’ai quitté mes parents. J’ai déménagé. J’ai un emploi fixe dans lequel je travaille de jour comme de nuit. Je me suis marié. Je suis devenu père. Et, j’ai même appris à conduire une voiture. La gare de Herblay est désormais à moins d’une vingtaine de minutes en train par la ligne J depuis chez moi. Et, me rendre en voiture au dojo d’Herblay depuis mon domicile me prend à peu près autant de temps.
Sans le faire exprès, en me rendant aux 24 heures du Samouraï, malgré la technologie de guidage aujourd’hui présente sur tous nos smartphones, je me suis un peu trompé d’itinéraire ce samedi à un moment donné. Et, pour retrouver ma route vers le dojo d’Herblay, pour la première fois depuis à peu près trente ans, je suis repassé devant cet établissement où, à 20 ans, j’avais commencé à découvrir le monde du travail ainsi que le travail de nuit en 19h/7h.
Je suis aussi allé à cette deuxième édition des 24 heures du Samouraï par curiosité.
Durant ces 24 heures, j’ai pratiqué avec plus d’une vingtaine de participants et participantes. J’ai d’ailleurs reconnu deux ou trois personnes que j’avais croisées quelques mois plus tôt au Centre Tissier, à Vincennes, lors du stage animé par Hino Akira Sensei et organisé par Léo Tamaki.
Certains des pratiquants que j’ai rencontrés lors des 24 heures du Samouraï (comme moi pour elles et eux) ont parfois voulu savoir ce que je pratiquais.
Je me suis étonné à chercher mes mots et à avoir un peu de mal à répondre.
Officiellement, je suis un très jeune et sporadique élève (depuis l’année dernière) de Jean-Pierre Vignau, Maitre en karaté Shotokan. J’ai aussi pratiqué le judo avec Pascal Fleury, aujourd’hui 6ème ou 7ème Dan de Judo, il y a plus de vingt ans.
Cependant, aujourd’hui, je crois être moins cloisonné qu’il y a plusieurs années.
Lors de ces 24 heures du Samouraï, j’ai dit que je faisais du karaté pour répondre quelque chose. Mais je crois que je suis moins dans cette « limite ».
« Avant », je me cantonnais à une discipline et j’étais presque fier de m’emmitoufler dedans. Dans cette croyance et cette certitude que « ma » discipline était la meilleure.
Bien-sûr, on a compris que c’était surtout moi qui, une fois que je marchais sur le tatami, me sentais meilleur que d’ordinaire. Une fois que je quittais kimono et tatami et que je retrouvais la vie courante, certaines difficultés de l’existence restaient insaisissables et résistaient terriblement à mes ippon.
Il y a plusieurs années, encouragé en cela par Pascal Fleury, mon prof de Judo, il m’était arrivé d’aller un peu au dojo d’été. Nous étions nombreux à être sur le tatami.
Un jour, un des intervenants dont j’ignore évidemment le nom – vu que, lorsque l’on estignorant, on l’est souvent à peu près jusqu’à l’infini– nous avait tenu un petit discours. Beaucoup de judokas ceinture noire étaient parmi nous.
L’ intervenant, très certainement ceinture noire de Judo et enseignant de judo, nous avait exhorté à apprendre, aussi :
« A donner des coups de poing et des coups de pieds ! ».
Ce jour-là, j’ai commencé à comprendre à quel point j’étais resté beaucoup trop collé au Judo qui était devenu pour moi l’équivalent d’un doudou.
Depuis, bien-sûr, j’ai aussi compris qu’apprendre à donner des coups de poing et des coups de pied pour simplement en donner est une application très limitée des Arts martiaux ou de toute discipline de combat.
Non sens, enfermement et perte de goût
Pour différentes raisons, aveuglement, fainéantise, facilité ou petites lâchetés, on apprend très vite à croire que nous devons ou pouvons rester recroquevillés, enchevêtrés, enfermés et cadenassés, dans un seul « style », une seule attitude et tournure d’esprit. Et que cette seule expérience suffira à nous offrir le reste de l’univers et ce dont nous rêvons ou avons besoin dans notre existence. Comme si l’Art Martial ou la discipline de combat que nous pratiquons était notre lampe d’Aladin.
Je crois donc que je suis allé à ces 24 heures du Samouraï aussi pour me « soigner » un peu en quelque sorte de cette maladie de l’enfermement qui me captive et que je cultive passivement ou très activement. Consciemment ou inconsciemment, voire, souverainement. Et, cela, dans le plus grand calme ainsi qu’avec une certaine maitrise ou une maitrise quasi-totale.
Je « connaissais » ou avais croisé deux ou trois de ces experts. Mais je savais que c’était une très bonne occasion que de les rencontrer en aussi grand nombre, de façon aussi rapprochée, dans un temps limité et concentré. Car je le « sais » aussi, maintenant :
Tous ces experts sont souvent très occupés ainsi que passionnés par leur Art comme a pu le souligner Léo Tamaki à la fin de ces 24 heures du Samouraï. C’est donc une chance et une très grande et une très belle opportunité que d’avoir pu les approcher ou leur parler.
A partir de ces quelques raisonnements, payer 85 euros, cela se justifiait facilement. Passer 24 heures à pratiquer, aussi. Pour aller au concert de Beyoncé ce week-end, le prix des places démarrait à 79,60 euros pour monter jusqu’à 200 euros.
Il ne reste désormais plus de places pour ce concert de Beyoncé sans doute depuis plusieurs semaines ou plusieurs mois. A moins de pouvoir recourir au système D : acheter des billets sur place le jour même ou sur internet s’il est possible d’en trouver. Toutefois, car il faut bien savoir se changer les idées de temps en temps, si l’on tient à profiter de ce concert du Renaissance World Tour de Beyoncé, on peut aussi se rabattre sur les places au salon VIP Cocktail. Il en reste. Il semble qu’elles aient été mises en vente récemment. Le prix par personne hors taxe est de 699 euros et de 838.80 euros TTC, une « ambiance festive » et « un cocktail dinatoire » sont inclus. Il faut savoir vivre avec son temps.
J’aurais bien-sûr aimé pouvoir aller découvrir Beyoncé en concert au stade de France. Mais j’aurais eu- aussi- beaucoup de mal à lâcher l’équivalent de cent euros pour aller assister de loin à un concert en étant aussi éloigné d’un(e) artiste sur scène. Même si je suis certain que l’organisation technique du concert de Beyoncé est exemplaire voire unique. Et que son concert sera vraisemblablement un très grand spectacle.
La normalité, c’est être raisonnable, mais aussi presque tout faire pour oublier que l’on va mourir. Et, entre les deux, éviter certaines aventures car elles exposent à des risques et demandent certains efforts qui paraissent hors normes ou impossibles.
Sans doute ai-je été un tout petit déraisonnable de comparer les experts martiaux de ce Week-end à Beyoncé. Car, comparer des experts en Arts Martiaux ou d’une discipline de combat à une chanteuse américaine sensuelle et rythmée, mondialement connue et presque milliardaire, cela pourrait irriter quelques personnes. Puisque certaines et certains sont capables de consacrer une partie de leur activité à se « clasher » par écrit, sur youtube ou sur un réseau social, sans jamais se rencontrer et sans véritablement prendre le temps de discuter, seulement parce qu’un commentaire publié sous une vidéo leur a déplu.
Pourtant, si aux 24 heures du Samouraï, lors de ce week-end, il y avait eu Jackie Chan, Jet Li ou Donnie Yen (présent dans le dernier John Wick 4 sorti au cinéma il y a plusieurs semaines) il est probable que le prix du billet aurait augmenté mais aussi que l’événement aurait attiré bien plus de public y compris parmi des non-participants. Ainsi qu’un public en partie différent. Imaginons un peu ce que cela aurait donné si Bruce Lee était encore vivant et qu’il avait été présent aux 24 heures du Samouraï. Ou une des vedettes actuelles de MMA…
Avant de me rendre aux 24 heures du Samouraï, je me suis demandé qui j’allais rencontrer parmi les quelques personnes que j’ai déjà pu croiser aux cours de Jean-Pierre Vignau (qui compte parmi ses élèves des fidèles de vingt ans ou plus), ailleurs ou parmi mes collègues de travail que je sais portés sur les Arts martiaux ou les sports de combat.
Hé bien, je n’y ai rencontré personne parmi mes connaissances. J’apprendrai sans doute plus tard que telle personne n’avait pas entendu parler de l’événement.
Je crois que la donne aurait changé s’il s’était trouvé un Jackie Chan, un Jet Li ou un Donnie Yen. Parce qu’un Jackie Chan, un Jet Li, un Donnie Yen ou une « star » de la boxe ou du MMA, cela pousse très facilement dans les agendas personnels.
Mais l’événement des 24 heures du Samouraï aurait alors pris une toute autre saveur. Car, Beyoncé au stade de France, c’est déjà une industrie. Economiquement, c’est très rentable. Car rien que le nom et l’image de Beyoncé « draguent » très rapidement des milliers de personnes. Beyoncé n’a pas de problème d’anonymat. Tout le monde ou beaucoup de monde sait très vite de qui il s’agit et elle ne fait pas encore partie de celles et ceux que l’on oublie. L’anonymat et l’oubli étant les signes avant coureurs fréquents d’une mort au moins sociale.
On peut aimer se retrouver dans un très grand stade comme dans certains jeux gigantesques. Cela permet aussi très facilement d’oublier notre anonymat en vibrant avec des centaines et des milliers d’autres. Mais le vécu n’est pas le même. La foule et le spectacle l’emportent complètement sur l’individu présent à l’événement.
Les 24 heures du Samouraï ont sûrement demandé beaucoup de travail et beaucoup d’énergie à l’équipe organisatrice. De façon déraisonnable et passionnée. « Mais » cela a été mis au service d’une expérience à taille humaine. Même si au dojo d’Herblay, ce week-end, j’ai compris qu’il y avait eu deux fois plus de personnes que l’année dernière à Nantes lors de la première édition (Plus de 200 contre 100 personnes), ce qui a été vécu avait assez peu de points communs avec un spectacle ou une certaine forme de divertissement. Même si certaines démonstrations ont pu être spectaculaires et que ces heures passées ont pu être divertissantes ou très divertissantes.
Du reste, l’équipe organisatrice des 24 heures du Samouraï l’avait bien rappelé :
Le but n’est pas de rester absolument sur le pont durant 24 heures. Mais d’être dans l’ambiance de l’événement. Que ce soit en se reposant lorsque l’on en éprouve le besoin, en allant se faire masser, en partant se restaurer ou en discutant avec d’autres personnes venues vivre cet événement.
Et, à la fin des 24 heures du Samouraï, lorsque Léo Tamaki prendra la parole devant nous tous, en présence des experts présents, ce sera aussi pour nous dire qu’ils ont créé cet événement car, plus jeunes, ils auraient aimé qu’un tel événement existe pour eux.
En y repensant, ces 24 heures ont leur intérêt pour au moins deux autres raisons :
Une expérience, pour qu’elle soit marquante, doit avoir un effet suffisamment durable. Pour cela, il faut qu’elle soit suffisamment intense et qu’on l’ait vécue un certain temps.
On pourrait ajouter la nécessité de la répétition de l’expérience pour que celle-ci nous marque. Pour contrecarrer ou renouveler, un peu, notre expérience de notre vie quotidienne, il nous faut bien un événement qui nous sorte de ce que nous avons l’habitude de faire ou de vivre dans la durée, en intensité mais aussi de ce que nous faisons d’habitude.
En « restant » 24 heures dans ce bain martial, en vivant sur place de façon quasi-autonome, pour peu que l’on se soit débranché de son téléphone portable et d’internet durant ces 24 heures (ce que j’ai fait), je crois que l’on peut entrevoir un aperçu de la vie des uchideshi. Et les bénévoles de l’événement, en particulier celles et ceux qui ont pratiqué par ailleurs lors des 24 heures du Samouraï (en grande partie, j’ai l’impression, des élèves de Tanguy Le Vourch, Issei et Léo Tamaki) se sont ainsi mis dans les sillons des uchideshi.
Impressions
24 heures, cela peut sembler long ou très long. Pourtant, les 12 premières heures sont passées très vite.
Pour ma part, lors de ces 24 heures du Samouraï, il y a eu des interventions qui sont passées rapidement ou plus rapidement que d’autres. Et, deux ou trois autres, lors desquelles j’ai dû fournir plus d’efforts afin de maintenir mon attention et mon implication. Et où le temps m’est apparu plus long.
Je crois que certaines disciplines nous flattent plus facilement parce-que leurs gestes sont plus proches de nous et sont plus rapides à « obtenir » mais aussi à répéter. Mais aussi parce qu’elles nous semblent directement et visiblement plus « efficaces ».
Je crois que nous avons cette sensation parce-que ces disciplines reposent sur des actions musculaires et explosives assez simples et qu’elles nous donnent le sentiment d’être aussi puissants que des taureaux ou des machines.
Par contre, lorsque cela devient plus subtil, qu’il nous faut sentir certaines poussées ou certaines forces plus profondes, contradictoires ou plus intimes peut-être, cela nous demande des efforts auxquels nous ne sommes pas habitués ou qui nous dérangent parce-que cela nous demande plus de temps ou plus de maturité émotionnelle peut-être.
Ces disciplines présentées devant nous durant ces 24 heures reposent sur beaucoup de fondements communs. Mais leurs formes et leurs présentations sont différentes. Et c’est ce qui va nous attirer, nous barber, nous décourager ou nous repousser.
J’ai bien vu comment nous étions un certain nombre à être à la peine lors des interventions de Didier Beddar que ce soit en Kung Fu Wing Chun ou en Tai Chi.
J’étais alors l’équivalent d’un lourdaud saccadé, bruyant et poussif qui saccageait l’espace autour de lui alors que j’essayais seulement de marcher tandis que Didier Beddar et ses assistants étaient des ballerines pleines de grâce.
Lorsque j’avais débuté le judo il y a quelques années, j’avais eu la gratification assez immédiate de « réussir ». Le Kung Fu et le Tai Chi m’ont fait exactement l’effet inverse. Malgré leur intérêt évident, ils m’ont adressé un reflet de moi-même peu valorisant.
J’ai aussi eu l’impression que l’enseignement de Didier Beddar fait particulièrement appel au Yin et au Yang, au féminin et au masculin, alors que dans le Penchak Silat, le Hapkimudo, le karaté ou dans le Sistema, on peut n’être « que » bourrin.
Ou « masculin ». Ou « viril ». Ou « macho ».
Arrivera un moment où passer en force finira pas nous limiter ou nous rigidifier mais on peut arriver à « y faire des choses » tout de suite et durant un certain temps. C’est efficace. Ou c’est plus saccadé. Plus heurté. Plus frontal.
C’est un peu comme, dans la pratique de l’apnée ou de la plongée, utiliser la méthode vasalva pour descendre en profondeur. On est très volontaire. On s’impose. C’est efficace jusqu’à une certaine profondeur ainsi que pendant un certain nombre d’années. Mais c’est aussi plus traumatisant pour l’organisme même si on ne le ressent pas tout de suite.
Lors des 24 heures du Samouraï, j’ai croisé un pratiquant qui a été un moment mon partenaire qui m’a dit qu’étant donné son âge, la cinquantaine, le karaté Shotokan commençait à être dur pour lui. J’ai compris que la brutalité qu’il s’imposait au travers du karaté shotokan depuis des années commençait à avoir raison de lui.
Jusqu’à maintenant, je n’avais pas pensé aux Arts martiaux comme une possible expérience ou réflexion sur le « genre » masculin et féminin, sur la façon de l’habiter de façon « masculino-viriliste » et/ou de façon « fémino-douce ». Bien-sûr, voir la féminité comme le versant de la douceur et la masculinité comme celui de la brutalité est un cliché. Mais ce sont des repères pour dire que s’obliger à faire ou à passer en force parce-que l’on est un homme lorsque l’on pratique est une erreur très commune. Et, j’ai trouvé que parmi les différents experts, Didier Beddar était celui qui incarnait le mieux ou le plus cette synthèse du féminin et du masculin dans son expression martiale. Expression martiale que je n’ai aucune difficulté à percevoir comme très efficace dans des conditions de combat.
J’ai pris quelques notes à la volée après certaines des séances auxquelles j’ai participé lors de ces 24 heures du Samouraï. C’était une façon, pour moi, de conserver des impressions que l’on oublie souvent par la suite.
J’ai beaucoup aimé les interventions de Kang Jong Lee, expert en hapkimudo. Ses formulations et son humour, aussi. D’ailleurs, les experts, lors de ces 24 heures du Samouraï, ont souvent su faire concilier l’humour avec leurs démonstrations ce qui a pu contribuer à désacraliser un certain niveau d’exigence.
J’ai été amusé de voir Kang Jong Lee avec son pantalon tendance pattes d’éléphant. Il y a sans doute une raison à cela. Mais je n’ai pas pensé à le lui demander. Je me dis que c’est peut-être une façon de dissimuler les déplacements de ses pieds.
Chez Kang Jong Lee, j’ai aussi noté sa formulation :
« Le monde a changé ».
Pour dire que lors d’un affrontement, la situation évolue très vite et que ce qui aurait pu marcher quelques secondes ou quelques dixièmes de secondes auparavant est devenu obsolète. Et qu’il faut s’adapter, trouver autre chose pour parvenir à la résolution du conflit.
« Accepter » a aussi été employé par Kang Jong Lee. Soit, au lieu de résister ou de forcer, de se servir ou de suivre l’action de l’autre.
Kang Jong Lee enseigne à divers endroits, entre autres au gymnase le Patriarche, rue Monge mais aussi dans le 16èmearrondissement, toujours à Paris.
Jérome Kadian, pour le systema, juste après Kang Jong Lee, m’a beaucoup fait plaisir lorsqu’il nous a parlé de la respiration. Depuis ma formation au massage bien-être et ma pratique amateur de l’apnée en club, je suis devenu assez sensible à ce qui touche la respiration. Ceinture jaune de karaté shotokan avec Jean-Pierre Vignau, donc niveau débutant, lors de certains mouvements de mes katas que je répète, je me sens gêné. Car je n’ai pas encore trouvé la bonne façon, le bon moment, pour respirer, expirer ou arrêter de respirer.
La respiration est l’acte le plus important et le plus profond que nous faisons. Pourtant son apprentissage fait partie des apprentissages les plus souvent négligés. Peut-être est-ce parce qu’en plus d’être un acte, la respiration est une fonction qui nous est « donnée » dès la naissance et qu’elle est automatique. Donc acquise.
J’ai aussi noté avec Jérome Kadian :
Expirer quand on reçoit un coup. Accepter le contact. Travailler sur les appuis. Pivot du bassin. Plier les genoux.
Lionel Froidure nous a expliqué qu’aux Philippines, ils ne parlaient pas de techniques mais de principes. Il a insisté sur la nécessité de se « bâtir une mémoire » lorsque l’on pratique. De prendre le temps d’apprendre à se servir d’une arme avant d’en découvrir une autre. De garder le contact avec son adversaire lors du combat.
« La peur, ça se travaille ».
L’Arnis m’est apparu très technique ou exigeant de moi des efforts certains d’apprentissage.
De 19h30 à 20h45, Didier Beddar est intervenu en expert Wing Chun.
« En Wing Chun, on travaille sur les réflexes ». Didier Beddar a souligné qu’il s’agissait de travailler relâché. Il a présenté le Wing Chun comme un Art « tout en déviations ».
Lorsque l’on est à distance de pied, contrôle visuel du genou de son adversaire. Lorsque l’on est à distance de poignet, contrôle visuel du coude de son adversaire.
Didier Beddar nous a parlé du triangle pour créer le déséquilibre chez l’autre. Il nous a aussi parlé du centre. Garder ou protéger notre centre. L’importance du contact physique permanent pour connaître le mouvement de son adversaire. Mais aussi de notre colonne vertébrale. La garder droite.
Avec l’Arnis, le Kung Fu Wing Chun m’est apparu comme l’autre discipline la plus technique à assimiler. C’étaient pour moi deux disciplines qui ne se donnent pas facilement en prime abord. Plus tard est arrivée la séance Taï Chi, le lendemain matin, avec Didier Beddar également. Et, là, j’ai parfois eu l’impression d’être dans une expérience métaphysique lorsqu’il nous a parlé de l’importance de garder ou de protéger notre centre mais aussi de la nécessité d’entraîner son adversaire vers le triangle.
Même si j’ai retenu grâce à Didier Beddar que le gros orteil est en quelque sorte l’appendice de la motricité et le petit doigt de pied, celui de la stabilité.
De 0h15 à 1h30, Ronan Datausse est intervenu comme expert en Penchak Silat. C’était assez « drôle », de manière décalée, de nous entraîner à une heure du matin à réaliser des torsions cervicales en cas d’agression.
Ronan Datausse nous a dit que nous devions imaginer que nous étions des araignées tissant notre toile autour de notre proie, notre agresseur qui, au départ, nous avait pris « pour un agneau ».
Ronan Datausse nous a appris qu’au départ, le Penchak Silat était un art de guerre appris par les Indonésiens qui ont des petits gabarits. Le Penchak Silat, originellement, est un art de destruction.
Ronan Datausse nous a aussi fait travailler les frappes multidirectionnelles. Cela m’a beaucoup plu.
Léo Tamaki est intervenu de 1h45 à 3 heures. Je n’ai plus rien noté à partir de ce moment-là mais je vais écrire de tête.
Ce créneau horaire est un horaire tranchant. Peut-être le plus charnière. Nous entrons alors dans la deuxième partie de ces 24 heures. En plus, le Penchak Silat « de » Ronan Datausse a été dynamique et aussi « ludique ». L’ Aïkido, c’est une autre allure. C’est donc quitte. Ou double. Soit on s’ennuie, soit on se laisse entraîner.
Léo Tamaki a été permanent et pédagogique dès le coup de gong. Chaque séance débutait par un coup de gong. J’ai même eu l’impression que Léo Tamaki avait fait retentir le gong une à deux minutes plus tôt. Ensuite, Léo a pris le train en main.
Il y avait du rythme. Des séquences d’entraînement de 2 à 4 minutes. De la martialité et de l’humour. La nuit et le sommeil ont semblé sans prise sur lui. J’ai réentendu parler de
« dissociation ». Mais aussi :
« Recommencez, s’il vous plait ». Ce qui fait partie de ses signatures.
Je tenais comme je pouvais le long bâton qui m’avait été prêté face à G, plus avancé que moi en Aïkido lorsque Léo Tamaki est passé pour me montrer. Il s’agissait de laisser la gravité agir sur le bâton sans mettre de force. Je n’ai rien vu venir. Mon bâton a volé hors de mes mains trois ou quatre mètres plus loin comme si je ne l’avais pas tenu.
Un peu plus tard, il convenait de « couper » son partenaire avec le tranchant de la main au niveau de ses deux poignets qu’il tenait joints devant nous. Léo Tamaki est repassé. Il m’a montré sur mes poignets. Il n’a pas mis (beaucoup) de force. J’ai senti la coupe. Le temps de me relever, il était déjà à nouveau parti.
L’intervention était variée, attractive. Même si, pour moi, l’Aïkido a fait partie des disciplines les plus délicates techniquement de ces 24 heures du Samouraï avec le Wing Chun, l’Arnis….et le Tai Chi dispensé par Didier Beddar.
C’était bien pensé de clôturer ces 24 heures par le Tai Chi Quan et l’Aïkido.
Sortie de Dojo :
A l’issue des 24 heures, 80 personnes avaient participé aux 16 séances proposées, glanant les quatre bracelets. L’année dernière, à Nantes, seules 10 personnes y étaient parvenues. Les 80 personnes ont été applaudies.
Quant à moi, arrivé aux 24 heures du Samouraï avec un point de contracture à la cuisse et désobéissant aux recommandations de mon kiné (« Cela revient à jeter une pièce en l’air »), j’ai participé à 11 séances ratant d’une séance le troisième bracelet que j’aurais bien aimé obtenir. Je n’avais pas l’ambition de faire toutes les séances ( 16).
« Tous les voyants sont au vert » m’a dit mon kiné il y a quelques heures à propos de ma cuisse. Je n’ai pas- encore- osé lui dire que j’avais participé ce week-end aux 24 heures du Samouraï.
Au début des 24 heures du Samouraï, j’ai cru que je n’obtiendrais même pas le bracelet vert, ce qui correspond à quatre séances. Mais, finalement, cela tend à démontrer que les soins apportés par mon kiné sont bons et qu’une pratique raisonnable des Arts martiaux est possible sans se blesser. Je me suis par exemple abstenu d’essayer de faire les déplacements toniques, presque sautés, proposés par Bertrand Jaillet en karaté shotokan. J’ai aussi laissé passer la première séance de Ju-Jitsu brésilien avec David Pierre-Louis en pensant, à tort, aux randoris.
Et, je dormais lors de sa seconde séance. Car entre 4h40 et 7h50, après une douche et une seconde séance de shiatsu (séances de shiatsu qui ont aussi très certainement aidé à la prévention de blessures supplémentaires), j’ai dormi dans mon sac de couchage sur un coin du tatami comme deux ou trois autres, la petite salle de repos étant pleine lorsque je m’y suis présenté.
En sortant du dojo plus de 24 heures après y être entré, j’ai été moins décalé que ce à quoi je m’attendais.
Depuis, je me demande ce que cela a changé ou contribué à changer en moi.
Même si je suis loin d’avoir assimilé tout ce que j’ai vu, vécu, entendu ou essayé de pratiquer, commençons d’abord par dire que je suis content d’avoir vécu l’expérience.
J’avais envisagé d’écrire sur cet événement bien plus tard. A la lecture de cet article, rédigé finalement beaucoup plus rapidement que prévu, on pourra mesurer comme les 24 heures du Samouraï m’ont inspiré.
Concernant la « performance » des 24 heures, si je n’avais pas de doute quant au fait que trois heures de sommeil me conviendraient pour me remettre à un moment donné (comme d’autres, j’ai dormi de manière immédiate et compacte une fois couché sur le tatami malgré l’animation et les stimulations environnantes), je n’avais pas d’idée précise quant à ma capacité de résistance physique et mentale à la fatigue. C’était bien de pouvoir pratiquer malgré ou avec la fatigue tant mentale que physique. C’était évidemment la première fois que je pratiquais autant en si peu de temps.
Je pourrais faire un trait d’humour et écrire que, depuis les 24 heures du Samouraï, j’ai surtout l’impression de mieux comprendre le créole haïtien. Mais le fait est qu’après avoir pris part à autant de « séances » (sans combats) martiales sans me faire mal, je me dis que je pourrais quand même prendre le temps de faire le nécessaire pour obtenir et « donner » à Pascal, mon prof de judo, cette ceinture noire qu’il attend de moi depuis une vingtaine d’années. La ceinture noire n’étant qu’un début, comme il l’a rappelé, et non une fin en soi.
Il me reste d’autres photos ( sur lesquelles, notamment, figurent Kang Jong Lee et David Pierre-Louis ) que j’aurais bien voulu insérer dans cet article. Mais, pour l’instant, je n’ai pas réussi à le faire malgré diverses tentatives pour des raisons techniques qui me dépassent. Des histoires de codes et de téléchargement de fichier. J’ai opté pour rédiger cet article et le publier maintenant tel quel quitte à le compléter plus tard. Car, ce jeudi, c’est à dire dans quelques heures, je pars quelques jours à Camaret, en Bretagne, avec mon club d’apnée, afin de continuer à m’initier à la chasse sous-marine.
Il est probable que le concert de Beyoncé sera passé lorsque je parviendrai, enfin, à rajouter ces autres photos des 24 heures du Samouraï.
Avec Léo Tamaki, ce dimanche 21 Mai 2023, à la fin des 24 heures du Samouraï.
Avant les 24 heures du Samouraï au dojo d’Herblay ce 20 et 21 Mai 2023.
Demain, à midi, débutent les 24 heures du Samouraï. Il y a environ quarante huit heures, nous avons reçu un mail de l’équipe des 24 heures du Samouraï pour nous donner quelques informations et nous faire quelques recommandations. Cela donne peut-être un côté secret à l’événement, unique en France. Pourtant, il n’y a rien de secret pour quiconque s’attarde un peu sur ce qu’il y a de relatif aux Arts Martiaux. L’année dernière, les 24 heures du Samouraï s’étaient déroulées à Nantes. Dans le magazine Yashima de ce mois de mars 2023, Tanguy Le Vourch’ en raconte la genèse, au sein de l’école Kishinkai Aïkido d’après une idée de Léo Tamaki.
Pour cette deuxième édition des 24 heures du Samouraï qui se dérouleront dans le dojo d’Herblay où enseigne Issei Tamaki, dans le Val d’Oise, seront présents les experts suivants :
Didier Beddar pour le Wing Chun et le Tai Chi.
Kang Jong Lee pour le Hapkimudo.
Lionel Froidure pour le karaté et l’Eskrima.
David Pierre-Louis pour le Jiujitsu brésilien.
Jérôme Kadian pour le Systema.
Didier Lorho pour le Uechi-Ryû.
Ronan Datausse pour le Penchak Silat.
Léo Tamaki pour l’Aikido.
Bertrand Jaillet pour le Shotokan.
Un stand de pratiquants de Shiatsu sera également présent.
J’ai déjà croisé ou rencontré deux ou trois de ces experts ( Léo Tamaki (Dojo 5) , David Pierre-Louis, Didier Beddar ( Marcher jusqu’à un Maitre de Kung Fu Wing Chun traditionnel ). Je vais découvrir les autres. Le judo est la discipline que je « connais » le mieux. Mais je n’ai pas pratiqué depuis très longtemps. Lorsque j’ai appelé mon professeur, Pascal Fleury, cette semaine, celui-ci m’a à nouveau « reproché » de ne toujours pas avoir passé ma ceinture noire. Pascal m’a aussi rappelé ce temps où, il y a plusieurs années, Léo Tamaki venait enseigner l’Aïkido, rue Michel Lecomte, là où j’ai passé mes ceintures de judo dans les années 90.
Ces dernières semaines, je suis aussi devenu un pratiquant irrégulier de mon blog. Mais je ne pouvais pas laisser passer cet article la veille des 24 heures du Samouraï.
Demain matin, les inscriptions commenceront à 10h45. J’ai déjà mon billet d’entrée. La cérémonie d’ouverture aura lieu à 11h45. Il faudra être prêt et en kimono. Prévoir plusieurs kimonos pour des raisons d’hygiène. Je suis allé en acheter un second ce matin. Bien s’hydrater durant ces 24 heures. J’ai prévu ce qu’il faut et un stand de restauration est prévu sur place. Amener son nécessaire de toilette pour se rafraîchir. Mais aussi son sac de couchage et un oreiller. Une aire de repos est prévue dans le dojo.
Les 24 heures du Samouraï sont ouvertes à toute personne curieuse, de bonne volonté et en suffisamment bonne condition physique quelle que soit son niveau ou sa discipline de pratique.
Je me demande si je suis « prêt ». Des séances d’1h15 environ pendant 24 heures. Avec dix à quinze minutes de pause entre chaque intervention.
Je n’avais pas prévu de tout « faire » de toute façon. Mais, cette semaine, mon kiné m’a répondu que participer à cet événement revenait pour moi à « lancer une pièce en l’air ». J’ai une contracture à la cuisse. Le vélotaf, je peux, l’apnée ( hors compétition), je peux. Mais pas les Arts Martiaux ou les sports de combat qui exigent ou peuvent exiger une disponibilité soudaine et totale en termes d’engagement physique et mental.
J’ai encore le choix. Renoncer. Forcer. Regarder. Ou me faufiler.
Tout à l’heure, j’ai changé de sac. Après ma sieste, je me suis avisé que je pouvais mieux faire en matière de rangement.
J’en ai pris un autre pour disposer mes kimonos. S’économiser autant que possible. Disposer ses affaires de la façon la plus pratique. Prévoir ce qu’il faut mais sans pour autant trop s’encombrer. Un vrai voyage ! Mes appareils photos, deux sacs. Je vais sans doute emmener une petite glacière rigide afin d’y mettre bouteille d’eau, thermos et un peu de nourriture. Cela ne m’empêchera pas d’aller faire un tour au stand de restauration pour avaler ou manger quelque chose de chaud. Et pour discuter.
L’équipe des 24 heures du Samouraï nous a appris par mail qu’il était prévu des retards sur la ligne de train de banlieue qui dessert Herblay depuis Paris. Pour une fois, en qualité de banlieusard, je suis favorisé :
J’habite à Argenteuil, pas très loin. Et je viendrai avec ma voiture. J’ai repéré l’endroit il y a plus d’un mois.
Je m’attends à ce qu’il y ait beaucoup de monde. Plus d’une centaine de personnes puisque le dojo est grand ( 750 mètres carrés ?). De Paris, de banlieue et de province.
Dans cet univers généralement très masculin, je me demande, sans arrière pensée particulière, dans quelle proportion il y aura des femmes. Je dirais : 20 pour cent. Et, je me hasarde à croire que l’avenir des Arts martiaux serait peut-être davantage assuré s’il y avait plus de pratiquantes et d’expertes féminines dans ces domaines. Pour aller acheter mon second kimono, ce matin, j’ai proposé à ma fille de venir avec moi à Paris. Elle a spontanément accepté. J’en suis très content. Pour la première fois, j’ai rompu avec la tradition en achetant un kimono bleu. 85 euros.
Demain, le dojo d’Herblay deviendra un couvent martial où nous essaierons de nous extraire du cratère de nos enchevêtrements. Nous chercherons le merveilleux voire un monde qui a disparu et nous tenterons de lui réattribuer un espace dans nos corps et dans nos rêves.